Mercredi 28 janvier 2009

- Présidence de M. Jean Arthuis, président -

Services à la personne : bilan et perspectives - Audition de Mme Michèle Debonneuil, inspectrice générale des finances, membre du conseil d'analyse économique

La commission a procédé à l'audition de Mme Michèle Debonneuil, inspectrice générale des finances et membre du conseil d'analyse économique, sur les services à la personne.

M. Jean Arthuis, président, a indiqué que cette audition permettrait de dresser un bilan du plan de développement des services à la personne mais aussi de présenter, dans le contexte de la crise actuelle, de nouvelles perspectives pour les métiers de services au sens large.

Mme Michèle Debonneuil, inspectrice générale des finances, a souhaité resituer l'exécution du plan de développement des services à la personne, lancé en 2005 par M. Jean-Louis Borloo, alors ministre de l'Emploi, de la Cohésion sociale et du Logement, dans un contexte économique et temporel plus large, en lien avec la crise actuelle. Ainsi est-elle revenue sur les causes de l'épuisement du modèle économique occidental qui fondait, depuis l'après-guerre, la croissance économique sur la production de biens et l'équipement des ménages. D'une société de la mécanisation et de « l'avoir plus », l'introduction des nouvelles technologies a réorienté les objectifs de production, vers l'information et l'accession au « mieux être ». En corollaire, elle a décrit les mutations à attendre du concept de gain de productivité qui, dans une approche industrielle, consiste à produire davantage et plus vite, alors que, dans la société de l'information, il s'agit de diversifier la production et de mieux l'adapter à la demande. Cela revient, en matière de services, à élargir l'offre, améliorer la qualité et assurer une meilleure satisfaction des besoins.

Elle a rappelé que les services à la personne représentaient non seulement un gisement d'emplois, mais aussi un gisement de gains de productivité. Rappelant la définition des services qui consiste en « la mise à disposition temporaire d'une personne, de savoir ou de savoir-faire », elle a rappelé que le rapprochement de l'offre et de la demande devait s'appuyer sur les nouvelles technologies afin d'obtenir une organisation véritablement productive et mise à disposition sur les lieux de consommation. Elle a affirmé que, à l'avenir, la croissance ne pourrait reposer que sur le développement des services, dans le cadre d'une « économie quaternaire ».

S'agissant d'une révolution de civilisation qui estompe la frontière entre le secteur secondaire et le secteur tertiaire, elle a annoncé que la transition entre la société industrielle et la future « économie quaternaire » serait appelée à créer un chômage de masse, à l'image de la transition qu'a connue l'Occident entre le vieux modèle agricole et l'ère industrielle.

Revenant sur les causes profondes de la crise économique actuelle, Mme Michèle Debonneuil a souligné que l'émergence des nouvelles technologies avait fortement contribué aux gains de productivité dans l'industrie, contribuant ainsi à rendre inutiles de très nombreux postes de travail. Or, afin de continuer à employer ces personnes provisoirement sorties des emplois productifs, les Etats-Unis d'Amérique ont largement prôné un recours aux « petits boulots », soutenus dans leur consommation par un endettement généralisé. Elle a estimé que ce changement de modèle économique était une des causes de la crise, à l'image des « subprimes », constituant un cas typique d'une mutation structurelle qui s'opère dans le passage d'une ancienne économie à une nouvelle. Elle a annoncé que l'entrée dans un modèle quaternaire continuerait à détruire le tissu industriel, notamment dans le secteur automobile, faute d'introduction de nouveaux modes de production et de satisfaction des besoins des consommateurs. Elle a considéré que le soutien à l'industrie automobile dans sa configuration actuelle était celui d'un modèle de développement « totalement dépassé ». Elle a redouté que le stade ultime d'affaiblissement des organismes bancaires et du système industriel ne conduise en dernier recours les Etats à s'endetter massivement.

Devant ce constat, Mme Michèle Debonneuil a fait valoir que l'Etat était le seul acteur capable de jouer un rôle d'accélérateur et de catalyseur pour la réforme d'organisations complexes telles que l'économie des services à la personne. Elle a estimé que si le marché pouvait assumer a priori toutes les mutations, celui-ci réagirait trop lentement, une fois les « dégâts » sociaux réalisés. Or, en cette période de crise très profonde, elle a observé que des Etats libéraux tels que les Etats-Unis étaient amenés à intervenir dans des circuits jusqu'alors strictement privés, justifiant ainsi la pleine légitimité de l'Etat pour coordonner des politiques à mettre en oeuvre d'urgence.

Revenant sur le bilan du plan de développement des services à la personne, Mme Michèle Debonneuil a estimé - au-delà des fonctions de base de ces métiers anciennement tournés vers les tâches domestiques et l'aide aux personnes fragiles - que les métiers de services devaient faire l'objet d'une vaste diversification. Elle a mis en lumière la nécessité de soutenir les entreprises à hauteur de 50 % du coût des prestations afin d'amorcer le développement du secteur privé. Elle a rappelé que cette « solvabilisation » avait déjà été mise en place dans le cadre du plan « Borloo » mais qu'elle devait être intensifiée grâce notamment à un nouveau dispositif d'agrément des entreprises et des associations. Même si l'essentiel des créations d'emplois chez les particuliers employeurs est réalisé en raison des nombreux avantages fiscaux et sociaux, il s'agissait d'encourager la déclaration des employés et de réduire le « travail au noir ».

Mme Michèle Debonneuil a mis en exergue la nécessité de soutenir le secteur des services à la personne par un « mot d'ordre mobilisateur » selon lequel si chaque famille française recourait à trois heures de services par semaine, cela créerait deux millions d'emplois à temps plein. Dans cette perspective, elle s'est déclarée favorable à la mise en place d'une réduction immédiate de 50 % du coût des services à la personne qui se substituerait au crédit ou à la réduction d'impôt dont le retour sur investissement n'intervient qu'avec un an de décalage. A cette fin, elle a suggéré la diffusion d'un outil de solvabilisation immédiate sous la forme d'une carte de paiement dite « 50 % » permettant d'acheter une gamme de services. Elle a précisé que ce dispositif pourrait s'appuyer sur la technologie des cartes et téléphones portables « sans contact », qui présentent des potentialités de développement très importantes et dont le coût serait maîtrisé si l'Etat en généralisait l'usage. Elle a souligné que l'utilisation des ordinateurs et des téléphones par les entreprises des services à la personne, sur des plateformes techniques distinctes et redondantes, représentait 30 % du prix des services rendus.

Mme Michèle Debonneuil a souligné que seul l'Etat était apte à susciter une demande de masse, à sécuriser le dispositif, à définir des formations propres à assurer l'attractivité des métiers de service. A cet égard, elle a proposé que soit mis en place un dispositif incitatif permettant aux salariés, le plus souvent employés à temps partiel, d'être payés à temps plein la première année à la condition qu'ils suivent une formation. Elle a souhaité que les ministères chargés du travail, de la santé, de l'agriculture mais également de l'éducation nationale, se coordonnent pour mettre en oeuvre un « véritable parcours de formation » tout au long de la vie.

En conclusion, Mme Michèle Debonneuil a affirmé que le secteur de l'automobile serait également amené à entrer dans l'économie quaternaire, du fait des nouvelles exigences en matière de mobilité, de redéploiement des emplois et de protection de l'environnement. Elle a cité en exemple les projets de mise à disposition de véhicules électriques urbains qui, à court terme, pourraient conduire à un renouvellement accéléré du parc de véhicules et pourvoir un très grand nombre d'emplois de services.

Un débat s'est alors instauré.

M. Jean Arthuis, président, a souligné que la crise économique mondiale semblait marquer la fin d'un cycle industriel et devait inciter les Etats à mettre en oeuvre des solutions novatrices. Toutefois, il a noté que l'essor des métiers de services continuerait à recourir au financement public alors même que la commission des finances recherche une baisse globale soit des allègements généraux de sécurité sociale, soit des dispositifs fiscaux dérogatoires.

Mme Nicole Bricq a mis en exergue le caractère peu redistributif des allègements fiscaux qui ne concernent que les contribuables les plus aisés. Elle a ajouté que, dans un contexte de forte montée du chômage et de précarisation des emplois, l'aide de l'Etat au secteur des services à la personne avait permis d'augmenter l'offre du secteur privé, mais que celui-ci, loin de prendre le relais dans la solvabilisation des services à la personne, continuerait à réclamer un soutien public.

M. Joël Bourdin s'est interrogé sur la signification du concept « d'industrialisation des emplois de services » et sur la capacité à réaliser des économies d'échelle. Il a considéré que, dans le secteur des services à la personne, dont la demande est éclatée, l'identification des coûts fixes ou variables était malaisée. Reprenant la distinction introduite par Jean Fourastié concernant les secteurs primaire, secondaire et tertiaire, il a souhaité que soit mieux défini le périmètre de l'économie quaternaire.

M. Jean-Jacques Jégou est revenu sur l'épuisement du modèle de croissance des sociétés occidentales et s'est inquiété que les mesures de soutien consistent en des versements à fonds perdus en faveur d'un système qu'il conviendrait de réformer. Il a fait part du risque que les salariés des sociétés de services à la personne, majoritairement employés à temps partiel, ne soient le nouveau prolétariat de l'économie moderne.

M. François Marc s'est félicité du gisement d'emplois que représentent les services à la personne. Néanmoins, il s'est demandé si ceux-ci étaient véritablement créateurs de richesse et s'ils pouvaient, à eux seuls, rétablir la croissance. Enfin, il lui a paru paradoxal que le « tout technologique » soit prôné dans un secteur où, à l'inverse, la relation sociale et le lien humain sont les premières qualités recherchées par les consommateurs.

M. Jean-Pierre Fourcade a précisé que le projet de développement des emplois de service fondés sur les nouvelles technologies était un gage de succès dans la mesure où les donneurs d'ordre et l'offre en seraient d'autant plus diversifiés. Toutefois, il a craint que le développement de l'économie quaternaire ne conduise à la disparition des structures actuelles telles que l'artisanat. Il a souhaité savoir si une baisse générale des exonérations et allègements de charges pouvait être envisagée sur les bas salaires.

En réponse à M. Adrien Gouteyron, qui s'est inquiété de l'affaiblissement annoncé du secteur automobile et du devenir des salariés de ce secteur, Mme Michèle Debonneuil a indiqué qu'au lieu de soutenir une industrie en fin de cycle, l'Etat devait inciter les acteurs à s'engager dans un modèle économique quaternaire afin de rajeunir le parc en accélérant la production de petits véhicules, de proposer dans de brefs délais de nouveaux modèles électriques, à diffuser sur l'ensemble du territoire grâce à des bornes de recharge, et à créer un nouveau « business model » qui améliorerait la satisfaction des besoins de mobilité.

Revenant sur la question du périmètre de l'économie quaternaire, elle a indiqué qu'il ne s'agissait pas d'un secteur en particulier mais d'un changement de mentalité sur un ensemble d'activités bien plus large que les simples services à la personne, faisant prévaloir les éléments qualitatifs de tout appareil de production. Elle a appelé, dans cette perspective, à inscrire le développement de la société quaternaire dans une véritable « vision politique » de ce que sera le monde de demain.

Au terme de ce large débat, M. Jean Arthuis, président, a suggéré qu'un bilan des politiques de développement des métiers de service fasse l'objet d'une étude de la délégation parlementaire pour la planification.

Jeudi 29 janvier 2009

- Présidence de M. Jean Arthuis, président -

Programmation des finances publiques et loi de finances rectificative pour 2009 - Amendements du Gouvernement sur les conclusions des commissions mixtes paritaires

M. Yann Gaillard remplaçant M. Philippe Marini, rapporteur général, empêché, a, tout d'abord, rendu compte des travaux des deux commissions mixtes paritaires, réunies le mardi 27 janvier 2009 à l'Assemblée nationale, chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion, pour la première, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2009, et, pour la seconde, sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009-2012.

S'agissant du projet de loi de finances rectificative pour 2009, il a indiqué que sur les onze articles restant en discussion, neuf avaient été adoptés dans la rédaction du Sénat ou n'avaient fait l'objet que d'amendements de forme, précisant qu'en revanche, deux articles - l'article 1er relatif au Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) et l'article 6 relatif à « l'Eco-prêt à taux zéro » - avaient suscité un large débat.

En ce qui concerne l'article 1er, il a indiqué que la CMP avait confirmé une disposition, adoptée par le Sénat, visant à reporter au 15 avril 2009 la date limite de conclusion des conventions signées par les communes pour pouvoir bénéficier du versement anticipé des attributions du FCTVA pour les investissements réalisés en année n-1.

S'agissant du seuil d'investissement permettant d'obtenir ce versement anticipé, il a précisé que le principe d'une prise en compte d'une moyenne de quatre années de référence avait été confirmé, mais qu'il avait été décidé de substituer l'année 2004 à l'année 2008.

Il a indiqué que, en revanche, la CMP n'avait pas confirmé la création d'une dotation spéciale pour les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), destinée à soutenir les communautés de communes et les communautés d'agglomération qui investiraient davantage en 2009 et en 2010 que leur investissement moyen au cours de la période 2005-2008.

M. Yann Gaillard a indiqué que le dispositif introduit à l'initiative de M. Jean Arthuis, président, tendant notamment à anticiper d'une année supplémentaire le versement du FCTVA, avait donné lieu à un débat approfondi.

Il a précisé que le vote avait été acquis par 7 voix contre 7, M. Didier Migaud, président de la CMP, ayant jugé, avec l'appui d'une majorité des membres de la CMP, que le vote ne portait pas sur le dernier texte adopté, c'est-à-dire celui du Sénat, mais sur le dispositif voté par le Sénat, ce qui signifiait qu'en cas de partage égal des voix, c'était le dispositif voté par l'Assemblée nationale qui était considéré comme adopté.

S'agissant de l'article 6 relatif à « l'Eco-prêt à taux zéro », destiné à financer certains travaux de rénovation énergétique, il a précisé que le débat avait porté sur la question du cumul de ce dispositif avec les autres avantages fiscaux existant dans ce domaine. Un compromis a été trouvé en limitant ce cumul aux bénéficiaires ayant un revenu fiscal de référence inférieur à 45.000 euros.

Il a ensuite fait part des interrogations de M. Jean-Pierre Fourcade sur la soutenabilité financière de la politique budgétaire, que traduisait le plan de relance de l'économie, avec, en 2009, un déficit budgétaire et un besoin de financement estimés respectivement à 86 milliards d'euros et 200 milliards d'euros.

S'agissant du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009-2012, M. Yann Gaillard a précisé que le texte avait fait l'objet de très peu de modifications et de débats. Il a indiqué que, sur les huit articles restant en discussion, sept n'avaient fait l'objet que d'amendements de forme ou avaient été adoptés dans la rédaction du Sénat. Il a précisé que seul l'article 2, relatif aux objectifs de la programmation pluriannuelle des finances publiques, avait fait l'objet de discussions approfondies.

Alors que le Sénat, respectueux du principe de l'autonomie des collectivités territoriales, ne souhaitait pas que les tableaux retraçant l'évolution des soldes par catégorie d'administrations publiques comprennent une ligne correspondant aux collectivités territoriales, il a indiqué que l'Assemblée nationale avait convaincu la CMP d'accepter de rétablir ces tableaux dans la forme initialement prévue par le gouvernement, c'est-à-dire en distinguant les différentes catégories d'administrations publiques, moyennant deux conditions :

- d'une part, il a été décidé de substituer l'expression « besoin de financement » au mot « solde » pour les collectivités territoriales ;

- d'autre part, il a été pris en compte que les députés ne demandaient pas la suppression de l'article 4 A, qui ne fixait de norme de dépense que pour l'Etat, ses organismes et la sécurité sociale, en excluant les administrations locales.

Il a souligné que la CMP n'avait pas cru pouvoir toucher aux chiffres compris dans les différents articles du projet de loi, considérant qu'il s'agissait d'une prérogative du pouvoir exécutif et que les règles de recevabilité financière lui interdisaient de prendre acte de l'accroissement des déficits.

Il a ajouté que M. Gilles Carrez, rapporteur général pour l'Assemblée nationale, avait annoncé que, dans ces conditions, le gouvernement allait, sur la base du rapport adopté par la CMP, modifier en tant que de besoin, les chiffres du projet de loi pour tenir compte de l'évolution de la conjoncture économique.

A titre personnel, M. Yann Gaillard a indiqué que si la méthode choisie avait le mérite de la cohérence, elle demeurait délicate, dans la mesure où elle revenait à inscrire dans la loi des chiffres correspondant à une réalité particulièrement mouvante.

Il a relevé, notamment, que le gouvernement conservait sa prévision de + 0,2 - 0,5 % de croissance du Produit intérieur brut (PIB) pour 2009, alors que la plupart des conjoncturistes anticipaient une croissance négative d'au moins 1 %.

Tout en insistant sur l'importance de mener des réformes de structure en période de crise, il a souligné la nécessité de poursuivre la maîtrise des dépenses.

M. Albéric de Montgolfier a estimé que le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009-2012 demeurait pertinent s'agissant de la maîtrise des dépenses de fonctionnement de l'Etat, mais que, en revanche, il restait aléatoire en ce qui concernait la partie consacrée aux hypothèses macroéconomiques et aux prévisions de recettes.

M. Jean-Pierre Fourcade s'est interrogé sur la soutenabilité de la politique budgétaire, que traduisait le plan de relance, avec, pour 2009, un déficit budgétaire de 86 milliards d'euros et un besoin de financement de près de 200 milliards d'euros. Il a suggéré que le gouvernement présente le déficit budgétaire en distinguant trois composantes : la part du déficit issue des dépenses de fonctionnement ; celle résultant de la contribution de l'Etat à l'effort d'investissement et celle correspondant à l'accélération du remboursement des dettes de l'Etat. Il a en effet estimé que cette décomposition permettrait de mieux justifier les hypothèses de réduction du déficit public à compter de 2011-2012.

M. Jean Arthuis, président, a rappelé que l'idée d'instaurer une loi de programmation pluriannuelle des finances publiques était apparue au moment du débat sur le projet de loi de révision constitutionnelle, lorsque avait été évoquée l'idée d'introduire dans la Constitution le principe, dit de la « règle d'or », interdisant les déficits publics issus de dépenses de fonctionnement. Comme M. Albéric de Montgolfier, il a estimé que le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009-2012 conservait sa pertinence s'agissant de la maîtrise des dépenses de fonctionnement de l'Etat, mais que, en revanche, les hypothèses macroéconomiques de ce projet de loi demeuraient très incertaines. Il a notamment insisté sur la forte dégradation du déficit de la sécurité sociale, résultant pour partie de la contraction de la masse salariale et donc de l'assiette des cotisations sociales.

Rappelant les déclarations récentes de M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes, Mme Nicole Bricq a souhaité savoir comment la commission s'associerait aux travaux de suivi que la Cour des comptes souhaitait mener sur les mesures prises par le gouvernement, notamment dans le cadre de la première loi de finances rectificative pour 2008.

M. Jean Arthuis, président, a insisté sur la question délicate de la compatibilité de deux des fonctions de la Cour des comptes, à savoir une fonction juridictionnelle et une fonction de certification des comptes.

M. Jean-Pierre Fourcade a indiqué qu'en sa qualité de rapporteur spécial de la mission « Engagements financiers de l'Etat », il auditionnerait notamment le directeur de l'Agence France Trésor (AFT). Il a ajouté qu'il conviendrait également de rencontrer le directeur de la Société de prises de participation de l'Etat.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur les risques d'inflation résultant de l'ampleur des émissions d'emprunt réalisées à l'échelle mondiale en raison de la mise en oeuvre des différents plans de relance nationaux. Il a ainsi indiqué qu'au déficit budgétaire de plus de 86 milliards d'euros et au déficit de la sécurité sociale de 14 milliards d'euros, soit un total de l'ordre de 100 milliards d'euros, il convenait d'ajouter les emprunts consécutifs à la couverture d'une série d'autres besoins : le refinancement des titres de l'Etat arrivant à échéance, les émissions obligataires de la Société de financement de l'économie française (SFEF) et de la Société de prises de participation de l'Etat (SPPE), ainsi que celles nécessaires aux interventions du fonds stratégique.

La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements aux conclusions des deux commissions mixtes paritaires, présentés par le gouvernement.

S'agissant du projet de loi de finances rectificative pour 2009, elle a émis un avis favorable à l'adoption de l'amendement à l'article 2 relatif à l'article d'équilibre général du budget, à la trésorerie et au plafond d'autorisation des emplois. Cet amendement tend à modifier l'article d'équilibre par coordination avec la suppression, par la CMP, de la disposition instaurant une « dotation de relance » pour les communautés de communes et les communautés d'agglomération.

Quant au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012, la commission a émis un avis favorable à l'adoption de l'ensemble des amendements présentés par le gouvernement, soit :

-  à l'article 2 relatif aux objectifs de programmation pluriannuelle des finances publiques, trois amendements proposant, respectivement, d'inclure explicitement les effets du plan de relance de l'économie  dans la programmation des finances publiques ; d'actualiser la trajectoire de solde public d'ici à 2012 pour tenir compte de la révision à la baisse de la prévision de croissance pour 2009 ainsi que des résultats de l'exécution pour l'année 2008 ; et d'actualiser, par coordination, la trajectoire de la dette publique d'ici à 2012 ;

-  à l'article 3 relatif à l'approbation du rapport annexé au projet de loi, un amendement tendant à modifier profondément ce rapport, par coordination avec les autres amendements du gouvernement et avec le plan de relance de l'économie ;

-  à l'article 4 relatif à la norme annuelle de progression des dépenses de l'Etat, un amendement précisant que la règle d'indexation des dépenses de l'Etat sur la prévision d'inflation en 2009-2012 s'entend « hors effet de la loi de finances rectificative pour 2009 portant plan de relance de l'économie » ;

-  à l'article 5 relatif à la programmation triennale des crédits des missions du budget général de l'Etat, un amendement proposant d'ajuster les plafonds d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement de chaque mission du budget général pour les années 2009 à 2011 ;

-  à l'article 6 relatif à l'évolution des prélèvements sur recettes et des crédits affectés aux collectivités territoriales, un amendement précisant que la règle selon laquelle les dotations de l'Etat aux collectivités territoriales sont indexées en 2009-2012 sur la prévision d'inflation s'entend hors prise en compte de la mesure du plan de relance relative au Fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) ;

-  à l'article 9 relatif à l'encadrement des mesures nouvelles relatives aux impôts, aux cotisations et aux contributions sociales affectés au budget de l'État ou à la sécurité sociale, deux amendements tendant à actualiser les prévisions de recettes fiscales de l'Etat et des recettes des régimes obligatoires de base en 2009-2012, afin de prendre en compte les mesures du plan de relance et la révision à la baisse des prévisions de recettes pour 2008, qui a des conséquences sur 2009 et les années suivantes.

Comité de suivi du plan de financement de l'économie française - Communication

Puis M. Jean Arthuis, président, a rendu compte de la première réunion du comité de suivi du dispositif de financement de l'économie française qui s'est tenue mardi 27 janvier 2009.

Il a tout d'abord rappelé que le Parlement avait autorisé par la loi n° 2008-1061 de finances rectificative pour le financement de l'économie du 16 octobre 2008, l'octroi de la garantie de l'Etat, dans la limite de 360 milliards d'euros, aux créances émises par la Société de financement de l'économie française (SFEF) et aux financements levés par la Société de prises de participation de l'Etat (SPPE) ainsi que par le groupe DEXIA.

Après avoir rappelé que le comité de suivi avait été mis en place par décret à la demande du Parlement, il a indiqué qu'il se composait des présidents et rapporteurs généraux des commissions des finances des deux assemblées, du Gouverneur de la Banque de France, du directeur général du Trésor et de la politique économique et du directeur du Budget. Il a souligné que le comité de suivi constituait un outil au service des prérogatives de contrôle du Parlement, et que, à ce titre, sa mission n'était pas exclusive d'un travail de contrôle de la commission des finances. Il a considéré que le champ de compétences du comité de suivi devait être élargi aux nouvelles garanties votées dans la loi n° 2008-1443 de finances rectificative du 30 décembre 2008 et dans le projet de loi de finances rectificative pour 2009, à savoir la garantie de l'Etat à la Caisse centrale de réassurance (CCR) pour ses opérations de réassurance de risques d'assurance-crédit portant sur des PME et sur des entreprises de taille intermédiaire situées en France, et la garantie de l'Etat aux prêts bancaires consentis aux entreprises signataires d'un contrat de partenariat public-privé.

Il a ensuite présenté un premier bilan de l'action de la SFEF dont le but est de prévenir l'asphyxie du crédit interbancaire, en mettant en place une intermédiation de confiance apportée par la garantie de l'Etat. La SFEF permet ainsi aux banques d'obtenir des financements de moyen terme à des taux attractifs. A ce jour, 23 milliards d'euros ont été prêtés à treize banques, à un taux moyen de 4 %, dont 3 % correspondent au taux d'emprunt par la SFEF, auquel s'ajoute la rémunération de la garantie de l'Etat.

M. Jean Arthuis, président, a indiqué que la comptabilisation de la rémunération de la garantie de l'Etat, soit 380 millions d'euros à ce jour, devait faire l'objet d'un suivi attentif et être constatée, logiquement, comme une provision pour risque et non comme une recette budgétaire.

Il a ensuite rendu compte de l'action de la SPPE chargée d'apporter des fonds propres, ou des « quasi-fonds propres », aux établissements bancaires, afin d'améliorer leur ratio de solvabilité, et jouer ainsi un rôle « d'activateur de distribution de crédits ». La SPPE a procédé, le 11 décembre 2008, à une première souscription de titres supersubordonnés (TSS) à hauteur de 10,5 milliards d'euros au profit de six groupes bancaires. Le taux de rémunération moyen de ces titres est de 8,2 %, soit une rétribution relativement élevée afin d'inciter les établissements à sortir rapidement du dispositif. Une deuxième tranche de 10,5 milliards d'euros sera ouverte jusqu'au 31 août 2009, les banques auront alors le choix entre des TSS ou des actions de préférence sans droit de vote.

M. Jean Arthuis, président, a insisté sur la nécessité d'établir une distinction entre :

- les établissements « à sauver », pour lesquels l'Etat procède directement à une recapitalisation et participe à la gouvernance de l'établissement ;

- et les établissements pour lesquels l'Etat ne fait que pallier, de manière temporaire, les déficiences du marché.

M. Jean Arthuis, président, a mis l'accent sur l'importance du suivi des conventions signées entre les établissements bancaires bénéficiaires et l'Etat. Il a notamment observé que l'objectif d'évolution d'encours demandé, soit 3,5 % de croissance mensuelle en moyenne, devait être appuyé pour être significatif sur des indicateurs précis, notamment le montant des encours par type d'entreprise, l'évolution moyenne de l'encours des crédits à l'économie pouvant témoigner d'effets de substitution importants tels que, par exemple, le repli des grands groupes français sur des établissements bancaires nationaux. Il a également indiqué que les banques s'étaient engagées à respecter, en matière de gouvernance, un certain nombre de principes et, que, à ce titre, les prochaines assemblées générales seraient instructives.

Un large débat s'est ensuite instauré.

Mme Nicole Bricq a regretté que la communication du gouvernement soit essentiellement fondée sur le fait que les garanties apportées par l'Etat puissent rapporter, dans un contexte de crise aigüe, des recettes au budget général.

M. Jean Arthuis, président, a estimé que s'il était normal que l'Etat accorde sa garantie à titre onéreux, il n'était toutefois pas opportun de mettre l'accent sur le fait que l'Etat soit le « gagnant » de cette opération.

En réponse à Mme Nicole Bricq qui s'interrogeait sur les intentions du groupe BNP-Paribas quant à la deuxième souscription prévue par la SPPE, M. Jean Arthuis, président, a indiqué, d'une part, que ce sujet d'actualité était survenu postérieurement à la réunion du comité de suivi et, d'autre part, que, selon les informations qu'il avait obtenues du gouvernement, aucune décision n'avait été prise concernant la ventilation de la seconde tranche de souscription par la SPPE. Il a reconnu que la situation actuelle nécessitait d'être clarifiée.

M. Philippe Adnot s'est étonné qu'après avoir annoncé un bénéfice et donc la distribution éventuelle de dividendes, le groupe BNP-Paribas souhaite procéder au renforcement de ses fonds propres via la SPPE. Il s'est interrogé également sur une éventuelle amélioration de la connaissance des mécanismes qui avaient conduit à la crise des « subprimes » notamment par la diffusion des produits dits « toxiques ».

M. Jean Arthuis, président, a précisé qu'il s'était lui-même étonné publiquement que les groupes qui réalisaient des bénéfices ne les affectent pas intégralement à l'augmentation de leurs fonds propres. De même, il s'est déclaré surpris que certains groupes actuellement bénéficiaires du soutien de l'Etat aient été ceux qui ont procédé à d'importants rachats d'actions un ou deux ans auparavant. Il a toutefois expliqué que le but du dispositif, mis en place par le gouvernement français, visait à garantir une oxygénation suffisante du système bancaire en facilitant le renforcement des fonds propres des établissements bancaires afin d'éviter que ces derniers opèrent un repli sur certains risques et rationnent le crédit aux entreprises et aux ménages.

En réponse à M. Albéric de Montgolfier qui s'interrogeait sur la situation des banques britanniques, M. Jean Arthuis, président, a précisé que ces établissements avaient refusé l'aide proposée par le gouvernement, soucieux de conserver toute leur liberté dans le choix des risques qu'ils couvraient. Telle est précisément l'attitude que souhaite éviter le gouvernement français.

Répondant ensuite à M. Jean-Pierre Fourcade, M. Jean Arthuis, président, a indiqué que la première souscription réalisée par la SPPE avait profité à hauteur de 0,95 milliard d'euros au groupe Banques Populaires, de 1,1 milliard d'euros aux Caisses d'épargne, de 1,2 milliard d'euros au Crédit Mutuel, de 1,7 milliard d'euros à la Société générale, de 2,55 milliards d'euros à BNP-Paribas et de 3 milliards d'euros au Crédit agricole.

M. Albéric de Montgolfier a insisté sur la nécessité d'avoir des statistiques précises sur l'évolution de l'encours des crédits à l'économie, afin de savoir dans quelle mesure le dispositif répond aux difficultés de financement des PME. Il a évoqué les résultats de l'activité du médiateur du crédit. Il a également jugé opportun de mesurer le respect des contreparties demandées aux établissements bancaires, notamment en termes d'éthique ou d'orientation financière.

Après avoir indiqué que la prochaine réunion du comité de suivi du dispositif de financement de l'économie française se tiendrait début mars 2009, M. Jean Arthuis, président, a déclaré qu'il rendrait compte régulièrement, devant la commission des finances, de ses réunions, et que, dans le cadre des travaux de la commission, il proposerait une série d'auditions de personnalités impliquées directement dans le plan de soutien du secteur bancaire.

Organismes extraparlementaires - Désignation de candidats

Enfin, la commission a procédé à la désignation de deux candidats proposés à la nomination du Sénat.

Ont été désignés M. Auguste Cazalet, pour siéger au sein de la Commission centrale de classement des débits de tabac, et Mme Nicole Bricq, pour siéger au sein de l'Observatoire de la sécurité des cartes de paiement.