Mardi 13 novembre 2012

- Présidence de M. Raymond Vall, président -

Loi de finances pour 2013 - Mission « Politique des territoires » - Audition de Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement

La commission auditionne Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement sur la mission « Politique des territoires » du projet de loi de finances pour 2013.

M. Raymond Vall, président. - C'est un grand plaisir de vous recevoir, madame la Ministre. Nous allons vous écouter avec d'autant plus d'attention que vous nous aviez mis l'eau à la bouche lors de votre première audition, au mois de juillet dernier.

Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement. - Sans rompre avec les politiques antérieures, ce budget intermédiaire marque en faveur de l'égalité des territoires l'inflexion souhaitée par le président de la République. Après une période interventionniste, voire parfois autoritaire, a prévalu au cours des dix dernières années l'idée que l'aménagement du territoire se réduisait tantôt à la juxtaposition de politiques de compétitivité, tantôt à des mesures d'accompagnement ou d'adaptation. La concentration des moyens sur les territoires les plus performants a ainsi mis à mal notre cohésion nationale. Les travaux actuellement menés par des chercheurs, sous l'autorité d'Eloi Laurent, sur l'égalité des territoires montrent en effet que le rééquilibrage entre les régions s'accompagne d'une aggravation des inégalités au sein du territoire, voire d'une métropole : l'inégalité devient plus proche, moins supportable. Grâce à la politique de l'égalité des territoires, chacun d'entre eux participera pleinement à l'effort de redressement de notre pays. Pas de situation univoque, pas de solution unique, tel est l'état d'esprit du ministère de l'égalité des territoires.

Le budget 2013 du programme  « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » s'inscrit dans cette ambition. Malgré l'impératif de réduction des dépenses publiques, ses 263 millions d'euros (- 6,5 %) porteront une politique volontariste et de transition.

Une grande partie des dispositifs et politiques d'aménagement du territoire est maintenue en 2013, malgré des évolutions sur les objectifs et une réflexion plus globale sur une meilleure articulation entre les primes et autres zonages. Nous continuerons, par exemple, d'accompagner les villes qui ont souffert ces dernières années du retrait des implantations territoriales de l'armée, en engageant près de 13 millions d'euros pour abonder les contrats de site de défense et les plans locaux de redynamisation. La prime à l'aménagement du territoire est maintenue à hauteur de 40 millions d'euros, avant d'être réformée dès l'an prochain, dans une optique de structuration des territoires et de renforcement du tissu économique local.

Les pôles de compétitivité sont dotés de 6 millions d'euros. Comme l'a annoncé le Premier ministre lors du séminaire de compétitivité, leurs objectifs évolueront vers la recherche d'un effet d'entraînement maximal sur l'économie, et en particulier sur le tissu de PME locales. Cette évolution garantira une meilleure diffusion du développement économique sur les territoires. Cela n'a pas toujours été le cas : des études montrent en effet que si les pôles ont eu parfois un effet d'entraînement sur certaines entreprises, et particulièrement les grandes, leur impact sur les territoires environnants a été faible.

La politique des pôles d'excellence rurale engagée en 2009 ira également à son terme. Depuis 2009, 263 pôles ont été labellisés.

Une nouvelle étape de la contractualisation va s'ouvrir. Les contrats de plan État-régions (CPER) sont dotés de 119 millions d'euros de crédits en 2013. S'il importe de garantir une stabilité aux porteurs de projets et acteurs territoriaux, nous travaillons d'ores et déjà sur la contractualisation 2014-2020. Nous n'excluons pas de réfléchir sur la périodicité des contrats, voire même sur leur niveau, ni de développer les contrats de territoires, qui sont de bons outils de travail avec les collectivités locales pour le maillage des services publics. Nous avons également à réaliser un travail de mise en cohérence des nombreux zonages existants, des différents échelons de collectivités et de l'État, en particulier dans le domaine du développement économique.

Concernant les services publics, un bouquet adapté doit être offert à l'ensemble de nos concitoyens : si la réponse n'a pas à être identique sur l'ensemble du territoire français, il est nécessaire de conjuguer une présence physique de proximité, une meilleure coopération entre les prestataires, quel que soit le niveau de collectivité, et un recours mieux concerté au télé-service. Parce que la présence humaine est déterminante, 10 millions d'euros sont consacrés au financement des maisons de santé pluridisciplinaires. L'objectif est de créer 250 maisons de ce type d'ici 2015. Dix millions supplémentaires iront au déploiement d'une politique ambitieuse de rétablissement de l'accès aux services publics sur tous les territoires, pour tous les habitants. Nous nous appuierons sur l'expérimentation « plus de services au public », menée dans 22 départements par la Datar en association avec les principaux opérateurs du service public.

La phase de transition nous aidera à optimiser notre budget grâce à une réflexion sur les changements en cours dans notre société. A cette fin, les crédits nécessaires aux missions de prospective et d'étude dévolues à la Datar sont pérennisés à hauteur de 3,5 millions d'euros. De même, la poursuite du programme Territoires 2040, qui vise à anticiper et mieux comprendre les dynamiques territoriales est garantie.

Deux échéances majeures attendent la Datar au cours de la période 2014-2020. La nouvelle génération de contrats régionaux et, sans doute, de contrats de territoire, se développera sur la base d'une définition des priorités partagée entre l'État et les collectivités ; elle pourrait nécessiter un travail législatif. Quant à la négociation des fonds européens, la concertation menant à l'élaboration de l'accord de partenariat devrait être lancée d'ici peu.

L'hypothèse d'un commissariat général à l'égalité des territoires que la commission Wahl teste en ce moment auprès des élus, des associations et des acteurs économiques, vise à repenser, trente ans après le début de la décentralisation, les liens entre l'État et les collectivités territoriales. L'État doit garantir son rôle de mutualisation et d'animation, tout en se situant dans une relation d'égalité avec les collectivités territoriales.

Tel est l'état d'esprit qui a présidé à l'établissement de ce budget 2013 : il s'agit de réévaluer nos outils sans brusquerie, d'agir pour nos territoires et de prévenir les évolutions à venir.

M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis (mission « Politique des territoires »). - La politique d'aménagement du territoire est au coeur des préoccupations du Sénat. Cette politique déborde le strict cadre de la mission budgétaire politique des territoires qui demeure modeste : elle gagnerait à être rassemblée dans une mission globale, incluant notamment les crédits de la mission logement.

Premier constat : les crédits d'engagement et de paiement sont en baisse d'environ 10 %. Vous qualifiez ce budget d'intermédiaire, mais n'annoncez rien de nouveau : ce n'était peut-être pas si mal avant....

M. Charles Revet. - Il faut le dire !

M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis. - Lors de votre audition du 10 juillet dernier, vous déploriez que la politique d'aménagement du territoire soit dépourvue d'objectif clair, parlant même d'abandon et de relégation. On aurait pu penser que passant aux actes, vous nous annonceriez une véritable révolution, et qu'enfin la politique d'égalité des territoires sortirait de l'ombre. Apparemment, ce n'est pas si facile.

Les autorisations d'engagement du FNADT (Fonds nationale d'aménagement et de développement du territoire) baissent de 6 %. Avez-vous l'intention de conserver cet instrument et, sinon, que lui substituerez-vous ?

L'État est muet quant à l'avenir des CPER. Seront-ils prorogés de deux années supplémentaires ?

L'Agence française pour les investissements internationaux (AFII), qui facilite l'installation des entreprises étrangères dans les territoires, a connu des succès encourageants en 2011 : 700 investissements réalisés pour 28 000 emplois sauvegardés. La baisse des crédits ne risque-t-elle pas d'affecter ces résultats ?

Comment comptez-vous accélérer le déploiement des 2 milliards d'euros prévus pour l'économie numérique au titre du grand emprunt ? A ce jour, seulement 267 millions ont été engagés.

Les communautés de communes rurales reçoivent 19 euros par habitant, contre 105 euros pour les communautés urbaines. Ce différentiel est-il conforme à votre vision de la justice et de l'égalité ?

Enfin, pourquoi avoir créé une commission pour la création d'un commissariat général à l'égalité des territoires et une mission de réflexion sur l'égalité des territoires ? Clemenceau disait que pour enterrer un projet, rien n'égale une commission. Ne vaudrait-il pas mieux innover ?

Mme Cécile Duflot, ministre. - Si j'avais bouleversé en quelques semaines une politique lourde d'implication pour les territoires, vous auriez pu légitimement m'accuser de jouer les apprenties sorcières.

M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis. - Je n'ai pas dit ça.

Mme Cécile Duflot, ministre. - Nous n'atteindrons la nouvelle frontière de l'égalité des territoires que dans le calme et le dialogue. Voilà pourquoi j'ai souhaité la mise en place de ces deux commissions. Travaillant avec les meilleurs spécialistes, la commission d'Eloi Laurent objectivera d'ici fin janvier les inégalités et évaluera les moyens à mettre en oeuvre. L'égalité des territoires, que ressentent de façon intuitive de nombreux élus locaux, rencontre en effet les préoccupations d'urbanistes, de géographes, d'économistes et de sociologues. Leur travail nous fournira les mots, les chiffres et les cartes dont nous avons besoin.

Quant au commissariat général, la Datar fêtera ses cinquante ans en février. Si elle avait été très rapidement transformée en DIACT, elle est tout aussi précipitamment revenue à son ancien statut. La rapidité ne dispense pas de méthode.... Que nous soyons amenés à nous retrouver dans quelques jours pour débattre une nouvelle fois de la loi de modernisation du foncier public et de la révision de la loi SRU prouve que le temps a aussi ses vertus. C'est pourquoi il ne m'a pas semblé opportun de chambouler l'intégralité des financements.

Ce budget s'accompagne d'une réflexion et je vous donne rendez-vous l'année prochaine : les choses auront évolué. J'entends en revanche votre proposition de rassembler autrement les crédits, cela fera partie de notre réflexion.

Il n'est pas question a priori de rallonger les actuels CPER, dont le taux de réalisation moyen atteindra 80 % fin 2013, ce qui est plutôt satisfaisant. Une nouvelle génération doit voir le jour pour la période 2014-2020.

La deuxième génération des pôles d'excellence rurale (PER) sera financée : nous avons 20 millions par an jusqu'en 2015.

Un cadre budgétaire contraint est douloureux, mais votre chiffre concernant le FNADT me semble excessif.

Enfin, nous demandons à l'AFII, dont les interventions ont été relativement concentrées, de déployer son action sur un plus grand nombre de régions.

M. Hervé Maurey. - Vous nous aviez effectivement mis l'eau à la bouche en juillet. Vous établissiez un constat sévère sur la politique d'aménagement du territoire. Je partageais en grande partie cette analyse, notamment sur son manque d'ambition, d'où ma déception devant ce budget qui déploie les mêmes outils avec moins de crédits. Comment faire mieux sans imagination ni nouveaux outils ?

Autre déception : vous n'avez pas eu un mot pour l'économie numérique, pas même en réponse à une question du rapporteur. C'est dire à quel point ce sujet pourtant essentiel pour l'aménagement du territoire semble absent de vos préoccupations. Il n'est toujours pas question de mettre un euro dans le Fonds d'aménagement numérique du territoire et les amendements déposés en ce sens à l'Assemblée nationale ont été rejetés par la majorité avec des avis défavorables du gouvernement. J'ai bien peur que dans ce domaine, malgré les objectifs ambitieux du président de la République, ce gouvernement ne soit pas plus volontaire que le précédent.

Les maisons de santé auront des crédits supplémentaires : très bien, mais elles ne sont pas la panacée. A quoi sert-il d'élever des murs si l'on manque de médecins ? Le groupe de travail présidé par Jean-Luc Fichet et dont je suis rapporteur, recherche des solutions à ce problème crucial en matière d'aménagement du territoire. Peut-être attendez-vous nos conclusions ?

Enfin, quelles seront les missions du futur Commissariat général à l'égalité des territoires ? S'agit-il de la Datar sous un autre nom ou d'un instrument plus pertinent aux missions différentes ?

M. Michel Teston. - D'après le bleu budgétaire, assurer le développement équilibré et solidaire des territoires suppose d'éviter la fracture numérique et de favoriser le déploiement des réseaux. La présentation du programme 112 indique que la Datar doit y contribuer. Nous savons tous qu'il faut revoir le programme national très haut débit, et que la ministre Fleur Pellerin mène une réflexion. Dans ces conditions, le délégué interministériel pourrait-il venir exposer à notre commission les orientations de la Datar sur un sujet auquel le Sénat travaille depuis des années ?

M. Jean Bizet. - A quand un lissage du différentiel entre les dotations des zones rurales et des zones urbaines ?

Vous avez souhaité, dans le cadre des Scot, qu'il n'y ait pas d'étalement urbain. Quid de la surdensité urbaine, qu'il faudrait quand même revoir ?

M. Marcel Deneux. - Vous avez tenu des propos sévères sur les pôles de compétitivité. Celui auquel j'appartiens, qui compte deux cents adhérents, s'en est ému. Pourquoi ces critiques ? Quel est votre programme ?

Mme Odette Herviaux. - J'aurais aimé que M. Pointerau nous fasse part de ses récriminations il y a quelques années... Est-il possible de disposer d'un rapport faisant le bilan des pôles d'excellence rurale ?

M. Alain Le Vern. - Les CPER sont à leur plus mauvais taux de réalisation : en ayant signé trois, je parle en connaissance de cause. Mal ficelés, souvent surdimensionnés en termes de grande infrastructure, ils ont en outre subi la crise. Vous avez demandé aux préfets de réaliser les diagnostics territoriaux dans le cadre de l'élaboration des programmes européens 2014-2020. Il me semble sage de ne pas prolonger les contrats actuels et de repartir sur une base plus solide de 2014 à 2020. Les régions qui se verront confier la cession des fonds européens pourront ainsi procéder par addition des fonds européens et non par substitution comme dans la séquence précédente. Il faut bâtir des contrats sur ce qu'il est possible de réaliser. Le précédent président de la République avait promis 25 milliards d'euros pour le numérique. Là aussi, nous avons besoin d'un discours de vérité et de faisabilité, et les nouveaux contrats peuvent y contribuer.

M. Ronan Dantec. - Ne soyons pas déçus alors que la ministre nous annonce que nous allons prendre le temps de travailler ensemble. Ma seule question est : comment ?

Mme Cécile Duflot, ministre. - Je vous propose d'ores et déjà une réunion avec Thierry Wahl, qui préside la commission pour la création du Commissariat général à l'égalité des territoires. Il vous présentera ses premiers travaux et entendra vos attentes concernant la politique d'égalité des territoires.

M. Raymond Vall, président. - Merci, nous y sommes sensibles.

Mme Cécile Duflot, ministre. - Différents scenarios sont envisageables pour le haut débit. Parmi les missions possibles du Commissariat général à l'égalité des territoires, on peut imaginer qu'il détienne un outil pour piloter le déploiement des réseaux, en appui des collectivités locales qui en sont les initiatrices. S'il ne s'agissait que de rebaptiser la Datar, ce serait déjà fait ! Une mission interministérielle a été lancée avec Fleur Pellerin ; elle prendra des décisions en février. La question est en effet déterminante pour l'égalité des territoires : comme je l'ai dit hier à l'intention de l'European Mountain ICT Forum, l'absence de desserte en haut débit pourrait aggraver la fracture territoriale. A l'inverse, la redéfinition des installations constitue un outil majeur pour l'aménagement du territoire. L'installation du très haut débit favoriserait une modification des usages : c'est pourquoi, pour aller au delà de la question des opérateurs et de la fibre, j'ai décidé de confier une mission sur les usages à Claudy Lebreton.

Enfin, je suis favorable à un grand débat sur la péréquation. J'entends, dans d'autres enceintes, des élus urbains expliquer que les collectivités demandant une plus grande mutualisation sont celles qui ont la pression fiscale la plus faible : je les inviterais volontiers à participer à des états généraux sur la péréquation. Que tout le monde prenne place autour de la table pour que le débat ait lieu.

M. Charles Revet. - Avec des chiffres.

Mme Cécile Duflot, ministre. - J'en ai parlé hier soir avec le Premier ministre.

M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis. - La péréquation verticale aussi !

Mme Cécile Duflot, ministre. - Les deux sont liées.

Enfin, je ne suis pas systématiquement critique sur les pôles de compétitivité : ils ont rempli une partie de leurs missions, de manière différenciée. Ce qui est certain, c'est que la diffusion sur les territoires, le relais attendu avec les PME, a fait défaut. C'est à cette capacité de diffusion que nous devons travailler.

Une analyse des PER est en cours : je vous informerai des résultats de nos travaux.

Monsieur Maurey, je me réjouis que vous ayez l'eau à la bouche, car nous sommes en cuisine, et les plats les meilleurs sont ceux qui ont longuement mijoté. Je me ferai un plaisir de vous inviter à une dégustation.

Le débat sur la péréquation nous fournira l'occasion d'évoquer la nouvelle frontière de l'égalité. La politique d'aménagement du territoire a jusqu'alors été prise entre deux tendances contradictoires, l'accélération de la décentralisation d'une part, et une politique autoritaire, très centralisatrice, principielle, de l'autre.

M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis. - On est passé d'une logique de guichet à une politique de projets.

Mme Cécile Duflot, ministre. - La politique de projets favorise les territoires les plus dynamiques.

M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis. - Pas les pôles d'excellence rurale !

Mme Cécile Duflot, ministre. - Nous en débattrons avec Thierry Wahl et sa commission.

Loi de finances pour 2013 - Mission « Écologie, développement et aménagement durables » - Audition de Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie

La commission auditionne Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, sur la mission « Écologie, développement et aménagement durables » du projet de loi de finances pour 2013.

M. Raymond Vall, président. - Nous sommes heureux d'accueillir Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie pour évoquer le budget de son ministère pour 2013, la mise en oeuvre de la Feuille de route pour la transition écologique adoptée à l'issue de la conférence environnementale et, sans parler d'urgence, comme mon homologue de l'Assemblée nationale, nous serions également heureux d'avoir des réponses concrètes sur les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique.

Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. - Nous mettons effectivement en oeuvre la Feuille de route sur la transition écologique issue de la conférence environnementale. Un certain nombre de décisions ont déjà été prises.

Le budget pour 2013 tient compte des difficultés financières du pays et de la nécessité d'atteindre notre objectif de réduction du déficit en 2013. Le ministère de l'écologie, qui n'est pas prioritaire, participe à l'effort de stabilisation globale des effectifs de la fonction publique décidé par le Premier ministre. Cette contrainte ne lui est pas nouvelle, puisque 400 millions d'euros ont été économisés ces deux dernières années sur ses crédits. Le grand ministère de l'écologie et du développement durable, incluant le logement, a perdu 6 300 postes entre 2008 et 2012.

En 2013, un budget de 8,4 milliards d'euros financera nos priorités. Ce montant préserve nos capacités d'intervention : nous mettrons en oeuvre les engagements de la Feuille de route pour la transition écologique tout en conduisant dans les meilleures conditions les actions de préservation des milieux, de sécurité des biens et des personnes, de prévention des pollutions, ainsi que de lutte contre le réchauffement climatique.

La biodiversité est l'une de nos priorités. L'enveloppe de 280 millions d'euros du programme « Paysage, eau et biodiversité » est sanctuarisée sur le triennal. Une Agence nationale de la biodiversité sera créée, dont le préfigurateur sera nommé très prochainement. La France sera ainsi dotée d'un outil complet et efficace en matière de connaissance de la biodiversité. L'Agence accompagnera les projets de protection de celle-ci, qu'il s'agisse de la biodiversité extraordinaire, sur des sites remarquables, ou ordinaire, sur l'ensemble du territoire, grâce notamment à la création de continuités écologiques ; elle assurera le pilotage national du réseau Natura 2000 et de la mise en oeuvre des trames verte et bleue ; l'Agence sera enfin l'interlocutrice privilégiée des collectivités locales, des opérateurs, ainsi que des associations de protection de l'environnement.

Les agences de l'eau inaugureront en 2013 leurs dixièmes programmes d'intervention. Leur plafond de dépenses a été porté à 13,3 milliards d'euros, contre 12,4 milliards d'euros pour les neuvièmes programmes. Ces moyens supplémentaires s'accompagnent d'un fléchage plus exigeant afin de concentrer les moyens sur l'atteinte des objectifs de la directive-cadre sur l'eau. Je me félicite tout particulièrement de cet arbitrage, dans la mesure où les financements accordés par les agences ont un réel effet de levier sur l'investissement local, et par conséquent sur l'activité et l'emploi dans les territoires.

Le budget dédié à la qualité de l'air augmente de 18 % dès 2013, et ce pour trois ans. Ces moyens supplémentaires iront à la révision du plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques et à l'amélioration des dossiers des plans de protection de l'atmosphère. Il s'agit d'un objectif majeur de santé publique, qui fait l'objet d'un contentieux européen.

En matière de prévention des risques, nous nous donnons d'abord les moyens d'accompagner l'accélération du rythme de prescription des plans de prévention des risques technologiques, en portant les crédits de 33,6 millions d'euros en 2012 à 44,6 millions d'euros en 2013, soit une augmentation d'un tiers. Nous mettons également en cohérence le financement de la prévention des risques naturels, en concentrant sur le Fonds de prévention des risques naturels majeurs un certain nombre d'actions auparavant disséminées entre le Fonds et le budget de l'État : l'article 64 du projet de loi de finances facilitera l'élaboration des plans de prévention des risques inondations à la suite de la tempête Xynthia et aux inondations dramatiques de 2010 dans le Var, qui feront l'objet d'un débat au Sénat lundi prochain.

Les travaux de l'Autorité de sûreté nucléaire entrepris à la suite de la catastrophe de Fukushima seront financés grâce à la reconduction de la dotation budgétaire consacrée à l'ASN. La fiscalité affectée à l'IRSN sera augmentée de 5 millions d'euros dès l'année prochaine, décision dont j'ai convaincu le ministre du budget la semaine dernière.

La réussite d'une politique tient à ses moyens, mais aussi au travail des agents de l'Etat dans tous les métiers de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Je salue leur sens du service public. Notre ministère a subi de nombreuses réorganisations ces dernières années, qui ont abouti à des transferts et des suppressions massives d'emplois. Le bilan qui m'a été remis par le conseil général de l'environnement et du développement durable le dit clairement : la RGPP a donné aux agents le sentiment d'un empilement de réformes n'obéissant à aucune logique si ce n'est comptable. J'ai entrepris à mon arrivée de remédier à la dégradation du dialogue social : un agenda social a été longuement discuté et élaboré avec les organisations syndicales. Les arbitrages que nous avons obtenus limiteront les suppressions d'emplois à 614 en 2013, en contrepartie d'un effort accru des opérateurs, soit l'inverse de la politique menée ces dernières années. Ce changement de logique s'accompagne d'un changement de méthode, dans le cadre du séminaire gouvernemental sur la modernisation de l'action publique. Nous devons redonner du sens au travail de chacun, et simplifier un certain nombre de procédures, comme y invitait le projet de loi dont Laurence Rossignol était le rapporteur la semaine dernière.

Le projet de loi de finances pour 2013 contient enfin deux mesures importantes relatives à la fiscalité écologique : le relèvement de la TGAP sur les polluants atmosphériques, et le durcissement du malus automobile. Nous avons décidé lors de la conférence environnementale d'engager un processus de réforme de la fiscalité écologique. La Feuille de route prévoit, entre autres, le réexamen des dépenses fiscales relatives à l'usage des énergies fossiles, l'évaluation de l'impact sanitaire et climatique de la fiscalité des véhicules, la remise à plat de la fiscalité des déchets ou encore la fiscalité des activités d'exploitation des ressources naturelles terrestres ou marines. S'y ajoute l'objectif, dégagé par le séminaire compétitivité, de débloquer 3 milliards d'euros en 2016. Une instance dédiée au dialogue sur ces questions avec l'ensemble des partenaires sociaux, des ONG, et des associations de consommateurs, sera bientôt installée.

M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. - En dépit d'un contexte difficile, vous avez su préserver un bon budget.

La responsabilité élargie des producteurs dans la gestion des déchets a fait ses preuves. Notre système de prélèvement sur les producteurs d'emballages et de transfert aux collectivités est l'un des meilleurs au monde. Le dispositif Eco-mobilier rencontre toutefois quelques difficultés. Nous souhaitons que le prélèvement sur les producteurs soit mis en oeuvre, afin de donner aux collectivités les ressources leur permettant de traiter ces déchets. Aujourd'hui, le coût de traitement repose, par l'intermédiaire de la taxe sur l'enlèvement des ordures ménagères, sur les habitants.

Malgré les pressions de la presse, nous déposons tous les ans des amendements sur Ecofolio, organisme agréé chargé de la gestion des papiers, Les quantités de papiers non soumises à contribution sont énormes, leur gestion est payée au niveau local. La contribution à laquelle je propose de soumettre tous les papiers est faible : il ne s'agit que de quelques centimes par journal, à soustraire des milliards d'euros d'aides à la presse. Un premier amendement y pourvoit. Un second amendement visera à inclure les magazines dans le champ de la contribution : faire participer Closer, Auto Plus ou Gala ne devrait pas poser de difficultés.

Mme Laurence Rossignol. - Et le Figaro !

M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. - Une partie de plus en plus importante de notre territoire subit des sécheresses inquiétantes. Or, la constitution des réserves d'eau pour irriguer les cultures à forte valeur ajoutée et maintenir le débit d'étiage des petits ruisseaux, est soumise à des procédures longues et complexes. Pourrait-on alléger les procédures, pour des réserves d'eau de faible volume ?

Certains déchets sont recyclés, d'autres incinérés ou traités en centres d'enfouissement technique. Tous peuvent être traités, si l'on met en place des systèmes de tri et de valorisation. La matière organique peut être traitée par méthanisation ou transformation en compost. Le système de tri mécano-biologique n'est toutefois pas apprécié par l'Ademe, ni par les instances européennes, qui négligent l'analyse du produit à l'issue du processus de traitement. Ne devrait entrer en ligne de compte que la conformité de celui-ci aux normes en vigueur : il nous faudrait y réfléchir pour trouver des solutions moins coûteuses et autorisant le recyclage de l'ensemble de ces produits.

Enfin, la TGAP a été modifiée à l'Assemblée nationale. Les territoires ruraux, qui peinent à mettre en place des centres de traitement thermique - même si je ne pense pas qu'il s'agisse là d'une solution d'avenir - ne devraient pas être pénalisés par une TGAP qui les frappe davantage que d'autres centres de traitement.

M. Vincent Capo-Canellas. - Vous avez annoncé des objectifs ambitieux. On peine toutefois à distinguer votre calendrier et le mode opératoire retenu pour les atteindre.

Quelle cohérence y a-t-il entre la conférence environnementale, la proposition de loi Brottes, le débat sur la transition énergétique et la loi sur la transition énergétique ? Quelle articulation faites-vous entre l'Agence nationale de la biodiversité - d'aucuns diront « une de plus ! » - et la loi-cadre à venir sur le même sujet ?

On n'y voit pas très clair sur la fiscalité écologique : quand la réforme sera-t-elle conduite ? Sur quoi portera-t-elle ? Quel cap se fixe-t-elle ?

M. Alain Fouché. - Cette année, la France a connu moins d'épisodes de sécheresse que les années précédentes. Ils risquent toutefois de se multiplier dans les années à venir. Une politique qui bloque les retenues d'eau peut être source d'inquiétude pour de nombreux Français.

Mme Odette Herviaux. - La diversification des agricultures, par exemple le passage d'une culture de maïs à une culture de légumes, reste très consommatrice d'eau.

Sur les huit contrats territoriaux qui devaient être signés dans le cadre du plan de lutte contre les algues vertes, seuls deux l'ont été, et deux sont en cours d'adoption, dans des conditions qui ne sont pas toujours satisfaisantes. Comment envisagez-vous l'avenir de ce plan ? Certains évoquent des mesures coercitives, ce qui m'inquiète car jusqu'à présent, ce plan a toujours ménagé un dialogue avec l'ensemble des parties prenantes.

Mme Évelyne Didier. - La REP-meubles nous préoccupe. Nous devrions examiner sérieusement la question du traitement des déchets, notamment organiques. La France a fait partie des pays favorables à un infléchissement d'une obligation de moyens vers une obligation de résultats en matière de qualité des composts : qu'en est-il aujourd'hui ? Puisqu'il faut investir à quinze ans, cessons de modifier les normes de TGAP tous les ans.

M. Ronan Dantec. - Ce matin, le Conseil supérieur de l'énergie a décidé de plafonner à 10 % les risques de fluctuation sur le tarif du photovoltaïque, de limiter à 10 % sa dégressivité annuelle, et a repoussé l'idée d'une baisse de 20 % des tarifs du photovoltaïque. Les décrets vont-ils suivre ces décisions ?

Quel est le calendrier de mise en place du Conseil national de la transition écologique, et quelle place y occuperont les parlementaires ?

M. Jean-Jacques Filleul. - L'agglomération tourangelle s'interroge sur la méthanisation : le processus coûte cher, mais apparaît indispensable dans la chaîne de traitement des déchets. Comptez-vous aider les collectivités à adopter cette technique, pour traiter en particulier les déchets ménagers ?

De même, beaucoup de communes s'interrogent sur les conséquences budgétaires très lourdes qu'emporte le plan d'action de lutte contre les fuites des réseaux d'eau, adopté dans le cadre de la directive-cadre sur l'eau. Pouvez-vous les rassurer ?

Enfin, les trois quarts des installations d'assainissement collectif sont en mauvais état. Leur remise à niveau représente un coût considérable pour les collectivités territoriales. Avez-vous travaillé sur ces sujets ?

M. Louis Nègre. - Votre budget passe de 8 milliards à 7,6 milliards d'euros, soit une diminution de 5 %. Vous avez annoncé une augmentation du programme 181 relatif à la prévention des risques : j'ai trouvé pour ma part qu'il passait de 306 à 284 millions d'euros. J'ai présidé la mission d'information sur les risques d'inondation : je sais l'importance des politiques de prévention, comme nous l'enseigne notamment le modèle hollandais.

Vous faites passer des messages contradictoires. Le budget de l'Ademe me semble aussi en baisse de 20 %. Bien que la Cour des comptes ait dénoncé le nombre excessif d'agences en France, l'Ademe joue, elle, un rôle majeur pour faciliter la pédagogie relative à la transition énergétique.

Il y a plus de 180 zones à bas niveaux d'émissions en Europe, mais aucune en France. Le maire de Paris, Bertrand Delanoë, a essayé d'agir pour l'amélioration de la qualité de l'air, cela a semblé tout sauf simple. Vous avez annoncé une augmentation de 18% de ce poste budgétaire : quelles mesures concrètes envisagez-vous, et que pensez-vous du péage urbain ?

Je propose que l'on fasse évoluer les péages des autoroutes pour favoriser les véhicules électriques. En outre, je milite pour le droit à la prise, en particulier dans les anciennes copropriétés.

Zéro euro pour le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, cela fait peu. Que proposez-vous pour rétablir un message positif en faveur de l'environnement ?

M. Michel Teston. - De nombreuses installations photovoltaïques ont été bloquées lors du moratoire de décembre 2010. La Feuille de route pour la transition écologique prévoit de soutenir la filière. Dans le prochain appel à projets, comment faire en sorte de traiter prioritairement les dossiers qui apparaissent particulièrement intéressants pour les territoires concernés ?

M. Marcel Deneux. - Un rapport d'étape du plan Ecophyto 2018 est prévu pour la fin 2012. J'attire votre attention sur le trend de consommation des produits phytosanitaires, qui varie au hasard des années climatiques. Dans le rapport d'étape, je vous invite à distinguer attentivement les herbicides des autres pesticides, ainsi que les types de cultures.

Pouvez-vous nous confirmer la position du gouvernement  sur la taxe carbone sur l'aviation civile? Le délai d'un an est-il maintenu ?

Le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) s'est vu doté d'une nouvelle compétence relative aux énergies renouvelables. Au regard de ce nouveau périmètre, son orientation apparaît peu claire et ses crédits insuffisants. Envisagez-vous de lui apporter des crédits supplémentaires au titre des investissements d'avenir ?

Enfin, nos régions rurales accusent un certain retard en matière d'assainissement individuel. Celui-ci atteint parfois trois ans sur la mise en oeuvre de la directive européenne. Les crédits des agences ne sont pas toujours bien orientés. Que comptez-vous faire ?

Mme Laurence Rossignol. - Le gouvernement évoque souvent l'idée d'une fiscalité écologique. Entendez-vous par là la seule fiscalité carbone, ou y incluez-vous les différentes niches fiscales qui continuent de se dissimuler dans la première partie de la loi de finances, et qui nuisent à l'environnement ? Un certain nombre d'amendements entendent y remédier, qu'ils traitent du biodiesel et du taux modulé de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TIPCE), ou de l'exonération de TIPCE au profit des raffineries sur les produits pétroliers autoconsommés. Pensez-vous que de telles dispositions restent utiles pour faciliter la transition énergétique, ou font-elles partie d'un grand chantier écologique à venir ?

M. Robert Navarro. - L'empilement de réglementations diverses, gérées par des services différents, rend difficile la réalisation de ce qui devrait être notre priorité : combler nos déficits, créer des richesses et des emplois. Nous devrions nous doter d'un système de gouvernance globale du risque, coordonné par l'État.

M. Alain Le Vern. - Je m'associe à la question relative aux tarifs de l'électricité.

L'Ademe veut initier des projets de méthanisation très vastes. Je rejoins Jean-Jacques Filleul sur la possibilité de soutenir les unités de transformation de matière organique sur le terrain. Prudence toutefois : l'importation du modèle allemand de cultures intensives destinées à alimenter des unités de méthanisation dans les campagnes aurait pour effet de dégrader la qualité de l'eau que nous buvons.

Personne ne calcule le bilan carbone de l'approvisionnement des grandes unités de production de chaleur par le bois. Or, on va parfois chercher du bois à 150, voire 300 kilomètres, ce qui est absurde. Il faudrait préciser la réglementation.

M. André Vairetto. - Le plafond de dépenses des agences de l'eau est passé de 12,4 milliards à 13,3 milliards d'euros. Toutefois, il faut encore accompagner la mise en conformité des stations d'épuration, la mise à niveau des réseaux d'assainissement en milieu rural, sans oublier les dispositifs individuels au travers des services publics d'assainissement non collectifs (SPANC) pour lesquels les diagnostics coûtent deux cent euros en moyenne : les deux tiers des installations ne sont pas aux normes et il faudra un milliard d'euros supplémentaire pour atteindre nos objectifs.

Dans quelles conditions les programmes d'action de prévention des inondations (PAPI) seront-ils renouvelés ? La nécessité d'un agrément par une commission nationale a rendu la procédure plus complexe. En outre, alors que des analyses sont réalisées au niveau local, la grille d'analyse nationale ne prend pas en compte la situation des zones de montagne.

Alors que les gisements en biomasse bois sont inférieurs à la demande, il y a une distorsion de concurrence au profit des producteurs qui, ayant été agréés, peuvent vendre leur énergie à un prix élevé.

Enfin, pouvez-vous nous confirmer que l'Office national de la chasse et de la faune sauvage ne sera pas rattaché à l'Agence la biodiversité ?

Mme Delphine Batho, ministre. - Les travaux du Conseil national des déchets éclaireront le gouvernement, monsieur Miquel. Nous sommes en phase finale de discussion sur la REP-mobilier, qui entrera bien en vigueur le 1er janvier 2013. Nous souhaitons remplacer les TGAP-sanctions par une amende administrative. L'application avec discernement de ce nouveau système répondra aux préoccupations de certains professionnels.

Après d'intenses discussions menées notamment avec le ministère de la culture au sujet d'Ecofolio, une réunion de la dernière chance se tiendra demain pour obtenir une proposition de réduction volontaire de la part de la presse, qui s'est jusqu'à présent refusée à prendre des engagements chiffrés.

Le gouvernement a décidé de ne pas prendre les deux décrets relatifs aux réserves d'eau qu'avait préparés Bruno Lemaire après la sécheresse de 2011. Ils étaient de toute façon inconstitutionnels : ils ne prévoyaient ni enquête publique ni étude d'impact, même pour des projets de dimension importante. L'agriculture a besoin d'eau alors que les sécheresses sont de plus en plus fréquentes et qu'il n'est pas évident que les eaux d'hiver constituent des excédents à stocker. En outre, dans le cadre de la réforme de la PAC, Stéphane Le Foll proposera la création de groupements pour une agriculture écologiquement intensive et reposera la question des assolements. Toutes les cultures n'ont pas les mêmes besoins en eau - je suis bien consciente des besoins de sécurité fourragère. Tout cela doit être abordé avec beaucoup de discernement, sans considérer que les retenues seraient la solution miracle. J'ai donc demandé aux agences de l'eau de ne pas investir dans un certain nombre de projets avant une concertation qui devra intervenir dans un délai raisonnable.

On ne peut pas dire que l'Ademe bloque les projets de méthanisation des déchets organiques. Nous sommes dans l'attente d'une nouvelle réglementation européenne reposant non plus sur une logique de moyens mais de résultats. Si elle n'exclut plus les déchets soumis à un tri mécano-biologique, elle devrait en revanche se révéler plus exigeante. Le nouveau dispositif devant être connu en 2013, les projets en cours doivent être suivis de très près.

Quel est notre calendrier ? C'est celui d'un début de quinquennat où doivent être engagés de front plusieurs chantiers déterminants. C'est le cas de la transition énergétique dont les enjeux concernent l'avenir de la Nation, ne serait-ce que par l'engagement de la France sur le facteur 4 à l'horizon 2050. Un véritable débat national est donc nécessaire. En ce domaine, nous devons aussi prendre des décisions plus immédiates, comme en matière de tarifs sociaux ou de soutien aux énergies renouvelables.

La biodiversité, ensuite. Outre la création de l'Agence nationale, nous avons besoin d'une loi-cadre - la dernière date de 1976 - et d'une transposition de textes internationaux tels que le protocole de Nagoya sur le partage des avantages. La France a en effet l'ambition d'être exemplaire en matière de préservation de la biodiversité, terrestre et maritime.

La conférence environnementale, qui sera annuelle, a fixé notre Feuille de route : transition énergétique, biodiversité, santé face aux risques environnementaux, fiscalité écologique et gouvernance. A cet égard, il convient de franchir une nouvelle étape dans la définition d'un dispositif d'ensemble, notamment grâce à la création du Conseil national de la transition écologique ou à une plateforme sur la responsabilité sociale des entreprises. Chaque année, le Conseil national décidera des sujets mis à l'ordre du jour de la conférence et un bilan sera dressé des engagements pris par le gouvernement. Certains acteurs souhaiteraient déjà que la conférence de l'an prochain aborde les thèmes de l'eau, de l'éducation à l'environnement, ou de la mer. Participant ce matin à Brest, aux rencontres internationales de la biodiversité marine, j'ai pu mesurer les attentes dans ce domaine.

En matière d'irrigation, Odette Herviaux a raison. Dans ma région, un producteur de légumes ne peut obtenir le volume d'eau nécessaire à l'augmentation de sa production alors que la question ne se pose pas pour les grandes cultures. Il y a des incohérences dans la règlementation.

J'ai souhaité avancer sur la question des algues vertes. En juillet dernier, les choses avaient progressé dans certaines baies mais pas dans toutes. Il faut s'attaquer aux causes de ce fléau environnemental qui, de surcroît, coûte cher au contribuable. Annoncer que l'Etat prendrait ses responsabilités là où les choses n'avanceraient pas, a contribué à faire évoluer la situation. Je l'ai dit ce matin à Brest au président de la chambre d'agriculture, si les propositions sont au niveau des besoins, la porte de la discussion reste ouverte. L'Etat ne souhaite pas prendre un arrêté pour prendre un arrêté, notre but est que des mesures efficaces soient prises.

Les deux commissions, de l'Assemblée nationale et du Sénat, veulent travailler avec le ministère et l'Ademe sur les déchets. Votre président a déjà rencontré le directeur général de la prévention des risques...

M. Raymond Vall, président. - C'était une prise de contact.

Mme Delphine Batho, ministre. - L'enjeu est de dresser le bilan du plan déchets 2009-2012 et d'engager une réflexion globale à laquelle participe le Conseil national des déchets, présidé par Gérard Miquel.

Le gouvernement a décidé de relancer le photovoltaïque. Pour éviter les conflits d'usage avec le monde agricole, les appels d'offre sur les grandes installations privilégieront les installations sur toiture ou dans les friches industrielles. Pour le photovoltaïque moyen, nous modifierons les cahiers des charges. Enfin, pour le petit photovoltaïque, nous relevons le tarif d'achat au-delà des propositions de la conférence environnementale. Un projet d'arrêté actuellement soumis à la CRE et au Conseil supérieur de l'énergie prévoit une bonification des projets répondant à un patriotisme écologique. Nous souhaitons soutenir un développement des énergies renouvelables créateur de valeur ajoutée en France, et qui ne creuse pas notre balance commerciale. Or ce n'est pas toujours le cas avec le tarif T5. Une réunion se tient en ce moment au ministère avec le Syndicat des énergies renouvelables. D'une part, le montant des nouvelles mesures de soutien est cinq fois supérieur aux baisses prévues, d'autre part, le Conseil supérieur de l'énergie a indiqué que ces minorations seraient limitées à 10 %. Il y a dans notre pays des usines d'assemblage et des producteurs de panneaux et nous adapterons les cahiers de charges aux technologies à haute valeur ajoutée développées en Europe. C'est une question de cohérence. Notre soutien ne se limite pas aux filières du photovoltaïque ou de l'éolien. Comme l'a confirmé ma visite ce matin à France Energies marines, des opportunités existent aussi dans ce domaine.

Oui, les parlementaires participeront pleinement au Conseil national de la transition écologique comme au débat ; nous parlons donc désormais de gouvernance à « cinq plus un ». J'ai déjà demandé au président du Sénat de désigner cinq sénateurs pour participer à ce débat national.

Monsieur Filleul, le décret de septembre 2012 ne faisait que préciser la loi du 17 mai 2011 : étendre aux collectivités le plafonnement des factures pour fuites indétectables exige une modification législative.

Sur la diminution de 24 millions du programme 181, 15 millions correspondent à de simples transferts : 3 millions sont affectés à l'élaboration des PPRM, 6 millions à la cartographie des surfaces inondables et 6 millions à la mise en oeuvre des PAPI.

Oui, l'Ademe joue un rôle majeur. Après des années de forte montée en puissance, ses moyens seront stabilisés : les autorisations d'engagement seront maintenues à 590 millions d'euros de 2013 à 2015, les crédits de paiement passant de 563 millions à 557 millions. En outre des dispositifs d'intervention tels que le fonds chaleur seront pérennisés. Un certain nombre d'améliorations seront aussi apportées aux investissements d'avenir.

Aucune ville n'ayant, à la date du 12 juillet dernier, déposé de dossier de zone d'action prioritaire pour l'air, un comité interministériel de la qualité de l'air a été créé, qui travaille à partir de propositions dont celles de la ville de Paris. Je ne peux néanmoins préjuger de ses résultats.

Le bonus à l'usage des véhicules électriques est une question majeure. Avec Arnaud Montebourg, nous avons confié à Philippe Hirtzman, président de l'Ineris, une mission sur le déploiement de bornes de recharge, le droit à la prise électrique et les facilités d'usage. Des discussions sont en cours avec les sociétés d'autoroute pour faciliter le passage de ces véhicules aux péages.

J'ai participé récemment au conseil d'administration du Conservatoire du littoral, qui a élu une nouvelle présidente. S'il est interdit de relever le droit annuel de francisation des navires, les effectifs du Conservatoire ont été stabilisés et les problèmes de statut seront abordés dans le cadre de l'agenda social. En outre, que le Conservatoire gère le patrimoine des phares serait cohérent mais empêcherait toute acquisition. Beaucoup de présidents de conseils de rivage jugent avec raison nécessaire d'aller chercher de nouveaux moyens financiers privés, de mobiliser la société civile et le mécénat, sans changer bien sûr la nature de la structure. De belles choses pourront être faites avec cet outil, qui va fêter ses 40 ans et auquel les Français sont attachés.

Nous en sommes au stade de la phase d'évaluation du plan Ecophyto.

Il n'est pas question d'abandonner les objectifs de la directive ETS Aviation. L'Europe a toujours souhaité que l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) mette en place un système comparable. Laissant à celle-ci une dernière chance de le faire, la Commission européenne a suspendu l'entrée en vigueur de la directive.

Une évaluation des investissements d'avenir est en cours et le CEA a postulé à un appel à projets en matière de sûreté nucléaire, pour lequel les décisions n'ont pas encore été prises.

La Feuille de route discutée à la conférence environnementale envisage tous les aspects de la fiscalité écologique. Le débat sur le carbone sera mené dans la cadre du débat national sur la transition énergétique. Il en va de même pour la CSPE ou la fiscalité des carburants.

Alain Le Vern est très attentif aux projets d'éolien off shore, secteur où les enjeux industriels sont forts. Le bilan effectué sur le fonds chaleur révèle que les grandes installations nécessitent d'importer de la biomasse. Cette dernière est adaptée à la cogénération en tant que complément. Comme la méthanisation, l'installation d'une centrale à biomasse peut contribuer à fixer une industrie. Nous avons cependant hérité d'appels d'offres qui sont allés à leur terme, et sont déjà en phase de réalisation.

Les moyens nécessaires à la politique de l'eau sont importants. Le Conseil national de l'eau procède à un certain nombre de travaux, et je souhaite que le Parlement fasse de même. Il nous faut une photographie claire de la situation au regard des objectifs 2015, dont nous sommes loin. Il faudra sans doute hiérarchiser les investissements.

L'Agence de la biodiversité aura naturellement des échanges avec l'Office national de la chasse et de la faune sauvage ; ce dernier conserve néanmoins sa raison d'être ne serait-ce que parce qu'il gère les redevances cynégétiques ou les permis de chasse.

M. Raymond Vall, président. - Je vous remercie, madame la Ministre, d'avoir répondu avec précision à ces nombreuses questions.

Mercredi 14 novembre 2012

- Présidence de M. Raymond Vall, président -

Loi de finances pour 2013 - Mission « Écologie, développement et aménagement durables » - Audition de M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

M. Raymond Vall, président. - Nous sommes heureux de vous accueillir, Monsieur le ministre délégué chargé des transports, pour évoquer prioritairement les sujets qui font l'objet d'un rapport pour avis de notre commission : le ferroviaire et le fluvial, dont les crédits sont rapportés par notre collègue Roland Ries ; les transports maritimes avec Charles Revet ; le transport routier avec Ronan Dantec ; enfin, les transports aériens avec Vincent Capo-Canellas.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. - Synthétiser ce budget est un exercice délicat : il s'élève en effet à 8 milliards d'euros, auxquels il faut ajouter plusieurs milliards d'euros d'investissement gérés par l'Agence de financement des infrastructures de transports en France (AFITF).

C'est d'abord un budget responsable et exigeant. Il organise la transition vers une politique des transports ambitieuse et réaliste. Nous avons d'ores et déjà engagé, depuis six mois, un certain nombre de réformes. Nous avons fait preuve de courage en nous attelant à la réforme du ferroviaire, puisqu'il a fallu battre en brèche l'idée que son organisation était intangible, que son efficacité ne pouvait être optimisée, que la charge de la dette continuerait à croître d'1,5 milliard d'euros par an de manière automatique... Au-delà de la maintenance de l'existant, le système ferroviaire doit être modernisé en profondeur. Le récent rapport de l'école fédérale polytechnique de Lausanne, après celui de 2005, constate que nous avons encore bien des progrès à faire puisque nos infrastructures ferroviaires continuent de se dégrader. Notre réforme doit rendre le système plus efficace, dans le respect des principes et du calendrier européen. Elle doit également préparer l'ouverture du secteur à la concurrence, parce que nous refusons de laisser les services voyageurs dans l'état d'impréparation où était le fret ferroviaire lors de son ouverture à la concurrence, avec tous les dégâts que cela a produit.

Ce n'est pas un budget de renoncement. Nous avons cherché des sources de financement innovantes, notamment pour l'AFITF. Nous avons en outre souhaité donner une suite crédible au schéma national des infrastructures de transports (SNIT), dont j'ai dit grand mal...

M. Raymond Vall, président. - ... Nous aussi !

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. - ... mais auquel je veux donner une suite réaliste. Il faut savoir quelles sommes les départements et les régions, dont les financements viennent souvent en soutien des investissements de l'Etat, peuvent mobiliser.

Aujourd'hui, le SNIT, hors Grand Paris, est évalué à 245 milliards d'euros. Nous allons hiérarchiser, rendre plus crédibles et plus lisibles les investissements publics, notamment au regard de critères environnementaux, d'aménagement du territoire et de compétitivité économique.

Nous soutenons les filières industrielles en matière de transport. L'écotaxe poids lourds - mode de financement innovant - sera mise en place en 2013. Son produit s'élèvera à près de 400 millions d'euros au bénéfice de l'AFITF, dont la subvention est diminuée en conséquence. La redevance domaniale appliquée aux concessionnaires d'autoroutes rapportera près de 200 millions d'euros, au bénéfice d'investissements d'avenir, du report modal ou de la cohérence entre les schémas routier, ferroviaire, et fluvial.

Nous poursuivons les chantiers engagés et nous en lançons de nouveaux : le contournement de Nîmes et de Montpellier, la rocade L2 à Marseille, exemple d'une infrastructure payée depuis des années mais qui n'est toujours pas mise en service...

Une nouvelle impulsion est donnée aux programmes de modernisation des itinéraires routiers (PDMI) : je souhaite qu'on remédie au faible taux d'exécution, 37 % environ, de la dernière génération de programmes. Le Gouvernement précédent aurait pris, devant l'Assemblée nationale, des engagements sur les PDMI de la prochaine génération, ceux de la période 2015-2020. Mais la procédure de ces programmes n'a même pas été initiée : comment l'Etat pourrait-il être lié par de telles promesses ? Les lettres d'engagement se sont multipliées avant les élections du printemps dernier : je le déplore.

Le budget annexe de l'aviation civile s'élève à 2 milliards d'euros. Notre priorité va à la mise en place du Ciel unique européen, c'est-à-dire aux programmes SESAR (Single European Sky Air traffic management Research) et FABEC (bloc d'espace aérien fonctionnel d'Europe Centrale), l'ensemble de règles et de dispositifs techniques nécessaires à la gestion intégrée du ciel européen. Nous recherchons de nouvelles recettes pour désendetter la direction générale de l'aviation civile (DGAC).

Pour le transport maritime et les infrastructures portuaires, nous avons, avec Delphine Batho, posé un nouveau cap, avec la politique maritime intégrée, respectueuse des principes économiques, sociaux et environnementaux d'un développement durable. Nous ne pouvons continuer à tourner le dos à la mer et aux enjeux relatifs aux infrastructures portuaires. Nous en reparlerons à l'occasion des discussions sur la décentralisation et la modernisation de l'Etat. Je recevrai prochainement l'ensemble des directeurs des grands ports maritimes, mais l'Etat ne saurait limiter sa vision à ceux-ci, il doit, plus largement, élaborer des stratégies de façades, vecteurs de compétitivité et d'emplois. La pêche fait naturellement partie de ces réflexions. Energies marines renouvelables, développement de l'aquaculture... : la croissance bleue, c'est demain ! A condition toutefois d'avoir des lieux de gouvernance adaptés, des façades correctement exploitées, des ports désenclavés, des liaisons ferroviaires et fluviales efficaces avec les hinterlands.

La solidité de notre filière industrielle du ferroviaire est une condition de ce développement. J'ai évoqué le sujet avec le PDG d'Alstom. Je rencontre régulièrement les chefs d'entreprise qui ont besoin du soutien de l'Etat dans leur conquête de marchés extérieurs. Je rencontrerai tout à l'heure le ministre des transports koweitien. Nous promouvons la filière française partout où nous le pouvons. Je travaille avec Delphine Batho sur la question des énergies maritimes renouvelables. En matière ferroviaire, c'est la commande publique qui remplit les carnets de commande de nos entreprises, dont on sait qu'ils commenceront à se vider à partir de 2015. C'est aujourd'hui qu'il faut anticiper.

Notre budget s'élève à 8,12 milliards d'euros, en augmentation de 4 %. Les transferts à l'AFITF sont en hausse. Le compte d'affectation spéciale relatif aux trains d'équilibre du territoire (TET) est doté de 325 millions d'euros, contre 280 millions l'année dernière. Le budget de l'aviation civile s'élève à 2,1 milliards d'euros. Dans une période budgétaire difficile, nous mettons ainsi en oeuvre une stratégie de soutien à nos territoires.

Les budgets des PDMI et des contrats de plan Etat-régions (CPER) sont en augmentation : 450 millions d'euros en 2013 contre 322 l'année précédente.

Nous avons aujourd'hui besoin de crédibilité dans la parole de l'Etat, de relations de confiance avec les collectivités territoriales sur les cofinancements, d'efficacité dans les investissements publics, de hiérarchisation - c'est cette dernière exigence qui m'a amené à créer la commission « Mobilité 21 ». Nous devons remédier à l'absence de continuité dans la stratégie depuis de nombreuses années, comme en témoignent le chantier de la L2 à Marseille ou les réalisations par tronçons, non reliés. Il est temps de restaurer la cohérence de l'action.

M. Michel Teston, en remplacement de M. Roland Ries, rapporteur pour avis des crédits des transports ferroviaires et fluviaux. - Roland Ries vous adresse deux questions. La première concerne le troisième appel à projets pour les transports en commun en site propre (TCSP). Les autorisations d'engagement y afférant ne sont pas fléchées dans le bleu budgétaire. Les financements seront vraisemblablement apportés par l'AFITF : pouvez-vous nous le confirmer ? Quand les projets retenus dans ce cadre pourront-ils être lancés ? Il ne faudrait pas attendre 2014...

Le déficit des TET s'accroît, ce qui oblige l'Etat à inscrire 325 millions d'euros au projet de budget, contre 280 millions l'an passé - il est vrai que la ligne Paris-Belfort est cette année comprise dans le total. Le financement de ces services est essentiellement assuré par l'augmentation de la taxe sur les entreprises ferroviaires, c'est-à-dire principalement la SNCF, tandis que les concessionnaires autoroutiers n'en acquittent qu'une faible part. Comment financer le report modal de façon plus équitable à l'avenir ?

J'ai moi aussi des questions à vous poser. Vous avez annoncé que le monopole de la SNCF sur le transport national de voyageurs serait préservé jusqu'en 2019. Pourquoi ne pas préparer d'ores et déjà le nouveau contrat Etat-SNCF pour les TET ? L'opérateur ferroviaire aurait ainsi la possibilité de programmer la modernisation des matériels et de lancer ses commandes dès aujourd'hui.

J'ai toujours été opposé à la séparation entre le gestionnaire d'infrastructures et l'exploitant. J'approuve donc les propositions que vous avez formulées à l'occasion du 75e anniversaire de la SNCF en matière de gouvernance ferroviaire. Cela étant, avez-vous obtenu du commissaire européen Siim Kallas la garantie que le 4ème paquet ferroviaire actuellement en préparation ne remettra pas en cause ces engagements ?

Enfin, observons que ce budget échappe totalement à la rigueur. L'écotaxe poids lourds apportera 100 millions d'euros supplémentaires au budget de l'AFITF : ses 400 millions d'euros de produit compenseront les 300 millions d'euros perdus dans le budget. L'effort de régénération du réseau demandé à RFF est confirmé, comme y appelle l'étude actualisée de l'école polytechnique de Lausanne. Le groupe socialiste approuve pleinement ce budget.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. - Votre conclusion me rassure et m'encourage. Le financement du nouvel appel à projets sera trouvé dans le budget de l'AFITF. Nous respectons le calendrier, puisque l'appel devrait être lancé en 2013. Il portera globalement sur la mobilité urbaine, en lien avec le groupement des autorités responsables de transports (Gart). L'accent sera mis sur l'innovation technologique. J'ai été interpellé à l'Assemblée nationale  sur la place du vélo : nous serons également vigilants sur ce point. Enfin, nous serons attentifs à ce que les fonds d'épargne de la Caisse des dépôts et consignations soient garantis à hauteur de 8 milliards d'euros pour faciliter le financement des collectivités territoriales.

Le coût des TET est supérieur à ce qui était prévu : nous faisons face, en augmentant notamment de 45 millions d'euros les crédits correspondants.

D'aucuns se sont étonnés de la faible participation d'autres sources de financement au soutien du report modal. Le budget de l'AFITF est essentiellement financé par les autoroutes. Le produit de la taxe d'aménagement du territoire (TAT) s'élève à 565 millions d'euros ; l'écotaxe poids lourds représente environ 400 millions d'euros ; les amendes de radars avoisinent les 200 millions d'euros, à quoi il faut encore ajouter la redevance domaniale. La TAT se répercutant dans le prix des péages, nous ne l'avons pas augmentée, afin de protéger les usagers. Une telle décision n'aurait de toute façon pas eu d'effet sur des concessionnaires pour qui les années précédentes ont été relativement fastes. Certains sont certes très endettés, mais ils dégagent près d'1,2 milliard d'euros de profit par an. Rappelons que l'ensemble du réseau autoroutier a été privatisé pour la modique somme de 15 milliards d'euros, sur lesquels seuls 4 milliards d'euros ont été affectés à l'AFITF ! Cette privatisation est choquante, l'agence aurait pu bénéficier de 1,5 à 2 milliards d'euros supplémentaires chaque année si les autoroutes étaient demeurées dans le secteur public... La situation serait plus simple.

L'écotaxe poids lourds sera effective rapidement. Le système ne remet pas en cause la pérennité des 37 000 entreprises du domaine routier, qui connaissent déjà une situation très compliquée : leurs marges ne dépassent pas 2 %. Le dispositif initialement retenu - par décret en date du 6 mai 2012, qui résonne tel un voeu de changement du gouvernement précédent - aurait totalement bloqué le secteur. Je serai demain au congrès de la Fédération nationale des transports routiers (FNTR) : je leur dirai que nous avons repris les discussions pour élaborer un dispositif qui ne défavorise pas exagérément le routier par rapport aux autres modes, et qui touche autant le routier étranger que français.

Sur les TET, l'Etat verse pendant trois ans à la SNCF une compensation annuelle de 325 millions d'euros. Il faut y ajouter des obligations de service public. La convention prévoit 300 millions d'investissements sur trois ans de la part de la SNCF, pour la rénovation du matériel roulant. J'ai évoqué ces questions tout récemment avec Guillaume Pépy.

D'après le commissaire Kallas, « le 4ème paquet ferroviaire n'est pas écrit », du moins pas complètement. Je plaide pour le respect du principe de subsidiarité : dès lors que les principes de transparence et de libre accès sont respectés, que le cadre général de la libéralisation est fixé, l'organisation de la structure du système ferroviaire doit rester de la compétence des Etats : nous avons en effet des histoires, des industries, des collectivités et des autorités qui sont propres à chacun. Pourquoi vouloir un modèle unique ? J'ai préféré exposer au commissaire Kallas notre philosophie en amont de la réforme...

S'agissant du transport public quotidien, les événements qui se sont produits récemment sur la ligne B du RER montrent que la sécurité, la qualité et la régularité doivent être au coeur de nos préoccupations.

M. Francis Grignon. - Le budget ne me pose pas de problème : 4 % d'augmentation, par les temps qui courent, ce n'est pas négligeable. En revanche, la préparation de l'avenir m'inquiète.

J'ai travaillé longtemps avec MM. Bussereau et Mariani sur la concurrence dans les TER et les TET ; j'ai aussi participé aux Assises du ferroviaire. La concurrence est inéluctable. Nous devons l'anticiper pour ne pas répéter les erreurs commises dans le secteur du fret. Michel Teston envisageait un financement des TET jusqu'en 2019 : nous devrions plutôt y organiser la concurrence rapidement pour tester le marché. Qu'en pensez-vous, monsieur le ministre ?

Je suis d'accord sur le gestionnaire d'infrastructures unique : il n'est plus possible de partager la direction de la circulation ferroviaire (DCF) entre Réseau ferré de France (RFF) et la SNCF. Mais nous devons garantir une séparation comptable rigoureuse, en évitant de bâtir une holding où remontent tous les bénéfices des filiales, comme l'a fait la Deutsche Bahn. Encore faut-il instaurer une vraie indépendance opérationnelle, afin que l'équité soit préservée dans la distribution des sillons. Le droit européen impose la séparation comptable, mais c'est tout ! Qu'allez-vous faire de la dette du groupement ? L'intégrer à celle de l'Etat pénaliserait la notation de la France.

L'économie ferroviaire a besoin d'une bonne complémentarité entre les TGV, les TET, les TER et les bus. Etre membre du conseil d'administration de la SNCF ne m'empêche pas de dire ceci : si l'on remplaçait les lignes parcourues quotidiennement par moins de cinq trains par jour par une navette de vingt bus, le trafic doublerait et les contributions publiques et les émissions de CO2 seraient réduites de 20 %. Ayons le courage d'affronter les élus locaux désireux de garder leurs lignes ferroviaires, cessons de faire rouler des TGV presque vides jusqu'aux fonds de vallée.

Vous travaillez beaucoup avec Alstom pour aider la filière industrielle ferroviaire, c'est une forme de patriotisme économique que je soutiens. Toutefois, est-on prêt à renforcer l'ensemble de la filière, à mieux la structurer, pour l'orienter à l'export ?

M. Louis Nègre. - Je remercie monsieur le ministre d'avoir pris le dossier des transports à bras le corps, alors qu'il n'était pas spécialiste de ce domaine très technique.

Nos chiffres ne concordent pas. Le programme 203 me semble diminuer de 135 millions d'euros d'une année sur l'autre, de 4,2 à 4,07 milliards d'euros. L'action 10, relative aux infrastructures de transports collectifs et ferroviaires, est en recul de 9,3 %, à 3,23 milliards d'euros.

Sur la gouvernance, vous savez quelle est ma position à l'égard d'un pôle public unifié entre la SNCF et RFF. La séparation est, à mes yeux, indispensable ; alourdir encore le diplodocus qui n'a pas fait montre d'agilité me paraît dangereux. Je suis par conséquent déçu par le choix politique qui a été fait, mais je reconnais qu'il y a une gouvernance démocratique et j'espère qu'il n'y aura pas de choc frontal avec l'Europe. Vous avez pris la précaution de rencontrer le commissaire Kallas en amont, nous aussi. Mais le problème de la gouvernance n'est pas prioritaire : peu importe que le chat soit noir ou blanc, pourvu qu'il attrape des souris. Le maître-mot, c'est la compétitivité du système et le service aux usagers. Je serai attentif à la gestion des ressources humaines dans cet ensemble unifié, et à l'étanchéité entre le gestionnaire unique d'infrastructures - cette idée me paraît en revanche excellente - et l'opérateur historique. Je suggère en outre de renforcer significativement le régulateur.

La seconde divergence philosophique que j'ai avec votre stratégie concerne l'ouverture à la concurrence. Je vois là le syndrome français de la ligne Maginot : nous nous terrons dans nos bunkers au lieu d'être à l'offensive ! Ayons foi dans les compétences de la SNCF, elle a toute les capacités pour conquérir des parts du marché anglo-saxon. Nous repoussons toujours à plus tard l'ouverture à la concurrence et pendant ce temps, les Allemands, plus malins que nous, l'ont réalisée et le prix du kilomètre parcouru est à présent inférieur de 20 % à 30 % à nos prix.

Toute augmentation de la TVA était exclue d'ici la fin du quinquennat. Mais voilà que la TVA sur les transports passera finalement de 7 % à 10 % et ce sont 168 millions d'euros qui seront ainsi transférés sur les collectivités. Or les transports publics sont un service de première nécessité qui devrait rester soumis au taux réduit.

Je vous fais confiance sur les appels à projets. La quarantaine de projets de la première tranche représente un montant de 450 millions d'euros qui pourra être pris dans le budget de l'AFITF. Mais le Gart estime que la « mobilité durable » - vélo par exemple - doit rester secondaire par rapport aux transports publics classiques dont tout le monde a besoin.

Que pouvez-vous nous dire des 30 milliards d'euros de dette, dont personne ne parle, dans le cadre de la nouvelle gouvernance ?

Etes-vous certain que l'écotaxe rapportera 400 millions d'euros?

Enfin, comment remplir les carnets de commande de l'industrie ferroviaire, qui n'a plus de visibilité après 2015 ?

M. Jean-Jacques Filleul. - On ne peut parler du passé comme vous le faites, monsieur Nègre. Le ferroviaire a une histoire. Nous avons été nombreux, mais pas suffisamment, à lutter sans succès contre la séparation en deux du système ferroviaire et à déplorer le niveau de la dette accumulée. Il n'y a eu depuis lors aucun règlement, alors mieux vaut rester modeste. Le ferroviaire dépasse les appartenances politiques : il est inclus dans les gènes du peuple français. J'ai apprécié la présentation du ministre ainsi que les questions, toujours intelligentes, de Michel Teston.

Je vous félicite, monsieur le ministre, des réformes entreprises et de votre engagement dans le rapport de force avec l'Union européenne...

M. Louis Nègre. - Gardons quand même les yeux ouverts.

M. Jean-Jacques Filleul. - La doctrine libérale de la Commission met en péril notre système ferroviaire. Je défends le principe de subsidiarité.

La ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique (LGV-SEA) en cours de construction est un chantier considérable de 8 milliards d'euros. Les petites communes concernées souhaitent surtout l'attribution d'une redevance annuelle pérenne fondée sur les kilomètres d'implantation, à l'instar du système Cofiroute. Une grande partie de leur territoire communal supporte des infrastructures ferroviaires : est-il normal qu'elles n'aient en retour ni péage, ni gare ? Certaines, dont le territoire accueille des ouvrages d'art qui accompagnent ces infrastructures, s'inquiètent vivement des frais d'entretien qu'elles auront à supporter dans quelques années. Nous devrions trouver une solution qui rendrait les concessionnaires propriétaires des ouvrages d'art.

M. Rémy Pointereau. - « Pas de renoncement » dit le ministre. Voilà qui me réjouit, mais je n'en attendais pas moins : le président de la République prône une relance par la croissance, or celle-ci passe par l'investissement dans les infrastructures d'avenir. Faisons la différence entre la mauvaise dette, née des dépenses de fonctionnement, et la bonne, qui finance les investissements.

Comment fonctionnera la commission Duron sur le SNIT ? Quelle est sa feuille de route ? Son cahier des charges ? Il semble que vous soyez en désaccord avec la ministre chargée de l'égalité des territoires. Vous placeriez la rentabilité avant tout, et elle, l'équité entre les territoires. Comment allez-vous vous accorder ?

Y aura-t-il désormais plus d'objectivité dans le choix et le traitement des dossiers ? Je pense notamment au barreau de Poitiers-Limoges, le TGV corrézien, qui va coûter très cher, pour une faible rentabilité.

Qu'entendez-vous par « financements innovants » ? Il faut faire partie du réseau dit central des réseaux transeuropéens de transport (RTE-T) pour accéder aux fonds européens : quelles sont les capacités d'investissement de l'Europe pour financer nos grandes infrastructures ?

M. Henri Tandonnet. - Une question de méthode se pose aux élus : lorsqu'on envisage la création d'une nouvelle ligne à grande vitesse (LGV), il faut engager une réflexion sur l'aménagement du territoire. C'est ce que nous faisons avec le Grand projet ferroviaire du Sud-ouest (GPSO) qui comprend la nouvelle ligne Bordeaux-Toulouse et une gare nouvelle dans l'Agenais, en moyenne Garonne. Vous avez heureusement autorisé RFF à poursuivre les études en cours, l'enquête publique se déroulera en juin prochain. Le chantier implique des aménagements sur la RN 21, une nouvelle sortie d'autoroute et divers aménagements urbains. Comment travailler rapidement avec les services de l'Etat pour garantir la mutualisation des moyens et donner au projet toute sa cohérence ? Si nous travaillons ensemble, nous pouvons réaliser des économies.

M. Raymond Vall, président. - Je m'associe à la question !

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. - MM. Grignon et Nègre s'interrogent sur l'ouverture à la concurrence, en ayant sans doute à l'esprit ce qui s'est passé avec le fret. Le plan Fret prévoyait de porter à 25 % la part du non-routier - nous avons vu l'inverse, puisque la part du ferroviaire a reculé de 15 % à 9 % ! Il faut préparer davantage les changements, conforter nos opérateurs plutôt que de les affaiblir, sans quoi ils subissent avec la libéralisation brutale une véritable cannibalisation et ce n'est pas la régulation qui l'empêchera efficacement. Le rapport du Conseil économique, social et environnemental est très réservé sur l'ouverture anticipée en 2014, même sous la forme expérimentale et volontaire.

Tant que les règles sociales ne seront pas uniformisées, la concurrence allégée de toute obligation et le service public lesté par ses missions d'intérêt général ne pourront être à égalité de prix ! La différence de 20 % s'explique ainsi. C'est pourquoi nous souhaitons que la réforme concerne l'ensemble des opérateurs ferroviaires, qui sont déjà dix-huit aujourd'hui. Un décret « socle » fixera le cadre de référence, les grandes lignes de l'organisation du travail, les relations salariales. Ce sera le cadre des accords de branche et d'entreprise. Tout ceci suppose de la négociation.

La réforme est aussi une réponse à la dette. Si nous ne revoyons pas l'organisation de la SNCF et de RFF, la perte d'efficacité continuera de coûter 800 millions d'euros par an, c'est la moitié de la dette « automatique » que nous promet l'organisation actuelle. Avec la réforme, nous voulons stabiliser le volume de la dette, avant de la résorber - je signale qu'elle était de 25 milliards en 2008 et atteint 31 milliards aujourd'hui... - tout en évitant sa requalification en dette de l'Etat. La réforme sera difficile, mais sans elle, le chemin de fer français est condamné. C'est aussi pourquoi nous avons besoin de règles claires et d'un cadre social solide, avant toute ouverture supplémentaire à la concurrence.

Nous envisageons d'expérimenter un nouveau cadre de relations entre l'Etat et les collectivités régionales sur les lignes malades, celles où l'on observe des doublons entre TET et TER. Mais je n'ai nulle intention de me délester d'un fardeau sur les régions en leur demandant de rationaliser l'offre de transports, le travail sera fait en amont de la décentralisation des transports. Nous verrons comment optimiser l'offre sur les territoires concernés.

Je n'ai aucun antagonisme avec Cécile Duflot. Les enjeux diffèrent selon la nature des chantiers : les lignes à grande vitesse visent l'efficacité économique, l'électrification concerne plutôt les transports quotidiens, et la rénovation des lignes dépend de leur usage,  mixte, voyageurs, ou fret. Tel barreau de 100 kilomètres pourrait relier deux morceaux de ligne grande vitesse : est-il prioritaire ? Comment le réaliser ? Quelle doit être sa vitesse maximale ? Pour quelle efficacité économique ? La commission Duron se penchera sur ces enjeux d'aménagement du territoire, d'efficacité environnementale et économique, dans les territoires riches en présidents de la République passés ou présent, aussi bien que dans les autres territoires...

Les petites communes peuvent signer des conventions avec RFF pour l'entretien des ouvrages d'art. Une enveloppe de l'ordre de 30 millions est prévue, par exemple, pour accompagner le chantier de la LGV Tours-Bordeaux, une autre de 14 millions pour la LGV Bretagne-Pays de la Loire.

Mme Évelyne Didier. - Le Sénat a voté une loi sur les ouvrages d'art, elle est sur le bureau de l'Assemblée nationale après avoir recueilli un large consensus. Ce texte ne fait pas de différence entre les petites et les grandes communes mais pose un principe général, car le problème de sécurité publique se pose de la même façon pour toutes et il emporte de lourdes responsabilités, financières, pénales. Si un pont s'effondrait en raison du défaut d'entretien par une commune, le problème juridique serait des plus sérieux ! Quand ce texte sera-t-il examiné par les députés ?

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. - Je n'ai pas la maîtrise de l'ordre du jour des assemblées, mais à ma connaissance, la proposition n'est pas inscrite. J'ai le problème inverse avec une proposition de loi sur le transport aérien : votée à l'Assemblée nationale, elle n'est toujours pas inscrite à votre ordre du jour. Le texte voté par le Sénat n'est bien sûr pas opposable, mais vous n'avez pas tort : quelle que soit leur taille, les communes sont dans la même situation. Pour l'instant, je me contente d'indiquer qu'il existe des conventions avec RFF pour les communes rurales qui n'ont pas les moyens techniques d'entretenir les ouvrages d'art. Pour ce qui est de la concertation, si vous avez des difficultés, faites-le nous savoir. C'est notre rôle d'interpeller les différents acteurs.

Au-delà du coût élevé d'entretien des ouvrages d'art, les grands chantiers induisent d'autres travaux, comme le raccordement ou le détournement de voies, qui sont directement à la charge des collectivités et ne figurent pas toujours dans l'évaluation initiale. Toutes les collectivités réclament des lignes, elles doivent savoir que la dépense associée peut être très élevée.

La hausse de la TVA sera-t-elle répercutée sur les transports ? La question est posée. Un certain nombre d'opérateurs sont prêts à réfléchir avec nous et à ne pas répercuter toute la hausse dans leurs tarifs.

M. Raymond Vall, président. - Nous passons au volet routier.

M. Ronan Dantec, rapporteur pour avis des crédits du transport routier. - Votre budget est un budget d'avant la commission SNIT. Je me réjouis que la route finance le rééquilibrage des transports, en particulier le secteur ferroviaire, et je retiens deux signaux forts : la mise en place d'un ministère à l'égalité des territoires et l'annonce par François Hollande de l'objectif de réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2030. Cette échéance concorde avec l'échelle de temps d'élaboration des grandes infrastructures de transport.

Le débat que nous avons aujourd'hui ouvre celui que nous aurons au cours de l'année 2013 sur le SNIT. Quelle place y prendront les parlementaires ?

Pour évaluer, pour choisir des solutions, on a besoin de critères, de préférence acceptés par tous. On ne peut procéder au doigt mouillé comme l'Etat le fait parfois, je songe au bonus malus automobile. Les critères sociaux-économiques datent du rapport Boiteux II... Nous manquons de vision globale. Quelle est l'économie globale de la route ? Nous manquons d'éléments pour établir précisément l'ensemble des recettes et des dépenses de la route. Vos services doivent définir des critères afin que nous puissions prendre des décisions. Nous sommes en retard.

Une des questions clés est l'évaluation de l'intermodalité et de l'impact global. Le barreau ferroviaire de l'Essonne est par exemple un enjeu majeur pour la façade ouest, de Bordeaux à Brest. Il permettrait un gain de temps pour les passagers qui veulent se rendre à Bruxelles ou à Francfort. Il libérerait des sillons RER. Il faciliterait la stratégie des compagnies aériennes qui cherchent à drainer le plus grand nombre de passagers vers les deux plateformes parisiennes.  

Quant aux PDMI, nous devons prendre en compte les modifications de l'environnement intervenues depuis l'inscription : telle rocade prévue se retrouve en zone Natura 2000 qui n'existait pas initialement. Une remise à plat s'impose.

Les enjeux de biodiversité exigent de faire passer un message clair. Les grandes infrastructures ne peuvent plus les négliger, je pense en particulier aux effets de coupure des LGV ou encore aux zones humides.

M. Gérard Cornu. - Vous nous annoncez un budget de transition : autrement dit, il s'appuie sur le budget précédent. Cécile Duflot nous a dit la même chose hier. Nous verrons quelles orientations vous adopterez lorsque la transition sera passée. Pas de renoncement, dites-vous encore. S'il n'y a pas de renoncement sur les projets routiers, je m'en réjouirai. Si vous cherchez à vous en dédouaner, ce sera moins bien. Pouvez-vous me rassurer sur la poursuite de l'aménagement à deux fois deux voies  de la RN 154 ? Il ne manque que 80 kilomètres pour opérer la jonction par l'ouest, ce qui permettra d'éviter la région parisienne quand on vient du nord. Tous les parlementaires concernés demandent l'achèvement du projet, le dossier paraît en bonne voie : me le confirmez-vous ?

M. Louis Nègre. - La commission « Mobilité 21 », où je siège, se penche actuellement sur les critères d'évaluation des projets. Or, les Verts y sont représentés par Mme Eva Sas, vice-présidente de la commission des finances de l'Assemblée nationale : vous n'avez pas à vous inquiéter, monsieur Dantec !

M. Ronan Dantec, rapporteur pour avis. - Je m'inquiète pour les infrastructures, pas pour Europe-Ecologie-LesVerts !

M. Louis Nègre. - La France ne doit pas répéter les erreurs du passé : un défaut d'entretien ne se rattrape pas, comme nous en faisons aujourd'hui l'expérience dans le secteur ferroviaire. Ne faisons pas tomber nos routes dans ce piège : préservons notre patrimoine !

M. Philippe Esnol. - Je suis très attaché à l'intermodalité. La route est archi-saturée. On souhaite développer le transport fluvial, plus conforme aux exigences du développement durable. En même temps, il faut trouver la bonne articulation avec le réseau ferroviaire. L'enjeu est crucial pour la région parisienne qui arrive à une saturation extrême. Dans la partie ouest de l'Ile-de-France, on s'inquiète...

Les précédents gouvernements nous ont fait miroiter des milliards d'euros d'investissement depuis six, dix ou quinze ans. Nous avons espéré, réfléchi, travaillé. En réalité, l'Etat n'avait pas le premier euro pour financer ces projets, alors que la réalisation du SNIT dépasse 240 milliard d'euros. Quels critères prévaudront désormais ?

M. Jean-Jacques Filleul. - Les montants que vous avez cités pour la privatisation des autoroutes sont considérables et choquants. Notre commission ne devrait-elle pas enquêter sur le sujet ? Cet argent qui manque dans les caisses de l'Etat aurait pu contribuer à réduire la dette ferroviaire.

M. Louis Nègre. - Eh oui...

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. - Je n'ai pas voulu que Mobilité 21 soit une réunion de techniciens, mais que les parlementaires y aient toute leur place, et que toutes les sensibilités soient représentées. La question centrale est celle de la méthodologie. La commission doit aussi travailler sur un schéma d'ensemble prenant en compte les différences régionales. Je lui laisse la plus grande marge de manoeuvre. Un seul conseil, distinguer entre les vrais projets et les faux, entre les projets opposables, étayés par une concertation, des études, des démarches administratives, et les simples traits de crayons tracés à la hâte sur une carte. On me reproche d'abandonner la LGV Picardie Tunnel sous la Manche. Mais le dossier n'existe même pas ! Le SNIT et les PDMI ne sont pas des jouets pour calmer les élus locaux, en leur donnant l'illusion que les choses avancent...

A l'Assemblée nationale, on m'a demandé si la RN 12 serait bien maintenue dans le SNIT. J'ai regardé le dossier : aucune étude n'était lancée, il ne contenait que des lettres d'intention. Et l'on aurait le toupet de me reprocher « l'abandon » d'un tel projet ? Qu'on ne me fasse pas porter des responsabilités qui ne sont pas les miennes ! Je ne me sens pas davantage tenu par des annonces qui concernent les PDMI à venir entre 2015 et 2020. Je serai donc prudent dans toutes mes réponses, comme sur la RN 154, mais qu'on n'en déduise pas que le projet est abandonné, car le débat public a eu lieu, les études se poursuivent...

Louis Nègre feint de croire que je ne connaitrais pas le secteur des transports ? J'ai été maire d'une ville qui est le premier centre de transformation de produits de la mer : sa logistique de transports est très développée, avec une industrie ferroviaire très poussée, tout cela à 30 kilomètres du tunnel sous la Manche. Je suis également fils de routier, mais j'arrête là les confidences !

S'il y a eu renoncement sur un projet, il est venu de tel partenaire privé d'un PPP, je songe au contournement de Strasbourg. Le gouvernement s'est contenté d'en tirer les conséquences légales. Sur l'ensemble du SNIT, Jérôme Cahuzac a tenu un discours de vérité : nombre de projets ne sont pas financés. Certains ont été pensés avant la crise. Le financement du contournement Nîmes-Montpellier, par exemple, nécessite la constitution d'un pool bancaire d'une cinquantaine de banques...

J'ai entendu aussi des inquiétudes sur l'extension d'Eole. Elle était censée, en 2010, coûter entre 2,2 à 2,8 milliards d'euros, elle dépasse aujourd'hui 3,7 milliards. L'enjeu est majeur, mais si des rumeurs courent sur l'abandon du projet, elles ne sont pas de mon fait. Mon intention est de jumeler Eole avec la ligne Ligne Nouvelle Paris Normandie (LNPN) pour désengorger le trafic à l'ouest et faciliter l'accès à Paris.

Quant aux sociétés d'autoroute, leur chiffre d'affaires a gagné 30 % depuis la privatisation, leur marge brute d'exploitation 36 % et leur marge nette 53 %, alors que la redevance domaniale n'a progressé que de 18 %. Nous procédons à un premier rattrapage, mais il est vrai que ces chiffres incitent à s'interroger.

- Présidence de M. Michel Teston, vice-président -

M. Michel Teston, vice-président. - Nous en venons au transport maritime.

M. Charles Revet, rapporteur pour avis des crédits du transport maritime. - La France a été une très grande puissance maritime : elle est passée du quatrième rang mondial dans les années 1970, au 28ème rang aujourd'hui. Où en est l'application du plan de rénovation des grands ports maritimes ? Près de 220 millions d'euros ont été investis depuis 2008. Mais les autorisations d'engagement baissent de 40 %  dans ce budget : pensez-vous vraiment que les ports aient achevé de rattraper leur retard d'investissement ?

Le registre international français (RIF) a sauvé le pavillon français et préservé l'emploi de nos marins, puisque le tonnage global de la flotte française à l'international a augmenté. Pourtant la France a fait le choix courageux de s'imposer une proportion d'emplois communautaires - un tiers, ce que la plupart des autres pavillons internationaux, luxembourgeois, britannique, n'appliquent pas. Cependant, nous attendons de nouvelles mesures pour renforcer encore la compétitivité de notre pavillon, sur le plan social comme sur le plan fiscal. Qu'en pensez-vous ?

La réforme portuaire de 2008 a modifié la gouvernance des grands ports maritimes, mais sans leur donner les coudées assez franches pour qu'ils puissent eux-mêmes prendre les décisions de leur développement. Alors qu'en Allemagne, aux Pays-Bas et même en Espagne, les ports relèvent des autorités locales, même lorsque l'Etat en est resté propriétaire, nous avons maintenu nos grands ports maritimes dans le giron de l'Etat, sans rompre avec la prudence, sinon l'attentisme de l'administration. Ne pensez-vous pas qu'il est grand temps de confier la gestion des ports à des autorités locales, comme partout ailleurs en Europe ?  L'Etat veut à tout prix garder la main sur tout : il en résulte une paralysie certaine.

Mme Odette Herviaux. - Depuis des années, Charles Revet et moi partageons les mêmes analyses, les mêmes interrogations. Les grands ports maritimes et tous les ports français jouent un rôle crucial pour notre économie et le développement du territoire. Je me réjouis du lancement d'une politique maritime intégrée et d'une stratégie maritime de façade, que nous appelions de nos voeux depuis longtemps. Sur le plan strictement budgétaire, nous nous heurtons à une difficulté de lecture, en raison de l'intégration de la pêche dans la partie transport maritime. Les comparaisons sont compliquées, beaucoup de domaines sont rattachés au développement durable, notamment les grands fonds. Nous avons intérêt à travailler en partenariat avec nos collègues de la commission des affaires économiques.

Mme Laurence Rossignol. - Vous ne serez pas surpris que je vous interroge sur le canal Seine-Nord. Le projet a eu droit l'année dernière à une belle inauguration mais il semblerait que seuls les petits fours avaient été financés...Vous savez que les élus de la région sont très attachés au projet : ils s'interrogent sur son avenir.

M. Philippe Esnol. - Ma région est située à l'arrivée du canal Seine-Nord, à la confluence de la Seine et de l'Oise. L'enjeu est évidemment considérable pour l'Ile-de-France. Et pour le développement du transport fluvial.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. - L'enjeu du canal Seine-Nord est majeur, il donne un sens au transport fluvial. Encore faut-il une bonne jonction avec les ports maritimes français.

M. Charles Revet, rapporteur. - Nous sommes inquiets.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. - J'entends beaucoup de choses au sujet du canal Seine-Nord : il aurait été financé avant le 6 mai, mais pas ensuite. Financé par un coup de baguette magique, sans doute ? Ces rumeurs et suspicions motivées par des arrière-pensées politiciennes ne font pas de bien au projet. Les autorités européennes s'interrogent, d'autant que certains invoquent une forte participation des fonds européens. En réalité celle-ci serait de 6 %, par un choix de l'ancien ministre de l'écologie Jean-Louis Borloo qui avait sans doute d'autres priorités à financer. Bouygues, le partenaire, avait exprimé des doutes sur le bouclage financier bien avant les élections : en février dernier. Et c'est à nous que l'on reproche un abandon !

Comment donner une chance à ce projet ? D'abord en définissant l'enveloppe financière, notamment en mobilisant les fonds européens, ce qui n'a pas encore été fait. Puis en s'interrogeant sur la pertinence du PPP, d'autant que le partenaire privé a prévenu qu'il ne serait pas au rendez-vous. Il y a environ 1,5 milliard d'euros à trouver. Les collectivités sont très sollicitées et il faudra définir les modalités de la participation de l'Etat. J'ai demandé une analyse à l'inspection générale des finances et au conseil général du développement durable, elle ne sera ni à charge, ni à décharge, mais il faut songer aussi à protéger nos ports maritimes. Car si le canal doit devenir un axe de desserte du territoire français à partir des ports de l'Europe du Nord, il faut y réfléchir à deux fois et peut-être préférer des travaux pour renforcer la liaison Le Havre-Dunkerque ? Nous avons besoin de temps pour mettre de l'ordre dans le dossier, après un lancement en avril 2011 dans la précipitation et selon un calendrier insoutenable. Prenons également garde à ne pas susciter des attentes illusoires dans les territoires : j'ai lu que 15 000 emplois seraient créés avec la construction du canal. C'est une invention.

Lorsqu'un projet prend une telle mauvaise tournure, il faut construire une alternative, revoir peut-être le cahier des charges. Je ne m'appelle pas M. Borloo, je n'ai pas la science infuse ni les financements magiques, je ne m'adonne pas à des effets de tribune en assénant des contre-vérités à tout instant, parce que je respecte les gens concernés par ce projet.

La question maritime n'est ni de droite ni de gauche, elle mérite une union sacrée. Et lorsque Charles Revet parle, même le ministre se tait. Nous partageons le même constat. Notre stratégie doit consister à bâtir une politique maritime intégrée. Le gouvernement a recréé un ministère de la mer et de la pêche, au sein du ministère des transports, car nous ne tirons pas suffisamment bénéfice de nos façades maritimes, ni en métropole, ni outre-mer. Le Grenelle de la mer a été intéressant, dans sa démarche sinon dans les résultats. Nous lancerons une nouvelle concertation afin de faire éclore cette stratégie maritime, qui exige de mettre l'accent sur les infrastructures portuaires, sur la recherche, sur tout ce qui conforte l'activité maritime. Il nous faut en convaincre tous les acteurs, y compris les administrations d'Etat, inadaptées et fragilisées.

Vous avez failli me convaincre sur la décentralisation portuaire. Je veux que les collectivités soient mieux associées aux enjeux portuaires et d'aménagement territorial, sans cloisonnement entre les deux. Mais une décentralisation malhabile, on l'a vu, peut aussi ligoter les initiatives locales. Rien ne peut se faire contre la volonté des territoires. Nous avons besoin de mécanismes de codécision. Les lois de décentralisation n'ont pas donné aux régions compétence sur les ports...

M. Charles Revet. - Ce n'est pas ce que je propose !

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. - Il nous faut mobiliser tout le monde, armateurs, décideurs locaux,... Je vous invite à mobiliser vos assemblées, pour soutenir le développement d'une politique maritime intégrée.

M. Michel Teston, vice-président. - Nous en venons au transport aérien.

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur pour avis des crédits de l'aviation civile. - Comme les années précédentes, une partie du produit de la taxe de l'aviation civile sera reversée au budget général, alors que le budget de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) est structurellement déficitaire. Par conséquent, les redevances versées ne couvrent pas le coût du service rendu : l'écart est d'environ 15%, soit 110 à 115 millions d'euros tous les ans. La DGAC est fortement endettée, en raison des investissements qui lui sont nécessaires, mais aussi en raison d'un important déficit de fonctionnement. Sa dette a gonflé de 40% en quatre ans pour atteindre 1,2 milliard d'euros. Néanmoins, on la pénalise encore en laissant subsister un déficit d'exploitation illégitime. La direction ne devrait-elle pas recouvrer l'intégralité du produit de la taxe de l'aviation civile ?

S'agissant des crédits affectés à la recherche, la comparaison avec l'Allemagne est peu flatteuse. Le programme d'investissements d'avenir (PIA) depuis 2010 amorce une réduction de cet écart : 8 milliards d'euros financent la recherche, 7,5 milliards d'euros la filière industrielle aéronautique, l'un des rares domaines d'excellence français, le premier secteur exportateur. Toutefois, le PIA doit s'achever l'an prochain : comment maintenir un effort de recherche soutenu dans ce domaine très créateur d'emplois - 13 000 embauches en 2011 ? Une clause de revoyure sur le PIA permettrait-elle de le financer à nouveau ?

Le lien entre les aéroports et la capitale est une question ancienne. Le projet de Charles de Gaulle Express a fait l'objet d'un rapport de Pierre-Henri Gourgeon. Les opérateurs semblent prêts à s'engager. Le mode de financement est-il arrêté ? Les engagements des opérateurs sont-il suffisants? Le projet est impensable sans un effort de desserte des territoires traversés par ce train. Se pose en outre la question de la ligne B, parallèle à ce train direct, et celle de la desserte par le Grand Paris Express, notamment jusqu'à l'aéroport du Bourget. Sur le chemin de Roissy se trouve en effet le premier salon de l'aéronautique et de l'espace au monde, le premier aéroport d'affaires d'Europe, et le musée de l'air et de l'espace, vitrine touristique mondiale. Préservons au moins, dans les arbitrages sur le tracé du Grand Paris Express, la gare du Bourget, enjeu majeur pour l'industrie et le territoire, même si la liaison ne va pas jusqu'à Roissy.

M. Philippe Esnol. - Face aux nuisances croissantes du trafic aérien, je souhaite voir renforcée l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa). Notre collègue député Jacques Alain Bénisti est beaucoup plus virulent que moi, mais nous demandons tous deux que l'on revienne sur l'arrêté pris par Nathalie Kosciusko-Morizet. Procédant à un relèvement des altitudes en Ile-de-France, il soulage - à peine - quelques populations pour en pénaliser beaucoup d'autres. J'habite juste sous le passage des avions qui atterrissent à Roissy toutes les cinq minutes à partir de cinq heures du matin. C'est insupportable. Conflans n'est pourtant pas tout près de l'aéroport !

Je vous saurais gré de solliciter la DGAC sur la mise en place de la descente continue. Les pilotes de ligne nous assurent de sa faisabilité technique, mais les contrôleurs aériens s'y opposent. Il en va de la tranquillité de millions de Franciliens !

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. - L'aéronautique est un tel enjeu économique pour la nation qu'elle fera l'objet de la mobilisation de toutes les administrations. L'aéronautique est aussi facteur de développement de la recherche ; 2 milliards d'euros du PIA ont permis d'accompagner le développement de l'A350 - à hauteur de 500 millions d'euros -, celui du successeur de l'A320, des hélicoptères Super Puma et Dauphin, ainsi que du projet de construction d'un avion régional de 90 places - un créneau manquant. Nous participons en outre au projet européen SESAR sur la gestion aéroportuaire.

Le déficit de la DGAC augmentera encore jusqu'en 2014, pour ne diminuer qu'à partir de 2015. Nous étudions la possibilité de lui affecter à nouveau l'intégralité du produit de la taxe de l'aviation civile. Nous cherchons aussi à diminuer un certain nombre de taxes qui pèsent aujourd'hui sur le secteur et les compagnies aériennes, notamment françaises. La moitié des taxes versées à Aéroports de Paris est en effet payée par Air France...

Je partage votre point de vue sur le CDG Express, j'y suis favorable. Une capitale comme Paris en a besoin, car les modes de transports actuels ne sont pas satisfaisants. Toutefois, on ne peut mener ce projet à bien sans améliorer également les transports en commun quotidiens des Franciliens. Un rapport sur ces questions a été demandé par Cécile Duflot à Pascal Auzannet. Le PPP ayant été abandonné pour le CDG Express, un financement public de la part de tous les acteurs  peut désormais être envisagé - ADP, RFF, SNCF, RATP -, en plus de la contribution des usagers. Nous nous battrons pour Roissy, et c'est dans ce cadre là qu'interviendra une réponse pour le Bourget.

Les nuisances liées aux approches aériennes font l'objet d'un contentieux. De 2007 à 2011, Nathalie Kosciusko-Morizet avait fait de la lutte contre les nuisances aéroportuaires un combat prioritaire. Ses objectifs n'ont pas été atteints, son dispositif ayant été censuré pour vice de procédure par le Conseil d'Etat. Nous avons purgé le dispositif de ses vices, mais la question demeure sur le fond et la haute juridiction en reste saisie. Je ne me prononcerai donc pas sur ce point. L'approche retenue par l'ancienne ministre a toutefois eu pour effet d'augmenter le nombre de personnes affectées, bien qu'avec moins d'intensité... Le dossier n'est pas abandonné : nous sommes aujourd'hui à près de 50% de descentes continues et travaillons à une amélioration. Des propositions pourront être faites dans quelques mois, je souhaite une concertation avec les collectivités territoriales sur ce dossier compliqué.

M. Charles Revet, rapporteur pour avis. - Lors des auditions, nous avons compris que les étudiants de l'Ecole nationale supérieure maritime (ENSM) avaient eu des difficultés à réaliser la partie pratique de leur scolarité, des obstacles réglementaires et d'organisation les ayant empêchés d'embarquer.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. - La situation s'améliore.

M. Charles Revet, rapporteur pour avis. -  Elle est absurde.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. - En outre, la pluralité des sites de l'ENSM pose problème. Je souhaite que nous ayons cette discussion ensemble. Nous devons moderniser le site du Havre, mais en l'absence de projet d'ensemble de maintien des sites, on ne fera que l'affaiblir.

M. André Vairetto. - Le président de la République a demandé un pacte de croissance au sommet européen des 28 et 29 juin derniers. Il me paraîtrait inopportun que les opérations pouvant bénéficier de cette dynamique se trouvent bloquées. Je pense notamment au Lyon-Turin. Le tunnel ferroviaire bénéficie d'un engagement de l'Union européenne à hauteur de 672 millions d'euros, 40% du coût de l'investissement. Les deux Etats sont d'accord sur leurs parts respectives.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. - Je m'en tiendrai aux conclusions du sommet franco-italien, qui définira la politique commune aux deux parties et le bon rythme - supportable pour chacune.

M. Michel Teston, vice-président. - Je remercie le ministre pour sa disponibilité, le temps qu'il nous a consacré, et la qualité de ses réponses.

Loi de finances pour 2013 - Mission « Écologie, développement et aménagement durables » (transports maritimes) - Examen du rapport pour avis

La commission examine le rapport pour avis sur les crédits « transports maritimes » de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » du projet de loi de finances pour 2013.

M. Charles Revet, rapporteur pour avis. - Vous connaissez ma position, constante depuis tant d'années déjà : je ne me résous pas au déclin de l'activité maritime française en général, et du transport maritime en particulier. Nous disposons des plus beaux atouts en Europe de par nos façades maritimes, les transports maritimes n'ont pas cessé de progresser ces dernières décennies, mais nous faisons toujours moins ! Nous reculons dans un marché toujours plus grand, nos voisins européens nous dépassent et nous surpassent largement : je ne suis pas marin, mais ma fibre maritime ne peut accepter un tel recul, parce que je suis convaincu qu'il n'a rien d'inéluctable !

Je sais que je peux compter ici sur votre écoute, car nous partageons les mêmes objectifs : faire avancer notre pays sur les métiers et les technologies de demain, pour développer nos savoir-faire, notre emploi, dans un monde désormais soucieux de sobriété énergétique, à une époque où nous devons assurer la transition écologique de notre économie.

Il y a bien sûr de la politique dans tout cela, mais aussi un besoin de bon sens  face aux réalités : le transport maritime achemine 90 % des marchandises que nous consommons ; nos ports sont mal reliés au chemin de fer et aux voies navigables, ce qui en bride le développement, alors même que les ports européens concurrents sont saturés ; nous avons des objectifs très élevés de report modal, nous ne les atteindrons pas sans utiliser mieux notre domaine maritime, qu'il s'agisse du transport ou de l'énergie ; nous avons encore des savoir-faire en matière maritime, qui sont méconnus, insuffisamment valorisés, mais qui représentent un atout considérable.

J'en viens aux chiffres de ce projet de budget.

Il y a d'abord les 142 millions d'euros du volet « sécurité et affaires maritimes » inscrits au programme 205. Ce programme est élargi à la pêche depuis cette année mais je ne vous parlerai pas de la pêche puisque ce secteur relève de la commission des affaires économiques.

A quoi iront ces 142 millions l'an prochain ?

Pour plus de moitié ces crédits compenseront les exonérations de charges patronales pour l'emploi de marins français sur les navires inscrits au registre international français, le RIF. Cette mesure de soutien à la flotte de commerce est indispensable : sans cette exonération, il est certain que le pavillon français reculerait encore plus, alors qu'il se maintient tant bien que mal en nombre de bateaux - pour les chiffres des trafics et des navires, je vous renvoie à mon rapport écrit.

L'autre moitié se répartira ainsi : 20 % iront aux actions de sécurité maritime proprement dite, c'est-à-dire aux moyens techniques des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS), des centres de sécurité des navires (CSN) et de la société nationale de sauvetage en mer (SNSM) ; 20 % iront à la formation des gens de mer et au soutien à l'emploi maritime, principalement à la nouvelle Ecole nationale supérieure maritime (ENSM), née en 2009 et toujours en cours d'installation ; les 10 % restant iront à des moyens techniques de soutien au programme.

Il y a ensuite, deuxième ensemble, la centaine de millions d'euros inscrits au programme 203 « Infrastructures et services de transports » et qui iront : pour une grosse moitié (soit 58 millions d'euros) à l'entretien des accès aux sept grands ports maritimes de métropole et aux quatre grands ports des départements d'outre mer : ce sont en particulier les travaux de dragage, que l'État est censé assumer à ses frais ; l'autre petite moitié de cette enveloppe, soit 45 millions d'euros, servira à cofinancer des infrastructures fluviales et portuaires.

Quels commentaires m'inspirent ces chiffres ?

Les crédits du volet « sécurité et affaires maritimes » reculent de 2 % en autorisations d'engagement et de 3 % en crédits de paiement : c'est une mauvaise nouvelle, même si le recul s'explique par celui des exonérations de charges pour le RIF, qui sont des dépenses de constat.

Le plus grave se situe du côté des investissements. Depuis 2008, des investissements ont été relancés dans nos grands ports maritimes : l'État y a mis 174 millions au titre du plan de relance portuaire, qui ont été inscrits dans les contrats de plan 2007-2013 ; puis l'État a encore ajouté, toujours sous la précédente législature, 50 millions grâce au plan de relance de l'économie. C'est peu dire que ces investissements étaient nécessaires ! Mais il faut continuer sur cette tendance ! Or, pour l'an prochain, le Gouvernement, ne prévoit d'autoriser que 45 millions d'investissements nouveaux : c'était 74 millions l'an passé, la chute est de 40 % !

Je déplore vivement ce recul de l'investissement dans nos grands ports, même si je sais bien que leur modernisation ne sert à rien sans leur désenclavement, et qu'il faut dépenser aussi hors de la circonscription portuaire pour relier mieux nos ports à la voie ferrée et aux fleuves. Les investissements de ces dernières années auraient-ils été suffisants, le temps serait-il venu de marquer une pause ? Je ne le crois pas, je suis même convaincu de l'inverse.

Pour ce fait majeur, je vous proposerai, mes chers collègues, et croyez bien que c'est par dépit, un avis négatif à ces crédits insuffisants.

J'aimerai, ensuite, attirer votre attention sur des sujets dont nous aurons à reparler l'an prochain à propos des transports maritimes.

Je crois nécessaire, tout d'abord, de parachever la réforme de nos grands ports maritimes. Je n'ai pas pu l'obtenir en 2008, je l'ai redit l'an passé dans un rapport d'information puis dans un débat en séance publique : il est grand temps de confier la gestion de nos grands ports maritimes aux collectivités et organismes économiques locaux. C'est même la condition nécessaire à ce qu'ils redémarrent vraiment ! Tous les ports qui réussissent en Europe sont entre les mains des autorités locales, même ceux qui sont restés propriété d'État, comme c'est le cas en Espagne. La réforme de 2008 représente un progrès, nous sommes parvenus à rendre la gouvernance portuaire un peu plus dynamique, davantage tournée vers le projet économique. Nous sommes également parvenus, certes péniblement, à mettre fin à une organisation du travail héritée d'un autre âge. Mais nous ne sommes pas allés assez loin, les responsables des ports n'ont pas les coudées assez franches, les décisions d'investissement doivent encore aujourd'hui attendre l'accord de l'administration centrale ; c'est un frein voire un blocage qui paralyse le développement de nos ports.

Il y a semble-t-il une légère amélioration de l'activité en 2012 : Marseille va lentement franchir la barre du million de conteneurs transités dans l'année, Le Havre les deux millions. Mais nos deux grands ports les mieux placés au sud et au nord de l'Europe restent largement derrière les autres grands ports européens. Comment se contenter d'une croissance si péniblement acquise lorsque la position géographique et les investissements récents nous font toucher du doigt des résultats deux fois, trois fois supérieurs ? Pourquoi se contenter de si peu, quand nos voisins, sur chacune de nos façades, font toujours mieux que nous ? Je vous rappelle qu'Anvers et Hambourg sont à dix millions et Rotterdam à 15 millions de conteneurs par an !

Un mouvement est en marche, on le voit en vallée de la Seine, avec un rapprochement des ports : comme en Allemagne, comme en Hollande, les ports veulent aller plus loin, assumer leur rôle véritable de « chef d'orchestre logistique ». Mais ils ont besoin de nous, et c'est par le développement de l'activité, par l'investissement que nous nous en sortirons « par le haut » !

Deuxième sujet d'importance : la compétitivité du pavillon français. Nous en avons débattu - trop peu, hélas ! - à l'occasion de la proposition de loi sur le cabotage maritime, que nous a présentée récemment Evelyne Didier.

C'est un sujet essentiel mais complexe, sur lequel nous devons avancer : c'est dans l'intérêt de nos emplois maritimes tous métiers confondus. Le sujet est complexe parce qu'il est économique, social et fiscal, parce que les règles sont souvent européennes mais nous avons des marges d'action. Ces marges d'action sont étroites, mais nous ne devons pas renoncer à les utiliser et nous devons le faire avec les parties prenantes : les marins et les gens de mer en général, les industriels, les autorités organisatrices de transports. Le RIF a été salutaire pour nos navires au long cours, il reste encore quelques améliorations à y apporter pour que nos navires naviguent à armes égales avec leurs concurrents européens. Nous devons trouver des moyens d'action contre la concurrence déloyale en matière de cabotage national, notamment avec les îles : c'est le sujet dont nous a parlé Evelyne Didier, il mérite toute notre attention.

Nous pourrions également améliorer la compétitivité du pavillon français en prenant deux mesures législatives qui me paraissent devenir urgentes :

- il nous faut actualiser la loi de 1992 sur la sécurité des approvisionnements énergétiques. Cette loi impose que les navires français transportent au moins 5 % du pétrole brut que nous raffinons. Or, à mesure que nos raffineries ferment, cette obligation perd sa raison d'être, à savoir que la France maîtrise ses approvisionnements « stratégiques » d'énergie. Il faut donc inclure dans cette obligation les produits raffinés, ainsi que le gaz liquide : nous rétablirons la maîtrise de cette « réserve stratégique » et nous ferons du bien à notre pavillon national ;

- il nous faudra débattre également pour savoir si, devant le risque grandissant de la piraterie maritime, nous autorisons ou pas l'embarquement de gardes armés à bord de nos navires marchands. D'autres pays ne s'en privent pas, notamment la Grande-Bretagne, dont le pavillon est déjà bien plus compétitif que le nôtre. Nous avons choisi le recours à la Marine nationale, mais elle n'est pas suffisamment disponible. Les risques changent vite en la matière, nous devons être réactifs, c'est aussi un critère de compétitivité de notre pavillon.

Mon rapport pour avis comporte encore d'autres pistes, notamment en matière d'enseignement maritime, dont je suis sûr que nous aurons à reparler.

En conséquence, je vous invite à donner un avis défavorable à l'adoption de ces crédits.

Mme Odette Herviaux. - Je partage votre constat, mais pas votre conclusion. On peut certes regretter la baisse des investissements portuaires, mais vous en donnez vous-même une bonne raison : les investissements portuaires, pour être efficaces, doivent s'accompagner d'autres investissements de connexion aux réseaux ferré et fluvial, hors de la circonscription portuaire, il faut de la cohérence.

Faut-il associer davantage les collectivités locales à la gestion des ports ? Certainement, mais doit-on pour autant leur confier l'ensemble des investissements, au moment où leurs propres moyens deviennent des plus contraints ? Ce qui manque, c'est plutôt un État stratège, qui investisse de façon cohérente non seulement avec le reste des réseaux de transports, mais également dans le cadre de la politique maritime intégrée.

Enfin, face à la piraterie,  faut-il autoriser l'embarquement de gardes armés sur nos navires marchands ? Il faut faire attention en la matière, parce que la présence de gens armés à bord n'est pas sans risque, pour eux-mêmes comme pour l'équipage, avec des conséquences qu'il faut bien mesurer en matière de responsabilité.

M. Jean-Jacques Filleul. - Je partage également les constats de Charles Revet, mais je sais qu'ils n'ont guère changé depuis une quinzaine d'années. Lorsque je rapportais ce budget comme député, je déplorais déjà le défaut d'accès multimodal à l'hinterland, condition indispensable pour que les marchandises soient évacuées rapidement des quais : sur ce point, les choses n'ont guère avancé, ou si peu ! Même chose pour l'entretien de nos voies navigables, où les progrès sont bien trop lents. Est-ce une raison, cependant, de refuser ses crédits au ministre ? Je ne le crois pas, car je suis satisfait de ce qu'il vient de nous dire : il y a bien longtemps que nous n'avions pas entendu un discours aussi cohérent, au bénéfice du développement portuaire. Je lui donnerai donc toutes ses chances, en adoptant ce budget !

M. Charles Revet, rapporteur pour avis. - Je me satisfais également de l'écoute et de la cohérence du ministre, qui connaît très bien le maritime et le portuaire. Cependant son budget subit des coupes sombres : je dois bien en tenir compte ! L'État ne tient pas ses engagements, je le dis depuis assez de temps pour ne pas pouvoir me taire aujourd'hui. Un exemple : l'armateur MSC a décidé de s'installer au Havre il y a quelques années, en demandant que le fret qu'il débarquerait puisse être évacué par la voie d'eau ; l'enjeu est de taille, puisque son activité ferait doubler le transit de conteneurs au Havre ; or, que constate-t-on ? MSC est venu, il a rénové son quai et investi 600 millions d'euros - mais l'accès à la Seine n'est toujours pas opérationnel, l'administration tergiverse pour quelques dizaines de millions d'euros entre plusieurs solutions et nous nous faisons promener de service en service, d'étude préalable en étude préalable... Cela ne peut plus durer, à ce rythme c'est notre activité portuaire tout entière qui va sombrer !

Vous me dites, Madame Herviaux, que les investissements portuaires doivent être cohérents avec le raccordement aux réseaux, j'en suis bien d'accord ! Ce qui me frappe plutôt, et vous l'avez constaté avec moi lors de notre rapport d'information, c'est le manque d'ambition en la matière, y compris des ports eux-mêmes. D'où vient la frilosité de nos grands ports maritimes ? De leur tutelle : c'est l'État qui les réfrène ! En préparant la réforme portuaire de 2008, j'ai rencontré tous les directeurs de ports, ainsi que leurs prédécesseurs : tous, je dis bien tous, m'ont dit qu'ils n'avaient jamais reçu d'encouragement à investir, ni même de réponse claire lorsqu'ils proposaient un programme d'investissement dans le temps ! Ailleurs en Europe, les ports ont pris leurs responsabilités parce qu'ils ont les coudées franches et même lorsque l'État est propriétaire, comme en Espagne, il se contente de coordonner ses interventions : les projets de développement, eux, sont faits par les acteurs locaux.

Face aux pirates, ensuite, nous ne pouvons pas laisser notre marine marchande sans solution quand la Marine nationale ne peut répondre aux demandes de protection. Ou bien, une fois encore, c'est accepter de perdre de l'activité, je ne m'y résous pas.

Enfin, Monsieur Filleul, je ne dirai pas que rien n'a changé depuis quinze ans dans nos ports : la réforme de 2008 a modifié l'organisation du travail portuaire, c'est important - au prix de quelques grèves qui resteront dans les mémoires... Ce que je dis, c'est que le problème est maintenant du côté de l'investissement et que nous ne le règlerons pas sans modifier plus avant la gouvernance des ports, en la confiant aux acteurs économiques et politiques locaux, avec tout l'accompagnement de l'État et toutes les précautions nécessaires : c'est la prochaine étape pour que nos ports réussissent !

A l'issue de ce débat, contre l'avis du rapporteur pour avis, la commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits « sécurité et affaires maritimes » inscrits au programme 205 et des crédits maritimes inscrits au programme 203 « Infrastructures et services de transports » de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables ».

Loi de finances pour 2013 - Mission « Écologie, développement et aménagement durables » (transports aériens) - Examen du rapport pour avis

La commission examine le rapport pour avis sur les crédits « transports aériens » de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » du projet de loi de finances pour 2013.

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur pour avis. - Il me revient de vous présenter les crédits du contrôle et de l'exploitation aériens, qui font l'objet d'un budget annexe bien connu, le BACEA. Je vous remercie, Monsieur le Président, de m'avoir donné cette occasion d'examiner un domaine qui m'intéresse au plus haut point, que j'ai d'abord connu comme maire d'une commune aéroportuaire et maintenant comme élu national.

La filière aéronautique est devenue notre premier exportateur national. Elle dégage un excédent de 18 milliards d'euros et recrute chaque année 11 000 salariés : nous sommes bien là au coeur d'un secteur clé de compétitivité nationale et nous avons tout intérêt à ce qu'il reste dynamique. Lors de son audition au Sénat la semaine dernière, Louis Gallois citait avec raison la filière aéronautique en exemple : c'est la principale filière d'excellence française sur le plan industriel. L'intégration de la recherche et de l'industrie y est exemplaire, à travers le Conseil pour la recherche aéronautique civile (CORAC), créé à l'issue du Grenelle de l'environnement pour coordonner toute la recherche dans le secteur. La filière est également exemplaire pour ses relations entre donneurs d'ordre et sous-traitants. Nous avons des atouts, nous sommes encore leader, nous coopérons de manière efficace avec nos partenaires européens, nous exportons et nous recrutons : voilà ce que disent les acteurs de l'aéronautique, en nous demandant de ne pas leur mettre du plomb dans l'aile...

Quel est le risque ? Le contexte très international du secteur aéronautique vient de changer en profondeur et brusquement : la crise économique mondiale a frappé durement le secteur aérien. Les conséquences sont très importantes pour les compagnies aériennes, elles peuvent le devenir pour les plateformes aéroportuaires, pour toute la filière aéronautique et les emplois indirects des transports aériens. La crise a redistribué des cartes maîtresses dans la compétition internationale : l'année 2013 est cruciale pour notre secteur aéronautique et c'est dans ce contexte très particulier que j'ai analysé ce budget annexe.

Les grandes tendances avec quelques chiffres, d'abord.

Les crédits de paiement du budget annexe progressent de 3,3 %, à 1,868 milliard d'euros et ses opérations en capital augmentent de 6,7 %, à 418,4 millions. Dans le même temps, et pour la troisième année consécutive, la DGAC diminuera ses effectifs de 116 emplois, soit 1 % du total.

Ce budget est donc en continuité des précédents : le Gouvernement cherche à contenir les dépenses de fonctionnement, en particulier l'évolution des emplois de la DGAC, pour mieux consacrer l'argent public aux investissements, car ce sont bien les investissements qui renforcent la compétitivité de notre territoire. En matière d'aérien, le moins qu'on puisse dire c'est qu'il n'y a pas beaucoup de « changement », même maintenant...

Un mot sur ces investissements, cependant.

La DGAC continue de préparer le ciel français aux standards européens en matière de contrôle du trafic aérien et de la navigation aérienne : ce sont, en particulier, les programmes du « ciel unique européen », les SESAR et autres FABEC. SESAR (Single European Sky Air traffic management Research) est un ensemble de règles et de techniques communes pour uniformiser la gestion du trafic aérien, programme lancé il y a bientôt dix ans et qui doit s'achever en 2015. Et le FABEC (Functionnal Airspace Block Europe central), c'est le bloc d'espace aérien fonctionnel d'Europe centrale dont nous faisons partie, pour gérer effectivement en commun le trafic aérien. Les techniques utilisées par les dizaines de milliers de contrôleurs aériens et de personnels navigants sont en jeu, l'affaire n'est pas mince et coûte évidemment cher. Cependant, ces investissements sont nécessaires pour « intégrer » le ciel unique et de ce point de vue, les transports aériens sont en avance sur le ferroviaire, par exemple...

Je note, parmi les investissements, la préparation effective du nouvel aéroport de Notre-Dame-Des-Landes : des crédits sont réservés pour les acquisitions foncières, d'autres pour la construction et l'équipement des infrastructures de navigation aérienne - le projet devient effectif ; il s'inscrit, là encore, dans la continuité de l'action gouvernementale.

Du côté du fonctionnement, maintenant, où en est-on ?

Pour mémoire, l'emploi, avec les quelque 11 000 postes de la DGAC et 1,149 milliard d'euros, représente les deux-tiers du budget annexe. L'enveloppe augmente légèrement, de 2,7 %, alors que le nombre d'emplois diminue de 116 équivalents temps plein. En matière de fonctionnement, la priorité reste donc à la maîtrise des dépenses : l'autorité de tutelle demande à la DGAC de rationaliser davantage son service, de mutualiser là où c'est possible, voire de supprimer les services inutiles. Cela dure depuis quelques années et il semble que nous soyons arrivés près de l'os : la DGAC ne va pas pouvoir continuer à supprimer 100 emplois par an sans devoir toucher à la qualité de service elle-même, ce que personne ne souhaite quand il s'agit de contrôle et de sécurité aériens. En tout cas, aller plus loin suppose des réorganisations fortes et une négociation souple, bien au-delà des seuls aspects budgétaires.

Deuxième point essentiel du fonctionnement, celui-ci très préoccupant : la part des charges financières dues à l'endettement, qui sont devenues très difficiles à supporter pour la DGAC.

La DGAC s'est endettée de 337 millions supplémentaires en quatre ans, c'est un bond de 40 % ! Il y a bien sûr l'effet de la crise, qui déséquilibre l'exploitation : la DGAC a perdu 16 millions l'an passé et l'administration prévoit 25 millions de déficit pour l'an prochain. Il y a aussi la « bonne dette », celle de l'investissement, qui est nécessaire même en période de crise.

Mais ce qui est plus difficile à comprendre, c'est de voir le budget général de l'État continuer à prélever une part de la taxe de l'aviation civile (TAC), alors qu'il faudrait laisser à la DGAC l'intégralité de cette ressource. La TAC est acquittée par les passagers et par le fret qui transitent par nos aéroports. Chaque année, plus de 100 millions d'euros de cette taxe abondent le budget général de l'État : dans ces conditions, elle couvre 85 % seulement du coût de l'exploitation et du contrôle aériens. Le budget annexe en est structurellement déséquilibré, la DGAC doit s'endetter pour financer son fonctionnement : elle va dépenser l'an prochain 38 millions d'euros en seules charges financières, alors que l'État prélève dans la taxe qui est censée payer le service rendu...

Cette situation devient difficilement tolérable en période de crise. La DGAC fait des efforts pour comprimer ses coûts, elle investit pour se moderniser, elle n'a plus grand chose à vendre de son patrimoine immobilier, - entre nous, les tours de contrôle se vendent mal... - mais l'État lui retire plus de 100 millions par an : ce n'est pas raisonnable. C'est pourquoi je suis favorable à l'affectation intégrale de la TAC au budget annexe de l'aviation civile.

Or, l'administration nous présente un plan de désendettement de la DGAC qui paraît optimiste sur la conjoncture des années à venir. Certes, le trafic a repris à l'échelle mondiale depuis 2011, pour les voyageurs bien plus que pour le fret. En France même, le nombre de voyageurs a progressé de 7 % l'an passé, c'est favorable, quoiqu'il faille pondérer ce bon résultat par l'effet de rattrapage sur l'année 2010, où le trafic avait été complètement interrompu suite à l'éruption du volcan islandais Eyjafjöll. La tendance est fragile, les opérateurs nous l'ont bien dit et il faut prendre en compte la structure même du trafic. Le nombre d'avions augmente moins vite que celui de voyageurs : on remplit mieux les avions, c'est une bonne chose pour l'environnement mais une mauvaise pour les taxes. Ensuite, le trafic progresse bien plus à l'international qu'à l'intérieur, un opérateur majeur nous a même confié ses plus vives inquiétudes sur le trafic domestique depuis septembre dernier. Le secteur aéronautique est très sensible à la conjoncture : il suffit d'une moindre croissance, pour un effet amplifié sur le trafic.

Dans ces conditions, l'année 2013 sera cruciale pour l'activité aéronautique : ou bien le trafic reprend, et la DGAC pourra se désendetter comme l'espère le Gouvernement, ou bien la reprise ne se confirme pas, et nous aurons toutes les chances de devoir redire la même chose l'an prochain, avec bien des dégâts entre temps. Je n'annonce pas un scénario noir, mais je m'inquiète d'un possible grippage de la croissance, qui aurait des conséquences directes et fortes sur le secteur aérien.

Air France KLM est en position difficile, avec un risque important dont la compagnie a pris toute la mesure.

La dégradation des comptes d'Air France s'est brusquement accélérée cette année : après avoir perdu 350 millions d'euros en 2011, alors que le résultat était encore positif en 2010, Air France a perdu 663 millions au cours du seul premier semestre 2012, malgré l'augmentation du trafic ! Il y a eu, certes, la hausse du carburant, qui a représenté une charge supplémentaire de 400 millions. Mais l'explication tient plus profondément au modèle économique de notre champion national. En fait, la crise a mis sur la sellette toutes les compagnies aériennes européennes, le mouvement est allé très vite. Les compagnies américaines ont continué à faire des bénéfices importants et plus encore les compagnies asiatiques et moyen-orientales : sur les 8 milliards de dollars de bénéfices à l'échelle mondiale, les compagnies asiatiques en ont capté 62 % et les compagnies américaines 16 %, tandis que les européennes devaient se contenter d'à peine 6 %, bien en dessous de leur part de marché. C'est que la marge nette des compagnies européennes est inférieure à 1 %, bien en deçà de celle de leurs concurrentes asiatiques comme américaines.

Air France, avec son nouveau président Alexandre de Juniac, a engagé un plan courageux pour revenir à l'équilibre en 2015, en ayant entre temps changé le modèle économique et industriel de l'entreprise. Comme les autres compagnies européennes, notre champion national subit de plein fouet une double concurrence : celle des compagnies low cost qui lui prennent des parts de marché sur les moyens courriers et de plus en plus de vols domestiques ; celle des compagnies asiatiques et du Golfe persique, qui ont le grand avantage de ne pas payer leur plateforme aéroportuaire et qui sont très agressives aussi bien sur les tarifs en classe économique, que sur la qualité de services en business et en première. Avec le plan « Transform 2015 », Air France KLM entend rester une compagnie globale attachée à son hub de Roissy, mais avec des coûts supportables. Il faut pour cela qu'elle gagne globalement 20 % de productivité, qu'elle investisse pour développer le service et qu'elle supprime des lignes et des activités déficitaires.

Je n'en dis pas davantage sur ce volet, la direction d'Air France KLM me paraît faire un excellent travail, la négociation a réussi avec les pilotes et avec les personnels au sol, elle est à continuer avec les navigants commerciaux : j'espère qu'ils trouveront d'ici ce printemps les voies d'accord pour que notre champion national atteigne ses objectifs. Les personnels sont très attachés à la compagnie et sont conscients des enjeux, je salue leur engagement et leur mobilisation pour son redressement.

De notre côté, il faut veiller à ne pas charger trop « la barque » d'Air France KLM et nous défaire de l'idée que les compagnies aériennes seraient florissantes. C'est vrai pour les taxes d'aéroport : Air France paie sa plateforme 30 % plus cher que KLM ne paie la sienne à Amsterdam. Il y a une raison à cela : ADP réalise des investissements colossaux, que la plateforme doit bien financer. Dès lors, on ne peut pas pénaliser ADP pour redresser Air France, d'autant que la compagnie n'est pas seule : tout changement tarifaire s'applique à toutes les compagnies.

Nous devons raisonner « global » en la matière : l'enjeu, c'est bien l'attractivité de notre territoire, en l'occurrence de nos plateformes aéroportuaires, et la possibilité pour des entreprises françaises de compter encore dans l'activité aéronautique. Le rapport Gallois nous incite à un tel raisonnement global. Les sujets sont éminemment liés, entre l'entreprise Air France, l'attractivité de la place de Paris, le soutien à la recherche dans l'aéronautique, la performance de la filière aéronautique, et finalement l'emploi dans ce domaine d'activité. Le moment budgétaire pousse bien sûr à retirer ici ou là des moyens pour les redistribuer à d'autres, c'est normal, mais nous devons dans ce domaine jouer collectif et ne pas opposer les opérateurs.

Aéroports de Paris a bien changé en quelques années, étant passé du statut d'EPIC à celui de société anonyme, puis cotée en bourse. La plateforme de Roissy et plus récemment celle d'Orly font de gros efforts de compétitivité, avec un programme d'investissement très conséquent. ADP a développé ses activités commerciales et immobilières, parvenant à trouver des revenus qui ne sont pas directement liés au trafic. ADP connaît une révolution tranquille, attendue, avec une très nette amélioration de son service au point que certains de ses aérogares sont en tête du classement mondial. Il faut bien sûr veiller à ce que les taxes appliquées aux compagnies et à Air France en particulier, ne les affaiblissent pas dans la conjoncture d'aujourd'hui : c'est l'objet du contrat de régulation, qui encadre les évolutions tarifaires.

Nous devons également améliorer la liaison de l'aéroport de Roissy avec la capitale : c'est le sujet du Charles-de-Gaulle Express. Ici, quoique je déborde de « mes » crédits, je veux dire que le dossier est mûr : le tracé, le type de service, le matériel, et jusqu'au tour de table financier. Une mission lancée par le ministre vient de s'achever, il faut trancher le débat, ce sera bénéfique à la plateforme aéroportuaire, donc à l'Ile-de-France et à notre pays tout entier. De mon côté, je crois qu'il faut réaliser le CDG Express par un service direct, tout en renforçant l'accessibilité des territoires qu'il traversera, en particulier celui du Bourget, premier aéroport d'affaires en France, qui accueille tous les ans le plus grand salon aéronautique du monde.

En conclusion, j'aborderai deux sujets essentiels pour l'avenir : la recherche dans l'aéronautique et l'affaire des ETS.

Dans l'aéronautique, nos crédits de recherche sont inférieurs à ceux de nos voisins allemands. Cependant, la filière aéronautique a bénéficié depuis 2010 du programme d'investissement d'avenir (PIA), abondé par les 35 milliards du grand emprunt. Le programme arrive à échéance l'an prochain, ce qui provoque de fortes inquiétudes dans ce secteur d'activité : quelle en sera la suite ?

Enfin, la question de l'environnement se pose évidemment. Les avions contribuent peu au réchauffement climatique : d'après le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC), ils représentent environ 2 % des émissions de carbone. Mais leur part progresse chaque année, sans qu'une alternative aux carburants actuels paraisse accessible dans un délai proche. C'est un sujet de recherche sur lequel nous devons porter une attention particulière.

La Commission européenne vient tout juste d'annoncer le « gel » de la taxe carbone sur les compagnies aériennes, au moins jusqu'à la prochaine réunion de l'Organisation de l'aviation civile internationale, dans un an. Comme vous le savez, les Américains, les Russes, les Indiens et les Chinois, parmi d'autres, refusent l'application des ETS à leurs vols. L'idée était d'appliquer cette taxe carbone aux vols intercontinentaux à destination ou au départ de l'UE pour lutter contre le réchauffement climatique. La taxe est en vigueur depuis cette année et le restera pour les vols intra-européens. Pour les vols intercontinentaux, l'Organisation de l'aviation civile est compétente et c'est de son côté qu'il faudra désormais se tourner, plutôt que d'essayer de forcer la main aux compagnies qui sont en même temps nos principaux clients...

Il y aurait encore bien des sujets à aborder, notamment la lutte contre les nuisances aéroportuaires, ou encore la situation des aéroports de province.

Mais nous aurons d'autres occasions et pour le moment, au vu des éléments que je viens de vous présenter, je vous propose un avis de sagesse sur ces crédits. Une sagesse bienveillante, mais très attentive à ce que l'action publique facilite plutôt qu'elle ne contraigne cet important secteur qu'est l'aéronautique.

M. Philippe Esnol. - Je partage votre inquiétude devant l'endettement de la DGAC, votre souhait que le CDG Express soit lancé et je me soucie particulièrement de voir diminuer les nuisances aéroportuaires, qui posent des problèmes de plus en plus aigus. Cependant, je crois que le ministre nous a apporté des réponses satisfaisantes et que nous avons de quoi être optimistes, y compris sur le désendettement de la DGAC. C'est pourquoi je voterai ces crédits.

Parmi les réformes à venir, il faudrait renforcer le rôle de l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) et mettre en oeuvre des procédures de descente continue, qui sont bien moins bruyantes que celles que nous utilisons actuellement : il en va du confort de millions de Franciliens !

M. Charles Revet. - Je félicite M. Vincent Capo-Canellas, nous le rejoignons pour déplorer certaines incertitudes dans ce budget : le groupe UMP votera contre.

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur pour avis. - J'ai auditionné Victor Haïm, le nouveau président de l'ACNUSA. Il m'a fait part de ses idées, en particulier sur le régime de sanction des compagnies aériennes en cas d'infraction à la réglementation relative au survol, ainsi qu'en matière d'urbanisme à proximité des plateformes aéroportuaires. Nous en reparlerons l'an prochain.

La descente en continu diminue effectivement le bruit des avions et il est vrai que les populations supportent de plus en plus difficilement les changements de trajectoires. La DGAC fait des efforts pour contenir les nuisances sonores, elle n'a pas toutes les cartes en main puisqu'elle doit compter avec Eurocontrol, l'organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne. La réduction des nuisances passe également par la modernisation des flottes, c'est encourageant pour l'avenir.

A l'issue de ce débat, la commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».