Mardi 14 décembre 2010

- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président -

Projet de décret relatif aux installations classées - Communication

La commission entend la communication de M. Gérard César sur le projet de décret relatif aux installations classées.

M. Gérard César, rapporteur. - Le Premier ministre a transmis aux commissions compétentes des deux assemblées parlementaires le projet de décret sur l'allègement des procédures applicables en cas de regroupement ou de modernisation d'installations classées dans le domaine de l'élevage.

La procédure est originale : nous sommes associés au processus d'élaboration d'un décret d'application de la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche. Dans le respect de la séparation des pouvoirs, nous ne serons pas appelés à voter sur ce projet de décret, simplement à formuler des observations. Le compte rendu de nos travaux sera transmis au Gouvernement, à qui il appartiendra d'en tirer les conséquences.

Le régime des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) concerne de très nombreuses activités, industrielles ou agricoles. Il vise à éviter le développement anarchique d'installations pouvant avoir un impact important sur l'environnement immédiat et sur le milieu naturel, en les soumettant au contrôle de l'administration et les subordonnant à une procédure de déclaration ou d'autorisation. On compte environ 18 000 installations classées dans le domaine agricole, essentiellement dans l'élevage ; 40 % des installations classées relèvent du secteur agricole.

Il existe trois types de procédure. La déclaration de l'activité suffit pour les petits élevages, qui se situent en dessous de seuils fixés par voie réglementaire. L'autorisation, procédure plus lourde comprenant une étude d'impact et une enquête publique, est requise pour les élevages à partir d'un certain seuil. Enfin, la procédure intermédiaire, dite d'enregistrement, a été créée par le Grenelle de l'environnement, mais elle ne s'applique pas aux élevages.

Les seuils d'entrée dans le régime d'autorisation sont fixés à des niveaux relativement bas en France, plus faibles que les seuils européens dits IPPC fixés par la directive de 2008 sur la prévention et la réduction intégrées de la pollution. Concernant les porcs, le seuil français est fixé à 450 places, une truie comptant pour trois places, contre un seuil européen de 750 animaux pour les truies et 2 000 pour les porcs. Compte tenu des différences dans le mode de calcul des seuils, ce niveau de 2 000 semble correspondre à 2 500 à 2 800 places dans la nomenclature française.

Concernant les volailles, le seuil français d'autorisation est situé à 30 000 places, contre 40 000 têtes au niveau européen. Quant aux bovins, les élevages doivent être déclarés à partir de 400 places pour la production de viande et 100 places pour les élevages laitiers, alors qu'il n'existe pas de seuil européen IPPC.

Lors de la discussion de la loi de modernisation, les députés, à l'initiative de M. Marc Le Fur, avaient souhaité relever substantiellement les seuils d'entrée dans le régime d'autorisation, pour les aligner sur la directive européenne. Un compromis avait été trouvé et l'article 28 prévoit simplement qu'un décret, pris avant le 31 décembre 2010, devra simplifier les procédures applicables aux regroupements et modernisations d'exploitation.

En effet, aujourd'hui, tout transfert ou toute modification substantielle - augmentation des effectifs ou encore changement des conditions d'exploitation - doit faire l'objet d'une nouvelle autorisation. Or la procédure d'autorisation est très lourde ; l'instruction des dossiers dure entre seize et dix-huit mois - contre six à dix mois en Allemagne. Le coût d'une enquête publique s'élèverait à 12 000 euros environ. Un allègement est d'autant plus justifié que le regroupement et la modernisation d'élevages peuvent avoir des effets bénéfiques sur l'environnement - par une meilleure gestion des cheptels sur le territoire, par exemple. Une nouvelle procédure avec étude d'impact et enquête publique apparaît dans ce cas tout à fait excessive.

Le décret instaure une exception pour les regroupements et la modernisation d'élevages, à condition qu'ils n'induisent pas d'atteintes notables à l'environnement et ne provoquent pas une augmentation globale de capacité. Ce texte va bien dans le sens prévu par l'article 28 de la loi, mais il est assez restrictif.

Tout d'abord, il prévoit une procédure spéciale pour l'accueil sur une installation classée soumise à autorisation d'animaux provenant d'une ou plusieurs autres exploitations. Ce régime simplifié consiste non pas en une nouvelle autorisation, comme c'est le cas aujourd'hui, mais en une déclaration de l'exploitant, mentionnant notamment les évolutions des effectifs sur les sites concernés et précisant les mesures prévues pour maîtriser les impacts, nuisances, pollutions et dangers. Il s'applique lorsque six conditions sont réunies : le regroupement ne concerne que des animaux d'une même rubrique ; il n'entraîne pas de dangers ni inconvénients en matière de qualité des eaux et de protection de l'environnement ; il ne provoque pas d'augmentation globale des effectifs - avec une marge de tolérance de 5 % ; il se traduit au plus par un doublement des effectifs sur le site de regroupement ; pour les élevages porcins, bovins et de volailles, l'augmentation de l'effectif global après regroupement n'excède pas deux fois le seuil national d'autorisation ; le regroupement n'entraîne pas de dépassement du seuil communautaire d'autorisation.

Le projet de décret prévoit aussi une procédure simplifiée lorsque le regroupement concerne une installation plus petite, soumise à déclaration. Lorsque le regroupement provoque un franchissement des seuils d'autorisation, une demande d'autorisation est exigée, légèrement simplifiée par rapport au droit actuel avec étude d'impact allégée et consultation du public et non enquête publique. Les conditions pour bénéficier de cette procédure allégée sont les mêmes que celles qui tendent à exonérer les regroupements de nouvelle autorisation.

Enfin, le projet de décret dispense de nouvelle déclaration les opérations de modernisation qui n'entraînent ni augmentation de capacité, ni dangers ou inconvénients pour l'eau ou l'environnement. Ces opérations recouvrent les mises aux normes, l'amélioration des conditions de travail des salariés mais aussi toute « démarche reconnue positive par les pouvoirs publics », notion qui manque certes de précision juridique, mais permettra, souhaitons-le, dans une interprétation large, d'exonérer de nouvelle autorisation certains investissements de productivité dans les élevages. Concernant les secteurs d'amélioration des conditions de travail, elles devraient concerner tous ceux qui travaillent sur l'exploitation, les salariés mais aussi l'exploitant. Le b. de l'article R. 515-54 pourrait être ainsi rédigé : « ou permettant une amélioration des conditions de travail sur l'exploitation ».

La procédure simplifiée d'autorisation applicable aux regroupements d'installations sous régime de déclaration, en cas de franchissement de seuil, paraît logique et satisfaisante.

En revanche pour le nouveau régime de déclaration des regroupements touchant des exploitations qui ont reçu une autorisation, il faut concilier l'objectif de protection de l'environnement et celui de compétitivité. La France s'est imposée des contraintes fortes en adoptant des seuils très inférieurs aux seuils européens, en particulier pour les élevages porcins. Ouvrir totalement les vannes n'est pas raisonnable - voyez les problèmes qu'a connus la Bretagne avec les algues vertes. Ne commettons plus les erreurs du passé. Le projet de décret pose deux garde-fous essentiels : le regroupement ne doit pas porter atteinte à l'environnement ou à la qualité des eaux ; il doit demeurer modeste, les capacités globales ne devant pas augmenter de plus de 5 %, l'effectif du site de regroupement devant au maximum doubler.

Les critères additionnels nous semblent cependant bien restrictifs ! L'exigence de non-dépassement du seuil d'autorisation communautaire est difficilement contournable, même si, en pratique, cette restriction ôte une bonne partie de son intérêt aux opérations de regroupement, par exemple dans le secteur des volailles où seuil national et seuil européen sont proches. La limitation de l'augmentation de l'effectif à deux fois le seuil national d'autorisation paraît excessive pour les élevages porcins, car les seuils nationaux sont très bas. Les producteurs de porc soulignent que la taille moyenne d'un élevage en France est aujourd'hui de l'ordre de 165 truies. Un naisseur-engraisseur dispose donc en principe de 1 400 à 1 500 places. Comme l'augmentation de l'effectif sur le site de regroupement est limitée à deux fois le seuil d'autorisation, soit 900 places, seuls de petits regroupements pourront être effectués. Dès lors, l'intérêt de ce dispositif devient très limité.

Nous pourrions suggérer d'assouplir le dispositif pour permettre des regroupements plus importants, mais encore dans les limites du raisonnable, conduisant à une augmentation des effectifs sur le site de regroupement au-delà de deux fois le seuil d'autorisation ; de sécuriser juridiquement les opérations de regroupement par un arrêté préfectoral constatant la déclaration de regroupement des éleveurs, pour clarifier les possibilités de recours des tiers ; d'étendre le régime aux lapins, qui sont bizarrement exclus du projet de décret ; de prévoir l'intervention du ministre de l'Agriculture dans la mise en oeuvre du décret. Le projet de décret est signé par le seul ministre de l'Environnement. Or, c'est le ministre de l'Agriculture qui a défendu la loi de modernisation de l'agriculture.

Sous réserve des assouplissements suggérés, ce projet de décret va dans le sens de l'article 28 de la loi de modernisation de l'agriculture. Cette faculté de regroupement et de modernisation des élevages sans nouvelle autorisation préfectorale sera-t-elle suffisante pour régler les difficultés des éleveurs, en particulier porcins ? Certainement pas. Car la concurrence intra-communautaire fait rage et cela continuera ! Il est évident que les durées d'instruction des dossiers sont trop longues. Il y a là un frein à la modernisation des élevages, un handicap pour notre compétitivité. Une action énergique devrait être menée pour accélérer les procédures, qui souvent découragent les meilleures volontés. La loi de modernisation a fait un premier pas dans ce sens.

Le projet de décret n'est pas un aboutissement mais le commencement d'un processus qui doit conduire à une harmonisation des normes européennes, afin que les éleveurs ne subissent pas une concurrence déloyale. L'harmonisation des seuils d'autorisation pour les élevages devra être recherchée, pour alléger les charges administratives et réglementaires qui pèsent sur nos agriculteurs. Ceci suppose à terme un relèvement des seuils nationaux d'entrée dans le régime d'autorisation des installations classées d'élevage.

M. Jean-Paul Emorine, président. - Vous vous souvenez certainement tous du débat sur l'article 28. L'amendement de M. Le Fur convenait à l'ensemble de notre commission et le Sénat y a souscrit.

M. Yannick Botrel. - Quelle complexité ! Le rapporteur lui-même le reconnaît. La communication du décret a été tardive : hier soir seulement. Or les incidences ne sont pas immédiatement perceptibles. Nous avons infiniment peu de temps d'ici le 31 décembre pour étudier ce texte, je le déplore.

Je veux vous livrer quelques réflexions sur des situations auxquelles le projet de décret va s'appliquer. La Bretagne compte une forte production porcine, mais localisée ; elle n'est pas répartie sur l'ensemble du territoire mais concentrée dans des bassins de production. Des difficultés en termes de protection de l'environnement demeurent, même si beaucoup d'efforts ont été accomplis. Le conseil général des Côtes d'Armor retrace régulièrement, dans un bulletin public, l'évolution de la qualité des eaux : on observe une corrélation évidente entre l'intensité de la production porcine et la qualité des eaux. Les deux bassins versants sur lesquels les captages d'eau ont été fermés correspondent exclusivement à des zones d'élevage porcin, car les élevages bovins maîtrisent à peu près les déjections animales.

L'aspect environnemental n'est pas totalement oublié dans le décret : la qualité des eaux est mentionnée. Mais comment déterminera-t-on les zones sensibles ? S'agira-t-il des zones d'excédent structurel, dont le recensement est obsolète, ou des bassins versants en contentieux ? Ou d'autres zones sensibles ?

L'augmentation de 5 % concernera-t-elle tous les cas de figure ? Sur les gros cheptels, l'augmentation n'est pas insignifiante ! S'il s'agit de 5 % dans le cadre du projet agricole départemental, en revanche, je pourrais le comprendre.

Mme Renée Nicoux. - On nous dit qu'il n'y aura pas d'enquête publique complémentaire, trop coûteuse. Je m'interroge, comme sur la marge de plus ou moins 5 %, ainsi que sur le doublement de l'effectif qui détermine le déclenchement du seuil d'autorisation. Comment les deux peuvent-ils être combinés ? Qu'arrivera-t-il en cas d'augmentation de 10 % ? Que se passera-t-il en cas de regroupement sur des territoires qui traditionnellement n'ont pas vocation à l'élevage intensif, je songe aux parcs naturels, qui ont pour objet de protéger l'environnement et la ressource en eau ?

Mme Odette Herviaux. - Je comprends la nécessité d'accélérer les procédures et de les simplifier. Mais faut-il aller jusqu'à supprimer l'enquête publique ? Ce n'est pas parce que celle-ci conclut favorablement au projet d'agrandissement que tout se déroule facilement. L'opinion publique, enquête ou pas, est toujours défavorable aux regroupements et aux agrandissements. Il faut donc être très précis. J'y insiste : le maintien de ces élevages dépendra de leur acceptabilité environnementale. La région Bretagne est particulièrement sensible à ce problème. Nombre de jeunes s'y installent encore, mais pas dans l'élevage porcin, parce qu'au-delà d'un certain seuil de regroupement, la transmission ne peut plus se faire. Le rapatriement de plusieurs exploitations sur un site soulève des difficultés avec la population des environs. Bref, si l'on va trop loin dans la libéralisation des regroupements, on risque de compromettre le maintien des exploitations et de favoriser la délocalisation vers des territoires moins peuplés, où la qualité de l'eau pose moins problème. Je suis réservée sur cette affaire, en raison de ma préoccupation pour la transmission et pour l'acceptabilité par la population et parce que je redoute des dérives possibles dans la localisation des élevages. Conservons des exploitations à taille humaine !

M. Yannick Botrel. - La durée des procédures, inférieure en Allemagne, n'est pas liée au volume de production... Il y a dans le traitement des dossiers quelque chose à améliorer !

M. Gérard César, rapporteur. - Le projet de décret n'est pas facilement assimilable, j'en conviens volontiers. Je précise que j'ai auditionné des représentants de la fédération nationale porcine et de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA). Nous suggérons que le décret soit cosigné par le ministre de l'Agriculture, ce qui sera plus cohérent. Les 5 % s'appliquent à l'ensemble de l'opération considérée. Et le doublement du seuil d'autorisation concerne l'augmentation de l'effectif total sur le site de regroupement. La législation sur les parcs naturels s'impose toujours, rien ne change quant aux règles de protection de l'environnement.

Les regroupements sont un sujet sensible, nous le savons. Raison de plus pour que la rédaction soit d'une grande précision, afin d'éviter les recours d'associations créées pour l'occasion. Mais je vous le signale, le décret est déjà restrictif. Il existe aujourd'hui un consensus large pour assouplir le régime des autorisations, afin de permettre des regroupements.

M. Jean-Paul Emorine, président. - Ce décret répond globalement à nos préoccupations. Il a été élaboré en collaboration avec la profession.

Audition de M. Henri Proglio, Président-directeur général d'Électricité de France

M. Jean-Paul Emorine, président. - La commission de l'Économie et les sénateurs membres du groupe d'études sur l'énergie sont heureux de vous accueillir, Henri Proglio. Nous vous avions rencontré lorsque vous étiez candidat à la présidence d'EDF, les commissions parlementaires compétentes étant saisies pour avis, puis à nouveau lors de l'examen de la loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité (Nome). Vous allez nous exposer la stratégie d'EDF sur le territoire national et à l'international.

M. Henri Proglio, président-directeur général d'Électricité de France. - Je vous ai rencontré effectivement lors de ma candidature à ce poste, mais aussi lors de la préparation de la loi Nome, dont l'histoire, du reste, n'est pas définitivement écrite, et est sans cesse renouvelée...

EDF a construit un leadership mondial dans la gestion du service public de l'électricité et il est d'abord un opérateur public, fier de ses racines ; il s'est développé dans l'ensemble des composantes du secteur de l'énergie. Il est aujourd'hui le premier acteur mondial, fort de l'expérience acquise, de son expertise, de ses traditions, des qualités humaines qu'il a su intégrer et de ses ambitions, qui sont clairement internationales. Le 25 novembre 2009, j'ai pris la présidence de ce groupe. J'ai depuis lors tenté de structurer une stratégie industrielle, au demeurant fort simple et dont les piliers correspondent aux grands domaines d'expertise du groupe. En amont du cycle industriel, il y a la production sous toutes ses formes, nucléaire, hydroélectrique, thermique, énergies renouvelables. C'est un métier international, qui a vocation à rayonner dans le monde entier. J'ai confié à Hervé Machenaud la responsabilité de la production, quelle que soit l'énergie concernée, y compris donc la filière nucléaire.

L'aval du cycle est moins bien identifié à l'international. Nous l'appelons dans le jargon interne « l'optimisation » : comment optimiser les infrastructures de production, de transport, de distribution, lourdement capitalistiques, afin d'optimiser les investissements et le service ? Il y a aussi le commerce, la gestion des services clients et le trading, c'est-à-dire l'optimisation de l'alimentation en matières premières.

S'y ajoute une autre composante, qui pourrait paraître étrange, la gestion des tarifs. Il s'agit de savoir comment on peut, à équivalence de capacité, permettre à tous d'accéder à ce service public essentiel, grâce à une gestion tarifaire fine. Vous connaissez cette gestion, que les Français perçoivent plus ou moins bien car elle est complexe. Elle est aussi un élément essentiel de l'accessibilité et de la qualité du service offert. Cette expertise développée par notre groupe est rare, elle est très sollicitée dans de nombreux pays.

Entre les deux, il y a les réseaux de transport et de distribution, de plus en plus sophistiqués, dits « intelligents » parce que devant intégrer les nouvelles technologies. Ces trois piliers sont les trois axes de développement du groupe. On peut travailler, au plan international, dans l'amont ou dans l'aval, ou dans les réseaux ; on peut aussi connecter ces composantes afin d'offrir un service intégré, d'une efficacité absolue, qui représente l'idéal de ce que nous pouvons offrir. Mais chaque pilier a vocation à affirmer en lui-même une dimension internationale.

J'ai confié l'amont du cycle, je l'ai dit, à un grand professionnel, un grand industriel, qui a l'habitude de défendre les couleurs de la France ailleurs, en Chine notamment où il a passé quinze années. L'aval a été confié à M. Pierre Lederer, autre grand professionnel qui a passé onze ans de sa vie à construire les nouvelles composantes de l'énergie en Allemagne. Et c'est Mme Michèle Bellon, grande professionnelle également, qui s'occupe des réseaux. La vocation internationale du groupe est évidente. Je ne conçois pas l'identité d'EDF sans une priorité donnée à la conquête internationale - mais sans oublier nos origines ni nos ambitions légitimes ici : le meilleur service d'électricité, au service de la nation.

La conception et la construction d'unités de production n'ont pas le même horizon géographique que l'activité liée aux réseaux de distribution. Les diverses zones de développement, d'un axe industriel à l'autre, ne se confondent pas totalement. Le groupe réalise déjà 45 % de son chiffre d'affaires à l'étranger, ce pourcentage augmentera sensiblement dans les années à venir. Nous sommes le premier opérateur britannique, le deuxième italien, très présents en Europe centrale, y compris en Allemagne malgré la récente évolution... Le territoire européen est notre marché domestique, nous occupons la deuxième place en Belgique, mais nous sommes présents aussi en Asie, en Chine, où nous construisons le premier EPR ; nous sommes partenaires du premier programme nucléaire chinois. Nous sommes présents au Moyen-Orient, en Afrique où des développements sont prévus, en Amérique latine...

Au Laos, la semaine passée, j'ai inauguré le barrage de Nam Theun. C'est la plus belle réalisation hydroélectrique au monde : 1 070 mégawatts de production électrique ! Cet ouvrage induira à lui seul une augmentation de 3 % du PIB laotien. C'est la plus belle référence que l'on puisse présenter en matière de développement durable dans le secteur de l'énergie.

J'en viens au nucléaire. EDF est le premier exploitant mondial, et de très loin : notre capacité, principalement en France et au Royaume-Uni, atteint 74 gigawatts, trois fois plus que le second exploitant, l'opérateur russe, cinq fois plus que le premier exploitant américain, douze fois plus que l'exploitant belge Electrabel qui est la filiale de GDF-Suez. Dans la filière à eau pressurisée et sur le seul territoire français, nous bénéficions d'un retour d'expérience de 1 450 années-réacteur. Aucun autre acteur dans le monde ne possède une telle expérience et certainement pas les constructeurs. EDF n'est pas seulement exploitant mais aussi concepteur de centrales, dans la position d'architecte-ensemblier : l'ingénierie conçoit, passe les contrats de fabrication, supervise le montage sur site. Cette complémentarité est essentielle, elle est le fondement de notre stratégie, elle est au coeur du succès historique du nucléaire français.

EDF a construit en France 58 réacteurs à eau pressurisée (PWR), tranche après tranche, et profité chaque fois de l'expérience acquise lors de la construction et de l'exploitation. A l'international, nous avons construit la centrale de Daya Bay en Chine à la fin des années 1980 en tirant parti de l'expérience de Gravelines.

Les trois autres pays qui disposent encore d'une industrie nucléaire, la Corée du Sud, la Russie et la Chine, disposent comme nous d'une ingénierie performante, d'un tissu industriel dense, d'un marché important, de capitaux suffisants, mais nous sommes les seuls à bénéficier de longues années d'expérience, du moins dans le domaine de l'eau pressurisée. Sachons en tirer parti pour notre développement international.

EDF n'a ni les moyens financiers, ni la capacité industrielle d'inonder le marché mondial : elle peine déjà à financer les investissements nécessaires en France. Nous participons à la construction de seulement quatre réacteurs sur la cinquantaine actuellement en projet dans le monde. Ce que nous nous efforçons de faire est d'accompagner les pays qui ont fait le choix du nucléaire, par le biais d'alliances modulables. Notre vocation est avant tout industrielle et non financière. La France et l'Europe pourraient réfléchir à un mode de financement des projets à l'exportation, à l'instar des États-Unis : nous avons pu emprunter des capitaux chinois pour construire la centrale de Taishan, mais cela restera l'exception.

A l'étranger, nous pouvons intervenir en tant qu'assistants à la maîtrise d'ouvrage, en amont des projets, afin d'apporter nos conseils en ce qui concerne le cadre réglementaire, les sites propres à recevoir une centrale, les conditions socioéconomiques, la sécurisation de la gestion des déchets, l'intégration au réseau électrique et les ressources humaines. Aucun constructeur ne dispose de notre expertise, qui est celle de l'investisseur et de l'exploitant. C'est ainsi que nous travaillons en Italie avec Enel, en Pologne avec PGE, comme par le passé au Royaume-Uni. En gagnant la confiance de nos interlocuteurs, nous pouvons ensuite les accompagner dans leur projet nucléaire.

L'équipe constituée par EDF et ses partenaires français doit être adaptée à chaque situation, insérée dans un réseau d'alliances internationales plus large et conforme au droit de la concurrence. Le gouvernement italien a, par exemple, pour projet de développer une industrie nucléaire nationale, ce qui a conduit à un accord entre EDF, Areva, Ansaldo et Enel.

Nous travaillons avec Areva, Alstom, des PME et l'ensemble des constructeurs français et européens. EDF est un électricien, tandis qu'Areva est un fabricant de réacteurs et un prestataire de services dans le domaine du combustible. Les groupes qui réussissent sont ceux qui marient l'exploitation et l'ingénierie de conception. Aucun constructeur ne pourrait assumer seul les risques que présente la construction d'une centrale, sauf à renchérir considérablement son offre. La relation entre EDF, Areva et Alstom ne peut être exclusive : les équipementiers doivent pouvoir construire des centrales pour d'autres opérateurs, et nous devons être en mesure de travailler avec d'autres chaudiéristes, pour améliorer notre connaissance du tissu industriel. On pourrait ainsi imaginer qu'EDF aide à la rénovation d'un réacteur VVER russe.

L'entreprise, riche de l'expérience fournie par le premier parc électronucléaire mondial, a vocation à être le premier interlocuteur de nos partenaires étrangers. Il faut concevoir des réacteurs diversifiés, adaptés à la demande mondiale, et préparer le renouvellement du parc français. Nous projetons ainsi de développer un réacteur de 1 000 MW.

Je m'attarderai un instant sur le parc français existant, dont il ne faut pas oublier le vieillissement, alors que l'attention se focalise sur les projets internationaux et les rivalités qu'ils attisent. La moitié des tranches des réacteurs français aura bientôt trente ans : c'est l'âge du grand carénage, où les générateurs de vapeur, alternateurs et transformateurs doivent être renouvelés. La France a pris du retard, ce qui ne remet pas en cause la sûreté de ses installations, mais amoindrit leurs performances et nuit à l'image de l'industrie nationale. Le renouvellement du parc est une opportunité pour l'industrie française : plusieurs dizaines de milliards d'euros sont en jeu, bien plus qu'à l'international. Il faut réinventer la politique industrielle qui a réussi dans le passé, et trouver les financements indispensables : le prix auquel nous serons contraints de vendre une partie de notre production à nos concurrents, ainsi que les tarifs régulés, doivent donc être suffisants pour rembourser les investissements passés et financer ceux qui sont aujourd'hui nécessaires. Le nucléaire est une chance pour la France : c'est une industrie à forte valeur ajoutée, dont l'outil de production est sûr, les émissions de gaz à effet de serre faibles et l'exposition à la conjoncture macro-énergétique limitée.

M. Ladislas Poniatowski, président du groupe d'études de l'énergie. - La loi Nome oblige EDF à revendre une partie de son électricité à ses concurrents, mais comme vous venez de le dire, « l'histoire n'est pas encore écrite » : le prix de vente n'a pas encore été fixé. Le 23 juin, vous déclariez devant notre commission qu'un prix inférieur à 42 euros serait inadmissible. Qu'en pensez-vous aujourd'hui ? Quel peut être le rôle d'EDF dans le marché des capacités de production et d'effacement qui sera mis en place en application de la loi Nome ?

Votre entreprise vient de quitter l'Allemagne, mais vous n'excluez pas qu'elle y retourne : est-ce à la condition qu'elle dispose d'une participation majoritaire dans un groupe ? Le produit de la vente de votre participation dans EnBW sera-t-il affecté au développement international ou au désendettement du groupe ? Comptez-vous participer à la recapitalisation d'Areva ?

Le rapport Roussely préconise qu'EDF soit chef de file des projets internationaux. Mais la méthode pragmatique adoptée jusqu'ici a du bon : en Afrique du Sud, l'électricien veut un partenariat avec EDF, mais en Inde vous faites peur à l'électricien local, qui préfère traiter directement avec Areva.

M. Henri Proglio. - Je ne suis pas un zélateur de la loi Nome, mais le Parlement est finalement parvenu à un équilibre. Le prix de vente devra être en cohérence avec le tarif réglementé transitoire d'ajustement de marché (Tartam), qui était en 2009 de 42 euros. La loi nous impose de mettre à disposition de nos concurrents 25 % de nos capacités de production, sans dégager aucune marge ; le prix de vente doit au moins couvrir le coût de production, faute de quoi ce sont nos clients qui paieront la différence ! Je me suis élevé avec véhémence contre le projet caressé par quelques-uns, qui consistait à piller le patrimoine d'EDF et de la nation française. ( M. Daniel Raoul approuve) J'attends la parution du décret ; je ne comprendrais pas que le prix fixé soit inférieur à 42 euros.

EDF jouera naturellement un rôle primordial dans le marché des capacités de production et d'effacement. La France est aujourd'hui dotée de l'industrie électrique la plus compétitive au monde : les prix sont inférieurs de 40 % à la moyenne européenne. Ne détruisons pas ce qui a été rendu possible par le dévouement et le savoir-faire des générations précédentes !

L'Allemagne est un pays doté d'une vraie politique industrielle... sauf dans le domaine de l'énergie. Les Allemands refusent l'énergie thermique tirée du charbon par souci d'écologie, sans pour autant s'intéresser au charbon propre, se méfient du gaz pour ne pas être dépendants de la Russie, rejettent le nucléaire pour des raisons idéologiques, et privilégient les énergies dites « renouvelables », aléatoires et fort coûteuses. La conséquence est une forte dépendance aux exportations. Or l'Allemagne veut imposer à ses voisins, par le biais des règlementations européennes, les conséquences malheureuses de ses propres choix...

Nous détenions 45 % du capital d'EnBW, les communes de Bade-Wurtemberg possédant le reste. Or, le ministre-président du Land, au cours d'une campagne électorale difficile, avait promis de renationaliser l'électricien et de recentrer ses activités sur le territoire du Land : il nous a donc fait une proposition unilatérale de rachat, que nous aurions pu refuser ; mais à la veille du renouvellement du contrat de partenariat, nous risquions de nous retrouver dans une position d'actionnaire minoritaire, sans plus pouvoir participer à la gestion industrielle. Dans une conjoncture difficile pour l'industrie allemande, frappée par la taxe sur le nucléaire et par les fluctuations des prix du gaz, il nous a paru préférable de vendre à un prix acceptable - 20 % au-dessus du cours boursier - et de dégager ainsi 4,7 milliards d'euros que nous avons pu affecter à notre propre désendettement.

On prétend qu'EDF est surendettée : c'est faux. La dette n'est pas structurelle, mais s'explique par les lourds investissements qu'il nous faut consentir pour l'entretien du parc français et le développement international du groupe. Cependant, l'effort de désendettement atteint aujourd'hui 23 milliards d'euros.

Nous n'excluons pas de revenir en Allemagne et étudierons les opportunités qui se présenteront.

S'agissant du développement international, pour lequel nous avons toujours privilégié des partenaires français au nom du patriotisme économique, le rapport Roussely a énoncé une évidence : il est naturel que celui qui a la meilleure expertise soit le chef de file.

Lorsque je me suis rendu à Pékin au début de mon mandat, j'ai rencontré le ministre chinois de l'énergie, qui m'a d'abord fait comprendre que son pays était désormais doté de moyens financiers considérables, d'une industrie puissante, de capacités d'expertise égales à celles des pays occidentaux, d'un marché intérieur considérable, et qu'il n'avait plus besoin de notre coopération. Je lui ai alors fait remarquer qu'une chose manquait encore à l'industrie nucléaire chinoise : le retour d'expérience sur un parc nucléaire existant. Il lui faudrait pour cela attendre vingt ou trente ans. A l'issue de la réunion, nous avons signé le renouvellement pour cinquante ans de notre coopération avec l'électricien chinois CGNPC et un autre contrat de cinquante ans avec CNNC.

J'entends dire qu'un opérateur ne pourrait pas vendre d'équipements à un autre opérateur. Qu'est-ce d'autre qui a fait de Veolia le premier constructeur mondial d'usines de traitement d'eau et de déchets ? C'est justement parce que l'opérateur a l'expérience de l'exploitation des usines qu'il est le mieux placé pour les vendre. L'Afrique du Sud souhaite une coopération avec EDF, pourquoi l'Inde la refuserait-elle ?

M. Michel Teston. - Il y a quelques jours, c'est une tout autre vision de la filière nucléaire française que nous exposait Mme Anne Lauvergeon... La France peut-elle se permettre de laisser prospérer des rivalités entre les principaux acteurs de ce secteur stratégique ?

Le Bade-Wurtemberg a voulu racheter la participation d'EDF dans EnBW, mais le groupe français peut-il rester absent du marché allemand ?

M. Roland Courteau. - L'acquisition de British Energy fut-elle selon vous une bonne affaire, étant donné le prix d'achat et la situation de l'entreprise ?

Nous avons combattu la loi Nome. Sur le prix de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh), paraît-il, les choses se précisent...

La presse a annoncé votre intention d'affecter 50 % du capital de RTE aux actifs dédiés, afin de financer le démantèlement de certaines centrales et le stockage des déchets. Peut-on connaître les détails de cette opération ? Ce choix met-il en cause l'intégration du groupe, comprenant une filière dont le capital est exclusivement public ? Quelles garanties a-t-on pour l'autre moitié des actifs ? RTE suscite bien des convoitises...

M. François Fortassin. - Je m'étais ému, Monsieur le Président, de vous voir diriger à la fois EDF et Veolia, mais je vois que les choses sont rentrées dans l'ordre. La Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) s'est alarmée de certaines de vos déclarations récentes, et son président Xavier Pintat a promis d'écrire aux ministres compétents. Pouvez-vous nous éclairer à ce sujet ?

M. Robert Navarro. - Areva et EDF sont deux fleurons de l'industrie française, mais leurs responsables se livrent une concurrence féroce. Je suis de ceux qui pensent qu'EDF est mieux placée pour être chef de file à l'international. Mettons un terme à ces problèmes de gouvernance, dans un des rares domaines où nous pouvons encore gagner de l'argent dans une économie mondialisée !

Vous avez parlé d'un outil financier inadapté. Pourriez-vous nous en dire plus ? J'ai bien sûr quelques idées...

M. Marc Daunis. - Le développement de la filière électrique française a reposé dès l'origine sur des choix technologiques. A l'heure où les délais de livraison de l'EPR s'allongent, où les coûts s'alourdissent, comment envisagez-vous l'avenir ? Ne faudrait-il pas diversifier notre offre ?

Donnerez-vous la priorité aux investissements internationaux ou au renouvellement du parc nucléaire français ? Vous avez parlé d' « alliances modulables » : s'agit-il de conclure des « partenariats à la carte » tantôt avec des constructeurs français ou européens, tantôt avec des constructeurs étrangers, par exemple chinois ou coréens, au détriment de la filière française ?

M. Henri Proglio. - Je ne conteste pas à Areva le droit d'exposer son point de vue. Le rôle d'EDF est celui de l'architecte-ensemblier, et nous accordons aux autres acteurs industriels français une place aussi grande que possible. Nous faisons appel à Areva pour les chaudières, l'alimentation en combustible, le retraitement des déchets : EDF est même le premier client d'Areva ! Mais à l'étranger, il est souvent nécessaire faire appel aux industriels locaux, en tenant compte des zones d'influence et de l'efficacité industrielle. La mission Roussely a reconnu le rôle primordial d'EDF en tant que concepteur-opérateur, riche d'une longue expérience. EDF est le seul opérateur électrique d'Europe occidentale à disposer de l'ingénierie nécessaire pour n'avoir pas à déléguer à d'autres entreprises la construction de ses centrales : sachons tirer parti de cet atout !

Il n'est pas indispensable d'être présent sur le marché allemand, mais si une opportunité se présente, nous la saisirons.

En ce qui concerne British Energy, il faudra attendre dix ou vingt ans pour savoir si son rachat a été rentable. Le Royaume-Uni est l'un des rares pays à avoir une vraie politique énergétique. Le Premier ministre, David Cameron est sur la même ligne que son prédécesseur, et la loi sur l'énergie a été adoptée il y a quelques jours à une majorité de 97 % ! Il est dommage que les journaux français n'en aient pas rendu compte. Il est d'autant plus précieux pour EDF d'être présent au Royaume-Uni que d'autres pays du Commonwealth pourraient mettre en oeuvre des politiques comparables.

J'en viens à la question du financement. Les États-Unis et la Chine ont mis en place des financements d'État pour aider leurs industriels à l'exportation. La France, dans ce domaine, a pris du retard ; il est vrai qu'elle ne dispose pas des mêmes ressources... EDF n'a d'ailleurs pas vocation à être propriétaire de toutes les centrales qu'elle exploite.

Les choix technologiques, Marc Daunis, évoluent lentement. Nos équipes de recherche et développement - les plus importantes du monde - travaillent sur les technologies du futur : les réacteurs de quatrième génération sont en préparation. Le réacteur EPR, comme tout pilote, a nécessité une phase de mise au point, mais le temps est venu de l'industrialisation.

La rénovation du parc nucléaire français nécessitera des investissements considérables. Ceux que requièrent nos projets à l'étranger ne sont pas comparables. Le prix de l'Arenh doit être suffisant pour garantir les investissements nécessaires à la préservation du service public en France. L'extension de la durée de vie des centrales existantes coûtera 35 milliards d'euros dans les années à venir, plus la maintenance courante.

Marc Daunis a parlé d'un « partenariat à la carte ». EDF a toujours fait la part belle à l'industrie française dans ses coopérations ; mais la confiance au sein de la filière doit lui permettre de s'élargir à des acteurs étrangers, faute de quoi nous perdrons certains appels d'offre.

M. Jacques Blanc. - Les responsables politiques peuvent être fiers des choix qui ont permis la construction de cet outil industriel merveilleux qu'est EDF. Mais je voudrais aborder le problème du transport et de la distribution. Les collectivités territoriales travaillent en partenariat avec ERDF : elles sont propriétaires du réseau, l'entreprise est concessionnaire. Ces liens doivent être renforcés. Lors de la dernière réunion de la FNCCR, de vives inquiétudes se sont exprimées au sujet du fonds d'amortissement des charges d'électrification (Facé) ; c'est grâce à ce fonds et à la mutualisation des moyens qu'il garantit que nous avons pu réaliser la couverture électrique du territoire. Ne l'amputons pas !

S'agissant de RTE, où en est le projet de boucle méditerranéenne ?

M. Martial Bourquin. - L'électricité à bon marché contribue à l'attractivité du territoire français. Si nous voulons rebâtir une industrie compétitive, il faut préserver cet acquis. La loi Nome autorise toutes les dérives ; les industries électro-intensives sont particulièrement inquiètes. Ne les forçons pas à se délocaliser au Canada ou en Chine !

EDF doit avoir une stratégie internationale, non se lancer dans des aventures dont les usagers feront les frais. N'oublions pas que, si l'électricité est moins chère en France, c'est parce que les usagers ont payé les investissements nécessaires !

Il faut resserrer les liens entre EDF et la filière photovoltaïque. Près de chez moi, un parking entier est couvert de panneaux photovoltaïques de première génération produits en Chine, dont l'empreinte carbone est énorme ! Les entreprises françaises du secteur demandent un contrat de filière. Pourquoi ne pas inclure le bilan carbone parmi les critères des appels d'offre ?

M. Alain Fouché. - J'ai voté contre la loi Nome. On se réfugie toujours derrière l'Europe : voyez le texte sur l'urbanisme commercial dont nous débattrons demain en commission. Je voudrais interroger Henri Proglio sur les énergies renouvelables. Un moratoire sur les projets photovoltaïques a été décidé par le Gouvernement. Comment financer le développement de ces énergies à long terme ?

M. Michel Houel. - On prévoit que la consommation électrique doublera d'ici 2050, ce qui assure un bel avenir aux industries du secteur. Les Français sont fiers de leur industrie nucléaire, mais l'échec d'Abou Dhabi a déçu : il n'est pas dû aux ratés de l'EPR, mais à la mésentente entre les acteurs de la filière. Pourquoi ne pas créer un pôle international, associant EDF, Areva, Alstom, Total, Suez environnement, afin que nos partenaires étrangers aient un interlocuteur identifiable ?

M. Roland Courteau. - Vous ne m'avez pas répondu au sujet de l'affectation de 50 % du capital de RTE aux actifs dédiés. Une dépêche vient d'annoncer que ce projet avait été bouclé aujourd'hui. Qu'en est-il ?

M. Jean-Paul Emorine, président. - En juin, vous avez annoncé vouloir porter le taux de disponibilité des centrales nucléaires à 85 % en cinq ans. Où en sommes-nous ?

M. Henri Proglio. - François Fortassin, au sujet de Veolia, rien n'est rentré dans l'ordre, car rien n'a jamais été en désordre. Ayant assumé à la demande du Président de la République de nouvelles fonctions à la tête d'EDF, j'ai souhaité aménager la transition à la direction de Veolia, sans que l'on m'ait jamais reproché de ne pas consacrer toute mon énergie à EDF : je guidais seulement les dirigeants de Veolia dans leurs choix. Un nouveau président-directeur général a été nommé dimanche dernier.

S'agissant du Facé, la décision à laquelle vous avez fait référence relève de l'administration française, et n'a pas été inspirée par moi. ERDF n'est qu'un opérateur, respectueux des règles qui lui sont imposées.

Le conseil d'administration d'EDF a accepté ce matin le principe d'une affectation de 50 % du capital de RTE aux actifs dédiés. EDF a en effet constitué, dans la perspective du démantèlement de ses centrales, un fonds doté de 2 à 3 milliards d'euros par an, que nous ne dépenserons - si la durée de vie des centrales est prolongée de vingt ans - que dans quarante ans.

M. Marc Daunis. - Le Gouvernement l'aura épuisé avant cela pour financer les retraites !

M. Henri Proglio. - Nous tenons à garder le contrôle sur ce fonds. En vertu de la réglementation, EDF n'est pas opérateur de RTE : elle ne dirige pas ses dirigeants ni ne fixe ses tarifs. J'ai considéré qu'il n'était pas aberrant d'affecter au fonds dédié une partie du capital de RTE, dont le rendement est garanti. Je me suis d'ailleurs engagé à ne pas revendre ces actifs, sauf à les remplacer par de l'argent frais.

Alain Fouché m'a interrogé sur les énergies renouvelables. N'oublions pas que la première énergie renouvelable, c'est l'hydraulique ! Ce sont ses réalisations hydroélectriques qui ont forgé la réputation d'EDF. Cette filière représente encore 15 % de notre production. Quant aux énergies éolienne et photovoltaïque, elles sont aléatoires. Pragmatiques, nous tenons à maîtriser ces technologies et produisons de l'énergie dérivée de ces sources, mais le coût est bien supérieur à celui de l'électricité classique : deux à trois fois pour l'éolien, dix à vingt fois plus pour le photovoltaïque. Le développement de ces énergies creuse donc des déficits considérables, en principe à la charge de l'Etat, en réalité à la charge d'EDF par le biais de la contribution au service public de l'électricité (CSPE) qui ne lui est pas remboursée.

Nous travaillons déjà sur le photovoltaïque avec Saint-Gobain et des entreprises en Allemagne et en Asie, de grands acteurs industriels, mais l'on ne peut demander qu'EDF, entreprise efficace, devienne le financeur de filières marginales ou locales. Oui au pragmatisme, au dynamisme, mais nous devons avoir le souci de l'efficacité.

Je crois, moi aussi, en la filière nucléaire française, et EDF n'a pas été partie prenante de l'échec d'Abou Dhabi. Quand j'ai pris mes fonctions le 25 novembre 2009, EDF ne faisait pas partie du tour de table, et il a fallu indiquer nos prix le 10 décembre. Je ne pouvais rattraper en quelques jours un retard de deux ans. Je ne vous donne pas mon sentiment personnel sur cet échec, même si je pense que la filière française mérite mieux. Simplement je rejoins les conclusions du rapport Roussely.

S'agissant du taux de disponibilité de nos centrales, des 58 réacteurs du parc, je peux vous dire que le taux moyen annuel d'utilisation devrait s'améliorer en 2010, mais le critère important est celui de la production, qui va s'accroître de 5 à 7 %. Nos 58 réacteurs seront tous opérationnels à Noël, sauf incident, ce qui constitue une vraie prouesse technique. Il est préférable de concentrer les arrêts de tranche dans les périodes où l'on consomme moins d'électricité, pendant l'été par exemple. Nous allons améliorer, cela dit, ce taux moyen de disponibilité, malgré l'obligation dans laquelle nous serons de prévoir des arrêts plus longs, en raison des travaux nécessaires à l'allongement de vingt ans de la durée de vie des centrales, ce qui sera sans doute le meilleur investissement que nous aurons à faire. J'exprime ma reconnaissance à l'équipe qui a déjà lancé cette réorganisation. Le chantier est en bonne voie.

M. Jean-Paul Emorine, président. - Je vous remercie pour cette audition de deux heures qui a permis d'apporter des réponses aux questions que les sénateurs se posent.

Mercredi 15 décembre 2010

- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président -

Urbanisme commercial - Examen du rapport et du texte de la commission

La commission procède à l'examen du rapport et du texte de la commission sur la proposition de loi n° 558 (2009-2010), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à l'urbanisme commercial.

M. Jean-Paul Emorine, président. - Tout d'abord, je souhaite la bienvenue à Benoît Apparu, secrétaire d'État à l'urbanisme et au logement, qui a souhaité assister aux travaux de notre commission.

Je remercie Dominique Braye qui a beaucoup travaillé sur cette proposition de loi, laquelle revient utilement sur la loi de modernisation de l'économie (LME) et sur le Grenelle de l'environnement. Depuis longtemps, en effet, les élus souhaitaient que l'urbanisme commercial figure dans le code de l'urbanisme.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Cette proposition de loi m'a en effet demandé beaucoup de travail, car il fallait concilier l'inconciliable, à savoir le souci d'encourager le développement commercial dans notre pays - et donc de défendre le pouvoir d'achat de nos concitoyens - tout en luttant contre la désertification des centres-villes. Il s'agissait de rapprocher les points de vue entre ceux qui souhaitent plus de contrôles et ceux qui veulent la libéralisation totale de ce secteur d'activité. Avec beaucoup d'imagination, il a été possible de réunir ces deux approches apparemment contradictoires. La réussite de certains de nos voisins l'atteste d'ailleurs.

Notre incapacité collective, au cours des 30 dernières années, à penser de manière cohérente l'insertion du commerce sur nos territoires a produit une véritable catastrophe en termes d'aménagement du territoire et d'urbanisme. Il suffit de constater la laideur des entrées de villes et l'organisation aberrante d'un tissu urbain morcelé en zones monofonctionnelles qui gaspillent l'espace foncier et imposent des transports coûteux et polluants. Il suffit de tourner les yeux vers nos communes, petites et moyennes, pour mesurer la désertification des centres-villes, vidés de leur animation au profit de zones périphériques.

Si la difficulté à réaliser une intégration harmonieuse du commerce sur nos territoires ne date pas d'hier, la réforme de l'urbanisme commercial portée par la loi de modernisation de l'économie de 2008 n'a pas contribué à améliorer la situation. Le relèvement du seuil de saisine des commissions départementales d'aménagement commercial (CDAC), de 300 à 1 000 m², ainsi que l'interdiction de fonder leurs décisions sur des critères économiques ont en effet été suivis d'une libéralisation des implantations.

Cette réforme répondait à un objectif économique louable : lever les barrières à l'entrée du marché afin d'intensifier la concurrence entre enseignes au profit des consommateurs. Néanmoins, ce texte a provoqué d'importants dommages collatéraux en matière d'aménagement du territoire, avec une véritable explosion des surfaces commerciales dans notre pays, qui était pourtant déjà l'un des mieux équipés d'Europe et même du monde en ce domaine. On n'a pas assez pris garde, même si le Sénat avait tiré la sonnette d'alarme lors de l'examen de la LME, que la législation de l'urbanisme commercial était avant tout un outil urbanistique d'organisation de l'espace pour les collectivités territoriales, outil que la réforme a fortement affaibli sans proposer un véritable mécanisme de substitution.

Je reconnais que cet outil était très imparfait, voire critiquable, mais il avait au moins le mérite d'exister. Je regrette donc que l'on ait, en quelque sorte, jeté le bébé avec l'eau du bain et sacrifié l'aménagement du territoire à la levée des barrières à la concurrence.

Néanmoins, à quelque chose malheur est bon : cette évolution nous a fait prendre conscience qu'il fallait rebâtir sur de nouvelles bases une politique de régulation des implantations commerciales. D'ailleurs, le Gouvernement s'était engagé, pendant les débats, à présenter un projet de loi sur la question dans les six mois suivant la LME. Ne voyant rien venir, nos collègues députés, Michel Piron et Patrick Ollier, se sont saisis du problème au printemps dernier en faisant adopter cette proposition de loi. Je salue cette heureuse initiative qui n'aurait pas été possible sans la réforme constitutionnelle de 2008.

Pour comprendre et amender ce dispositif, il faut, en préambule, rappeler qu'il s'inscrit dans un cadre relativement contraint.

La première obligation est le respect du droit européen en matière de concurrence et de liberté d'établissement. Il n'est plus possible aujourd'hui de restreindre les implantations commerciales sur la base de « tests économiques ». Les seuls critères autorisés sont des critères d'intérêt général tel que l'aménagement du territoire. Encore faut-il que les restrictions à la liberté d'implantation imposées au nom de cette exigence soient non discriminatoires et qu'elles restent proportionnées aux objectifs recherchés. La Commission européenne, qui suit ce dossier de très près avec une méfiance non dissimulée, sera très sourcilleuse sur toutes sur ces questions, notamment celle des seuils de surface. Ceux qui souhaiteraient pouvoir discriminer les commerces selon leur format ou selon leur « concept » seront donc forcément déçus.

Un deuxième paramètre fait partie de l'équation législative : les nouvelles règles relatives aux implantations devront concilier deux objectifs aussi légitimes l'un que l'autre - l'aménagement du territoire et le renforcement de la concurrence. Nous devons donc réguler sans figer, créer ou renforcer des situations de rentes monopolistiques, car ce serait contraire à l'un des axes majeurs de notre politique économique.

Le principe directeur de cette proposition de loi est d'intégrer l'urbanisme commercial au droit commun de l'urbanisme. Cette expression un peu pompeuse indique tout simplement qu'il s'agit de mettre fin à la dichotomie entre des autorisations d'exploitation commerciale délivrées sur le fondement du code de commerce et des autorisations d'urbanisme classiques. Désormais, seul le permis de construire sera nécessaire. Cela permettra une simplification et donc une accélération des procédures d'autorisation.

Pour réaliser cette intégration, le texte s'appuie sur les schémas de cohérence territoriale (SCOT) : ces derniers devront, dans un délai de deux ans à compter de l'entrée en vigueur du texte, délai que je souhaite étendre à trois ans, être complétés par un document d'aménagement commercial (DAC), qui sera le volet « commerce » du document d'orientation et d'objectifs. La disposition votée dans le Grenelle II, à l'initiative du président Emorine, qui tend à généraliser les SCOT sur l'ensemble du territoire national, devrait donc permettre à terme à tous les territoires de disposer d'un outil d'aménagement commercial.

Il est tout à fait logique de confier au SCOT l'organisation générale du commerce, car cela correspond au choix du périmètre d'action pertinent. Le DAC, en cohérence avec les orientations du SCOT, définira donc les grandes orientations relatives à l'organisation du commerce. Il précisera en particulier les exigences d'aménagement du territoire auxquelles les implantations commerciales d'une surface supérieure à 1 000 m² devront se plier.

Les outils offerts aux collectivités territoriales grâce au DAC seront de deux sortes. Tout d'abord, le DAC délimitera diverses zones d'implantation.

Premier type de zones : les centralités urbaines. Nous les définirons plus précisément lors de l'examen des amendements. Dans ces centralités, les implantations, quelle que soit leur surface, seront réglementées par le plan local d'urbanisme (PLU) sans que le SCOT puisse imposer de prescriptions.

Deuxième type de zones : celles, autres que les centralités urbaines, où les implantations de grande taille pourront être autorisées par le DAC sous réserve qu'elles respectent les conditions qu'il fixe.

Enfin, il y aura les zones résiduelles, que le texte ne vise pas explicitement, dans lesquelles les implantations de plus de 1 000 m² seront interdites.

Dans les zones d'implantation périphériques qu'il définit, le DAC pourra imposer des conditions à l'implantation. Cela constitue le deuxième outil d'aménagement et c'est à ce niveau que se pose la question centrale : les conditions prévues sont-elles suffisantes ? Portent-elles sur les critères-clé ? Permettent-elles au DAC d'être véritablement un outil de régulation des implantations ?

On a beaucoup dit que les commissions départementales étaient devenues des machines à dire « oui ». Il ne faudrait pas que les DAC qui vont les remplacer ne soient eux-mêmes que des machines à délivrer sans réserve des permis de construire. Or, si le législateur ne prévoit pas des conditions suffisamment contraignantes, toutes les implantations seront permises n'importe où et les élus perdront la main sur les implantations effectuées sur les territoires dont ils ont la charge. Il y a là un vrai danger.

Si le lieu normal d'élaboration d'un DAC est le SCOT, la proposition de loi prévoit néanmoins des solutions alternatives. En l'absence de SCOT, le PLU intercommunal devra en effet contenir des dispositions faisant office de DAC. En l'absence de SCOT et de PLU intercommunal, tout EPCI pourra élaborer un DAC s'imposant au PLU des communes membres. Enfin, dans certaines régions comme l'Île-de-France, où la carte intercommunale est loin d'être achevée, une commune pourra intégrer dans son PLU les dispositions d'un DAC.

Le permis de construire servira d'autorisation d'implantation commerciale. Lorsqu'il existera un PLU compatible avec le document d'aménagement commercial, ce PLU intègrera, dans son règlement et dans ses orientations d'aménagement et de programmation, les prescriptions du DAC. Le permis de construire sera donc délivré en conformité avec le PLU.

En l'absence de PLU, ce qui est fréquent, ou bien s'il existe un PLU mais qu'il n'a pas encore été rendu compatible avec le DAC, le permis de construire devra être compatible avec le DAC, qui sera donc directement opposable aux demandes d'autorisations individuelles. C'est pourquoi le DAC devra être suffisamment précis, notamment dans son zonage.

Enfin, pendant la période transitoire au cours de laquelle les DAC seront élaborés, des commissions régionales d'aménagement commercial (CRAC) devront donner leur accord préalable à la délivrance des permis de construire pour les implantations de plus de 1 000 m². Les critères de décision de ces CRAC, majoritairement composées d'élus, seront à peu près celles des actuelles CDAC.

Voilà, à grands traits, la logique de ce texte, qui introduit un bouleversement assez profond dans le contrôle des implantations commerciales et qui modifie les relations entre les documents d'urbanisme et les procédures de délivrance des autorisations individuelles.

Cette nouvelle approche impose que nous précisions les notions utilisées et les procédures envisagées. En total accord avec le rapporteur de l'Assemblée nationale, je vous proposerai donc de réorganiser en profondeur le texte adopté par les députés, sans toutefois en modifier substantiellement l'esprit et les orientations fondamentales.

Les réécritures globales d'articles font tomber, en séance, les amendements qui se rapportent aux articles. Le travail de commission se fait cependant dans un esprit et selon un formalisme différents. Tous les amendements seront examinés sur le fond et chacune de vos propositions trouvera sa place dans la discussion et fera l'objet d'un vrai débat.

En ce qui concerne mes amendements de fond, un point est essentiel. Je le dis franchement : cette proposition de loi a tout pour devenir un bon texte mais, en l'état, non seulement elle ne remplit pas l'objectif qu'elle se fixe, mais elle risque même d'aboutir au résultat inverse. Aujourd'hui les CDAC, malgré toutes les critiques dont elles font l'objet, demeurent un lieu où les élus peuvent avoir leur mot à dire sur la pertinence des implantations commerciales et, le cas échéant, peuvent s'opposer à celles qu'ils jugent néfastes pour la structuration de leur territoire. Or, cette proposition de loi prévoit la disparition de ces CDAC. À l'avenir, les implantations commerciales seront autorisées par une décision de conformité du permis de construire avec le DAC, ce qui signifie que le maire se bornera à constater que le projet qui lui est soumis satisfait aux règles objectives explicitées dans les documents d'urbanisme. Nous passons donc d'une décision d'opportunité à une décision de conformité. Les PLU et les DAC devront donc avoir bien défini les règles applicables.

Personnellement, cela me convient, mais à une seule condition : il faudra que les DAC disposent d'outils pour autoriser ou interdire les implantations commerciales en fonction des exigences d'aménagement du territoire. Or, après avoir étudié ce texte en détail, après avoir beaucoup auditionné, après avoir consulté les divers ministères intéressés, et en avoir discuté avec le Président Emorine, je constate que, dans le texte actuel, ces outils n'existent pas. Rien dans le DAC ne peut empêcher la poursuite de la dévitalisation des centres-villes et la disparition programmée du commerce de proximité.

Si elle était adoptée en l'état, cette proposition de loi constituerait donc un remède pire que le mal. En supprimant les CDAC au profit d'un DAC sans vrai pouvoir de contrainte, les élus perdraient le peu d'influence qu'ils possèdent encore dans les CDAC pour gagner, en contrepartie, un pouvoir illusoire de régulation à travers des DAC qui se révèleraient des machines à délivrer des permis de construire. Ainsi, au lieu de réguler à nouveau les implantations commerciales au service de l'aménagement des territoires, ce texte deviendrait l'étape ultime de leur libéralisation.

Doit-on en conclure que ce texte est fondamentalement vicié ? Je ne le crois pas. Son orientation générale me paraît bonne. De plus, la législation sur l'urbanisme commercial, telle qu'elle figure dans le code de commerce, s'est montrée incapable, depuis 30 ans, d'apporter des réponses aux problèmes de vitalité des centres-villes, surtout pour les villes moyennes. En rester aux règles de la LME n'est pas une option souhaitable. C'est pourquoi je vous propose d'adapter ce texte à condition que nous garnissions la boîte à outils du DAC afin qu'il réponde à la désertification des centres-villes.

A ce jour, je n'ai trouvé qu'une solution : le DAC pourra contraindre la localisation des implantations commerciales sur la base d'une typologie des secteurs commerciaux. Si nous voulons que les centralités urbaines soient des lieux animés, qui mettent à la disposition de la population une offre commerciale diversifiée et de proximité, il faut que les commerces s'installent dans les centres afin de jouer un rôle de « locomotive » car ils peuvent attirer la population et faire profiter le reste du tissu urbain et commercial de leur présence. Ils ne doivent pas céder à la facilité de l'installation en périphérie, pour cause de foncier moins cher, de charges moins élevées et de stationnement plus facile. Or, ils ne le feront pas d'eux-mêmes. J'ai beau être un libéral, cela ne m'empêche pas de constater les éventuelles limites du marché. Selon la tendance économique spontanée, les « locomotives » commerciales s'installent plutôt en périphérie, car le prix du foncier y est plus faible et les marges commerciales plus élevées. Si nous voulons inverser cette logique économique centrifuge de localisation des commerces, si nous voulons redynamiser les zones de centralité urbaine, le DAC doit pouvoir imposer à des types de commerce, qu'ils soient alimentaire, de culture ou de loisir, de s'installer dans les zones centrales.

Cette idée appelle plusieurs commentaires. Premièrement, ces règles de localisation préférentielle basée sur une typologie des commerces devront respecter la liberté d'établissement. Le DAC doit pouvoir exiger, au nom de l'aménagement du territoire, que telle grande catégorie de commerce soit localisée ici plutôt que là, mais il ne peut conduire à lui interdire toute implantation dans la zone de chalandise d'un territoire. Ce n'est ni juridiquement possible, ni économiquement souhaitable.

Deuxièmement, la planification urbanistique n'est pas la panacée. Les élus locaux doivent assumer toutes leurs responsabilités : s'ils veulent attirer les commerces dans les centralités urbaines, il faut qu'ils aménagent leurs centres en conséquence, qu'ils prévoient le stationnement et la desserte des clients, qu'ils préemptent les locaux disponibles, qu'ils procèdent à un remembrement commercial, qu'ils fassent en définitive des localisations centrales une option économiquement possible et rentable. On ne peut interdire toute implantation en périphérie sans aménager les centres-villes !

Troisièmement, si la loi crée une typologie des secteurs de commerce, il faudra que celle-ci soit suffisamment générique pour rester simple et opératoire. Bruxelles nous observe : les cinq DAC mis en place sont au contentieux, car les élus ont été trop précis. Le législateur et les SCOT ne doivent pas enfermer le commerce, qui est une matière en constante évolution, dans des catégories étroites et figées.

Quatrièmement, si la loi crée des outils de régulation territoriale puissants, il faut qu'elle leur donne aussi une grande souplesse. Il est important que le DAC soit conçu au sein du SCOT pour mettre le commerce en cohérence avec l'ensemble des fonctionnalités d'un territoire. Mais le SCOT est un document d'orientation à long terme et la temporalité du DAC ne peut être la même que celle du SCOT : il faut par conséquent que les élus puissent faire évoluer le contenu de leur DAC très vite et sans formalisme excessif. Le DAC doit être un document aussi vivant que la matière qu'il régule. Cela passe par la définition de procédures de modification, qui figurent dans mes propositions d'amendements.

Je vous le dis en toute franchise, notamment à monsieur le ministre avec qui j'en ai déjà beaucoup discuté : si vous êtes en mesure de me proposer une autre solution qui réponde au problème de l'agonie des centres-villes, je suis preneur. S'il y a plus simple et plus efficace, qu'on me le démontre. En tant que rapporteur, je ne peux me satisfaire d'un discours reconnaissant que la désertification des centres-villes est un immense problème sociétal, sans que l'on ne propose rien pour y remédier. La solution que je préconise n'a sans doute pas que des avantages, mais ne pas la proposer serait irresponsable.

J'en viens à mes autres amendements. Pour renforcer les outils du DAC, outre la typologie des secteurs commerciaux, je propose que le DAC puisse fixer des conditions portant sur la diversité des fonctions urbaines et sur la densité minimale de construction.

Plusieurs amendements permettent de sécuriser juridiquement les DAC.

Les centralités urbaines font l'objet d'une définition claire.

Le statut des secteurs qui ne sont ni des centralités urbaines, ni des zones d'implantation autorisées par un DAC, est clarifié.

La procédure d'élaboration des DAC communautaires est explicitée, avec une procédure copiée sur celle des PLU.

Un amendement prévoit d'abroger le DAC communautaire lorsqu'entre en vigueur le DAC d'un SCOT ou un PLU intercommunal faisant office de DAC.

Les circonstances dans lesquelles la CRAC sera saisie pour donner son accord à une implantation commerciale sont précisées.

Le DAC doit être un document vivant. Deux amendements répondent à cet objectif : les procédures d'évolution déjà existantes pour les PLU - révision, révision simplifiée, modification, modification simplifiée et déclaration de projet - sont transposées aux cas des DAC communautaires et des DAC de SCOT.

Un débat triennal sur les effets du DAC communautaire sera organisé.

Il conviendra d'inciter les intercommunalités à élaborer des DAC. Il faudra donc maintenir des restrictions à l'implantation des commerces de grande taille dans les zones où s'applique actuellement la règle de l'urbanisation limitée et qui ont été ouvertes à l'urbanisation après 2003. J'avais prévu, si les DAC n'étaient pas adoptés dans les trois ans, d'en revenir à 300 m2. Je vous proposerai vraisemblablement de supprimer cette disposition en séance.

Enfin, il faudra veiller au bon déroulement de la phase transitoire entre l'ancien et le nouveau régime. Pour cela, je vous propose deux amendements : l'un concerne la composition de la CRAC avec une représentation accrue des élus. L'autre a trait aux délais de conversion des documents d'urbanisme aux nouvelles règles : le délai de droit commun de l'urbanisme en la matière, trois ans, doit s'appliquer.

Voilà quelle est ma lecture de cette proposition de loi : il s'agit d'un texte techniquement et politiquement difficile. Il nous oblige en effet à prendre à bras le corps un problème compliqué, celui du bon équilibre entre aménagement du territoire et concurrence économique, deux domaines qui ne font pas aisément bon ménage. Si on ne donne pas au DAC des outils puissants, l'aménagement du territoire sera une fois de plus sacrifié, ce que je ne saurais accepter.

M. Jean-Paul Emorine, président. - Notre rapporteur va donc nous proposer des modifications importantes. Il ne s'agit pas de faire ici le procès de la LME mais de décider que les élus puissent, dans le cadre d'un bassin de vie, décider de l'utilisation de l'espace.

Lorsque nous participons à des commissions départementales, il n'est pas rare d'avoir le sentiment que la décision échappe aux élus qui sont les premiers concernés.

Nous avons des divergences d'appréciation avec le Gouvernement, mais c'est tout à fait légitime. Certes, nos concitoyens doivent bénéficier des meilleurs prix, mais il est aussi de la responsabilité des élus de lutter contre la désertification des centres-villes.

M. Pierre Hérisson. - J'ai été rapporteur de la loi de 1996 sur le commerce et l'artisanat, loi présentée par un jeune ministre nommé Jean-Pierre Raffarin : nous avons passé de longues heures en séance à traiter de toutes ces questions.

La France est un des pays au monde à avoir la plus forte densité commerciale par habitant, notamment en zones frontalières, mais il continue à chercher des instruments de régulation.

De plus, les grands de la distribution ont en portefeuille, département par département, des autorisations de grandes surfaces non réalisées et il se développe un marché parallèle d'autorisations que se revendent entre elles les grandes enseignes.

L'équilibre entre la concurrence et la régulation passe par la définition précise des centres-villes.

Maintenez-vous dans ce texte la possibilité offerte aux maires de saisir la commission départementale sur les surfaces de moins de 1 000 m2 dans les villes de moins de 20 000 habitants, villes où les implantations commerciales en périphérie sont légion ?

Quand un permis de construire est délivré dans une zone artisanale ou dans une zone industrielle, les contraintes d'urbanisme et d'architecture pèsent sur le coût de l'opération.

Enfin, lorsqu'on modifie la loi, la grande distribution met en moyenne douze à dix-huit mois pour s'adapter aux nouvelles règles et surtout pour en trouver les failles.

M. François Patriat. - La matière est compliquée, le sujet sensible. Voilà trente ans que nous y revenons. Votre diagnostic, monsieur le rapporteur, est, à juste titre, sévère et incontestable. Mais les solutions que vous proposez sont-elles les bonnes ? Votre thérapeutique ne nous semble pas appropriée.

Vous avez fait le bilan de la LME et de la situation actuelle de l'urbanisme commercial, vous avez ensuite présenté le texte que nous pourrions adopter et, enfin, vous avez estimé que le texte de l'Assemblée nationale était dangereux sans y apporter vraiment les garde-fous nécessaires. Au lieu de régler le problème, cette proposition de loi conforte la dérégulation complète du secteur puisqu'elle assimile l'autorisation d'implantation à un simple permis de construire : on prive ainsi les responsables locaux de tout pouvoir d'orientation et de régulation commerciale, au risque de créer de véritables zones d'implantations anarchiques. Nos entrées de villes sont déjà meurtries : il nous faut donc une régulation et une planification.

Cette proposition de loi vise à régler le problème des périphéries de villes, mais ne traite en rien la question des centres-villes ni des commerces en banlieue ou dans les zones sensibles.

Vous nous avez dit que la révision constitutionnelle était heureuse car elle nous permettait de corriger les mauvaises lois que nous avions votées. Je m'amuse de cette analyse...

Les collectivités territoriales n'ont eu ni les moyens ni le temps de s'adapter au nouveau cadre législatif issu de la LME. Et comme bilan, qu'avons-nous ? 4 millions de m² autorisés en 2009 ! Les acteurs du secteur parlent d'une surproduction, de bulle immobilière et d'une véritable anarchie très préjudiciable aux centres-villes. En outre, on a assisté à une multiplication des marques de distributeurs. La Bourgogne a particulièrement souffert de cet état de fait : de vieilles entreprises, comme Amora, à Dijon, ont disparu à cause de la LME.

Nous allons proposer une réelle régulation à travers une double procédure d'instruction, PLU et SCOT. Nous allons aussi élaborer des outils pour permettre aux maires et aux présidents d'intercommunalité de lutter contre les monopoles sur un territoire.

M. le rapporteur a parlé de la période intermédiaire : il faudra prendre garde que ces trois ans ne soient pas mis à profit pour provoquer une surproduction des surfaces commerciales.

M. Alain Fouché. - Il y a quelques années, j'ai déposé une proposition de loi sur ce thème qui a été votée par le Sénat mais bloquée à l'Assemblée nationale parce que le ministre de l'époque, Renaud Dutreil, y était radicalement opposé.

J'ai ensuite été défavorable à la LME, mais la pression ministérielle était telle qu'il a fallu la voter. Aujourd'hui, les résultats sont là : des millions de m² ont été créés. A Poitiers, qui compte 100 000 habitants, le maire socialiste a permis en plein centre-ville que s'installent des ensembles commerciaux importants, comme la FNAC. Avec la LME, le groupe Auchan s'est surdéveloppé en périphérie et il va tuer le commerce de centre-ville. La LME n'est pas un bon texte et il serait souhaitable que les ministres nous écoutent parfois.

Les normes européennes sont-elles strictes, précises ou pas ? Ainsi, en Allemagne, il semble que l'autorisation commence à partir de 800 m².

Dans mon département, j'assiste à la renaissance du commerce de proximité, grâce à diverses aides. Prenons garde de ne pas interrompre ce mouvement par la multiplication des grandes surfaces qui ne créent que peu d'emplois, compte tenu de ceux qu'elles suppriment, et qui accélèrent la désertification des campagnes.

Mme Élisabeth Lamure. - Je salue le pragmatisme de Dominique Braye sur ce sujet difficile. Nous en avions beaucoup discuté lors de l'examen de la LME ; certaines de nos propositions ont été retenues, qu'il s'agisse des seuils pour les communes de moins de 20 000 habitants ou de l'intégration des périmètres commerciaux dans les SCOT.

Nous étions en attente du projet de loi qui devait venir dans les six mois ; deux ans plus tard, nous voici avec une proposition de loi certes méritante, mais qui ne donne pas aux élus tous les outils nécessaires... Quid de la période transitoire, si mal gérée après la LME ? Quel devra être le degré de précision des DAC ? Ces documents devront être « vivants » ; est-ce à dire que l'on va changer sans arrêt les règles d'urbanisme ? Comment les élus vont-ils travailler ?

M. Dominique Braye, rapporteur. - En effet, la LME a été adoptée dans l'attente d'un projet de loi sur l'urbanisme commercial, qui devait arriver dans les six mois.

Les commissions départementales et la Commission nationale d'aménagement commercial étaient devenues des machines à dire « oui ». Ne reprochons pas aux entrepreneurs de saisir les possibilités que leur ouvre la loi : ils sont dans leur rôle ! À nous de modifier la loi, si celle-ci est mauvaise.

Pendant la période transitoire, dans les communes de moins de 20 000 habitants, les élus pourront toujours saisir la CRAC pour toute implantation de plus de 300 m². Dans les communes de plus de 20 000 habitants, le seuil est fixé à 1 000 m² de surface hors oeuvre nette (SHON) ; l'Allemagne est à 800 m² de surface commerciale, ce qui est équivalent. Nous nous plaçons au niveau européen, à la limite de ce que l'on peut faire : impossible de descendre davantage.

Je partage le diagnostic de François Patriat : en bon vétérinaire, je vous demande d'améliorer la thérapeutique proposée, pour rendre le pronostic plus favorable !

Nos propositions de loi peuvent être discutées grâce à la réforme constitutionnelle ; c'est tout ce que je voulais dire. Il ne s'agit pas de corriger la LME, adoptée dans un contexte particulier, mais de la compléter. La proposition de loi précise les choses pour la période transitoire, afin d'éviter que les acteurs économiques ne s'engouffrent dans les brèches.

Mon obsession est de lutter contre la dévitalisation des centres des villes moyennes. Si Auchan s'est développé dans la périphérie de Poitiers, Alain Fouché, c'est avec l'accord des élus des communes concernées et de la CDAC !

M. Alain Fouché. - Des élus de l'agglomération...

M. Dominique Braye, rapporteur. - Il faut mettre fin à cette concurrence. J'ai longtemps été maire d'une commune de périphérie, qui compte un Auchan de 16 000 m² : cela fait vingt ans que je leur refuse l'autorisation d'implanter une galerie commerciale, pour préserver le centre-ville ! Les élus sont responsables de l'aménagement cohérent du territoire. Si ce n'est pas le cas, changez d'élus ! Le problème est que les projets commerciaux sont approuvés par des élus qui ne représentent pas le territoire impacté. D'accord pour que le DAC soit souple : il s'agit de ne pas rater les occasions qui pourraient se présenter. La LME était un premier volet ; nous vous en présentons aujourd'hui le deuxième.

M. Martial Bourquin. - Nous sommes d'accord sur le constat : la LME est une mauvaise loi, dont il faut limiter les effets. Pour ces groupes du CAC 40,4 millions de m², ça ne suffit pas : ils en veulent davantage ! Avec un Gouvernement tout à leur écoute, on élabore une nouvelle loi pour leur donner satisfaction...

Je suis maire d'une ville de 15 000 habitants. Si les élus n'autorisent pas un projet, il se fait à quelques kilomètres de là, dans un autre département : en matière d'urbanisme commercial, ces grands groupes font ce qu'ils veulent ! (M. le rapporteur le conteste).

Pour augmenter le pouvoir d'achat, il n'est jamais question d'augmenter les salaires, la LME allait faire baisser les prix en faisant jouer la concurrence, nous disait-on. Pure idéologie : 4 millions de m² plus tard, les prix n'ont pas baissé, car les groupes s'entendent sur les prix ! Contrairement à ce qui se passe en Allemagne, ce sont quelques groupements d'achat qui font seuls la loi en matière de prix !

Dominique Braye et François Patriat ont souligné le véritable enjeu : revitaliser les centres-villes. Il fallait une loi-cadre qui dirige les investissements des grands groupes vers les centres-villes ! Quant à la réglementation européenne, le Gouvernement l'invoque quand cela l'arrange...

L'aménagement du territoire est un argument solide pour contrer l'absence de régulation. En Allemagne, la fuite en avant a été évitée car le droit de l'urbanisme y est très strict ; on y trouve des grandes surfaces en centre-ville. Il faut renforcer notre politique d'aménagement du territoire pour obliger les grands groupes à investir dans les coeurs de villes. À Meaux, Auchan a quitté une ZUS en laissant une friche derrière lui ; le maire, que vous connaissez bien, doit se bagarrer pour trouver un repreneur ! Cette loi encourage la fuite en avant, avec à la clé, la désertification des zones rurales, des quartiers, des centres-villes. Il faudrait au contraire contraindre les grands groupes à investir dans ces zones en déshérence.

Vous proposez de renforcer le DAC pour limiter les effets de la dérégulation, mais les grands groupes le contourneront ! C'est pourquoi je prône une réglementation dès 300 m². Ces grandes surfaces prétendent créer des emplois, mais combien en détruisent-elles ailleurs ? Enfin, permis de construire ne signifie pas permis de commercer : il faudrait se pencher sur ce point constitutionnel.

Cette loi, qui est un pas de plus vers la dérégulation, est encore un cadeau fait aux entreprises du CAC 40, au mépris de l'aménagement du territoire. Aux élus de réparer sans arrêts les dégâts...

M. Jean-Paul Emorine, président. - Le rapporteur a donné d'autres orientations. Nous sommes d'accord sur la responsabilité des élus en matière d'occupation de l'espace.

M. Gérard Cornu. - Je félicite le rapporteur pour sa contribution novatrice. Tout repose sur le DAC. Il faut une typologie des secteurs commerciaux. Soyons précis, mais aussi modestes. Les effets positifs sont toujours longs à venir. Le problème qui se pose est celui de la phase transitoire. Nous avions fait un bon travail sur la LME : c'est le décret qui a été dramatique !

Quid des autorisations qui ont été délivrées mais ne sont pas encore engagées ?

La CDAC offrait l'avantage de la proximité, d'autant que les élus - cinq sur huit membres - y avaient repris la main. Aujourd'hui, les grandes surfaces qui se heurtent à un refus de la CDAC font un recours auprès de la CNAC - qui ne compte pas d'élus. Celle-ci a ainsi donné un avis favorable à l'implantation dans l'agglomération de Chartres d'un Leclerc de 30 000 m², contraire au SCOT, malgré l'avis défavorable de la CDAC. Nous sommes maintenant devant le Conseil d'État ! Même si la CRAC donne le pouvoir aux élus, la CNAC peut toujours revenir sur ses décisions... Cette fois-ci, il faudra être très précis et vigilant sur le décret d'application.

M. Jean-Paul Emorine, président. - La proposition de loi vise à donner pleine responsabilité aux élus.

M. Alain Chatillon. - Je regrette que la loi de modernisation agricole (LMA) n'ait pas abordé la question des 65 000 hectares de terres agricoles qui disparaissent chaque année en périphérie des villes. J'ai repris les travaux de Pierre Laffitte sur ce dossier : une forte taxation des plus-values sur les ventes de terrains en périphérie, sur le modèle allemand, permettrait à la fois d'aider l'agriculture et de freiner l'hémorragie.

La distribution a changé au cours des quinze dernières années. Le hyper-discount a montré ses limites, et ne dépasse pas 15 % du marché. Cette forme de grande distribution ne correspond plus aux attentes des consommateurs, les hypermarchés perdent des clients, au profit des supermarchés. Nous avons là un moyen de pression intelligent.

La distribution n'est plus facteur de développement des produits agroalimentaires français dans le monde. Le modèle est dépassé ! Il faut inciter les industriels à orienter leur développement vers l'international. L'agroalimentaire français est passé de la première à la seconde place européenne, bientôt à la troisième. Le Salon international de l'agroalimentaire, qui coûte pourtant fort cher, ne sert qu'à promouvoir des produits étrangers ! Il faut trouver un consensus avec la distribution pour améliorer la promotion de nos produits agroalimentaires.

Surtout, il faut accompagner le petit commerce en centre-ville, facteur indispensable de lien social.

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'intervention de Martial Bourquin était pétrie d'idéologie ; ce n'est pas mon approche. (Protestations à gauche). La LME n'était pas une mauvaise loi, mais une loi incomplète.

M. Martial Bourquin. - 4 millions de m² !

M. Dominique Braye, rapporteur. - Les entrepreneurs se sont engouffrés dans la brèche. Nous nous préoccupons tous du pouvoir d'achat des Français.

M. Martial Bourquin. - Parlons-en !

M. Dominique Braye, rapporteur. - Le rôle des élus est déterminant. J'ai sur mon territoire un Auchan de 16 000 m² ; nous accueillons un Leclerc pour introduire de la concurrence, l'enjeu étant de faire baisser les prix de 15 %. Martial Bourquin cite l'Allemagne en exemple, mais en oubliant de dire que les salaires y ont été bloqués pendant trois ans !

Mon obsession est la revitalisation des centres-villes. Tout repose sur le DAC. Nous donnons aux élus les outils pour faire de l'aménagement du territoire ; encore faut-il qu'ils s'en saisissent. Donnez de bons outils à un mauvais ouvrier, il fera du mauvais travail...

Gérard Cornu, l'autorisation de la CDAC est valable deux ans ; si le projet n'est pas lancé avant son terme, elle devient caduque. Certains élus font traîner les choses, ce qui est une façon habile de refuser... Avec le nouveau système, la commission nationale disparaît au profit des CRAC.

Alain Chatillon, nous avons beaucoup parlé des périphéries lors de la LMA. Certes, le hard discount stagne, mais jamais les grandes enseignes n'auraient pensé qu'il atteigne 15 % ! Il attire désormais toutes les classes sociales, preuve qu'il répond à une attente des consommateurs. On est passé des courses-loisirs aux courses-contrainte, d'où un rejet des hypermarchés au profit des moyennes surfaces. Les Franprix ou Carrefour Market de 1 500 à 1 800 m² sont des locomotives dans les centres-villes. D'ailleurs, contrairement à Auchan, Carrefour ne demande plus à augmenter systématiquement ses surfaces.

Quant au volet international, il excède le champ de la proposition de loi...

M. Jean-Paul Emorine, président. - Lors de la LMA nous nous sommes penchés sur la perte de surface agricole : l'équivalent d'un département agricole disparaît tous les dix ans... La LMA a instauré un observatoire départemental, avec une commission départementale pour l'affectation des sols, en attente du schéma de cohérence territoriale. C'est aux agriculteurs, avec les élus, de déterminer l'occupation de l'espace !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Le Gouvernement approuve l'esprit général de ce texte. Actuellement, il faut distinguer autorisation commerciale et autorisation urbanistique. Comme toute construction, le permis de construire doit respecter le SCOT et les grandes surfaces doivent être conformes aux principes de l'urbanisme.

Ce texte change les règles du jeu, en transférant le principe de l'autorisation commerciale dans le droit commun de l'urbanisme : avec votre rédaction, on passerait d'une autorisation individuelle d'ouverture de commerce à une planification à long terme. Le Gouvernement souhaite que l'urbanisme joue tout son rôle, mais pas un rôle commercial. Si l'on prend des décisions d'opportunité dans ce cadre-là, via la typologie, on sort de l'urbanisme stricto sensu.

Au maire de faire les investissements nécessaires pour accroître l'attractivité de son centre-ville et trouver un équilibre entre commerce de périphérie et de centre-ville. Attention toutefois également à l'équilibre entre les différents pôles d'attractivité au sein d'un département ou d'une région. Ma ville de Châlons-en-Champagne, qui a 50 000 habitants, est à 40 kilomètres de Reims, une ville de 200 000 habitants : je dois aménager le développement de ma périphérie, avec une offre commerciale diversifiée, pour éviter une évasion vers la zone de chalandise rémoise...

La LME s'appliquera durant la période transitoire, mais les CRAC seront immédiatement mises en place. Les acteurs de la distribution profiteraient d'un vide juridique pour faire du mètre carré, ce que personne ne souhaite.

Examen des articles

Chapitre 1er

L'amendement rédactionnel n° 47 est adopté. La division est rétablie.

Chapitre 1er

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

47

Rétablissement d'une division intitulée « Chapitre 1er : Les documents d'aménagement commercial ».

Adopté

Article 1er

M. Dominique Braye, rapporteur. - Mon amendement n° 1 réécrit l'article pour le rendre plus lisible. Il précise la procédure relative au DAC.

M. François Patriat. - Le terme « délimite » renvoie à la parcelle. L'amendement précise la nature des centralités urbaines mais sans la définir. Il interdit les implantations commerciales d'une surface supérieure à 1 000 m² hors centralité urbaines, mais dans les secteurs urbains, les projets sont totalement libéralisés ! Vous ne changez rien au texte. Nous, nous voulons limiter le seuil à 300 m².

D'accord pour la typologie des commerces, mais elle ne prend pas en compte les services. Enfin, la procédure simplifiée pour le DAC mentionne le SCOT : est-ce une erreur ? Bref, nous sommes opposés à cet amendement.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Le DAC fixe des orientations pour l'ensemble du territoire du SCOT. Dans les zones interstitielles, il n'est pas question de bloquer l'implantation d'une boulangerie ou d'un tabac-presse ! Nous allons déterminer les centralités urbaines mais aussi d'autres zones de centralité, comme les quartiers sensibles. Les élus décideront. Le problème n'est pas les zones interstitielles, mais l'équilibre entre centralités et périphéries.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Cette réécriture globale me convient, à une nuance près. L'introduction d'une typologie, prévue au IV de l'article 1er, pose problème. Qu'adviendra-t-il si le commerce est revendu, ou s'il évolue légèrement ? On risque de figer les territoires. Va-t-il falloir définir un pourcentage d'activité ? Où commence « l'équipement de la maison » ? Quid des commerces mixtes ? Il va falloir une cinquantaine de catégories ! Je crains une explosion de l'insécurité juridique en la matière. La décision d'opportunité sur l'implantation d'un commerce ne relève pas d'un document d'urbanisme.

Le rapporteur considère la typologie comme la meilleure solution...

M. Dominique Braye, rapporteur. - La moins mauvaise !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Cela fait trente ans que l'on cherche un équilibre, sans jamais le trouver. Une typologie ne réglera pas la question, et va figer les territoires. On ouvre un nid à contentieux - sans compter qu'une typologie détaillée se heurtera au droit communautaire, comme c'est le cas en Allemagne...

Le IV de votre amendement modifie profondément le texte. Le DAC est un outil puissant à disposition des élus pour organiser leur territoire, d'autant que la proposition de loi libéralise le centre-ville, mais attention à la rigidité de la typologie.

On a aujourd'hui une vision très traditionnelle de l'urbanisme commercial. Or il n'y a quasiment plus de petits commerces en centre-ville, mais des franchises de grandes enseignes. Quelles seront les grandes surfaces de demain ? Pour la FNAC, le futur, c'est Internet. Demain, on ne se rendra plus en voiture depuis le centre-ville vers la périphérie pour faire ses courses ; ce sont les camionnettes de livraison qui feront le chemin inverse ! Il nous faut un outil pour organiser l'urbanisme, mais attention à ne pas figer les choses.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Nous sommes au coeur du sujet. Le ministre reconnaît les problèmes mais ne m'apporte aucune solution ! La mienne a le mérite d'exister.

Certaines enseignes s'installent en périphérie car il leur faut de la surface. D'autres, notamment dans le secteur de l'équipement de la personne, concourent vraiment à l'animation des centres-villes. Si elles s'installent en périphérie, c'est pour des raisons purement économiques ! La FNAC quitte aujourd'hui les centres-villes - où elle a toujours été implantée - parce que la périphérie est plus rentable...

Qu'adviendra-t-il en cas de vente du commerce, demande le ministre. Nous avons tous donné des autorisations en CDAC, et nous nous sommes tous fait berner ! Assez ! Nous n'avons pas résolu le problème, car il y a toujours eu des ministres talentueux, comme aujourd'hui, qui se sont opposés aux solutions efficaces que nous proposions !

La typologie n'entre pas dans les détails : nous parlons de grands secteurs. Les services du ministre n'ont pas suffisamment d'idées ; le Sénat lui en apporte ! Si vous ne votez pas cette mesure, vous libéralisez tout : les enseignes pourront faire ce qu'elles veulent !

M. Jean-Paul Emorine, président. - On ne peut faire plus clair.

M. Martial Bourquin. - D'accord si le seuil est fixé à 300 ou 500 m². Leclerc concurrence la FNAC, avec succès, en proposant une offre culturelle en périphérie, à côté de ses hypermarchés. La FNAC s'installe donc en périphérie...

Une ville sans commerces est une ville morte. Les commerces de bouche quittent les coeurs de villes ; la loi les encourage à y revenir. Mais si une grande surface s'installe à 2 kilomètres de lui, le Huit-à-huit qui s'est installé en centre-bourg fermera dans les deux ans ! C'est pourquoi il faut davantage de régulation. Il n'y a là rien d'idéologique ! Il faut réguler ce qui bouleverse les zones de chalandise.

N'oublions pas non plus que la population vieillit : nombre de nos concitoyens ne peuvent plus prendre leur voiture pour faire leurs courses. Si l'on porte le seuil à 500 m², je suis prêt à voter ce texte. La typologie des commerces est indispensable. Si le bail commercial n'est pas « tout commerce », on ne peut ouvrir n'importe quel commerce !

M. Dominique Braye, rapporteur. - Merci d'aller dans mon sens.

M. Gérard Cornu. - Je n'étais initialement pas très favorable à une typologie, mais cet amendement n'ouvre qu'une possibilité, non une obligation. L'affectation du commerce n'est pas régulée par les élus mais par le propriétaire des murs, qui peut imposer un bail « mono-produit ». C'est possible, à condition que celui qui exerce le commerce ne soit pas le propriétaire des murs, et si l'on interdit les baux « tout commerce ».

La typologie proposée, autour de quatre grands secteurs, me paraît assez souple. Le principe heurte quelque peu ma sensibilité libérale, mais il faut savoir ce que l'on veut ! Il faut être novateur, et se donner les moyens de sauvegarder nos centres-villes.

M. Alain Houpert. - Il faut savoir ce que nous voulons faire de nos centres-villes. Les commerces et les clients vont en périphérie, parce que c'est plus pratique. Bientôt nous n'aurons que des banques en centres-villes. Mêmes les cabinets médicaux les désertent, car nos patients ne peuvent plus venir nous voir ! Je suis donc favorable à une limitation du seuil à 300 ou 400 m² et à la mise en place des outils qui permettent de faire venir les commerces-clés en centres-villes. La FNAC du centre-ville est un endroit où l'on se retrouve, où l'on vit ensemble.

M. François Patriat. - Nous sommes favorables à la typologie, mais le rapporteur ne m'a pas répondu : dans les centralités, aucune condition, tout est libéralisé ! Nous demandons donc que soient maintenus des seuils.

M. Alain Chatillon. - Pour limiter le hard-discount, je suis favorable à un seuil de 300 ou 400 m².

M. Dominique Braye, rapporteur. - Il faut trouver un équilibre accepté par tous. Il n'est pas possible de revenir à un seuil de 300 m².

M. François Patriat. - Nous proposons 500 m².

M. Dominique Braye, rapporteur. - Nous sommes à 1 000 m² de SHON, soit 750 m² environ de surface commerciale. Les FNAC, les Franprix de 1 500 m² sont les locomotives qui permettent au petit commerce de centre-ville de vivre. Beaucoup d'élus cherchent à les attirer !

Si un hypermarché existant dépasse les 1 000 m², il ne pourra s'étendre sans autorisation. Quant aux zones interstitielles, aux élus de les déterminer ; ce n'est pas là que l'on verra un développement anarchique du commerce !

Le projet est équilibré. Avec 1 000 m² de SHON, nous sommes déjà à la limite acceptable par Bruxelles. De grâce, ne déséquilibrons pas l'équilibre : je n'ai pas trouvé d'autre solution !

Je connais le risque de contentieux : c'est pourquoi je propose quatre grands secteurs. Donnez-vous les moyens d'animer vos centres-villes, sans rejeter la faute sur l'extérieur ! Les commerçants qui ont des horaires d'ouverture erratiques ont leur part de responsabilité dans la désertification des centres-villes...

M. Jean-Paul Emorine, président. - Je partage les propos d'Alain Houpert. Encore faut-il pouvoir stationner en centre-ville ! Il faut prendre en compte les nouvelles formes de commerce via Internet.

M. Dominique Braye, rapporteur. - À Mantes-la-Jolie, nous avons voté hier 12,75 millions d'euros pour des parkings.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Personne n'a jamais trouvé de solution à ce problème, à gauche comme à droite : il convient d'avancer avec peu de certitudes et beaucoup de modestie... La LME n'a pas réglé la question du droit de suite.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Les secteurs sont suffisamment larges et souples.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Vous ne réglez pas le problème. Qu'adviendra-t-il si le propriétaire veut vendre son magasin quatre mois après avoir obtenu son autorisation, ou le faire évoluer ? C'est un nid à contentieux.

On passe d'un seuil de 1 000 m² de surface de vente à 1 000 m² de SHON : c'est déjà une diminution de surface. Il est impossible de revenir à 300 ou 500 m² sans rompre tout l'équilibre, et encourir la censure de Bruxelles. Si l'on veut y encourager l'implantation de commerces, il faut donner de la souplesse aux centres-villes en matière d'urbanisme.

Il faut donc des règles contraignantes en périphérie et de la souplesse en centre-ville afin de parvenir à un équilibre.

M. Dominique Braye, rapporteur. - C'est ce que je propose !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - La planification est bien plus essentielle que la typologie. L'élaboration du DAC permet de délimiter les nouvelles zones. Avec une ZAC, votre maîtrise des implantations est totale. Vous aurez donc bien des outils pour contrôler ce qui se passe en périphérie, sans avoir besoin de la typologie, même à Mantes-la-Jolie.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Je reconnais l'enthousiasme de M. le ministre, mais sa démonstration, qu'il me pardonne, n'est pas pertinente. Il prône la souplesse, et moi aussi. Charles Revet estime que les élus perdent la main.

M. Charles Revet. - C'est vrai !

M. Dominique Braye, rapporteur. - Nous donnons ici la possibilité aux élus d'utiliser les typologies. S'ils n'en veulent pas, ils n'y sont pas obligés. Je propose aussi que les DAC puissent évoluer très rapidement pour être réactifs face à d'éventuelles délocalisations de commerce en périphérie.

M. le ministre nous propose de faire des ZAC afin de maîtriser les implantations : c'est vrai... le jour de l'inauguration ! Mais dès le lendemain, les élus n'ont plus leur mot à dire et tout peut changer ! J'ai été berné trois fois de la sorte !

M. Jean-Paul Emorine, président. - Cet amendement a été soumis à une large discussion. La période de Noël permettra à la réflexion de se poursuivre, monsieur le ministre.

L'amendement n° 1 est adopté.

M. Jean-Paul Emorine, président. - Nous en arrivons aux amendements identiques nos 33 et 20

M. Dominique Braye, rapporteur. - Au départ, j'avais la même approche que les auteurs de ces deux amendements. Mais en l'absence de PLU, les contentieux risquent de se multiplier. Faute de PLU, il faut « délimiter » plutôt que « localiser » puisqu'on se réfèrera au DAC. Je ne vois d'ailleurs pas ce qui vous gêne dans ma rédaction.

Mme Élisabeth Lamure. - Si on « délimite », on le fait à la parcelle : c'est le travail du PLU, pas d'un SCOT qui est un document d'orientation générale et à long terme. Il y a donc confusion.

M. Jean-Paul Emorine, président. - Le SCOT lui-même ne délimite pas la parcelle, il la localise.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Les conditions fixées par le DAC doivent être opposables directement ou indirectement aux permis de construire. Il y a déjà eu des exceptions avec le Grenelle lorsque des secteurs ont été délimités. Les élus devront se pencher un peu plus précisément sur ces documents pour éviter les contentieux.

Mme Élisabeth Lamure. - Le DAC va donc définir très précisément la délimitation concernée.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Cela ne pose pas de problèmes, car la plupart des zones sont délimitées par des voies, des routes ou des obstacles naturels. Le mot « localise » ne convient pas car il faut avoir en mémoire la question de l'opposabilité directe ou indirecte. Le milieu du commerce n'est pas particulièrement tendre et il exploitera la moindre faille juridique lui permettant de faire échec à un concurrent. Voyez l'attitude de Bricorama qui fait des recours sur tous les projets d'implantation de ses concurrents. Si vous ne délimitez pas, ce sera au juge de le faire.

M. Jean-Paul Emorine, président. - Cet argument est recevable.

M. François Patriat. - Vous transformez les DAC en PLU supra-intercommunal.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Heureusement que les PLU traitent de bien d'autres domaines !

L'amendement n° 33 est retiré.

L'amendement n° 20 est rejeté.

M. François Patriat. - Sur le seuil des 300 ou 500 m², vous nous renvoyez à chaque fois à l'Europe. Or, cette dernière n'empêche pas de fixer un nombre de m² dans l'intérêt général. Cette argumentation n'étant pas recevable, nous présentons cet amendement n° 21.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Impossible !

L'amendement n° 21 est rejeté.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Je préfère harmoniser le vocabulaire utilisé avec celui retenu par la loi Grenelle II. Défavorable à l'amendement n° 22.

L'amendement n° 22 est retiré.

Les amendements nos 39 et 23 sont rejetés.

M. François Patriat. - Nous voulons davantage encadrer.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Nous voulons libéraliser !

L'amendement n° 24 est rejeté.

M. Dominique Braye, rapporteur. -Les amendements nos 35 et 41 sont satisfaits. Avis défavorable.

Les amendements nos 35 et 41 sont rejetés.

M. Dominique Braye, rapporteur. - je préfère ma typologie à celle proposée par l'amendement n° 25. « Habillement » est un critère trop précis.

M. François Patriat. - Nous tenons à la mention des services.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Ce point est réglé par l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme, quand il parle des bureaux.

L'amendement n° 25 est retiré.

M. François Patriat. - Il ne faut pas que l'ensemble du SCOT soit annulé si le DAC se trouve annulé, et c'est l'objet de l'amendement n° 31.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Je partage ce souci. Le DAC ne peut être indépendant du SCOT, et le juge a toujours le pouvoir d'annuler partiellement ou entièrement le document.

M. Gérard Cornu. - Je partage l'avis du rapporteur, mais je vois le danger pour les SCOT.

L'amendement n° 31 est rejeté.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission sur l'article 1er est retracé dans le tableau suivant :

Article 1er

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

1

Réécriture des dispositions relatives aux documents d'aménagement commercial (DAC) des schémas de cohérence territoriale pour préciser un certain nombre de notions et de procédures.

Adopté

Mme LAMURE

33

Localisation par le DAC des centralités urbaines et des zones périphériques d'implantation commerciales.

Retiré

M. PATRIAT

20

Identique au n° 33.

Rejeté

M. PATRIAT

21

Règlementation par le DAC des implantations de plus de 300 m² dans les centralités urbaines.

Rejeté

M. PATRIAT

22

Substitution du terme « espaces » à celui de « zones » dans un DAC

Retiré

M. FOUCHÉ

39

Abaissement du seuil de surface à 500 m² de SHON au-delà duquel l'implantation n'est plus libre.

Rejeté

M. PATRIAT

23

Abaissement du seuil d'autorisation de 1 000 à 300 m².

Rejeté

M. PATRIAT

24

Possibilité pour le DAC d'interdire l'implantation des commerces supérieurs à un seuil de 300 m² dans les zones "interstitielles".

Rejeté

M. NÈGRE

35

Délimitation par le SCOT des grands pôles structurants du tissu commercial.

Rejeté

M. CÉSAR

41

Définition par le DAC des pôles commerciaux en les hiérarchisant selon leurs niveaux de rayonnement.

Rejeté

M. PATRIAT

25

Établissement d'une typologie des secteurs commerciaux.

Retiré

M. PATRIAT

31

Portée de l'annulation du DAC par le juge.

Rejeté

Article 1er bis A

M. Dominique Braye, rapporteur. - Les PLU intercommunaux peuvent faire office de DAC en l'absence de SCOT.

L'amendement n° 2 est adopté à l'unanimité

L'article 1er bis A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 1er bis A

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

2

PLU intercommunaux faisant office de DAC en l'absence de SCOT.

Adopté

Article 1er bis B

M. Dominique Braye, rapporteur. - Mon amendement n° 3 autorise l'élaboration d'un DAC communautaire élaboré selon les mêmes procédures que le PLU, en l'absence de SCOT ou de PLU intercommunal.

M. François Patriat. - Nous ne pouvons accepter cela. Nous voulons des schémas d'aménagement commercial élaborés par les intercommunalités et compatibles avec le DAC.

M. Dominique Braye, rapporteur. - On ne peut pas élaborer de DAC de petite taille.

M. Gérard Cornu. - Je suis d'accord avec le rapporteur. Mais que se passe-t-il s'il y a un DAC départemental ?

M. Dominique Braye, rapporteur. - Il n'y aura pas de DAC départemental.

L'amendement n° 3 est adopté.

L'amendement n° 27 est rejeté.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Les amendements nos 42 et 36 sont satisfaits. Si les DAC communautaires sont élaborés selon les mêmes règles que les PLU, les chambres consulaires sont nécessairement associées.

Les amendements nos 42 et 36 sont rejetés.

L'article 1er bis B est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission sur l'article 1er bis B est retracé dans le tableau suivant :

Article 1er bis B

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

3

Procédure d'élaboration du DAC communautaire.

Adopté

M. PATRIAT

27

Elaboration d'un schéma d'aménagement commercial même quand il existe un SCOT muni d'un DAC.

Rejeté

M. CÉSAR

42

Association des chambres consulaires à l'élaboration des DAC communautaires.

Rejeté

M. NÈGRE

36

Même objet que le 42.

Rejeté

Article 1er bis C

L'amendement rédactionnel n° 4 est adopté.

L'article 1er bis C est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 1er bis C

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

4

Rédactionnel

Adopté

Article 1er bis

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'amendement n° 5 propose d'associer les organismes représentant les professionnels du commerce à l'élaboration des DAC.

M. Daniel Raoul. - Qui sont-ils en dehors des chambres consulaires ?

M. Dominique Braye, rapporteur. - Des fédérations ... Un décret est prévu.

L'amendement n° 5 est adopté.

L'article 1er bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 1er bis

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

5

Association des professionnels du commerce à l'élaboration des DAC.

Adopté

Article 2

L'amendement rédactionnel n° 6 est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 2

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

6

Rédactionnel.

Adopté

Article additionnel après article 2

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'amendement n° 16 étend à trois ans le délai accordé aux SCOT et aux PLU intercommunaux pour se doter d'un DAC.

M. Gérard Cornu. - La transition sera difficile. Pourquoi allonger le délai ?

M. Dominique Braye, rapporteur. - Un tel document requiert des études. L'amendement n° 32 propose ce même allongement.

Les amendements nos16 et 32 sont adoptés.

L'article additionnel est inséré.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Article(s) additionnel(s) après Article 2

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

16

Reprise des dispositions de l'article 7 et précision sur le délai de trois ans de mise à jour du SCOT.

Adopté

M. PATRIAT

32

Délai de mise à jour du SCOT.

Adopté

Article 3

L'amendement rédactionnel n° 7 est adopté.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

7

Rédactionnel.

Adopté

Division additionnelle après l'article 3

L'amendement n° 48 est adopté. La division additionnelle est insérée.

Division(s) additionnelle(s) après Article 3

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

48

Insertion d'une division additionnelle intitulée : « chapitre 2 : Les autorisations d'implantation commerciale ».

Adopté

Article additionnel avant l'article 4

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'amendement n° 8 clarifie la rédaction. Nous voulons contrôler les changements de secteur d'activité commerciale.

L'amendement n° 8 est adopté. L'article additionnel est inséré.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Pourquoi instituer une double instruction des demandes de permis de construire par les maires et le président de l'établissement public chargé d'élaborer le SCOT ? Cela complexifie fortement les procédures. J'y suis défavorable.

M. François Patriat. - Cela accroît la légitimité de la décision.

L'amendement n° 26 est rejeté.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Article(s) additionnel(s) avant Article 4

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

8

Définition des projets d'implantation commerciale soumis au respect des conditions fixées par le DAC.

Adopté

M. PATRIAT

26

Double instruction des permis de construire pour les implantations commerciales.

Rejeté

Article 4

L'amendement rédactionnel n° 9 est adopté.

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 4

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

9

Rédactionnel.

Adopté

Article 4 bis

L'amendement rédactionnel n° 10 est adopté

L'article 4 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 4 bis

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

10

Rédactionnel.

Adopté

Article 5

M. Dominique Braye, rapporteur. - Cet amendement clarifie la rédaction de l'article relatif aux commissions régionales d'aménagement commercial. Nous en modifions la composition de neuf membres en accroissant le nombre d'élus et en ne prévoyant qu'un seul représentant de l'État au lieu de deux. Est également prévue la présence du président de l'EPCI.

M. François Patriat. - Pourquoi, dès lors, avoir refusé la double instruction ?

L'amendement n° 11 est adopté.

M. François Patriat. - Nous comblons par cet amendement n° 30 un vide juridique. Rien n'est prévu pour contrôler les parties du domaine public affecté aux gares, ni pour l'implantation des commerces de véhicules automobiles ou de motocycles en centre-ville.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Où est le problème ? Les gares sont des zones de centralité. En outre, la surface des surfaces commerciales est limitée à 2 500 m².

M. Daniel Raoul. - Les élus n'ont pas de droit de regard sur ces bâtiments et ces surfaces commerciales qui impactent la vie des quartiers.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Les garagistes ont du mal à s'installer car les constructeurs imposent aux concessionnaires bien des exigences. Faut-il leur imposer de nouvelles contraintes ? Je serais favorable à l'amendement si la partie consacrée aux garages était supprimée.

M. Daniel Raoul. - Nous modifions l'amendement en ce sens en conservant la référence aux commerces situés dans les gares.

L'amendement n° 30 rectifié est adopté.

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'amendement n° 40 est contraire à l'esprit des SCOT.

L'amendement n° 40 est rejeté.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Je reconnais que l'arrondissement n'est peut-être pas la meilleure formule, mais l'aire de chalandise proposée comme référence par l'amendement n° 28 est une notion économique et non juridique. Elle peut avoir différentes dimensions. C'est la porte ouverte à d'innombrables contentieux et j'y suis défavorable.

L'amendement no 28 est rejeté.

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'amendement n° 29 est satisfait puisqu'il propose également que l'Etat ne dispose que d'un représentant dans la CRAC.

L'amendement no 29 est adopté.

L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission sur l'article 5 est retracé dans le tableau suivant :

Article 5

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

11

Clarification et regroupement des dispositions relatives à la CRAC.

Adopté

M. PATRIAT

30

Soumission de l'implantation des commerces situés dans les gares en centre-ville à la CRAC.

Adopté avec modification

M. FOUCHÉ

40

Modification des règles de composition de la CRAC.

Rejeté

M. PATRIAT

28

Modification des règles de composition de la CRAC.

Rejeté

M. PATRIAT

29

Réduction du nombre de représentants de l'Etat dans la CRAC.

Adopté

Article 5 bis

L'article 5 bis demeure supprimé.

Division additionnelle avant l'article 6

L'amendement rédactionnel n° 49 est adopté. La division additionnelle est insérée.

Division(s) additionnelle(s) avant Article 6

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

49

Insertion d'une division additionnelle intitulée : « Chapitre 3 - Dispositions diverses ».

Adopté

Article 6

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'amendement n° 12 rassemble au sein de l'article les diverses modifications au code de l'urbanisme dispersées dans le texte.

L'amendement n° 12 est adopté.

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'ensemble de la typologie des destinations de locaux relève de la partie réglementaire du code, non de sa partie législative. Je demande le retrait de l'amendement n° 43. A défaut, avis défavorable.

L'amendement n° 43 est rejeté.

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'amendement n° 44 prévoit un pourcentage de réalisation de commerces pour les opérations d'aménagement, de construction ou de réhabilitation dans le règlement du PLU, à l'instar du pourcentage de logements sociaux prévu dans la loi SRU. C'est une excellente idée. L'avis est favorable sous réserve, toutefois, d'une rectification.

M. Gérard Cornu. - Attention : les opérations d'aménagement sont lourdes, de nombreux hectares sont en jeu...

M. Dominique Braye, rapporteur. - Il s'agit seulement d'une possibilité !

M. François Patriat. - Nous voterons l'amendement n° 44.

L'amendement n° 44 est adopté.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Délimiter les secteurs géographiques précis où s'applique une destination exclusive commerce ou artisanat pour des locaux situés en rez-de-chaussée d'un immeuble dans le règlement du PLU est une excellente idée. La rédaction plus large du 2° de l'article 6 telle que proposée par mon amendement n° 12 l'autorise. Je propose donc le rejet de l'amendement n° 45 qui est satisfait.

L'amendement n° 45 est rejeté.

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'amendement n° 34 instaure une révision simplifiée du PLU pour les habitations classées en zone agricole destinées à être reclassées en zone Nh du PLU. Je comprends parfaitement le problème que cherche à résoudre Yannick Botrel. Pour autant, l'amendement est un cavalier. Son but affiché dans l'objet - la révision simplifiée - ne correspond pas au dispositif de cet article qui repose sur la modification simplifiée du PLU. Il ne traite pas d'urbanisme commercial. Et, enfin, les zones Nh n'existent pas dans la partie législative du code de l'urbanisme.

M. François Patriat. - Nous laissons l'auteur défendre seul cet amendement...

M. Yannick Botrel. - Soit, l'amendement est hors sujet. Pour de multiples raisons, il n'a pas été retenu dans le cadre de la proposition de loi de simplification du droit. Pour répondre aux difficultés rencontrées sur le terrain, le Grenelle II a autorisé le « rezonage » des habitations des agriculteurs qui changent de métier ou partent en retraite à la condition que le PLU soit révisé. Or la révision complète du PLU est un processus extrêmement long (3 ans), coûteux et chronophage si bien qu'à son terme, il faut tout recommencer car la situation a évolué. De surcroît, cela rend le PLU peu opérationnel.

M. Gérard Cornu. - Qu'est-ce qu'une zone Nh ?

M. Yannick Botrel. - Une zone naturelle avec de l'habitation.

M. Jean-Paul Emorine, président. - Le problème est simple : dans la zone agricole, délimitée par le PLU, ne peuvent construire que les personnes ayant une activité agricole. Si vous rendez la zone constructible, elle le sera pour tout le monde ! (M. Yannick Botrel le réfute.) En droit, on ne peut pas créer des catégories spécifiques pour les agriculteurs et les enfants d'agriculteurs....

M. Daniel Raoul. - Cela revient à encourager le mitage !

M. Yannick Botrel. - Non ! L'amendement crée une zone autour d'une habitation, non une nouvelle zone encourageant les habitations isolées. La loi Grenelle II l'autorise, mais la procédure prévue est trop lourde. Il faut tenir compte de la situation existante.

L'amendement n° 34 est rejeté.

L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission sur l'article 6 est retracé dans le tableau suivant :

Article 6

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

12

Rédactionnel.

Adopté

M. CÉSAR

43

Insertion, au niveau législatif, de la typologie des destinations de locaux qui figurent actuellement dans la partie règlementaire du code.

Rejeté

M. CÉSAR

44

Possibilité dans le règlement du Plan Local d'Urbanisme de prévoir pour des opérations d'aménagement, de construction ou de réhabilitation un pourcentage de réalisation de commerces.

Adopté avec modification

M. CÉSAR

45

Possibilité dans le règlement du Plan Local d'Urbanisme de délimiter des secteurs où s'applique une destination exclusive de commerce ou artisanat en rez-de-chaussée d'immeuble.

Rejeté

M. BOTREL

34

Possibilité de reclasser en zone Nh les habitations classées en zone agricole à travers une révision simplifiée du PLU.

Rejeté

Article 7

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'amendement n° 14 réécrit l'article en assurant les coordinations nécessaires.

L'amendement n° 14 est adopté.

L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 7

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

14

Rédactionnel.

Adopté

Article 7 bis

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'amendement n° 46, par cohérence, propose de supprimer l'article 7 bis, ses dispositions ayant été transférées à l'article 6.

L'amendement n° 46 est adopté.

L'article 7 bis est supprimé.

Article 7 bis

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

46

Suppression de coordination.

Adopté

Article 8

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'amendement de réécriture n° 15 rassemble au sein d'un seul article les dispositions modifiant le code de commerce qui figuraient aux articles 5 et 7 bis.

L'amendement n° 15 est adopté.

M. François Patriat. - Les amendements nos 17, 18 et 19 mettent en place un mécanisme afin de gérer la période transitoire. L'objectif est d'éviter que, la confusion régnant, certains continuent de bénéficier d'effets d'aubaine et que les enseignes se multiplient entre 2011 et 2014 dans les centres-villes.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Cette proposition de loi abroge l'article 752-1 du code du commerce, autrement dit la CDAC et la CNAC sont supprimées. Vous ne pouvez pas modifier les pouvoirs d'instances supprimées au profit de la CRAC.

M. Daniel Raoul. - Soit ! Mais que se passera-t-il durant la période transitoire ?

M. Jean-Paul Emorine, président. - Ce sera la CRAC qui sera compétente.

M. Dominique Braye, rapporteur. - Dès que la loi entrera en vigueur, la CNAC et les CDAC disparaitront pour être remplacées par une CRAC consultative et une CRAC exécutive. Cette dernière s'effacera après 2014.

L'amendement n° 17 est rejeté, de même que les amendements nos 18 et 19.

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'amendement n° 37 propose que les chambres de commerce et d'industrie soient également destinataires des données de l'Observatoire national de l'aménagement commercial via l'Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie (ACFCI). Les chambres consulaires, par définition, sont tenues informées puisqu'elles sont les principales exécutrices de l'Observatoire.... Je propose le rejet.

M. Gérard Cornu. - La réponse apportée par l'amendement n'est pas bonne - il ne faut pas passer par l'ACFCI -, mais le problème soulevé doit être réglé. Auparavant les chambres consulaires étaient tenues au courant des dossiers, parce qu'elles étaient membres des CDAC. Ce ne sera plus le cas. (M. Daniel Raoul approuve.)

L'amendement n° 37 est rejeté.

M. Dominique Braye, rapporteur. - L'avis est également défavorable à l'amendement n° 38 qui traite de la composition et des missions des observatoires régionaux du commerce, ce qui relève du domaine réglementaire.

L'amendement n° 38 est rejeté.

L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission sur l'article 8 est retracé dans le tableau suivant :

Article 8

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. BRAYE, rapporteur

15

Rédactionnel.

Adopté

M. PATRIAT

17

Modification de l'article L. 752-1 du code de commerce, afin d'accorder des règles particulières d'implantation commerciale dans le coeur des villes.

Rejeté

M. PATRIAT

18

Modification de l'article L. 752-1 du code de commerce, pendant la période transitoire.

Rejeté

M. PATRIAT

19

Modification de l'article L. 752-1 du code de commerce pour fixer un seuil unique de 300 m² au-delà duquel le changement de secteur d'activité est soumis à autorisation.

Rejeté

M. NÈGRE

37

Transmission des données recueillies par l'Observatoire national d'équipement commercial à l'Assemblée française des chambres de commerce et d'industrie

Rejeté

M. NÈGRE

38

Précision sur la composition et les missions des observatoires régionaux du commerce.

Rejeté

Les articles 8 bis et 9 sont adoptés sans modification.

M. François Patriat. - Nous avons pris bonne note du travail accompli par le rapporteur et de sa volonté de réguler l'urbanisme commercial. Pour autant, la confusion entre permis de construire et permis de commerce est inacceptable. Sur les seuils, l'opération n'est pas valable en droit européen ; il faut rétablir un seuil de 500 m². Les mêmes causes produiront les mêmes effets. Nous voterons contre.

La commission adopte l'ensemble de la proposition de loi telle qu'elle ressort de ses travaux, le groupe socialiste votant contre.

Adaptation de la législation au droit communautaire - Désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire

M. Jean-Paul Emorine, président. - Nous devons procéder à la désignation des membres de la commission mixte paritaire qui se réunira le mardi 21 décembre 2010 à l'Assemblée nationale pour examiner les dispositions restant en discussion sur la proposition de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne.

Pour les titulaires, je vous propose de désigner :

- pour le groupe UMP : MM. Bruno Sido, Pierre Hérisson et moi-même ;

- pour le groupe UC : M. Marcel Deneux ;

- pour le groupe socialiste : MM. Daniel Raoul et Roland Ries ;

- pour le groupe CRC : Mme Evelyne Didier.

Pour les suppléants :

- pour le groupe UMP : MM. Charles Revet, Jackie Pierre, Daniel Laurent et Gérard Cornu ;

- pour le groupe socialiste : Mme Bariza Khiari et M. Roland Courteau ;

- pour le groupe RDSE : M. Robert Tropeano.

Il en est ainsi décidé.

Adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques - Demande de saisine et nomination d'un rapporteur pour avis

Puis, la commission demande à être saisie pour avis du projet de loi n° AN 2789 (XIIIe lég.) portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques, et désigne M. Bruno Retailleau rapporteur pour avis.

Organismes extra-parlementaires - Désignation de candidats

Ensuite, la commission procède à la désignation de candidats à la nomination du Sénat pour siéger au sein de la Commission nationale d'évaluation des politiques de l'État outre-mer :

- MM. Georges Patient et Daniel Marsin en qualité de membres titulaires ;

- MM. Claude Lise et Michel Magras en qualité de membres suppléants.

La commission désigne également M. Daniel Raoul candidat titulaire à la nomination du Sénat pour siéger au sein du Comité stratégique pour l'élaboration et le suivi de la stratégie nationale de la recherche énergétique.

Compteur électrique évolué - Communication

Enfin, la commission entend la communication de M. Ladislas Poniatowski sur le compteur électrique évolué.

M. Ladislas Poniatowski. - Lors de l'examen de la loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité (NOME), nous nous étions engagés, le président Jean-Paul Emorine et moi-même, à tenir un débat sur le sujet du compteur électrique évolué. Ce débat a pris la forme d'une table ronde organisée dans le cadre du groupe d'études de l'énergie, le mercredi 1er décembre 2010. Ma communication d'aujourd'hui est donc largement alimentée par les propos tenus à l'occasion de cette table ronde, qui a réuni une dizaine d'intervenants de qualité. Elle vise à déterminer quels sont les points forts, les points faibles et les points mitigés du compteur évolué.

Je voudrais commencer par faire simplement deux rappels. Premièrement, la mise en place de compteurs électriques évolués n'est pas un choix français, mais résulte d'une obligation européenne, posée par trois directives intervenues successivement dans le domaine du marché de l'énergie. Deuxièmement, ces obligations européennes ont été confirmées par les lois « Grenelle I » et « Grenelle II », qui ont posé le principe de la diffusion des compteurs électriques évolués afin de permettre aux consommateurs de maîtriser leur demande d'énergie.

En ce qui concerne le contexte économique, le compteur évolué est une étape nécessaire pour la mise en place de réseaux « intelligents » visant à répondre à trois défis :

- le défi de la hausse continue de la consommation d'électricité, qui aboutit à une saturation des réseaux de transport et de distribution ;

- le défi des pointes de consommation, toujours plus fréquentes et plus élevées. Nous avons battu hier soir à 19H00, avec une pointe à 96,3 mégawatts, le record précédent de janvier 2010. Ce problème de la pointe ne pourra trouver de solution que dans le développement de l'effacement de consommation, et notamment de l'effacement « diffus » chez les consommateurs domestiques ;

- le défi du développement des énergies renouvelables, qui doivent être intégrées au réseau, alors qu'elles ont un caractère souvent intermittent et décentralisé.

Lors de la table ronde, la présidente du directoire d'Electricité Réseau Distribution France (ERDF), Mme Michèle Bellon, nous a fait un premier bilan de l'expérimentation en cours du compteur Linky. Elle nous a rappelé que cette expérimentation se déroule dans une zone urbaine, le nord de Lyon et de sa banlieue, et dans une zone rurale, le département de l'Indre-et-Loire en dehors de l'agglomération de Tours. Elle n'a pas cherché à nous cacher les difficultés rencontrées, tout en s'estimant satisfaite que le taux de réclamation soit inférieur à 1 %. Certains compteurs Linky ont pris feu, mais dans une très faible proportion de 7 pour 200 000 installés, qui est identique à celle observée pour les compteurs ordinaires.

Parmi les points faibles du compteur électrique évolué, figure la question de la confidentialité des données à caractère personnel qu'il sera amené à traiter. Plus de la moitié des compteurs sont installés à l'extérieur des logements, donc accessibles à des tiers. Les informations transmises à distance peuvent permettre de déceler ce qui se passe chez un particulier, s'il est chez lui ou absent, combien de personnes partagent son domicile, et jusqu'à son rythme de vie quotidien.

Parmi les points forts, personne ne conteste que le compteur évolué sera d'une grande utilité pour améliorer le réseau de distribution. Les pannes seront décelées beaucoup plus vite, et réparées plus facilement. L'introduction d'intelligence dans les réseaux permettra de mieux y insérer les énergies renouvelables, photovoltaïque et éolienne, qui ne produisent pas toujours de l'électricité là et quand on en a besoin.

Parmi les points mitigés, je citerai la contribution du compteur évolué à la maîtrise de la demande d'énergie. Faut-il aller plus loin que le compteur Linky, plutôt rudimentaire ? Il n'est pas vrai que le consommateur surveillera lui-même sa consommation pour modifier son comportement. Nous avons besoin d'un dispositif qui donne davantage d'informations. L'ADEME et les fournisseurs alternatifs sont plutôt favorables à la superposition de deux compteurs : un compteur de base, aux fonctions minimales, et un compteur plus intelligent, permettant de faire réellement de la maîtrise de la demande d'énergie. Mais il faut raisonner ici en termes de coûts et d'avantages, car ce sera forcément plus cher. Le coût d'une généralisation de Linky est estimé à 4 milliards d'euros pour 35 millions de foyers. Mais il n'apporterait pas beaucoup au consommateur en termes de maîtrise de la demande d'énergie. Les gains à réaliser sont minimes pour chacun des consommateurs, mais importants en effet de masse.

Pour conclure, je souhaite que le bilan de l'expérimentation Linky que réalisera la CRE nous soit présenté. Les consommateurs, EDF et les fournisseurs alternatifs devront être consultés. Et le Parlement doit avoir aussi son mot à dire.

M. Jean-Paul Emorine, président. - Le compteur évolué permettra bien la relève à distance ?

M. Ladislas Poniatowski. - Tout à fait. Ce sera d'ailleurs une source d'économies importantes pour ERDF. Mme Michèle Bellon a bien précisé, lors de la table ronde, que ses salariés vont devoir changer de métier, abandonner la « relève à pied » pour se mettre à l'informatique.

M. Charles Revet. - Mon syndicat de distribution d'eau pratique déjà la relève à distance. La technologie du compteur évolué permet au consommateur, même s'il ne surveille pas quotidiennement sa consommation, d'être alerté en cas de fuite, en détectant une surconsommation anormale.

M. Ladislas Poniatowski. - En matière d'électricité, l'accident ce n'est pas la fuite, mais la coupure.

M. Jackie Pierre. - Le particulier devra-il-payer pour disposer du compteur électrique évolué ?

M. Ladislas Poniatowski. - Il est prévu que le financement soit imputé sur le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE), donc à terme sur le consommateur. Le coût moyen du compteur Linky est de l'ordre de 110 euros par unité, pose comprise. Il sera étalé sur une durée de vingt ans, soit une charge de 1 euro par mois.

M. Gérard Bailly. - Je m'interroge sur la modulation des prix de l'électricité. Nous avons battu hier un record pour la pointe de consommation. Le système EJP (Effacement Jour de Pointe) ne me paraît pas efficace, il faudrait réviser ses plages horaires. Mais, surtout, il nous faut cesser le gaspillage.

M. Ladislas Poniatowski. - Vous avez choisi le mot juste ! C'est le gaspillage qu'il faut éviter. La bonne réponse à la pointe, ce n'est pas de produire plus, mais de modifier le comportement de tous les consommateurs, particuliers comme entreprises. L'effacement chez les industriels fonctionne, car il leur rapporte suffisamment financièrement. Mais il ne rapportera jamais beaucoup aux particuliers. Il faut néanmoins parvenir à mettre en place l'effacement « diffus » dans 35 millions de foyers, pour répondre au problème de la pointe.

M. Jean-Paul Emorine, président. - Chers collègues, je vous propose de donner votre accord à la publication d'un rapport d'information sur le compteur électrique évolué, à la suite de la communication de M. Ladislas Poniatowski. Et j'ai bien noté qu'il nous faudra entendre la Commission de régulation de l'énergie (CRE) au moment où elle aura fait son évaluation de l'expérimentation Linky.