Mardi 24 octobre 2006

- Présidence de M. Nicolas About, président -

PJLF pour 2007 - Mission : « Outre-mer » - Audition de M. François Baroin, ministre de l'outre-mer

La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, sur le projet de loi de finances pour 2007 (mission : « Outre-mer »).

M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, a indiqué que les crédits 2007 de la mission « Outre-mer » s'élèvent à 2,03 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 1,96 milliard d'euros en crédits de paiement. Dans un contexte financier toujours marqué par une forte contrainte, ils traduisent l'attachement du Gouvernement aux départements et collectivités d'outre-mer. A cet égard, il convient de tenir aussi compte de ce que les crédits de la mission ne représentent que 13 % de l'effort global de l'Etat en faveur de l'outre-mer, qui s'élève à près de 15 milliards d'euros.

La première priorité du projet de budget est le soutien au développement des collectivités d'outre-mer. Cet objectif implique la reconnaissance des identités particulières et le développement des responsabilités locales, comme le prévoient les deux projets de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles pour l'outre-mer actuellement soumis au Parlement. Sur le plan financier, il est concrétisé par le soutien de l'Etat aux collectivités dans le cadre des actions « Aménagement du territoire » et « Continuité territoriale » du programme « Conditions de vie outre-mer ». En ce qui concerne la continuité territoriale, il est utile de noter que les crédits du passeport-mobilité augmentent en 2007 de plus de 31 %.

Pour autant, l'emploi représente toujours l'effort principal du ministère de l'outre-mer. Cette politique est dotée de 1,16 milliard d'euros, ce qui représente près de 60 % des crédits de la mission.

Dans l'attente des résultats de l'évaluation prévue à l'article 5 de la loi de programme du 21 juillet 2003, les exonérations de charges sociales spécifiques à l'outre-mer restent conformes au dispositif institué par cette loi. En ce qui concerne les dispositifs spécifiques financés par la mission « outre-mer » dans le cadre de la lutte contre l'exclusion du marché du travail des publics prioritaires, le projet de budget prévoit le financement de 57.400 contrats aidés. Par ailleurs, les moyens de la formation professionnelle vont être renforcés. C'est ainsi que 3.000 jeunes seront formés en 2007 par le service militaire adapté (SMA), avec un objectif d'intégration dans la vie professionnelle fixé à 72 %.

Pour conclure sa présentation des crédits de l'emploi, M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, a rappelé que la relance de la création d'emplois dans le secteur productif outre-mer est un engagement du président de la République. L'an dernier, le nombre d'emplois salariés dans le secteur marchand a augmenté de 2,2 %, ce rythme étant 3,5 fois supérieur à celui de la métropole. Depuis 2002, 30.000 emplois salariés ont été ainsi créés dans les quatre départements d'outre-mer.

La troisième priorité du ministère de l'outre-mer est l'affirmation de l'Etat de droit et la lutte contre l'immigration clandestine. Des progrès ont été enregistrés dans ce domaine. C'est ainsi que, depuis le 1er janvier 2006, la délinquance de voie publique a diminué de 12,7 % et que 16.707 éloignements d'étrangers en situation irrégulière ont eu lieu à partir des départements et collectivités d'outre-mer. Ce chiffre, obtenu en huit mois, dépasse le total de l'année 2005 et représente 53,39 % du nombre des éloignements effectués en 2006 sur le plan national.

M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, a ensuite rappelé que le Premier ministre vient de décider d'augmenter les crédits du logement social de 120 millions d'euros consommables sur trois ans, dont 60 millions d'euros seront disponibles dès 2007. La dotation de 2007 augmentera ainsi de plus de 38 % en moyens de paiement, ce qui permettra d'accélérer la relance du logement social dans les départements d'outre-mer.

Par ailleurs, le Premier ministre a souhaité que la dette de la ligne budgétaire unique (LBU) soit apurée avant le 31 mars 2007. A cette fin, un montant de 42 millions d'euros est mobilisé sur l'exercice 2006, dont 30 millions d'euros financés par la Caisse des dépôts et consignations et 12 millions d'euros ouverts dans le collectif budgétaire. Les modalités de mise en oeuvre de cette décision en 2007 n'ont pas encore été fixées.

Il a aussi indiqué que deux audits de modernisation ont été réalisés en 2006 sur la politique du logement social d'outre-mer. Ils ont préconisé le recentrage du rôle de l'Etat sur ses fonctions de pilotage et d'animation de la politique de l'habitat.

Par ailleurs, deux autres études ont été menées pour évaluer la mise en oeuvre des dispositions de la loi de programme relatives aux exonérations de charges et à la défiscalisation des investissements. Leurs conclusions sont soumises à la commission d'évaluation de la loi de programme installée le 5 juillet dernier.

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis, a demandé ce qui explique la diminution des crédits de remboursement des exonérations de cotisations sociales, alors que les exonérations ont connu jusqu'à présent une croissance régulière. Elle a souhaité connaître les suites que l'on envisage de donner aux deux évaluations du dispositif d'exonération réalisées en 2006, mentionnant en particulier la proposition de lisser les effets de seuil, la conditionnalité des remboursements et l'amélioration du recouvrement des cotisations. Enfin, rappelant que le Conseil économique et social a proposé de clarifier la rédaction de l'article du code général des impôts relatif à la défiscalisation des activités de recherche et développement des entreprises, elle a voulu savoir si une initiative en ce sens pourrait être prise dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances.

M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, a répondu que les 823 millions d'euros mentionnés dans le bleu budgétaire au titre de la compensation des exonérations de charges, contre 830 millions dans la loi de finances pour 2006, ont un caractère prévisionnel. Le responsable du programme « Conditions de vie outre-mer » utilisera au mieux les crédits dont il dispose. A titre d'illustration, le passeport mobilité, qui connaît un grand succès en 2006, a bénéficié en cours d'exercice d'un abondement permettant de donner satisfaction aux demandes des familles. En ce qui concerne le recouvrement des cotisations sociales, le rapport du Conseil économique et social et celui de la mission d'audit de modernisation, complétés par deux études commandées par le ministère de l'outre-mer, ont été remis à la Commission nationale d'évaluation, dont les conclusions aideront le Gouvernement à élaborer sa position.

Abordant ensuite la politique du logement, Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis, a souhaité savoir de quelle façon sera mis en oeuvre le financement de 120 millions d'euros, annoncé par le Premier ministre lors de son récent voyage aux Antilles, pour apurer les dettes de l'Etat auprès des opérateurs. Evoquant l'impact négatif des mécanismes de défiscalisation sur la production de logement social, elle a demandé si un recentrage de la défiscalisation est envisagé. Se référant aux analyses critiques présentées sur le pilotage de la politique du logement, sur l'implication insuffisante des collectivités territoriales et sur le cloisonnement de l'intervention financière de l'Etat, elle s'est enquise des projets de réforme éventuellement à l'étude. Elle a enfin demandé à quelle hauteur sera financée l'extension aux DOM du volet « logement » du plan de cohésion sociale et si la programmation pluriannuelle de la LBU est réalisable.

M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, a rappelé la décision du Premier ministre de résorber les retards de paiement accumulés par l'Etat depuis plus de dix ans dans le secteur de la construction. Un montant de 113 millions d'euros sera engagé à cet effet d'ici à la fin du premier trimestre 2007, selon une procédure déconcentrée. Il a rappelé que les difficultés du secteur du logement social résultent aussi de la rareté du foncier disponible. Le deuxième engagement pris aux Antilles par le Premier ministre porte sur l'allocation d'un montant de 120 millions d'euros en trois ans, dont 60 millions dès 2007, en vue de la mise en oeuvre dans les départements d'outre-mer (Dom) du volet « logement » du plan de cohésion sociale. Ces crédits seront gérés par le ministère du logement. Un troisième engagement du Premier ministre porte sur la mise en place d'une Conférence nationale du logement pour l'outre-mer. Sa mission sera de faire le point avec l'ensemble des acteurs sur les moyens d'éviter de nouveaux cumuls de retards de paiement. En ce qui concerne la gestion de la LBU, le ministère de l'outre-mer a admis que le ministère du logement puisse jouer un rôle de chef de file si l'efficacité de l'action de l'Etat le justifie. Ce qui importe est que l'accumulation des retards de paiement aux opérateurs ne se renouvelle pas.

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis, a souligné que les professionnels du logement professent des opinions contradictoires sur l'étendue des réserves foncières dont l'Etat et les collectivités territoriales ont la maîtrise.

M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, a indiqué que si les ministères de la défense et de l'éducation disposent de réserves importantes, la spéculation et l'augmentation des prix portent les évaluations des Domaines à un niveau important. L'Etat doit en tenir en compte pour fixer le prix de vente des terrains, ce qui alourdit les charges des bailleurs sociaux. Cette situation pourrait justifier la réorientation d'une partie de la défiscalisation vers le logement social. Le même problème se pose pour les collectivités territoriales.

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis, rappelant qu'un audit de l'indemnité temporaire de retraite est en cours de réalisation, a demandé si l'existence d'un lien fort entre l'agent qui prend sa retraite et l'outre-mer peut apparaître comme un critère possible d'allocation de l'indemnité et être retenu comme élément déterminant d'acceptation d'une réforme éventuelle.

M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, a estimé que l'outre-mer connaît les mêmes problèmes que la métropole, mais multipliés par deux ou trois. Ceci concerne le nombre des chômeurs, celui des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion et celui des allocataires de prestations sociales, ainsi que l'évolution démographique. L'Etat doit anticiper sur les besoins que cette situation suscite dans un grand nombre de domaines. Il en résulte des contraintes supplémentaires pour les agents de l'Etat, parfois très lourdes comme le montre le tribut payé par les gendarmes, notamment en Guyane, depuis le début de l'année. Il est légitime que des bonifications accompagnent cette réalité. Il est facile de critiquer l'indemnité temporaire de retraite mais, sur le plan opérationnel, si ce dispositif devait être amélioré, il faudrait que ce soit dans des conditions acceptables par les 30.000 fonctionnaires de l'Etat vivant dans les six collectivités d'outre-mer, par les collectivités directement intéressées et par les finances publiques, ceci tant au regard de la finalité du dispositif que de son coût, qui s'élève à 250 millions d'euros. Les mises en cause trop hâtives ne permettent pas de définir les voies acceptables d'une éventuelle réforme. A quelques mois d'une échéance politique essentielle, il est envisageable d'aborder ce dossier dans le cadre d'une réflexion liée à l'élaboration d'un projet de législature.

En réponse à une dernière question de Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis, sur la création non encore réalisée de l'observatoire des prix prévu par la loi d'orientation pour l'outre-mer du 13 décembre 2000, il s'est déclaré très favorable à la mise en place de cet outil dans les Dom, afin que la réalité du coût de la vie soit appréhendée de façon objective. Des problèmes de périmètre, de moyens et de conditions de fonctionnement se posent cependant.

M. Nicolas About, président, a demandé si les crédits inscrits au budget de 2006 sont suffisants pour assurer la compensation intégrale des exonérations de charges sociales. La baisse des dotations signifie-t-elle qu'une baisse des exonérations est attendue en 2007 ou bien résulte-t-elle seulement de la souplesse de gestion autorisée par la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) ?

M. Alain Vasselle a précisé que les exonérations spécifiques de charges sociales ne sont pas toujours compensées de manière satisfaisante par le budget de l'Etat.

M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, a réaffirmé le caractère indispensable des exonérations de charges sociales pour développer l'emploi dans le secteur marchand outre-mer. Le montant inscrit au projet de budget est globalement valable, a-t-il précisé, mais les chiffres exacts ne seront disponibles qu'en fin d'exercice. Le mécanisme consiste en une sorte de droit de tirage, gagé par les crédits du ministère de l'outre-mer, des entreprises sur l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss).

M. Jacques Gillot a demandé si une modification du décret, fixant le montant de la dotation versée par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) au titre de la prestation compensatoire de handicap, est prévue afin d'ajuster la base de calcul retenue à la dépense effectivement constatée en 2004 en Guadeloupe. Il a souhaité savoir si le niveau de compensation de la dépense au titre de l'allocation personnalisée d'autonomie (Apa) fixé pour 2005 et 2006, correspondant à 31 % de la dépense réelle, sera maintenu pour les exercices à venir. Notant la croissance exponentielle de la dépense afférente au revenu minimum d'insertion, il s'est enquis des conditions de mise en oeuvre de la dotation exceptionnelle de 500 millions d'euros, versée en trois ans à partir de 2006. Il a enfin voulu savoir quelle part des crédits ouverts pour le logement en 2007 sera consacrée au rattrapage de la dette et quelle part servira à financer des opérations nouvelles.

M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, a précisé que la prestation compensatoire de handicap est un dispositif nouveau visant un public plus large que l'allocation compensatoire pour tierce personne. Pour tenir compte de cette différence, l'Etat a prévu de verser 500 millions d'euros aux départements cette année. En outre, 20 millions d'euros seront répartis entre les départements pour financer la mise en place des maisons départementales des personnes handicapées. En ce qui concerne l'Apa, le niveau de compensation sera maintenu et pour le RMI, la Guadeloupe percevra au titre de 2005 une dotation exceptionnelle permettant de couvrir entre 60 % et 70 % des dépenses. Enfin, les crédits destinés au logement hors dette s'élèvent à 236 millions d'euros en 2007, ce qui représente une augmentation de 20 % des crédits.

M. Alain Gournac s'est associé à l'hommage rendu par le ministre aux gendarmes de la Guyane, puis il a évoqué les conséquences de l'épidémie de chikungunya sur le secteur du tourisme à la Réunion et a demandé si un plan de prévention sera mis en place en 2007. Il s'est ensuite félicité de la décision de résorber les retards de paiement de l'Etat dans le secteur du logement, les effets de cette situation étant catastrophiques pour l'emploi outre-mer. Evoquant l'alcoolisme à Mayotte, et spécialement celui qui touche les femmes enceintes, il a exprimé le souhait que l'aide aux associations luttant contre ce phénomène soit renforcée et a rappelé les efforts du conseil régional de la Réunion pour mobiliser sur ce dossier l'ensemble des parties intéressées. Il s'est enfin enquis de l'évolution du statut de Mayotte.

M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, a indiqué que neuf cas de chikungunya ont été constatés la semaine passée à la Réunion et que la période actuelle correspond à celle du début de l'épidémie l'année dernière. Cette épidémie a révélé la baisse d'intensité de la lutte anti-vectorielle contre les moustiques. Les mesures concertées lancées au cours de l'année par l'Etat et les collectivités territoriales restent en vigueur. La maladie, très méconnue jusqu'à l'année dernière, y compris au sein de l'organisation mondiale de la santé (OMS), doit faire l'objet de fortes recherches. Un pôle recherche a donc été mis en place. Des efforts importants sont consentis en matière de lutte anti-vectorielle. Par ailleurs, les services de la direction régionale des affaires sanitaires et sociales (Drass) ont été étoffés, passant de quatre-vingt-quinze à cent cinquante-deux agents, l'objectif étant de monter à deux cent vingt agents. Enfin, un groupement d'intérêt public (Gip) confortera la coopération de l'Etat et des collectivités territoriales dans la lutte contre la maladie. En ce qui concerne les difficultés de l'économie réunionnaise, une enveloppe de 100 millions d'euros a été débloquée par le Premier ministre, dont une partie, non encore consommée, est destinée aux entreprises. En l'absence de vaccin et de traitement du chikungunya, il faut aider les professionnels du tourisme, activité globalement sinistrée, le temps nécessaire. Le Gouvernement a lancé à cet égard une campagne sur l'efficacité des mesures individuelles de protection en liaison avec les professionnels réunionnais du tourisme.

L'alcoolisme à Mayotte et dans tout l'outre-mer nécessite une grande politique publique mobilisant tous les acteurs concernés. Le ministère de l'outre-mer dispose de son côté de crédits permettant de financer les associations de terrain.

En ce qui concerne le statut de Mayotte, le projet de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer prévoit la création d'une identité législative plus affirmée, ce qui rapproche l'île du droit commun. Une anticipation du rendez-vous référendaire avec les Mahorais n'est pas à exclure.

Nomination d'un rapporteur

Puis la commission a désigné Mme Marie-Thérèse Hermange sur la proposition de résolution n° 441 (2005-2006), présentée par M. Roland Ries, au nom de la délégation pour l'Union européenne, en application de l'article 73 bis du règlement, sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création du fonds européen d'ajustement à la mondialisation (E 3102).

Mercredi 25 octobre 2006

- Présidence de M. Nicolas About, président -

Loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 - Audition de M. Jean-Michel Laxalt, président de l'union nationale des organismes d'assurance maladie (Unocam)

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à plusieurs auditions sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Jean-Michel Laxalt, président de l'union nationale des organismes d'assurance maladie (Unocam).

M. Nicolas About, président, a rappelé qu'à la suite d'un amendement adopté par le Sénat à l'initiative de la commission des affaires sociales, l'union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (Unocam) est désormais invitée à rendre un avis public et motivé sur chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale.

M. Jean-Michel Laxalt, président de l'Unocam, s'est félicité de cette initiative du Sénat qui conforte l'esprit de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie et contribue à améliorer l'articulation des interventions respectives de l'assurance maladie obligatoire et des organismes complémentaires.

M. Jean-Michel Laxalt a rappelé que l'Unocam participe à la prise en charge des dépenses de santé et que la relation qu'elle entretient avec l'union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) doit être approfondie, notamment au niveau des échanges d'informations relatives aux remboursements, afin que les organismes complémentaires cessent d'être des payeurs aveugles.

Les mesures financières arrêtées dans le cadre des lois de financement de la sécurité sociale produisent des effets sur les comptes des organismes complémentaires. C'est le cas des déremboursements des médicaments décidés en 2005, des revalorisations du forfait hospitalier ou de la création du forfait de 18 euros par la loi de financement pour 2006.

Les propositions contenues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 s'inscrivent dans une situation budgétaire fragile en raison de la persistance de déficits élevés. L'Ondam pour les soins de ville tel qu'il figure dans le projet initial est volontariste car sa construction repose essentiellement sur une baisse des dépenses de médicaments. Or, l'expérience des années antérieures montre que les économies attendues n'ont pas été réalisées, et celles prévues pour 2007 sont plus ambitieuses que les années précédentes.

Il a réitéré à cette occasion la position constante de l'Unocam qui est favorable à des baisses de prix de médicaments plutôt qu'à des remises accordées en fonction des volumes commercialisés, car cette dernière procédure ne bénéficie qu'à l'assurance maladie obligatoire alors que les baisses de prix profitent à tous les acteurs, assurance maladie, organismes complémentaires et assurés.

L'année dernière, l'Unocam a souhaité que le Gouvernement suive les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) sur les déremboursements des médicaments disposant d'un service médical rendu insuffisant. Il a observé que dans son avis du 19 octobre dernier, la HAS a recommandé le déremboursement de 89 médicaments, soulignant à cette occasion que les vasodilatateurs n'ont pas prouvé leur intérêt en vie réelle et augmentent les risques liés à la polymédication. Il a estimé qu'en conséquence le Gouvernement doit procéder au déremboursement de ces produits.

L'Unocam est favorable à la revalorisation du montant du crédit d'impôt créé par la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie ainsi qu'à une revalorisation régulière de la protection offerte par la couverture maladie universelle (CMU).

Enfin, l'Unocam participe aux travaux du comité national de lutte contre les fraudes à la sécurité sociale mis en place cette semaine par le ministre de la santé et des solidarités.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a rappelé que les négociations relatives à la création d'un secteur optionnel ont débuté la semaine précédente et il a voulu connaître les dispositions prises par l'Unocam avant d'aborder ces discussions conventionnelles.

Il s'est également interrogé sur les conditions dans lesquelles s'est déroulée la mise en place des contrats responsables à compter du 1er janvier 2006. Il a voulu savoir si les assureurs complémentaires ont développé une offre nouvelle de contrats « non responsables ».

M. Jean-Michel Laxalt a précisé que le conseil de l'Unocam a délibéré avant le début des négociations qui réunissent, pour la première fois, l'Uncam, les syndicats médicaux et les organismes complémentaires. L'Unocam souhaite qu'un accord puisse être trouvé pour majorer la rémunération des chirurgiens choisissant d'exercer dans ce nouveau secteur optionnel. Ce complément tarifaire serait la contrepartie d'engagements souscrits par les chirurgiens en matière de qualité des soins et de transparence des tarifs. Les frais afférents à la mise en oeuvre de ce nouveau secteur optionnel seraient pris en charge par l'assurance maladie obligatoire et les organismes complémentaires. Il a estimé que l'instauration de ces nouvelles modalités de rémunération doit se faire dans le cadre d'une réflexion plus globale sur l'articulation entre les pratiques existantes et ce nouveau secteur optionnel. Il a considéré que l'Unocam ne peut plus accepter que la pratique des honoraires libres en cours dans le secteur 2 relève des seuls praticiens.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, s'est interrogé sur le déroulement des négociations relatives à la création du secteur optionnel et sur les modalités de répartition de cette charge financière entre l'assurance maladie et les organismes complémentaires.

M. Jean-Michel Laxalt a indiqué que des dispositions figurant dans la convention conclue entre les médecins et l'assurance maladie peuvent servir de support à la configuration du futur secteur optionnel. En effet, le mécanisme dit de l'option de coordination offre aux patriciens exerçant en secteur 2 qui le souhaitent la possibilité de pratiquer des actes en secteur 1 (tarifs opposables) sous réserve que ces actes ne représentent pas plus de 30 % de leur activité globale. En contrepartie, l'assurance maladie obligatoire prend en charge les cotisations sociales dues au titre de ces consultations. Il a reconnu que cette option ne suscite pas l'adhésion des médecins concernés puisque seuls 700 médecins ont choisi d'en bénéficier.

Cette base de répartition des charges peut être transposée pour la prise en charge de dépenses résultant de la création du secteur optionnel : l'assurance maladie assurerait le financement des cotisations sociales des praticiens tandis que les compléments de rémunération seraient à la charge des organismes complémentaires, pour un montant total évalué entre 17 et 23 millions d'euros.

Une première rencontre entre le directeur général de l'Uncam et les syndicats médicaux a eu lieu le 18 octobre dernier. Les syndicats médicaux y ont considéré que le bénéfice du secteur optionnel doit être ouvert à l'ensemble des spécialités médicales. Le 24 octobre, le conseil de l'Uncam a réitéré son intention de réserver le bénéfice du secteur optionnel aux seuls chirurgiens. Face à cette situation de blocage, le ministre de la santé et des solidarités a annoncé qu'en cas d'échec de la négociation, il prendrait les mesures législatives qui lui sembleront nécessaires.

M. Jean-Michel Laxalt a indiqué que la transformation des contrats individuels d'assurance complémentaire santé en « contrats responsables » n'a pas posé de difficulté majeure. Cette appréciation doit être légèrement nuancée pour les contrats collectifs dont la modification nécessite au préalable une négociation entre les partenaires sociaux concernés.

Il a précisé que l'offre commerciale en matière de contrats « non responsables » est très réduite avant de signaler que les contrats CMU et les contrats de sortie de CMU ne respectent pas la législation relative aux contrats responsables.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a rappelé que le Sénat avait adopté, lors de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, un amendement visant à mettre en conformité les contrats CMU complémentaire avec les règles relatives aux contrats responsables. Il a voulu savoir si les contrats offrant des garanties partielles doivent bénéficier d'une dérogation par rapport à cette législation.

M. Jean-Michel Laxalt a rappelé que la législation prévoit que les contrats à garanties partielles disposent d'un délai supplémentaire, fixé au 1er janvier 2008, pour se mettre en conformité avec la législation relative aux contrats responsables.

Il a estimé que les contrats responsables contribuent à l'efficacité du parcours de soins et qu'en conséquence, rien ne justifie le maintien de dispositions dérogatoires en faveur des contrats couvrant des garanties partielles.

M. François Autain a souligné que si le secteur optionnel a pour objectif d'assurer une meilleure transparence des honoraires perçus par les chirurgiens et une meilleure qualité des actes, cela laisse supposer que toutes les activités chirurgicales pratiquées en dehors de ce secteur n'offrent pas les mêmes garanties. Il a donc voulu savoir si, à terme, le secteur optionnel a vocation à devenir le secteur unique d'activité des chirurgiens.

Il a rappelé que les recommandations de la HAS publiées en 2005 sur le déremboursement de 218 médicaments disposant d'un service médical rendu insuffisant n'ont pas été suivies par le Gouvernement qui a choisi de mettre en place un nouveau taux de remboursement fixé à 15 %. Il a estimé que cette situation va se répéter en 2007, opérant ainsi un nouveau transfert de charges de l'assurance maladie obligatoire vers les organismes complémentaires qui prennent en charge 85 % du prix du médicament partiellement déremboursé. Il s'est interrogé sur les conséquences de ces transferts sur le tarif des cotisations versées par les assurés.

Enfin, il a voulu connaître le sentiment du président de l'Unocam sur l'offre commerciale développée par une société d'assurances visant à appliquer au domaine de la santé des règles proches du bonus/malus accordé aux automobilistes.

Mme Marie-Thérèse Hermange a regretté que les contrats offrant des garanties partielles ne bénéficient pas d'une dérogation à la législation relative aux contrats responsables. Elle a fait part des craintes que lui inspirent les conséquences de la mise en oeuvre d'un nouveau secteur d'exercice, situation qui risque d'accroître la complexité d'un système d'accès aux soins déjà passablement difficile à comprendre pour les assurés.

Enfin, elle s'est interrogée sur les raisons pour lesquelles aucun véritable plan d'économies n'est engagé dans le secteur hospitalier.

M. Jean-Michel Laxalt a insisté sur la nécessité de lier la rémunération complémentaire versée dans le cadre du secteur optionnel à la souscription d'engagements individuels en termes de qualité des soins.

M. Paul Blanc a voulu connaître les critères susceptibles d'être appliqués pour mesurer cette évolution en matière de qualité.

M. Jean-Michel Laxalt a précisé qu'il n'appartient pas à l'Unocam de définir ces critères de qualité et que cette tâche est du ressort de la HAS ou des sociétés savantes.

M. Alain Millon a voulu savoir si cette recherche de la qualité passe par le développement de recommandations de bonne pratique.

M. François Autain a rappelé que la Cour des comptes a émis de sévères critiques sur l'efficacité des dispositifs de bonne pratique dans son rapport consacré à la sécurité sociale de septembre 2005.

M. Jean-Michel Laxalt a jugé que le développement de la procédure d'évaluation des pratiques professionnelles constitue une approche novatrice en matière de développement de la qualité des soins.

Il a précisé que les organismes complémentaires n'ont pas suivi une politique commune en matière de prise en charge des médicaments déremboursés au début de l'année 2006. Si les mutuelles ont fait le choix de ne pas les prendre en charge, les assureurs et les institutions de prévoyance ont suivi la voie inverse. Cette différence d'approche s'explique en partie par les règles applicables à la modification des contrats propres à chaque grande famille d'assurances complémentaires.

Le tarif de base des cotisations devrait connaître une majoration comprise entre 2 % et 4 % pour l'année à venir. Cette augmentation s'explique bien entendu par la hausse des dépenses de santé prises en charge par les assureurs complémentaires mais également par la modification du taux de la taxe CMU, passé de 1,75 % à 2,5 %, et par la nécessité de recourir à des provisions techniques et prudentielles qui seront rendues obligatoires à compter de 2007.

Enfin, pour ce qui concerne le nouveau contrat d'assurance santé prévoyant l'introduction d'un dispositif de bonus/malus pour les assurés, il a signalé qu'il s'accompagne d'une majoration de 15 % de la cotisation perçue pour un contrat classique offrant les mêmes garanties.

M. Nicolas About, président, a estimé que cette proposition commerciale vise à attirer une clientèle jeune et en bonne santé que cette société d'assurance espère fidéliser.

Loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 - Audition de MM. Pierre Burban, président du conseil d'administration, Jean-Luc Tavernier, directeur, et Alain Gubian, directeur des statistiques, des études et de la prévision, de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss)

La commission a ensuite procédé à l'audition de MM. Pierre Burban, président du conseil d'administration, Jean-Luc Tavernier, directeur, et Alain Gubian, directeur des statistiques, des études et de la prévision, de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss).

En préambule, M. Pierre Burban, président du conseil d'administration de l'Acoss, a remercié le sénateur Alain Vasselle pour les propos qu'il a tenus lors de la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale, notamment sur le problème de la compensation des exonérations de charges sociales par l'Etat, et sur lesquels il est lui-même en parfait accord. Puis il a évoqué les principaux axes de la nouvelle convention d'objectifs et de gestion (Cog), signée avec l'Etat le 31 mai dernier : l'amélioration de la qualité de service dans la relation auprès des cotisants, en particulier par un service adapté en fonction des différentes catégories de cotisants, le renforcement des actions de contrôle et de lutte contre le travail dissimulé, la poursuite de l'optimisation de la gestion de la trésorerie et d'un accroissement de l'expertise en matière de financement de la sécurité sociale, enfin le renforcement de l'efficience du pilotage de la branche, en particulier à l'échelon local.

Il a ensuite souligné les évolutions très significatives intervenues dans le réseau des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (Urssaf). L'échelon départemental est désormais clairement le niveau de base du réseau ; néanmoins un pôle régional de coordination des Urssaf est créé pour renforcer la coopération entre ces organismes. Par ailleurs, huit Urssaf spécialisées dans les très grandes entreprises, de plus de deux mille salariés, ont été créées. A titre personnel, il s'est déclaré opposé à la préconisation de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) de l'Assemblée nationale de régionaliser l'ensemble du dispositif local de la branche recouvrement.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a à son tour félicité M. Pierre Burban pour sa récente réélection à la présidence du conseil d'administration de l'Acoss, au sein duquel son investissement personnel se traduit par des progrès indéniables. Il s'est ensuite interrogé sur la situation actuelle de la compensation des allégements généraux de charges sociales par l'Etat. Il a notamment regretté l'absence d'une clause de rendez-vous pour garantir une compensation à l'euro près de ces exonérations à partir de l'année 2007, puisqu'un excédent devrait être constaté en 2006. Il s'est déclaré très préoccupé par le vote continuel de textes législatifs prévoyant de nouveaux allégements sans que leur compensation soit garantie. Il a demandé si la prise en charge, par l'Etat, des frais financiers résultant de sa propre dette à l'égard de la sécurité sociale ne conduit pas à rendre pérenne cette dette. Il a également voulu savoir si l'Acoss estime souhaitable la systématisation du principe de la prise en charge des frais financiers par l'Etat.

M. Pierre Burban a indiqué que les exonérations compensées en 2006 s'élèvent à 18 milliards d'euros, soit une augmentation de 10 % par rapport à 2005, en raison de la dernière phase de mise en oeuvre des mesures prévues par les lois « Aubry II » et « Fillon ». Pour l'ensemble des régimes, les allégements généraux doivent s'élever à 19,2 milliards d'euros en 2006 et la prévision des recettes affectées à cet effet atteint 19,4 milliards d'euros. Au total, cela permet d'envisager un surplus de 260 millions pour 2006 qui sera transféré à la Cnam, conformément à la décision du Gouvernement. Néanmoins, les échéances de versement par l'Etat des recettes affectées ne sont pas satisfaisantes et ne correspondent pas aux dispositions de la convention signée avec l'Etat le 30 décembre 2005. En 2007, les allégements de charges sociales devraient évoluer comme la masse salariale. Toutefois, la suppression des 2,1 points de cotisations subsistant encore au niveau du Smic à compter du 1er juillet 2007 devrait coûter 320 millions d'euros. En 2007, cette mesure sera compensée par un transfert de droits sur les tabacs, mais rien n'est prévu pour 2008 et les années suivantes alors qu'en année pleine, cette nouvelle mesure d'allégement représente un coût supérieur à 600 millions d'euros.

S'agissant des exonérations ciblées, les versements actuellement prévus par l'Etat pour 2006 s'élèvent à 2,4 milliards d'euros alors que les dépenses atteindront 3,2 milliards.

Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, l'Etat a décidé de prendre en charge les frais financiers imputables à la dette de l'Etat envers l'Acoss ; il aurait été plus satisfaisant qu'il rembourse une partie du principal de cette dette. Néanmoins cette mesure permet, pour la première fois, l'application de l'article L. 139-2 du code de la sécurité sociale qui a instauré un principe de neutralisation des effets de trésorerie. Cette mesure aura peut-être pour effet d'inciter l'Etat à être plus vertueux à l'avenir.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a souhaité connaître le profil des besoins de trésorerie de l'Acoss en 2007, savoir si cette prévision tient compte des défaillances de l'Etat et à combien le plafond des avances aurait dû être fixé si, comme le suggère la Cour des comptes dans son dernier rapport, ce plafond avait été calculé de façon à couvrir les seuls besoins de trésorerie de l'Acoss. Il s'est également interrogé sur les raisons de la diversification des moyens de financement de l'Acoss prévue par l'article 28 du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui ouvre à l'agence la possibilité d'émettre des billets de trésorerie. Dans quelle proportion est-il prévu d'y recourir en 2007 ? En matière de contrôle et de lutte contre la fraude, il a demandé à quel pourcentage on peut évaluer aujourd'hui la fraude, quelles sont les actions menées par l'Acoss pour la limiter et quels sont les résultats obtenus. De nouvelles mesures législatives ou réglementaires paraissent-elles nécessaires pour permettre d'améliorer encore ces résultats ? Enfin, il s'est interrogé sur le bilan des actions menées en faveur de la dématérialisation des déclarations et du paiement des cotisations, notamment en termes de gain pour l'Acoss. L'article 30 du projet de loi de financement de la sécurité sociale doit-il permettre de nouvelles économies avec le franchissement d'une étape supplémentaire en matière de dématérialisation ?

M. Pierre Burban a indiqué que le plafond des avances fixées pour l'Acoss dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 est de 28 milliards d'euros, ce qui inclut le solde négatif de 14,8 milliards à la fin de 2006, auquel s'ajoute une variation de trésorerie, pour 2007, de 13,2 milliards. La possibilité ouverte à l'agence d'émettre des billets de trésorerie a un double objectif : sécuriser l'approvisionnement en ressources de l'Acoss et permettre des économies de charges d'intérêts, celles-ci étant potentiellement estimées à environ 500.000 euros par milliard emprunté annuellement. A priori, en 2007, l'Acoss devrait recourir aux billets de trésorerie pour environ 5 milliards d'euros et continuer à faire appel à la Caisse des dépôts et consignations, qu'il n'est pas question d'écarter, pour un minimum de 20 milliards d'euros.

Les actions menées en matière de contrôle ont permis de redresser l'équivalent d'environ 1 % des cotisations. Le travail dissimulé représente des montants plus importants, estimés entre 2,5 % et 5 % des cotisations encaissées. La lutte contre les fraudes est un axe important de la nouvelle Cog avec des objectifs bien identifiés : un travail plus étroit avec les corps de contrôle, en particulier dans certains secteurs prioritaires comme le bâtiment et les travaux publics, les hôtels-cafés-restaurants, le spectacle, le gardiennage, la confection et les services à la personne, un renforcement de la connaissance du phénomène du travail dissimulé, une amélioration du ciblage des contrôles, la mise en place d'un réseau de référents régionaux et un contrôle plus poussé de la régularité des prestataires de services étrangers. Les résultats obtenus sont significatifs : 51 millions d'euros de redressements en 2005 au titre du travail illégal, en augmentation de plus de 10 millions d'euros par rapport à 2003. Au total, 13 % du temps de contrôle est consacré à la lutte contre le travail dissimulé.

L'article 30 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui prévoit de nouvelles obligations en matière de dématérialisation des déclarations et du paiement des cotisations, est la traduction législative d'une disposition de la Cog. La dématérialisation doit permettre de dégager 220 équivalents temps plein à la fin de 2009, soit un gain de ressources appréciables qui sera consacré à l'action prioritaire de lutte contre la fraude. Il est toutefois important que les mesures de dématérialisation soient adaptées aux différentes catégories de cotisants.

M. Alain Gubian, directeur des statistiques, des études et de la prévision de l'Acoss, a indiqué que le coût financier de l'insuffisante compensation des exonérations de charges en 2006 s'élève à peu près aux 160 millions d'euros que l'Etat a l'intention de prendre à sa charge au titre de l'exercice 2006. Mais en 2007, ces frais financiers seront supérieurs du fait à la fois d'une augmentation de la dette et d'une hausse des taux d'intérêts et, à ce jour, rien n'est prévu pour y faire face.

M. André Lardeux, rapporteur pour la branche famille, a souhaité connaître l'état exact des réserves financières de la branche famille et obtenir la confirmation du respect du principe d'étanchéité entre les branches de la sécurité sociale.

M. François Autain a estimé que la différence entre besoins de trésorerie, besoins de financement et déficits apparaît de moins en moins claire. Il s'est interrogé sur la possibilité de continuer à cumuler les déficits et sur l'existence d'une limite au plafond d'avances annuel de l'Acoss.

M. Pierre Burban a insisté sur la véritable individualisation des ressources affectées à chaque branche. Il a confirmé que les déficits de 2006 et de 2007 se cumuleront pour atteindre environ 28 milliards d'euros à la fin de 2007, sauf si intervient une reprise de dettes comme celles qui ont été effectuées par la caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) au cours des années récentes.

M. Bernard Cazeau a demandé si le déficit du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (Ffipsa) est intégré dans les comptes de l'Acoss.

M. Pierre Burban a indiqué que l'Acoss couvre uniquement le régime général des salariés mais que des coopérations sont développées entre les Urssaf, l'Acoss et le nouveau régime social des indépendants (RSI). Le monde agricole est géré par la mutualité sociale agricole (MSA).

M. Alain Gubian a précisé que chaque branche détient un compte individualisé à l'Acoss qui peut lui fournir quotidiennement sa situation de trésorerie. S'agissant de la branche famille, les réserves disponibles s'élevaient à 2,128 milliards d'euros à la fin de 2005 et atteindront seulement 500 millions d'euros à la fin de 2006. Pour 2007, le déficit attendu de la branche, de 700 millions d'euros, aura pour conséquence l'extinction des réserves de la branche famille et le calcul de charges financières au lieu de produits financiers au cours des années précédentes.

Puis il a souligné la nécessaire distinction entre variation de trésorerie et solde comptable, notamment lorsqu'on constate des retards de paiement de l'Etat ou du fonds de solidarité vieillesse (FSV). Enfin, il a estimé que le plafond d'avances demandé pour 2007 a été calculé de façon plutôt juste.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a demandé aux responsables de l'Acoss leur appréciation sur les prévisions quadriennales annexées au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

M. Jean-Luc Tavernier, directeur de l'Acoss, a regretté le caractère trop schématique de ces prévisions qui ne lui paraissent pas avoir la qualité et les standards que le Parlement serait en droit d'exiger. Il a souligné le côté très volontariste des hypothèses retenues tant pour l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) qui progresserait entre 2,2 % et 2,5 % par an, soit un rythme inférieur à la richesse nationale, que pour la masse salariale qui, à l'inverse, s'accroîtrait plus vite que le PIB.

Loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 - Audition de Mme Danièle Karniewicz, présidente du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (Cnav)

La commission a enfin procédé à l'audition de Mme Danièle Karniewicz, présidente du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (Cnav).

Après avoir excusé l'absence de M. Dominique Leclerc, rapporteur pour la branche vieillesse, M. Nicolas About, président, a invité Mme Danièle Karniewicz, présidente de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (Cnav), à présenter ses observations sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007. Il a notamment souhaité savoir si cette caisse connaît déjà une situation de déficit structurel et si le coût, beaucoup plus important que celui prévu initialement, des départs en retraite pour longue carrière permet encore d'envisager l'ajout d'un dispositif de compensation de la pénibilité au travail. Les négociations engagées à ce sujet entre les partenaires sociaux semblent en effet dans l'impasse depuis de nombreux mois.

Mme Danièle Karniewicz, présidente du conseil d'administration de la Cnav, a considéré qu'il est exact de dire que le déséquilibre des comptes de la Cnav présente un caractère structurel. Les personnes appartenant aux premières classes d'âge du baby-boom d'après-guerre sont désormais très nombreuses à pouvoir demander la liquidation de leur pension. Le nombre des départs en retraite s'est ainsi accru de 8 % en 2006 par rapport à 2005.

Les projections tablent pour les prochaines années sur le maintien d'un fort déficit, qui serait compris, en 2010, entre 3,3 milliards d'euros et 5,1 milliards d'euros. Ces estimations ont pourtant été élaborées sur la base d'hypothèses que certains observateurs considèrent comme « optimistes » , aussi bien en ce qui concerne la progression de la masse salariale que celle des prestations versées. Ainsi, les prévisions de déficit du régime général pour 2007 reposent sur l'idée d'une modification substantielle des comportements des assurés sociaux, en réponse à la mise en oeuvre du plan national d'action en faveur des seniors : on suppose que 40.000 personnes choisiraient, dès l'année prochaine, de repousser la date de leur départ à la retraite, ce qui n'est pas avéré.

Le creusement récent du déficit du régime général s'explique aussi en grande partie par l'ampleur des départs anticipés des assurés sociaux qui ont commencé précocement leur carrière professionnelle et qui liquident leur pension avant soixante ans. Le déséquilibre des finances de la Cnav est ainsi passé de 1,9 milliard d'euros en 2005, à 2,4 milliards d'euros en 2006 et devrait atteindre 3,5 milliards d'euros en 2007. L'augmentation du coût de la mesure des carrières longues a pesé très fortement sur cette tendance : les dépenses correspondantes se sont élevées à 600 millions d'euros en 2004, à 1,4 milliard d'euros en 2005, à 1,8 milliard d'euros en 2006 et seraient, en 2007, de 2 milliards d'euros.

Les comptes de la Cnav sont affectés par un effet de ciseau entre le rythme de croissance des recettes (+ 4,3 % en 2006 et + 4,6 % estimés en 2007) et celui, sensiblement supérieur, des prestations versées (+ 5,6 % en 2006 et + 5,2 % estimés en 2007). A cela s'ajoute la mise à contribution du régime général au titre de la compensation démographique dont le montant, qui atteint 2,8 milliards d'euros par an, s'est d'ailleurs accru de 800 millions d'euros depuis la réforme des critères intervenue à l'automne 2002. Au total, la croissance des dépenses de la Cnav atteindrait 24 % sur la période 2005/2010, tandis que la progression des recettes serait comprise, selon les hypothèses envisagées, entre 21,2 % et 23,6 %.

Après avoir constaté l'absence de changement des comportements individuels et collectifs dans les entreprises et déploré que les employeurs continuent à utiliser massivement les différents mécanismes de cessation précoce d'activité des salariés, Mme Danièle Karniewicz a indiqué que le nombre des nouveaux bénéficiaires de la mesure des carrières longues tend tout juste à se stabiliser, mais à un niveau très élevé : 102.000 en 2005, 105.000 en 2006 et probablement 95.000 en 2007. Dès l'âge de quarante-cinq ans, beaucoup de salariés ont le sentiment de représenter un fardeau pour les entreprises qui les emploient. Or, voici quelques années encore, ce couperet psychologique ne semblait apparaître qu'à cinquante, voire cinquante-cinq ans. Ce phénomène très sensible explique une tendance générale à l'oeuvre parmi les « seniors » qui consiste à vouloir partir en retraite dès que possible, afin de se prémunir contre les possibles effets de la prochaine réforme des retraites. Ce mouvement d'inquiétude semble gagner le corps social à l'approche de la « clause de rendez-vous » de 2008.

En ce qui concerne le dossier de la pénibilité, les partenaires sociaux ont engagé des négociations nationales en février 2005, conformément à l'article 12 de la réforme des retraites de 2003, mais les discussions ne semblent pas devoir aboutir rapidement à un accord. Il apparaît donc prématuré d'évoquer un futur dispositif destiné à compenser la pénibilité au cours de la carrière professionnelle, d'autant plus que la définition des contours de cette notion pose de redoutables difficultés pratiques et conceptuelles. Pour autant, Mme Danièle Karniewicz a estimé que, compte tenu de l'impact financier déjà élevé de la mesure des carrières longues et du caractère structurel du déficit du régime général, il ne sera sans doute pas possible d'indemniser la pénibilité dans des conditions généreuses. La diminution progressive, à partir du début des années 2010, des effectifs éligibles au dispositif des carrières longues pourrait toutefois donner lieu à des effets de substitution en faveur d'un nouveau dispositif de cessation d'activité, fondé cette fois sur la pénibilité.

Après avoir rappelé l'intérêt constant manifesté par la commission des affaires sociales du Sénat à la question des adossements de régimes spéciaux, M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a demandé pourquoi le dossier de la Régie autonome des transports parisiens (RATP) n'a toujours pas abouti. Il a également souhaité savoir si la Cnav a reçu des assurances du Gouvernement sur l'abandon du projet consistant à amorcer, dès cette année, l'adossement des retraites de La Poste. Puis il a interrogé la caisse sur la présentation de l'adossement des industries électriques et gazières (IEG) dans son rapport annuel.

Après avoir rappelé que les négociations engagées entre la Cnav, l'Etat et la RATP se sont ouvertes au premier semestre 2005 et que, dès juin 2005, les échanges ont porté sur le montant de la soulte et sur son mode de calcul, Mme Danièle Karniewicz a indiqué que les discussions avec les pouvoirs publics semblent au point mort depuis le mois de juillet dernier. Compte tenu de ce retard qui ne lui est en rien imputable, il est désormais indispensable, pour espérer parvenir à un accord, de remettre à plat l'ensemble des éléments financiers du projet d'adossement.

Les négociations engagées avec les pouvoirs publics achoppent sur trois points de blocage principaux : la question de la prise en charge des avantages familiaux par le fonds de solidarité vieillesse (FSV), le niveau de la rente garantie des retraités et le taux d'actualisation sur la base duquel la soulte sera calculée.

S'agissant des avantages familiaux, elle a estimé que la situation actuelle de sous-financement chronique du FSV, lequel doit au demeurant 5,6 milliards d'euros à la Cnav, interdit désormais de reproduire le schéma de compromis qui avait prévalu in fine pour les IEG. Même si les sommes en jeu apparaissent nettement inférieures dans le cas de la RATP à ce qu'elles étaient pour les IEG, il s'agit d'une question de principe pour le régime général, notamment dans la perspective des opérations ultérieures d'adossement.

Il en va de même pour le niveau de la rente garantie, qui devrait être plus faible pour la RATP que dans le cas des IEG. Cette opération consiste, dans un souci de simplification, à reprendre globalement les droits des retraités du régime adossé, pour éviter d'avoir à reconstituer individuellement leurs carrières professionnelles.

Reconnaissant que cette demande pose très certainement des difficultés à l'Etat, dans la mesure où la nouvelle caisse de retraite du personnel de la RATP serait alors amenée à verser la différence, elle a toutefois estimé que ce problème n'est pas celui des assurés sociaux du régime général.

En ce qui concerne le taux d'actualisation, qui joue un rôle déterminant dans le montant de la soulte, Mme Danièle Karniewicz a indiqué que le niveau retenu il y a deux ans pour les IEG (2,5 %) n'a pas aujourd'hui vocation à être automatiquement reconduit pour la RATP. Des experts financiers et des actuaires préconisent en effet d'utiliser des taux inférieurs, ce qui aboutirait à augmenter sensiblement le montant des droits d'entrée à acquitter par le régime adossé : un écart de quelques dizaines de points de pourcentage se traduit par une différence actuarielle de plusieurs centaines de millions d'euros sur une durée de vingt-cinq ans. Après avoir réaffirmé, comme elle l'avait fait lors de son audition du 21 juin 2006 par la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat, le besoin pour la Cnav de disposer d'une contre-expertise des banques de la place pour être en mesure d'apprécier le taux d'actualisation proposé par le ministère des finances, elle a observé que les calculs de la soulte reposent également sur des hypothèses d'évolution des effectifs du personnel fournies par la RATP que la Cnav se trouve contrainte d'accepter.

Aussi bien pour le dossier de la RATP que pour celui de La Poste, Mme Danièle Karniewicz, a estimé que dès lors que la solution d'un adossement sur le régime général semble le seul schéma envisagé par le ministère des finances, il apparaît indispensable de consacrer les prochains mois à des travaux très approfondis sur ces opérations. Compte tenu de la difficulté avérée de l'exercice et de la nécessité absolue de trouver une solution en 2007, il serait impensable que l'Etat attende, pour ouvrir des négociations, que les échéances électorales de l'année prochaine soient passées.

Après avoir indiqué que la Cnav n'a reçu à ce jour aucun élément chiffré de la part de La Poste, Mme Danièle Karniewicz a rappelé, d'une part, que ce dossier porte sur un montant d'engagements de retraite de 70 milliards d'euros, d'autre part, qu'il ne s'agit pas, en l'espèce, de l'adossement d'un régime de retraite spécial. Cette entreprise publique, dont l'effectif total s'élève à 300.000 personnes, est en effet composée, pour un tiers, de salariés de droit privé et, pour le reste, de fonctionnaires de l'Etat, dont la situation au regard de la retraite est déterminée par le code des pensions civiles et militaires de retraite. Il s'agit donc d'un cas de figure entièrement nouveau par rapport aux précédents des IEG ou de la RATP, nécessitant probablement quatre ou cinq mois de travaux techniques préalables, avant d'être en mesure d'engager des négociations qui seront de toute évidence ardues.

Observant que la puissance publique joue en quelque sorte le rôle de réassureur de La Poste pour les retraites des agents publics, elle a constaté que les relations entre l'Etat et l'entreprise publique évoluent progressivement : La Poste a ainsi déjà été conduite à verser 2 milliards d'euros dans le cadre de la loi de finances pour 2006. Cette opération pourrait être renouvelée à l'occasion de l'examen de la loi de finances rectificative pour 2006.

Après s'être félicitée que le Gouvernement ait finalement abandonné le projet consistant, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, à amorcer dès cette année l'adossement des retraites de La Poste sur le régime général, par le biais d'une avance d'environ un milliard d'euros, elle a indiqué qu'une telle opération aurait pu coûter un montant équivalent à la Cnav en 2007.

M. Nicolas About, président, a fait valoir sur ce point que M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers et l'assurance maladie, et M. Dominique Leclerc, rapporteur pour la branche vieillesse, se sont prononcés contre une telle perspective, le 28 septembre 2006, dans un communiqué de presse conjoint.

Mme Danièle Karniewicz s'est réjouie de l'implication des sénateurs dans ces dossiers ainsi que de leur très bonne compréhension de la situation du régime général. Elle s'est par ailleurs interrogée sur la nécessité pour la Cnav, à l'instar des régimes complémentaires qui en bénéficient déjà, d'intégrer une clause de rendez-vous dans les conventions d'adossements qui seront signées à l'avenir. Il n'est pas raisonnable d'imaginer que le régime général s'engage, à coup sûr et une fois pour toutes, sur le calcul des droits d'entrée, dans le cadre d'opérations fort complexes avec des durées de projection de vingt-cinq ou trente ans. La possibilité de dresser un premier bilan après quelques années est donc indispensable. Enfin, la Cnav ne saurait admettre que l'Etat veuille lui appliquer un taux d'actualisation différent de celui qui sera utilisé pour les régimes complémentaires Agirc et Arrco.

En réponse à M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, qui s'interrogeait sur la présentation de l'adossement des IEG dans le rapport annuel de la Cnav, elle a indiqué que l'opération apparaît jusqu'ici globalement équilibrée. Toutefois, les données disponibles ne concernent que la seule année 2005, pour laquelle la Cnav a versé à la caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG) un montant de 1.380 millions d'euros de prestations de retraite. En contrepartie, la Cnav a reçu de la CNIEG 816 millions d'euros de cotisations, auxquels s'ajoutent 48 millions d'euros de la part du FSV et 287 millions d'euros au titre de la première partie de la soulte. A première vue, le solde de trésorerie semblerait donc être négatif de 225 millions d'euros pour le régime général. Mais le résultat économique global doit également prendre en compte les intérêts (62 millions d'euros) et les plus-values latentes (178 millions d'euros) au titre de la seconde partie de la soulte, dont la gestion sera assurée par le fonds de réserve des retraites jusqu'en 2020. Au total, le bilan pour 2005 de l'adossement des IEG serait donc globalement positif (+ 37 millions d'euros) pour la Cnav.

Après avoir observé qu'il convient néanmoins d'appréhender sur une longue durée le respect du principe de stricte neutralité financière introduit par le législateur, Mme Danièle Karniewicz a estimé que ces calculs de rentabilité économique sont difficiles à réaliser et présentent un caractère relatif : il est inévitable que des écarts se produisent certaines années.

Constatant au passage que ces estimations ne prennent pas en compte le coût d'opportunité pour le régime général de cet écart de 225 millions d'euros, M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a estimé à son tour que le bilan d'ensemble de l'opération semble équilibré. Puis il s'est demandé comment, et suivant quel calendrier, la Cnav entend préparer la prochaine réforme des retraites, et quels thèmes de réflexion retiennent plus particulièrement son attention.

Mme Danièle Karniewicz a estimé qu'il est encore un peu trop tôt pour ouvrir ce débat sur la base d'éléments chiffrés. Pour autant, et en s'exprimant à titre personnel, elle a jugé que les assurés sociaux du secteur privé, qui ont déjà réalisé d'importants efforts dans un passé récent, ne pourront consentir à une nouvelle diminution du niveau de leurs retraites. Cette problématique est d'ailleurs encore plus sensible pour les régimes complémentaires que pour les régimes de base. Il conviendra sans doute de réfléchir à une augmentation des ressources de l'assurance vieillesse, par le biais d'une hausse des cotisations, d'une part, et de la recherche de ressources nouvelles, d'autre part. A ce titre, elle s'est prononcée en faveur d'une remise à plat des politiques d'exonération de charges des entreprises, ainsi que de l'élargissement de l'assiette des cotisations à l'intéressement, à la participation et à d'autres formes de rémunération.

Elle s'est inquiétée de voir les assurés sociaux du secteur privé en quelque sorte livrés à eux-mêmes, face à la perspective d'une diminution inexorable du taux de remplacement des régimes de retraite de base et des organismes de retraite complémentaire. La puissance publique donne d'ailleurs l'impression de vouloir repousser, sinon même éluder, les choix douloureux qui s'imposent pour sécuriser le financement des retraites. Le contraste avec les ressortissants d'autres régimes qui, eux, ont la chance de bénéficier de la sollicitude de l'Etat n'en est que plus visible.

Elle a ensuite estimé qu'il n'est plus possible de considérer isolément chaque branche de la sécurité sociale, mais qu'il convient de raisonner globalement sur les conséquences du vieillissement de la population pour l'effort social de la nation dans son ensemble. Il faut dégager des priorités, faire des choix et affecter les ressources disponibles en conséquence.

A la lumière des observations formulées par la Cour des comptes sur la situation actuelle du FSV, M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, s'est interrogé sur le crédit que l'on peut accorder aux garanties apportées par l'Etat. Il en va de même pour les éventuelles clauses de rendez-vous dont la puissance publique pourrait chercher à s'affranchir. En conséquence, il s'est demandé s'il ne conviendrait pas même d'élever au niveau organique, voire constitutionnel, le respect de ces principes.

Après avoir remercié le Sénat pour son soutien, Mme Danièle Karniewicz a rappelé qu'elle entend obtenir de l'Etat le paiement des sommes importantes que le FSV doit au régime général, non seulement en intérêts mais aussi en capital.

Participation et actionnariat salarié - Examen du rapport

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, sous la présidence de M. Nicolas About, président, puis de M. Jean-Marc Juilhard, secrétaire, la commission a procédé à l'examen du rapport de Mme Isabelle Debré sur le projet de loi n° 15 (2006-2007), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié.

Après avoir salué l'action de Jean Chérioux, longtemps spécialiste de la participation à la commission des affaires sociales, Mme Isabelle Debré, rapporteur, a évoqué l'élargissement progressif du périmètre du projet de loi. Initialement consacré à la participation, l'intéressement, l'épargne salariale et l'actionnariat salarié, ce texte a été complété dès l'étape de son élaboration avec diverses mesures de droit du travail, avec des dispositions relatives à la commercialisation des produits d'épargne, puis, sur lettre rectificative, avec des dispositions relatives au chèque-transport et à la cotation en bourse des clubs sportifs. En raison de sa spécificité, l'examen de l'article traitant de ce dernier sujet a d'ailleurs été délégué à la commission des affaires culturelles. Lors de la première lecture, l'Assemblée nationale a recentré le projet de loi sur son objet initial en supprimant une quinzaine d'articles.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a ensuite rappelé que l'ancien Premier ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, a été à l'origine de ce texte en décidant de relancer le débat sur la participation et en demandant à deux parlementaires en mission, MM. Jacques Godfrain et François Cornut-Gentille, de formuler des propositions.

Les deux premiers titres du projet de loi, traitant de la participation, s'inscrivent dans le projet du général de Gaulle qui, dès les années 1960, voyait dans la participation la possibilité d'associer le capital et le travail au service du progrès social. Les trois dimensions identifiées à cette époque - participation au résultat, au capital et à la gestion de l'entreprise -sont présentes dans le projet de loi. Le concept s'est néanmoins beaucoup diversifié depuis lors. On distingue aujourd'hui :

- la participation au sens strict, qui conduit les entreprises de plus de cinquante salariés à leur verser une partie des bénéfices, les sommes correspondantes restant bloquées pendant cinq ans ;

- l'intéressement, facultatif et fonction des résultats et des performances de l'entreprise, dont le montant est immédiatement disponible pour les salariés ;

- les plans d'épargne salariale, qui accueillent une part importante de la participation et de l'intéressement versés aux salariés et comprennent les plans d'épargne d'entreprise (PEE), les plans d'épargne interentreprises (PEI) et les plans d'épargne pour la retraite collectifs (Perco) ;

- l'actionnariat salarié, fortement lié à l'épargne salariale dans la mesure où les sommes placées dans les plans d'épargne peuvent être investies en titres de l'entreprise, généralement par l'intermédiaire de fonds communs de placements en entreprise (FCPE).

Puis Mme Isabelle Debré, rapporteur, a détaillé les six objectifs principaux du projet de loi.

Le premier objectif est de favoriser la diffusion de l'ensemble de ces instruments, notamment dans les petites et moyennes entreprises (PME) où elle reste limitée. En effet, si 54 % des salariés bénéficient de la participation, de l'intéressement ou d'un PEE, ils sont dans 92 % des cas employés dans des entreprises de plus de cinquante salariés.

A cette fin, le texte prévoit que les branches négocient dans un délai de trois ans un accord de participation « clé en main », susceptible d'être repris par les entreprises de la branche. Dans le même souci, il autorise la conclusion d'accords « d'intéressement de projet » permettant à plusieurs entreprises engagées dans un projet commun d'intéresser les salariés à la bonne exécution de celui-ci ; il facilite la mise en place de la participation ou de l'intéressement dans les groupements d'intérêt économique (GIE) et dans les groupements d'employeurs et il crée une procédure de contrôle a priori par les directions départementales du travail afin de sécuriser juridiquement les accords d'intéressement, de participation et les règlements de plans d'épargne salariale. Il prévoit également, à l'initiative de l'Assemblée nationale, la remise d'un rapport au Parlement sur la politique d'intéressement dans le secteur public.

Le projet de loi a pour deuxième objectif l'augmentation des montants perçus par les salariés grâce au versement d'un supplément d'intéressement ou de participation au titre de l'exercice clos. Cette somme, dénommée par l'Assemblée nationale « dividende du travail », est versée sur décision du conseil d'administration et bénéficie du régime fiscal et social de l'intéressement ou de la participation. Par ailleurs, le projet de loi propose que, désormais, le bénéfice fiscal pris en compte pour déterminer le montant de la participation ne soit plus diminué des exonérations fiscales ni du report des déficits antérieurs. L'Assemblée nationale a toutefois décidé de conserver la possibilité de reporter les déficits, dans la limite des trois exercices précédents et de manière illimitée quand l'entreprise a conclu un accord de participation dérogatoire. Mme Isabelle Debré, rapporteur, a indiqué qu'elle proposerait de porter à cinq exercices l'autorisation de report des déficits.

Le troisième objectif du texte est de favoriser la participation des salariés au capital de leur entreprise. A cette fin, les entreprises pourront déduire de leurs résultats fiscaux les charges afférentes à la distribution d'actions gratuites aux salariés, la reprise d'entreprises par les salariés sera facilitée et les fonds communs de placement d'entreprise (FCPE) seront autorisés à faire partie d'un pacte d'actionnaires afin de favoriser la stabilité de l'actionnariat ou la liquidité du fonds.

Le quatrième objectif est de renforcer la participation des salariés à la gestion de leur entreprise. Sur ce point, le texte rend obligatoire la représentation des salariés actionnaires au conseil d'administration des sociétés dont ils détiennent plus de 3 % du capital.

L'Assemblée nationale a adopté plusieurs dispositions nouvelles inspirées par des intentions équivalentes : interdiction aux sociétés privatisées entre 1986 et 1988 de ramener en deçà d'un certain seuil le nombre des représentants des salariés au conseil d'administration ; amélioration de l'information du comité d'entreprise sur la participation et sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ; droit accordé aux partenaires sociaux de substituer aux obligations légales d'information du comité d'entreprise des obligations fixées de manière contractuelle, telle la remise au comité d'un rapport annuel de synthèse à la place des multiples documents actuellement prévus par la loi.

Le cinquième objectif est d'améliorer la cohérence des dispositifs existants. Il s'agit en particulier d'orienter vers les plans d'épargne d'entreprise, puis vers les Perco, les sommes issues de la participation ou de l'intéressement. A cette fin, le texte initial obligeait les entreprises disposant d'un régime de participation à se doter d'un PEE mais l'Assemblée nationale a rétabli la possibilité d'affecter les fonds à un compte courant bloqué dès lors que l'entreprise institue un PEE par ailleurs. De même, le projet de loi rend obligatoire la conduite d'une négociation pour l'instauration d'un Perco dans les entreprises disposant d'un PEE depuis plus de cinq ans et permet aux anciens salariés de continuer à effectuer des versements sur leur ancien Perco si leur nouvelle entreprise en est dépourvue.

Le dernier objectif est de renforcer l'information et la formation des salariés sur l'épargne salariale. A cet égard, l'Assemblée nationale a amélioré le régime du livret d'épargne salariale, suivant l'une des préconisations du rapport Godfrain-Cornut-Gentille. Dans la même inspiration, les formations à la participation, à l'intéressement et à l'épargne salariale seront intégrées à la formation professionnelle continue et un crédit d'impôt sera institué au bénéfice des PME pour la formation des salariés. Mme Isabelle Debré, rapporteur, a indiqué qu'elle proposerait d'y ajouter la formation à l'économie de l'entreprise.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a ensuite présenté les dispositions du projet de loi n'entretenant pas de lien direct avec le thème de la participation.

En matière de droit du travail, le texte propose la sécurisation des parcours professionnels grâce à la mise à disposition de salariés entre entreprises, organismes de recherche et établissements d'enseignement supérieur au sein d'un même pôle de compétitivité. Par ailleurs, un nouveau congé permettra aux salariés menacés de licenciement de bénéficier d'actions de formation, d'accompagnement, et d'accomplir des périodes de travail en entreprise. Enfin, il prévoit la ratification de l'ordonnance instituant le contrat de transition professionnelle à titre expérimental.

En ce qui concerne l'emploi des seniors, le projet de loi supprime la contribution Delalande à compter du 1er janvier 2010. Ce dispositif était en effet un puissant frein à l'embauche. Sur le même sujet et sans en contester le fond, l'Assemblée nationale a supprimé deux dispositions visant à interdire les mises à la retraite d'office avant soixante-cinq ans et aménageant les règles de cumul emploi-retraite en ce qui concerne le tutorat, considérant qu'elles trouveraient mieux leur place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

Pour des motifs tenant aussi à l'inadéquation du thème central du projet de loi, elle a par ailleurs supprimé deux articles consacrés aux conseils de prud'hommes - l'un portant sur l'indemnisation des conseillers prud'homaux, l'autre sur la tenue des listes électorales -, ainsi que diverses mesures relatives au décompte des effectifs dans l'entreprise, à l'amélioration de la législation dans le domaine de l'apprentissage, à la récupération des indus de certaines allocations et à la transposition par ordonnance d'une directive communautaire sur la solvabilité des créances des salariés en cas de faillite transnationale.

Seul subsiste, à ce stade de l'examen du texte, un article qui accorde un nouveau délai pour procéder à la recodification du code du travail, mais le rapporteur a indiqué son intention de proposer le rétablissement de ceux de ces articles peu susceptibles de trouver une place dans un autre texte de loi avant la fin de la législature.

Evoquant ensuite le chèque-transport, elle a indiqué que ce nouveau dispositif s'adresse principalement aux entreprises situées en dehors de l'Ile-de-France, qui pourront préfinancer les dépenses de transport collectif de leurs salariés ou leur accorder chaque année 100 euros lorsqu'ils sont dans l'obligation d'utiliser leur véhicule pour rejoindre leur lieu de travail. Cette mesure favorable, incitative et non obligatoire, représente un effort financier évalué à 220 millions d'euros d'exonérations sociales et à 66 millions d'exonérations fiscales.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a enfin évoqué le dernier volet du projet de loi, consacré à la commercialisation des produits d'épargne et au financement de l'économie.

Le projet de loi, tel qu'issu des travaux de l'Assemblée nationale, propose que les mandataires sociaux ne puissent plus lever leurs stock-options pendant l'exercice de leurs fonctions ou qu'ils soient dans l'obligation de conserver une partie des titres levés jusqu'à la fin de leur mandat. Ce mécanisme d'encadrement a été étendu à la détention d'actions gratuites, dont la pratique tend aujourd'hui à se répandre. Pour la mise en oeuvre de ce dispositif, un rôle majeur sera conféré à l'Autorité des marchés financiers, qui sera informée des pratiques des entreprises. Mme Isabelle Debré, rapporteur, a indiqué son intention de proposer l'adoption en l'état de ces dispositions.

En ce qui concerne les mesures intéressant à proprement parler la commercialisation des produits de l'épargne, issues pour la plupart des propositions du rapport Delmas-Marsalet de novembre 2005, un seul article du projet de loi initial a été conservé par l'Assemblée nationale, car il permet de combler un vide juridique après l'annulation par le Conseil d'Etat des dispositions du décret de 2004 sur le fichier des démarcheurs financiers. Mme Isabelle Debré, rapporteur, a estimé que la plupart des dispositions relatives à la commercialisation de l'épargne étaient effectivement des « cavaliers législatifs ».

M. Guy Fischer a déploré à son tour qu'un grand nombre de mesures du texte n'entretiennent aucun rapport avec la participation, tel l'article 44 relatif aux clubs sportifs. Il a estimé qu'en dépit de l'effet d'affichage de ce projet de loi, la participation reste liée à la question des salaires, jugeant qu'à travers ce texte opportuniste, le Gouvernement poursuit son objectif de confiscation du pouvoir d'achat des salariés. Il a ensuite souligné le caractère contestable de la notion de dividende du travail introduite par l'Assemblée nationale. Il a jugé dérisoires les mesures relatives à la sécurisation des parcours professionnels alors que la période actuelle est marquée par un développement de la précarité et de l'émiettement des formes du travail. Pour ces motifs, le groupe communiste républicain et citoyen n'approuvera pas en l'état le rapport présenté.

A titre liminaire, M. Jean-Pierre Godefroy a regretté que la présentation du rapporteur ne soit pas plus critique, notamment à l'égard des « cavaliers » laissés dans le projet de loi. Puis il a souligné la rupture introduite par la notion de dividende du travail qui conduit à substituer au salaire une rémunération différée et exonérée de charges sociales, sans compensation pour les organismes de sécurité sociale. Il a ensuite exprimé son profond désaccord avec l'article visant à regrouper dans un rapport annuel l'ensemble des informations transmises au comité d'entreprise tout au long de l'année. Ce dispositif aboutirait en effet à retirer aux représentants des salariés les moyens d'information dont ils disposent actuellement. Il s'agit d'une véritable sous-information organisée.

M. Jean-Pierre Godefroy s'est ensuite interrogé sur les modalités de fonctionnement du congé de mobilité : quelles seront les bases sur lesquelles le contrat de travail pourrait être rompu à l'issue de ce congé ? Quelles seront les conséquences pour le salarié d'un refus d'entrer dans un dispositif de congé de mobilité ? Quelle sera l'étendue de ses droits au chômage s'il ne retrouve pas d'emploi à l'issue du congé de mobilité ? En définitive, ce dispositif semble n'avoir pour seule ambition que de faire baisser les statistiques du chômage et réduire le coût de son indemnisation.

S'agissant du dispositif de chèques-transport, son insertion dans le projet de loi est due uniquement, à son sens, au fait que le Gouvernement n'a pas voulu restaurer la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) flottante et l'impact de cette mesure risque de n'être que limité.

Revenant à la participation, M. Jean-Pierre Godefroy a regretté que les entreprises puissent échapper à leurs obligations en déduisant de leur bénéfice leur déficit des exercices antérieurs. Il a ensuite estimé que la représentation des salariés au conseil d'administration de l'entreprise ne doit pas se limiter aux seuls salariés actionnaires et qu'il convient d'assurer une représentation de cette catégorie en tant que telle. Sur les dispositions de l'article 15 en particulier, il est vraisemblable que les sociétés concernées feront en sorte de ne jamais atteindre le palier de 3 % de leur capital pour interdire l'accès des salariés à leur conseil d'administration. S'agissant des dispositions autorisant la distribution d'actions gratuites, il a déclaré être opposé à une pratique qui consiste en réalité à permettre à l'employeur de ne pas acquitter de cotisations sociales.

Enfin, il a déploré l'insertion dans le projet de loi des dispositions relatives aux clubs sportifs, sujet sans rapport avec le texte. L'argument suivant lequel cet article répond à une exigence des instances communautaires ne paraît pas très convaincant dans la mesure où le nombre de clubs concernés en Europe ne dépasse pas la douzaine.

Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste ne votera pas le rapport présenté.

M. André Lardeux a regretté la multiplication de textes trop « bavards ». S'il s'est déclaré globalement en accord avec la philosophie générale du projet de loi, il a estimé qu'il conviendra de veiller à ce que la participation ne se substitue pas au salaire.

Il a ensuite exprimé deux réserves : la première pour déplorer que l'on ne supprime pas l'article, introduit à l'Assemblée nationale, qui prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur l'intéressement dans la fonction publique, alors que la commission est généralement sceptique sur ce type de mesure ; la seconde pour contester les dispositions relatives au chèque-transport, fausse bonne idée à son sens et dont on voit mal comment elle s'articule avec le dispositif de versement-transport actuellement en vigueur. Le Gouvernement devra prendre des engagements sur la compensation des exonérations de charges sociales liées à cette mesure, évaluées à 220 millions d'euros. Il a douté de l'intérêt d'une disposition dont le coût apparaît élevé et qui ne touchera en définitive qu'un nombre limité de bénéficiaires. Sous ces réserves, il adoptera les conclusions du rapporteur.

Mme Catherine Procaccia s'est interrogée sur l'intérêt que présente le fait d'ajouter au champ de la formation professionnelle continue les actions de formation relatives à l'intéressement, à la participation et aux plans d'épargne salariale. Il paraîtrait à tout le moins opportun de limiter cette nouvelle possibilité de formation aux représentants du personnel.

Elle a ensuite souligné l'utilité du congé de mobilité qui prévoit une procédure de licenciement de gré à gré, car cette mesure est très demandée par les directions des ressources humaines.

Enfin, approuvant le principe de la suppression de la contribution Delalande, elle a considéré trop tardive la date du 1er janvier 2010.

En réponse aux différents intervenants, Mme Isabelle Debré, rapporteur, a exprimé ses propres réticences à l'égard de la notion de « dividende du travail », dont la formule n'est pas très opportune. Afin d'écarter tout risque de substitution au détriment des salaires, elle proposera un amendement rétablissant le plafond collectif supprimé par l'Assemblée nationale.

Elle a précisé que le contrat rompu à l'issue du congé de mobilité le serait d'un commun accord entre l'employeur et le salarié et qu'à défaut d'accord, la procédure de licenciement poursuivrait son cours.

Sur la question du regroupement en un seul document annuel des informations transmises au comité d'entreprise, il ne s'agit que d'une faculté qui ne pourra intervenir qu'après un accord collectif et qui ne porte de surcroît que sur certaines matières.

Elle a indiqué que la mesure relative au chèque-transport ferait l'objet d'une compensation.

S'agissant de la suppression de la contribution Delalande, elle a précisé que la date d'abrogation de 2010 ne vaudrait que pour les personnes déjà embauchées. Celles qui seront embauchées après l'adoption de la loi ne rentreront plus dans le champ d'application de la contribution. En tout état de cause, elle proposera à la commission un amendement avançant au 1er janvier 2008 la date d'entrée en vigueur de l'abrogation de la contribution Delalande pour les salariés déjà embauchés.

En réponse à M. Roland Muzeau, Mme Isabelle Debré, rapporteur, a admis que les dispositions de l'article 22 relatives au prêt de main-d'oeuvre pourraient avoir pour effet d'écarter une partie des actuelles règles jurisprudentielles, mais elle a rappelé que le projet de loi prévoit que le prêt ne doit pas porter préjudice aux salariés concernés.

La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements présentés par le rapporteur.

La commission a adopté l'article premier A (notion de dividende du travail) sans modification.

A l'article premier (supplément d'intéressement ou de réserve de participation), outre deux amendements rédactionnels, elle a adopté un amendement tendant à réaffirmer le caractère collectif du supplément d'intéressement ; puis elle a adopté deux amendements visant respectivement à rétablir le plafond global de l'intéressement supprimé par l'Assemblée nationale et à prévoir un plafond global pour la réserve spéciale de participation ; enfin, elle a adopté un amendement visant à préciser le régime fiscal et social applicable au supplément d'intéressement ou de participation.

La commission a adopté sans modification l'article premier bis (réforme du livret d'épargne salariale).

A l'article 2 (intéressement de projet), elle a adopté un amendement renforçant l'autonomie de l'accord d'intéressement de projet par rapport à l'accord d'intéressement de base afin d'en faciliter la mise en oeuvre.

A l'article 3 (intéressement dans les groupements d'employeurs ou dans les groupements d'intérêt économique), la commission a adopté un amendement de suppression du paragraphe V, qui apparaît difficilement applicable en raison des règles comptables propres aux groupements d'intérêt économique.

A l'article 4 (comités de suivi), elle a adopté un amendement de coordination.

A l'article 5 (négociation de régimes de participation au niveau des branches), la commission a adopté trois amendements : le premier tend à faire figurer les dispositions prévues par cet article dans la section du code du travail applicables tant aux entreprises de moins de cinquante salariés qu'aux entreprises de cinquante salariés et plus ; le deuxième vise à préciser que la mise en place d'un accord de participation négocié au niveau de la branche demeure facultative ; le troisième a pour objet d'inscrire la reconnaissance du droit du chef d'entreprise à mettre en place unilatéralement la participation lorsque les négociations ont échoué.

A l'article 6 (modification de l'assiette de calcul de la réserve spéciale de participation), elle a adopté deux amendements, l'un proposant de faire passer la durée de report des déficits autorisés de trois à cinq ans, l'autre tendant à repousser au 1er janvier 2008 l'entrée en vigueur des nouvelles règles de report des déficits.

A l'article 6 bis (prise en compte de l'évolution de la valeur des actions de l'entreprise dans la formule dérogatoire de participation), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

Elle a adopté sans modification l'article 7 (versements au PEE effectués par le conjoint d'un chef d'entreprise exerçant une activité non rémunérée).

A l'article 8 (modalités de conclusion et de dépôt des accords de participation et d'intéressement et des règlements de plan d'épargne salariale), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

Elle a maintenu la suppression de l'article 9 (caractère obligatoire du plafond de répartition de la réserve spéciale de participation) et adopté sans modification l'article 9 bis (présentation d'un rapport relatif à la politique d'intéressement dans le secteur public).

La commission a ensuite adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel avant l'article 10, ajoutant la mention des plans d'épargne salariale dans l'intitulé du chapitre III du titre IV du livre quatrième du code du travail.

A l'article 10 (affectation des droits des salariés à un plan d'épargne d'entreprise), elle a adopté un amendement prévoyant que l'obligation faite aux entreprises de se doter d'un plan d'épargne d'entreprise s'applique à compter de la mise en oeuvre des accords de participation conclus après la promulgation de la loi.

A l'article 11 (plan d'épargne retraite collectif), la commission a adopté un amendement visant à permettre aux personnes sans emploi de continuer à effectuer des versements sur le Perco de leur ancienne entreprise.

La commission a adopté sans modification l'article 12 (imposition des droits inscrits sur un compte épargne temps et utilisés pour abonder un PEE ou un Perco).

A l'article 13 (simplification du fonctionnement des plans d'épargne interentreprises), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 14 (liquidité des titres placés sur un FCPE), elle a adopté un amendement de coordination.

Après l'article 14, la commission a adopté un amendement portant article additionnel qui autorise les ouvriers d'Etat travaillant pour la direction des constructions navales (DCN) à bénéficier d'un plan d'épargne d'entreprise.

A l'article 14 bis (association du comité d'entreprise à la négociation des accords de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

La commission a adopté sans modification l'article 14 ter (incitation à la programmation de mesures de développement de l'activité dans les bassins d'emploi concernés par des restructurations).

La commission a adopté un amendement rédactionnel à l'article 14 quater (adaptation, par voie d'accord collectif, des modalités d'information du comité d'entreprise et des salariés), ainsi qu'à l'article 14 quinquies (organisation de débats en comité d'entreprise sur l'évolution de la démarche participative).

La commission a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 14 quinquies, tendant à prévoir que l'accord transférant au comité central d'entreprise la gestion d'activités communes est valable s'il n'est pas frappé d'opposition.

Elle a adopté sans modification les articles 15 (représentation des salariés actionnaires) et 15 bis (nombre de représentants salariés au conseil d'administration ou de surveillance des sociétés privatisées sur la base de la loi de 1986).

A l'article 16 (encouragement à l'actionnariat salarié), la commission a adopté un amendement visant à mieux articuler entre elles les dispositions du code du travail et du code du commerce relatives à l'attribution d'actions gratuites.

A l'article 16 bis (possibilité offerte au salarié de demander la disponibilité immédiate des produits des actifs détenus dans le cadre de l'actionnariat salarié), elle a adopté un amendement clarifiant sur le plan juridique la disposition adoptée à l'Assemblée nationale qui autorise les salariés à disposer immédiatement du produit des actifs qu'ils détiennent dans un FCPE ou une Sicav.

A l'article 17 (participation d'un FCPE à un pacte d'actionnaires), la commission a adopté un amendement supprimant le renvoi à un décret d'application devenu superflu.

A l'article 18 (reprise de l'entreprise par les salariés), elle a adopté un amendement tendant à préciser que les sommes ou valeurs affectées au fonds de reprise de l'entreprise sont bloquées jusqu'au terme de l'opération de reprise sauf cas d'invalidité ou de décès du salarié, et instituant un fonds de liquidités à hauteur de 5 % des sommes investies pour tenir compte de ces cas de déblocages anticipés.

La commission a adopté sans modification l'article 19 (crédit d'impôt pour le rachat d'entreprise).

A l'article 20 (attribution d'actions gratuites), elle a adopté un amendement de coordination avec les dispositions de l'article 20 quater.

A l'article 20 bis (extension aux entreprises contrôlées par plusieurs organes centraux des règles applicables en matière d'options de souscription ou d'achat d'actions et en matière d'attribution d'actions gratuites), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

Elle a adopté sans modification l'article 20 ter (possibilité d'affiliation d'un établissement de crédit à plusieurs organes centraux).

A l'article 20 quater (assouplissement des règles de blocage des actions et parts placées sur un plan d'épargne d'entreprise), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

Elle a adopté sans modification l'article 21 (corrections et précisions juridiques).

La commission a adopté un amendement portant sur l'intitulé du chapitre IV, par coordination avec les amendements aux articles 21 bis et 21 ter.

A l'article 21 bis (intégration des actions de formation à l'intéressement, à la participation et aux plans d'épargne salariale dans le champ de la formation professionnelle), la commission a adopté un amendement étendant le champ de la formation professionnelle continue aux actions de formation relatives à l'économie de l'entreprise.

A l'article 21 ter (crédit d'impôt au bénéfice des petites entreprises offrant des actions de formation aux dispositifs d'épargne salariale et d'actionnariat salarié à leurs salariés), elle a adopté deux amendements, le premier étendant le dispositif de crédit d'impôt aux dépenses exposées par les petites et moyennes entreprises pour les actions de formation de leurs salariés à l'économie de l'entreprise, le second tendant à insérer une référence oubliée dans le projet de loi initial.

A l'article 22 (expérimentation du prêt de personnel dans le cadre des pôles de compétitivité), la commission a adopté deux amendements, le premier visant à autoriser les établissements d'enseignement supérieur à mettre à disposition plus facilement leurs salariés dans le cadre des pôles de compétitivité, le second visant à permettre la mise à disposition des salariés en contrat à durée déterminée dans le cadre de ces pôles.

A l'article 23 (congé de mobilité), outre un amendement rédactionnel, elle a adopté un amendement supprimant la possibilité d'accomplir des périodes de travail en application d'une convention de mise à disposition au sein d'un pôle de compétitivité et supprimant la mention selon laquelle le congé est suspendu pendant ces périodes de travail. Elle a également adopté un amendement précisant que le salarié est dispensé d'exécuter son préavis s'il accepte le congé de mobilité.

A l'article 24 (ratification de l'ordonnance relative au contrat de transition professionnelle), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

La commission a maintenu la suppression des articles 25 (recours au travail temporaire pour compléter les revenus d'un temps partiel) et 26 (champ des entreprises tenues de proposer un congé de reclassement).

A l'article 27 (extinction de la contribution Delalande), elle a adopté un amendement avançant de deux ans, au 1er janvier 2008, la date de suppression de la contribution Delalande.

La commission a maintenu la suppression des articles 28 (limite d'âge pour la mise à la retraite d'office des salariés), 29 (tutorat), 30 (indemnisation des activités prud'homales) et 31 (publicité des données relatives à l'inscription sur les listes électorales prud'homales).

Elle a rétabli dans la rédaction du projet de loi initial les articles 32 (clarification du décompte des effectifs et du droit de vote aux élections professionnelles) et 33 (modalités d'enregistrement des contrats d'apprentissage et d'utilisation de la fraction de la taxe d'apprentissage versée au Trésor public).

La commission a maintenu la suppression de l'article 34 (conditions de récupération des indus d'allocation temporaire d'attente et d'allocation de solidarité spécifique). Elle a adopté sans modification l'article 35 (prolongation de l'habilitation pour la recodification du code du travail). Elle a maintenu la suppression de l'article 36 (habilitation pour la transposition des obligations communautaires en matière de garantie des créances salariales lors des faillites transnationales).

A l'article 37 A (conditions d'exercice des options d'achat d'actions attribuées aux mandataires sociaux ou aux membres du directoire), la commission a adopté un amendement de précision.

La commission a maintenu la suppression des articles 37 (obligations en matière de publicité des producteurs et distributeurs de produits financiers), 38 (devoir de conseil des prestataires de services d'investissement), 39 (devoir de conseil en matière d'assurance vie), et 40 (instauration de codes professionnels de bonne conduite). Elle a adopté sans modification l'article 41 (aménagement des règles d'enregistrement des démarcheurs financiers). Elle a maintenu la suppression de l'article 42 (protection des droits des souscripteurs et bénéficiaires de contrats d'assurance vie). Elle a adopté sans modification les articles 43 (ratification de l'ordonnance relative aux retraites professionnelles supplémentaires), 44 (abrogation de l'interdiction pour les sociétés anonymes sportives de faire appel public à l'épargne), 45 (création du chèque-transport), 46 (régime fiscal et social du chèque-transport), 47 (évaluation du chèque-transport), et 48 (application outre-mer de certaines dispositions de la présente loi).

M. Alain Vasselle a indiqué qu'il se réservait le droit de ne pas voter le projet de loi si la compensation des exonérations de cotisations sociales liées au dispositif de chèque-transport n'est pas garantie.

La commission a ensuite adopté le projet de loi ainsi amendé.

Jeudi 26 octobre 2006

- Présidence de M. Nicolas About, président -

Loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 - Audition de M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat

La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, s'est déclaré très heureux de cette audition, permettant au ministre du budget d'apporter sa part de vérité sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il a constaté que la sécurité sociale est en meilleure situation, notamment la branche maladie, grâce à la réforme entreprise par le Gouvernement qui a le grand mérite d'avoir associé tous les acteurs : patients, professionnels de santé, secteur du médicament et établissements de santé. Cette réforme a introduit des mesures innovantes telles que la franchise de un euro.

La branche famille a réduit son déficit de 50 %, la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) est revenue à l'équilibre et la branche vieillesse, en déficit, subit les conséquences conjuguées de trois facteurs : le papy-boom, les départs anticipés et un changement de comportement des assurés, lié au rendez-vous de 2008.

Les améliorations constatées tiennent aux efforts de l'ensemble des acteurs mais également à l'importance des contributions versées par l'Etat. Il est à cet égard regrettable que les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale soient aussi complexes et opaques car cette situation alimente les critiques et les contradictions : il serait nécessaire d'apporter plus de transparence et de simplicité à ces relations. Ainsi, l'Etat contribue, pour 62 milliards d'euros à la sécurité sociale, dont 22 milliards au titre de diverses prestations qu'il finance (allocation aux adultes handicapés [AAH], allocation de parent isolé [API]...), 20 milliards d'impôts et taxes affectés aux allégements de charges, 11 milliards pour sa contribution employeur et 9 milliards de droits sur les tabacs. Cette contribution est d'ailleurs légitime.

Il faut aussi souligner, car cet aspect des choses est insuffisamment mentionné, que certaines politiques menées par l'Etat accroissent les ressources de la sécurité sociale. Par exemple, la réforme fiscale suscitera, à son bénéfice, un surcroît de recettes et notamment l'augmentation de 500 millions d'euros en 2007 de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus des patrimoines fonciers.

En 2007 également, l'Etat prendra en charge les frais financiers liés à sa créance pour 160 millions d'euros, les allégements supplémentaires de charges sociales pour les entreprises de moins de vingt salariés, à hauteur de 320 millions d'euros, et laissera à la caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) le surplus constaté sur le panier de recettes fiscales transférées pour environ 320 millions d'euros.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, a estimé que le sujet principal est l'avenir de la sécurité sociale et du modèle social français. Celui-ci doit relever trois défis : la soutenabilité financière du système, le vieillissement démographique et ses conséquences en matière de santé, de dépendance et de retraite et, enfin, la montée de nouveaux risques économiques, climatiques, d'épidémies ou liés au terrorisme, par exemple. Dans ce contexte, la première question à laquelle il faut répondre est celle de la maîtrise de la dynamique des dépenses. Même si certains pensent qu'un tel objectif est irréaliste, le rapport Pébereau en a bien montré l'impérieuse nécessité. L'enjeu est donc de travailler à un processus de maîtrise continue des dépenses et d'évaluation des performances. A cet égard, il a regretté que l'on n'ait pas mis en place pour la sécurité sociale des indicateurs de performance, comme l'a fait l'Etat. Il a cité, à titre d'exemple, les programmes d'audits lancés par son ministère sur plus de 100 milliards de dépenses. Parmi ces audits, certains ont été consacrés aux dépenses sociales et à la gestion de certaines prestations, telles l'allocation aux adultes handicapés (AAH), l'allocation de parent isolé (API) ou l'allocation de solidarité spécifique (ASS). Ils ont montré que ces prestations n'étaient ni bien ni équitablement gérées. Il a également donné l'exemple de la nouvelle gestion du patrimoine immobilier de l'Etat avec la création de l'Agence France Domaine et le lancement d'un vaste programme de cessions dont les résultats sont déjà très significatifs. Il a donc appelé à un travail identique à la sécurité sociale, en particulier pour l'optimisation du patrimoine immobilier des hôpitaux. Il a fait valoir que ces opérations ne présentent pas seulement un intérêt financier ; elles permettent aussi la création d'une dynamique d'optimisation des moyens.

Outre la maîtrise des dépenses, la deuxième question fondamentale est celle du financement de la sécurité sociale. L'augmentation des prélèvements obligatoires est exclue car elle pourrait peser sur le pouvoir d'achat des ménages, ce qui n'est pas souhaitable pour la croissance économique. Il convient donc de lancer un vrai débat sur le degré de protection sociale souhaité et le degré de prélèvements nécessaire pour y faire face. Afin d'avoir une vision globale de ces prélèvements et d'éviter les situations de malentendus récurrentes entre les ministères financiers et les ministères sociaux, la création d'un ministère des comptes publics pourrait s'avérer utile.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a remercié le ministre d'avoir accepté d'être entendu par la commission des affaires sociales. Il a rappelé que la situation de chaque branche de la sécurité sociale est bien connue de ses collègues, chacun ayant la préoccupation de la maîtrise des dépenses. Les inquiétudes de la commission résultent de l'observation suivant laquelle un détournement trop fréquent des recettes de la sécurité sociale est opéré pour un objet étranger à ses missions. Cela a été le cas avec le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (Forec), aujourd'hui supprimé, mais dont les recettes, revenues au budget de l'Etat, n'alimentent plus la sécurité sociale. Le problème est d'assurer une juste répartition des recettes entre celles qui viennent abonder le budget de l'Etat et celles qui sont affectées aux quatre branches de la sécurité sociale.

Puis M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a rappelé que le FSV a été créé par le gouvernement Balladur pour alléger la branche vieillesse des dépenses de solidarité. Le FSV doit en principe être équilibré, comme l'a souligné la Cour des comptes dans son dernier rapport. Il en est de même pour le fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (Ffipsa). Or, ces deux organismes accusent aujourd'hui des déficits importants. Quelles sont les intentions du Gouvernement pour traiter ces déficits et les dettes accumulées ? Le Gouvernement est-il favorable à la proposition de la Cour des comptes de supprimer ces deux organismes ? Leurs dettes seront-elles bien inscrites dans le bilan d'ouverture de l'Etat au 1er janvier 2006 ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, a indiqué que le panier de recettes affecté à la sécurité sociale au titre de la compensation des allégements généraux de charges sociales a une dynamique bien supérieure à celle des anciennes recettes du Forec et qu'il ne peut laisser dire que la sécurité sociale se soit trouvée lésée lorsque ce fonds a été supprimé.

M. Guy Fischer s'est élevé contre le fait que le budget de la sécurité sociale constitue une variable d'ajustement du budget de l'Etat et de la politique de l'emploi.

Puis M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, a rappelé que le FSV a été créé pour répondre aux exigences de solidarité nationale, en l'occurrence le minimum vieillesse qui ne relève pas de la logique de l'assurance. Ce fonds s'améliore avec la situation de l'emploi et il a donc vocation à revenir à l'équilibre avec la décrue très nette du chômage observée aujourd'hui. Ses déficits ne concernent pas l'Etat mais les relations entre cet organisme et la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (Cnav). Il en serait de même si le FSV constatait des gains car ceux-ci ne seraient pas affectés à l'Etat. Aussi, il n'y a pas de raison que les dettes du FSV apparaissent dans le bilan de l'Etat. En tout état de cause, le ministre s'est déclaré opposé à la suppression du FSV qui apporte une réponse à la solidarité au titre de la vieillesse et permet en outre une pédagogie sur cette solidarité.

Le Ffipsa est également un sujet très difficile. Son budget global, qui s'élève à 15 milliards d'euros, enregistre un déficit de 2 milliards dont la moitié au titre de la vieillesse et la moitié au titre de la maladie. Cette situation conduit à retenir deux logiques distinctes pour le traitement du Ffipsa. Les difficultés de la branche vieillesse devront être examinées dans le cadre du rendez-vous de 2008 sur les retraites. Pour la branche maladie, le rapport du groupe de travail Chadelat a montré qu'il n'y avait pas de solution évidente.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, a ajouté qu'en purgeant une dette, on ne règle pas le problème des déficits. C'est pourquoi il a décidé de refuser de s'engager dans un processus de remboursement de dette si une démarche « donnant-donnant » n'est pas adoptée avec, comme priorités, la transparence des comptes et l'évaluation de la performance.

M. Nicolas About, président, a regretté que les arbitrages interministériels se fassent presque toujours en faveur de Bercy et au détriment des ministères chargés de la sécurité sociale.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, a souligné que l'Etat a fait un geste en reprenant, à la fin de 2005, 2,5 milliards d'euros de dettes du Ffipsa. Aujourd'hui, il est difficile pour l'Etat d'être le seul financeur du Ffipsa, ce qui implique de trouver des solutions complémentaires. Parmi ces solutions figurent, d'une part, de nouvelles recettes, d'autre part, un adossement au régime général.

M. Guy Fischer a souhaité savoir si l'adossement du régime agricole au régime général doit se faire au même niveau que ceux de La Poste ou de la RATP.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a rappelé qu'une disposition législative du code de la sécurité sociale impose au Gouvernement de présenter chaque année le budget du FSV en équilibre.

M. Nicolas About, président, a ajouté qu'à l'occasion de l'examen de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, le Sénat avait souhaité inclure le FSV dans le périmètre de la loi de financement, précision sans laquelle cet organisme n'aurait fait l'objet d'aucun examen parlementaire.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a interrogé le ministre sur le chiffrage exact des allégements généraux de charges sociales en 2006 et en 2007. Il a souhaité savoir pourquoi la compensation des allégements ciblés donne lieu à d'importants retards dans les versements à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss). Enfin, il a demandé au ministre son appréciation sur le récent rapport de la Cour des comptes consacré au bilan des allégements de charges sociales.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, a indiqué que le panier de recettes destiné à la compensation des allégements généraux de charges sociales devrait s'élever à 19,4 milliards d'euros en 2006 et atteindre un montant de 20,4 milliards en 2007, témoignant ainsi du calibrage très favorable pour la sécurité sociale de ce panier de recettes. Les allégements ciblés sont compensés par des crédits budgétaires en provenance notamment des ministères du travail et de l'outre-mer. On constate actuellement un retard de paiement de 1,4 milliard à ce titre, dont 40 % pour l'outre-mer. Ce retard est lié à la difficulté de prévision de ces crédits qui ont une nature limitative dans le budget de l'Etat. Leur mode de financement devra à l'évidence évoluer, de même qu'une évaluation systématique de l'utilité de ces allégements devra être effectuée. Le rapport de la Cour des comptes ne fait que développer cette idée en insistant sur la nécessité d'évaluer les dispositifs des allégements ciblés. Par ailleurs, pour rendre plus transparents, aussi bien pour les employeurs que pour les salariés, les allégements généraux, il faudrait s'orienter vers la barémisation de ces exonérations.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a interrogé le ministre sur la dette de l'Etat à l'égard de la sécurité sociale, soit environ 5 milliards d'euros au 30 juin 2006, auxquels s'ajoute 1,3 milliard de dettes anciennes. Il a souhaité savoir si le Gouvernement a l'intention de rembourser cette dette, considérant qu'on aurait pu utiliser à cet effet une partie au moins des plus-values de recettes fiscales constatées cette année. Il a estimé indispensable d'établir un plan d'apurement de cette dette, la seule prise en charge des frais financiers correspondants ne constituant qu'un pis-aller. Il a également demandé pourquoi l'intégralité des droits tabacs n'était pas affectée à la sécurité sociale. Après avoir rappelé que les déficits de la sécurité sociale, toutes branches et fonds confondus, s'élèveront à plus de 20 milliards à la fin de 2007, il a demandé au ministre comment le Gouvernement envisage de les financer. Enfin, il s'est interrogé sur les nouveaux transferts à la sécurité sociale de charges relevant de la solidarité nationale, comme, cette année encore, le plan Biotox. De même, il a insisté sur la nécessité de privilégier la question de la neutralité financière des adossements des régimes spéciaux pour le régime général plutôt que d'utiliser les soultes correspondantes pour réduire les déficits annuels de l'Etat.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, a indiqué qu'il ne faut pas poser un problème de bilan quand on a d'abord un problème de compte de résultat. Cela signifie que même si la dette de la sécurité sociale est remboursée, le problème de la dynamique des dépenses sociales et des déficits demeure entier. Si l'Etat doit bien de l'argent à la sécurité sociale, il effectue un effort indéniable en prenant en charge les frais financiers liés à cette créance. S'agissant des droits tabacs, une part déjà très importante en a été affectée à la sécurité sociale. La vraie question aujourd'hui est de répartir les financements entre les taxes sociales et les taxes fiscales. Il est nécessaire d'améliorer la lisibilité de ces prélèvements, ce qui explique, par exemple, sa ferme opposition à l'idée de créer un prélèvement sur recettes pour la sécurité sociale. Des progrès immenses ont été réalisés pour les dépenses de l'Etat grâce à la loi organique relative aux lois de finances ; il est important que la même démarche soit désormais appliquée à la loi de financement de la sécurité sociale. Il a souligné par ailleurs que le transfert des dépenses liées au plan Biotox ne s'élève qu'à 175 millions d'euros.

En réponse à M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, il a indiqué que les prévisions de retour à l'équilibre de la sécurité sociale telles qu'elles sont annexées au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 sont parfaitement sérieuses et fondées.

M. Claude Domeizel a souhaité connaître la méthode utilisée pour le calcul de la soulte de La Poste et le montant qu'elle devrait atteindre.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, a indiqué qu'il lui est difficile de répondre à ces questions car l'adossement du régime de La Poste sur le régime général est en cours de discussion et que le montant de la soulte n'est donc pas connu. Pour ces raisons, il ne figure pas dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, ce qui aurait constitué un affichage inopportun et prématuré.

M. François Autain a fait valoir que, pour la Cour des comptes, les déficits du FSV et du Ffipsa permettent avant tout de masquer le déficit de la sécurité sociale.

M. Guy Fischer a plutôt considéré que si la Cour des comptes est très claire sur la suppression du Ffipsa, elle est plus nuancée sur celle du FSV.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, a indiqué que l'article 26 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 inclut clairement les déficits du FSV et du Ffipsa dans l'équilibre général des comptes de la sécurité sociale.

M. François Autain a souhaité savoir s'il est prévu d'aligner la contribution de l'Etat employeur sur celle des entreprises dans le régime général. Il a constaté, à la suite de l'audition par la commission du président du conseil d'administration de l'Acoss, que le Gouvernement n'applique pas la loi dans ses relations financières avec la sécurité sociale et notamment les dispositions de l'article L. 139-2 du code de la sécurité sociale.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, a fait valoir qu'aucune raison ne justifie un alignement des contributions de l'Etat employeur sur celles des entreprises puisque l'Etat est son propre assureur pour un certain nombre de risques : les arrêts de travail, l'invalidité, le décès. Il serait tout à fait anormal, dans ces conditions, qu'il soit astreint à la même obligation.

Il a conclu sur l'utilité de cette audition pour lever les malentendus qui existent dans l'analyse des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.

Prélèvements obligatoires - Communication

Puis la commission a entendu une communication de M. Alain Vasselle sur le rapport du Gouvernement sur les prélèvements obligatoires et leur évolution (article 52 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances).

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a d'abord rappelé le cadre dans lequel se déroule ce débat puisqu'à l'initiative du Sénat, l'article 52 de la loi organique relative aux lois de finances a prévu le dépôt chaque année, par le Gouvernement, d'un rapport sur les prélèvements obligatoires, éventuellement accompagné d'un débat en séance publique. Ce débat a eu lieu tous les ans au Sénat depuis 2002. Il permet de mettre en perspective certaines caractéristiques de l'évolution actuelle des prélèvements sociaux et de débattre en direct et simultanément avec les ministres chargés du budget et de la sécurité sociale.

Globalement, le niveau des prélèvements obligatoires français est élevé. Il s'établit à 44 % du produit intérieur brut (PIB) en 2006 et devrait revenir à un taux légèrement inférieur en 2007, soit 43,7 %. Ce retrait recouvre des tendances divergentes selon les sous-secteurs. Ainsi, les prélèvements de l'Etat accusent une baisse sensible tandis que les prélèvements sociaux et les prélèvements au profit des collectivités locales continuent leur progression. En conséquence de cette évolution, les prélèvements sociaux devraient représenter, pour la première fois en 2006, plus de la moitié des prélèvements obligatoires, soit près de 400 milliards d'euros sur un total de 784 milliards. L'écart entre les prélèvements sociaux et les prélèvements de l'Etat est désormais supérieur à 127 milliards d'euros, équivalent à plus de deux fois le montant du produit de l'impôt sur le revenu.

Cette situation résulte d'une part, des mesures des dernières lois de financement et lois de finances ainsi que de la mise en oeuvre des réformes des retraites et de l'assurance maladie, d'autre part, de l'aboutissement d'un processus de long terme qui a entraîné un remodelage complet des prélèvements sociaux. En 2006, les prélèvements sociaux augmentent de 1,1 point de PIB sous l'effet de deux facteurs : des mesures nouvelles, dont 2 milliards de hausse de cotisations et 2,7 milliards au titre de la modification du régime des prélèvements sociaux sur les plans d'épargne logement (PEL), et le transfert d'un panier de neuf recettes fiscales à la sécurité sociale pour financer la compensation des allégements de cotisations patronales sur les bas salaires.

Ce transfert, par un effet miroir, a diminué les prélèvements de l'Etat de près de 20 milliards, ce qui, avec les baisses d'impôt votées dans la loi de finances pour 2006, a permis une réduction des prélèvements de l'Etat de 1,2 point de PIB en 2006. Pour l'année prochaine, les prélèvements de l'Etat poursuivront leur baisse grâce à l'entrée en vigueur de la nouvelle réforme fiscale, dont l'impact est de l'ordre de 6 milliards d'euros. Pour les prélèvements sociaux, l'année 2007 est une année de stabilisation avec un maintien du taux de prélèvement à 22,2 % du PIB.

En effet, l'année prochaine, les prélèvements sociaux seront affectés à la fois par des mesures nouvelles négatives et des mesures nouvelles positives. Parmi les pertes de recettes, il faut citer le passage en régime de croisière du dispositif de prélèvement sur les intérêts produits par les PEL, soit une perte de 2,1 milliards d'euros ; le retour à 1 % du taux de la taxe sur l'industrie pharmaceutique, porté exceptionnellement l'année dernière à 1,76 %, soit une perte de 170 millions d'euros ; un accroissement des allégements de cotisations sur les bas salaires dans les entreprises de moins de vingt salariés pour un coût de 320 millions d'euros ; l'extension du régime de l'aide aux chômeurs créateurs d'entreprises (Accre) avec un manque à gagner de 100 millions d'euros. Ces mesures ne seront que partiellement compensées par trois nouvelles recettes résultant d'un transfert de 480 millions de droits sur les tabacs, de l'impact de la réforme du barème de l'impôt sur le revenu, sur la CSG, sur les revenus du patrimoine, soit une recette supplémentaire de 500 millions d'euros, et de la modification du régime de versement des acomptes des prélèvements sociaux sur les placements qui se traduit par une anticipation de 430 millions de recettes en 2007.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a regretté la très grande fragilité des recettes liées à l'anticipation des prélèvements sociaux sur les produits de placement. Ce sont des mesures « à un coup » qui ont un effet trompeur dans la construction de l'équilibre des comptes. La mesure PEL de l'an dernier, par exemple, a permis de réduire le déficit de la sécurité sociale pour 2006 de 2 milliards d'euros mais sans reproduction possible en 2007. Ce type de mesure ne fait que reporter le problème du financement de la sécurité sociale sans en permettre la résolution de façon durable.

Puis M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a évoqué les évolutions de long terme constatées sur les prélèvements sociaux. En vingt-cinq ans, ceux-ci sont passés de 16 % du PIB à plus de 22 %. En outre, leur structure s'est profondément modifiée, d'une part sous l'effet d'une tendance à la diversification des recettes et à l'élargissement de l'assiette du prélèvement social, d'autre part, en raison de la mise en place d'allégements de cotisations sur les bas salaires. A l'origine en effet, le financement de la sécurité sociale était exclusivement fondé sur des cotisations assises sur les salaires. En 1978, les cotisations représentaient 97 % du financement des organismes sociaux et un taux de 15,4 % du PIB. Aujourd'hui, ces chiffres s'élèvent à 72 % et 16 % du PIB, ce qui est plus conforme à la moyenne des pays de l'Union européenne. Les cotisations sociales constituent toujours la majorité des ressources de la protection sociale malgré la diversification intervenue au cours des dernières années : création en 1991 de la contribution sociale généralisée (CSG), assise aussi bien sur les revenus d'activité que les revenus de remplacement et les revenus du patrimoine et des produits de placements, affectation à la sécurité sociale de la contribution sociale de solidarité sur les sociétés (CSSS), des droits sur les tabacs et les alcools, et de certaines taxes spécifiques comme les contributions dues par l'industrie pharmaceutique.

La deuxième évolution majeure des prélèvements sociaux résulte de la politique d'exonérations de cotisations patronales, mise en place d'abord en direction de publics spécifiques puis de manière plus générale sur les bas salaires. Cette politique a poursuivi un objectif clair de réduction du coût relatif du travail des salariés les moins qualifiés. Son enjeu financier est lourd car les allégements généraux représentent une masse proche de 20 milliards d'euros. En étendant cette année le dispositif à l'ensemble des cotisations patronales au niveau du Smic pour les entreprises de moins de vingt salariés, le Gouvernement manifeste son intention de poursuivre cet axe majeur de la politique de l'emploi. De ce fait, le système dégressif initial de cotisations sociales plafonnées a été peu à peu transformé en un système partiellement progressif.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a ensuite développé plusieurs réflexions inspirées par ces évolutions. La première concerne les exonérations de charges qui doivent être compensées par l'Etat comme l'a imposé la loi Veil de 1994. En effet, la sécurité sociale ne peut pas financer la politique de l'emploi, ce qui rend d'autant plus regrettable l'insuffisante compensation des exonérations de charges ciblées par le Gouvernement. La progression très dynamique et difficilement maîtrisable de ces dépenses pose un réel problème comme l'a souligné le récent rapport de la Cour des comptes sur le bilan des allégements de charges sociales. Il en ressort que les mesures d'allégements généraux ont certainement permis un « enrichissement » de la croissance en emplois peu qualifiés bien que leur coût soit élevé. La Cour précise d'ailleurs que 1 % de hausse du Smic entraîne un coût supplémentaire pour les finances publiques de 600 millions d'euros. Pour les dispositifs d'exonérations ciblées sur des publics particuliers ou sur des territoires, la Cour est plus critique, les jugeant à la fois nombreux, instables et d'efficacité très inégale. Elle estime donc nécessaire de s'interroger sur la pérennité et l'ampleur du calibrage du dispositif. Ainsi, au regard de ces observations et de la baisse continue du chômage, il devient possible de revoir le dispositif des allégements de charges, ce qui permettrait d'envisager l'utilisation d'une partie du panier de recettes pour des dépenses de redistribution.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a indiqué que le principal défi des mois à venir est celui du financement de la protection sociale. Si les dernières réformes ont permis d'avancer dans la maîtrise des dépenses, en particulier dans la branche maladie, il est certain qu'au rythme auquel vont continuer de progresser les dépenses de santé et de vieillesse au cours des prochaines années, de nouvelles recettes devront être trouvées. Le président de la République a lancé, au début de 2006, la piste d'une modification de l'assiette des cotisations sociales en ne la limitant pas aux seuls salaires mais en l'élargissant à la valeur ajoutée de façon à ne pas pénaliser l'emploi. Plusieurs instances et groupes de travail ont approfondi la question et examiné diverses autres options. Le résultat de leurs travaux n'est pas probant. Il est en effet extrêmement difficile de concilier l'équilibre financier des régimes sociaux avec le maintien de la compétitivité de l'économie française à moyen et long termes.

Aussi, il est indispensable de poursuivre la réflexion en évoquant non seulement les recettes mais également les dépenses. Il faut aujourd'hui repenser l'ensemble du système de protection sociale en séparant bien ce qui relève de la solidarité nationale de ce qui relève d'un mécanisme assuranciel. Une fois ce travail effectué, il sera plus aisé de prévoir quel type de recettes affecter à chacun de ces ensembles. Ainsi, ce qui relève de l'assurance devra être financé par des cotisations ou des primes créatrices de droits tandis que ce qui relève de la solidarité nationale pourra être financé par des recettes à caractère essentiellement fiscal. Différentes pistes pourront alors être étudiées et comparées, comme celle d'un recours au moins partiel à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Plusieurs pays voisins de la France se sont engagés dans cette voie, notamment l'Allemagne qui, malgré des difficultés pour achever l'élaboration d'une réforme d'ensemble de la protection sociale, a décidé d'augmenter la TVA tout en baissant légèrement les cotisations. En conséquence, il serait utile que la Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) entreprenne au début de l'année 2007 un travail approfondi sur ces questions. Ce travail pourrait d'ailleurs inclure une analyse comparée des cotisations et des dépenses du régime général et du régime de l'Etat, pour tenir compte des arguments précédemment développés par le ministre chargé du budget pour justifier le fait que l'Etat employeur cotise à des taux moins élevés que les employeurs privés.

M. François Autain s'est étonné que l'on diminue les prélèvements obligatoires à un moment où des déficits très importants perdurent, notamment dans le domaine de la sécurité sociale.

Contrôle de l'application des lois au 30 septembre 2006 - Communication

Enfin, la commission a entendu M. Nicolas About, président, sur le contrôle de l'application des lois pour la période du 1er octobre 2005 et au 30 septembre 2006.

M. Nicolas About, président, a rappelé que, conformément aux instructions du Bureau du Sénat, les commissions permanentes présentent chaque année un bilan de l'application des lois intervenues dans leur domaine de compétences. La synthèse de leurs travaux fait l'objet d'une communication du président du Sénat en conférence des présidents et est annexée au bulletin des commissions.

Cet exercice est fondamental pour apprécier la réalité de l'entrée en vigueur des lois et mesurer les difficultés pratiques d'application de la législation.

Au cours de l'année parlementaire, allant du 1er octobre 2005 au 30 septembre 2006, quarante-cinq lois ont été adoptées par le Parlement, dont six examinées au fond par la commission. Parmi ces textes, certains ont d'ailleurs suscité une très lourde charge, notamment la loi pour l'égalité des chances, qui a nécessité neuf jours de séance publique pour son adoption.

Le tableau complet de l'activité de la commission voudrait qu'on y ajoute les avis présentés pour la loi de finances et la loi « Engagement national pour le logement » et les trois textes encore en navette, notamment ceux relatifs à la protection de l'enfance et à la prévention de la délinquance, sans oublier les sept rapports d'information publiés cette année, dont deux élaborés par la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss).

Abordant les données chiffrées de l'application des lois, M. Nicolas About, président, a constaté que l'année écoulée est plutôt positive, qu'il s'agisse de textes récemment votés ou plus anciens. Sur les six lois votées cette année, seule, une n'est pas du tout applicable : il s'agit de celle relative à la retraite des personnes handicapées, issue d'une proposition de loi qu'il a déposée. Le fait qu'elle ait été très récemment promulguée explique sans doute cette situation.

Les cinq autres sont applicables, soit totalement, soit pour partie. Ainsi, la loi relative à l'accès des jeunes en entreprise, qui a remplacé le contrat première embauche (CPE), a reçu très vite les deux décrets d'application nécessaires. Le taux d'application des autres textes varie dans des proportions allant de 34 % (loi relative à l'égalité des chances) à 80 % (loi sur le retour à l'emploi des titulaires de minima sociaux).

Ces six lois ont appelé 120 mesures d'application, soit une moyenne de vingt mesures par loi, ce qui confirme la spécificité des textes à caractère sanitaire et social de requérir une grande partie des textes d'application : elles ont mobilisé, cette année encore, plus du quart de l'ensemble des mesures réglementaires requises par toutes les lois votées au cours de la session écoulée. Or, le taux de parution de ces textes réglementaires est en très forte hausse cette année : confirmant la tendance des trois sessions précédentes, il atteint désormais 43 %, soit la meilleure performance de la législature. On peut y voir la traduction concrète des nombreuses déclarations d'intention gouvernementales sur la publication rapide des décrets d'application.

Evoquant ensuite le cas des lois plus anciennes, M. Nicolas About, président, a souligné les progrès réalisés puisque, cette année, 241 mesures réglementaires ont été prises, contre 189 en 2004-2005 et 105 en 2003-2004. Cette progression s'explique essentiellement par le grand nombre de mesures d'application requis par la loi « handicap » (132 mesures) et, dans une moindre mesure, par la loi de programmation pour la cohésion sociale (63 mesures). Ainsi, la situation est bien plus favorable qu'elle ne l'était l'an dernier pour ces deux lois ; pour la première, 83 mesures sont intervenues, faisant passer son taux de parution des mesures réglementaires de 8 % à 71 % ; pour la seconde, il est passé de 45 % à 63 %.

Le même satisfecit est à adresser pour deux lois votées en 2005, qui étaient totalement inapplicables au 30 septembre 2005 et qui ont enfin reçu une bonne partie de leurs mesures réglementaires : la loi « assistants maternels et familiaux », applicable désormais à 88 % et la loi sur l'adoption, applicable à 80 %.

Enfin, trois lois votées au cours de la session précédente sont devenues pleinement applicables, notamment celle relative à la fin de vie. En conséquence, le taux d'application moyen de la session 2004-2005 est de 70 %, contre 17 % un an plus tôt.

En ce qui concerne les deux lois emblématiques de la législature, la réforme des retraites de 2003 et celle de l'assurance maladie de 2004, elles ont reçu respectivement 86 % et 81 % de leurs textes d'application. Il faut d'ailleurs préciser que la formule utilisée ici de « taux d'application » est en réalité impropre, car le taux d'application effectif d'un texte ne se mesure pas au seul degré d'intervention des décrets. Il doit être bien sûr calculé en prenant en compte les articles d'application directe. Il en résulte naturellement un degré de performance bien supérieur : ainsi, la réforme des retraites est désormais applicable à 95 %.

M. Nicolas About, président, a ensuite évoqué quelques motifs d'insatisfaction et d'abord l'allongement des délais de parution des mesures réglementaires : cette année, 68 % des mesures ont été publiées en moins de six mois, contre 78 % en 2005 et 100 % en 2004. Sur ce point, la circulaire du 1er juillet 2004, qui réaffirmait le délai maximum de six mois pour l'intervention des textes d'application, n'a donc pas eu de véritable effet d'accélération.

Autre motif d'inquiétude, quelques lois sont encore insuffisamment applicables, et notamment deux des lois promulguées cette année qui n'avaient reçu, au 30 septembre 2006, qu'un peu plus du tiers de leurs décrets d'application : la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 et celle pour l'égalité des chances, alors même qu'elles avaient été toutes deux adoptées en urgence. Pour la loi égalité des chances, de nombreuses dispositions sont encore inapplicables : on mentionnera par exemple l'ouverture des classes préparatoires aux élèves provenant de zones d'éducation prioritaires ou l'instauration du curriculum vitae anonyme à laquelle le Gouvernement semble avoir renoncé au mépris du vote du Parlement. Cette situation est d'autant plus regrettable que ces deux dispositions sont issues d'initiatives sénatoriales, ce qui rend plus visible, voire choquante, l'absence de texte d'application.

Tout aussi critiquable est le fait que deux lois de 2004, relatives à la bioéthique et à la politique de santé publique, n'ont à ce jour reçu, respectivement, que 39 % et 48 % de leurs mesures d'application et ce, malgré les initiatives nombreuses prises par la commission pour en accélérer le processus.

M. Nicolas About, président, a ensuite rapidement évoqué la situation des textes votés entre 1997 et 2004 : sur les 68 lois adoptées, 25 lois seulement sont pleinement applicables, et 37 en partie. Or, pour les lois plus anciennes, on peut craindre qu'au gré des alternances politiques, elles ne constituent plus une priorité aux yeux du Gouvernement et ne reçoivent jamais la totalité de leurs mesures réglementaires. Par exemple, la loi de 2002 de modernisation sociale n'est encore que très imparfaitement applicable, puisque, seule, la moitié des mesures d'application a été adoptée et que 66 mesures sont encore en attente.

Il a ensuite observé que, contrairement à l'an dernier, l'urgence n'a produit aucun effet d'accélération positif sur les délais de parution des mesures réglementaires, comme le montre le cas de la loi pour l'égalité des chances.

En revanche, un aspect semble plus favorable : le bon suivi réglementaire des dispositions législatives issues d'initiatives sénatoriales se confirme. Le taux de production approche les 33 %, assez proche de celui bénéficiant aux mesures introduites par voie d'amendements gouvernementaux (36 %), même s'il reste très inférieur à celui des mesures présentes dans le texte initial (51 %). En outre, il faut souligner qu'au cours de la session parlementaire écoulée, une proposition de loi d'initiative sénatoriale a été adoptée par le Parlement : celle relative à la pension de retraite des fonctionnaires handicapés.

Pour conclure, M. Nicolas About, président, a exposé les statistiques se rapportant aux rapports régulièrement demandés au Gouvernement par le législateur. Les statistiques en confirment le caractère peu opérant : sur les 101 rapports réclamés par les lois adoptées avant 2006, seuls 34 ont été effectivement déposés. Ce taux illustre de lui-même le peu d'efficacité de la méthode. Pour cette raison, la commission des affaires sociales n'a cessé de réduire ses exigences en la matière : de 27 rapports en 2004, sa demande a été ramenée à 14 en 2005 et à 4 seulement en 2006.

M. François Autain a dénoncé la situation particulièrement choquante de la loi de 2002 relative aux droits des malades qui n'est pas encore pleinement applicable. La légère baisse du nombre des décrets en attente sur ce texte résulte non pas d'un effort de parution de la part du Gouvernement mais de l'abrogation d'articles de cette loi par des textes ultérieurs et, partant, de la suppression mécanique des décrets qui y étaient liés.

M. Nicolas About, président, en est convenu et a indiqué sur ce point que les statistiques d'application des lois doivent être régulièrement tenues à jour pour vérifier que les textes réglementaires répertoriés lors du vote de la loi demeurent toujours nécessaires au fil des évolutions des textes.

M. Alain Vasselle s'est préoccupé de l'absence de sanction applicable lorsque le Gouvernement s'affranchit de son obligation de publication des mesures réglementaires. Il a réitéré ses propositions des années précédentes pour exiger du Gouvernement qu'il présente les projets de décrets en même temps qu'il dépose les projets de loi auxquels ils se rapportent. Il conviendrait à tout le moins d'expérimenter un temps cette procédure.

M. Nicolas About, président, a déclaré partager cette analyse. Toutefois, il semble difficile d'exiger du Gouvernement qu'il présente par avance des projets de décrets sur un texte appelé, par définition, à évoluer au fil de ses lectures dans chacune des assemblées. Pour cette raison, d'ailleurs, on observe que la parution des décrets est toujours plus rapide lorsqu'ils se rapportent aux dispositions du projet de loi initial que lorsqu'ils sont destinés à la mise en oeuvre d'amendements d'initiative parlementaire.

Puis la commission a donné acte au président de sa communication.