COM(2010) 552 final  du 07/10/2010

Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 20/10/2010
Examen : 19/11/2010 (commission des affaires européennes)


Politique commerciale

Texte E 5732

Préférences commerciales autonomes d'urgence pour le Pakistan

COM (2010) 552 final

(Procédure écrite du 19 novembre 2010)

En juillet et août 2010, de violentes pluies de mousson ont provoqué des inondations dévastatrices au Pakistan, touchant 20  % du territoire et 20 millions de personnes, dont 12 millions nécessitent une aide humanitaire d'urgence. Le Conseil européen a décidé le 16 septembre 2010 de donner mandat aux ministres pour convenir d'un train de mesures, notamment commerciales, susceptibles de soutenir le Pakistan.

La Commission européenne a donc élaboré une proposition de règlement introduisant des préférences commerciales autonomes d'urgence pour le Pakistan. Il s'agit d'accorder temporairement au Pakistan un accès accru au marché de l'UE, par le biais d'exonération de droits de douane ou de contingents tarifaires pour certains produits dont l'exportation présente un intérêt pour le Pakistan.

Les exportations du Pakistan vers l'UE relevant à 60 % du textile ou de l'habillement, la liste des 75 produits concernés comprend des articles de textile ou d'habillement, mais également des produits industriels et agricoles afin d'accompagner les efforts du Pakistan visant à diversifier sa base d'exportation. Notamment, l'éthanol pakistanais sera admis à l'importation dans l'Union en exonération des droits de douane dans la limite d'un contingent tarifaire annuel de 100 000 tonnes. Les lignes de produits retenues représentent 900 millions d'euros en valeur d'importation, soit 27 % des importations de l'UE en provenance du Pakistan. La libéralisation de ces lignes entraînerait une augmentation des importations de l'UE en provenance du Pakistan estimée à 100 millions d'euros par an par rapport à 2009, tout en réduisant les recettes douanières du budget de l'UE d'un peu plus de 80 millions d'euros.

L'octroi des préférences est subordonné au respect, par le Pakistan, des règles pertinentes relatives à l'origine des produits ainsi qu'à son engagement à coopérer administrativement avec l'Union afin de prévenir tout risque de fraude.

Selon la Commission, cet avantage économique sérieux pour le Pakistan devrait avoir, dans l'Union, des effets limités sur l'emploi tout en occasionnant des gains grâce aux prix plus bas des articles importés. La Commission estime notamment que l'augmentation induite des importations ne représenterait que 0,5 % de la production de l'Union européenne sur les 75 lignes concernées.

Il importe de préciser qu'afin de pouvoir accorder ces préférences commerciales au Pakistan, l'Union européenne va devoir demander une exemption de ses obligations à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), notamment aux articles I (clause de la nation la plus favorisée) et XIII (application non discriminatoire des restrictions quantitatives) du GATT.

Compte tenu de l'urgence de la situation au Pakistan, le règlement devrait être applicable depuis le 1er janvier 2011 (ou, si elle est postérieure, à compter de la date à laquelle l'OMC aura accordé la dérogation demandée) jusqu'au 31 décembre 2013.

Sur le principe, la France est très favorable à cette démarche de soutien à l'égard du Pakistan. Toutefois, le Gouvernement français reste mobilisé sur ce texte, en raison de la sensibilité des lignes tarifaires concernées : d'une part, seraient exonérés de droits de douane des produits (fils de coton, cuirs et peaux) pour lesquels la production française n'est pas nulle ; d'autre part, le contingent tarifaire envisagé pour l'éthanol constitue une menace pour notre filière nationale encore fragile. D'autres États membres sont également inquiets, au premier rang desquels l'Italie, l'Espagne et surtout le Portugal. A l'inverse, des États membres plus libéraux (par exemple ceux du Nord de l'Europe) trouveraient avantage à l'entrée en franchise de droits de produits pakistanais. Un compromis pourrait être trouvé, notamment en réduisant à deux ans la période de validité de l'avantage consenti au Pakistan. Il sera néanmoins délicat à élaborer, dans la mesure où doit aussi être prise en compte la réticence que l'Inde et le Bangladesh ont déjà exprimée à l'OMC à l'égard de concessions commerciales trop généreuses au profit du Pakistan.

Étant donné que le Parlement européen ne s'est pas encore prononcé en plénière sur le texte et que la discussion pourrait y être plus difficile que ne l'anticipe la Commission, il n'est pas évident que ce calendrier puisse être respecté.

Dans ce contexte de calendrier serré et étant donné la vigilance dont fait preuve le Gouvernement, la commission a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte.