Mardi 17 juillet 2007

- Présidence M. Nicolas About, président, et de M. Jean Arthuis, président de la commission des finances -

Travail, emploi et pouvoir d'achat - Audition de Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, et M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté

La commission a entendu, conjointement avec la commission des finances, Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, et M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, sur le projet de loi n° 390 (2006-2007), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat.

Le compte rendu de cette audition figure à la rubrique de la commission des finances.

Jeudi 19 juillet 2007

- Présidence de MM. Alain Gournac, vice-président, Jean-Marc Juilhard et François Autain, secrétaires -

Organismes extraparlementaires - Désignation d'un candidat

Tout d'abord, la commission a procédé à la désignation de Mme Annie David pour siéger au sein du conseil d'administration de l'agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail.

Travail, emploi et pouvoir d'achat - Examen du rapport pour avis

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Alain Vasselle sur le projet de loi n° 390 (2006-2007), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat.

Rappelant que le Président de la République avait fait du retour à la valeur « travail » un des thèmes majeurs de sa campagne, M. Alain Vasselle, rapporteur, a indiqué que le projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat a pour objectif de relancer l'économie par la réhabilitation du travail comme outil d'amélioration du pouvoir d'achat et comme instrument de lutte contre le chômage et la pauvreté.

L'examen de ce texte est renvoyé au fond à la commission des finances, mais deux séries de dispositions entrent dans le champ de compétence de la commission des affaires sociales : l'article premier, qui crée une exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires et les articles 8 à 13, qui instituent le revenu de solidarité active.

La mesure en faveur des heures supplémentaires découle du raisonnement selon lequel l'augmentation de la durée moyenne de travail entraîne une baisse durable du chômage et un taux de croissance plus élevé. En effet, des exemples étrangers montrent que la création de richesses, qui entraîne la hausse de la consommation, des investissements et de l'emploi, est fonction du nombre d'heures travaillées.

Il s'agit donc de rompre avec la logique de « partage du travail » qui a longtemps guidé la politique de l'emploi de la France, en dépit de résultats peu convaincants et d'un coût considérable pour les finances sociales.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a indiqué que l'article premier vise à diminuer le coût du travail pour inciter les entreprises à augmenter la durée d'activité de leurs salariés, sans revenir pour autant sur la durée légale de trente-cinq heures hebdomadaire. En contrepartie, les salariés bénéficieront d'une hausse substantielle de leurs revenus grâce à trois mesures : le salaire de chaque heure supplémentaire sera exonéré d'impôt sur le revenu, sans plafonnement ; cette heure ouvrira droit à une exonération complète des cotisations et contributions salariales (assurance maladie et assurance vieillesse, CSG et CRDS, cotisations de retraite complémentaire Agirc-Arrco et assurance chômage) ; le régime dérogatoire des heures supplémentaires des entreprises d'au plus vingt salariés, qui avait été reconduit jusqu'au 31 décembre 2008, sera abrogé et la majoration des heures supplémentaires y sera portée à 25 %, soit le taux de droit commun.

Le champ d'application des exonérations est extrêmement large, puisqu'il vise toutes les heures supplémentaires, complémentaires ou choisies, effectuées par les salariés du secteur privé, mais aussi par les agents publics.

Des garde-fous sont prévus afin d'éviter un recours abusif au dispositif. Le projet de loi pose notamment un principe de non substitution des heures supplémentaires à d'autres éléments de rémunération, sauf si un délai de douze mois s'est écoulé entre le dernier versement de rémunération en tout ou partie supprimé et le premier paiement pour heures supplémentaires exonérées. Le bénéfice de l'exonération est également exclu lorsqu'un salarié à temps partiel effectue des heures complémentaires de manière permanente sans que son horaire contractuel de travail soit modifié.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a indiqué que le projet de loi est aussi favorable aux employeurs, puisqu'il prévoit une déduction forfaitaire de cotisations patronales afin de réduire le coût de l'heure supplémentaire. Sont concernés les employeurs entrant dans le champ de la réduction « Fillon », c'est-à-dire essentiellement le secteur privé ; en sont en revanche exclus l'Etat et les collectivités publiques ainsi que les employeurs de personnels à domicile ou d'assistants maternels.

Le montant horaire de cette déduction sera de 50 centimes d'euros ; il sera porté à 1,50 euro dans les entreprises d'au plus vingt salariés afin de compenser l'entrée en vigueur anticipée du passage de 10 % à 25 % du taux de majoration des heures supplémentaires. Elle pourra se cumuler avec les autres dispositifs d'exonération, dont l'allégement « Fillon » sur les bas salaires, qui est également modifié dans un sens favorable à la prise en compte des heures supplémentaires.

L'impact de ce nouveau dispositif, qui entrera en vigueur au 1er octobre 2007, devrait être sensible. Ainsi, un salarié payé 1,2 Smic pour 35 heures de travail hebdomadaire percevra un revenu net en hausse de 4,5 % s'il fait une heure supplémentaire par semaine et de 17,8 % pour quatre heures.

Le cas particulier des petites entreprises, qui vont subir le relèvement du taux de majoration des heures supplémentaires à 25 %, est plus délicat. Si la déduction forfaitaire au taux majoré de 1,50 euro et la modification de la formule de l'allégement « Fillon » permettront de compenser ce surcoût pour des salaires compris entre 1,27 et 1,45 Smic, le coût des heures supplémentaires sera légèrement plus élevé au-delà qu'il ne l'est aujourd'hui. Sachant toutefois que le régime dérogatoire devait s'éteindre au plus tard le 31 décembre 2008, alors que la déduction forfaitaire d'1,50 euro a un caractère pérenne, toutes les entreprises auront intérêt à recourir aux heures supplémentaires.

Puis M. Alain Vasselle, rapporteur, a précisé le coût de ce dispositif : 6 milliards d'euros en année pleine, soit environ la moitié de la dépense publique résultant du projet de loi, dont 4,5 à 5 milliards d'euros constituent un manque à gagner pour la sécurité sociale. Mais cette somme risque d'être largement dépassée en cas de succès du dispositif, ce qui pose la question des conditions de compensation des exonérations de cotisations sociales au régime concerné.

Le texte aura en effet un impact en trésorerie d'environ 800 millions d'euros sur les deux derniers mois de 2007, puisqu'aucun versement de compensation n'interviendra avant l'entrée en vigueur des lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2008. De fait, le plafond de découvert de 28 milliards d'euros accordé à l'Acoss devrait être atteint à la fin de l'année. Ce constat sera aggravée par l'augmentation prévue du coût de l'allégement « Fillon » sur les bas salaires, dont le manque à gagner pour la sécurité sociale ne serait déjà pas compensé à hauteur de 850 millions à la fin de l'année 2007.

Cette situation est préoccupante, d'autant plus que le Gouvernement n'est pas tenu de résoudre le problème avant 2008 et que le Parlement ne peut s'en charger en raison des règles d'application de l'article 40 de la Constitution.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a ensuite présenté les dispositions relatives à la mise en place expérimentale d'un revenu de solidarité active. Celle-ci a un double objectif : encourager l'augmentation de l'activité professionnelle ou le retour à l'emploi des allocataires de minima sociaux et améliorer leur niveau de revenu, qui se situe le plus souvent au dessous du seuil de pauvreté européen (60 % du revenu médian, soit environ 830 euros). Sept millions de personnes sont concernées en France, dont deux millions d'enfants et plus de 3 millions et demi de bénéficiaires d'un minimum social.

Le Gouvernement souhaite diminuer de 30 % en cinq ans le niveau de pauvreté. Le texte propose donc d'instituer un revenu de solidarité active (RSA), versé aux bénéficiaires d'un minimum social, pour assurer l'augmentation de leurs revenus lorsqu'ils reprennent, exercent ou accroissent leur activité professionnelle.

Dans un premier temps, ce dispositif sera expérimenté pendant trois ans dans les départements volontaires et sera limité aux seuls allocataires du RMI et de l'allocation de parent isolé (API). Cette expérimentation complète celle précédemment organisée par la loi de finances pour 2007, qui a autorisé les conseils généraux volontaires à augmenter les montants de la prime de retour à l'emploi et de la prime forfaitaire d'intéressement et à en modifier les modalités, la périodicité et la durée de versement, mais aussi à déroger aux règles régissant les contrats aidés, en aménageant leur durée, les conditions de leur renouvellement, les aides versées aux employeurs et le temps de travail hebdomadaire.

Le champ de cette expérimentation est élargi par le projet de loi à dix nouveaux départements, qui s'ajoutent aux dix-sept déjà candidats et aux allocataires de l'API et du RMI qui travaillent moins de 78 heures par mois ou bénéficient d'un contrat aidé. Son coût sera pour partie assumé par l'Etat selon des conditions définies dans une convention avec le conseil général.

Les départements volontaires pourront s'inspirer de l'expérience en cours dans le département de l'Eure, où le niveau du RSA tient compte de la composition de la famille et des revenus d'activité. Ils auront toutefois la liberté de fixer le niveau du revenu garanti, pour lequel le texte ne prévoit aucun plafond, et de définir les modalités de calcul du RSA.

L'agence nouvelle des solidarités actives (Ansa), qui participe activement à la mise en oeuvre de cette expérimentation, a formulé plusieurs recommandations pour une plus grande efficacité de la mesure. La progressivité du revenu garanti pourrait, selon elle, être plus forte pour les premières heures travaillées pour inciter à la reprise d'activité et être accentuée dès lors que l'on dépasse un certain temps de travail pour favoriser les emplois à temps plein. Par ailleurs, il est recommandé de fixer un nombre d'heures travaillées à partir duquel les ressources totales des bénéficiaires dépassent le seuil de pauvreté. Enfin, les droits connexes légaux, souvent liés au statut des bénéficiaires de minima sociaux, les prestations ou aides locales et extra-légales versées par les collectivités locales, certains organismes de protection sociale ou des associations, et les dépenses liées au retour à l'emploi pourraient être utilement recensés et pris en compte.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a fait sienne cette dernière proposition, l'estimant indispensable dans l'optique d'une réforme à venir du régime des minima sociaux et des droits connexes. L'avantage en serait triple : permettre aux départements d'ajuster le montant du RSA qu'ils verseront aux bénéficiaires en fonction des droits connexes, limiter l'apparition d'inégalités entre travailleurs pauvres non éligibles au RSA expérimental et ses bénéficiaires, enfin préparer la mise en place d'une allocation unique.

Par ailleurs, des questions restent en suspens concernant le financement du dispositif, notamment le montant de la participation de l'Etat. Si le haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, Martin Hirsch, a annoncé que cette participation atteindrait 50 % du coût estimé de l'expérimentation pour les départements, soit 25 millions d'euros, le projet de loi ne garantit pas le montant de cette dotation. Au regard des dérapages observés pour le RMI et des surcoûts liés à la mise en place des contrats d'avenir, il est nécessaire que les modalités exactes de la participation de l'Etat au financement de l'expérimentation soient précisées.

Une autre interrogation porte sur la durée au cours de laquelle s'applique cette participation de 25 millions d'euros, d'autant plus que la généralisation du dispositif a été annoncée par le haut commissaire pour la fin de l'année 2008, c'est-à-dire bien avant le terme de la période d'expérimentation fixé à fin 2010. Il serait donc légitime que le texte indique clairement que le surcoût pour le département n'excédera pas 50 % du coût total de l'expérimentation, et cela sur l'ensemble de sa durée, même si cette précision ne peut être proposée par la commission en raison de l'application de l'article 40.

Enfin, M. Alain Vasselle, rapporteur, a suggéré d'améliorer le texte pour favoriser l'accompagnement et le développement des actions de formation en faveur des allocataires de l'API et pour prévoir que le comité d'évaluation, créé par l'article 142 de la loi de finances pour 2007, émette un avis qui sera annexé au rapport que le Gouvernement doit remettre au Parlement avant la généralisation du dispositif.

Pour conclure, il a jugé cette expérimentation prudente et pragmatique et a rappelé qu'elle répond, pour partie, aux préoccupations du groupe de travail « minima sociaux » de la commission, même si elle laisse de côté les travailleurs pauvres et certains bénéficiaires de minima sociaux (AAH, ASS).

M. Paul Blanc a regretté que le RSA ne s'applique pas aux bénéficiaires de l'AAH, qui sont pourtant nombreux à souhaiter travailler, mais ne franchissent pas le pas, de crainte d'une diminution de leurs revenus.

Mme Isabelle Debré s'est fait l'écho des préoccupations des petites entreprises qui estiment insuffisante la déduction d'1,50 euro sur les charges patronales applicables aux heures supplémentaires compte tenu de la prochaine augmentation du coût de celles-ci.

M. Guy Fischer a considéré que le coût du nouveau régime de rémunération des heures supplémentaires est exorbitant pour l'Etat et que les avantages attendus ne bénéficieront qu'aux seules entreprises. La suppression déguisée des trente-cinq heures proposée par le texte ne constitue en aucun cas, à son sens, une solution pour lutter contre l'explosion de la précarité et la « smicardisation » des salaires.

Concernant le RSA, s'il a apprécié certaines conclusions du rapport Hirsch sur les minima sociaux, il a estimé que le dispositif prévu créera des inégalités entre les départements et n'apportera aucun progrès pour les plus pauvres. L'expérimentation ne serait-elle pas les prémices d'une réforme plus large des minima sociaux défavorable à leurs bénéficiaires ? Pour ces raisons, le groupe communiste républicain et citoyen (CRC) se prononcera contre l'article premier et s'abstiendra sur les articles relatifs au RSA.

M. François Autain a estimé que la réforme des heures supplémentaires remet en cause les trente-cinq heures sans être pour autant accompagnée d'une revalorisation des salaires. Il convenait selon lui, au contraire, de réduire la différence croissante entre les revenus du capital et les revenus du travail. Il s'est opposé à l'idée selon laquelle les déficits publics pourraient être réduits en diminuant les impôts et s'est inquiété, de ce fait, des modalités de financement de la réforme et de son coût pour l'Etat.

S'agissant de la mise en place du RSA, il a estimé le dispositif complexe et porteur d'un risque d'effet d'aubaine et a regretté que les travailleurs pauvres n'aient pas été pris en compte. Jugeant toutefois l'idée générale intéressante, il a craint qu'elle n'institutionnalise le travail précaire. Il a ironiquement salué les efforts du Gouvernement en faveur des 234 000 bénéficiaires de l'impôt sur la fortune (ISF), auxquels un cadeau fiscal de 810 millions d'euros a été offert, et a comparé cette somme aux modestes 25 millions que l'Etat dépensera pour les sept millions de personnes potentiellement éligibles au RSA.

M. Alain Gournac, président, a jugé pour le moins caricaturale cette argumentation.

Mme Bernadette Dupont s'est interrogée sur l'impact que pourraient avoir les exonérations de cotisations sociales sur le niveau des retraites futures des assurés sociaux. Elle a souhaité savoir pourquoi les employeurs de salariés à domicile ont été exclus du bénéfice de la déduction des cotisations patronales. Elle s'est enfin inquiétée du sort de certaines femmes au foyer, mères de jeunes enfants, qui n'ont pas travaillé depuis longtemps et ne remplissent pas les conditions d'éligibilité aux minima sociaux. Alors que ces personnes ont prioritairement besoin d'une formation, elles ne disposent d'aucune aide et le RSA ne leur sera d'aucune utilité.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis, a confirmé que l'exercice d'une activité professionnelle conditionne le bénéfice du RSA.

Comme l'ont fait avant elle François Autain et Guy Fischer, Mme Annie David a observé que, contrairement aux affirmations du Gouvernement, deux catégories de salariés ne tireront pas avantage des dispositions de l'article premier du projet de loi : ceux qui ne sont pas assujettis à l'impôt sur le revenu et les cadres dont le temps de travail est réglementé par un forfait mensuel. Puis elle a souligné l'extrême disparité entre l'effort consenti en faveur des personnes pauvres, d'une part, et les moyens budgétaires considérables alloués aux entreprises par le biais de la déduction forfaitaire de cotisations patronales, d'autre part.

M. Guy Fischer a fait valoir que, contrairement au RSA qui est destiné aux personnes les plus pauvres, les mesures fiscales en faveur des plus riches sont d'application générale immédiate et ne font l'objet d'aucune expérimentation préalable.

En réponse à M. Paul Blanc, M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis, a indiqué que les mesures récentes prises en faveur des bénéficiaires de l'AAH leur permettent, s'ils sont dans l'incapacité de travailler, de bénéficier d'une majoration pour la vie autonome de 103 euros par mois ou d'une garantie de ressources de 800 euros par mois, soit l'équivalent du seuil de pauvreté. Toutefois, la question de l'incitation à travailler, même quelques heures, pour cette catégorie d'assurés sociaux, est effectivement posée : une étude approfondie sur ce sujet serait nécessaire.

En ce qui concerne le problème avancé par Isabelle Debré de l'insuffisance, pour les PME, du tarif de la déduction forfaitaire de cotisations patronales, il a précisé que ce cas de figure ne concerne que les PME dont le personnel perçoit un salaire supérieur à 1,45 fois le niveau du Smic.

M. Guy Fischer a réaffirmé que ce projet de loi organise une distorsion flagrante entre le véritable « pont d'or » réservé aux personnes favorisées et les maigres moyens budgétaires alloués aux plus pauvres.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis, a souligné que l'effort de 6 milliards d'euros engagé au titre des heures supplémentaires profitera à l'ensemble des salariés et pas uniquement à une poignée de personnes nanties, comme voudrait le faire croire une présentation caricaturale du projet de loi. D'ailleurs, les salariés non imposables bénéficieront des exonérations de cotisations sociales et de la majoration du paiement des heures supplémentaires dans les PME. La comparaison des moyens financiers alloués aux différentes mesures n'est pas pertinente : il est infondé de rapporter purement et simplement le montant total du « paquet fiscal » (14 milliards d'euros) aux 25 millions engagés par l'Etat au titre de la mise en oeuvre du RSA, dès lors que cette enveloppe n'est destinée qu'à une expérimentation menée dans vingt-cinq départements, pour une période de temps limitée. A terme, lorsque ce dispositif sera généralisé, son coût atteindra 6 milliards d'euros, soit l'équivalent de l'effort engagé par la puissance publique pour encourager le développement des heures supplémentaires. Enfin, pour ce qui concerne l'impact budgétaire du bouclier fiscal et de l'allégement de l'impôt de solidarité sur la fortune, les montants en cause se limitent à respectivement 400 et 410 millions d'euros.

M. François Autain s'est dit en désaccord avec ces observations. Il n'est pas illégitime de comparer les 25 millions d'euros, engagés au titre du RSA et destinés aux 7 millions de personnes pauvres, avec les centaines de millions d'euros que se partageront les 280 000 contribuables fortunés qui bénéficieront du bouclier fiscal à 50 %. Quels que soient les chiffres avancés, la disproportion entre l'attention accordée par le Gouvernement à ces deux populations différentes est flagrante.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis, a estimé que l'allégement de l'impôt sur la fortune bénéficiera, à terme, à l'ensemble des Français, puisque cet argent sera tôt ou tard réinvesti dans le tissu économique. Il a par ailleurs considéré que le phénomène précédemment dénoncé de « smicardisation » croissante de la population active résulte aussi, pour une bonne part, de la forte augmentation de ce salaire plancher au cours de la précédente législature. Les pouvoirs publics ont alors voulu « sortir par le haut » des problèmes posés par l'instauration de six niveaux différents de Smic lors du passage des entreprises aux trente-cinq heures. Mais la gauche a aussi sa part de responsabilité dans le développement de ce phénomène de « trappe à bas salaires », du fait des mesures d'allégement de charges qu'elle a elle-même imposées en son temps.

En réponse aux critiques portant sur la progression trop lente des salaires par rapport au dynamisme de la croissance des revenus du capital, il a noté que l'objectif du projet de loi consiste précisément à permettre à ceux qui le souhaitent de travailler plus pour gagner plus, ce qui rendra l'économie française plus forte et plus performante. La baisse des impôts relancera ainsi la croissance, ce qui permettra de réduire les déficits.

Enfin, il a indiqué à Bernadette Dupont que les mesures proposées n'auront pas d'effet sur le niveau de la retraite des assurés sociaux, dans la mesure où le paiement des cotisations dues aux caisses de retraite sera intégralement compensé par l'Etat. Il a par ailleurs confirmé que les particulier employeurs n'entrent pas dans le champ d'application du projet de loi.

Puis la commission a procédé à l'examen des amendements.

A l'article premier (exonération de charges fiscales et sociales des heures supplémentaires), la commission a adopté neuf amendements tendant à :

- n'accorder aux salariés couverts par un accord de modulation que l'exonération des heures supplémentaires effectuées au-delà du plafond légal de 1 607 heures, et non celles effectuées au-delà d'un plafond conventionnel qui serait d'un niveau inférieur ;

- préciser, dans les entreprises d'au plus vingt salariés, les plafonds de déclenchement des heures supplémentaires exonérées d'impôt sur le revenu ;

- revenir à la rédaction du projet de loi initial en ce qui concerne le dispositif destiné à prévenir les abus en matière de travail à temps partiel ;

- apporter quatre améliorations rédactionnelles ;

-  simplifier la rédaction des dispositions excluant les heures complémentaires du bénéfice de la déduction forfaitaire de cotisations patronales ;

- mettre à jour les dispositions relatives aux cumuls d'exonération de cotisations patronales, en supprimant dans le code de la sécurité sociale une possibilité de cumul obsolète depuis le 31 mars 2004.

L'article premier bis (rapport au Parlement sur la prise en compte statistique du chômage des demandeurs d'emploi outre-mer), a été adopté sans modification.

A l'article 8 (principe du revenu de solidarité active), la commission a adopté un amendement proposant que les départements recensent et retiennent les aides locales et les droits connexes aux minima sociaux pour le calcul du RSA.

A l'article 9 (extension des possibilités d'expérimentation aux allocataires du RMI), la commission a adopté une modification rédactionnelle et un amendement pour prévoir que l'échéancier de la contribution de l'Etat pendant toute la durée de l'expérimentation figure dans la convention signée entre le département et l'Etat.

A l'article 10 (extension des possibilités d'expérimentation aux allocataires de l'API), la commission a adopté une modification de forme et un amendement tendant à favoriser l'accompagnement et le développement des actions de formation en faveur des allocataires de l'API.

A l'article 11 (conditions d'entrée en vigueur de l'expérimentation au niveau départemental), la commission a adopté un amendement pour reporter la date limite de dépôt à la préfecture des dossiers d'expérimentation des conseils généraux dans le cadre de l'article 142 de la loi de finances pour 2007.

A l'article 12 (nouveau) (rapport sur l'expérimentation du revenu de solidarité active), la commission a adopté un amendement visant à prévoir que le comité d'évaluation prévu par la loi de finances pour 2007 rendre un avis sur l'expérimentation du RSA.

L'article 13 (nouveau) (rapport sur la prime pour l'emploi), a été adopté sans modification.

Etat des comptes de la sécurité sociale - Examen du rapport d'information

M. Alain Vasselle a ensuite présenté le rapport d'information, qu'il a établi en sa qualité de président de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss), sur l'état des comptes de la sécurité sociale en vue de la tenue du débat sur les orientations des finances sociales.

M. Alain Vasselle, président de la Mecss, a évoqué le caractère singulier de ce débat d'orientation budgétaire et des finances sociales, qui intervient en début de législature, c'est-à-dire à un moment privilégié pour tracer des perspectives, définir des orientations de moyen terme claires et réalistes et qui, pour la première fois, aura lieu avec un interlocuteur gouvernemental unique, le ministre des comptes publics.

Il a estimé que la dégradation des comptes sociaux obligera les pouvoirs publics à prendre rapidement des mesures structurelles de grande ampleur. En effet, après les déficits record du régime général, plus de 11 milliards d'euros en 2004 et 2005, l'année 2006 a marqué une décrue en ramenant le déficit à 8,7 milliards d'euros, les quatre branches affichant toutefois un résultat négatif. Ce résultat peut sembler encourageant, mais il est pour l'essentiel la conséquence de recettes exceptionnelles non reconductibles d'un peu plus de 2 milliards d'euros, liées à la taxation anticipée des plans d'épargne logement de plus de dix ans.

Or, les résultats publiés en juillet marquent le retour aux années noires : le solde négatif du régime général, qui devait être ramené à 8 milliards d'euros, s'établira finalement à au moins 12 milliards. Ce résultat met d'ailleurs en cause la sincérité de la loi de financement pour 2007.

Les raisons de ce dérapage sont principalement au nombre de trois : l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam), le « papy-boom » et les allégements de charges sur les bas salaires.

L'Ondam devrait être dépassé de 2,2 milliards d'euros, essentiellement au titre des soins de ville en raison de la forte progression des indemnités journalières, des revalorisations tarifaires diverses et de moindres économies sur les médicaments. La branche maladie verrait ainsi son déficit se creuser : de 3,9 milliards prévus en loi de financement, à 6,4 milliards, en l'absence de mesures nouvelles.

Le dérapage des dépenses de retraite, estimé à près d'un milliard d'euros, résulte du dispositif « carrière longue » dont le succès ne se dément pas. Il est également imputable à l'arrivée à l'âge de soixante ans des générations du « baby-boom » et à l'échec des mesures prises en faveur du travail des seniors. Au total, le déficit de la branche vieillesse pourrait atteindre 4,7 milliards, au lieu des 3,5 milliards prévus.

Par ailleurs, le régime général enregistre une perte de recettes évaluée à 1,45 milliard d'euros sur le panier de recettes fiscales institué en 2006 pour compenser le coût des allégements généraux de cotisations sociales.

M. Alain Vasselle, président de la Mecss, a rappelé que le Gouvernement avait affirmé à l'automne dernier que non seulement ce panier permettrait de compenser parfaitement les allégements généraux de cotisations sociales, mais encore qu'il ferait apparaître des excédents de recettes évalués à 580 millions d'euros pour les deux exercices 2006 et 2007. Or, on ne constate aucun surplus, et même une insuffisance de financement estimée à 850 millions pour cette année, avant même de prendre en compte le coût supplémentaire des allégements qui découleront de l'application du projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, en cours d'examen.

La commission avait d'ailleurs souhaité prévenir une telle situation en votant l'année dernière, en loi de finances, le principe d'une compensation des allégements généraux à l'euro près. Malheureusement, le Gouvernement avait obtenu la suppression de cette disposition.

Il a souhaité que le Gouvernement prenne l'engagement clair de régler cette question dans la prochaine loi de finances. Le vote des exonérations liées aux heures supplémentaires rendra d'ailleurs cette question encore plus impérative.

Enfin, dans cette présentation de la situation des finances sociales, la seule bonne surprise vient de la branche famille dont le déficit a été révisé à 700 millions d'euros au lieu de 800 millions en loi de financement et de 900 millions en 2006.

Après ce rapide tableau des comptes de la sécurité sociale, M. Alain Vasselle, président de la Mecss, a souhaité évoquer trois questions importantes, qui exigent des réponses rapides du Gouvernement.

La première est celle de la dette accumulée par le FSV. En effet ce fonds, qui assure le financement de dépenses d'assurance vieillesse à caractère non contributif, enregistre un résultat négatif depuis 2002. Avec un déficit de 300 millions d'euros en 2007, sa dette cumulée devrait s'élever à 5,3 milliards d'euros à la fin de l'année, soit environ 40 % de ses produits annuels.

La Cour des comptes a, ces dernières années, clairement imputé à l'Etat la charge de pourvoir à l'équilibre du FSV. Toutefois, comme l'Etat a estimé que cela ne relevait pas de sa responsabilité, la Cour a modifié ses préconisations en demandant que le déficit du FSV ne soit pas occulté et que ses comptes soient combinés avec ceux de la branche retraite, ce qui accentuera encore le déficit de l'assurance vieillesse. M. Alain Vasselle, président de la Mecss, a estimé que le Gouvernement doit tirer les conséquences de cette nouvelle position de la Cour des comptes.

La deuxième question est celle des retards toujours plus importants de l'Etat dans le remboursement des prestations et des exonérations. Au 31 décembre 2006, il devait en effet à la sécurité sociale 6,7 milliards d'euros et ce montant continue d'augmenter.

La troisième question a trait à la situation désespérée du Ffipsa. D'ici à trois ans, le déficit du fonds, déjà supérieur à 2 milliards cette année, devrait approcher les 3 milliards et son déficit cumulé, 5,4 milliards aujourd'hui, devrait plus que doubler.

Aucun début de solution n'a encore été esquissé pour remédier à cette situation. Seules quelques pistes éventuelles ont été évoquées à l'occasion des auditions menées ces derniers mois par la Mecss.

A l'issue de cette présentation de la situation des finances sociales, M. Alain Vasselle, président de la Mecss, a estimé que la question de la réouverture de la Cades se pose clairement.

En effet, à la fin de l'année 2007, le plafond de trésorerie accordé à l'Acoss par la dernière loi de financement, soit 28 milliards d'euros, risque fort d'être dépassé. Par ailleurs, un tel montant ne pourra perdurer dans les comptes de l'Acoss sans faire l'objet d'un traitement, c'est-à-dire être transformé en dette, l'apparition d'excédents à court terme étant évidemment hautement improbable.

Or, conformément aux dispositions de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (Lolfss), tout nouveau transfert de dette à cette structure devra être accompagné d'une augmentation des recettes de façon à ne pas allonger la durée d'amortissement de la dette sociale. Une reprise de dette de 30 milliards nécessitera de porter le taux de la CRDS à 0,7 %, au lieu de 0,5 % aujourd'hui, soit un impact financier non négligeable pour nos concitoyens.

En conséquence, il a jugé extrêmement préoccupante la situation générale des finances sociales et ce, d'autant plus que cette dégradation des comptes intervient dans un contexte conjoncturel plutôt favorable avec une bonne tenue des recettes, renforçant ainsi le constat que le déficit actuel est essentiellement d'ordre structurel. Le redressement financier ne pourra résulter de simples mesures d'économie, mais bien de réformes structurelles.

Puis M. Alain Vasselle, président de la Mecss, a présenté quelques orientations pour mener à bien les réformes indispensables. En ce qui concerne l'assurance maladie, une réflexion sur la prise en charge des personnes souffrant d'une affection de longue durée (ALD) est inévitable. Ce poste absorbe 59 % des dépenses en 2004 et, à législation constante, il devrait en représenter 70 % en 2015. La tentative pour médicaliser la prise en charge des ALD prévue par la loi du 13 août 2004 a donc montré ses limites. Compte tenu de la charge que les ALD font peser sur les dépenses, des mesures plus contraignantes vont s'avérer indispensables.

Il a souligné que la création d'un bouclier sanitaire ne constitue qu'une réponse partielle au problème, même si elle devrait se traduire par une réforme profonde des régimes de prise en charge des assurés.

Il s'est prononcé en faveur d'une remise à plat des dispositifs de « reste à charge » en vigueur. Les dispositifs existant pour les consultations, les actes de biologie et l'hospitalisation pourraient être complétés par une participation forfaitaire prélevée au moment de l'achat des boîtes de médicaments.

Il a jugé urgent d'associer l'hôpital aux politiques de réduction des déficits de l'assurance maladie. Tout d'abord, par une relance de la tarification à l'activité, et notamment du processus de convergence des tarifs dont la mise en oeuvre constitue un gage d'efficience des dépenses et de qualité des soins aux patients. Seule une stratégie claire en ce domaine permettra d'associer et de responsabiliser les acteurs.

De même, les principes de la maîtrise médicalisée appliqués en ville doivent être étendus à l'hôpital, comme le prévoit la loi du 13 août 2004. A ce sujet, il serait légitime d'accroître la place dévolue à l'assurance maladie dans la gestion des dépenses hospitalières et d'accorder à l'union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) une responsabilité plus importante dans la fixation des tarifs.

La branche vieillesse constitue un deuxième domaine où les réformes ne peuvent plus attendre. Avec un déficit proche de 5 milliards d'euros cette année, l'assurance vieillesse fait les frais d'une conjonction de facteurs défavorables : une dynamique des dépenses supérieure aux estimations, des comportements des assurés mal anticipés, un marché de l'emploi moins vigoureux que prévu, l'échec des dispositifs destinés à reculer l'âge moyen de départ en retraite.

Dans ce contexte, le départ en retraite des générations du « baby-boom » rend l'équilibre, qui était déjà audacieux, intenable. Si l'on y ajoute le vieillissement de la population et l'allongement de la durée de vie, le financement des retraites paraît de plus en plus incertain, car l'accumulation de déficits et de dettes est évidemment proscrite dans ce domaine.

M. Alain Vasselle, président de la Mecss, a jugé impératif, pour redresser les comptes, d'arrêter l'hémorragie des préretraites et de tout faire pour promouvoir l'emploi des seniors. La France est aujourd'hui en dernière position en Europe avec un âge moyen de retrait du marché du travail de deux ans inférieur à celui de la moyenne européenne, de trois ans par rapport à l'Allemagne et de plus de cinq ans par rapport à la Suède.

Le dispositif des carrières longues doit également être revu, en particulier pour éviter les abus manifestes et les effets d'aubaine liés à l'utilisation des nombreuses possibilités de validations de trimestres actuellement en vigueur. Cette pratique ne respecte pas l'esprit de la réforme de 2003. De la même façon, les discussions en cours sur la pénibilité devront intégrer une dimension de coût et de soutenabilité financière qui a réellement fait défaut au moment de l'adoption de la mesure carrières longues.

Il a souhaité que l'ensemble des coûts liés au vieillissement de la population fasse l'objet d'une approche globale, prospective et surtout plus approfondie. Les besoins de financement devront notamment être chiffrés le plus correctement possible, en retenant plusieurs scénarios, de façon à éviter une nouvelle impasse.

La prochaine réforme des retraites ne pourra pas être paramétrique. Toutes les pistes doivent être explorées, par exemple en instituant une retraite par points, tout en garantissant aux assurés sociaux la pérennité du système et d'un certain nombre de règles minimales, comme cela a été réalisé en Suède.

M. Alain Vasselle, président de la Mecss, a conclu par quelques observations sur le financement de notre protection sociale, sujet sur lequel un début de polémique est récemment apparu, principalement autour de la question de la TVA sociale.

Les différents travaux menés au cours de l'année 2006 sur la possibilité de recourir à une cotisation sur la valeur ajoutée, à une cotisation patronale généralisée, à plus de CSG ou à la TVA sociale ont clairement montré qu'aucune solution n'est idéale. Il en est surtout ressorti qu'aucune de ces alternatives n'entraîne un impact significatif en termes d'emploi et qu'on ne peut exclure un risque inflationniste dans le cas de la TVA sociale. Le prélèvement le plus neutre reste, au vu de ces rapports, la CSG.

En outre, la mise en place d'une véritable TVA sociale, c'est-à-dire le transfert de points de cotisations sur des points de TVA, est bien plus complexe qu'il n'y paraît, compte tenu en particulier des allégements de cotisations en vigueur entre 1 et 1,6 Smic. En revanche, la création de nouvelles taxes est parfaitement envisageable, par exemple une taxe sur les boissons sucrées, dans un souci autant sanitaire que financier. Dans le même ordre d'idée, des marges existent encore pour la taxation de certains produits alcoolisés.

Enfin, d'autres modes de financement, de type plutôt assurantiel, seront indispensables, notamment pour financer certaines dépenses liées à la dépendance. Sur ce sujet, une réflexion commune sera menée avec la commission des finances au cours de l'hiver prochain.

M. François Autain a estimé que ce débat d'orientation doit être l'occasion de faire le bilan de la réforme de l'assurance maladie adoptée en 2004, qui était censée ramener l'équilibre budgétaire à compter de 2007.

Il a fait part de ses réserves quant aux propositions émises par le rapporteur pour lutter contre le déficit de la branche assurance maladie et de la branche vieillesse et s'est prononcé, à titre personnel, en faveur d'une fusion de la CSG et de l'impôt pour rénover le financement des dépenses de protection sociale.

M. André Lardeux a observé que le déficit de la branche famille est artificiellement provoqué par l'Etat qui n'honore pas les créances dues au titre du versement de l'APL. Cette situation est inadmissible, car elle pourrait être résolue simplement si l'Etat inscrivait dans ses comptes le montant exact des sommes dues.

Revenant sur la situation financière de la branche famille, il s'est déclaré défavorable au versement d'allocations familiales dès le premier enfant, car une telle mesure n'aura aucun impact sur les évolutions démographiques. Il serait plus utile de réviser les modalités de prise en compte des modes de garde dans le versement des aides aux familles.

Il a dit son inquiétude face à l'évolution des comptes de la branche vieillesse. Les pouvoirs publics doivent être attentifs aux résultats des négociations en cours avec les partenaires sociaux sur la prise en compte de la pénibilité au travail dans le calcul de la retraite. Cet accord ne doit pas se traduire par des dérapages comparables à ceux qui ont été constatés avec les dispositifs de préretraite. Cette négociation présente d'ailleurs, à son avis, un côté immoral. Si la pénibilité au travail est telle qu'elle provoque un raccourcissement de la durée de vie des salariés, la solution ne réside pas dans une anticipation de leur départ à la retraite, mais bien dans une réflexion sur les moyens d'améliorer leurs conditions de travail.

Evoquant la situation de l'assurance maladie, il a rappelé que le nombre de personnes souffrant d'affections de longue durée est plus important en France que dans des pays comme l'Allemagne ou la Suède et que cette situation n'est pas justifiée par des différences d'état sanitaire.

Il a jugé inacceptable toute politique fondée sur le report de la dette sociale vers les générations futures et s'est déclaré favorable à une augmentation de la CSG et à son harmonisation.

Il a estimé que la TVA sociale n'est pas une réponse globale à la question des déficits sociaux puisqu'elle ne permet qu'un transfert des modalités de financement. Il a conclu en précisant que la prise en charge de la dépendance ne peut pas être assurée par les seuls régimes de sécurité sociale et que, dans ces conditions, une démarche assurantielle est inévitable.

M. Guy Fischer a estimé que ce rapport met en évidence l'échec de la réforme de l'assurance maladie de 2004, tandis que de lourdes incertitudes planent sur le montant réel du déficit de la sécurité sociale qui pourrait encore s'alourdir avant la fin de l'année 2007 en raison de la dégradation des comptes du FSV et du Ffipsa.

Il a souligné l'aggravation des inégalités d'accès aux soins dont sont victimes les populations les plus fragiles et s'est inquiété des risques de réduction des moyens financiers attribués à l'hôpital public, alors que les établissements privés se regroupent et augmentent leurs capacités d'accueil.

Il a fait part de son opposition à toute proposition de réforme du financement de la protection sociale qui pèserait uniquement sur les salariés, tandis que le monde de l'entreprise serait exonéré de ces charges. Il s'est étonné que les assureurs complémentaires ne soient pas associés au plan d'économie présenté par le Gouvernement et a souligné que les médecins ont bénéficié de revalorisations tarifaires importantes au cours des dernières années.

En conclusion de son intervention, il a estimé indispensable de procéder à une évaluation de la réforme des retraites mise en oeuvre en 2003.

En réponse aux différents intervenants, M. Alain Vasselle, président de la Mecss, s'est déclaré réticent face à une fiscalisation complète des recettes de la sécurité sociale, qui nuirait à la transparence des comptes, puisque les recettes ne seraient plus affectées à des dépenses précises, comme c'est le cas aujourd'hui avec les cotisations et les taxes.

Il a reconnu que le bilan de la réforme de l'assurance maladie n'est pas à la hauteur des objectifs fixés il y a maintenant trois ans.

Il a précisé que la participation des assureurs complémentaires à la prise en charge de la rémunération forfaitaire des médecins nécessite l'adoption d'une mesure législative et qu'en conséquence, cette disposition n'a pas pu être immédiatement intégrée dans le plan d'économie établi par le Gouvernement après la notification du comité d'alerte.

Il a considéré que la participation de l'hôpital à la réduction des dépenses d'assurance maladie ne se traduit pas automatiquement par une réduction de l'offre de soins. Sa proposition consiste à établir une plus grande transparence sur les dépenses hospitalières, afin que la Cnam cesse d'être un payeur aveugle.

Il a précisé qu'un lien plus étroit doit être établi entre les revalorisations du tarif des consultations médicales et le respect des engagements de maîtrise médicalisée conclus entre la Cnam et les syndicats médicaux, car ces engagements justifient les augmentations accordées par les pouvoirs publics.

La commission a autorisé la publication de cette présentation sous la forme d'un rapport d'information.