COM(2021) 664 final  du 27/10/2021


La Commission européenne présente un ensemble de mesures destinées à parachever la mise en oeuvre dans l'Union de l'accord de Bâle III sur le contrôle bancaire, conclu en 2010 entre les membres du G20, au sein du Comité de Bâle, qui a défini les normes applicables aux établissements de crédit en réponse à la crise financière de 20081(*) afin de rendre les banques européennes plus résilientes face à d'éventuels chocs économiques.

Depuis l'entrée en vigueur en 2015 de la directive 2013/36/UE concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (dite « CRD ») 2(*) et du règlement (UE) n° 575/2013 (dit « CRR »)3(*) qui définit les exigences en matière de fonds propres auxquelles sont soumis les établissements de crédit et les entreprises d'investissement exerçant des activités dans l'Union européenne, l'organisation et le fonctionnement des organes de direction de ces établissements et entreprises s'inscrivent dans un cadre prudentiel renforcé dans la suite de ces normes convenues au niveau international.

Un mécanisme de surveillance unique (MSU) a en outre été établi en novembre 2014, qui place les établissements significatifs sous la supervision directe de la Banque centrale européenne (BCE), notamment pour les questions de gouvernance, les établissements moins significatifs demeurant sous la supervision des superviseurs nationaux (l'ACPR en France).

Le règlement CRR a été modifié afin de mieux garantir la résilience de ces établissements, en particulier par le paquet de mesures de réduction des risques adopté en 2019, qui a également revu le cadre de résolution des défaillances bancaires défini par la directive dite « BRRD » 2014/59/UE de 2014 (résolution des banques et résolution de leur défaillances)4(*), le mécanisme de résolution unique (dit « MRU ») institué en 20145(*) et les différents ratios définis par le CRR6(*).

L'Union européenne a ainsi mis en oeuvre sur le marché intérieur la norme internationale relative à la capacité totale d'absorption des pertes (dite « TLAC »), adoptée par le Conseil de stabilité financière (CSF) en novembre 2015, et a renforcé l'application de l'exigence minimale de fonds propres et d'engagements éligibles (dite « MREL »), qui est fixée sur base consolidée au niveau du groupe de résolution. La norme TLAC et la MREL, qui est spécifique à chaque établissement, sont en effet des éléments complémentaires et essentiels pour gérer les crises bancaires et réduire leurs répercussions sur la stabilité financière et les finances publiques.

Le 27 octobre 2021, la Commission européenne a présenté la dernière étape de la réforme de la réglementation bancaire européenne afin que les banques exerçant des activités dans l'Union européenne soient plus résilientes pour parer à d'éventuels chocs économiques futurs, tout en contribuant à la reprise de l'Europe après la pandémie de COVID-19 et à la transition vers la neutralité climatique.

Ces trois instruments législatifs, dont la publication a été retardée par la pandémie7(*), modifient la directive CRD 2013/36/UE, en ce qui concerne les pouvoirs de surveillance, les sanctions, les succursales de pays tiers et les risques environnementaux, sociaux et de gouvernance, et le règlement CRR (UE) n 575/2013, en ce qui concerne les exigences prudentielles (risque de crédit, risque d'ajustement de l'évaluation de crédit, risque opérationnel et risque de marché et plancher de fonds propres). Un texte spécifique vise par ailleurs à adapter les exigences de fonds propres dans le domaine de la résolution applicables aux structures en guirlande (« daisy chain ») et la directive BRRD 2014/59/UE en ce qui concerne le traitement prudentiel de ces groupes.

Afin de contribuer à la stabilité financière et au financement stable de l'économie dans le contexte de la reprise, ces mesures s'articulent autour de quatre objectifs spécifiques :

- renforcer les exigences en matière de fonds propres fondées sur le risque, sans augmenter significativement leur niveau global ;

- mettre davantage l'accent sur les risques ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance)8(*) dans le cadre prudentiel, car la transition vers les objectifs de durabilité de l'Europe exige des efforts de financement privé dans lesquels l'intermédiation bancaire doit jouer un rôle primordial ;

- harmoniser davantage, dans le contexte de l'union bancaire, les pouvoirs et outils de surveillance qui restent trop fragmentés au sein de l'Union, ce qui empêche le MSU de remplir efficacement ses fonctions de surveillance ;

- réduire les coûts administratifs des banques liés aux publications d'informations et améliorer l'accès des participants au marché et des autorités de surveillance à leurs données prudentielles9(*).

Le texte COM(2021) 664 procède à des mises en conformité avec les normes révisées de Bâle III et tire les enseignements des inadéquations constatées en matière d'évaluation des risques supportés par les établissements de crédit.

Ø Mise en oeuvre de Bâle III pour renforcer la résilience aux chocs économiques

*Modifications de la définition des fonds propres et établissement d'un plancher de fonds propres pour :

- clarifier la définition des entités à inclure ans le périmètre de consolidation prudentielle ;

- y ajouter les détentions d'engagements pertinents qui ne sont pas des instruments de capital dans la définition de la détention indirecte et de la détention synthétique ;

- prendre en compte des modifications règlementaires introduites en 2019 dans la définition de seuils de fonds propres de base déductibles ;

- prendre en considération des filiales situées dans des pays tiers ;

- réduire la variabilité excessive des exigences calculée au moyen de modèles internes et imposer des approches standard (actifs pondérés en fonction du risque) pour calculer le ratio de solvabilité du groupe

*Révision de l'approche standard du risque de crédit (SA-CR) pour le calcul des exigences de fonds propres relatives à l'exposition au risque de crédit afin de faire en sorte que les modèles internes utilisés par les banques pour calculer leurs exigences de fonds propres ne sous-estiment pas les risques et qu'il soit plus facile de comparer les ratios de fonds propres fondés sur les risques entre banques, rétablissant ainsi la confiance placée dans ces ratios et, plus généralement, dans la solidité du secteur bancaire.

Plus précisément, ces modifications portent principalement sur :

- le calcul de la valeur exposée au risque des éléments hors bilan et des engagements sur ces éléments ;

- le traitement des expositions sur les établissements (introduction de l'approche standard du risque de crédit dite SCRA ; abaissement de la pondération applicable à ce risque, notamment) ;

- le traitement des expositions sur les entreprises (abaissement de la pondération du risque applicable et application de la pondération SA-CR) ;

- le traitement des expositions de financement spécialisé, qui sont particulièrement développées en raison de la faiblesse du financement par les marchés de capitaux, dans le cadre de l'approche SA-CR dont la granularité a été renforcée, notamment pour permettre un traitement préférentiel du financement et de l'investissement bancaire dans des projets d'infrastructures de grande qualité ; 

- la pondération du risque pour les expositions renouvelables sur la clientèle de détail (traitement préférentiel dans le cadre de l'approche SA-CR) ;

- le calcul des expositions présentant une asymétrie de devises (exigence de multiplicateur de pondération pour les expositions sur la clientèle de détail et les biens immobiliers résidentiels non couvertes) ;

- l'affinement du calcul des expositions garanties par un bien immobilier (par exemple introduction d'un traitement spécifique pour les prêts hypothécaires dont le remboursement dépend fortement des flux de liquidités générés par les biens donnés en garantie ou encore prise en compte du risque attaché aux prêts finançant l'acquisition et le développement de terrains ainsi que la construction de biens immobiliers résidentiels ou commerciaux) ;

- la pondération du risque attaché aux expositions sur instruments de dette subordonnés ou sous forme d'actions.

* Révision de l'évaluation de certains risques de crédit pour :

- réduire le périmètre des approches fondées sur les notations internes ;

- introduire une nouvelle catégorie d'exposition pour certaines entités du secteur public ;

- réviser les décotes applicables aux sûretés financières ;

- modifier les techniques d'atténuation du risque de crédit.

*Révision du cadre du risque de marché, en particulier des exigences de fonds propres relatives au risque de marché pour les positions du portefeuille de négociation, du cadre du risque d'ajustement de l'évaluation de crédit (CVA), du cadre de seuils de décote minimale pour les opérations de financement sur titres (OFT) et nouvelle approche standard du risque opérationnel

*Révision des modalités de calcul du ratio de levier pour la valeur exposée au risque des dérivés, des éléments hors bilan et des achats et ventes normalisés en attente de règlement.

Ø Prise en compte de la contribution des banques à la transition écologique10(*)

Le texte introduit de nouvelles définitions harmonisées des différents risques ESG, qui sont alignées sur les propositions de l'ABE. La réglementation prudentielle ayant un rôle crucial à jouer à cet égard, il impose aux banques de détecter, rendre publics et gérer de manière systématique les risques ESG dans le cadre de leur gestion des risques.

En outre, tant les autorités de surveillance que les banques devront procéder régulièrement à des tests de résistance climatique et les autorités de surveillance devront évaluer les risques ESG dans le cadre des contrôles prudentiels périodiques.

Enfin, toutes les banques devront en outre indiquer dans quelle mesure elles sont exposées aux risques ESG.

Dans la mesure où la proposition de règlement tire les conséquences des insuffisances constatées dans la législation européenne, tend à améliorer la cohérence et l'applicabilité de la législation européenne et à y inclure les préoccupations ESG et les risques attachés aux succursales de banques établies dans des pays tiers, elle est de nature à réduire les risques dans le secteur financier sur l'ensemble du marché intérieur.

Le groupe de travail sur la subsidiarité a donc décidé de ne pas intervenir sur ce texte au titre de l'article 88-6 de la Constitution.


* 1 Les normes mondiales sont élaborées par le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire (CBCB) composé de représentants des banques centrales et des contrôleurs bancaires de 28 juridictions (dont la France) ainsi que la BCE, la Commission européenne et l'Autorité bancaire européenne (ABE) participant aux réunions en tant qu'observateurs.

* 2 Directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et entreprises d'investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE.

* 3 Règlement (UE) n°575/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement et modifiant le règlement (UE) n° 648/2012.

* 4 Directive (UE) 2019/879 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 modifiant la directive 2014//59/UE en ce qui concerne la capacité d'absorption des pertes et de recapitalisation des établissements de crédit et des entreprises d'investissement.

* 5 Règlement (UE) n° 2019/877 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 modifiant le règlement (UE) n° 806/2014 en ce qui concerne la capacité d'absorption des pertes et de recapitalisation des établissements de crédit et des entreprises d'investissement.

* 6 Règlement UE 2019/876 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 modifiant le règlement (UE) n°  575/2013 en ce qui concerne le ratio de levier, le ratio de financement stable net, les exigences en matière de fonds propres et d'engagements éligibles, le risque de crédit de contrepartie, le risque de marché, les grands risques et le exigences de déclaration et de publication.

* 7 Les travaux préparatoires ont été reportés à la suite de la décision du CBCB du 26 mars 2020 de repousser d'un an les délais précédemment convenus pour la mise en oeuvre des derniers éléments de Bâle III.

* 8 En lien avec les travaux en cours sur la transition vers une économie durable (pacte vert pour l'Europe - Green deal - et ajustement à l'objectif 55 - fit for 55.

* 9 Cela devrait également permettre de réduire les possibilités actuelles d'arbitrages réglementaires et prudentiels.

* 10 Dans la suite de la Stratégie pour le financement de la transition vers une économie durable présentée par la Commission le 6 juillet 2021 (COM(2021)390 final).


Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 04/01/2022


MARCHÉ INTÉRIEUR, ÉCONOMIE, FINANCES, FISCALITÉ

Renforcement du cadre prudentiel dans la suite de l'accord de Bâle III :
les exigences pour risque de crédit, risque d'ajustement de l'évaluation de crédit, risque opérationnel et risque de marché et le plancher de fonds propres

COM(2021) 664 final - Texte E16333

(Procédure écrite du 3 mars 2022)

Ce deuxième texte du renforcement du cadre prudentiel Bâle III procède à des mises en conformité avec les normes révisées de Bâle III et tire les enseignements des inadéquations constatées en matière d'évaluation des risques supportés par les établissements de crédit.

· Mise en oeuvre de Bâle III pour renforcer la résilience aux chocs économiques

- Modifications de la définition des fonds propres et établissement d'un plancher de fonds propres pour :

- clarifier la définition des entités à inclure dans le périmètre de consolidation prudentielle ;

- y ajouter les détentions d'engagements pertinents qui ne sont pas des instruments de capital dans la définition de la détention indirecte et de la détention synthétique ;

- prendre en compte des modifications règlementaires introduites en 2019 dans la définition de seuils de fonds propres de base déductibles ;

- prendre en considération des filiales situées dans des pays tiers ;

- réduire la variabilité excessive des exigences calculée au moyen de modèles internes et imposer des approches standard (actifs pondérés en fonction du risque) pour calculer le ratio de solvabilité du groupe.

- Révision de l'approche standard du risque de crédit (SA-CR) pour le calcul des exigences de fonds propres relatives à l'exposition au risque de crédit afin de faire en sorte que les modèles internes utilisés par les banques pour calculer leurs exigences de fonds propres ne sous-estiment pas les risques et qu'il soit plus facile de comparer les ratios de fonds propres fondés sur les risques entre banques, rétablissant ainsi la confiance placée dans ces ratios et, plus généralement, dans la solidité du secteur bancaire.

Plus précisément ces modifications portent principalement sur :

- le calcul de la valeur exposée au risque des éléments hors bilan et des engagements sur ces éléments ;

- le traitement des expositions sur les établissements (introduction de l'approche standard du risque de crédit dite SCRA ; abaissement de la pondération applicable à ce risque, notamment) ;

- le traitement des expositions sur les entreprises (abaissement de la pondération du risque applicable et application de la pondération SA-CR) ;

- le traitement des expositions de financement spécialisé, qui sont particulièrement développées en raison de la faiblesse du financement par les marchés de capitaux, dans le cadre de l'approche SA-CR dont la granularité a été renforcée, notamment pour permettre un traitement préférentiel du financement et de l'investissement bancaire dans des projets d'infrastructures de grande qualité ;

- la pondération du risque pour les expositions renouvelables sur la clientèle de détail (traitement préférentiel dans le cadre de l'approche SA-CR) ;

- le calcul des expositions présentant une asymétrie de devises (exigence de multiplicateur de pondération pour les expositions sur la clientèle de détail et les biens immobiliers résidentiels non couvertes) ;

- l'affinement du calcul des expositions garanties par un bien immobilier (par exemple introduction d'un traitement spécifique pour les prêts hypothécaires dont le remboursement dépend fortement des flux de liquidités générés par les biens donnés en garantie ou encore prise en compte du risque attaché aux prêts finançant l'acquisition et le développement de terrains ainsi que la construction de biens immobiliers résidentiels ou commerciaux) ;

- la pondération du risque attaché aux expositions sur instruments de dette subordonné ou sous forme d'actions.

- Révision de l'évaluation de certains risques de crédit pour :

- réduire le périmètre des approches fondées sur les notations internes ;

- introduire une nouvelle catégorie d'exposition pour certaines entités du secteur public ;

- réviser les décotes applicables aux sûretés financières ;

- modifier les techniques d'atténuation du risque de crédit.

- Révision du cadre du risque de marché, en particulier des exigences de fonds propres relatives au risque de marché pour les positions du portefeuille de négociation, du cadre du risque d'ajustement de l'évaluation de crédit (CVA), du cadre de seuils de décote minimale pour les opérations de financement sur titres (OFT) et nouvelle approche standard du risque opérationnel.

- Révision des modalités de calcul du ratio de levier pour la valeur exposée au risque des dérivés, des éléments hors bilan et des achats et ventes normalisés en attente de règlement.

· Prise en compte de la contribution des banques à la transition écologique1(*)

Le texte introduit de nouvelles définitions harmonisées des différents risques ESG, qui sont alignées sur les propositions de l'ABE. La réglementation prudentielle ayant un rôle crucial à jouer à cet égard, il impose aux banques de détecter, rendre publics et gérer de manière systématique les risques ESG dans le cadre de leur gestion des risques.

En outre, tant les autorités de surveillance que les banques devront procéder régulièrement à des tests de résistance climatique et les autorités de surveillance devront évaluer les risques ESG dans le cadre des contrôles prudentiels périodiques.

Enfin, toutes les banques devront en outre indiquer dans quelle mesure elles sont exposées aux risques ESG.

*

Dans la mesure où la proposition de règlement tire les conséquences des insuffisances constatées dans la législation européenne, tend à améliorer la cohérence et l'applicabilité de la législation européenne, et à y inclure les préoccupations ESG et les risques attachés aux succursales de banques établies dans des pays tiers, elle est de nature à réduire les risques dans le secteur financier sur l'ensemble du marché intérieur.

Compte tenu de ces éléments, la commission a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte.


* 1 Dans la suite de la Stratégie pour le financement de la transition vers une économie durable présentée par la Commission le 6 juillet 2021. COM/2021/390 final