Mardi 8 septembre 2009

- Présidence de Mme Catherine Procaccia, présidente -

Audition de M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale

La commission spéciale a tout d'abord procédé à l'audition de M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, sur le projet de loi n° 578 (2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie.

M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, a déclaré que l'orientation est un processus continu et progressif qui doit permettre à l'élève de faire des choix tout au long de son parcours en vue de réussir son insertion dans la vie professionnelle et sociale. L'orientation s'étale principalement entre bac + 3 et bac - 3, elle concerne à titre principal l'éducation nationale mais la compétence en la matière peut être partagée, sur certains points, avec d'autres entités publiques.

Pour pouvoir s'orienter l'élève a besoin tout d'abord d'une information préalable et objective sur les formations disponibles au niveau local et sur leurs débouchés. Il doit être sensibilisé très tôt aux choix d'orientation qui s'offrent à lui et à la question de l'insertion professionnelle. L'élève a également besoin de développer ses capacités à s'orienter afin d'entrer dans une démarche active et ne pas subir son orientation.

L'orientation est une composante essentielle de l'égalité des chances. Elle doit prendre en compte les talents de chacun et faire l'objet d'une politique volontariste. Malheureusement, le dispositif actuel souffre de plusieurs limites : des procédures nombreuses et complexes qui bénéficient le plus aux élèves initiés, un parcours dicté pour l'essentiel par les résultats scolaires, une information délivrée aux élèves et aux familles de façon tardive, un « projet d'orientation » qui se résume pour beaucoup d'élèves à des choix tardifs et par défaut.

La réforme de l'orientation est une des priorités de la réforme des lycées actuellement élaborée par le ministère. L'objectif est de passer à une orientation choisie et non plus subie. Ainsi, un parcours de découverte des métiers et des formations a été généralisé dès la rentrée 2009 à tous les élèves de la cinquième à la terminale. Ce système de découverte progressif et diversifié s'accompagne par la remise, dès la classe de cinquième, d'un livret personnel de suivi qui permettra à l'élève de garder des traces de ses expériences et d'élaborer lui-même sa démarche d'orientation.

Il faut également agir sur tous les prescripteurs en matière d'orientation, car celle-ci ne peut pas être l'affaire des seuls spécialistes. Les enseignants doivent assurer le premier accompagnement et cette question fera l'objet d'une attention particulière dans le cadre de la réforme du recrutement des maîtres. Les missions des conseillers d'orientation psychologues seront redéfinies afin d'orienter leurs compétences psychologiques en direction des élèves qui en ont vraiment besoin et de consolider leurs connaissances sur les métiers, l'emploi et le travail. Enfin, les parents seront davantage associés à la formation des élèves concernant la découverte des métiers.

M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, a ensuite fait valoir que le second cycle de l'enseignement secondaire sera réformé. Tout d'abord, concernant la voie professionnelle, cent vingt mille élèves quittent l'enseignement secondaire sans aucun diplôme. Un élève sur deux qui s'engage dans la préparation d'un baccalauréat professionnel s'arrête au niveau du BEP. Dès lors, l'objectif de la réforme est de réduire le nombre de sorties prématurées du système scolaire sans qualification. Il s'agit également d'élever progressivement le niveau moyen de qualification de tous les élèves au travers de la généralisation du baccalauréat professionnel en trois ans et de l'augmentation significative de l'offre de CAP. De même, l'accompagnement personnalisé et la multiplication des passerelles contribueront à une meilleure orientation.

Concernant le lycée général et le lycée technologique, le rapport de Richard Descoings va servir de base aux recommandations des différentes organisations syndicales des parents d'élèves et des lycéens qui seront recueillies par le ministère pour élaborer l'architecture du nouveau lycée avant la fin septembre. Le nouveau lycée devrait être plus juste et faire davantage pour ceux qui en ont le plus besoin afin d'éviter les sorties prématurées du système. Il est également nécessaire de mieux préparer à l'enseignement supérieur et dès lors, non seulement de transmettre du savoir mais aussi d'enseigner l'autonomie. Il faut passer d'un système dans lequel l'orientation est figée très tôt à un système progressif permettant une réelle réversibilité des choix.

La lutte contre les sorties sans diplôme est une priorité. Le ministère de l'éducation nationale et le haut commissariat à la jeunesse travaillent actuellement à des réponses précises sur la question du décrochage scolaire. Dès cette rentrée, tous les établissements scolaires seront dotés d'un outil informatisé de repérage et de signalement des élèves sans solution d'orientation. L'ensemble des acteurs est mobilisé dans la lutte contre l'absentéisme précoce.

Le nombre et la qualité des services destinés aux élèves et à leurs familles seront très significativement accrus. De nouveaux services personnalisés développés par l'Onisep seront accessibles dès cette année à travers un numéro azur et un site internet unique afin de fournir une information complète et actualisée en matière de formation, de métiers et de débouchés. La plate-forme multimédia d'orientation expérimentée dans l'académie d'Amiens sera généralisée. Au total, six plates-formes de ce type couvriront l'ensemble du territoire national. Elles seront accessibles aux élèves et aux familles par téléphone ou par internet mais offriront également des possibilités d'échanges et des rendez-vous avec les professionnels des réseaux en charge de l'information et de l'orientation. Les questions posées par les collégiens, les lycéens et leurs familles seront donc traitées directement. Dès la fin du mois de septembre, le site de l'Onisep offrira un système de géolocalisation des formations et pourrait, à terme, permettre également une géolocalisation des offres d'emploi.

M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, a souligné la nécessité de décloisonner les différentes voies de formation. Ceci passe par la multiplication de passerelles entre voie générale, voie technologique et voie professionnelle, la diversification des approches pédagogiques et l'amélioration de l'articulation entre formation initiale et formation continue. Ainsi, l'alternance sera développée pour les jeunes les plus en difficulté en fin de collège et l'apprentissage sera développé en milieu scolaire.

L'essentiel de la formation continue est aujourd'hui assuré par le réseau des groupements d'établissements (Greta). Les rapports les plus récents, et notamment celui de la mission d'information commune conduite par le sénateur Jean-Claude Carle, ont montré la nécessité d'améliorer le dispositif actuel qui souffre de dysfonctionnements récurrents faisant obstacle à la mission de service public de l'éducation nationale en matière de formation continue des adultes. Un groupe de travail est chargé de formuler des propositions concrètes pour faire évoluer la gouvernance des Greta ainsi que le statut et les missions des conseillers en formation continue.

Concluant son propos, le ministre a indiqué que l'articulation entre insertion professionnelle et accompagnement des élèves est au coeur des réformes en cours.

Mme Catherine Procaccia, présidente, a souligné que l'éducation nationale est au centre des enjeux en matière de formation et d'orientation et qu'il paraît difficile de séparer formation initiale et formation continue.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a remercié le ministre de s'être saisi dès son arrivée du problème des Greta. Une réforme importante est nécessaire et attendue depuis trop longtemps.

Concernant le projet de loi, il paraît indispensable que la réforme soit globale et intègre la formation initiale. Sans cela, on ne parviendra qu'à traiter le « stock » d'élèves qui quittent l'enseignement secondaire et l'enseignement supérieur sans diplôme, mais sans apporter de solutions pour l'ensemble des jeunes.

Deux problèmes essentiels sont posés : celui de l'orientation et celui des plans régionaux de développement des formations professionnelles (PRDF). S'agissant de l'orientation, l'enjeu principal est celui de l'information, qui relève d'une compétence partagée entre l'éducation nationale et d'autres acteurs publics. L'orientation implique de prendre en compte les aspirations de l'élève ainsi que les besoins économiques et ceux des territoires. Il est nécessaire de mettre en cohérence le système d'orientation et c'est ce que propose le livre vert de Martin Hirsch sur la jeunesse, en préconisant la mise en place d'un service public de l'orientation. Il est difficile de retarder encore une réforme qui paraît nécessaire à tous.

S'agissant du recrutement des conseillers d'orientation psychologues, la nécessité d'un diplôme de psychologie clinique paraît moins indispensable en matière d'orientation qu'une bonne connaissance des métiers.

Enfin, pour les quatre-vingt mille étudiants qui quittent l'université au terme de la première année, ne serait-il pas adéquat d'augmenter le nombre de places en brevets de technicien supérieur (BTS) et en instituts universitaires de technologie (IUT) ?

M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, a estimé que l'orientation repose sur le triptyque informer, affecter et insérer. S'agissant de l'information, celle-ci incombe, au sein de l'éducation nationale, à l'Onisep qui compte seize millions de connections sur son site Internet. La mission d'information n'appartient pas exclusivement à l'éducation nationale puisqu'y participent également les centres d'information et de documentation jeunesse (CIDJ) ainsi que les collectivités locales et de nombreux organismes privés. Dès lors, il paraît difficile de la confier à un acteur unique. L'affectation, qui s'effectue en fonction du projet de l'élève, appartient en revanche en propre à l'éducation nationale. L'insertion est enfin un domaine partagé que l'éducation nationale doit mieux prendre en compte.

L'un des dysfonctionnements actuels réside dans la mauvaise diffusion de l'information. Mettre en place une grande structure nationale qui exercerait la tutelle des organismes existants ne ferait sans doute qu'accroître le problème en éloignant les responsables de l'orientation du terrain. Ce qu'il faut, c'est plus de coordination entre les acteurs. Singulièrement, il paraît problématique de faire passer l'Onisep sous la responsabilité d'une nouvelle structure alors même que l'éducation nationale est en train de s'y investir de plus en plus. D'autres formules qu'un système unifié sont envisageables. Ainsi, la plate-forme mise en place à Amiens ou celle de Bordeaux, créée avec l'association de régions de France, constituent des initiatives intéressantes.

S'agissant des conseillers d'orientation, une réflexion sur leur mission est en cours. On peut envisager notamment qu'ils soient rapprochés du terrain et placés auprès des équipes pédagogiques.

La prévention du décrochage scolaire lors de la première année des études universitaires est un axe majeur de la réforme du lycée. Il est important de limiter l'écart entre le lycée et l'université non seulement en transmettant des savoirs, mais également en organisant l'apprentissage de l'autonomie.

M. Jacques Legendre a insisté sur le fait qu'il s'agirait d'une faute que de ne pas poser ensemble la question de la formation professionnelle et celle de la formation initiale. Les quelques cent-vingt mille élèves qui quittent l'enseignement secondaire sans diplôme sont trop nombreux, et ce depuis trop longtemps. Il est important de rappeler que le baccalauréat général a pour vocation de préparer à l'enseignement supérieur tandis que le baccalauréat professionnel doit permettre une insertion rapide sur le marché du travail. Ceux qui ont choisi cette voie doivent par ailleurs accéder à la formation continue afin d'évoluer dans leur carrière après un nouveau passage par l'enseignement.

Le problème des conseillers d'orientation provient du fait qu'ils sont tous issus du même moule alors qu'ils doivent orienter vers des métiers très différents ; il importe donc de diversifier leur recrutement.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin a déclaré que, pour être réel, le droit à être orienté doit se traduire par un accompagnement et un suivi tout au long de la scolarité. Par ailleurs, il paraît dommageable qu'il y ait une déconnection entre le droit à l'orientation, mentionné par le projet de loi, et la formation initiale. La formation des conseillers d'orientation n'est pas le seul problème. Il faudrait également prendre en considération leur nombre et être en mesure de s'assurer qu'un adulte sera responsable de l'orientation de chaque élève durant toute sa scolarité. Un véritable service public de l'orientation doit être créé au sein de l'éducation nationale, le dispositif actuel étant particulièrement inefficace.

M. Alain Gournac a tenu à appuyer les remarques de ses collègues sur la rupture entre le lycée et l'enseignement supérieur. Il existe plus largement un problème d'image et de contact entre l'entreprise et l'école. Il est nécessaire de montrer que les métiers de la main ne sont pas des métiers secondaires. C'est un état d'esprit qu'il convient de faire évoluer, non seulement pour les conseillers d'orientation, mais également pour les enseignants. La revalorisation des baccalauréats professionnels est un point essentiel.

Mme Annie David a précisé que l'un des intérêts d'un service public de l'orientation qui débuterait sous statut scolaire et se prolongerait par la formation continue serait de permettre les reconversions professionnelles. Il faudrait au moins réunir l'ensemble des formations sur une même plate-forme, quelle que soit sa forme juridique ou son ministère de rattachement.

Par ailleurs, il est regrettable que le droit à la formation différée, prévu par les partenaires sociaux dans les accords interprofessionnels, ait disparu du texte alors qu'il encouragerait certains à s'engager dans une formation initiale courte dès lors que la possibilité d'un retour à l'enseignement leur serait ouverte. Deux questions se posent également : comment passer concrètement à 5 % de contrats d'alternance dans les entreprises et comment faire en sorte que les écoles de la « deuxième chance », placées hors statut scolaire, ne servent pas à dédouaner l'école de la « première chance » de ses échecs ?

M. Yannick Bodin a rappelé que le rapport sur la diversité sociale dans les classes préparatoires a montré que le problème premier est celui de l'information. Les conseillers d'orientation souffrent d'un vrai déficit de moyens qui empêchent le suivi régulier. Le contact avec les jeunes est aléatoire et épisodique et plutôt lié aux circonstances. Le ministre ayant indiqué, au moment de la rentrée scolaire, le nombre d'élèves par enseignant, il serait intéressant qu'il donne également le nombre d'élèves par conseiller d'orientation ainsi que le temps moyen passé par un élève avec un conseiller pédagogique au cours de sa scolarité.

En matière d'orientation, la lenteur de l'évolution de la formation accordée aux maîtres est également problématique. Enfin, il conviendrait de s'assurer que l'orientation n'est plus aujourd'hui stigmatisée comme elle l'a été pendant longtemps par les enseignants eux-mêmes.

Mme Christiane Demontès a relevé le paradoxe qu'il y a à étudier un texte sur la formation tout au long de la vie qui laisse de côté la formation initiale. Ne pas traiter de ce sujet ferait du projet de loi une occasion manquée. Par ailleurs, traiter séparément la formation professionnelle, la réforme du lycée et la question de la jeunesse, suite au livre vert de Martin Hirsch, paraît dommageable dès lors que les trois sujets se recoupent largement.

Lors des auditions conduites par la mission commune d'information sur la politique en faveur des jeunes, les critiques sur l'orientation offerte par l'éducation nationale ont été nombreuses, notamment en raison du manque de lisibilité des structures. L'idée d'un service public unique est dès lors intéressante. Elle ne doit pas forcément prendre la forme d'une nouvelle structure mais peut se concrétiser par une coordination accrue entre les organismes existants et la mise en place d'une déclinaison territoriale. Il est également important que ceux qui, à quarante ans, souhaitent réorienter leur carrière professionnelle, puissent disposer d'un lieu identifié pour l'orientation et le conseil.

Enfin, le rôle des différents acteurs du PRDF semble également devoir être précisé.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a manifesté son accord avec le monopole de l'éducation nationale en matière d'affectation des élèves, à condition que celle-ci ait une claire connaissance des débouchés des différentes filières.

Le PRDF doit être le lieu des compétences partagées entre l'Etat, la région et, surtout, les partenaires économiques et sociaux. Il faut que chacun s'engage et, à cet égard, la proposition actuelle du projet de loi n'est pas satisfaisante.

M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, a indiqué avoir réuni les recteurs d'académie afin notamment de traiter de la question des sorties sans diplôme. A Strasbourg, vient d'ouvrir la première classe préparatoire composée d'élèves issus du baccalauréat professionnel, ce qui participe de la revalorisation de cette filière. La diversification du recrutement des conseillers d'orientation est en cours et devrait permettre une meilleure connaissance du monde de l'entreprise comme des nouvelles filières d'emploi.

Les conseillers d'orientation, qui ne sont que quatre mille, passent nécessairement un faible nombre d'heures avec les élèves, ce qui incite à les rapprocher des établissements et des besoins. L'accompagnement individualisé des élèves sera par ailleurs renforcé et un tutorat mis en place dans le cadre de la réforme du lycée avec un financement pour les professeurs qui accepteront de s'y engager. Dans ce cadre, toute la communauté éducative, y compris les parents, pourra également être impliquée.

La mise en place d'une structure d'orientation compétente tout au long de la vie n'est pas forcément une réponse adéquate. Il faudrait un outil adapté à chaque situation et donc des organismes spécialisés avec, entre eux, une bonne coordination.

La revalorisation de la voie professionnelle est également engagée avec le passage du baccalauréat professionnel en trois ans qui doit permettre de recruter pour cette filière quatre-vingt mille élèves de plus. Par ailleurs, les élèves en difficulté qui bénéficient déjà d'un accompagnement pour l'acquisition des savoirs fondamentaux, comme la lecture, bénéficieront également d'une aide qui sera développée au lycée.

Si l'école est encore insuffisamment ouverte à l'entreprise, il ne faut pas oublier que cent vingt mille élèves suivent, chaque année, une initiation à l'entreprise au collège. Un groupe technique de travail a été mis en place pour émettre des propositions concrètes afin d'améliorer les liens entre école et entreprises.

Le fait que l'aide personnalisée soit de deux heures par semaine à l'école primaire et bénéficie à un tiers des collégiens en France et à la moitié des collégiens en zone rurale montre que l'école de la « première chance » n'entend pas se défausser sur l'école de la « deuxième chance ». Les PRDF doivent également permettre d'augmenter le nombre de contrats d'alternance. Un véritable service d'accompagnement des élèves pour l'accès aux entreprises pourra dès lors être mis en place.

Si les PRDF doivent être établis en concertation avec les collectivités locales et après avis des partenaires sociaux, il ne saurait être question pour l'éducation nationale de déléguer sa compétence en matière d'ouverture des formations. Les PRDF peuvent servir de documents d'orientation mais ne sauraient devenir contraignants.

En réponse à M. Yannick Bodin, M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, a affirmé qu'orienter était permettre à chacun de trouver sa voie et que cette acception positive du terme devait faire disparaître les connotations négatives dont il avait pu être assorti par le passé.

Audition de M. Jean-Paul Denanot, président du conseil régional du Limousin, président de la commission formation de l'association des régions de France

Puis la commission spéciale a entendu M. Jean-Paul Denanot, président du conseil régional du Limousin, président de la commission formation de l'association des régions de France (ARF).

M. Jean-Paul Denanot, président du conseil régional du Limousin, président de la commission formation de l'association des régions de France (ARF), a tout d'abord fait valoir que le projet de loi intéresse au premier chef les régions puisque la formation professionnelle constitue l'une de leurs compétences reconnues. Les régions ont d'ailleurs joué le jeu de la concertation en participant activement aux divers travaux de réflexion sur la réforme du système actuel, aussi bien dans le cadre de la mission sénatoriale présidée par Jean-Claude Carle que dans celui des groupes de travail Ferracci ou du Conseil d'orientation pour l'emploi. Or, leurs préoccupations n'ont guère été prises en compte dans le projet de loi.

Le dispositif proposé suscite plusieurs interrogations. Les régions resteront-elles les animateurs du plan régional de développement des formations professionnelles (PRDF) ? Quelle sera désormais la portée de ce plan régional ? Les régions auront-elles un véritable rôle de pilotage de la formation professionnelle ? Pourront-elles prendre en compte les préoccupations d'aménagement du territoire lorsqu'elles passeront commande de formations ?

Le point essentiel de préoccupation pour les régions est évidemment le PRDF. Aujourd'hui, ce document est élaboré par la région en concertation avec l'ensemble des acteurs, mais, par la suite, ceux-ci ne se sentent guère liés par ce document, ce qui a fait naître un débat sur l'opportunité de le rendre « prescriptif » pour contraindre chacun à respecter les engagements qu'il a pris au cours de la négociation. Le système prévu par le projet de loi consiste à faire signer le PRDF par le président de la région sans que le conseil régional lui-même soit mentionné. Il est souhaitable que les régions soient responsables du pilotage, en concertation avec l'ensemble des acteurs intéressés, notamment les partenaires sociaux mais aussi l'Etat, en particulier les ministères de l'éducation nationale et, dans les régions rurales, de l'agriculture, ces différents partenaires devant s'engager pour que le PRDF ait une véritable portée. En outre, s'il est indispensable que l'horizon du PRDF soit de quatre ou cinq ans, il convient aussi de prévoir que, chaque année, le plan régional fera l'objet d'ajustements conventionnels de manière à l'adapter au plus près des besoins de la population et de la société.

Il est par ailleurs regrettable que rien ne soit prévu en matière d'orientation alors que cette question constitue actuellement le maillon faible du système éducatif et de formation. L'orientation doit tenir compte des souhaits des jeunes mais aussi des besoins économiques et sociaux.

En ce qui concerne la gouvernance du système de formation professionnelle, le rapport Ferracci a montré que tous les acteurs estiment aujourd'hui que la région constitue le niveau de pilotage le plus pertinent. On observe d'ailleurs en France une nette préférence pour les mobilités professionnelles plutôt que géographiques : 80 % des mouvements professionnels se font au sein d'une même région.

Enfin, il est important de souligner que la formation n'est pas une marchandise comme les autres ; elle ne peut donc être soumise systématiquement au marché, ce qui nécessiterait l'adoption d'une charte publique de la formation. En effet, l'expérience montre que certains lots de formation ne trouvent pas preneurs en milieu rural et qu'il est même parfois nécessaire de subventionner les opérateurs pour qu'ils dispensent les formations au plus près des territoires. Une solution pourrait consister à définir un périmètre de formations qui ne soit pas soumis à la concurrence, par exemple pour le niveau 5 ou pour permettre la qualification de publics en difficulté qui nécessitent un accompagnement très spécifique. Plusieurs organismes publics, comme l'association pour la formation professionnelle des adultes (Afpa), les groupements d'établissements publics d'enseignement (Greta) ou les centres de formation professionnelle et de promotion agricoles (CFPPA), sont capables de répondre à ce type de demande mais pas dans le cadre d'une problématique de marché.

Mme Catherine Procaccia, présidente, a souhaité savoir si, sur ces divers sujets qui sont au coeur des préoccupations de la commission spéciale, des amendements ont été examinés par l'Assemblée nationale.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, est convenu que la rédaction actuelle de l'article 20 du projet de loi sur le PRDF n'est pas satisfaisante et qu'elle cumule tous les inconvénients. Il serait en effet préférable que le plan régional ait une valeur d'engagement pour tous, Etat, région et partenaires socio-économiques, mais la question est de savoir comment mettre en place cet engagement des trois parties et comment l'organiser sur une durée de quatre ou cinq ans. Pour progresser dans cette voie, il faut que les compétences soient partagées et non séparées. De même, il est certain que la clause du mieux-disant est souvent difficile à valider dans les marchés de formation, mais les modalités d'amélioration du système sont complexes. En tout état de cause, revenir sur la compétence régionale en matière de formation professionnelle serait la pire solution.

M. Jean-Paul Denanot a insisté sur le caractère globalement utile de la décentralisation, notamment dans le domaine de la formation. Dans celui-ci d'ailleurs, l'existence de chacun des trois partenaires est indispensable : l'Etat pour la formation initiale et la gestion des titres et diplômes ; les partenaires sociaux, en particulier les entreprises, pour la définition des besoins économiques et sociaux qui diffèrent parfois sensiblement d'une collectivité à l'autre ; la région pour la coordination et l'organisation du dialogue entre les différents acteurs concernés et le contrôle de la cohérence du dispositif mis en place. Le conseil régional doit avoir pour mission de faire en sorte que le PRDF soit bien établi en partenariat avec les différents acteurs, au plus près des besoins des personnes concernées, et que les modalités d'ajustement et de réactivité en fonction de la situation économique soient bien mises en place.

M. Claude Jeannerot s'est interrogé sur la possibilité d'instaurer un périmètre pour l'achat de formations de niveau 5 ou du premier niveau de qualification dès lors que les règlements européens semblent l'interdire et que l'Afpa elle-même indique que, dans un tel cas, elle pourrait faire l'objet de demandes de remboursement par les instances européennes. Par ailleurs, quel jugement peut-on porter sur le transfert d'une partie des psychologues de l'Afpa vers Pôle emploi ? Est-ce compatible avec la nécessité pour les régions de s'intéresser à la question de l'orientation ?

Mme Christiane Demontès a souligné l'importance de ces deux questions relatives à la définition éventuelle d'un périmètre de formations qui échapperait à la logique du marché et au rôle des régions en matière d'orientation. Elle a insisté sur la nécessité d'inscrire dans la loi le principe de l'adaptation régulière du PRDF par l'adoption de conventions annuelles ; il ne faudrait pas que la nouvelle loi soit en recul par rapport aux règles actuelles sur ce point alors même que la crise économique montre la nécessité de ces ajustements. Il est enfin très pertinent de faire valoir que la formation professionnelle peut être un outil d'aménagement du territoire, ce qui renforce son incompatibilité avec la logique du marché et de la concurrence. Le parallélisme existant entre les parcours professionnels et les parcours de vie est une question à approfondir.

M. Yannick Bodin s'est déclaré très sensible à l'affirmation selon laquelle la région est le territoire le plus adapté en matière de formation professionnelle. Il a évoqué l'expérience menée en Ile-de-France pour élaborer un « schéma des formations des 15-25 ans », en partenariat avec tous les acteurs concernés ; seule la région était capable d'organiser l'ensemble des rencontres ayant permis d'établir ce document et d'effectuer les coordinations nécessaires. D'une façon plus générale, la région doit assurer le pilotage du PRDF et de ses ajustements annuels et garantir la complémentarité des diverses actions menées en matière de formation sur son territoire.

M. Jean-Paul Denanot a fait valoir que les régions ont une vocation naturelle à organiser le dialogue et la concertation ; elles n'ont pas de volonté d'accaparer le pouvoir mais le souhait de servir un territoire. Il a estimé que, loin d'empêcher la mise en place de périmètres protégés de formation, le droit européen y est plutôt favorable. Dans le cas de sa région, le périmètre spécifique mis en place ne recouvre qu'à peine 10 % de l'ensemble des formations ; il a été élaboré en s'appuyant sur les normes européennes et en identifiant précisément des niveaux et des natures de formations. Sans cette procédure, un certain nombre de publics et de territoires ne pourraient être touchés par les actions de formation. A cet effet, un amendement a été déposé à l'Assemblée nationale pour permettre, conformément au droit européen, un mandatement avec octroi de droits spéciaux au profit des collectivités territoriales et non seulement de l'Etat mais il s'est heurté à l'opposition du Gouvernement. De la même façon, il faut avoir conscience des difficultés probables auxquelles se heurtera l'Afpa si elle est systématiquement soumise aux lois du marché alors que cet organisme constitue un outil très intéressant pour le développement économique et l'aménagement du territoire. En matière d'orientation, le transfert des psychologues de l'Afpa à Pôle emploi pose le problème de l'accompagnement des formations mises en place par les régions. Des partenariats avec l'Etat sont pourtant possibles comme en témoigne la réussite de la Cité des métiers, créée par la région Limousin avec l'ensemble des acteurs concernés : le regroupement en un seul lieu de l'ensemble des services d'orientation permet de fournir des informations complètes sur les métiers et la situation de l'emploi et donc de donner tous les éléments du choix personnel d'une orientation.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, s'est interrogé sur la position des régions concernant l'idée, avancée par Martin Hirsch, de créer un service national de l'orientation.

M. Jean-Paul Denanot s'y est déclaré favorable à condition qu'il soit territorialisé. De la même façon, dans un service régional de l'orientation, il est indispensable que toutes les informations nationales soient disponibles.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a demandé comment on pourrait décliner le PRDF.

Mme Annie David a souhaité savoir si le PRDF devait avoir un caractère prescriptif.

M. Jean-Paul Denanot s'est déclaré favorable au caractère prescriptif du plan régional dès lors que celui-ci est élaboré dans la concertation et qu'il répond parallèlement à trois séries de besoins : ceux du territoire, ceux de l'entreprise et du développement économique, enfin ceux des citoyens.

Audition de M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse

Enfin, la commission spéciale a entendu M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse, a indiqué que le livre vert intitulé « reconnaître la valeur de la jeunesse » publié le 7 juillet s'inscrit dans le cadre de la politique ambitieuse voulue par le Président de la République pour apporter des réponses aux problèmes des jeunes. Ce livre vert est une construction commune des organisations syndicales, y compris patronales, des organisations représentatives des jeunes et des collectivités locales. Deux mois après la publication du livre vert, aucune de ces organisations ne s'est désolidarisée des propositions, ce qui renforce leur poids.

Concernant le projet de loi, plusieurs propositions du livre vert s'y rattachent, en particulier, la mise en place d'un service public territorialisé de l'orientation avec des missions précises et chargé de fournir une information claire, publique et gratuite. Il s'agit notamment de décloisonner l'orientation scolaire et celle de l'enseignement supérieur. On ne doit plus orienter en fonction des places disponibles, mais des besoins des élèves, de leur famille, de l'économie et, comme le souligne le rapporteur Jean-Claude Carle, des territoires. Ce service public doit être décliné à l'ensemble des niveaux. Au niveau national, il doit permettre une meilleure coordination en matière d'information et d'orientation. Il existe actuellement une vingtaine de réseaux dans ces domaines, ce qui est source de confusion. Plus particulièrement, il faut coordonner l'Onisep, Centre Inffo et les CIDJ. Au niveau régional, le service public de l'orientation doit réunir l'Etat et la région. Il est nécessaire d'avoir un lieu où tous les acteurs se retrouvent pour déterminer les orientations en la matière.

Enfin, la participation des différents organismes au service public de l'orientation doit passer par l'accréditation avec un cahier des charges national et des déclinaisons régionales. Il s'agit là d'une question de confiance car l'accréditation permettra d'assurer aux jeunes qu'il n'y a pas tromperie sur la marchandise. La mise en place d'un service unique permettra de lutter contre le cloisonnement actuel critiqué par l'ensemble des acteurs.

Le livre vert préconise également d'assurer la continuité du parcours et de la prise en charge des jeunes avec une obligation de formation jusqu'à dix-huit ans, cette obligation ne devant pas être confondue avec un allongement de l'obligation de scolarité qui a paru irréaliste. Il a également paru important de supprimer l'« année de carence » qui empêche la prise en charge au moment du décrochage scolaire. Le rôle des maires et des missions locales est essentiel en la matière. Il faut donc revenir à la conception d'origine du rôle des missions locales qui ont une vocation généraliste avec un coeur de métier centré sur les jeunes les plus en difficulté. Un renforcement du contrat d'insertion dans la vie sociale (Civis) paraît adapté dans ce cadre.

Le livre vert préconise également un doublement de l'alternance par la mise en place d'une diversification des formations offertes et des lieux où celles-ci peuvent se dérouler. Ainsi, dans les trois fonctions publiques, on compte un contrat d'alternance pour mille fonctionnaires, ce qui est bien loin des 3 ou 5 % attendus dans les entreprises. Le rapport du député Laurent Hénart a mis à jour les blocages techniques existants. Un système de double agrément limite ainsi fortement l'implication de la fonction publique dans l'alternance.

Une autre proposition est celle de la pré-embauche par un employeur, qu'il s'agisse d'une entreprise ou d'un organisme à but non lucratif. Un employeur pourrait proposer un financement à des jeunes pendant leurs études, qu'il s'agisse de payer les frais ou de compléter les revenus, en échange d'un engagement à travailler dans l'entreprise pendant une durée proportionnée aux sommes reçues. Cette mesure nécessite une disposition législative.

Enfin, concernant les stages, le principe a été arrêté qu'il n'y ait pas de formation sans stage et pas de stage sans formation. Dès lors, il faut aller plus loin que la loi de 2005.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a souligné qu'il partage le point de vue du haut commissaire sur l'orientation, la coordination des acteurs et la pertinence du niveau régional pour agir. A l'heure actuelle, l'information en matière d'orientation bénéficie principalement à ceux qui savent ou à ceux qui ont. Il a souhaité savoir qui devait donner la labellisation aux organismes chargés de l'orientation et pourquoi un double agrément était nécessaire pour accueillir des contrats d'alternance dans la fonction publique. Il a également demandé des précisions sur les contrats de pré-embauche. S'agissant de l'interdiction des stages hors cursus préconisée par le livre vert, s'agit-il uniquement de ceux où des étudiants sont utilisés pour ne pas pourvoir un emploi ou de l'ensemble des publics ? Une interdiction générale des stages hors cursus pourrait avoir des effets pervers. Enfin, quels sont les objectifs qui seraient dévolus aux missions locales ? Les maisons de l'information sur la formation et l'emploi (Mife) ne devraient-elles pas également y participer ?

M. Claude Jeannerot a estimé que, dès lors que l'on envisage un service public de l'orientation, il paraît difficile de ne pas s'interroger sur la prise en compte des projets successifs de formation au cours d'une vie professionnelle. Dans ces conditions, les transferts de personnels envisagés par l'article 19 du projet de loi vers Pôle emploi sont-ils opportuns ou ne doivent-ils pas plutôt être revus dans le cadre de la création d'un service public unique ?

Mme Christiane Demontès a souhaité savoir s'il ne faut pas étendre le service public de l'orientation à toute la vie professionnelle. Elle a également estimé que l'évaluation des missions locales est mieux prise en compte par la proposition 10 du livre vert que par l'article 13 nonies du projet de loi. En effet, les missions locales doivent avoir une approche globale de l'insertion et ne peuvent être évaluées uniquement en fonction du nombre d'emplois obtenus.

Mme Annie David a indiqué qu'un service public de l'orientation territorialisé pourrait permettre aux salariés de se reconvertir plus facilement. En matière d'alternance, l'un des problèmes est qu'après l'obtention d'un diplôme, les offres d'embauche par les entreprises où s'est déroulée l'alternance sont parfois inférieures au niveau atteint. Elle a également estimé qu'un stage peut permettre d'acquérir une expérience nécessaire à l'entrée sur le marché du travail.

M. Alain Gournac a jugé intéressante l'idée d'avoir un seul interlocuteur en matière d'orientation tout au long de la vie mais que sa réalisation paraît complexe. Les stages permettent effectivement de connaître les entreprises mais le problème est que l'école leur est peu ouverte. Il s'est déclaré très favorable à un recours accru à l'alternance.

M. Jean-Pierre Godefroy a souligné l'importance des stages dans un cursus. Il est néanmoins nécessaire d'avoir une convention entre le formateur, le stagiaire et l'entreprise dans tous les cas afin de limiter les abus. La proposition de loi qu'il avait déposée allait en ce sens. Il faut empêcher que les stages remplacent un emploi permanent. La solution la plus simple est de faire figurer en tant que tels les stagiaires dans les registres des emplois de l'entreprise, ce qui permet les contrôles. Par ailleurs, l'alternance dans la fonction publique est un moyen non seulement d'offrir une formation aux étudiants, mais également de permettre aux formateurs de se remettre en cause. Il a interrogé le haut commissaire sur le point de savoir si les propositions intéressantes du livre vert ne devraient pas faire l'objet d'un texte spécifique.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a déclaré que l'« année de carence » devient trop souvent une année d'errance et qu'il convient de trouver les moyens de résoudre ce problème.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse, a répondu sur la question des stages en entreprise qu'il appartiendrait à un service public de l'orientation de proposer des stages aux élèves et de les aider à en trouver. Il agirait en quelque sorte en tant que banque de stages. Il faut également mieux adapter l'insertion des stages dans la vie scolaire car, alors que les entreprises ne trouvent pas de stagiaires quand elles en cherchent, elles sont dans l'incapacité d'accueillir l'ensemble des stagiaires de troisième qui les sollicitent en même temps. Concernant les stages hors cursus, l'ensemble des organisations syndicales, y compris le Medef, sont d'accord pour mettre fin aux abus trop nombreux, notamment dans les entreprises de communication, où les stagiaires remplacent des emplois permanents et où leur travail est d'ailleurs facturé comme tel aux clients. C'est là encore une question de confiance que de ne plus proposer des emplois comme stages.

L'« année de carence » devient effectivement trop souvent une année d'errance et il est nécessaire d'y mettre fin par la loi. Une mission locale doit pouvoir s'occuper d'un jeune quand il quitte l'institution scolaire. Des questions matérielles restent à régler. Ainsi, des plates-formes où les différents acteurs se réuniraient et se mettraient d'accord sur les protocoles pourraient être mises en place. Ce sont souvent des barrières psychologiques qui doivent être franchies. De nombreux chefs d'établissement associent encore les missions locales à l'échec de la scolarité et refusent d'y envoyer des jeunes pour lesquels le lycée n'est pas une solution adaptée. Il y a également des problèmes financiers et matériels à surmonter et on peut penser qu'un fichier avec les noms et le mode de contact des jeunes pourrait être élaboré de façon commune pour l'éducation nationale, les missions locales et Pôle emploi.

Concernant le développement de l'alternance dans la fonction publique, le plus efficace paraît d'aligner le régime sur celui des entreprises et de faire disparaître la nécessité d'un agrément.

M. Jean Desessard a déclaré que le problème est que l'alternance concerne de plus en plus les jeunes les plus qualifiés.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse, a indiqué qu'il s'agit, de son point de vue, d'un enrichissement.

Mme Catherine Procaccia, présidente, a souligné que l'on peut désormais faire un doctorat en alternance, ce qui est positif.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse, a précisé que les contrats de pré-recrutement préconisés par le livre vert ont été jugés juridiquement acceptables par la direction générale du travail. Ce système peut intéresser tant les entreprises que le secteur médico-social à condition de respecter le dialogue social.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a considéré que ce dispositif serait également susceptible d'améliorer la situation des professions en manque de main-d'oeuvre.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse, a indiqué par ailleurs que les missions d'information et de formation peuvent parfaitement participer au service public de l'orientation si elles sont accréditées. Le système de l'accréditation est par ailleurs compatible avec les transferts de personnels envisagés par le projet de loi. A l'inverse, il semble important de diversifier le recrutement des conseillers d'orientation.

S'agissant de la mise en place d'un service public de l'orientation tout au long de la vie, il n'appartenait pas au livre vert de faire une proposition qui allait bien au-delà du domaine qui lui était imparti. Néanmoins, lors de sa présidence de l'Union européenne, la France s'est engagée sur la formation tout au long de la vie et tout ce qui va en ce sens est bénéfique. Mais il vaut mieux parfois ne pas brusquer les évolutions quand bien même des rapprochements sont envisageables et nécessaires. La notion centrale doit être celle d'insertion professionnelle et sociale.

Le Gouvernement jugera de l'opportunité de déposer un texte spécifique sur la base des propositions du livre vert en fonction des attentes des parlementaires. Il n'est pas question de proposer des amendements gouvernementaux au projet de loi qui donneraient l'impression d'un passage en force. A l'inverse, les propositions qui semblent utiles et cohérentes au Sénat doivent pouvoir être introduites dans le texte.

Mme Catherine Procaccia, présidente, a souligné que le développement des stages est évidemment souhaitable, mais que les entreprises, lorsqu'elles prennent véritablement en charge la formation des stagiaires, ne peuvent proposer qu'un nombre limité de stages.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse, a noté que le climat sur l'évolution des stages lui avait paru ouvert tant du côté des syndicats que du patronat. De nombreuses entreprises restent demandeuses de stages pour leur image et la formation qu'elles souhaitent donner.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a estimé que trop de stages tuent le stage et qu'il faut se défier des stages ordonnés par circulaire ministérielle. Concernant les dispositions qui doivent être introduites dans le texte, il faut absolument éviter une inflation semblable à celle du projet de loi sur l'hôpital mais des avancées sont indispensables par rapport au texte soumis à l'examen du Sénat.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse, a souhaité rappeler l'implication de Christian Demuynck, tant dans la formulation des propositions du livre vert que dans le travail de la mission d'information commune du Sénat. Les propositions du livre vert sont donc d'une certaine manière déjà celles du Sénat.

Mercredi 9 septembre 2009

- Présidence de Mme Catherine Procaccia, présidente -

Table ronde avec des représentants des organisations professionnelles

Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission spéciale a entendu, lors d'une table ronde, sur le projet de loi n° 578 (2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, des représentants des organisations professionnelles suivantes :

- Mmes Annie Thomas, secrétaire nationale, et Catherine Ducarne, secrétaire confédérale négociatrice de l'accord national interprofessionnel (Ani) formation professionnelle, de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) ;

- M. Jean-Pierre Therry, adjoint du secrétaire général adjoint chargé de la formation professionnelle continue, de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) ;

- MM. Jean-Michel Pottier, président de la commission formation-éducation, et Georges Tissié, directeur des affaires sociales, de la Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises (CGPME) ;

- MM. Thierry Lepaon, secrétaire confédéral, et Paul Desaigues, conseiller confédéral, de la Confédération générale du travail (CGT) ;

- M. Stéphane Lardy, secrétaire confédéral à la formation professionnelle, de Force ouvrière (FO) ;

- MM. Jean-François Pilliard, chef de la délégation patronale chargée de la négociation sur la formation professionnelle, et Francis Da Costa, président de la commission formation, du Mouvement des entreprises de France (Medef) ;

- M. Pierre Burban, secrétaire général de l'Union professionnelle artisanale (UPA).

M. Jean-François Pilliard, chef de la délégation patronale du Medef chargée de la négociation sur la formation professionnelle, a tout d'abord présenté les principales orientations de l'accord national interprofessionnel du 7 janvier 2009, signé par l'ensemble des organisations patronales et de salariés.

Rappelant le titre de l'accord - « accord national interprofessionnel sur le développement de la formation tout au long de la vie professionnelle, la professionnalisation et la sécurisation des parcours professionnels » - il a estimé qu'il s'inscrit dans la continuité de l'accord de 2003 et marque en même temps la volonté de mieux intégrer la sécurisation des parcours professionnels.

Puis il a énuméré les évolutions ou simplifications des dispositifs actuels apportées par l'accord :

- la réduction, de trois à deux, des catégories de plans de formation ;

- l'élargissement du contrat de professionnalisation aux publics les plus éloignés de l'emploi, conformément aux conclusions du Grenelle de l'insertion ;

- la fixation, par accord de branche, d'une durée minimale pour la période de professionnalisation ;

- la garantie effective de la portabilité du droit individuel à la formation (Dif) ;

- l'augmentation du nombre de salariés bénéficiaires du congé individuel de formation (Cif), ainsi que la possibilité de l'effectuer hors temps de travail ;

- l'importance réitérée de la formation initiale différée pour laquelle les signataires demandent, depuis leur accord de 2003, un abondement financier par les pouvoirs publics ;

- la mise en cohérence, par les observatoires prospectifs des métiers et des qualifications, des méthodes et des outils de formation, ainsi que la constitution d'un socle d'informations et leur diffusion par un observatoire national ;

- la meilleure prise en compte de l'ensemble des certifications professionnelles et des habilitations des personnes ;

- la facilitation de l'accès à la validation des acquis de l'expérience (VAE) grâce à une implication renforcée des branches professionnelles et des entreprises ;

- enfin, en plus du socle de connaissances et de compétences acquis lors de la formation initiale, l'apprentissage ou l'actualisation de compétences destinées à favoriser l'évolution et les transitions professionnelles.

En ce qui concerne la qualification et la requalification des salariés et des demandeurs d'emploi, l'accord prévoit la mise en place d'un fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), en remplacement de l'actuel fonds unique de péréquation (Fup). Son financement sera assuré par une contribution assise sur les obligations légales des entreprises, égale à un pourcentage maximal de 13 %, défini chaque année en fonction des besoins. Jusqu'à 900 millions d'euros pourront ainsi être mobilisés en année pleine à partir de 2010. Compte tenu de la conjoncture et des délais d'application de l'accord et de la loi, des dispositions transitoires ont été prises pour 2009, dans le cadre d'un accord entre le Fup et l'Etat, permettant la mobilisation de financements pour répondre aux besoins de formation immédiats.

Une convention-cadre sera conclue entre les partenaires sociaux et l'Etat, déterminant les cofinancements et les grands axes de l'utilisation de ces fonds.

Des conventions au niveau national interprofessionnel, au niveau des branches et au niveau régional interprofessionnel pourront être conclues avec ce fonds. L'Etat, Pôle emploi, le fonds social européen (FSE), les conseils régionaux pourront participer à ces conventions destinées à mobiliser des cofinancements.

La période de professionnalisation et le Cif seront prioritairement mobilisables au profit des salariés dont le déficit de formation fragilise leur maintien ou leur évolution dans l'emploi.

Une action de préparation opérationnelle à l'emploi (POE), action de formation de 400 heures au maximum, pourra être mobilisée en faveur des demandeurs d'emploi, soit en fonction d'offres d'emploi déposées par les entreprises, soit dans le cadre de besoins identifiés collectivement par les branches professionnelles.

Il s'agit ainsi d'augmenter le nombre de salariés peu qualifiés et de demandeurs d'emploi accédant à la formation : 150 000 salariés fragilisés et demandeurs d'emploi devraient bénéficier, dès cette année, de l'accord entre le Fup et l'Etat et, en vitesse de croisière, c'est près de 700 000 salariés et demandeurs d'emploi supplémentaires qui seront ainsi formés.

Puis M. Jean-François Pilliard a présenté les dispositions relatives à la gouvernance des organismes de la formation professionnelle dont l'objectif est de distinguer les instances politiques des instances de gestion :

- le comité paritaire national pour la formation professionnelle, les commissions paritaires interprofessionnelles régionales pour l'emploi (Copire), les commissions paritaires nationales, régionales et territoires de branche, un conseil national d'évaluations de la formation professionnelle, pour ce qui est des instances politiques ;

- le FPSPP, les organismes paritaires collecteurs agréés (Opca) et les organismes paritaires agréés du congé individuel de formation (Opacif) en ce qui concerne les instances de gestion.

Il reviendra ainsi aux instances politiques la responsabilité du suivi et de la mise en oeuvre des politiques définies par l'accord et aux organismes de gestion la responsabilité de l'application de ces modalités aux entreprises et aux salariés.

Il a ensuite abordé l'évolution du rôle des Opca et des Opacif qui concerne notamment :

- pour les Opca, la définition de leurs besoins de formation professionnelle, en particulier s'agissant des très petites entreprises - petites et moyennes entreprises (TPE-PME), ainsi que l'information, la sensibilisation et l'accompagnement des entreprises ;

- pour les Opacif (gérant le Cif), l'amélioration de l'accompagnement des salariés et des demandeurs d'emploi grâce à la construction et la mise en oeuvre du projet de développement professionnel au travers de la réalisation d'actions de formation.

Des règles communes de gestion et de transparence sont par ailleurs précisées pour les Opca et Opacif dans une lettre paritaire consécutive à l'accord de janvier.

En conclusion, il a rappelé que l'Ani est l'aboutissement d'un long processus de négociation, et qu'il représente, par définition, un équilibre politique, technique et financier entre les parties signataires, que le Parlement devra prendre en compte.

M. Pierre Burban, secrétaire général de l'UPA, a d'abord rappelé que ce projet de loi s'inscrit dans le cadre de la loi du 31 janvier 2007 sur le dialogue social. L'Ani du 7 janvier 2009, parce qu'il a été signé par les huit organisations syndicales et patronales, est doté d'une certaine crédibilité, qui n'empêche toutefois pas les parlementaires d'exercer leur droit d'amendement. Il a néanmoins émis le voeu que les sénateurs soient attentifs aux termes de cet accord.

Evoquant le rôle de l'UPA, il a mis en avant la volonté de son organisation d'améliorer l'accès à la formation des salariés des TPE.

Au sujet de l'orientation et de la formation initiale, il s'est inquiété que 100 000 jeunes sortent encore aujourd'hui du système éducatif sans qualification ni diplôme. Si la formation professionnelle continue peut pallier certaines insuffisances de la formation initiale, elle ne résout pas tous les problèmes. L'objectif à atteindre est bien de ne plus avoir aucun jeune sortant du système éducatif sans qualification.

Concernant l'accès des salariés des TPE à la formation professionnelle, il a souhaité relativiser l'idée selon laquelle les salariés des plus petites entreprises seraient peu ou pas formés. Il a notamment contesté les outils et méthodes statistiques utilisés qui s'appuient sur le nombre de formulaires officiels remplis par les TPE. En réalité, la formation des employés se fait généralement « sur le tas » dès lors que de nouveaux produits, procédés ou techniques apparaissent. Il a néanmoins reconnu l'existence de freins à l'accès à la formation professionnelle pour les salariés des plus petites entreprises, qu'il est possible de surmonter.

Il s'est dit défavorable à la création d'une section supplémentaire au sein des Opca dont le seuil serait inférieur à cinquante salariés, souhaitant le maintien de la section regroupant les entreprises de moins de dix salariés. Il a regretté que la solution proposée par l'Assemblée nationale n'ait pas fait l'objet d'un dialogue syndical préalable, même si dans le fond elle n'est pas mauvaise. Enfin, il a reconnu la nécessité de la « mutualisation asymétrique » des contributions des grandes entreprises vers les TPE.

S'agissant de l'organisation des Opca, il a approuvé sa rationalisation ainsi que celle de l'utilisation des financements, souhaitant que l'adaptation des formations aux besoins des entreprises reste au coeur des préoccupations. Cela suppose de conserver un dispositif de gestion qui soit proche du terrain et qui offre des qualifications permettant aux salariés de progresser dans l'emploi.

M. Francis Da Costa, président de la commission formation du Medef, a rappelé que la négociation visait à répondre principalement à trois questions :

- comment favoriser l'accès à la formation des publics les plus fragiles sans déséquilibrer l'ensemble du système de formation professionnelle ?

- comment renforcer la complémentarité des politiques conduites par l'Etat, les partenaires sociaux et les conseils régionaux ?

- comment améliorer la gouvernance du système paritaire, et notamment des Opca ?

Il a approuvé la création du FPSPP qui devrait avoir un effet très structurant, sous réserve qu'un véritable partenariat se mette en place entre l'Etat et les partenaires sociaux, qui ont décidé de réaliser un effort considérable de redéploiement des contributions en faveur de la formation professionnelle versées par les entreprises.

La mise en oeuvre des mesures transitoires le montre : les nouvelles dispositions permettront d'améliorer la coordination et la lisibilité des actions mises en oeuvre par les Opca et les Opacif en cette période de crise. Elles devraient également favoriser l'accès à la formation de 150 000 salariés et demandeurs d'emploi supplémentaires grâce aux fonds mobilisés par les partenaires sociaux, l'Etat et le fonds social européen.

Favorable à la contractualisation, il s'est toutefois dit hostile à la mise en place de grands fonds multipartites dont la gouvernance serait incertaine ou en réalité assumée par l'Etat. Ainsi, la future convention-cadre entre les partenaires sociaux et l'Etat devra préciser les engagements de chacune des parties, et pas seulement ceux pris par les partenaires sociaux.

Puis il a rappelé qu'aux termes de l'Ani, le FPSPP a deux missions distinctes :

- la péréquation, d'une part (comme c'est déjà le cas pour l'actuel Fup) ;

- le cofinancement des actions de qualification ou de requalification des salariés et des demandeurs d'emploi, d'autre part.

La fonction de péréquation entre les Opca sur la professionnalisation et entre les Opacif sur le Cif doit en principe se dérouler paritairement, en dehors de la convention-cadre avec l'Etat, ce que ne prévoit pas le projet de loi à ce stade. Or, si cette péréquation n'était pas assurée, cela handicaperait l'activité des Opca et des Opacif qui hésiteraient à prendre les engagements nécessaires en faveur des jeunes, des salariés et des demandeurs d'emploi, faute de certitude quant à la péréquation dont ils pourraient bénéficier.

Pour ce qui est des versements au FPSPP, il est important que ce soit la négociation de branche et des organisations interprofessionnelles ayant signé un accord constitutif d'Opca interprofessionnel qui détermine les pourcentages appliqués à la professionnalisation et au plan de formation, sans que cette négociation fasse l'objet d'un encadrement réglementaire.

La POE a été voulue par les partenaires sociaux pour mettre la formation au service de l'emploi, en particulier grâce à une contractualisation technique et financière entre les Opca et Pôle emploi, et il est regrettable que le projet de loi se limite à un partenariat exclusivement financier. Il est indispensable que la POE soit mise en oeuvre soit sur la base d'une offre d'emploi identifiée, déposée par une entreprise, soit sur la base de besoins collectifs définis par les branches professionnelles et interprofessionnelles.

Il n'est pas souhaitable que le FPSPP finance une POE dont la mise en oeuvre serait exclusivement réalisée par Pôle emploi. La POE ne sera efficace que s'il y a un partenariat technique et financier entre Pôle emploi et les Opca.

M. Francis Da Costa a ensuite demandé que le législateur respecte l'équilibre financier prévu par l'Ani quant à la portabilité du Dif, la distinguant de la transférabilité. Evoquant les débats entre les partenaires sociaux à ce sujet, y compris sur l'éventuel rapprochement entre le Dif et le Cif, il a rappelé que l'accord n'est finalement pas allé au-delà de la mise en oeuvre de la portabilité.

Par ailleurs, il n'est pas souhaitable que la surtaxe à la taxe d'apprentissage versée par les entreprises de plus de 250 salariés n'atteignant pas un quota de jeunes en alternance soit versée en totalité au fonds national de modernisation et de développement de l'apprentissage (FNDMA). Il est préférable de maintenir des modalités de répartition équivalentes à celles qui prévalent pour la répartition de la taxe d'apprentissage. L'objectif est de permettre aux branches professionnelles et aux organisations interprofessionnelles de se doter de moyens complémentaires afin de favoriser le développement de l'alternance.

Comme d'autres organisations, le Medef est hostile à la création de nouvelles sections dans les Opca. Le texte initial du projet de loi prévoyait de remplacer les sections réservées aux entreprises de zéro à neuf salariés et de dix salariés et plus, par des sections regroupant les entreprises de zéro à quarante-neuf salariés et de cinquante salariés et plus. Le texte issu de l'Assemblée nationale prévoit trois sections : zéro à neuf, dix à quarante-neuf, cinquante et plus. La solution retenue est une mauvaise réponse à une bonne question : comment favoriser l'accès à la formation des salariés des TPE ?

L'obstacle sur cette question n'est pas financier, aucune donnée statistique ne permettant d'indiquer que les petites entreprises paieraient pour la formation des grandes entreprises. L'expérience montre que, dans les Opca ou les organismes de collecte de la taxe d'apprentissage (Octa), c'est en réalité l'inverse qui se produit : tant en ce qui concerne la professionnalisation que l'apprentissage, ce sont les contributions des grandes entreprises qui bénéficient aux plus petites. Il en est de même pour le plan de formation des TPE et des PME où les cofinancements obtenus en leur faveur par les Opca leur permettent de bénéficier de formations allant bien au-delà des fonds qu'elles ont versés.

En revanche, des mesures efficaces d'aide au remplacement des salariés des TPE-PME partant en formation seraient souhaitables.

La modification des actuelles sections complexifierait singulièrement la gestion et créerait un risque nouveau, à savoir que les plus grosses des entreprises de dix à quarante-neuf salariés aspirent les fonds versés par les plus petites. En conséquence, il serait préférable de revenir à la situation actuelle, qui distingue les entreprises de moins de dix salariés et celles de dix salariés et plus.

M. Francis Da Costa a ensuite considéré que la convention tripartite entre l'acheteur, le dispensateur de formation et la personne physique, prévue à l'article 16 du projet de loi, est totalement irréaliste, car elle rend impossible le déploiement massif d'actions de formation de courte durée dans un délai rapide. Il a préconisé de définir, a minima, la durée minimale des formations pour lesquelles cette convention s'appliquerait.

Par ailleurs, l'ensemble des partenaires sociaux regrette que l'Etat ne se soit pas davantage engagé en faveur du développement de la formation initiale différée. Cette absence avait déjà été soulignée lors de l'adoption de la loi de 2004 transposant l'accord de 2003. La possibilité d'abondement du Cif par l'Etat, sans représenter une voie exclusive, aurait permis à certains salariés et demandeurs d'emploi de bénéficier de ce type de formation. Cet abondement serait également une manière d'illustrer de façon concrète la convergence des objectifs et des réalisations, dont on peut espérer qu'elle sera favorisée par la contractualisation entre l'Etat et le futur fonds paritaire de sécurisation.

Il est regrettable que le projet de loi n'ait pas permis de clarifier les compétences de l'Etat et des conseils régionaux et, de façon plus générale, la gouvernance au niveau territorial, alors que les partenaires sociaux se sont efforcés de préciser les rôles des Copire et des commissions paritaires régionales ou territoriales pour l'emploi de branches. Il existe un trop grand nombre d'instances multipartites - certaines ayant été récemment créées par l'Etat - au sein desquelles les responsabilités sont diluées en raison du trop grand nombre de participants. A défaut de supprimer certaines instances, les comités de coordination régionale de l'emploi et de la formation professionnelle (CCREFP) pourraient être recentrés sur les représentants de l'Etat, des régions et des partenaires sociaux.

M. Stéphane Lardy, secrétaire confédéral à la formation professionnelle de Force ouvrière, a introduit son propos en évoquant des objections de fond et de forme sur certaines dispositions du projet de loi. Respectant le pouvoir d'amendement du Parlement, il a toutefois souhaité pouvoir faire oeuvre de pédagogie pour faire comprendre aux parlementaires la volonté des organisations syndicales et les principaux points d'achoppement de la négociation.

Il est tout d'abord regrettable que le projet de loi renvoie à de nombreux décrets ou rapports sur des questions qui relèvent en réalité de la compétence des partenaires sociaux. A titre d'exemple, l'article 4 bis du texte, sur le Dif, prévoit un rapport du Gouvernement au Parlement en excluant les partenaires sociaux. De même, la réorganisation des Opca relève en grande partie de textes réglementaires, alors que les partenaires sociaux ainsi que le conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV) devraient être associés.

Au sujet de la formation individuelle différée, le projet de loi ne prévoit pas la mise en place d'un droit opposable, alors que 150 000 jeunes sortent actuellement sans formation ni diplôme du système éducatif. Même si certains parviennent à exercer une activité, on observe qu'ils évoluent moins bien que les autres salariés au cours de leur carrière. Or, l'accord national interprofessionnel fixe le principe selon lequel tout salarié doit progresser au cours de sa carrière, ce qui implique que l'Etat prenne également sa part de responsabilité pour ces jeunes.

Sur le FPSPP, M. Stéphane Lardy s'est félicité de l'acceptation du fonctionnement paritaire, regrettant que le texte proposé dénote les réticences du Gouvernement à faire pleinement confiance aux partenaires sociaux. L'engagement des partenaires sociaux à intervenir en faveur des demandeurs d'emploi est une évolution importante. Or, le caractère obligatoire du conventionnement annuel avec l'Etat, en particulier sur la définition des modalités de péréquation des moyens entre les Opca, risque de compromettre le financement des contrats de professionnalisation et des Cif pour les personnes les plus fragiles. Le futur FPSPP, comme c'est le cas pour le fonds d'urgence aujourd'hui, a pour vocation de doter les Opca d'une capacité de réaction rapide, ce qui plaide contre l'intégration de la mission traditionnelle de péréquation du fonds dans la convention-cadre que doivent signer chaque année les partenaires sociaux et l'Etat. Cette convention, à laquelle les organisations ne sont pas résolument opposées dans son principe, permettra en revanche de préciser la manière dont seront distribués les aides aux publics prioritaires énumérés par le projet de loi.

Il est regrettable que le compromis obtenu à l'article 21 de l'Ani sur la POE n'ait pas été repris dans le projet de loi. Dans sa version actuelle, la POE ressemble davantage à l'actuelle action de formation préalable à l'emploi (AFPE), qui ne débouchait pas obligatoirement vers l'emploi. Selon les termes de l'article 21, la POE doit s'accompagner de la garantie de l'obtention, au terme de la formation, soit d'un contrat de professionnalisation, soit d'un CDI ou encore d'un CDD de plus de douze mois. La commission spéciale pourrait reconsidérer cet article à la lumière des dispositions retenues à l'article 21 de l'Ani.

Puis M. Stéphane Lardy il a évoqué le problème des jeunes en contrat de professionnalisation qui subissent un licenciement économique : aux termes de l'article 12 du projet de loi, l'Opca peut continuer de financer les actions d'évaluation, d'accompagnement et de formation, ce qui est une bonne chose. Mais il existe un risque que les jeunes choisissent d'interrompre leur contrat, s'ils ne sont plus que stagiaires de la formation professionnelle. Selon la date de la rupture du contrat, se pose également la question de la validation de la formation et des compétences acquises lors de la période d'activité. L'objectif à atteindre est de permettre à ces jeunes d'achever leur contrat auprès d'un autre employeur afin de valider leur formation. Pôle emploi, les Opca ou les organismes de formation devront donc tout faire pour trouver un autre emploi pour ces jeunes, ainsi que le stipule l'accord du 8 juillet 2009.

Quant au transfert des conseillers psychologues et des conseillers d'orientation de l'Afpa, il pourrait se traduire par le démantèlement de l'Afpa, même si la question du statut des personnels a été réglée favorablement.

Concernant les sections au sein des Opca, M. Stéphane Lardy s'est interrogé sur la pertinence de seuils, qui créent immanquablement des effets de seuils, reconnaissant que subsiste un véritable enjeu pour faire en sorte que les salariés des TPE soient aussi bien formés que les autres. Le coût du remplacement des salariés en formation doit être relativisé et l'allocation de remplacement qui a pendant quelque temps été offerte aux entreprises de moins de cinquante salariés ne s'est pas traduite par un développement des formations dans les TPE. En réalité, il s'agit davantage d'un problème de remplacement des compétences ainsi que de l'intérêt des employeurs pour la formation de leurs salariés.

S'agissant de la réorganisation des Opca, leur fusion et la remontée des seuils de collecte ne sont pas des éléments structurants, même si une taille critique est nécessaire pour assurer une meilleure gestion de la proximité et organiser un déploiement de l'offre de formation vers les salariés et les employeurs des TPE. A l'inverse, la création de « mastodontes » serait tout à fait préjudiciable.

Enfin, au sujet de la gouvernance, il est dommage que la coordination du système entre les régions, l'Etat et les partenaires sociaux n'ait pas été mieux organisée.

M. Thierry Lepaon, secrétaire confédéral de la CGT, a souligné que son organisation a respecté l'engagement pris de prolonger les acquis de l'Ani du 5 décembre 2003. La signature unanime de l'Ani du 7 janvier 2009 a prouvé la capacité des partenaires sociaux à assumer leurs responsabilités pour la mise en place d'un système de formation qui soit au service des besoins de la société et de ses différents acteurs. Il est souhaitable que l'Etat assume également ses responsabilités et ne dénature pas les fondements et l'équilibre de l'Ani, ce qui implique la mise en place de la formation initiale différée qui fait encore défaut au projet de loi.

Dans le contexte actuel de crise économique, la formation se révèle être non seulement une simple réponse conjoncturelle mais un investissement en faveur d'un développement économique durable, plus respectueux des équilibres sociaux et environnementaux. La formation n'est pas une fin mais un moyen, un véhicule. Elle doit avoir pour objectif de garantir à toute personne l'acquisition des qualifications lui permettant de choisir et assumer une trajectoire professionnelle sécurisée tout au long de sa vie, mais aussi la culture commune permettant la promotion sociale et l'émancipation, ce qui suppose la garantie collective de droits individuels, transférables et opposables, autrement dit, une sécurité sociale professionnelle dans le cadre d'un nouveau statut du travail salarié. La formation doit être construite comme une anticipation des besoins de demain pour relancer la machine économique et sociale.

Alors que l'Ani de 2003 était centré sur la personne, celui de 2009 est orienté vers l'entreprise et le développement économique, avec la volonté d'une meilleure prise en compte des publics spécifiques et des demandeurs d'emploi. A terme, l'objectif est de former 500 000 salariés et 200 000 demandeurs d'emploi supplémentaires. Pour autant, la loi doit garantir l'équilibre du système en maintenant les financements de la péréquation et de la professionnalisation.

L'accord du 7 janvier 2009 fait évoluer de façon importante les missions et les moyens financiers du fonds national de péréquation (aujourd'hui le Fup, demain le FPSPP), sans que les efforts en direction des demandeurs d'emploi et des publics spécifiques, ne se fassent pour autant au détriment de la professionnalisation, du Cif ou encore du plan de formation des entreprises de moins de dix salariés. A cet égard, la loi doit clairement sécuriser le financement de ces dispositifs par une mutualisation nationale des moyens.

M. Thierry Lepaon s'est alors dit favorable à l'inscription dans la loi du droit à l'information et à l'orientation, invitant le Sénat à en préciser les modalités d'application et les moyens alloués à sa mise en oeuvre, pour qu'il soit effectif. La CGT n'a aucune réticence particulière vis-à-vis de contractualisations avec l'Etat, dont les modalités sont d'ailleurs prévues dans l'Ani du 7 janvier. Mais la rédaction actuelle du projet de loi laisse augurer d'une mainmise de l'Etat sur les mécanismes de la formation et en particulier sur le FPSPP et le plan régional de développement de la formation professionnelle (PRDF). Il faudra donc clarifier les prérogatives des différents acteurs et garantir leur capacité à les exercer.

Il est regrettable que les conditions dans lesquelles se sont déroulées les négociations n'aient pas permis de déboucher sur une réforme simplifiant l'appareil de formation professionnelle et que, par manque de temps, le travailleur n'ait pas été placé au centre de cette réforme, conformément aux souhaits des organisations syndicales.

Alors que la négociation sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) et celle sur l'assurance chômage, ainsi que la mise en place de groupes de travail sur l'orientation, la VAE et la qualité de l'offre de formation, ont permis d'appréhender de manière globale les problématiques d'emploi et de formation au sein de l'accord, le projet de loi, dans son état actuel, est loin de répondre aux espoirs suscités par ces travaux. Ainsi, malgré l'urgence d'un travail de fond sur l'orientation et l'accompagnement tout au long de la vie et l'attribution à Mme Françoise Guegot d'une mission sur ce sujet, dont les conclusions seront rendues d'ici à la fin de l'année, le projet de loi se contente d'imposer le transfert des services d'orientation de l'association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) à Pôle emploi au risque de déstabiliser chacun de ces organismes.

Soulignant le fait que l'Ani du 7 janvier 2009 et le projet de loi n'ont pas repris l'ensemble des revendications de la CGT mais sont le résultat d'un compromis allant dans le sens de l'intérêt général, M. Thierry Lepaon a émis le voeu que l'Etat assume ses responsabilités et respecte les prérogatives des autres acteurs du système.

M. Jean-Michel Pottier, président de la commission formation-éducation de la CGPME, a fait valoir que la France dispose du système de formation professionnelle le plus développé au monde, avec de nombreux outils (contrat de professionnalisation, Dif, Cif, VAE, plan de formation, etc.). Ce système est principalement issu de la négociation collective, l'Ani de décembre 2003 représentant l'acquis le plus important. L'Ani du 7 janvier 2009 le complète et l'infléchit mais il reste globalement dans la ligne des fondements du précédent accord.

Concernant les dispositions du projet de loi, il a émis plusieurs réserves :

- il est regrettable que l'activation des financements en faveur de la formation des salariés les moins qualifiés et des demandeurs d'emploi, notamment dans le cadre de la POE, se fasse sur le seul fondement des offres d'emploi des entreprises et exclue le second critère défini par l'accord, à savoir les besoins collectifs identifiés par les branches professionnelles et interprofessionnelles. Il en résulte, même en période de crise, de nombreuses vacances d'emplois faute de qualifications disponibles. Aussi, afin d'offrir des formations adaptées aux besoins du marché du travail, il est souhaitable de conserver le principe d'une gestion paritaire des offres de formation. Afin d'amender le dispositif proposé par le projet de loi, les sénateurs pourraient s'inspirer de l'article 15 de l'Ani de janvier 2008 ;

- concernant la POE, elle doit intervenir avant l'entrée dans l'emploi. Un chef d'entreprise préfère en effet attendre trois mois pour recruter un salarié qui soit directement opérationnel. S'agissant de son financement, le concours de l'Opca ne doit pas être exclusivement financier mais aussi technique car ces organismes ont une bonne connaissance de l'entreprise dont il serait regrettable de se priver. A cet égard, la contribution de Pôle emploi dans le dispositif n'est pas suffisante ;

- le caractère annuel de la convention signée entre le FPSPP et l'Etat n'est pas forcément adapté au financement des formations en alternance ou des contrats de professionnalisation dont la durée dépasse le cadre d'une annuité. Le renouvellement annuel de cette convention-cadre sur la péréquation des financements fera inévitablement peser une incertitude sur la continuité des formations pluriannuelles. La définition des modalités de péréquation devrait sortir du champ de la convention-cadre afin que, en période de crise, le Fup aujourd'hui, le FPSPP demain, puissent jouer leur rôle d'amortisseur en développant les formations en alternance et les contrats de professionnalisation.

M. Jean-Pierre Therry, adjoint du secrétaire général adjoint chargé de la formation professionnelle continue de la CFTC, a souhaité rappeler en préambule que la grande réforme de la formation professionnelle de 2004 découle, en grande partie, de l'Ani signé par l'ensemble des partenaires sociaux en 2003. Il a également souligné le caractère unanime de l'accord signé le 7 janvier 2009 ainsi que tout le travail accompli par les partenaires sociaux depuis 2003 en faveur de l'amélioration du parcours professionnel des salariés.

Il a mis en évidence les principaux axes de l'accord :

- chaque salarié doit avoir la possibilité et les moyens de se former afin d'augmenter son niveau de qualification. En effet, on ne peut parler de sécurisation des parcours professionnels en l'absence d'outils et de moyens ;

- les salariés les plus fragiles et les demandeurs d'emploi doivent eux aussi avoir accès à la formation. Une réflexion importante a été initiée sur la nécessité de requalification des salariés les plus fragiles et des demandeurs d'emploi, en particulier avec la création de la POE.

Pour réorganiser les Opca, il est nécessaire d'être pragmatique et de privilégier l'adéquation aux besoins des salariés et des entreprises. En effet, une offre de formation adaptée permettra d'augmenter l'intérêt des salariés pour la formation. Un ou plusieurs stages devraient être proposés dans les cinq premières années d'activité pour familiariser les salariés avec les formations correspondant à leur secteur d'activité.

Enfin, M. Jean-Pierre Therry a regretté que les dispositions relatives à l'orientation concernent exclusivement les jeunes, estimant que tous les salariés doivent bénéficier au cours de leur carrière d'un accompagnement et d'une orientation dans le cadre de leur parcours professionnel.

Mme Annie Thomas, secrétaire nationale de la CFDT, s'est félicitée de l'approche globale retenue par le texte qui permet de favoriser l'accès à la formation de l'ensemble des salariés et demandeurs d'emploi. Il est utile que le texte contienne des dispositions relatives à la formation initiale, même si celle-ci relève au premier chef de l'Etat dont c'est une des fonctions régaliennes. A l'inverse, la formation professionnelle continue parce qu'elle participe au développement économique, à la gestion des ressources humaines, à la sécurisation des parcours professionnels, relève éminemment des partenaires sociaux et des entreprises. Afin que la loi soit opérationnelle, les nouvelles mesures doivent viser à favoriser l'accès des salariés à la formation mais aussi à faciliter la vie des chefs d'entreprise en répondant au mieux à leurs besoins et en étant au service de la modernisation du marché du travail et de la sécurisation des parcours professionnels.

La CFDT regrette l'absence d'un positionnement précis sur la formation initiale, en particulier pour les jeunes qui sortent sans qualification ni diplôme du système scolaire. Si les entreprises peuvent participer à la mise en oeuvre de solutions, l'Etat demeure le principal responsable. Les débats au sein du COE ont montré la nécessité de traiter au plus vite cette question. Le développement de l'apprentissage dans la fonction publique, à propos duquel Laurent Hénart a été chargé d'un rapport, constitue certainement une piste à explorer, à condition qu'il fonctionne de la même façon que dans le secteur privé.

S'agissant des dispositifs prévus pour les « jeunes décrocheurs », ils constituent l'amorce de la formation initiale différée puisqu'ils supposent un contact entre les jeunes et les acteurs présents sur le territoire - préfet, missions locales et collectivités territoriales - qui devront leur proposer des solutions.

Mme Annie Thomas s'est dite favorable à l'opposabilité du droit à l'orientation, estimant que la rédaction actuelle de l'article 3 du projet de loi - « toute personne engagée dans la vie active ou qui s'y engage » - exclut les jeunes décrocheurs, les étudiants ou les élèves scolarisés. Elle a mis en garde contre l'existence d'une barrière de plus en plus haute entre le système éducatif et le monde de l'entreprise et de la formation professionnelle. Pour éviter cet écueil, chaque jeune pourrait être doté d'un « passeport-formation-qualification » et chacun d'entre eux pourrait, à la sortie du système éducatif, disposer d'un relevé de compétences même lorsque celles-ci n'ont pas été attestées par un diplôme.

Pour traiter des questions sur l'orientation à l'échelle du territoire, une commission « orientation » pourrait être créée, au sein des CCREFP, mobilisant les dispositifs existants - maison de l'orientation, maisons de l'emploi notamment - tout en veillant à une évaluation régulière de leur efficacité. Les Fongecif pourraient être des entrées pour les salariés ainsi que Pôle emploi, qui, dès qu'il sera opérationnel dans ce domaine, devra développer sa mission d'orientation.

Mme Annie Thomas a émis des réserves sur le transfert rapide des conseillers d'orientation de l'Afpa à Pôle emploi, considérant que cette nouvelle institution et, de façon plus générale, le paysage institutionnel de la formation professionnelle et de l'orientation ne sont pas stabilisés. Une consultation aurait permis de faciliter la compréhension des salariés ainsi que des organisations syndicales de l'Afpa. L'absence de concertation explique certainement les réticences exprimées dans le cadre de la mise en place du droit opposable à l'orientation au sein de l'Afpa et de Pole emploi. La date de ce transfert et son principe même méritent d'être débattus. S'agissant de la mise en oeuvre du droit à l'orientation, la création d'une nouvelle organisation n'est pas utile, l'essentiel étant de parvenir à une meilleure coordination des dispositifs existants, notamment Centre Inffo.

S'agissant de la définition des plans régionaux de développement des formations (PRDF), la région constitue le niveau territorial le plus pertinent pour coordonner les actions dans ce domaine. Les conseils régionaux gardent leur vocation de chef de file dans le domaine de la formation professionnelle, dès lors qu'ils n'ont pas démérité au cours des dernières années. Toutefois, la co-contractualisation et les cofinancements demeurent les fondements des dispositifs régionaux de formation et l'expérience a montré que les partenaires sociaux ont su s'adapter à cette organisation.

En ce qui concerne la sécurisation des parcours professionnels, toutes les entreprises devront contribuer au FPSPP, y compris celles du secteur « hors champ » dans la mesure où il est souhaitable qu'aucune dérogation ou exemption ne soit accordée. La convention entre l'Etat et les partenaires sociaux devrait se traduire systématiquement par des cofinancements de l'Etat aux côtés des partenaires sociaux.

La restriction prévue par l'article 14 du projet de loi, qui interdit aux salariés des établissements de crédit ou des organismes de formation d'exercer des responsabilités au sein des Opca, posera des difficultés. Comment assurer une représentation des salariés au sein des Opca du secteur bancaire et des organismes de formation ? La même question se pose pour les salariés des groupements d'établissements publics locaux d'enseignement (Greta) et de l'Afpa.

Enfin, la présence de sept rapports du Gouvernement au Parlement dans le projet de loi suscite la perplexité dès lors qu'aucune consultation des partenaires sociaux et du CNFPTLV n'est prévue.

Mme Catherine Procaccia, présidente, a rappelé que la loi du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social, dont elle a été rapporteur pour le Sénat, donne toute sa place à la discussion entre les partenaires sociaux en amont du dépôt d'un projet de loi, tout en laissant aux députés et aux sénateurs la liberté d'utiliser pleinement leur droit d'amendement.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, s'est réjoui de la signature unanime de l'accord national interprofessionnel du 7 janvier 2009. Il a mis en avant quatre principes qui doivent structurer la réflexion sur l'organisation de la formation professionnelle : la prise en compte de la logique de l'entreprise, le respect des priorités définies par les branches professionnelles, le développement d'une vision transversale des métiers et des qualifications, enfin l'ancrage territorial. Il a souhaité que les organisations syndicales et patronales précisent la façon dont elles prennent en compte l'échelon local, aussi bien la région que le bassin d'emploi, dans leur organisation. Il s'est interrogé sur la place qu'il convient de donner aux organismes hors du champ de l'accord national interprofessionnel dans le projet de loi, et plus particulièrement dans la gouvernance du fonds de sécurisation des parcours professionnels.

En réponse, M. Stéphane Lardy, secrétaire confédéral à la formation professionnelle de Force ouvrière, a précisé que son syndicat n'est pas constitué en unions régionales. Il a estimé que ce n'est cependant pas un obstacle à la prise en compte des questions de formation professionnelle. La question centrale serait plutôt celle des moyens que les organisations peuvent engager pour permettre à leurs membres de s'approprier ces dispositifs très complexes. Quant aux organisations « hors champ », il est incontestable que la situation actuelle n'est pas satisfaisante, mais la question de la représentativité patronale ne peut être résolue que dans le cadre d'une négociation globale et non à l'occasion d'un projet de loi sur la formation professionnelle.

Mme Annie Thomas, secrétaire nationale de la CFDT, a précisé que la CFDT est organisée en unions régionales interprofessionnelle depuis les années soixante-dix. Les unions départementales subsistent mais sur les questions de formation professionnelle les unions régionales ont mandat pour négocier avec les acteurs de la région. Elle s'est ensuite interrogée sur les possibilités de faire parler d'une même voix en région les huit organisations représentatives au plan national, lorsqu'elles doivent dialoguer avec le préfet ou le président du conseil régional sur les questions de formation et d'emploi. De ce point de vue, l'expérience des commissions paritaires interprofessionnelles régionales de l'emploi (Copire) paraît très contrastée selon les régions, certaines fonctionnant harmonieusement, d'autres pas.

La question de la gouvernance du FPSPP renvoie nécessairement au problème de la représentativité des organisations patronales qui ne concerne pas seulement les négociations sur la formation professionnelle. Les modes d'organisations retenus par le secteur « hors champ » sont eux-mêmes très divers, l'agriculture étant, par exemple, depuis très longtemps pourvue de structures très fortes, que l'on ne retrouve pas dans le secteur de l'économie sociale.

M. Jean-François Pilliard, chef de la délégation patronale du Medef chargée de la négociation sur la formation professionnelle, a fait observer que l'accord national interprofessionnel du 7 janvier 2009 prévoit un renforcement du rôle et des pouvoirs des Copire afin de dynamiser le dialogue social régional. A cet égard, une réforme des CCREFP pour resserrer leur composition autour des représentants de l'Etat, des régions et des partenaires sociaux serait opportune. Le plan régional de développement des formations (PRDF) doit être co-construit entre ces trois acteurs essentiels de la formation professionnelle. En ce qui concerne le « hors champ », le conseil d'administration du FPSPP pourra prendre l'avis des organisations de ce secteur sur l'affectation des fonds. A plus long terme, il appartient aux organisations patronales de faire des propositions de réforme du régime de représentativité.

M. Jean-Pierre Therry, adjoint du secrétaire général adjoint chargé de la formation professionnelle continue de la CFTC, a souligné l'importance d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences au niveau local. Soucieuse de voir le dialogue social se dérouler le plus près possible du terrain, la CFTC a choisi de s'organiser dans chaque département. Enfin, la représentativité patronale devra être abordée au cours d'une prochaine négociation collective.

M. Pierre Burban, secrétaire général de l'UPA, a considéré qu'il ne fallait pas traiter la question de la représentativité patronale au détour d'un projet de loi sur la formation professionnelle. Il s'est également interrogé sur la définition même du secteur « hors champ » qui présente un caractère multiforme.

M. Paul Desaigues, conseiller confédéral de la CGT, a fait part du souci constant qui anime la CGT de rechercher une cohérence entre l'échelon national et l'échelon local. Pour permettre à la formation de répondre à la fois aux besoins des hommes, des entreprises, des territoires et de la Nation, il convient de dépasser les frontières administratives, de se concentrer sur le bassin d'emploi et de miser sur la coopération entre les acteurs.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a rappelé les trois maux dont souffre le système de formation professionnelle : complexité, corporatisme et cloisonnement. Souhaitant connaître l'avis des partenaires sociaux sur les moyens de faire davantage bénéficier les salariés des très petites entreprises de la formation professionnelle, il leur a ensuite demandé quelles sont leurs propositions pour faire face au problème du remplacement des salariés partis en formation, question que ne traite pas le projet de loi. A propos des dispositions du projet de loi concernant l'élargissement des missions des Opca à l'accompagnement et au conseil des entreprises, il s'est enquis de la position des intervenants sur la fixation du seuil minimal de collecte et sur la liberté du choix de l'Opca.

M. Paul Desaigues, conseiller confédéral de la CGT, a fait observer que le libre choix de l'Opca par l'entreprise suppose un accord sur la définition de l'entreprise, qui ne peut se réduire en tout état de cause à ses dirigeants en laissant de côté les salariés. A propos du développement de la formation dans les très petites entreprises, il a souligné que la sanctuarisation des fonds des entreprises de moins de dix salariés demeurera insuffisante tant que ne sera pas également préservée la capacité des salariés de ces entreprises à accéder à la formation.

M. Georges Tissié, directeur des affaires sociales de la CGPME, a jugé que l'échec du dispositif financier d'aide au remplacement des salariés en formation des petites entreprises, qui a conduit à sa suppression, s'explique pour partie par un défaut d'information des PME. C'est pourquoi tout nouveau dispositif en ce domaine devra, d'une part, être pérenne et lisible, d'autre part, faire l'objet d'actions de communication pour le faire connaître des PME. En outre, la mention du conseil aux entreprises pour les missions dévolues aux Opca constitue un des apports importants du projet de loi. Il faut prendre garde de ne pas bouleverser le système des Opca, qui jouent un rôle essentiel dans la mise en place des nouveaux dispositifs de formation.

Soulignant que le seul renforcement du rôle des Opca ne suffit pas à régler les problèmes spécifiques des très petites entreprises, Mme Annie Thomas, secrétaire nationale de la CFDT, a suggéré de permettre aux groupements d'employeurs de constituer des brigades volantes de remplacement, sur le modèle de ce qui existe, mutatis mutandis, dans le secteur public, à la Poste notamment. La CFDT est favorable au relèvement du seuil minimal de collecte des Opca pour rationaliser le paysage et l'organiser autour de quelques d'acteurs dotés d'une force de frappe financière suffisante. Néanmoins, l'agrément ne devra pas être accordé sur des critères uniquement financiers. La réorganisation des Opca devra viser des rapprochements entre acteurs d'une même famille professionnelle. C'est pourquoi la CFDT, attachée au respect du principe de la négociation par branches professionnelles, est défavorable à la liberté du choix de l'Opca.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a souhaité que les compétences des acteurs publics de la formation professionnelle ne soient plus séparées, mais partagées, faute de quoi l'efficacité globale du système de formation continue restera insatisfaisante. En ce qui concerne l'orientation, l'enjeu est de permettre à chacun de choisir sa voie en connaissance de cause, et de sortir du régime actuel dans lequel seuls « ceux qui savent et ceux qui ont » obtiennent les qualifications les plus porteuses. Il ne faut plus, en particulier, que les jeunes qui quittent le système scolaire après seize ans soient contraints d'attendre un an avant de pouvoir être pris en charge par une mission locale : l'année de carence ne doit plus être une année d'errance. Quelles sont les solutions à envisager pour répondre à ce problème ? Enfin, s'agissant du plan régional des formations (PRDF), la rédaction actuelle du projet de loi semble cumuler tous les inconvénients : comment peut-on l'améliorer ?

M. Jean François Pilliard, chef de la délégation patronale du Medef chargée de la négociation sur la formation professionnelle, a reconnu que si le système de formation continue français est sans doute l'un des plus performants au monde, le système d'orientation est certainement, en revanche, l'un des plus mauvais. Le principal problème est effectivement l'accès à l'information, notamment en raison de la dispersion des organismes chargés de la question et du manque de renseignements donnés aux adolescents à l'école par les enseignants, qui ne sont pas formés à cette tâche.

M. Jean-Pierre Therry, adjoint du secrétaire général adjoint chargé de la formation professionnelle continue de la CFTC, a indiqué que la CFTC propose, depuis plusieurs années, la mise en place d'un chèque formation dont le montant serait inversement proportionnel au niveau de la qualification, afin de donner une deuxième chance à ceux qui n'ont pas pu suffisamment profiter du système scolaire. Par ailleurs, il est évident que les partenaires sociaux doivent être associés à l'élaboration du PRDF, par exemple au sein du CCREFP.

M. Thierry Lepaon, secrétaire confédéral de la CGT, a insisté sur la nécessité d'ouvrir des passerelles entre les différentes filières, afin que le choix d'une orientation ne soit pas définitif.

Mme Gisèle Printz a souligné les difficultés que rencontrent certains jeunes à trouver un stage lorsqu'ils s'engagent sur la voie du baccalauréat professionnel. Par ailleurs, comment faciliter l'accès à l'emploi des personnes handicapées ? Enfin, les détenus bénéficient-ils d'un droit à la formation ?

Mme Christiane Demontès s'est interrogée sur l'opportunité d'introduire une durée minimum au-delà de laquelle tout stage de formation devrait faire l'objet d'une convention tripartite entre l'employeur, le salarié et l'organisme de formation. Elle a souhaité connaître l'avis des partenaires sociaux sur les dispositions du projet de loi relatives à la préparation opérationnelle à l'emploi (POE), qui semblent plus restrictives que celles prévues par l'Ani. Par ailleurs, la multiplication des organismes régionaux compétents en matière de formation professionnelle n'appelle-t-elle pas une simplification ? Enfin, il manque sans doute une dimension territoriale au FPSPP : les CCREFP pourraient-ils donc être sollicités pour avis sur l'utilisation des ressources du FPSPP au niveau régional ?

M. Claude Jeannerot s'est déclaré favorable à la proposition d'Annie Thomas de rendre opposable le droit à l'orientation. Cependant, sa mise en place requiert une meilleure coordination des organismes d'orientation, qui pourrait être confiée à la région. Concernant le transfert des psychologues du travail de l'association française pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) à Pôle emploi, deux justifications sont invoquées : d'une part, l'Afpa ne pourrait pas, au regard du droit de la concurrence, être juge et partie, c'est-à-dire prescrire des formations qu'elle offre elle-même ; d'autre part, son entrée sur le marché concurrentiel interdirait toute subvention publique nécessaire à la prise en charge de ces psychologues. Dans ces conditions, que peut-on attendre du moratoire demandé par les organisations syndicales de l'Afpa ?

M. Jean-Pierre Plancade a souhaité savoir si les partenaires sociaux considèrent ce projet de loi comme un progrès.

Mme Gisèle Gautier a rappelé que l'orientation est le fondement d'un parcours professionnel réussi. En ce sens, il est regrettable que le corps enseignant soit insuffisamment formé à l'orientation et que les conseillers d'orientation psychologues, auxquels échoit cette mission, connaissent en réalité très mal les métiers existants. Comment améliorer les relations entre le monde de l'éducation et le monde économique ? S'agissant des Opca, il est indispensable de poser des règles qui rendent leur gestion transparente.

Mme Annie David a jugé qu'une POE ne doit pas déboucher sur un contrat de professionnalisation, car les deux dispositifs ont la même fonction, qui est de former un jeune ou un demandeur d'emploi pour lui permettre d'obtenir une qualification ou un emploi particuliers. Par ailleurs, pourquoi les partenaires sociaux n'ont-ils pas souhaité donner aux salariés à temps partiel les mêmes droits à la formation qu'à ceux qui travaillent à temps plein ? Enfin, pour que les salariés puissent exercer leur Dif, ne faut-il pas le rendre opposable ?

M. Daniel Dubois a souhaité connaître l'instance nationale qui pourrait être chargée de mener une réflexion sur l'évolution des métiers, à partir de laquelle les grandes orientations de la formation professionnelle seraient définies.

M. Jean-Michel Pottier, président de la commission formation-éducation de la CGPME, a considéré que le projet de loi comporte des avancées importantes, comme la portabilité du Dif ou la mobilisation de ressources du FPSPP en faveur des demandeurs d'emploi.

M. Stéphane Lardy, secrétaire confédéral à la formation professionnelle de Force ouvrière, a estimé que le texte constitue une première étape d'une évolution inéluctable du droit à la formation, qui sera de plus en plus rattaché à la personne elle-même, et non plus au statut professionnel. La portabilité du Dif en est le témoignage le plus visible. Il est vrai, par ailleurs, que la prolifération des instances régionales compétentes en matière de formation professionnelle est source de confusion : le comité régional de l'emploi pourrait donc être utilement supprimé. Enfin, parmi les sujets sur lesquels les partenaires sociaux et les pouvoirs publics devront se pencher dans les prochains mois, figurent effectivement la formation des salariés à temps partiel ainsi que l'articulation entre formation et rémunération.

M. Pierre Burban, secrétaire général de l'UPA, a rappelé que les petites entreprises ont toujours besoin d'un certain délai pour s'approprier les nouveaux dispositifs créés par le législateur. C'est justement ce qui justifie la logique de branche qui structure la formation professionnelle : elle permet aux Opca de s'acquitter correctement de leur mission d'accompagnement.

Mme Annie Thomas, secrétaire nationale de la CFDT, a jugé que le texte ne règle ni le problème de la gouvernance territoriale de la formation ni celui de l'articulation entre formation professionnelle et formation initiale. Elle s'est déclarée favorable à la suppression du comité régional de l'emploi et à la coordination des organismes d'orientation par le conseil régional qui se verrait reconnaître une fonction de pilotage dans ce domaine. Il serait par ailleurs très utile que les CCREFP donnent un avis sur l'utilisation régionale des ressources du FPSPP.

M. Jean-Pierre Therry, adjoint du secrétaire général adjoint chargé de la formation professionnelle continue de la CFTC, a indiqué que les détenus bénéficient de formations dispensées par l'Afpa. Il a regretté que le texte n'implique pas davantage le conseil paritaire national d'évaluation de la formation professionnelle dans l'élaboration de critères de transparence pour la gestion des Opca. Il a enfin souhaité que le législateur suive avec attention l'application du projet de loi.

M. Jean-François Pilliard, chef de la délégation patronale chargée de la négociation sur la formation professionnelle du Medef, a estimé que la réflexion sur les métiers de demain peut être prise en charge par les branches professionnelles et les régions. S'agissant de l'Afpa, la crise économique actuelle plaide pour un report du transfert de ses psychologues, car le moment est mal choisi pour prendre le risque de déstabiliser la structure qui est la plus à même de répondre à la demande de formation des personnes les moins qualifiées.

M. Francis Da Costa, président de la commission formation du Medef, a rappelé que les personnes handicapées ont les mêmes droits que les autres en matière de formation professionnelle. L'Agefiph leur apporte en outre une aide complémentaire. Il est logique que la POE puisse conduire à un contrat de professionnalisation, car certaines personnes ont besoin d'une formation avant même de pouvoir postuler auprès d'une entreprise pour signer un tel contrat. Par ailleurs, la durée minimum d'un stage de formation nécessitant la signature d'une convention tripartite devrait être d'au moins quarante heures, soit la durée moyenne d'un stage de formation en France. Enfin, les Opca devraient être les relais territoriaux naturels du FPSPP.

M. Paul Desaigues, conseiller confédéral de la CGT, a souligné la nécessité de développer les formations longues pour les personnes handicapées. Il a jugé fallacieuse la position du Gouvernement sur le dossier de l'Afpa et estimé que celui-ci se réfugie derrière le droit de la concurrence pour justifier le transfert des psychologues, alors que la définition de la notion de service public, exercice auquel le Gouvernement se refuse, permettrait de l'éviter.

- Présidence de Mme Catherine Procaccia, présidente, puis de Mme Annie David, vice-présidente -

Audition de M. Laurent Hénart, député, chargé d'une mission temporaire sur le développement de l'apprentissage dans la fonction publique auprès du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, du secrétaire d'Etat chargé de l'emploi et du haut commissaire à la jeunesse

Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission spéciale a procédé à l'audition de M. Laurent Hénart, chargé d'une mission temporaire sur le développement de l'apprentissage dans la fonction publique auprès du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, du secrétaire d'Etat chargé de l'emploi et du haut commissaire à la jeunesse, sur le projet de loi n° 578 (2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie.

M. Laurent Hénart, député, a tout d'abord rappelé avoir été missionné au mois de juin par le Premier ministre pour réfléchir au développement de la formation en alternance dans le secteur public. Le rapport, qui doit être remis officiellement dans les prochains jours, couvre un périmètre bien précis : les trois fonctions publiques, les établissements publics administratifs et le monde associatif, en tant que partenaire occasionnel des collectivités locales en matière d'apprentissage.

Depuis quelques années, les pouvoirs publics ont souhaité apporter un nouveau souffle à la formation en alternance, notamment par la voie de l'apprentissage, qui constitue un mode efficace et reconnu d'insertion des jeunes dans la vie active. Ainsi, le plan de cohésion sociale de 2005, qui fixe un objectif de 500 000 apprentis à l'horizon 2010, a permis d'insuffler un réel dynamisme à l'apprentissage au sein du secteur privé. Le flux de signature de contrats d'apprentissage s'élevant à 285 000 en 2008, la cible des 500 000 apprentis en stock semble d'ores et déjà atteinte.

Cette situation contraste avec celle observée dans le secteur public. Certes, l'apprentissage dans les trois fonctions publiques a connu un essor important (+ 52 % entre 2004 et 2007), mais il reste encore trop modeste en volume, puisque seules 6 000 nouvelles entrées ont été enregistrées en 2007 selon la Cour des comptes. Le secteur public est donc loin d'être imprégné de la culture de l'alternance comme peut l'être le secteur privé. Ce constat est toutefois à relativiser dans la mesure où les entreprises publiques se sont montrées particulièrement actives dans la poursuite des objectifs du plan de cohésion sociale en matière d'apprentissage.

Puis, M. Laurent Hénart, député, a précisé que deux outils sont actuellement au service du développement de l'alternance et ont été étudiés dans le rapport qu'il a établi. Le contrat d'apprentissage, tout d'abord, qui s'adresse aux jeunes de seize à vingt-cinq ans. Celui-ci leur permet, à la suite de la formation prévue, d'obtenir une qualification professionnelle sanctionnée par un diplôme de l'enseignement professionnel ou technologique, un titre d'ingénieur ou un titre répertorié. Le parcours d'accès aux carrières territoriales et de l'Etat (Pacte), ensuite, qui offre la possibilité d'intégrer la fonction publique en qualité de fonctionnaire titulaire à l'issue d'une vérification d'aptitude. Le contrat Pacte est assorti d'une obligation de service dans l'administration de recrutement pendant une durée deux fois supérieure à celle du contrat lui-même. Ce mode de recrutement de droit public, ouvert à des corps et cadres d'emplois de catégorie C, est accessible à tout jeune de seize à vingt-cinq ans n'ayant pas obtenu le baccalauréat. A l'inverse du contrat d'apprentissage qui est surtout le fait des collectivités locales, le contrat Pacte est principalement utilisé par la fonction publique d'Etat. Actuellement, le flux de contrats Pacte est de l'ordre de 700 par an, soit au total actuellement 2 100 bénéficiaires. Le taux d'intégration dans la fonction publique en tant que titulaire atteint, quant à lui, les 90 %.

Après cette présentation générale, M. Laurent Hénart, député, a insisté sur l'importance d'une participation pleine et entière des trois fonctions publiques à l'engagement collectif en faveur du développement de l'apprentissage. Alors que le monde de l'entreprise est appelé à accroître ses efforts en matière de formation en alternance sous peine de pénalités, il serait pour le moins incohérent que le secteur public ne suive pas la même voie. Dès lors, deux objectifs doivent être poursuivis.

Le premier consiste à mettre en place, au sein des trois fonctions publiques, une véritable filière de recrutement via la formation en alternance. Si le contrat d'apprentissage ne débouche pas automatiquement sur un emploi dans la fonction publique, le contrat Pacte, quant à lui, permet au bénéficiaire de se voir proposer un emploi de titulaire. C'est pourquoi il convient de développer cet outil, d'une part, en allongeant la durée du contrat (actuellement limitée à deux ans au maximum) et en augmentant le temps consacré à la formation, d'autre part, en le rendant accessible à des jeunes ayant le baccalauréat ainsi qu'en l'ouvrant à des corps et des cadres d'emplois de catégorie B.

Le second objectif est de donner les moyens au secteur public d'exercer, comme le secteur privé, une mission d'accueil des jeunes en formation. La diversité des métiers de la fonction publique offre en effet aux jeunes la possibilité de s'engager dans une formation qualifiante qui pourra ensuite être valorisée dans le secteur privé. L'embauche de jeunes apprentis dans le secteur public passe donc par un accès plus facile de l'employeur public au contrat d'apprentissage. Or, M. Laurent Hénart, député, a relevé trois séries d'obstacles à la réalisation de cet objectif.

Tout d'abord, la fonction publique est, depuis la loi du 17 juillet 1992, soumise à une réglementation dérogatoire en matière d'apprentissage. L'obtention du titre de maître d'apprentissage, par exemple, obéit à une procédure spécifique qui nécessite un agrément préfectoral. De même, les modalités de conclusion du contrat d'apprentissage sont différentes de celles observées dans le privé. L'enchevêtrement des mesures dérogatoires issues de la loi de 1992 a fini par créer des zones d'ombre, qui sont autant de facteurs d'inertie défavorables au développement de l'alternance dans le secteur public. Afin de lever ces freins réglementaires, le rapport préconise l'harmonisation des règles relatives à l'apprentissage dans la fonction publique avec celles actuellement en vigueur dans le secteur privé.

Le recours à l'apprentissage dans le secteur public se heurte ensuite à des difficultés d'ordre financier. Dans le secteur privé, la prise en charge du coût de formation est mutualisée via la taxe d'apprentissage acquittée par les entreprises. Les produits de cette taxe sont ensuite affectés directement ou indirectement aux centres de formation d'apprentis (CFA). Un tel financement n'existe pas dans la fonction publique puisque les collectivités publiques ne sont pas redevables de la taxe d'apprentissage. Le rapport propose donc que, sur une période de cinq ans, le coût de formation des apprentis accueillis par des employeurs publics soit pris en charge par une réorientation des surcroîts de produits de la taxe d'apprentissage. Sur ce sujet sensible, M. Laurent Hénart, député, a précisé que les jeunes recrutés en apprentissage dans l'administration seront formés dans les centres de formation de droit commun. Il n'est en effet pas question de créer des centres propres à la fonction publique, le but étant de réunir des apprentis d'une même filière, qu'ils aient signé un contrat avec un employeur privé ou avec un employeur public.

Le troisième obstacle, enfin, est propre aux petites collectivités locales. N'ayant, dans la plupart des cas, ni direction des ressources humaines ni direction juridique et financière, celles-ci se trouvent démunies face aux demandes de recrutement en apprentissage qui leur sont fréquemment adressées. C'est pourquoi, le rapport prévoit la mise en oeuvre d'un programme spécifique pour les petites communes (moins de vingt agents communaux) afin qu'elles soient aidées dans leur démarche d'embauche de jeunes apprentis. Elles pourront notamment s'appuyer sur les centres de gestion de la fonction publique territoriale.

M. Laurent Hénart, député, a conclu son propos en indiquant qu'une telle réforme de l'apprentissage dans la fonction publique nécessite de prendre le temps de la concertation avec les différents acteurs concernés. Des négociations doivent être menées entre l'Etat et les régions ; des accords méritent d'être passés avec le centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), les centres de gestion de la fonction publique territoriale, ainsi qu'avec l'association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier (ANFH) ; des partenariats sont susceptibles d'être noués avec certaines branches professionnelles (bâtiment, hôtellerie). Compte tenu de ces contraintes, le rapport propose une démarche en deux temps. D'abord, la prise - par voie réglementaire - de mesures urgentes et immédiates, s'inscrivant dans la continuité du plan pour l'emploi des jeunes présenté au début de l'été par le haut commissaire à la jeunesse, M. Martin Hirsch, et portant sur les exercices 2009 et 2010. Puis, la négociation de mesures conventionnelles, notamment les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens en matière d'apprentissage passés entre l'Etat et les régions, qui arrivent à échéance à la fin 2009. La mobilisation en faveur de l'apprentissage dans la fonction publique nécessite finalement peu de modifications législatives, l'essentiel des mesures à prendre étant d'ordre réglementaire ou conventionnel.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, après avoir félicité M. Laurent Hénart pour le travail accompli dans le cadre de sa mission, a formulé quatre interrogations. Tout d'abord, certaines avancées en matière d'apprentissage dans la fonction publique peuvent-elles être inscrites dans le projet de loi relatif à la réforme de la formation professionnelle ? Faisant ensuite remarquer que l'un des freins au développement de l'apprentissage dans le secteur public tient à la complexité administrative (par exemple, l'agrément préfectoral), le rapporteur s'est demandé comment simplifier les démarches administratives des employeurs publics. S'agissant de la question du financement de la formation délivrée aux jeunes apprentis, est-il envisageable que les collectivités publiques s'acquittent du paiement de la taxe d'apprentissage ? Enfin, sachant qu'il n'existe pas de certificats de qualification professionnelle (CQP) dans le secteur public, faut-il en créer ? D'un côté, il est vrai que la fonction publique comptabilise déjà de très nombreux dispositifs de certification comme la validation des acquis de l'expérience (VAE). De l'autre, force est de constater que les jeunes apprentis ont aussi besoin d'une reconnaissance de la qualification professionnelle acquise dans l'administration.

En réponse à l'interrogation du rapporteur sur la lourdeur des démarches administratives, M. Laurent Hénart, député, a indiqué être personnellement favorable à la suppression de l'agrément préfectoral actuellement nécessaire pour obtenir le titre de maître d'apprentissage.

A propos du financement de l'apprentissage dans la fonction publique, il a souligné que le rapport propose un montage financier qui ne fait pas appel à une cotisation nouvelle. Etant donné la situation financière déjà critique de certaines collectivités locales ou de certains hôpitaux, il ne serait pas raisonnable de les obliger à s'acquitter de cette imposition. En outre, créer une taxe supplémentaire pour les employeurs publics aurait un effet contre-productif en les décourageant d'embaucher des jeunes en apprentissage. C'est pourquoi, le coût de formation des apprentis dans le secteur public doit être, à court terme, entièrement pris en charge. Il est donc souhaitable de s'appuyer sur la taxe d'apprentissage qui existe déjà et constitue une recette très dynamique puisqu'elle augmente de 4 % quand la croissance progresse de 1 %. Cela n'exclut pas d'envisager, à moyen terme, une participation financière progressive des collectivités publiques.

En ce qui concerne la certification professionnelle, il faut rappeler que le contrat d'apprentissage, dans le privé comme dans le public, a pour but de préparer à un diplôme ou à un titre inscrit au répertoire. La logique du contrat Pacte est, elle, différente puisqu'il s'agit d'aboutir à une éventuelle titularisation du bénéficiaire. Toutefois, M. Laurent Hénart, député, s'est déclaré favorable à ce que le contrat Pacte puisse aussi permettre la préparation d'un diplôme ou d'un titre référencé au répertoire. De surcroît, si l'on veut davantage de diversité au sein de la fonction publique, il est souhaitable que le contrat Pacte soit ouvert à des corps ou des cadres d'emploi de catégorie B.

Quant aux dispositions susceptibles d'être intégrées dans le projet de loi relatif à la formation professionnelle, elles sont de deux natures. Les premières portent sur le contrat d'apprentissage et concernent l'harmonisation des règles entre le secteur public et le secteur privé. Les secondes ont trait au contrat Pacte et à ses aménagements (durée du contrat, ouverture à d'autres publics, temps de formation).

Mme Patricia Schillinger s'est déclarée favorable à une harmonisation des règles en matière d'apprentissage entre le public et le privé. En outre, elle a insisté sur le fait que les petites communes sont très souvent sollicitées par de jeunes apprentis, mais qu'elles n'ont pas toujours les moyens matériels et humains de répondre favorablement à leurs demandes.

Mme Maryvonne Blondin a souligné que le financement de l'apprentissage constitue un véritable problème pour les collectivités locales. Ayant été en charge du personnel au sein du conseil général du Finistère, elle a pu observer que la formation des apprentis est très onéreuse. Ainsi, une collectivité doit débourser 12 000 euros par an pour un éducateur spécialisé. Il conviendrait, en outre, de réfléchir à un mécanisme de rémunération ou de gratification des maîtres d'apprentissage afin de renforcer l'attractivité de leur fonction. Ne peut-on pas également envisager de recruter des travailleurs seniors sur la base du volontariat pour former de jeunes apprentis ? Par ailleurs, elle a déploré que l'éducation nationale ne donne pas l'exemple en matière de formation professionnelle. Ainsi, les employés de vie scolaire ne reçoivent le plus souvent aucune formation pendant la durée de leur contrat. Dans le secteur médico-social aussi, la formation des personnels est pour le moins défaillante. Enfin, cette mobilisation en faveur de l'apprentissage dans le secteur public semble en contradiction avec la politique du Gouvernement visant à diminuer le nombre de fonctionnaires.

Mme Christiane Demontès a indiqué qu'une collectivité locale, qui signe un contrat d'apprentissage, n'est pas tenue de recruter l'apprenti à l'issue de son contrat. L'employeur public est potentiellement, mais non obligatoirement, un recruteur. Si le recrutement était automatique, aucune collectivité ne prendrait de jeunes en apprentissage ! Par ailleurs, la proposition du rapport tendant à harmoniser les règles entre le public et le privé en matière d'apprentissage est pertinente. Il faut, en effet, que le droit commun s'applique à la fonction publique. En revanche, on ne peut pas demander aux collectivités locales, déjà très sollicitées, de payer le coût de formation des apprentis. S'agissant de l'articulation entre le rapport et le projet de loi, elle a suggéré d'insérer certaines dispositions dans le titre IV relatif au contrat d'apprentissage et dans le titre IV bis relatif à l'emploi des jeunes.

Mme Gisèle Printz a souhaité obtenir des précisions sur l'éventuelle insertion de recommandations du rapport dans le projet de loi. Elle s'est en outre inquiétée du coût du développement de l'apprentissage au sein de la fonction publique. N'y a-t-il pas un risque que le recours à l'apprentissage soit suspendu au bon vouloir des collectivités locales ? S'agissant plus particulièrement de l'Alsace-Moselle, elle a demandé si les règles en matière de taxe d'apprentissage sont les mêmes que dans l'ensemble du pays.

Mme Annie David s'est, certes, déclarée favorable à une montée en charge de l'apprentissage aussi bien dans le privé que dans le public, mais a dit craindre que cette politique n'aboutisse à une désincitation à l'embauche. Autrement dit, les employeurs pourraient être incités à prendre des jeunes en apprentissage au lieu de les recruter directement. Il faut donc apporter des garanties aux jeunes quant à leurs chances d'intégrer de manière durable une entreprise ou une administration afin de leur assurer une véritable insertion dans la vie active.

En réponse aux commissaires, M. Laurent Hénart, député, a rappelé que la question du manque de moyens des petites collectivités est abordée dans le rapport, puisque celui-ci envisage la mise en place d'un programme spécifique à leur intention. Elles pourront notamment prendre appui sur les centres de gestion de la fonction publique territoriale.

A propos de l'intéressement des maîtres d'apprentissage, il a indiqué que deux voies sont possibles. La première serait de leur attribuer une prime, ce qui nécessite une intervention du législateur, toute prime dans la fonction publique devant avoir un fondement légal. Cette solution pourrait cependant poser plusieurs difficultés dans la fonction publique hospitalière. La seconde voie serait d'utiliser des dispositifs déjà existants comme la nouvelle bonification indiciaire (NBI) dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière, ou l'attribution d'heures supplémentaires dans la fonction publique d'Etat. Le recrutement de travailleurs seniors est également une idée à exploiter car il permettrait de renforcer la solidarité intergénérationnelle.

En ce qui concerne les employés de vie scolaire qui n'ont reçu aucune formation, M. Laurent Hénart, député, a reconnu que l'Etat est loin d'être un bon formateur. Cependant, il peut être remédié à cette lacune en facilitant l'accès de l'employeur public au contrat d'apprentissage, ce que recommande d'ailleurs le rapport.

Sur la baisse du nombre de fonctionnaires, il a rappelé que celle-ci ne concerne que la fonction publique d'Etat. En aucune façon, le non-renouvellement d'un fonctionnaire sur deux ne viendra affecter le développement de l'apprentissage. Ainsi, le rapport prévoit, pour les cinq prochaines années, un objectif de 20 000 à 25 000 recrutements en alternance par an au sein de la fonction publique (soit via le contrat d'apprentissage, soit via le contrat Pacte).

A son tour, il a redit que le contrat d'apprentissage ne débouche pas nécessairement sur une embauche. Afin d'éviter les confusions, il faut qu'un effort de communication soit réalisé auprès des acteurs concernés.

S'agissant de la possible intégration de mesures relatives à la fonction publique dans le projet de loi, celles-ci pourraient opportunément s'insérer dans le titre consacré à l'apprentissage, pour le contrat d'apprentissage, et dans le titre portant sur l'emploi des jeunes, pour le contrat Pacte.

Par ailleurs, M. Laurent Hénart, député, a précisé que l'Alsace et la Moselle sont soumises aux règles de droit commun en matière de taxe professionnelle.

En réponse aux nombreuses interrogations des commissaires sur le coût de l'alternance dans le secteur public, il a tenu à distinguer le contrat Pacte du contrat d'apprentissage. Le premier ne nécessite aucune subvention particulière de la part de l'employeur car il s'agit en quelque sorte d'une anticipation sur le recrutement de l'apprenti. Le second, en revanche, appelle un mécanisme de prise en charge du coût de formation via une évolution de la clef de répartition de la taxe d'apprentissage.

Enfin, M. Laurent Hénart, député, a fait observer que le développement de l'apprentissage dans la fonction publique n'exempte pas d'une réflexion approfondie sur l'après-apprentissage, notamment sur la situation des jeunes sur le marché du travail.