COM (2007) 264 final  du 23/05/2007
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 21/10/2009

Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 31/05/2007
Examen : 07/03/2008 (délégation pour l'Union européenne)


Transports

Conditions d'exercice de la profession de transporteur par route
et de la pratique du cabotage routier

Textes E 3541, E 3542 et E 3543
COM (2007) 263 final, COM (2007) 264 final
et COM (2007) 265 final

(Procédure écrite du 7 mars 2008)

L'ensemble de ces trois projets de règlement vise à préciser les conditions d'exercice de la profession de transporteur par route, qu'il s'agisse de transport de marchandises ou de transports de personnes, et les conditions d'accès au marché des transports de proximité de marchandises effectués par un transporteur d'un autre État membre (cabotage).

I - LE CONTEXTE

1. Ces propositions de règlement s'inscrivent dans le cadre général du programme « Mieux légiférer » visant à simplifier et mettre à jour « l'acquis communautaire ». La réglementation est parfois ancienne et a fait apparaître des difficultés d'application.

Elles visent aussi à renforcer l'efficacité du marché intérieur du transport par route. Elle fait partie d'un ensemble de textes visant à simplifier et clarifier la réglementation actuelle de la profession de transporteur routier et du transport de marchandises ou de voyageurs. Le cadre juridique actuel est fixé pour l'essentiel par la directive 96/26/CE concernant l'accès à la profession de transporteur de marchandises et de transporteur de voyageurs par route. Trois textes sont ainsi soumis à l'examen de la délégation (E 3541, E 3542 et E 3543) formant un ensemble cohérent des conditions d'exercice du transport par route.

Cette adaptation est rendue nécessaire. Le transport de marchandises par route est particulièrement sollicité dans les économies européennes et les transports routiers jouent un rôle fondamental dans les chaînes d'approvisionnement et de distribution des entreprises européennes. Tant l'inquiétude sur l'évolution des prix de consommation dans certains pays que le renforcement de la compétitivité de l'Europe imposent une grande vigilance sur le respect de règles communes.

2. La procédure suivie

La procédure suivie pour préparer ces propositions est assez novatrice.

En premier lieu, cette proposition a été précédée d'une consultation des partenaires, c'est à dire, en l'espèce, des administrations nationales et des organisations professionnelles des transports.

Cette consultation a fait ressortir un certain nombre de demandes communes à tous. La première demande est celle d'une simplification des textes, d'une normalisation accrue ; la deuxième demande vise à ce que la réglementation soit bien appliquée par tous les opérateurs des États membres afin d'éviter des distorsions de concurrence par le simple effet de l'application variable des mesures réglementaires ; enfin, les opérateurs souhaitent bien distinguer transport de marchandises et transport de voyageurs. Il s'agit de deux transports différents dont les parties intéressées estiment qu'ils ne présentent pas suffisamment de points communs pour les intégrer dans un même texte juridique.

S'agissant de l'objet précis de la proposition de règlement consacré à l'exercice de la profession du transporteur routier ( E 3541) la consultation publique a surtout fait ressortir la crainte de concurrence faussée sous la forme de sociétés dites « boîtes aux lettres » qui ne sont pas de véritables entreprises de transport, utilisant des prête-noms pour obtenir une autorisation. Les organisations professionnelles ont également relevé que les États étaient plus ou moins rigoureux dans les contrôles tant dans l'accès à la profession (avec des taux de réussite aux examens attestant la capacité professionnelle variant d'un État à l'autre de 10 % à 90 %) que dans son exercice. Elles ont également milité pour des contrôles plus ciblés sur les entreprises à risques, de préférence au contrôle systématique général.

S'agissant de la proposition sur l'accès au marché (E 3543), les parties intéressées étaient unanimes à demander une définition et un cadre au cabotage qui permette à un transporteur routier d'un État membre d'effectuer des transports et des livraisons à partir d'un autre État membre.

En second lieu, l'originalité de la présente proposition vient du fait qu'elle recense les différents scénarios d'évolution possibles. Cinq « options politiques » sont ainsi envisagées :

- l'option « statu quo » qui laisse inchangée la législation routière actuelle ;

- l'option « simplification technique » qui fusionne les textes communautaires ;

- l'option « harmonisation » qui transforme la directive actuelle et les quatre règlements en trois nouveaux règlements pour harmoniser l'accès à la profession, préciser le cabotage et améliorer l'application des textes ;

- l'option « standards de qualité supérieurs » qui introduirait des exigences plus élevées en matière de capacité financière et une formation continue obligatoire ;

- l'option « libéralisation » qui ouvrirait davantage la profession et le cabotage à la concurrence.

Les trois présentes propositions de textes reflètent l'option dite « harmonisation ».

II - LE CONTENU DES TROIS PROPOSITIONS

A/ Proposition sur les conditions d'exercice de la profession de transporteur par route (texte E 3541)

La proposition de règlement a pour objet d'harmoniser les conditions que les entreprises doivent remplir pour être autorisées à exercer la profession de transporteur routier. Elle complète les dispositions existantes afin d'assurer une application effective et homogène de la réglementation au sein de la Communauté. Elle a deux objets principaux :

a) Le cadre professionnel

La proposition de règlement sur l'accès à la profession de transporteur routier s'applique à toutes les entreprises de transport de voyageurs avec des véhicules aptes à transporter plus de neuf personnes ou de marchandises avec des véhicules dépassant 3,5 tonnes, le seuil antérieur étant de 6 tonnes. Elle introduit la notion de « gestionnaire de transport », personne qui dirige de façon effective et en permanence les activités de transport et qui est rendue responsable des infractions commises dans le cadre de l'activité de la société de transport. La proposition de règlement renforce la coopération entre les États membres puisqu'une infraction commise dans un État membre devra être transmise à l'État membre d'établissement de la société de transport. La coopération administrative est renforcée. D'ici 2010, les registres nationaux seront interconnectés au niveau européen.

b) Les conditions d'accès à la profession de transporteur routier

Un nouveau critère est instauré : le demandeur doit désormais disposer d'un établissement stable et effectif de façon à limiter les entreprises dites « boîtes aux lettres ». Le demandeur doit également apporter la preuve de son honorabilité (la proposition détaille les infractions susceptibles d'entraîner une perte d'honorabilité, telles que les condamnations pénales pour violation des règles communautaires dans le domaine des transports par route), de sa capacité professionnelle (les exigences de capacité professionnelle sont renforcées puisque l'accès à la profession suppose une formation de 140 heures et le passage d'un examen dans des centres accrédités), et de sa capacité financière.

c) L'impact en France

Cette harmonisation est souhaitée par l'ensemble des parties. Cette proposition de règlement a des conséquences techniques et juridiques non négligeables pour la France.

Sur le plan administratif, la formation et les examens attestant la capacité professionnelle doivent être revus. L'interconnexion des réseaux nationaux nécessite également la mise en place d'une organisation spécifique pour réaliser le recueil, l'enregistrement et la transmission des données entre États membres.

Cette proposition de règlement entraînera dix modifications législatives ou réglementaires. La loi dite « LOTI » (loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs) sera en particulier modifiée afin d'introduire la sanction d'interdiction d'exercice de la profession.

B/ Règles communes pour les transports internationaux de voyageurs par autocars et autobus (texte E 3542)

La proposition de règlement vise à simplifier les règlements existants, à créer un modèle communautaire de licence de transporteur routier et à améliorer la communication entre États membres.

La proposition opère une fusion des règles relatives à l'accès à la profession de transporteur, fixé par la directive 96/26 CE et complétée par deux règlements (règlements (CEE) n° 684/92 et 12/98 concernant l'accès au marché des services de transport par autocars et autobus). Les modifications de fond sont mineures et portent sur la normalisation des licences et les procédures d'autorisation qui ne peut être refusée que dans des cas limités.

Visant avant tout la simplification, cette proposition de règlement n'entraîne pas de modifications du droit français.

C/ Accès au marché des transports de marchandises par route, exécutés au départ ou à destination d'un État membre ou traversant le territoire d'un État membre (texte E 3543)

La présente proposition réunit les deux règlements relatifs à l'accès au marché des transports routiers et une directive du Conseil exemptant d'autorisation certains transports. Sur le fond, elle apporte des modifications importantes liées au cabotage routier.

1. La principale innovation concerne la réglementation du cabotage routier de marchandises.

Aujourd'hui, le cabotage est défini comme l'activité consistant pour un transporteur de marchandises par route à effectuer « à titre temporaire » des transports nationaux de marchandises par route pour compte d'autrui dans un autre État membre sans y être établi. Ces dispositions donnent lieu à des interprétations différentes selon les États membres en raison de l'absence de définition du caractère temporaire de cette activité. Le cabotage, au départ, visait à réduire la circulation à vide (un camion après avoir livré sa marchandise et dans l'attente de recharger à destination du pays d'établissement se trouvait à vide). Il est cependant certain que le cabotage comportait des risques de dévoiement dans la mesure où un transporteur d'un État était tenté d'effectuer les transports intérieurs dans un autre État, compte tenu des disparités socio-économiques existant en Europe.

La France était très sensibilisée à cette question. Le cabotage fait l'objet notamment de dispositions spécifiques dans la loi d'orientation des transports intérieurs (« LOTI ») : un véhicule d'une entreprise de transport routier de marchandises non-résidente ne peut demeurer sur le territoire français plus de 30 jours consécutifs. Les peines en cas d'infraction peuvent atteindre 7 500 €. La France avait suggéré qu'une seule prestation de cabotage soit admise après un transport international.

Cette limitation rigoureuse n'a pas été suivie par nos partenaires, en particulier les nouveaux États membres qui ont évidemment tout intérêt à valoriser leurs avantages comparatifs et à mordre sur le marché français.

Les dispositions adoptées apportent un encadrement juridique plus précis de l'activité de cabotage routier de marchandises. Ainsi, un transporteur non-résident serait autorisé à effectuer avec un véhicule donné (sans changer de véhicule) du cabotage routier de marchandises si celui-ci est consécutif à un transport international. Le cabotage serait limité à trois opérations à effectuer dans un délai de sept jours après l'opération de transport international. Le projet énumère, de façon limitative, les domaines dans lesquels s'applique la réglementation de l'État membre d'accueil : il s'agit du temps de travail, du temps de conduite et des périodes de repos. Cette énumération ne comprend pas le régime social du détachement qui consiste en la mise à disposition d'un chauffeur d'un État membre auprès d'une société de transport d'un autre État membre. Le détachement ne s'applique pas au transport de cabotage.

2. La proposition prévoit également un certain nombre de mesures destinées à améliorer le fonctionnement et le contrôle du transport routier de marchandises :

- le régime de la licence communautaire s'applique aux véhicules de transport de marchandises de plus de 3,5 tonnes au lieu de 6 tonnes actuellement ;

- les infractions et les sanctions sont précisées ;

- des structures doivent être mises en place sous forme de « points de contact nationaux » afin de renforcer l'échange d'informations entre les États membres, permettant ainsi d'assurer le suivi des sanctions administratives appliquées aux entreprises.

3. Cette proposition va entraîner des modifications sensibles du droit français. Ainsi, dix neuf modifications législatives ou réglementaires sont induites par le présent texte communautaire. Outre les modifications des peines d'amendes instaurées en 1952 contre l'exercice illégal du cabotage, les principales modifications induites par cette proposition de règlement vont affecter la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs (dite « LOTI »).

La délégation a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ces textes.