Mardi 17 février 2009

- Présidence de M. Claude Belot, président -

Débat sur les orientations de la mission

M. Claude Belot, président, a tout d'abord rappelé que, lors de sa réunion du mercredi 4 février 2009, la mission avait procédé à un premier débat sur les orientations de la mission concernant l'avenir des communes et de l'intercommunalité, et a précisé que seraient évoqués, au cours de la présente réunion, le département et la région.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a proposé que le débat porte sur l'articulation entre la région et le département, notamment au travers de la question de la clause générale de compétence. Il a reconnu que les réponses étaient diverses : certains sont favorables au maintien de cette clause pour l'ensemble des collectivités territoriales, d'autres proposent différentes évolutions. Il ne lui a pas semblé souhaitable de proposer une solution radicale, car une segmentation trop stricte des compétences ne résisterait pas à la pratique : dès le premier projet à financer, la collectivité concernée se tournerait vers les autres niveaux d'administration pour obtenir des subventions. Un compromis lui a semblé cependant possible, en clarifiant précisément les compétences existantes et en attribuant aux départements et aux régions des compétences optionnelles en plus de leurs compétences spécifiques.

M. Charles Guené a pris l'exemple du couple communes - intercommunalité, dans lequel les communes disposent d'une compétence générale qu'elles partagent de fait avec l'établissement public de coopération. Le minimum pour la réforme serait d'aligner le fonctionnement du couple départements - région sur cette technique de l'intercommunalité, qui a fait ses preuves en termes de souplesse et d'efficacité. M. Yves Krattinger, rapporteur, a estimé que le terme de couple était peu approprié pour des collectivités ayant peu de compétences communes, telles que les départements et les régions.

M. François Patriat a expliqué que sa position avait évolué, car abandonner la clause générale de compétence pour des raisons d'efficacité était en fait peu envisageable. Il a donc préféré conserver cette clause pour les départements et les régions, mais en conditionnant leur exercice à l'identification d'un véritable chef de file, avec des schémas prescriptifs et un pouvoir réglementaire.

M. Jean-François Voguet a tout d'abord rappelé que les collectivités territoriales n'étaient pas des identités abstraites, car elles satisfont des besoins humains. Le département du Val-de-Marne s'occupe par exemple de réhabilitation de logement social ou a ouvert des crèches départementales. Si la clause de compétence générale était supprimée, que se passerait-il pour ces réalisations ? Il a jugé nécessaire de regarder la réalité locale, pour éviter - surtout en période de crise - que la satisfaction collective ne diminue. Pour autant, il a également estimé nécessaire d'instaurer plus de débats, de rencontres, de concertation entre les niveaux de collectivités, mais sans mesure coercitive ou obligatoire, l'idée d'un chef de file lui paraissant dès lors intéressante pour permettre d'améliorer les rapports entre le département et la région.

M. Rémy Pointereau a indiqué que la situation justifiait des changements, notamment en termes de gouvernance. Il s'est déclaré favorable, d'une part, au maintien de la clause générale de compétence pour les communes et, d'autre part, à son attribution aux départements, qui en formant des sortes « d'interdépartementalités » confieraient certaines compétences aux régions, comme pour le couple communes - intercommunalité.

M. Eric Doligé a souligné le besoin de définir un nouveau fonctionnement permettant une harmonisation des politiques au niveau régional. Il a déploré le repli sur soi de nombreuses collectivités sur leur territoire et appelé au travail en commun. En tout état de cause, une meilleure délimitation des compétences exercées par chacun devrait permettre en elle-même de diminuer le champ de la clause générale de compétence, cette clause devant, selon lui, rester au niveau de chaque couple, pour lui permettre d'agir.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a mis en avant le besoin de clarification des compétences, qui ne devraient pas être regardées uniquement par couples, mais pour l'ensemble des collectivités, par rapport à l'Etat. Elle a relevé qu'aujourd'hui, la France connaissait en fait trois niveaux de collectivités, l'intercommunalité étant un regroupement de communes, la question se ramenant donc à savoir s'il fallait passer à deux. Face aux perspectives de réformes, il lui est apparu important que le Sénat participe à ce mouvement.

En prenant appui sur son expérience en Savoie et en Rhône-Alpes et en rappelant des arguments entendus lors du déplacement de la mission à Lyon le 12 février, M. Jean-Pierre Vial a souligné la confusion que la notion de chef de file peut laisser perdurer si sont conservées de nombreuses couches imbriquées. L'évolution de la clause générale de compétence doit se faire de manière pragmatique selon les territoires, car ceux-ci ont des expériences et des positionnements différents. Ainsi, en Rhône-Alpes existent deux composantes distinctes : l'agglomération lyonnaise et le sillon alpin.

Mme Marie-Claude Beaufils, qui a estimé les chevauchements de compétences entre régions et départements limités, a souligné la volonté, aujourd'hui, de construire une dynamique des territoires, illustrée par la transformation de la DATAR (délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale) en direction de la compétitivité des territoires. Elle a conclu au maintien essentiel de la clause générale de compétences pour chacun des trois niveaux. Elle a observé que la notion de chef de file n'avait pas été réellement mise en oeuvre et considéré qu'il fallait la favoriser mais que l'imposer ne constituait pas une solution. S'appuyant sur l'exemple de la diversité de la région Centre, aux territoires soumis à l'attractivité de différentes régions, qui ne permettait pas l'affirmation d'une unité économique forte, Mme Marie-Claude Beaufils en a déduit l'intervention nécessaire des départements.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a remarqué que la notion de chef de file était contraire à la Constitution qui interdit toute tutelle d'une collectivité sur une autre. Il a privilégié le remembrement des compétences en blocs comme l'attribution à la région de l'ensemble des aides stratégiques aux entreprises (innovation, recherche, emploi ...), aux départements et agglomérations, de leur environnement (zones d'activités). Il a appelé à l'exclusivité des dispositifs d'instruction des dossiers qui seraient confiés à une collectivité unique, garante de la conformité du dossier, quel que soit le nombre de cofinanceurs.

M. François Patriat, pour sa part, s'est déclaré favorable à des schémas prescriptifs et au chef de filat.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a invoqué le jeu de la subsidiarité en cas d'inaction de la collectivité compétente.

M. Claude Belot a observé que la suppression de la clause générale de compétences entraînait le risque d'interdire des initiatives nécessaires des départements.

Rejoint par M. Claude Belot, président, M. Yves Krattinger, rapporteur, a avancé la notion de compétences optionnelles, exercées sur l'établissement d'un « constat de carence » du niveau normalement compétent. Le rapporteur a distingué les compétences stratégiques de celles relevant du quotidien.

M. Jean-Pierre Vial, approuvant cette proposition, a insisté sur l'importance de l'articulation entre la clause de compétence générale et la clause de compétence spécifique.

M. Pierre-Yves Collombat a évoqué les deux domaines d'intervention privilégiée des départements : les territoires ruraux et les quartiers en difficulté.

M. Claude Belot, président, a rappelé que si l'article 72 de la Constitution dispose qu'aucune collectivité ne peut exercer sa tutelle sur une autre, la loi peut autoriser l'une d'entre elles à organiser les modalités de leur action commune.

La Constitution autorise donc, sous certaines conditions, la mise en oeuvre de chefs de file.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a estimé que la référence à un schéma prescriptif était, sous certains aspects, différente de la notion de chef de file, ce qui soulève des difficultés juridiques, notamment en raison de son impact sur les ressources financières des collectivités auxquelles l'action publique est prescrite.

M. Pierre-Yves Collombat a rappelé que le département avait vocation à la solidarité sociale et territoriale.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a estimé que la relation de proximité entretenue entre une collectivité territoriale et son territoire était différente suivant que l'on se trouve dans un département ou dans une région et que cette différence a un effet sur la disponibilité des élus et leur implication dans la gestion quotidienne de ce territoire.

M. Claude Belot, président, a souligné, en faisant part de son expérience personnelle, que les problèmes d'absentéisme étaient plus importants dans les conseils régionaux que dans les conseils généraux.

M. Yves Krattinger a observé que la rationalisation de la prise de décision devait se traduire par la mise en oeuvre de guichets uniques chargés de l'instruction des dossiers car il y a aujourd'hui beaucoup trop d'intervenants distincts. Il s'est prononcé en faveur d'un rapport d'instruction unique, garant de la procédure et transmis à tous les acteurs concernés par la demande de financement.

M. Jean-Pierre Vial s'est déclaré favorable à une simplification de la répartition des compétences, et à une plus grande souplesse des procédures, ce qui permet de régler la question du guichet unique d'instruction des demandes de financement. A titre d'exemple, il a indiqué qu'en Rhône-Alpes, départements et région ont harmonisé leurs interventions afin de faciliter l'instruction des dossiers.

M. Pierre-Yves Collombat s'est interrogé sur les moyens d'intervention dont disposerait, dans l'hypothèse d'une suppression de la clause de compétence générale, une collectivité territoriale en cas de carence de la collectivité spécifiquement en charge d'une compétence.

M. Charles Guené a rappelé que les établissements publics de coopération intercommunale pouvaient intervenir au-delà de leurs compétences spécialisées en procédant à des financements de projets par l'intermédiaire de fonds de concours.

Mme Josette Durrieu a rappelé que le conseil général des Hautes-Pyrénées a dû mener une politique de développement économique particulièrement active à la suite de la perte de 10 000 emplois liés à la fermeture de grands sites industriels. Cette initiative départementale, couronnée de succès, n'a pas reçu le soutien du conseil régional, celui-ci préférant consacrer son action au développement de la technopole toulousaine.

Elle a estimé qu'il convenait donc de ne pas dépouiller les départements de leurs compétences en matière de développement économique et de favoriser la mise en oeuvre d'un chef de file sur des sujets spécifiques, ainsi qu'une coopération contractuelle ; dans le même esprit, les départements devraient conserver la maîtrise de leur foncier afin de préserver leur pouvoir d'initiative.

Mercredi 18 février 2009

- Présidence de M. Claude Belot, président -

Etude du cabinet Ernst & Young - Audition

Au cours d'une séance tenue dans l'après-midi, la mission a procédé à l'audition de Mme Nathalie Van Vliet et de MM. Benoît Deron, Stéphane Manoukian et Bruno Sablière, membres du cabinet Ernst & Young, à l'occasion de la remise par ce cabinet du rapport d'étape relatif à une étude sur la réorganisation des collectivités territoriales et la clarification de leurs compétences.

Mme Nathalie Van Vliet, responsable du pôle secteur public local du cabinet, a rappelé que ce rapport intermédiaire portait sur dix compétences, qu'il s'appuyait sur une analyse de base de données et des entretiens menés avec 55 experts et 69 acteurs de terrain. Elle a indiqué que les analyses territoriales distinguaient plusieurs types de collectivités : le Grand Lyon, les métropoles à fort rayonnement (Toulouse, Nice, Bordeaux, Lille, Marseille), les métropoles à rayonnement local (Rouen, Nancy, Rennes, Montpellier), les agglomérations de taille intermédiaire (Avignon, Pau, Blois,...) et les territoires à dominante rurale. Elle a précisé que cette présentation porterait sur l'exercice par les collectivités territoriales de quatre compétences : les transports, les infrastructures, l'action sociale et médico-sociale et le développement économique.

M. Stéphane Manoukian, directeur de mission, a présenté l'analyse concernant les transports en précisant que les transports urbains représentaient l'essentiel de la compétence transports des collectivités territoriales avec 2,2 milliards de voyageurs annuels contre 450 millions pour les transports interurbains et 320 millions pour le transport scolaire. Il a indiqué que les dépenses brutes des collectivités territoriales s'élevaient à 5 milliards d'euros pour les régions, 3 milliards d'euros pour les départements et 8 milliards d'euros pour les communes et EPCI. Il a déclaré que les compétences étaient clairement réparties entre les différents acteurs, les communes et les intercommunalités étant chargées du transport urbain, le conseil général des transports interurbains et scolaires, la région du ferroviaire et l'Etat du fluvial. Il a observé que chaque niveau de collectivité intervenait sur son aire géographique et qu'il y avait une absence de tutelle d'une collectivité sur une autre, en dépit de la possibilité ouverte par la loi de créer des syndicats mixtes. Il a expliqué que les conditions d'exercice de la compétence transports variaient selon le type de collectivité en remarquant qu'il n'existait pas de fiscalité spécifique pour financer les transports interurbains, scolaires et ferrés, contrairement aux transports urbains qui bénéficient du « versement transports ». Il a indiqué que certaines collectivités établissaient des partenariats avec le secteur privé pour exploiter les réseaux urbains et a rappelé que la SNCF détenait un monopole sur le réseau ferré. Il a ensuite présenté une analyse contrastée relative à la région Lorraine, en insistant sur la qualité de l'offre de transport et l'adaptation des besoins à la demande mais en mettant également en évidence le manque d'interopérabilité, l'hétérogénéité tarifaire, l'absence de coordination territoriale et le défaut de lisibilité (absence d'information sur l'intermodalité et grilles tarifaires peu comparables). Il a expliqué que les autorités régionales travaillaient à la création de titres de transport combinés, ferroviaires et urbains, à l'échelle du territoire national. Enfin, M. Stéphane Manoukian a relevé que le déficit de coordination territoriale tenait en particulier à l'absence d'instances rassemblant les différents acteurs. Il a enfin considéré que la coordination serait facilitée si le transport interurbain était confié aux régions en complément du transport ferré.

M. Edmond Hervé a considéré qu'une seule catégorie de collectivité ne pouvait pas avoir le monopole de la compétence transports. Il a estimé que l'interopérabilité avait vocation à être mise en oeuvre par voie contractuelle et a rappelé le rôle du département qui intervenait en appui des communes.

M. Eric Doligé a considéré que si la qualité des services n'était pas contestée, il existait bien un problème de coordination et d'interopérabilité, tandis que M. Charles Guené a observé que le droit européen compliquait les collaborations entre collectivités territoriales.

M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, ayant évoqué la perspective d'un transfert de la compétence transports interurbains à la région, le département conservant les transports scolaires, M. Jean-Claude Peyronnet a observé néanmoins que les transports scolaires n'étaient pas toujours spécifiques et pouvaient également être opérés à travers des lignes régulières. M. Jean-Pierre Vial a signalé le cas de son département, dans lequel l'unification des services de transports interurbains était envisagée depuis plusieurs années sans être mise en oeuvre.

M. Edmond Hervé a estimé que la compétence transports avait pour avantage de donner sa pleine légitimité à l'intercommunalité, du fait de sa visibilité aux yeux des usagers. Il a considéré qu'il n'était pas souhaitable de désigner une autorité supérieure unique et qu'il fallait pouvoir aménager les temps au niveau local.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a rappelé que la loi sur les transports intérieurs (LOTI) avait ouvert la possibilité de créer des syndicats mixtes pour favoriser l'intermodalité. Il a estimé que le transport urbain constituait une compétence propre à l'agglomération, que les transports interurbains avaient vocation à faire l'objet de contractualisations et que les transports scolaires devaient relever du département.

M. Stéphane Manoukian, directeur de mission, a ensuite présenté l'analyse relative aux infrastructures en observant que l'essentiel des dépenses concernait aujourd'hui en France le transport routier et le transport ferroviaire. Il a indiqué que si l'intervention des différents acteurs était clairement identifiée, le financement des infrastructures n'était pas réalisé en cohérence avec les compétences des acteurs, du fait du recours à des financements croisés complexes. Il a expliqué que les collectivités territoriales participaient de manière croissante au financement des infrastructures de transports, notamment nationales, à l'image de la LGV Est. Il a déclaré que, en matière de transports, le décideur n'était pas forcément le payeur, en donnant l'exemple du transport routier pour lequel l'essentiel des dépenses était à la charge des collectivités territoriales, alors que l'essentiel des recettes, notamment la fiscalité des carburants, restait entre les mains de l'Etat. Il a considéré que les financements futurs pourraient recourir aux écotaxes, aux péages urbains ou à la captation des rentes foncières.

M. Bruno Retailleau a déclaré que l'observation concernant l'absence de corrélation entre les recettes et les dépenses en matière de transport routier était instructive et a observé que les financements croisés répondaient à une démarche pragmatique pour financer les grandes infrastructures.

M. Claude Belot, président, a déploré que l'Etat ait décidé de se séparer de la « rente autoroutière » en observant que cette décision avait été motivée par le fait que la réglementation européenne interdisait l'affectation des surplus d'une société d'autoroutes à d'autres investissements autoroutiers.

M. Eric Doligé a déploré le fait que de nombreux investissements routiers soient bloqués en raison d'un défaut d'autorisation de l'Etat, alors même que les financements privés pouvaient être rassemblés.

M. François Patriat a observé que le plan de relance du Gouvernement reposait principalement sur des financements croisés et renforçait la tendance à l'imbrication des compétences. Il a regretté une certaine forme de donnant-donnant imposée par l'Etat, conditionnant ses investissements à une participation des collectivités territoriales. Il a estimé que c'était l'Etat qui organisait les financements croisés et les doublons.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a rappelé que, à l'occasion du transfert des routes nationales, le principe du « décroisement » des financements avait été adopté. Il a estimé qu'il existait un besoin, entre l'Etat et les collectivités territoriales, d'un schéma cohérent qui ne soit pas remis en cause régulièrement. Il a considéré qu'il y avait un besoin de coopération interrégionale pour les grands projets et qu'il était aussi nécessaire d'envisager un schéma infrarégional. Il a jugé difficile d'interdire les cofinancements.

M. Jean-Pierre Vial a déclaré que plus l'opération à financer était importante, moins la capacité des collectivités territoriales était suffisante, en citant l'exemple du projet de liaison ferroviaire Lyon-Turin qui était envisagé depuis vingt ans et qui ne devrait pas voir le jour avant vingt ans. A cet égard, il a regretté que des couloirs aient été gelés sur le territoire des communes, alors que les tracés évoluaient régulièrement, ce qui constituait une contrainte importante pour les collectivités concernées.

M. Bruno Sablière, chef de mission, a présenté l'analyse relative à l'action sociale et médicosociale en expliquant que les départements consacraient 26 milliards d'euros à ces dépenses, contre 10 milliards d'euros pour l'Etat et 2,2 milliards d'euros pour les communes et les EPCI. Il a indiqué que 2,8 millions d'allocataires bénéficiaient de l'aide sociale départementale (personnes âgées, personnes handicapées, allocataires du RMI, protection de l'enfance). Evoquant les points forts de l'organisation actuelle, il a expliqué que le département exerçait une fonction de « chef de file » en matière d'action sociale et jouait un rôle d'impulsion et de rationalisation des actions en recourant, le cas échéant, à des délégations de compétences au bénéfice des communes et des intercommunalités. S'agissant des dysfonctionnements de l'organisation actuelle, il a indiqué que certaines programmations étaient parfois élaborées en parallèle par l'Etat et les départements et que le maintien d'une capacité d'intervention directe de l'Etat constituait une source de complexité, notamment lorsque l'Etat créait de nouveaux dispositifs dans le domaine des politiques décentralisées. Il a évoqué, par ailleurs, le problème de certains centres communaux d'action sociale (CCAS) qui étaient sous-dimensionnés compte-tenu des besoins des usagers, ce qui plaidait pour le développement de centres intercommunaux d'action sociale (CIAS).

M. Eric Doligé a considéré que le problème venait de la dualité des compétences de l'Etat et des collectivités territoriales en estimant qu'il était nécessaire de renforcer la coordination à travers des schémas communs. M. Louis Pinton a estimé que la pluralité des modes de financement de l'action sociale était une source de confusion budgétaire et a regretté le manque de vision globale.

M. Benoît Deron, directeur de mission, a enfin présenté l'analyse relative au développement économique en observant que tous les niveaux de collectivités intervenaient sur cette compétence pour des montants de 1,97 milliard d'euros pour l'Etat, 1 milliard d'euros pour les régions, 876 millions d'euros pour les départements, 806 millions d'euros pour les EPCI et 426 millions d'euros pour les communes. Il a signalé que, en outre, les compagnies consulaires consacraient au développement économique un budget d'environ 700 millions d'euros par an. Il a considéré que ces interventions étaient réalisées sans allocation rationnelle, ni par fonction, ni par activité. Il a déclaré que le législateur avait voulu faire du développement économique une compétence partagée entre les différents acteurs, sans attribuer aux régions les moyens nécessaires pour assumer leur rôle de chefs de file. Il a observé que les intercommunalités occupaient une place de plus en plus importante dans le développement économique car leur action apparaissait à la fois lisible, visible et efficace. Il a remarqué que les EPCI intervenaient fortement dans les métropoles et les agglomérations de taille intermédiaire, alors que c'étaient les conseils généraux qui exerçaient un rôle prépondérant dans les départements à dominante rurale, souvent en cofinancement avec d'autres acteurs.

M. Benoît Deron a déclaré que la multiplicité des acteurs était considérée comme un facteur positif de l'organisation actuelle pour des raisons politiques, fiscales, territoriales et opérationnelles. Il a remarqué l'instauration d'une spécialisation empirique entre les différents échelons d'intervention : soutien à l'innovation et à l'internationalisation pour les régions, aménagement des zones d'activité pour les EPCI et soutien au commerce pour les communes. Il a estimé que les pôles de compétitivité constituaient une pratique intéressante dans l'allocation fonctionnelle de la compétence, le rôle de l'Etat dans un pôle se situant aux niveaux de l'impulsion, du financement et de l'évaluation du dispositif, tandis que l'ensemble des collectivités locales intervenait dans un rôle de soutien financier, et parfois technique, à la mise en oeuvre. Il a enfin considéré que le partage de cette compétence permettait également une organisation pragmatique à travers la constitution d'offres globales et mutualisées et le développement de la contractualisation et des financements croisés. Evoquant les dysfonctionnements de l'organisation actuelle, il a mentionné les défauts de lisibilité, de cohérence, de visibilité et de réactivité. Il a indiqué que si, en milieu urbain, la multiplicité des acteurs favorisait l'enchevêtrement, il existait également un déficit d'intervenants dans les territoires ruraux auquel les départements essayaient de répondre. Il a, par ailleurs, considéré que si des moyens importants étaient mobilisés sur des activités à faible valeur ajoutée, comme l'aide à la création d'entreprise, il existait un déficit d'acteurs et de capacité d'ingénierie sur les services à plus forte valeur ajoutée (ingénierie financière, valorisation de la propriété intellectuelle).

M. Edmond Hervé a souhaité que lui soit communiquées des données précises concernant le coût de l'enchevêtrement des compétences.

MM. Jacques Mézard et François Patriat ont estimé que la complexité résultait de la multiplicité des acteurs, M. François Patriat évoquant ensuite la mise en place d'un guichet unique dans la région Bourgogne. M. Bruno Retailleau a observé qu'il existait autant d'organisations que de territoires et que si dans son département il avait fallu attendre l'action de la région, rien ne se serait passé. M. Charles Guené a déclaré que la question du développement économique ne pouvait plus être séparée de celle de l'aménagement du territoire, M. Jean-Pierre Vial estimant, pour sa part, qu'il existait un antagonisme entre le rôle des régions et le développement des territoires, qui pourrait trouver sa solution dans le recours au guichet unique. Il a, en outre, indiqué que les pôles de compétitivité relevaient d'une nouvelle culture qui avait permis de faire travailler ensemble des gens d'origines différentes.

Mme Josette Durrieu et M. Eric Doligé ont déclaré que la région n'intervenait pas assez en matière d'aménagement du territoire et qu'il était, par conséquent, nécessaire de conserver une pluralité d'acteurs pour le développement économique.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a estimé qu'il était nécessaire de clarifier le rôle de chaque acteur, la région pouvant être chargée d'une fonction stratégique à travers la formation professionnelle, la politique de l'emploi, l'insertion professionnelle, le soutien direct aux entreprises et la recherche. En revanche, il a estimé que la région n'était pas le bon niveau pour s'occuper de l'environnement économique des entreprises.

M. Claude Belot, président, a considéré qu'il convenait de favoriser des accords librement négociés et de permettre aux départements de se substituer à des régions déficientes.

M. Philippe Leroy a reconnu le rôle stratégique des régions et a souhaité que celles-ci agissent afin de déterminer des consensus sur les grandes politiques d'avenir (recherche, enseignement supérieur, technologies de l'information), chaque territoire devant demeurer autonome pour décliner ses grandes priorités.

M. Rémy Pointereau a souhaité l'émergence d'une seule agence de développement économique par département, qui agirait en lien avec la région, le département conservant une compétence en matière de développement économique.

Débat sur les orientations de la mission - Suite

Un débat sur les orientations de la mission s'est ensuite engagé.

Présentant les règles actuelles de répartition des compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales, M. Yves Krattinger, rapporteur, a souhaité connaître l'avis de ses collègues sur les modifications qu'il conviendrait, le cas échéant, d'y apporter. Il les a notamment invités à se prononcer sur des questions concrètes relatives à l'attribution des compétences en matière de bâtiments universitaires, d'allocation des bourses ou d'aide sociale aux étudiants, d'information et d'orientation, de logement étudiant, de transport, de restauration universitaire et d'accès à la santé, à la culture et au sport. Il a évoqué plusieurs options de répartition possibles et a notamment sollicité leur opinion sur celle consistant à confier à l'État et à la région le soin de prendre en charge l'immobilier universitaire et aux départements et agglomérations les prestations liées à la vie étudiante.

M. Philippe Leroy a fait valoir que toute réflexion sur cette question devait tenir compte de l'autonomie nouvelle accordée aux universités, qui changeait la donne financière comme l'impact éventuel des politiques locales.

M. Jean-Pierre Vial a estimé que, effectivement, de nouveaux modes de financements mixtes, à la fois publics et privés, allaient progressivement s'imposer, et que les collectivités territoriales devraient s'y adapter. Dans ce nouveau contexte, une des fonctions des financements publics serait, notamment, de servir à obtenir des financements privés. Il s'est par ailleurs interrogé sur les moyens susceptibles d'assurer, à l'avenir, la survie financière des établissements d'enseignement supérieur et sur la part que devraient y prendre les collectivités territoriales.

M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, s'est interrogé sur la pérennité d'un tel mode de financement. Il a, par ailleurs, dénoncé le caractère déséquilibré d'un système dans lequel l'État conserve la plénitude de compétence en engageant les collectivités territoriales à apporter une participation importante au financement du cadre universitaire. Il s'est demandé s'il n'y avait pas là un transfert de compétence implicite.

M. Philippe Leroy a estimé que la stratégie du développement universitaire devrait être de la compétence de la région et qu'elle devrait notamment reposer sur la définition du schéma régional de formation, dont le caractère opérationnel pourrait être renforcé, et auquel pourrait être adjoint un schéma régional de la recherche. Les collectivités infrarégionales pourraient, quant à elles, être chargées du financement des bâtiments et de certaines activités annexes.

M. Bruno Retailleau a souligné qu'en matière d'enseignement supérieur ce serait sans doute toujours l'Etat qui déciderait, les collectivités territoriales, titulaires d'une compétence d'appoint, étant seulement chargées d'accompagner son action. Il a cependant jugé nécessaire de réaffirmer la compétence de la région en matière de recherche, d'innovation et d'immobilier universitaire. Il a, en revanche, estimé que, pour autant, en aucun cas il ne fallait interdire aux départements d'agir sur le fondement de leur clause générale de compétence et d'être ainsi en mesure de pallier, le cas échéant, une défaillance éventuelle de la région.

Prenant l'exemple du pôle universitaire de La Rochelle, M. Claude Belot, président, a insisté sur le rôle déterminant joué par le département et la ville pour sa mise en place comme pour son financement. Il s'est interrogé sur l'avenir d'un tel pôle si, en l'absence de tout engagement de la région, le département n'y prenait plus sa part. Il a, par ailleurs, considéré qu'en matière de recherche, certaines données opérationnelles engageaient à remettre en cause les schémas administratifs traditionnels. Les universités et les laboratoires de recherche doivent aujourd'hui pouvoir fonctionner en réseaux nationaux voire internationaux, et ils doivent s'efforcer d'atteindre une taille critique. Il a néanmoins jugé que la région devrait être la collectivité chargée de porter les projets universitaires, dans le cadre de partenariats locaux.

Marquant son accord avec les réflexions précédentes, Mme Josette Durrieu a estimé qu'il revenait à l'Etat et aux régions de prendre en charge l'enseignement supérieur et la recherche, les départements apportant, le cas échéant, une contribution financière. Elle a par ailleurs relevé que, pour une part importante, la recherche s'effectuait dans le cadre d'entreprises privées, ce qui pouvaient conduire les conseils généraux à assurer une part du financement, afin de maintenir sur le territoire les emplois industriels qui en dépendent. Elle s'est demandé si une telle mission ne devrait pas plutôt incomber à la région, qui est seule en mesure d'organiser profitablement une politique globale en la matière.

M. Jean-Pierre Vial a indiqué que, en l'absence de clarification dans la répartition des compétences en matière d'enseignement supérieur et de recherche, le risque serait grand que les collectivités locales soient appelées à soutenir financièrement des universités de second rang, qui n'auraient pu atteindre une taille critique.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a estimé que si la clause générale de compétence, aujourd'hui mise en cause, devait être supprimée, il faudrait clarifier la répartition des compétences. Il a suggéré que l'enseignement supérieur relève de l'Etat et des régions. Il a considéré, comme M. Jean-Pierre Vial et M. Claude Belot, président, que ces dernières pourraient notamment intervenir en matière de bourses aux étudiants, d'information et d'orientation. Dans le domaine de la vie étudiante, les agglomérations, voire les départements, pourraient également être amenés à intervenir.

M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, a souligné que la dynamique locale était porteuse d'initiatives. Or, d'une façon contradictoire, une exigence de « taille critique » devrait également être prise en compte, désormais, pour l'exercice de certaines compétences.

M. Philippe Leroy a considéré que la clause générale de compétence constituait un « filet de sécurité » pour les collectivités territoriales, leur permettant de prendre des initiatives en cas de carence d'intervention des autres niveaux.

En matière de tourisme, M. Jean-Pierre Vial a considéré que, comme pour le développement économique, la compétence devrait être exercée en complémentarité par les départements et les régions.

Jeudi 19 février 2009

- Présidence de M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation, et de M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques -

Auditions publiques sur le thème collectivités territoriales, entreprises et développement du territoire

- Allocution d'ouverture par M. Claude Belot, président de la mission -

Après avoir salué les participants et les intervenants des tables rondes et présenté les objectifs et la méthode de la mission, M. Claude Belot, président, a relevé que les collectivités territoriales étaient des acteurs incontournables de la compétitivité des territoires, comme le manifestent notamment la part qu'elles prennent à l'investissement public ou le rôle majeur qu'elles sont appelées à jouer dans le cadre du plan de relance. Toute réforme de l'organisation territoriale doit en conséquence viser à leur donner les moyens de continuer à être à la hauteur des enjeux économiques. Il a jugé à cet égard nécessaire d'offrir une certaine souplesse aux dispositifs envisagés afin de tenir compte de la diversité des territoires et de permettre à chaque niveau de collectivité de trouver sa place par rapport aux autres. Avant d'ouvrir les débats de la première table ronde, M. Claude Belot, président, a évoqué le débat actuel sur la suppression de la taxe professionnelle et estimé que les élus locaux, véritables entrepreneurs de développement qui ont fait la preuve de leur responsabilité financière, ne pourraient continuer à mener leur action de développement économique qu'à la condition de conserver des moyens financiers suffisants.

- Présidence de M. Jean Arthuis, sénateur de la Mayenne, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation -

Première table ronde - Entreprises : attractivité et attentes à l'égard des collectivités territoriales

- Table ronde animée par M. Yves Krattinger, sénateur de la Haute-Saône,
co-rapporteur de la mission
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A titre liminaire et avant de présenter les invités de la première table ronde, M. Jean Arthuis, président, a considéré qu'il convenait de réfléchir aux moyens de favoriser la création, l'implantation et le développement des entreprises. Il a proposé que soient examinés successivement les atouts déterminants des territoires, les types d'actions que les entrepreneurs attendent précisément des élus locaux et enfin la forme et les conditions du dialogue qui peut se nouer entre les entreprises et les collectivités.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a estimé que le destin des territoires et celui des entreprises étaient liés. Reconnaissant le manque de lisibilité qui affecte parfois l'action économique des territoires, mais soulignant l'implication sans faille des collectivités dans ce domaine, il a considéré que les réflexions de la mission devaient notamment porter sur l'évolution qu'il convenait d'imprimer à leurs interventions économiques pour leur permettre d'être plus performantes en la matière. Afin d'ouvrir le débat sur cette question, il a en premier lieu sollicité l'avis des participants à la table ronde sur les déterminants de l'attractivité d'un territoire, qu'il s'agisse du capital humain, de la fiscalité, de l'environnement économique, des services collectifs ou de la qualité de vie.

Mme Marie-Christine Coisne-Roquette, présidente du groupe SONEPAR, présidente de la commission fiscale du MEDEF, a insisté sur la spécificité de l'activité de grossiste en matériau électrique de son entreprise qui l'obligeait à avoir une présence sur l'ensemble du territoire, par rapport à d'autres entreprises qui peuvent être plus sélectives dans leurs choix de localisation. Écartant la fiscalité comme atout déterminant de l'attractivité des territoires, elle a principalement retenu la qualification professionnelle de la main d'oeuvre locale.

M. Jean-François Bernardin, président de l'Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie (ACFCI), a tout d'abord souligné que les chambres consulaires seront prochainement réformées pour être organisées au niveau régional. Puis, jugeant que les relations entre les collectivités territoriales, les chambres consulaires et les entreprises se caractérisent par leur nature consensuelle, il a estimé que l'attractivité d'un territoire était principalement déterminée par la volonté des élus de mener une politique active en matière de développement économique. Ces politiques publiques prennent des formes concrètes avec le renforcement des infrastructures, notamment pour assurer la desserte du territoire concerné, et une action déterminée en matière de logements, qui semble plus déterminante que des dispositifs ponctuels d'aide à l'installation des acteurs économiques. Le développement d'une région est également lié à son image et à son orientation industrielle et, à l'instar de Silicon Valley aux Etats-Unis d'Amérique, il est important que l'activité des zones industrielles soit bien identifiée, comme à Grenoble ou en Vendée, par exemple.

En matière de fiscalité locale, les entreprises sont sensibles non seulement au niveau de la pression fiscale, mais elles sont surtout attachées à la stabilité des impôts, afin de pouvoir établir des projections pluriannuelles relatives à leurs coûts de fonctionnement. Naturellement, elles sont également attentives aux contreparties dont elles bénéficient de la part des collectivités territoriales, notamment en matière d'infrastructures publiques : aussi est-il indispensable de maintenir un lien fiscal entre les entreprises et les collectivités territoriales qui les accueillent.

Observant que l'environnement réglementaire et institutionnel dans lequel évoluent les PME était beaucoup plus complexe aujourd'hui que trente ans auparavant, M. Jean-Marie Euvrard, président de la Chambre de commerce et d'industrie de la Haute-Saône, a indiqué que la création d'un guichet unique centralisant tant les aides proposées par les différents niveaux de collectivités territoriales que les dossiers devant faire l'objet d'une instruction, préalablement à l'installation d'une entreprise, constituait une demande forte des PME, qui n'ont pas toujours les moyens humains nécessaires pour traiter avec de multiples interlocuteurs. Il a par ailleurs estimé que l'attractivité d'un territoire était conditionnée par la qualité de ses équipements structurants.

M. Jean-Paul Bailly, président de La Poste, a indiqué que son entreprise travaillait constamment avec les collectivités territoriales de toutes tailles, afin de faire fonctionner efficacement ce grand service public de proximité, organisé autour de 17 000 points de présence sur le territoire avec le concours de 100 000 facteurs. Mais les discussions entre La Poste et les collectivités territoriales ont également pour objet les questions relatives à l'implantation des activités logistiques nocturnes indispensables à la distribution du courrier. Ces structures étant porteuses de nuisances pour les riverains, leur implantation est souvent éloignée des zones d'habitation, ce qui suppose de rechercher, en concertation étroite avec les collectivités territoriales, des solutions aux questions de déplacements et de logement du personnel de La Poste. Après avoir rendu hommage au dynamisme dont font preuve les acteurs locaux sur ce sujet, il s'est félicité de la capacité des communes, des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et des départements à contracter avec son entreprise pour assurer une présence postale dans les petites communes, sous la forme de points partenariaux qui permettent également de conforter le commerce local.

M. Jérôme Bédier, président de la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD), a rappelé que sa fédération regroupe 1 500 hypermarchés, 6 000 supermarchés et 15 000 formats de proximité. Puis, ayant souligné que l'un des principaux éléments constitutifs de l'attractivité d'un territoire résidait dans sa capacité à définir un projet de développement partagé par tous les acteurs locaux, il a estimé que les collectivités territoriales doivent avant tout créer et entretenir les infrastructures indispensables aux acteurs économiques. Il a par ailleurs préconisé que ces derniers soient associés aux projets de développement ou de restructurations urbains, par exemple en centre ville. A cet égard, il a précisé que le coût du foncier avait une influence déterminante sur la rentabilité des petites structures, ce qui explique la disparition progressive des commerces alimentaires de proximité en centre ville. Il s'est enfin prononcé en faveur d'une réforme définitive de la loi Royer-Raffarin sur l'implantation des surfaces commerciales.

M. Philippe Bassot, consultant de CM International, rédacteur du rapport de la délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (DIACT) sur le bilan des pôles de compétitivité, a considéré que la capacité des collectivités territoriales à être réactives et à mettre les acteurs en réseau, ainsi que le dynamisme politique des élus, étaient des facteurs déterminants d'attractivité des territoires. Ainsi, alors que certaines collectivités se contentent d'être de simples financeurs des pôles de compétitivité, d'autres s'en servent comme d'un levier au service de leur projet de territoire.

Relevant qu'il appartient en premier lieu aux régions de financer les pôles de compétitivité, M. Yves Krattinger, rapporteur, a ensuite interrogé les intervenants sur les attentes des entreprises à l'égard des collectivités territoriales : ont-elles besoin, par exemple, d'un accompagnement au moment de leur création, d'aides lorsqu'elles rencontrent des difficultés, de garanties d'emprunts ou encore d'allègements fiscaux ?

M. Jean-Marie Euvrard a estimé que les collectivités territoriales devaient en priorité jouer un rôle de « facilitateur » et servir d'interlocuteur pour accompagner les entreprises dans des démarches qui s'apparentent parfois à un « parcours du combattant ».

M. Jean-François Bernardin a indiqué que les entreprises attendent d'abord un environnement favorable et une simplification des dispositifs, relevant, en ce sens, que la directive « services » a prévu la mise en place de guichets uniques. Il a également souligné l'importance d'une couverture de l'ensemble du territoire en haut débit.

Mme Marie-Christine Coisne-Roquette a considéré qu'une entreprise est d'abord à la recherche d'un environnement de qualité et qu'aucune n'a pour objectif premier de recevoir des subventions. En matière fiscale, les diverses formes d'exonération de taxe professionnelle ou d'autres impôts complexifient la fiscalité et induisent des effets de concurrence entre collectivités. En réalité, le lien fiscal entre entreprises et collectivités territoriales n'est pas nécessaire et il serait préférable de redistribuer à ces dernières une part de grands impôts nationaux. Alors que les entreprises françaises supportent dix points de plus de prélèvements obligatoires que cela n'est le cas dans la moyenne des pays de l'OCDE, il convient de trouver des voies de financement des collectivités compatibles avec la compétitivité des entreprises. En outre, les collectivités territoriales devraient chercher, comme les entreprises, à accroître l'efficacité de leurs services, face à la hausse de leurs dépenses de fonctionnement et à l'existence de doublons.

En réaction à ces propos, M. Yves Krattinger, rapporteur, a souligné que la fiscalité locale avait évolué, notamment avec la mise en place de la taxe professionnelle unique, et que les collectivités territoriales avaient déjà entrepris d'importants efforts de rationalisation.

M. Jérôme Bédier a relevé que l'environnement de l'entreprise, mais aussi la présence de pépinières ou la politique foncière, sont les principaux facteurs conditionnant la décision d'investissement. S'agissant des entreprises en difficulté, il convient de distinguer celles qui valent la peine d'être soutenues ; mais ce rôle incombant d'abord aux banques, il est délicat pour les collectivités territoriales d'aller sur ce terrain.

Pour M. Jean-Marie Euvrard, les collectivités locales peuvent aider à la levée de fonds pour financer les premiers besoins des entreprises.

M. Jean-Paul Bailly a estimé que les attentes de celles-ci tenaient essentiellement à la qualité de l'environnement déterminé par le tryptique « formation-services-logements ».

M. Jean-François Bernardin a considéré que la question de la création d'entreprise était réglée en France, observant par ailleurs que les collectivités locales s'engageaient auprès des entreprises en difficulté pour faciliter les reconversions. Il s'est en outre déclaré convaincu de l'avantage, pour les entreprises, à être associées aux projets de développement futur des territoires.

Si, pour M. Philippe Bassot, la collectivité peut être, à un moment, partenaire du risque de l'entreprise, notamment en cas de défaillance des banques, il a soulevé le problème de l'expertise et de la compétence aptes à remplir cette fonction au sein de la collectivité.

Puis, M. Yves Krattinger, rapporteur, a soumis aux intervenants la proposition tendant à confier à la région les compétences concourant à la stratégie économique de long terme et aux départements et intercommunalités celles concernant l'environnement des entreprises.

En faveur d'un rapprochement des chambres de commerce et d'industrie avec les partenaires, M. Jean-Marie Euvrard a jugé que le département est la bonne dimension. Pour M. Jean-Paul Bailly, La Poste travaille essentiellement avec les régions et les agglomérations pour les infrastructures, avec les départements pour le maillage et avec les intercommunalités pour les services de proximité, le fonctionnement de ce système s'avérant satisfaisant.

M. Jean-François Bernardin a appelé à une réforme de la situation actuelle, se déclarant partisan d'une coordination entre le département et la région et de l'affectation d'impôts spécifiques à chacun des deux niveaux. Après que M. Yves Krattinger, rapporteur, eut remarqué que le principe de la spécialisation de l'impôt devenait la feuille de route de tous, M. Jean-François Bernardin a également insisté sur la répartition des rôles entre communes et intercommunalités.

Pour Mme Marie-Christine Coisne-Roquette, il s'agit de déterminer le niveau pertinent d'exercice des compétences. M. Jérôme Bédier a noté la compétence des intercommunalités dans le domaine du commerce, ajoutant que, le cas échéant, elles se réunissaient régulièrement au niveau départemental pour vérifier la cohérence du secteur. M. Philippe Bassot s'est déclaré partisan d'une spécialisation fonctionnelle avec la détermination d'un chef de file.

Abordant la question du territoire pertinent pour concevoir et mettre en oeuvre durablement les projets de développement, M. Jean Arthuis, président, a considéré que le territoire communal était, en l'espèce, trop étroit. Tout en privilégiant alors le couple intercommunalité-département, il a relativisé cette opinion au regard de la variété des départements, dont certains s'identifient à la principale agglomération de leur territoire.

Après avoir estimé nécessaire la triple clarification des compétences, du financement et du bénéficiaire, le président de la commission des finances, évoquant la taxe professionnelle, a insisté sur la question des impôts, facteurs, selon le cas, de délocalisation ou de renforcement de la compétitivité locale. Il s'est demandé s'il fallait maintenir le lien de l'impôt économique avec les collectivités territoriales sur une base plus proche du foncier que de l'investissement. Rappelant la contribution des citoyens à la taxe professionnelle, il a considéré que l'avenir des collectivités locales dépendait très directement de la prospérité des entreprises qui y sont implantées et de leur capacité à attirer de nouveaux entrepreneurs.

Il a conclu que la réforme des collectivités territoriales venait à son heure et que la crise économique internationale était un excellent levier pour aller jusqu'au bout de la réflexion.

En conclusion à cette première table ronde, M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, a d'abord noté que les élus locaux et les entrepreneurs oeuvrent ensemble pour le développement local, non seulement pour créer des richesses mais également pour apporter des services au public sur l'ensemble du territoire. Il a remarqué que les territoires étaient des lieux de débouché pour les entreprises, les marchés publics pouvant participer à la dynamisation du tissu économique local. S'agissant des attentes des entreprises, il a retenu des débats que celles-ci portaient d'abord sur la mise en place d'un environnement de qualité, qui serait favorisé par trois types de facteurs :

- des facteurs immatériels, tels qu'une volonté politique de développement de la part des acteurs locaux, marquée par une capacité à fédérer les initiatives et à créer une image de marque, ainsi que la mise en place d'un système de formation qui s'adapte avec réactivité aux besoins des entreprises ;

- des facteurs d'infrastructure, concernant les infrastructures d'accès telles que le TGV ou le très haut débit, mais également les services locaux, notamment le logement et les transports en commun ;

- des aides à l'investissement, au moyen par exemple d'aides à la réalisation de pépinières d'entreprises. A cet égard, il a noté que les entreprises ne donnaient pas la priorité aux aides ponctuelles mais plutôt au soutien à des projets collectifs.

Enfin, s'agissant de la fiscalité et de la taxe professionnelle, M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, a remarqué que les positions n'étaient pas totalement partagées sur la nécessité ou non de préserver un lien entre l'activité économique et l'impôt local.

- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, sénateur de Saône-et-Loire, président de la commission des affaires économiques -

Seconde table ronde - Collectivités territoriales : stratégies économiques et actions envers les entreprises

- Table ronde animée par Mme Jacqueline Gourault, sénatrice de Loir-et-Cher,
co-rapporteur de la mission
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M. Jean-Paul Emorine, président, a observé que la problématique de cette seconde table ronde constituait d'une certaine manière la question-miroir de la première : après le recueil des attentes des entreprises à l'égard des collectivités locales, il s'agit maintenant d'interroger les stratégies économiques des collectivités et leurs actions envers les entreprises. Tout d'abord, pourquoi mener une politique de développement économique et quelle politique élaborer ? Les élus locaux connaissent la nécessité de favoriser le dynamisme territorial par un substrat économique solide, mais encore leur faut-il, à la lumière des attentes des entreprises, sérier les priorités pour agir efficacement et favoriser la meilleure allocation des ressources possible. A cet égard, il convient de se demander jusqu'à quel point les niveaux de collectivités et les types de territoires abordent des problématiques communes. Il devient alors nécessaire d'approfondir la question des collaborations entre collectivités, qu'elles soient ou non de même échelon. Enfin, une collectivité peut-elle obtenir des engagements d'une entreprise pour accorder son concours et, si oui, lesquels et comment ? Cela pose naturellement la question des délocalisations et des moyens dont disposent les élus locaux pour les éviter.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a ensuite rappelé le contexte général de la mission temporaire sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales voulue par M. Gérard Larcher, président du Sénat, dans le cadre des missions constitutionnelles de cette assemblée. A cet égard, elle a estimé que la réforme devrait nécessairement être globale pour être efficace. Revenant sur les conclusions de la première table ronde, elle a observé que la première attente des entreprises concerne leur environnement : les infrastructures, les équipements au sens large, mais aussi la formation, la dynamique de territoire et la mise en réseau des acteurs. Pour autant, faut-il que les collectivités locales aillent au-delà de ces domaines et continuent de développer des politiques économiques plus larges ? Soulignant le rôle éminent de l'Etat en la matière, elle a enfin rappelé que la région est chef de file de la compétence économique depuis la loi de 2004.

M. François Patriat, sénateur de la Côte-d'Or, président du conseil régional de Bourgogne et président de la commission économique de l'Association des régions de France, a confirmé que cette dualité illustrait parfaitement la contradiction de la décentralisation « à la française » : une absence de choix entre une décentralisation affirmée dans les textes et une pratique qui reste centralisée. De plus, alors que la décentralisation a fait ses preuves en assurant une meilleure mise en oeuvre des compétences lorsqu'elles sont transférées, la décentralisation est condamnée si les collectivités continuent de vouloir tout faire et si leurs ressources ne sont pas modernisées et redynamisées.

Après avoir évoqué plusieurs cas concrets d'entreprises qui se sont installées en Bourgogne, il a conclu que l'attractivité constitue un tout : il faut à la fois de multiples infrastructures de transport, mais aussi de la recherche-développement, des universités, du haut débit etc. Les équipements structurants ne sont pas suffisants pour être attractifs. Regrettant la concurrence que les territoires entretiennent entre eux alors même qu'il leur est nécessaire d'être solidaires, en plus d'être innovants et entreprenants, il a indiqué que la Bourgogne avait été, à la suite de la loi relative aux libertés et responsabilités locales de 2004, la première région à signer avec ses partenaires un schéma de développement économique, lequel a permis notamment la création d'une plateforme unique pour les demandes diverses des entreprises. En évoquant l'actualité du plan de relance national, il a observé que les collectivités ont également adopté des plans de soutien, celui de la Bourgogne abordant, d'un côté, les problèmes des entreprises et, de l'autre, les besoins des salariés. Par exemple, pour les entreprises, la région a réduit ses délais de paiement, mis en place des acomptes adaptés lors des appels d'offres et proposé des formules de prêts ou de cautions. Pour les particuliers, elle a encore développé ses offres de formation, par exemple à destination des salariés des entreprises en difficulté ou en proposant des formations qualifiantes adaptées au tissu économique local. En conclusion, il s'est dit convaincu que, pour gagner en efficacité globale, la région doit être un véritable chef de file de la compétence économique.

M. Benoît Huré, président du conseil général des Ardennes et sénateur de ce département, représentant l'Assemblée des départements de France, a indiqué que son conseil général s'était mobilisé en faveur du développement économique par pragmatisme. En effet, la plupart des petits projets contribuant au dynamisme local nécessitent un accompagnement de proximité et la région ne répond pas à l'ensemble des attentes et enjeux d'un département comme celui des Ardennes. Celui-ci intervient donc en coordination et complémentarité avec la région, dont devraient relever les grands projets structurants et la prospective sur un territoire.

Faisant observer que les intercommunalités interviennent également dans le domaine du développement économique, Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, s'est demandé comment coordonner les interventions des différents niveaux.

Rappelant que le développement économique est une compétence obligatoire des intercommunalités, M. Jacques Pélissard, président de l'Association des maires de France, a souligné que l'action de celles-ci et des communes dans ce domaine devait s'inscrire dans le cadre d'une démarche globale au niveau régional, afin que leur action de terrain soit en cohérence avec les grands axes du schéma régional. Estimant qu'il était devenu nécessaire de réformer la taxe professionnelle, en raison d'une dérive des taux, il a jugé néanmoins essentiel de maintenir un lien fiscal entre le territoire et les entreprises afin que les collectivités aient un intérêt à les accueillir.

Mme Estelle Grelier, présidente de la communauté de communes de Fécamp, représentant l'Assemblée des communautés de France, a indiqué que c'est le plus souvent autour de la compétence économique que les intercommunalités se sont créées et que ces dernières y ont consacré un milliard d'euros en 2005. La Cour des comptes a souligné la plus-value de leur intervention dans ce domaine, ainsi que la cohérence des stratégies locales. Il convient néanmoins d'aller plus loin que la loi du 13 août 2004 en reconnaissant un rôle de chef de file à la région, les intercommunalités étant chargées de la mise en oeuvre des actions au plan local. S'inquiétant des ressources dont bénéficiera sa communauté de communes, la taxe professionnelle représentant 50 % de son budget et 100 % de ses recettes fiscales, elle a souligné l'importance d'un impôt économique local afin que les entreprises puissent conserver une forme de pression par les retombées fiscales de leur activité sur le territoire.

M. Bruno Lucas, président du MEDEF de la région Pays-de-la-Loire et membre de la commission développement des territoires du MEDEF, a lui aussi plaidé pour le maintien d'un lien fiscal entre les entreprises et les collectivités. Décrivant la difficulté que rencontrent les entreprises, notamment de petite taille, pour identifier les bons interlocuteurs dans les collectivités, il a souhaité une meilleure lisibilité de l'action publique dans l'articulation entre les différents niveaux de l'administration territoriale. Comparant les collectivités territoriales à un écrin pour l'activité économique, il les a appelées à favoriser la création d'entreprise et à mettre en place les infrastructures qui permettent le développement économique.

M. Philippe Valletoux, vice-président de Dexia Crédit local et membre du Conseil économique, social et environnemental, a d'abord considéré que, jusqu'à présent, la puissance financière des collectivités locales leur a permis de faire face aux attributions qu'elles ont reçues de l'Etat. Au sujet de l'impôt local, il a fait observer que l'Etat en payait en réalité une part importante, de l'ordre de 30 % à 40 % pour la taxe professionnelle et la taxe d'habitation. S'agissant plus particulièrement de la taxe professionnelle, il a estimé que le mécanisme des dégrèvements en rendait l'analyse particulièrement complexe, tout en rappelant les critiques d'inéquité et de manque de prévisibilité souvent formulées à son encontre. Abordant ensuite la question des relations entre les collectivités territoriales et les entreprises, il a noté que ces dernières sont soumises en France à des prélèvements obligatoires supérieurs de 10 % à ceux qu'elles paient dans les autres pays. Il a enfin expliqué que la décentralisation avait introduit une compétition entre les collectivités territoriales, s'étonnant que les entreprises refusent cette forme de concurrence.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a estimé que la taxe professionnelle n'était pas le seul impôt responsable des problèmes de compétitivité des entreprises. Elle a en outre rappelé que les collectivités territoriales étaient à l'origine de plus des trois quarts de l'investissement public.

M. Benoît Huré a d'abord répondu aux intervenants qui regrettaient le manque de lisibilité des interventions des acteurs publics en faisant observer que ceux-ci constituaient aussi des donneurs d'ordre importants et solvables pour les artisans. S'agissant du département, il a souligné qu'il versait des prestations sociales importantes, notamment aux personnes âgées, qui permettent de soutenir la consommation locale et donc l'activité. Notant enfin que, pour les projets d'investissement conduits par les intercommunalités, la participation du département s'élevait souvent à 40 % des dépenses, il a estimé que c'était la collaboration de tous les échelons territoriaux qui permettait de répondre aux besoins.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a relevé qu'il ne s'agissait pas de remettre en cause l'efficacité des départements. Elle a ajouté que le bloc des compétences en matière sociale, que chacun associe bien au niveau départemental, constituait un modèle pour la lisibilité de l'action publique.

M. Bruno Lucas a estimé que les chefs d'entreprises cherchaient moins à organiser une concurrence entre les collectivités territoriales qu'à tirer parti de la complémentarité de leurs actions. Il a par ailleurs jugé nécessaire que les aides économiques reçues par les entreprises aient pour contrepartie des engagements et des garanties de leur part.

S'agissant de la péréquation, M. François Patriat a considéré que, ne pouvant être organisée sur une base horizontale du fait de la compétition des territoires, elle devait, pour cette raison, être assurée de manière verticale par l'Etat.

Après avoir rappelé la part que prenait l'Etat, à travers notamment les transferts financiers, à l'action économique des collectivités territoriales, M. Jean-Paul Emorine, président, a mis en perspective le débat sur les interventions économiques locales avec celui sur la clarification des compétences. Il a par ailleurs noté que, s'il n'était pas possible d'attirer sur un territoire un chef d'entreprise qui juge que les conditions favorables à l'implantation de son usine ne sont pas réunies, certains investissements en infrastructures étaient, en tout état de cause, nécessaires à défaut d'être suffisants. Relevant enfin le succès que rencontraient les pôles de compétitivité et les pôles d'excellence, il a préconisé de continuer à suivre ce modèle pour créer des synergies locales et renforcer l'attractivité des territoires.

- Conclusion générale par M. Gérard Larcher, président du Sénat -

Après avoir salué les membres de la mission et les participants aux tables rondes, M. Gérard Larcher, président du Sénat, a souligné l'utilité et l'importance du débat sur l'organisation des collectivités territoriales, au regard notamment de la part que ces dernières prennent au développement économique de la France. Rappelant les montants que chaque niveau de collectivité consacre au développement des entreprises sur les territoires, il a constaté que les résultats, d'une collectivité à l'autre, n'étaient pourtant pas les mêmes, ce qui appelait à examiner les conditions du succès en la matière. Il a estimé que la réforme de la gouvernance locale trouvait sa justification dans les réponses qu'elle entendait apporter aux défis de la compétitivité des territoires et de la qualité de vie offerte aux citoyens.

Reprenant les thèmes abordés au cours des travaux de la matinée, M. Gérard Larcher, président du Sénat, a retenu, comme déterminants essentiels de l'attractivité des territoires pour les entreprises, les infrastructures mises à leur disposition et, surtout, la qualité scolaire et culturelle des formations dispensées. Il a par ailleurs considéré que l'une des questions clés était celle de savoir comment éviter que les territoires ne se concurrencent au point d'annihiler le bénéfice qu'ils peuvent tirer de leur action en termes d'attractivité. Il s'est enfin interrogé sur l'avenir de la relation financière établie entre les entreprises et les collectivités locales, à un moment où la suppression de la taxe professionnelle est envisagée.

Sur l'ensemble de ces questions, M. Gérard Larcher, président du Sénat a considéré qu'il reviendrait à la Haute Assemblée, qui est constitutionnellement la maison des territoires, d'apporter une réponse dans le cadre du projet de loi visant à réformer l'organisation territoriale, dont elle sera nécessairement saisie en première lecture. Il a annoncé que, dans un premier temps, le Sénat débattra du rapport d'étape de la mission au cours de la troisième semaine de mars, et a formé le souhait que les sénateurs apportent à la réforme une vision à la fois pragmatique et audacieuse.