Mercredi 22 avril 2020

- Présidence de M. René-Paul Savary, vice-président -

La téléconférence est ouverte à 10 heures.

Audition de Mme Isabelle Sancerni, présidente du conseil d'administration, et de M. Vincent Mazauric, directeur général, de la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF)

M. René-Paul Savary, président. - Mes chers collègues, j'ai le plaisir d'accueillir ce matin Mme Isabelle Sancerni, présidente du conseil d'administration, et M. Vincent Mazauric, directeur général, de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), pour une audition consacrée au suivi des mesures d'urgence prises dans le cadre de la lutte contre la pandémie de Covid-19.

Je vous prie de bien vouloir excuser l'absence du président Milon qui m'a demandé de le remplacer.

Cette audition se tient en téléconférence et est ouverte à la presse. Nous avons recours ce matin à un nouvel outil, en espérant que nous n'ayons pas de difficulté technique.

Notre audition poursuit l'objectif d'assurer l'information de la commission sur trois points.

Le premier point, c'est la façon dont la CNAF s'est organisée pendant le confinement pour assurer la continuité de ses missions, en particulier le service des prestations, compte tenu de la vulnérabilité d'un certain nombre d'allocataires, liée en partie à la fracture numérique que connaît notre pays.

Le second point, ce sont les dispositifs qui ont été déployés pour soutenir vos allocataires, afin que la crise sanitaire ne se double pas d'une crise sociale d'ampleur. Vous assurerez ainsi le versement, le 15 mai prochain, de l'aide exceptionnelle aux familles modestes annoncée par le Président de la République sur laquelle nous souhaitons des précisions. Les caisses d'allocations familiales (CAF) sont aussi très mobilisées dans le secteur de la petite enfance, qu'il s'agisse de l'accueil des enfants des soignants ou des aides aux différentes structures d'accueil du jeune enfant afin de préserver des capacités d'accueil en sortie du confinement. Quels enseignements tirez-vous de cette crise sur les besoins de vos allocataires et sur la façon dont la branche famille peut y répondre ?

Enfin, nous nous interrogeons bien sûr sur l'impact de la crise sanitaire sur les comptes de la branche. Quels sont les moyens supplémentaires déployés dans le cadre de cette crise et qui en sera le financeur en dernier ressort ?

Madame la présidente, monsieur le directeur général, cette audition est complémentaire des questionnaires qui vous ont été adressés par le président ou notre rapporteure, Mme Doineau. Nous souhaitons en effet que notre commission puisse bénéficier régulièrement de remontées d'informations à la fois qualitatives et quantitatives.

Mme Isabelle Sancerni, présidente du conseil d'administration de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF). - Vous avez souhaité nous entendre sur les actions menées par la branche famille depuis le début de la crise sanitaire. Durant les semaines de confinement qui se sont écoulées, il faut relever la mobilisation exceptionnelle de notre institution.

L'impératif pour la branche famille était non seulement de continuer à assurer ses missions auprès de ses allocataires et de ses partenaires, mais aussi de faire preuve de réactivité et de créativité.

Dès le 17 mars dernier, le conseil d'administration s'est organisé pour travailler en téléconférence afin d'adopter des mesures d'urgence, notamment pour aider les établissements d'accueil du jeune enfant (EAJE) et les autres équipements financés par la branche famille. Il fallait sécuriser le financement de nos partenaires afin qu'ils puissent continuer à assurer leurs services aux familles après la crise : l'accueil de la petite enfance, l'animation de la vie sociale, la parentalité, la jeunesse.

L'idée était de déployer un filet de sécurité qui puisse couvrir rapidement le spectre de nos missions et de nos partenariats. Les équipes de la CNAF ont élaboré en un temps record, en liaison avec les autorités de tutelle, des dispositifs, qui ont ensuite été votés par le conseil d'administration.

Le 17 mars, le premier dispositif voté concernait les aides exceptionnelles en faveur des EAJE, crèches publiques et privées, faisant l'objet d'une fermeture administrative : il a été décidé une aide forfaitaire par jour et par place. Son montant est de 27 euros pour les crèches publiques et de 17 euros pour les établissements privés, pour compléter leur indemnisation de l'activité partielle. Cette aide sera financée par le Fonds national d'action sociale (FNAS) de la CNAF.

Nous avons ensuite voté le 1er avril des mesures d'aide en faveur des EAJE ne faisant pas l'objet d'une suspension de l'accueil : micro-crèches, crèches familiales, EAJE rattachés à un établissement social, médico-social ou de santé. Cette aide permet de compenser en partie les baisses de recettes induites par une fermeture de places ; elle s'élève à 27 euros par jour et par place pour les crèches bénéficiant de la prestation de service unique (PSU) et employant des agents publics et à 17 euros par jour et par place pour les micro-crèches ayant opté pour un financement via le complément de libre choix du mode de garde (CMG) et pour les crèches relevant de la PSU et employant du personnel de droit privé. Toutes les places fermées sont éligibles à l'aide exceptionnelle. Pour en bénéficier, les crèches ne doivent pas facturer aux familles les heures non réalisées.

Nous avons également voté le 7 avril une aide en faveur des assistants maternels. Son montant est de 3 euros par jour et par place fermée pour les maisons d'assistants maternels ayant des charges locatives.

Le même jour, nous avons adapté les modalités de calcul des prestations de services pour l'ensemble des équipements hors EAJE, afin de maintenir le financement des établissements soutenus par la branche famille dans le cadre de son action sociale en échange du maintien d'une offre de service minimum à distance en faveur de leurs usagers. Ces structures doivent déclarer leurs activités comme si celles-ci avaient été réalisées. Sont concernés les relais d'assistantes maternelles (RAM), les accueils de loisirs sans hébergement (ALSH), les lieux d'accueil enfants-parents, la médiation familiale, les contrats locaux d'accompagnement à la scolarité (CLAS), les services d'aide à domicile, les centres sociaux et espaces de vie sociale, les structures financées au titre de la prestation de service jeunes, les foyers de jeunes travailleurs et les espaces rencontres.

Tous nos partenaires sur l'ensemble des champs soutenus par la branche famille sont ainsi concernés. Pour les prestations à la fonction, il ne sera pas tenu compte de la période de fermeture dans la déclaration de données. Pour les prestations à l'acte, reposant sur la prise en charge d'un volume d'activité, le nombre d'heures sera déclaré comme si l'activité avait été réalisée. Concernant les relais d'assistantes maternelles et les services de médiation familiale et d'aide à domicile, il ne sera pas tenu compte de la période de fermeture, sauf s'ils ont recours à l'activité partielle. Il est demandé à l'ensemble des structures financées par les CAF de maintenir une offre de service minimum. S'agissant des ALSH, ils doivent pouvoir contribuer à l'accueil des enfants des personnels prioritaires.

Nous avons ainsi assuré à nos partenaires, avec ces différentes mesures, un filet de sécurité.

Le conseil d'administration a également voté le 25 mars des aides directes en faveur des familles, appelées aides financières individuelles. Pendant la crise sanitaire, celles-ci doivent être prioritairement débloquées sous forme de secours d'urgence, afin de répondre aux besoins les plus élémentaires.

Les CAF se mobilisent pour identifier les familles en difficulté et leur apporter un soutien financier. L'octroi des aides s'inscrit dans un cadre partenarial coordonné, dans l'intérêt des familles et pour éviter les doubles prises en charge. Il est nécessaire d'activer les réseaux de coordination de l'intervention sociale. En pratique, la situation d'urgence sociale est identifiée par un gestionnaire conseil allocataires, en lien avec un travailleur social qui évalue le besoin. Relève prioritairement de l'urgence l'ensemble des situations dans lesquelles la famille exprime un besoin alimentaire de première nécessité. Je pense à des parents en situation précaire qui bénéficient d'aides pour la cantine de leurs enfants. Les situations de monoparentalité, de handicap et de décès sont également considérées comme des priorités.

Concernant le financement, l'objectif est de ne pas grever les dotations d'action sociale des CAF. L'État a donc accepté qu'elles fassent l'objet d'un abondement exceptionnel estimé à 20 % du montant total des aides financières individuelles versées en 2019. Ce dispositif exceptionnel sera prioritairement financé par des redéploiements entre lignes de dépenses au sein du FNAS.

Toutes les mesures exceptionnelles ne s'appliquent que pour la période de la crise sanitaire et feront l'objet d'un bilan et d'une évaluation.

Je tiens à saluer l'engagement et la mobilisation sans faille du directeur général de la CNAF et de l'ensemble des équipes afin de concevoir et de mettre en oeuvre, dans des délais très rapides, ces solutions fortement attendues par les familles et nos partenaires. Je rends aussi hommage aux dirigeants de notre réseau pour leur réactivité.

M. René-Paul Savary, président. - L'État compensera à hauteur de 20 % du montant des aides versées en 2019. Quelle somme cela représente-t-il ?

Mme Isabelle Sancerni. - Je laisse le directeur général vous répondre sur ce point, car il dispose des chiffres précis.

M. Vincent Mazauric, directeur général de la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF). - Merci, madame la présidente, de vos derniers propos qui vont droit au coeur de toutes les équipes.

Pour répondre à votre question, monsieur le président, l'ordre de grandeur est de 50 millions d'euros.

Assurer la continuité des prestations a été notre premier défi. Les cas des premiers clusters nous avaient quelque peu instruits, mais pas assez pour faire face à la situation que nous connaissons depuis le 15 mars dernier. Les premiers jours ont été difficiles, car il fallait concilier deux objectifs : la sécurité des employés de la branche et la qualité de la délivrance des prestations à nos allocataires.

Au début, nous ne disposions pas de tous les moyens pour concilier ces deux objectifs. Nous n'avions pas la capacité technique suffisante pour permettre à nos employés de télétravailler en étant connectés sur les systèmes d'exploitation et de délivrance des prestations. La branche compte 32 000 employés, dont 15 000 se consacrent à l'accueil des usagers et à la délivrance des prestations. En deux semaines, nous avons doublé le nombre d'employés en télétravail, qui était de 4 000. L'objectif est d'atteindre le chiffre de 18 000
- hier, nous en étions à 11 000.

Nous estimons être en mesure aujourd'hui d'assurer 80 % de notre « production » normale, ce qui est remarquable et illustre la mobilisation des équipes techniques nationales, mais aussi de chaque directeur de CAF.

L'urgence a donc été d'assurer la continuité des prestations et le maintien des droits, avant même que l'ordonnance du 25 mars n'en prescrive le principe. Nous avons donné des consignes pour que toutes les situations susceptibles de produire une rupture de droits pour l'ensemble des minima sociaux soient traitées à la main par nos personnels.

Nous sommes chargés, avec la Mutualité sociale agricole (MSA) et Pôle emploi, de payer pour le 15 mai prochain l'aide exceptionnelle de solidarité, dont le Président de la République a annoncé le principe le 13 avril. L'objectif est simple : allouer une somme de 150 euros à tous les foyers bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) ou de l'allocation de solidarité spécifique (ASS), et y ajouter, pour les mêmes ainsi que pour les bénéficiaires de l'aide au logement, une somme de 100 euros par enfant à charge.

Selon notre estimation, ce dispositif concernera 4,1 millions de foyers, pour une dépense publique de 900 millions d'euros. Nous pourrons procéder sans faille à ce paiement le 15 mai sur les comptes des bénéficiaires, car cette aide concerne des populations d'allocataires déjà connues, et ne demande aucune démarche de leur part.

S'agissant des conséquences de la crise sur les comptes, les dépenses de fonctionnement et de paie des CAF et de la CNAF ne devraient pas connaître d'impact considérable. Dans tous les services publics de la sécurité sociale, nous avons, à la demande des ministres, maintenu intégralement la paie des personnels. Nous n'envisageons pas de recourir au chômage partiel. Nous avons été en mesure de mettre en télétravail un nombre croissant de nos personnels. Aujourd'hui, dans chaque CAF, il n'y a pas plus de 5 % des agents qui soient présents physiquement. En revanche, nous aurons une dépense supplémentaire en termes d'indemnités de télétravail. La convention collective de la sécurité sociale prévoit que le montant de cette indemnité est de 2,6 euros par jour. Nous l'avons étendue à cette situation de télétravail exceptionnelle.

La question du financement de l'aide exceptionnelle de solidarité a été réglée par la tutelle : elle le sera sur des crédits de l'État. Quant aux aides financières individuelles d'urgence, ce sont des dépenses d'action sociale locale des CAF. Mais, grâce à la tutelle, nous disposerons de crédits supplémentaires.

Enfin, en outre-mer, il existe une prestation d'accueil et de restauration scolaire pour subvenir à des besoins particuliers des familles dans ces territoires, qui représente un montant de 50 millions d'euros par an. À la suite d'une initiative de Mayotte, nous avons été avisés que cette prestation ne pourrait pas être versée pendant la fermeture des établissements scolaires. Nous avons donc créé un canal permettant de consacrer une somme équivalente à des aides plus directes aux familles avec enfants.

Cette idée d'employer des ressources à d'autres fins nous a permis de ne pas envisager de dépenses supplémentaires. C'est ainsi que le filet de sécurité a été conçu par le conseil d'administration de la CAF : nous dépensons ce que nous avons à dépenser pour que le filet tienne fermement et vienne en secours de tous les équipements qui auraient été autrement fragilisés.

M. René-Paul Savary, président. - Vous n'aurez pas de dépenses supplémentaires, mais vos recettes seront peut-être moindres.

Il faudra, me semble-t-il, un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative pour tenir compte des engagements pris par l'État. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur ce point ?

En ce qui concerne l'aide de 150 euros versée aux bénéficiaires du RSA, l'État ne risque-t-il pas de se tourner vers les départements, qui servent cette prestation ?

M. Vincent Mazauric. - Les questions que vous posez sont plutôt destinées au ministre ou à son administration. Une fois cette précaution prise, je peux vous assurer que je n'ai aucun doute sur le financement de l'aide exceptionnelle de solidarité. Ce n'est pas parce que, techniquement, une partie des bénéficiaires sont des allocataires du RSA que les départements seront appelés à contribuer. Cette aide n'a pas du tout la nature du RSA. La représentation nationale peut être rassurée sur ce sujet.

Les administrations déploient depuis six semaines une énergie considérable et, même s'il leur arrive de « discuter le bout de gras », si je puis dire, pour mettre au point un dispositif, elles jouent très bien leur rôle. Je n'ai, j'y insiste, aucune crainte sur le respect des engagements donnés. Il faudra sans doute in fine envisager un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative.

Mme Isabelle Sancerni. - S'agissant du financement des micro-crèches, un virement du Fonds national des prestations familiales (PNPF) vers le FNAS sera nécessaire. Le CMG n'est pas versé par le FNAS ; or le filet de sécurité a été mis en place au sein de ce fonds.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure pour la famille. - Je vous remercie de vos précisions. Je salue votre formidable mobilisation, que j'ai constatée dans mon département de la Mayenne.

À la suite de l'audition il y a quelques jours des représentants des crèches privées et des micro-crèches, plusieurs préoccupations sont apparues. Ces personnels se sont mobilisés, malgré les discours contradictoires, pour accueillir les enfants des professionnels prioritaires pendant la crise. Ils nous ont fait part de leur manque d'équipements, notamment de masques.

Vous avez choisi de soutenir financièrement les crèches, à hauteur de 27 euros par place fermée pour les crèches publiques et de 17 euros pour les crèches privées. Cet écart est justifié selon vous par le fait que les salariés des crèches privées peuvent bénéficier du chômage partiel. Ces organismes nous ont fait la démonstration de leur grande précarité et du risque de faillite. Or nous devons préserver ces modes de garde. Envisagez-vous de travailler avec eux pour renforcer le soutien qui leur est apporté trouver ? On ne peut pas les laisser dans cette angoisse. La somme de 17 euros paraît vraiment insuffisante.

Les micro-crèches, dont celles qui sont financées par la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE), semblent avoir été peu prises en considération au début de la crise. Il semblerait qu'elles ne soient ni intégrées à la plateforme mon-enfant.fr ni couvertes par l'aide des CAF visant à rendre l'accueil gratuit pour les familles prioritaires. Des doutes subsistent aussi pour ces structures quant à la facturation aux familles : certaines suspendent la facturation dans l'attente de consignes des CAF qui ne viennent pas toujours à temps. Certaines CAF enverraient en outre des textos aux familles donnant consigne de ne pas payer la micro-crèche. Madame la présidente, j'ai entendu votre propos, mais il faut des consignes claires, qui soient les mêmes pour tous. Les mesures vont-elles être bientôt clarifiées ?

Quelques interrogations sur la préparation du déconfinement pour les crèches : comment préparez-vous le retour des enfants dans les crèches ? Envisagez-vous d'accompagner les crèches pour qu'elles s'équipent en masques et en gel, via un soutien financier ? Il faut protéger les personnels. Réfléchissez-vous enfin à un soutien du personnel mobilisé pendant la crise, à l'image de la prime qui sera versée aux soignants ?

Par ailleurs, je veux évoquer le soutien aux familles les plus précaires. La CNAF a décidé le 25 mars d'ouvrir la possibilité de verser des aides financières d'urgence aux familles les plus précaires pour répondre à des besoins de première nécessité. Pourriez-vous préciser les conditions d'attribution de cette aide et indiquer combien de personnes en ont bénéficié à ce stade ? En outre, concernant l'aide aux familles modestes annoncée par le Président de la République et qui sera versée par les CAF le 15 mai prochain, pourriez-vous détailler son mode de financement et les modalités de son versement ?

M. Vincent Mazauric. - Merci de vos propos, madame la rapporteure, pour la CAF de la Mayenne. Je répondrai à vos questions sans entrer dans la polémique qui sous-tend les propos des représentants que vous avez auditionnés.

Je veux rectifier un point : nous n'avons pas prévu une aide de 27 euros par place fermée et par jour pour les crèches publiques et de 17 euros pour les crèches privées. Nous ne distinguons pas selon le statut, public ou privé ; ce qui fait la différence, c'est la capacité ou non de recourir au chômage partiel. La distinction n'est pas schématique ; il s'agit d'une décision pragmatique.

Ces estimations sont-elles justes ? Personne ne nous a dit que le montant de 27 euros était mal évalué. Je ne fais pas le serment que la somme de 17 euros, qui est pensée comme devant être complétée par les 10 euros de chômage partiel, soit une certitude absolue. Nous avons procédé à cette estimation en liaison avec les tutelles compétentes. Cela signifie que nous n'avons aucune difficulté de principe à corriger ce montant si cela s'avère nécessaire. Il faudra simplement veiller à ce que des fonds aillent du canal « prestations familiales » vers le canal « action sociale », ce qui n'est pas négligeable.

Je ne nie pas que ces organismes vous aient, pour reprendre votre expression, « fait la démonstration » de leur précarité. Encore faut-il aussi faire la démonstration que les montants déterminés ne sont pas exacts. Il faut le dire clairement, l'objectif d'un filet de sécurité n'est pas de compenser 100 % des inconvénients, voire des manques à gagner ou des surcoûts entraînés par cette situation. L'équilibre est difficile, car notre objectif principal est de préserver les capacités d'accueil du jeune enfant sous toutes leurs formes. Nous ne sommes pas dogmatiques. S'il est nécessaire de revoir les montants, nous le ferons, mais pas à coup de polémiques. Nous sommes à la disposition de l'ensemble des professionnels.

Répondre, c'est aussi clarifier. Il n'est pas exact de vous dire que les micro-crèches Paje ne sont pas sur mon-enfant.fr. Je l'ai vérifié. Il est néanmoins exact que, pour ces établissements, comme pour d'autres, les premiers jours ont été marqués par des incertitudes liées au temps nécessaire aux pouvoirs publics pour définir des règles sanitaires. La question de l'accueil des enfants des personnels prioritaires est importante. À la suite de l'initiative de nombreuses municipalités, le Gouvernement a suivi le mouvement et demandé que dans les crèches PSU, notamment municipales, l'accueil soit gratuit. Il n'a pas été demandé aux micro-crèches de faire de l'accueil gratuit.

Vous vous êtes interrogée sur certains messages envoyés par des CAF. Préparés par la CNAF, ceux-ci étaient destinés à des familles bénéficiaires du CMG, notamment utilisatrices de micro-crèches Paje. Il s'agissait de les informer qu'une micro-crèche bénéficiant de l'aide de la branche famille ne devait pas facturer les familles. Il ne faut pas jouer sur les deux tableaux.

J'en viens à la préparation du retour à l'activité. À l'exception de quelques crèches en gestion directe de certaines CAF, nous ne sommes pas les employeurs. Sans vouloir paraître abrupt, nous ne sommes donc chargés ni du soutien aux personnels ni de l'équipement. Mais la question reste entière. L'autorité publique qui s'occupe de ces questions est la protection maternelle et infantile (PMI). La direction générale de la cohésion sociale diffuse régulièrement, via les préfets, des instructions. Elle a en particulier demandé qu'un référent Covid petite enfance soit désigné dans chaque service de PMI et qu'une permanence téléphonique soit assurée pour aider les EAJE à préparer leur réouverture.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. - Merci pour vos précisions. Je comprends que vous puissiez percevoir une dimension polémique dans les propos des gestionnaires de micro-crèches ou de crèches privées, mais ceux-ci sont avant tout inquiets pour l'avenir de leurs structures. Sans doute pourriez-vous prendre contact avec eux pour lever les incompréhensions. Ils sont angoissés et attendent surtout des clarifications et un soutien.

M. René-Paul Savary, président. - Ce n'est pas le seul domaine où l'articulation entre le public et le privé suscite des problèmes.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Je souhaite vous interroger sur la situation financière de la CNAF. Ses dépenses augmentent-elles ou baissent-elles ? Certaines crèches ont cessé leur activité, d'autres l'ont maintenue. Quel sera l'impact sur vos comptes des aides que vous nous avez présentées ? De même, quel sera l'effet pour la branche famille de la forte baisse des recettes sociales, due notamment au report des cotisations sociales ? Avez-vous des problèmes de trésorerie ?

M. Vincent Mazauric. - Je n'ai pas encore de vision globale des dépenses nouvelles et des dépenses en moins de la branche en raison de la crise, car les premiers mouvements financiers d'aide et de compensation auront lieu à la fin du mois d'avril. Les caisses vont estimer avec chaque établissement son niveau de fermeture, en ce qui concerne les établissements d'accueil de jeunes enfants, ou les heures non faites, en ce qui concerne les centres de loisirs. Toutefois, comme notre idée est de maintenir les dispositifs comme si nous étions en période normale, la dépense devrait être constante.

Votre seconde question est cruciale pour tous les établissements de la sécurité sociale. Je laisserai, car cela ne relève pas de mon ressort, le ministère et la direction de la sécurité sociale vous fournir une projection sur les comptes sociaux des effets de cette crise. Je rappellerai juste que la branche famille revenait à l'équilibre.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Nous leur poserons la question cet après-midi.

M. Vincent Mazauric. - Je suis aussi mal placé pour répondre à votre question sur la perte de recettes et la trésorerie : dans mes fonctions, je ne rencontre pas de difficultés, mais il faudrait plutôt interroger mes collègues de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), qui sont confrontés à une situation délicate. J'avais, par exemple, recommandé au Gouvernement d'avancer la date de paiement des prestations dues au titre du mois de mars, car le 5 avril, date habituelle de paiement, tombait un dimanche. Normalement, dans ce cas, on le reporte au lundi. Vu les circonstances, on a proposé de l'avancer au samedi 4 avril : ce petit décalage a placé l'Acoss face à une difficulté de trésorerie significative, à cause de la situation. Les comptes de la branche famille ne sont pas affectés par la situation, mais si je peux dire cela, c'est parce que je ne suis pas le banquier.

M. Daniel Chasseing. - Je voulais vous interroger sur la différence de traitement entre les crèches privées et publiques, mais vous avez déjà répondu.

Mme Catherine Deroche. - Les accueillants familiaux font un travail remarquable. Mais ils ont un statut particulier et n'ont pas été inclus dans certains dispositifs de soutien financier et, en particulier, n'ont pas accès à certaines primes. Qu'en est-il de leur situation ? Êtes-vous compétents à cet égard ?

M. Vincent Mazauric. - Hélas, non. Je vais attirer l'attention de la direction générale de la cohésion sociale à ce sujet.

M. René-Paul Savary, président. - Je vous remercie d'appuyer nos démarches en leur faveur. Les assistants familiaux semblent avoir été oubliés par les annonces du Gouvernement.

Mme Michelle Meunier. - Je voudrais tout d'abord vous remercier pour votre action, car je vous avais sollicité au début du confinement pour régler un problème lié à une situation locale. Merci aussi pour vos précisions en réponse à la question de Mme Doineau, qui nous permettent de mieux appréhender les différents points de vue.

Je voudrais vous interroger sur l'enfance en danger. Lorsque nous l'avons auditionné, M. Adrien Taquet nous a annoncé une enveloppe de 500 000 euros en faveur des associations d'aide à la parentalité. Y serez-vous associés ? La CNAF finance-t-elle, directement ou par le biais d'autres mécanismes, des aides à la parentalité, à l'écoute ou à la médiation familiale ?

Les CAF ont réduit leur accueil de moitié grâce au numérique. Celui-ci prend une place très importante. Mais qu'en est-il des publics qui n'y ont pas accès ?

Mme Isabelle Sancerni. - L'enfance en danger ne relève pas de notre champ de compétences. En ce qui concerne l'aide à la parentalité, nous poursuivons les dispositifs que nous avions mis en place pour aider les familles, mais ils ne visent pas spécifiquement l'enfance en danger. Il en va de même pour nos actions en direction de la petite enfance, de l'animation de la vie sociale ou de la jeunesse.

M. Vincent Mazauric. - Les crédits annoncés par M. Adrien Taquet sont des crédits d'État qui seront gérés par les directions départementales de la cohésion sociale. Ils pourront toutefois être utilisés pour aider les associations que nous avons aussi pour coutume de financer. Il s'agit d'un coup de pouce appréciable, mais le maintien des prestations de la branche famille représente des montants beaucoup plus importants. Le confinement accroit toutes les tensions et les violences intrafamiliales en constituent une forme extrême. C'est pour cette raison que nous cherchons à maintenir, durant cette période, des formes de contacts et d'activités. Notre site www.mon-enfant.fr contient, par exemple, une rubrique consacrée aux loisirs à la maison ainsi que des conseils relatifs à la parentalité.

En ce qui concerne le numérique, la préoccupation est considérable : en temps normal, on estime qu'environ 20 % des Français ne sont pas à l'aise avec le numérique. Cela ne va pas s'arranger avec les circonstances, puisque nos sites d'accueils, qui peuvent aider le public, sont fermés, de même que les maisons de service au public. Pour surmonter cet obstacle, nous aidons nos allocataires à réaliser leurs démarches par téléphone, quitte à en appeler certains : un agent de la CAF remplit ainsi la déclaration que l'allocataire aurait dû remplir lui-même. Dans notre jargon, nous appelons cela la « coproduction ».

Mme Frédérique Puissat. - Je voudrais d'abord, à mon tour, attirer votre attention sur la nécessité de trouver une solution à la question du financement des micro-crèches : au-delà d'un enjeu d'équité avec le public, il faut aussi prendre en considération le fait que ces structures contribuent à l'ouverture de classes supplémentaires.

Les nouveaux exécutifs communaux n'ont pas encore été installés et les exécutifs des intercommunalités seront désignés encore plus tard. Comment sécuriser les contractualisations avec les collectivités ? Il ne faudrait pas qu'elles puissent être remises en cause pour des raisons de forme.

La CNAF n'est pas compétente en matière de protection de l'enfance, ce sont les départements ; néanmoins le soutien à la parentalité constitue un enjeu important. Dans certains territoires, comme l'Isère, nous avons été interpellés par les services du département pour trouver des solutions à des conflits délicats et faire en sorte que les enfants puissent être pris en charge dans les centres d'accueil de loisir sans hébergement, aux côtés des enfants des personnels indispensables à la gestion de la crise. Chaque département a trouvé des solutions au cas par cas. Dans l'Isère, le préfet l'a autorisé ; dans d'autres départements, cela n'a pas été possible. Serait-il possible d'émettre une recommandation nationale ?

Si l'on peut se réjouir de l'aide exceptionnelle de solidarité pour les plus démunis, il serait choquant que cette aide soit versée le 15 mai, avant le versement de la prime destinée aux personnels soignants qui sont mobilisés dans la crise et qui sont parfois dans une situation financière difficile, sans avoir droit au RSA ni à l'aide au logement. C'est une question d'équité entre ceux qui sont aidés et ceux qui risquent leur vie pour sauver les autres, mais qui toucheront une aide deux à trois mois plus tard.

M. Vincent Mazauric. - Je ne peux répondre à votre dernière question. Nous n'avons pas imaginé de consigne nationale pour accueillir dans les ALSH d'autres enfants que ceux des personnels prioritaires. Mais nous allons y réfléchir avec mes équipes et les directeurs de caisses. Enfin, nous sommes bien conscients que l'interruption du processus électoral a des conséquences pour les communes et les intercommunalités. Nous poursuivons, en lien avec les élus, la démarche entreprise de contractualisation globale destinée à remplacer les contrats enfance-jeunesse, car il ne serait pas souhaitable de revenir en arrière. Nous essayons, de manière pragmatique, de trouver des solutions d'attente, afin, par exemple, de ne pas retarder la mise en place du bonus territoire qui facilite la création de crèches dans des zones défavorisées.

Mme Corinne Féret. - Vous avez rappelé l'aide exceptionnelle de 3 euros par jour et par place fermée aux maisons d'assistants maternels (MAM). Pourriez-vous nous indiquer quel sera le montant total de cette aide ainsi que le nombre de places concernées ?

Constate-t-on, depuis le déclenchement de la crise, une hausse des demandes au titre de la garantie pour impayés de pension alimentaire ? La CNAF a-t-elle prévu une hausse des dépenses d'accompagnement des parents, la plupart du temps des femmes, qui se trouvent en grande difficulté quand la pension alimentaire n'est pas versée ?

Mme Isabelle Sancerni. - Nous portons une grande attention à ce sujet avec l'Agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires.

M. Vincent Mazauric. - Le soutien aux MAM devrait représenter une enveloppe d'un peu plus de 3 millions d'euros sous l'hypothèse que les 2 900 MAM restent toutes fermées pendant trente jours.

Nous n'observons pas, pour le moment, d'augmentation notable des demandes d'allocation de soutien familial. Mais il est peut-être encore un peu tôt, et je m'attends, comme vous, à une hausse. Depuis lundi, nous avons mis en place une téléprocédure qui permet de demander à bénéficier, de manière beaucoup simple, de l'allocation de soutien familial. J'espère que cela sera utile, notamment aux mères isolées.

Mme Michelle Gréaume. - Ma première question porte sur les conséquences du confinement pour les habitants des quartiers populaires. Pour celles et ceux qui vivaient déjà dans la précarité, la crise sanitaire entraîne une explosion des difficultés. Le Gouvernement a annoncé une aide d'urgence, qui sera versée le 15 mai. Les associations estiment cependant que cette échéance est trop lointaine : qu'en pensez-vous ?

De plus, les CAF ont dématérialisé leurs services, mais beaucoup de personnes, notamment les plus âgées, n'ont pas accès au numérique ou ne savent pas comment s'en servir. Comment accueillir ces assurés sociaux et leur permettre de faire valoir leurs droits ? Le renoncement aux droits est, en effet, une réalité pour un grand nombre de personnes ; or, il importe en cette période de crise de ne laisser personne au bord du chemin.

M. Vincent Mazauric. - Il est difficile d'apporter une réponse absolue à la situation que vous décrivez. L'octroi de l'aide d'urgence ne se réduit pas à des questions financières ni à une possibilité d'accès au numérique, mais repose aussi sur l'efficacité des intervenants sociaux. On a déjà délivré 6 000 aides d'urgence individuelles. Le dispositif ne peut fonctionner que si les travailleurs sociaux du département, les travailleurs sociaux des CAF - ils sont beaucoup moins nombreux - et les centres communaux d'action sociale travaillent en coordination, collaborent pour repérer les personnes et aller à leur devant, sinon nous échouerons.

Mme Isabelle Sancerni. - Nos travailleurs sociaux poursuivent leur travail et s'efforcent de repérer les personnes en difficulté. De même, outre les acteurs cités par M. Mazauric, les centres sociaux se sont également adaptés pour poursuivre leur activité pendant cette période difficile, malgré leur fermeture.

Mme Brigitte Micouleau. - Un certain nombre d'allocataires sont redevables d'une dette auprès de la CAF, la plupart du temps sans fait générateur frauduleux. Or, en cette période de confinement, les familles modestes avec enfants voient leurs frais exploser, notamment à cause de la fermeture des cantines. Toutefois, les dettes sociales courent toujours. Les CAF pourraient-elles suspendre, par solidarité, le prélèvement des indus opéré sur les prestations sociales ?

Les jeunes précaires et les étudiants pauvres de moins de vingt-cinq ans sont exclus de la prime de solidarité annoncée et des aides d'urgence. Or, le 13 avril, le Président de la République avait annoncé que les étudiants les plus précaires, vivant parfois loin de leur famille, en particulier lorsque celle-ci vient d'outre-mer, seraient aussi aidés. Je m'inquiète aussi du sort de ces étudiants isolés, souvent africains, qui ont perdu l'emploi qu'ils occupaient pour payer leurs études et doivent vivre leur confinement dans une chambre de neuf mètres carrés dans les cités universitaires - ils sont nombreux à Toulouse. Ils ne survivent souvent que grâce à l'aide alimentaire et doivent se contenter d'un seul repas par jour. Quelles mesures pourriez-vous prendre pour aider ces jeunes en situation de précarité que vous connaissez souvent par le biais de l'aide au logement ?

M. Vincent Mazauric. - À l'exception des cas frauduleux, nous avons suspendu le recouvrement des indus pendant la période de confinement, de même que nous n'avons pas lancé de nouvelles opérations de contrôle.

Je partage votre diagnostic sur la situation des jeunes précaires. J'ai lu récemment un article saisissant sur la condition de certains étudiants mal logés. La mesure annoncée le 13 avril pour les étudiants les plus précaires, originaires notamment d'outre-mer, relève du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Les CAF ne connaissent pas tous les jeunes de moins de vingt-cinq ans en situation de précarité. Ces derniers peuvent toucher la prime d'activité qui a été revalorisée de façon importante l'an dernier. Le chômage partiel n'entraîne pas une suppression de la prime d'activité puisque 80 % de la rémunération est maintenue. Il est néanmoins exact que les jeunes en situation de précarité qui n'ont pas d'emploi et ne touchent pas le RSA sont peu connus de la branche famille et peu couverts par nos dispositifs.

Mme Laurence Cohen. - Je vous remercie pour vos réponses précises et m'associe aux remerciements à l'attention de toutes les équipes des CAF, très mobilisées en cette période. Le confinement accroît les difficultés des publics fragiles. Certains enfants qui bénéficiaient de la cantine scolaire ne peuvent plus en profiter à cause de la fermeture des écoles. On a évoqué l'aide d'urgence. Il faut aussi souligner l'action d'un certain nombre de municipalités et de départements. Le Val-de-Marne a ainsi distribué plus de 800 kilogrammes de fruits et légumes et livré des tonnes de denrées aux banques alimentaires. Des municipalités, à l'image de celle de Champigny-sur-Marne, mais je pourrais en citer beaucoup d'autres, ont aussi apporté une aide importante. Or elles le font sur leurs fonds propres, ce qui peut poser des problèmes de financement à terme. La CNAF ne pourrait-elle pas s'associer à elles pour mener ces actions ? De même, a-t-elle prévu des mécanismes pour faire face à l'urgence alimentaire ?

M. Vincent Mazauric. - Plusieurs initiatives ont été prises. Ainsi, outre-mer, comme je l'ai expliqué, la CAF va changer l'affectation de plusieurs fonds d'État. Plusieurs municipalités, comme Marseille, Paris et Nice, ont décidé de transformer les subventions qu'elles consacraient au financement des repas à la cantine des enfants des familles les plus modestes en un versement direct aux familles et ce sont les CAF qui sont chargées de la logistique : identification des familles, paiement. Je pourrais aussi citer le cas du département du Nord, où des distributions en nature ont eu lieu grâce à une initiative conjointe des collectivités et de la CAF. Toutefois, en dehors des crédits de la prestation d'accueil et de restauration scolaire, nous n'avons pas de ligne budgétaire consacrée à ces actions. En revanche, comme dans le Nord, le conseil d'administration de chaque caisse peut décider de participer à une opération de soutien alimentaire aux côtés des collectivités ou des associations.

Mme Isabelle Sancerni. - Une telle action ne peut passer, en effet, que par des fonds locaux, car nous n'avons pas de lignes de crédits supplémentaires pour ce type d'aides au niveau national. Il nous faudrait redéployer les crédits d'enveloppes existantes et ponctionner d'autres actions inscrites dans notre convention d'objectifs et de gestion.

M. Jean-Louis Tourenne. - Je vous remercie pour la clarté de vos réponses. Je voudrais toutefois apporter une rectification : la prime d'activité a certes été augmentée en 2019, mais, pour y être éligible, il faut gagner au moins la moitié du SMIC, ce qui n'est pas le cas de la grande majorité des étudiants qui travaillent, et beaucoup se trouvent aujourd'hui privés de ressources.

Lorsque notre rapporteur général vous a demandé si l'État compenserait les dépenses engagées, vous avez répondu que cela n'était pas de votre ressort, car vous n'êtes pas le « banquier ». Soit, mais si le déficit entraîné par ces mesures perdure, il faudra bien le combler et cela aura une influence sur vos actions. De même, vous avez indiqué qu'une compensation de 50 millions de l'État était prévue, mais les mesures d'aides individuelles d'urgence devraient coûter, selon vous, 900 millions d'euros. L'écart n'est pas mince...

Les aides de la CAF aux crèches et aux micro-crèches ne compenseront pas l'intégralité leurs pertes. Certains établissements risquent donc de disparaître. Comment ajuster vos aides pour faire en sorte de garantir leur pérennité ?

M. Vincent Mazauric. - Vous avez raison, il faut sans doute s'attendre à un déficit de la branche famille, plus d'ailleurs en raison d'une perte de recettes que d'un excès de dépenses. Cela vaudra aussi pour les autres branches de la sécurité sociale. J'espère que je ne me suis pas mal exprimé : lorsque j'ai dit que je n'avais pas de problèmes de financement, c'est parce que je ne suis pas le banquier et qu'il appartient à l'Acoss de gérer les comptes ; mais cette dernière a des problèmes de financement. Il est encore trop tôt pour avoir une vision globale du déséquilibre des comptes de la sécurité sociale. Nous y verrons plus clair si un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale est déposé.

L'enveloppe de 900 millions d'euros est destinée à financer l'aide exceptionnelle de solidarité décidée par le Gouvernement, qui est d'une nature comparable à une prestation ; les 50 millions d'euros que vous évoquez correspondent, eux, à des dépenses d'action sociale locale permettant de financer des aides individuelles d'urgence, au cas par cas.

L'aide décidée par le conseil d'administration de la CNAF en faveur des crèches et des micro-crèches n'est pas destinée à compenser la totalité de la perte d'activité. Il en va d'ailleurs de même pour l'ensemble des politiques de secours publiques mises actuellement en place dans tous les secteurs. Notre objectif est d'utiliser les ressources dont nous disposions, mais pas davantage, pour maintenir notre concours aux établissements de la même manière que si ceux-ci avaient pu fonctionner normalement.

Comment alors préserver les places d'accueil dans les EAJE ? Les mesures que nous avons annoncées doivent y contribuer. De plus, la situation des crèches est très diverse. Lorsque les crèches sont municipales ou appartiennent à un grand groupe, elles doivent pouvoir compter sur le soutien de leur gestionnaire. La branche famille pourra aussi, éventuellement, mobiliser ses aides à l'investissement pour aider les établissements qui ont opté pour la prestation de service unique et qui seront en difficulté. Nous contribuons, sans être les seuls, à porter une politique d'accueil des jeunes enfants : notre premier devoir est de veiller, en mobilisant tous les moyens dont nous disposons, mais pas davantage, à la préservation de ce capital collectif.

Mme Isabelle Sancerni. - Les crèches qui ont fait le choix de relever du régime de la prestation de service unique, qu'elles soient publiques ou privées, peuvent bénéficier de l'aide aux structures en difficulté du FNAS. Quant aux micro-crèches, il s'agit de structures qui ont fait le choix d'être financées par le biais du complément de libre choix du mode de garde ; elles ne relèvent donc pas du champ du FNAS. Pour les soutenir, il faudrait un vote du conseil d'administration pour modifier la convention d'objectifs et de gestion ; cela signifierait que nous prélèverions des crédits du FNAS au bénéfice de structures qui n'y sont, normalement, pas éligibles. Le conseil d'administration a déjà décidé d'étendre les aides exceptionnelles à l'ensemble des crèches. Les différences de traitement s'expliquent par les choix des gestionnaires des établissements, qui ont choisi soit la PSU, soit le CMG.

Mme Victoire Jasmin. - L'aide de 3 euros par jour et par place en faveur des MAM vaudra-t-elle aussi outre-mer ?

M. Vincent Mazauric. - Oui, bien sûr. L'aide est valable sur tout le territoire.

M. René-Paul Savary, président. - Je vous remercie et merci aussi à toutes vos équipes, qui sont fortement mobilisées en cette période de crise.

La téléconférence est close à 11 h 45.

- Présidence de M. Alain Milon, président -

La téléconférence est ouverte à 16 h 35.

Audition de M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics, sur la situation et les perspectives des comptes sociaux

M. Alain Milon, président. - J'ai le plaisir d'accueillir cet après-midi M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics, pour une audition sur la situation et les perspectives des comptes sociaux. Cette audition se tient en visioconférence et est ouverte à la presse.

Ce rendez-vous est habituel à pareille époque : sur l'initiative de son rapporteur général, notre commission fait chaque année avant l'été un point sur les comptes sociaux entendus au sens large, c'est-à-dire non seulement la sécurité sociale, mais aussi l'assurance chômage, les hôpitaux et les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).

Ce qui est plus inhabituel, ce sont les conditions d'application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, puisque l'on assiste actuellement à une contraction historique des recettes et une forte augmentation des dépenses. Monsieur le ministre, je vous cède la parole.

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics. - Monsieur le président, c'est avec plaisir et gravité que je réponds à votre invitation.

En préambule, je voudrais souligner le caractère tout à fait exceptionnel et fluctuant des chiffres que je vais présenter. Si le Gouvernement ne propose pas de projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS), c'est parce qu'il n'en a pas l'obligation puisque, comme vous le savez, les crédits de la sécurité sociale sont indicatifs, mais c'est surtout en raison de la très grande variabilité de ses estimations : les chiffres actuels ne sont sûrement pas les mêmes que ceux que je vous aurais communiqués si vous m'aviez auditionné dans deux semaines.

Avant de répondre à vos nombreuses questions, j'aimerais évoquer trois points.

Tout d'abord, je veux parler du déficit et du montant des dépenses sociales. En 2019, nous avons eu de bonnes nouvelles, si j'ose dire, puisque le déficit de la sécurité sociale, qui devait atteindre 5,4 milliards d'euros, s'est élevé à un peu moins de 2 milliards d'euros. Ce bon résultat s'explique par une plus forte augmentation de la masse salariale que prévu, elle-même due à une baisse plus marquée du chômage et une hausse plus importante des salaires qu'attendu, et par des recettes plus dynamiques que ce que nous avions envisagé.

En avril 2020, les chiffres n'ont plus rien à voir : le déficit de la sécurité sociale s'établit aujourd'hui à 41 milliards d'euros. C'est du jamais vu, puisque le précédent record datait de 2010 lorsque le déficit social était de 28 milliards d'euros. Ce décrochage procède en partie de la décision du Gouvernement d'engager 8 milliards d'euros de dépenses nouvelles, mais il résulte surtout de l'effondrement des recettes de la sécurité sociale. À titre d'exemple, le dispositif de report des charges sociales représente un manque à gagner de l'ordre de 14,2 milliards d'euros sur les 38 milliards d'euros de cotisations qui devaient être versés pour les mois de mars et d'avril.

La dette de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) s'élève désormais à 45 milliards d'euros. Par un décret en date du 25 mars dernier, nous avions opportunément décidé de relever le plafond d'endettement de l'Agence de 39 milliards à 70 milliards d'euros. Compte tenu du contexte actuel, je le redis, il est très difficile de chiffrer avec exactitude les effets de la crise sur les comptes sociaux. Les pertes de recettes sont essentiellement dues à la hausse du recours au chômage partiel, à l'état de l'économie et à l'ampleur du report de charges.

Je souhaite également évoquer les dépenses d'assurance maladie et la situation de l'hôpital public.

L'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) pour 2020 aurait dû s'établir à 2,45 %. Une double incertitude pèse aujourd'hui sur l'évolution de cet objectif : la baisse très importante de l'activité de la médecine de ville en raison du confinement, d'une part, et la très forte augmentation des dépenses hospitalières, d'autre part. Il faut y ajouter 8 milliards d'euros de dépenses supplémentaires, dont une dotation exceptionnelle de 4 milliards d'euros pour Santé publique France, l'opérateur public qui gère la crise sanitaire, dont le budget n'était - je le rappelle - que de 150 millions d'euros, 3 milliards d'euros versés aux hôpitaux et établissements de santé pour couvrir les dépenses engagées durant la crise et, enfin, un peu plus de 1 milliard d'euros affectés à la prise en charge des indemnités journalières pour les arrêts de travail dérogatoires. Je ne sais pas encore s'il sera nécessaire d'amplifier cet effort financier, mais j'insiste sur les aléas extrêmement importants pesant aujourd'hui sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie.

Je n'ai pas de crainte particulière au sujet de la situation financière des hôpitaux. Premièrement, nous leur accordons beaucoup d'aides de trésorerie. Deuxièmement, les établissements publics de santé bénéficient du mécanisme de reprise de dette décidé avant la crise du coronavirus. Troisièmement, Santé publique France prend à sa charge une part des dépenses qui relèvent des hôpitaux en temps normal, comme l'achat de masques ou de respirateurs.

Enfin, j'en viens au dernier point de mon propos : la dette de l'Unedic, qui s'élevait à 37 milliards d'euros à la fin de l'année 2019, devrait atteindre 47 milliards d'euros fin 2020, soit 10 milliards d'euros supplémentaires.

D'un côté, les dépenses de l'Unedic devraient fortement s'accroître. En effet, elle assume un tiers des dépenses liées au chômage partiel, dans un contexte où - la ministre du travail l'a annoncé ce matin - plus de 10 millions de salariés sont en activité partielle. Le chômage partiel s'accroît fortement en France, ce qui s'apparente à une forme de « nationalisation » - si vous me permettez l'expression - d'une partie des salaires. De l'autre, les recettes de l'Unedic baissent de manière sensible, parce que l'indemnisation du chômage partiel ne donne pas lieu au versement de cotisations sociales. Cela étant, les prévisions pourraient fluctuer : l'évaluation du recours au chômage partiel est parfois complexe, notamment parce qu'il peut faire l'objet de déclarations rétroactives de la part des entreprises.

De manière générale, les chiffres concernant la sécurité sociale sont impressionnants et peuvent donner le tournis. Ils sont pourtant fondés sur des hypothèses que je qualifierai de « favorables ». En premier lieu, nous partons du principe que la croissance économique ne se dégradera pas davantage que ce que nous prévoyons aujourd'hui, c'est-à-dire une récession de 8 %. En second lieu, nous considérons que l'ensemble des cotisations reportées, soit environ 14 milliards d'euros, sera versé d'ici à décembre 2020, ce qui paraît pourtant peu probable, ne serait-ce que parce que le Gouvernement pourrait envisager un report des charges au-delà de cette date et qu'il étudie l'éventualité d'annulations de charges pour certains secteurs.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Merci d'avoir accepté cette invitation, Monsieur le ministre. Votre audition se déroule dans des conditions très exceptionnelles, mais elle n'en est pas moins indispensable : le Parlement doit en effet être pleinement informé de la situation des comptes sociaux. Malgré vos réserves, je pense que mes questions démontreront que le Gouvernement serait bien avisé de présenter un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale cet été.

Vous venez de détailler les 8 milliards d'euros de dépenses nouvelles qui affecteront directement le budget de la sécurité sociale. Pourriez-vous préciser ce qui, selon vous, aura le plus d'impact sur les comptes sociaux ? Quelles sont vos prévisions concernant le solde de la sécurité sociale pour 2020 ?

Cela fait plus d'une semaine que l'on entend dire qu'une partie des cotisations reportées pourrait être annulée. De fait, l'annulation des charges pourrait se révéler indispensable dans certains secteurs ou pour certains professionnels, dont l'activité a été durablement impactée et qui pourraient encore souffrir dans l'avenir - je pense à l'hôtellerie, à la restauration et au tourisme. La réflexion du Gouvernement a-t-elle évolué sur ce point ? À combien pourraient s'élever les annulations de charges ?

La crise remet-elle en cause le principe de non-compensation ou du « chacun chez soi », initialement motivé par des supposés excédents de la sécurité sociale ?

Enfin, pourriez-vous nous donner les raisons pour lesquelles la situation des comptes sociaux est meilleure que prévu en 2019 ?

M. Gérald Darmanin, ministre. - Les bons chiffres de 2019, même s'ils ne sont déjà plus qu'un lointain souvenir, semblent prouver que la stratégie du Gouvernement, qui consiste à encourager la croissance en baissant les impôts, est sans doute la bonne. Ces résultats s'expliquent par une augmentation de la masse salariale de 3 % et par le dynamisme des recettes, liés à une baisse du chômage plus importante que prévu.

Vous avez mentionné le principe de non-compensation entre le budget de l'État et celui de la sécurité sociale. Distinguer ce qui relève du champ social de ce qui dépend du champ de l'État n'est pas notre priorité aujourd'hui. Actuellement, le Gouvernement cherche avant tout à répondre à l'urgence. Ce que je peux vous dire, c'est que l'État joue son rôle de soutien du secteur social. Confrontée à une forte hausse de sa dette, l'Acoss bénéficie ainsi de l'aide de l'Agence France Trésor, autrement dit de l'État, qui lui garantit les taux d'intérêt les plus bas possible et lui prodigue un certain nombre de conseils pour bien emprunter.

La décision d'annuler les charges de certaines entreprises est primordiale pour l'économie française, mais complexe à mettre en oeuvre juridiquement. Jamais, depuis que la protection sociale existe, un gouvernement n'a annulé des charges par secteur d'activité.

Afin qu'une telle mesure voie le jour, il faut justifier le choix des secteurs d'activité retenus. Pour les secteurs pour lesquels le Gouvernement a déjà pris des mesures réglementaires portant fermeture les commerces - je pense aux restaurateurs -, il sera facile et peu contestable sur le plan juridique de proposer l'annulation des cotisations patronales. Pour d'autres secteurs, bien qu'indispensable, cette mesure sera plus difficile à motiver : c'est le cas de l'hôtellerie, du tourisme, de l'événementiel, des arts et spectacles, qui n'ont pas fait l'objet de mesures réglementaires de ce type.

Au-delà de ces considérations juridiques, trois questions se posent.

La première concerne le nécessaire maintien d'une égalité de traitement entre les entreprises. Ainsi, certains professionnels qui pourraient bénéficier d'une annulation de leurs charges dans un avenir proche en ont déjà réglé une partie. Il serait discriminant d'annuler le paiement des cotisations de ceux qui en ont demandé le report, alors que d'autres les ont payées. La deuxième question a trait à la nature des cotisations annulées : il s'agit des cotisations patronales et non des cotisations salariales qui sont, je le rappelle, créatrices de droits pour les salariés. La troisième interrogation porte sur les « secteurs de conséquence », directement liés aux secteurs cités par le Président de la République dans son discours lundi dernier. Je pense aux blanchisseries, qui travaillent presque exclusivement avec les hôtels, ou aux vignerons, qui travaillent énormément avec la restauration. Nous devons décider si ces secteurs doivent aussi bénéficier des annulations de charges. Pour ce faire, nous effectuons un travail d'analyse très minutieux, avec l'aide du ministère de l'agriculture pour ce qui concerne l'agroalimentaire, et avec l'aide du ministère de l'économie, du ministère de la culture et du ministère du tourisme pour leurs secteurs de compétence respectifs.

Bien entendu, le Parlement sera pleinement associé à la réflexion, ne serait-ce que parce qu'une disposition législative devra être votée. Bien que difficile à évaluer aujourd'hui, nous pensons que le montant global de ces annulations de charges devrait atteindre près de 1 milliard d'euros. J'insiste devant la représentation nationale sur le sérieux juridique avec lequel nous sommes en train d'élaborer ce dispositif. Nous redoutons plus que tout une possible censure du juge constitutionnel, qui aurait des effets désastreux pour les professionnels que je viens d'évoquer.

Enfin, s'agissant des perspectives pour l'année 2020, nous prévoyons un recul de la masse salariale de 7,5 %, une baisse de 20 milliards d'euros des recettes liées à l'arrêt de l'activité et une réduction de 11 milliards d'euros des recettes affectées au budget de la sécurité sociale.

M. Jean-Noël Cardoux, président de la Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss). - À l'automne dernier, nous estimions que les déficits cumulés de l'Acoss atteindraient 40 milliards d'euros en 2023, année d'expiration de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades). Auditionné par notre commission à l'époque, vous aviez affirmé que ce déficit serait beaucoup moins élevé grâce à la croissance, qui ne manquerait pas de créer des richesses supplémentaires. Aujourd'hui, en raison de la crise, vous citez le chiffre abyssal de 45 milliards d'euros pour la seule année 2020. En raisonnant simplement, le déficit de l'Acoss devrait donc atteindre entre 80 et 85 milliards d'euros à l'horizon de 2023. Je précise que l'Acoss est déjà confrontée à de graves problèmes de trésorerie, que ses besoins de financement à court terme dépendent en grande partie du niveau des taux d'intérêt et que, sans l'appui de la Banque centrale européenne (BCE), sa situation pourrait rapidement devenir intenable.

Dans ces conditions, envisagez-vous de reporter la pérennité de la Cades au-delà de 2023 ? De quels financements la Cades pourrait-elle bénéficier pour absorber les nouveaux déficits de l'Acoss ? Je conclurai en indiquant qu'une loi organique est nécessaire pour mettre en oeuvre une telle décision.

Mme Catherine Deroche, rapporteure pour l'assurance maladie. - Je souhaite vous interroger sur la situation financière des hôpitaux.

Disposez-vous de prévisions actualisées sur le déficit des établissements hospitaliers pour 2020, qui tiendraient compte des futures hausses de rémunérations des personnels ? Le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur l'endettement des hôpitaux, prévu pour le mois de mars, vous a-t-il été remis ? Si tel est le cas, modifie-t-il vos prévisions initiales ?

Vous avez parlé de la situation de la médecine de ville. Que prévoyez-vous pour les établissements privés, qui souffrent beaucoup de la crise ?

Dernier point, vous estimez qu'un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale n'est pas indispensable. Il serait pourtant utile de fixer un nouvel Ondam avant l'été. Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale de l'assurance maladie (CNAM), estimait la semaine dernière que l'examen d'un PLFRSS en juillet était possible.

M. Yves Daudigny. - Monsieur le ministre, personne ne conteste votre plan d'urgence, même si certains le jugent insuffisant. Les interrogations portent davantage sur son financement, car il semblerait que vous ayez l'intention de recourir à l'endettement, ce qui montre que les dogmes sur lesquels reposait notre économie ces dernières années sont en train de chanceler. Cette dette sera-t-elle un jour remboursable ? Devra-t-elle être monétisée ?

Pour prolonger la réflexion du rapporteur général sur les relations entre l'État et la sécurité sociale, j'ajoute que cette dernière assure avant tout les solidarités du quotidien. Lui faire porter la charge des mesures exceptionnelles prises pour lutter contre la crise actuelle reviendrait à la tuer.

Pourriez-vous détailler les demandes de report de cotisations et de contributions effectuées par les entreprises ? Constate-t-on une évolution entre les mois de mars et d'avril ?

Selon vous, le plafond d'endettement de l'Acoss, porté à 70 milliards d'euros par décret, sera-t-il suffisant ?

Les professionnels libéraux, comme les orthophonistes ou les kinésithérapeutes, demandent souvent aux collectivités locales une remise ou l'annulation des loyers des locaux qu'ils occupent. Quelles aides envisagez-vous pour ces professionnels ?

M. Dominique Théophile. - Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur la situation actuelle des employés à domicile. Face à la crise, les particuliers employeurs sont invités à verser l'intégralité de la rémunération de leurs salariés, même si toutes les heures n'ont pas été réalisées. Ce sont près de 3 millions de particuliers qui emploient 600 000 personnes à leur domicile, ainsi que 450 000 assistantes maternelles.

L'ordonnance du 27 mars 2020 portant mesures d'urgence en matière d'activité partielle a permis de mettre en place cette mesure d'indemnisation exceptionnelle pour que les salaires des employés à domicile soient maintenus. Cependant, les particuliers employeurs ne sont pas toujours en mesure de payer les heures non effectuées. Pourriez-vous imaginer un dispositif permettant de payer 80 % du montant net des heures non réalisées par le salarié, tout en dispensant le particulier employeur d'avance de frais ?

M. Daniel Chasseing. - Le Gouvernement fait le maximum pour aider les entreprises à survivre et soutenir les salariés. Comment entend-il répartir l'effort de redressement des finances publiques, sachant qu'une hausse de la fiscalité sur les sociétés est difficilement envisageable si l'on souhaite préserver la compétitivité et l'emploi ?

Le Gouvernement envisage d'annuler les charges patronales des restaurateurs et des hôteliers. Qu'envisagez-vous pour les grossistes en boissons, brasseurs et limonadiers, qui ne semblent pas concernés par cette mesure, alors que l'intégralité de leur chiffre d'affaires dépend des cafés, restaurants et hôtels ?

M. Gérald Darmanin, ministre. - Je veux rassurer M. Chasseing : ce n'est pas en augmentant la fiscalité sur les ménages, le capital ou les entreprises que nous comptons rembourser la dette. Je le répète, nous préférons la dette à la faillite et au licenciement massif des salariés. Si, comme je l'ai dit, les chiffres du déficit et de la dette sont très impressionnants, ce n'est pas à cause de dépenses structurelles. Même si la crise laissera des traces, le jour où les recettes augmenteront de nouveau, les chiffres reviendront à la normale.

Pour ce qui concerne les grossistes, les producteurs de vin ou de bière, ils seront naturellement concernés par les annulations de charges.

Pour répondre à M. Théophile, je tiens avant toute chose à souligner la grande réactivité dont a fait preuve le Gouvernement en étendant le chômage partiel aux employés à domicile, car ils n'y avaient pas droit jusqu'alors. Ils peuvent toucher 80 % de leur salaire net antérieur pour les heures prévues et non travaillées. Près de 72 millions d'euros ont été versés au titre du mois de mars, ce qui a permis d'indemniser 350 000 employés à domicile, et 750 000 particuliers employeurs ont déposé une demande d'indemnité d'activité partielle pour leurs salariés, que ces derniers aient ou non réalisé les heures de travail prévues. Cela signifie que beaucoup d'entre eux ont conservé le lien contractuel qui les unit à leurs employés.

Monsieur Daudigny, votre réflexion sur l'avenir de la dette est tout à fait passionnante. Les banques centrales doivent-elles et peuvent-elles racheter cette dette ? Doivent-elles accorder des prêts à des taux très faibles, voire négatifs ? Hélas, je n'ai ni le pouvoir ni l'envie de vous faire part de mes réflexions, d'abord parce que le Président de la République s'exprimera sur le sujet et, ensuite, parce qu'il est très compliqué d'anticiper toutes les conséquences de la crise. Cette question sera à coup sûr posée au moment d'examiner les budgets de relance. Aujourd'hui, nous nous contentons de gérer l'urgence.

Pour répondre à votre deuxième question, au mois d'avril, il y a davantage d'entreprises qui ont bénéficié d'un report de charges que le mois précédent. Le 15 mars dernier, le montant des cotisations versées à l'Acoss par les entreprises de moins de 50 salariés s'est élevé à 9,4 milliards d'euros. À la même date, on comptabilisait 3,8 milliards d'euros de cotisations reportées, soit 40 % du total. Un mois plus tard, le 15 avril, cette proportion est restée stable à 41 %. Le 5 avril, le montant des cotisations versées par les entreprises de plus de 50 salariés a représenté environ 12 milliards d'euros, contre 4 milliards d'euros de cotisations reportées, soit un tiers de l'ensemble.

Nous avons demandé aux Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (Urssaf) de contacter les grandes entreprises pour leur expliquer que le report de charges n'était pas une mesure de trésorerie, mais une disposition destinée aux entreprises en difficulté, menacées de faillite. Je peux vous assurer que toutes les grandes entreprises qui devaient payer leurs charges l'ont fait. La représentation nationale pourra le vérifier le moment venu.

Vous m'interrogez sur le plafond d'endettement de l'Acoss, désormais fixé à 70 milliards d'euros. Il ne me semble pas nécessaire de le revoir aujourd'hui, car les capacités d'endettement de l'Agence sont encore d'environ 25 milliards d'euros. Contrairement à ce que j'ai entendu, l'Acoss n'a aucun problème de trésorerie : par exemple, c'est sans aucune difficulté qu'elle a pu verser les aides sociales avec trois jours d'avance au mois d'avril.

Vous m'interrogez sur le soutien aux professionnels libéraux. C'est davantage au ministre de la santé qu'il appartient de vous répondre. Celui-ci a déjà annoncé plusieurs mesures à destination des professions libérales, pour un montant encore inconnu.

Madame Deroche, vous m'avez questionné sur le rapport commun de l'IGAS et de l'Inspection générale des finances (IGF) relatif à l'endettement des hôpitaux. Une version provisoire du rapport m'a été remise la semaine dernière. La mission doit poursuivre son travail et tenir compte de l'évolution de la situation des hôpitaux publics liée à la crise sanitaire. Aujourd'hui, le soutien aux hôpitaux publics prend trois formes : des aides de trésorerie, qui sont d'ores et déjà disponibles ; un mécanisme de garantie de financement dont les hôpitaux pourront bénéficier durant toute la durée de la crise pour un montant de recettes au moins égal à celui de l'année dernière ; enfin, au titre de la prise en charge de leurs dépenses exceptionnelles pour lutter contre le Covid-19, 376 millions d'euros leur ont déjà été versés.

Si les établissements de santé ont très peu de problèmes de trésorerie, le débat sur l'hôpital public n'est pas pour autant clos. S'agissant des établissements privés de santé, nous leur avons accordé des avances de trésorerie dès le mois de mars pour tenir compte de leurs difficultés particulières face à la crise.

Monsieur Cardoux, vous avez raison, il faut en effet une loi organique pour reporter la date d'extinction de la Cades. Toutefois, il est encore trop tôt pour répondre à votre question, d'autant que nous ne connaissons pas le montant exact de la dette à laquelle nous devrons faire face. S'agissant de l'Acoss, je tiens à vous rassurer. Il faut se réjouir que notre système puisse garantir un filet social efficace sans retarder le versement des pensions et des prestations sociales. C'est évidemment parce que l'État est là pour soutenir cette agence.

Pour répondre aux remarques faites par certains d'entre vous, je précise que le Gouvernement n'a pas rendu d'avis définitif sur l'éventualité d'un PLFRSS cet été. La question du calendrier parlementaire se posera, tout comme celle de l'élaboration, probablement très difficile, du PLFSS pour 2021. Faut-il vraiment examiner deux textes sociaux à trois mois d'intervalle ? Je n'en suis pas certain, d'autant qu'il y aura probablement d'autres urgences à traiter.

Mme Brigitte Micouleau. - Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner des précisions sur l'utilisation des 2,5 milliards d'euros de crédits non répartis de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles ? Cette procédure budgétaire inhabituelle vous donne davantage de flexibilité, mais pour soutenir quelles actions ? Les 800 millions d'euros correspondant à la prime versée à 4 millions de personnes précaires seront-ils prélevés sur ces crédits ? Quelle somme sera consacrée à l'acquisition de matériel médical ? Que ferez-vous du solde de cette dotation ?

Ma deuxième question porte sur les conjoints collaborateurs. Dans les mesures de soutien annoncées par le Gouvernement, deux catégories de personnes ont été oubliées : il s'agit des coassociés dirigeant des entreprises et des conjoints collaborateurs d'artisans et de commerçants, car les aides sont versées par entreprise et non par chef d'entreprise. De quelles mesures de soutien pourront-ils bénéficier ?

Ma troisième question concerne le chômage partiel : pouvez-vous nous dire où en est la concertation entamée avec les organisations représentatives des dentistes, alors que 24 milliards d'euros seront débloqués dans le cadre du dispositif d'activité partielle mis en oeuvre ? Sous quelle forme ce chômage partiel pourra-t-il s'appliquer aux dentistes ? Comment le chiffre d'affaires individuel, nécessaire à la mise en place d'un dispositif d'indemnisation, sera-t-il calculé ?

M. Michel Amiel. - Vous avez déjà répondu à l'une de mes questions sur le devenir de la Cades et sa probable non-extinction. Selon vous, ce n'est pas le moment d'y réfléchir - et je peux le comprendre.

Une question de philosophie générale de la dette : Esther Duflo, prix Nobel d'économie, estime que, avec une dette de cette importance, c'est le moment d'engager une relance de type keynésien. Qu'en pensez-vous ?

Lorsque la crise a éclaté, les personnels des hôpitaux, quasi à l'os, étaient en colère. Le Covid-19 peut-il être l'occasion de réfléchir de nouveau à un plan de fonctionnement des hôpitaux et d'abandonner certains dogmes comme la tarification à l'activité (T2A) ? Les hôpitaux sortiront totalement épuisés de cette crise et devront reprendre un fonctionnement normal, alors que toutes les opérations ont été reportées. Sera-ce un électrochoc pour passer à autre chose ?

Pouvez-vous apporter des précisions sur la prime des agents de la fonction publique territoriale ?

M. Michel Forissier. - Je connais votre attachement au réseau des artisans, et j'ai lu le message chaleureux et émouvant que vous leur avez adressé lors du décès de Bernard Stalter, notre regretté ami. Les artisans, déjà fortement fragilisés par la crise des « gilets jaunes » et les grèves contre la réforme des retraites, subissent de plein fouet cette crise sanitaire et ses conséquences économiques sans précédent. Beaucoup d'entre eux craignent de ne pas s'en relever, et s'inquiètent des incertitudes qui demeurent sur les conditions et le calendrier de reprise de leur activité.

J'ai travaillé avec le réseau des chambres de métiers et de l'artisanat, interlocuteur privilégié des artisans, qui souhaite voir les critères d'éligibilité au Fonds de solidarité assouplis pour que celui-ci bénéficie au plus grand nombre. Sur le premier volet, le critère de baisse du chiffre d'affaires de 50 % semble trop excluant, et ne tient pas compte des variations d'activité tout au long de l'année ni des entreprises nouvellement créées. Un critère de 20 % de baisse serait préférable. Le deuxième volet exige au minimum un salarié et l'impossibilité de régler ses dettes dans les trente jours. Ces conditions rédhibitoires excluent beaucoup de gens. La pérennité du dispositif, utile pour la survie de l'entreprise, mériterait d'être considérée avec attention en raison d'une évolution éventuelle de la crise.

Depuis six ans, je présente un rapport pour avis sur la mission « Travail et emploi » lors de l'examen du projet de loi de finances. Il y a quatre ans, j'avais avancé un chiffre potentiel de 39 milliards d'euros de déficit ; il m'avait été répondu qu'on n'atteindrait jamais ce chiffre... Avec la crise sanitaire, ce déficit atteindra 47 milliards d'euros, dont les deux tiers impactent directement la garantie de l'État.

Le politique ne doit pas oublier les fondamentaux de ce système, et notamment sa gestion paritaire. Le Gouvernement serait bien avisé de réunir les partenaires sociaux et de poser des questions d'avenir ; la période, au coeur de l'action, se prête à la négociation d'un accord. Certains affirment que nous sommes en guerre. Je dirais plutôt que nous subissons une catastrophe, imprévisible. Prenons exemple sur ce qui se fait en cas de catastrophe naturelle, ou sur ce qui est en train d'être fait pour ceux qui perdent des ressources sans être assurés pour cela : le secteur des assurances travaille actuellement avec le ministre de l'économie sur ce sujet. La dette de l'Unedic ne peut pas continuer à s'accroître pendant un ou deux mois sans qu'on bouge ; les partenaires sociaux devraient être réunis.

Mme Cathy Apourceau-Poly. - Vous n'avez pas évoqué la possibilité de mettre à contribution les revenus les plus élevés. N'est-il pas plus urgent de taxer les plus hauts revenus pour donner un signal fort de solidarité à nos concitoyens et aider les petites entreprises ?

Les fonctionnaires ayant eu un surcroît d'activité pourront toucher une prime allant jusqu'à 1 000 euros, mais les collectivités territoriales devront prendre leurs dispositions pour payer ces primes aux fonctionnaires territoriaux. Or plusieurs maires estiment que ce sera impossible pour eux, car ils ont déjà pris d'importantes mesures d'annulation de loyers pour des professions libérales, des petits commerces. Cet été, ils abandonneront leurs droits de terrasse, et les budgets des centres communaux d'action sociale (CCAS) vont exploser. Je suis favorable à une hausse des salaires par le biais d'une augmentation du point d'indice, et non au recours systématique à une prime. Le Gouvernement s'engage-t-il à exonérer de charges sociales les primes versées aux fonctionnaires ?

M. Alain Milon, président. - Nous avons déjà entendu ces propos lors de la séance publique hier soir...

Mme Corinne Imbert. - Je reviens sur les financements accordés à Santé publique France et à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). On a accusé le changement de doctrine de l'État entre 2011 et 2013 d'avoir provoqué la réduction du stock d'État de masques chirurgicaux et la disparition du stock d'État de masques FFP2. Cette doctrine sera probablement de nouveau révisée. Une partie de la dotation exceptionnelle de l'assurance maladie à Santé publique France sera-t-elle pérennisée, afin de renouveler le stock d'État de masques en vue d'éventuelles crises sanitaires à venir ?

Quels moyens seront consentis aux hôpitaux qui, en raison du changement de doctrine, s'étaient vu transférer la responsabilité d'acquérir des masques FFP2, qu'ils ont dû financer sur leurs crédits issus des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac) ? Ces stocks sont désormais épuisés. Quels financements leur permettront de reconstituer leurs stocks de masques ?

L'ANSM est sur tous les fronts - autorisation des essais cliniques, fiabilité des tests, tensions en termes d'approvisionnement en médicaments... -, alors que la mission d'information présidée par notre collègue Yves Daudigny déplorait déjà l'insuffisance de ses moyens en 2018 face aux pénuries de médicaments. La crise du Covid-19 met en lumière la limite de ses moyens. Comme pour Santé publique France, une dotation exceptionnelle sera-t-elle versée par l'assurance maladie à l'ANSM ?

La crise actuelle nous rappelle le caractère régalien de la police de sécurité sanitaire, mission fondamentale de l'ANSM. Il serait bon de réinscrire la dotation de l'ANSM au budget de l'État, comme celle de Santé publique France.

M. Gérald Darmanin, ministre. - Les 2,5 milliards d'euros prévus dans le deuxième projet de loi de finances rectificative relèvent du budget de l'État. Nous allons recourir, pour la première fois, à l'article 7 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) qui prévoit des dépenses accidentelles et imprévisibles - une disposition qui existe déjà pour les communes. Mais sur les 2,5 milliards d'euros prévus, 880 millions d'euros sont déjà amputés par un amendement du rapporteur général de l'Assemblée nationale, confirmé par le Sénat, qui prévoit que la prime de précarité pour les allocataires du revenu de solidarité active (RSA) soit budgétisée - et elle sera versée mi-mai. Parmi le 1,7 milliard d'euros restant, il faut comptabiliser les achats des ministères pour équiper les fonctionnaires de masques ou de protections.

Cela étant, il y a aura d'autres dépenses accidentelles et imprévisibles. Ainsi, nous avions budgétisé pour le Fonds de solidarité pour les indépendants 750 millions d'euros de l'État, 250 millions d'euros des régions, et 200 millions d'euros des assurances. Plus de 1,1 million d'indépendants a déjà demandé à accéder au fonds, et presque 1 milliard d'euros a déjà été versé. Nous sommes à quelques millions près au bout des crédits disponibles ; dès que la loi sera votée et publiée, nous pourrons de nouveau verser des crédits. De nombreuses régions n'ont pas encore versé les fonds ; en réalité, seules quatre d'entre elles les ont déjà mis en mandatement, notamment les Hauts-de-France, la Normandie et l'Occitanie. Les assureurs ont, quant à eux, versé une tranche de 90 millions d'euros. Ces dépenses accidentelles et imprévisibles sont là pour pallier les crédits limitatifs de l'État. Nous ne nous attendions pas à un tel « succès », et nous ne pouvons pas faire des projets de loi de finances rectificative chaque semaine ni dire que nous n'avons pas assez d'argent. L'utilisation des crédits pourra être contrôlée par les commissions des finances des assemblées - j'en rends compte chaque semaine, comme je m'y suis engagé auprès du président et du rapporteur général de la commission des finances du Sénat.

Le Fonds de solidarité pour les indépendants relève des crédits de l'État et a déjà connu beaucoup de modifications. Au départ, nous prenions comme critère le chiffre de 70 % de perte de chiffre d'affaires, puis celui de 50 %. Nous comparions les mois de mars 2019 et celui de mars 2020, puis nous nous sommes concentrés sur une comparaison sur l'année entière en raison de la crise des « gilets jaunes ». À la demande des parlementaires notamment, Bercy a beaucoup amélioré son dispositif.

Prévoir comme critère l'existence d'au moins un salarié est normal : ce fonds vise surtout à sauver l'emploi - sinon, il existe d'autres fonds.

En réalité, trois fonds se cumulent : l'un permet d'obtenir jusqu'à 1 500 euros par mois, versés directement sur le compte de l'entreprise, en suivant une démarche très simple sur le site des impôts : il suffit d'un numéro Siret (système d'identification du répertoire des établissements), d'un numéro Siren (système d'identification du répertoire des entreprises), d'une déclaration de chiffre d'affaires et d'un relevé d'identité bancaire. Ce premier étage est cumulable avec un deuxième étage financé par le conseil régional de 2 000 à 5 000 euros selon les charges fixes de l'indépendant, notamment lorsqu'il ne peut pas bénéficier d'un report de loyer. Enfin, une troisième aide, allant jusqu'à 1 500 euros, est versée par le Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants (CPSTI) au profit des indépendants, en tant qu'individus. Au total, les indépendants peuvent donc recevoir jusqu'à 8 000 euros totalement défiscalisés. Certes, cela ne remplacera pas leur activité, mais c'est extrêmement important, car les indépendants ont ainsi accès aux reports de charges - voire aux annulations, aux prêts garantis par l'État, aux aides de trésorerie, au chômage partiel...

Vous m'interrogez sur la pérennité du fonds ; l'État n'a pas fait tout ce travail pour couper le robinet juste après la crise s'il n'y a pas de reprise normale de l'activité ! Le 11 mai ne sonnera pas la fermeture des aides aux indépendants : cela dépendra beaucoup de la stratégie de déconfinement du pays.

Les dentistes ont accès au chômage partiel : près de 75 % des cabinets ont demandé à y recourir, alors que le secteur compte 40 000 salariés. Ils bénéficient aussi de fonds spécifiques du ministère de la santé, cumulables avec des aides de la CNAM. Les dentistes sont donc accompagnés.

M. Amiel évoquait Esther Duflo. Il y aura une relance, mais de quel type : une relance keynésienne par la demande avec des subventions, un soutien économique aux collectivités locales, ou bien une relance par l'offre, c'est-à-dire par les entreprises et la croissance économique ? Le Gouvernement croit que les baisses d'impôt augmentent les recettes, car elles augmentent l'activité. Nous pourrons peut-être continuer comme cela pour les impôts de production, mais le sujet est complexe et concerne aussi la sécurité sociale, la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) et les collectivités locales... Je ne sais pas ce que voudront faire le Président de la République et le Premier ministre, peut-être un peu des deux. En tout cas, la question de la relance se posera très vite et des projets de loi seront déposés.

Les déclarations de Mme Buzyn et de M. Véran devraient vous rassurer sur la T2A, mais je ne suis pas ministre de la santé. Ce dernier est à votre disposition pour vous répondre sur la stratégie des hôpitaux, les masques, les médicaments... Ce n'est pas de mon ressort.

Trois primes sont prévues pour les fonctionnaires : une prime de 1,2 milliard d'euros pour la fonction publique hospitalière, prise sur l'Ondam, qui a été évoquée par le ministre de la santé ; une prime pour les agents de l'État, versée par ministère, celui-ci décidant quels agents en bénéficieront ; une prime pour la fonction publique territoriale, calquée sur le dispositif de l'État, avec une prime allant jusqu'à 1 000 euros, sans fiscalité ni cotisations sociales. Elle ne coûtera rien aux collectivités locales, car il n'y aura pas de cotisation employeur.

Madame Apourceau-Poly, je ne comprends pas bien votre démonstration sur les maires. Dans la ville dont j'ai été le maire et dont je reste conseiller municipal, ville qui a un budget difficile, une population nombreuse et socialement touchée, il y a une hausse des dépenses imprévues, des recettes qui ne rentrent pas, mais nous observons aussi des économies de constatation, comme, par exemple, les cantines municipales : la commune paie toujours plus que le prix facturé aux familles.

Les difficultés des petites communes sont très diverses : celles qui paient le versement transport aux intercommunalités ne sont pas dans la même situation que celles qui ont des régies ; d'autres perdent des droits de terrasse... Mais 80 % des recettes des collectivités ne dépendent pas de la conjoncture économique. Certes, d'autres recettes en dépendent comme les taxes de séjour, les taxes sur les casinos, les droits de mutation, mais la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et la TVA ne seront dues que l'année prochaine. Oui, il y aura peut-être de moindres recettes, mais la plupart des collectivités locales pourront verser cette prime. Nous parlerons des futures difficultés des collectivités. L'article 72 de la Constitution, que l'on nous oppose régulièrement, dispose que l'État n'a pas à intervenir dans la gestion des collectivités locales. C'est donc l'employeur, sans obligation, qui fixe le montant de la prime, je le répète, totalement exonérée de charges fiscales et sociales.

Dans notre système d'assurance chômage, nous discutons avec les partenaires sociaux, monsieur Forissier. Le dialogue social reste important et la ministre du travail y est très sensible. La ministre du travail prépare activement le jour d'après.

L'État prend le plus gros risque financier, celui de l'endettement, et c'est normal, car il bénéficie de taux plus faibles et de stocks d'emprunts que ne pourrait pas faire l'Unedic. Ce ne sont plus les cotisations salariales qui sont versées à l'Unedic. Nous avons réalisé un changement de fiscalité, comme vous le savez et c'est désormais un impôt, la contribution sociale généralisée (CSG), qui est versé à l'Unedic pour la part salariale. Il demeure en revanche une part de cotisations patronales.

Hier soir, nous avons eu une longue discussion dans l'hémicycle sur le rétablissement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et du prélèvement forfaitaire unique (PFU). Créer une nouvelle taxe n'est pas à l'ordre de jour. Ce n'est pas en « surfiscalisant » que l'on relancera la croissance. « Il y en a qui ont essayé, ils ont eu des problèmes... » Avant la crise, nous avions le taux de chômage le plus bas depuis vingt ans, une augmentation du pouvoir d'achat et la croissance la plus forte de l'Union européenne, dans des conditions pourtant difficiles. La prime pour la fonction publique sera exonérée de charges fiscales et sociales.

Pour Santé publique France, sans être spécialiste du sujet ni prendre de gros risque, je vous dirai que nous devrions renouveler le stock de masques. Le risque pandémique est aujourd'hui bien compris par la plupart des dirigeants politiques. Mais je ne connais pas le montant ni le nombre de masques concernés. Le ministre de la santé pourrait utilement vous répondre.

Actuellement, l'assurance maladie paie 116 millions d'euros de dotation à l'ANSM, agence qui emploie plus de 900 équivalents temps plein (ETP). Nous avons choisi de la rattacher à la sécurité sociale et non à l'État, ce qui n'empêche pas de donner des moyens suffisants. Santé publique France  avait 150 millions d'euros il y a trois mois, elle en a 4 milliards aujourd'hui...

Mme Victoire Jasmin. - Le tourisme est durement touché, en particulier outre-mer : des réservations sont annulées en grand nombre et beaucoup de touristes ne viendront pas cet été. Au-delà de ce que vous avez répondu à notre rapporteur général, quelles mesures comptez-vous prendre pour aider les professionnels pour qui la crise durera bien au-delà du mois de mai ? Quelles mesures spécifiques comptez-vous également prendre pour les agriculteurs ? Certains ont adapté leurs pratiques, en évoluant vers de la vente directe par exemple, mais beaucoup n'ont pas pu le faire, parce que leurs produits étaient habituellement achetés par la restauration ou par des magasins qui se trouvent fermés aujourd'hui, ou parce que les circuits d'approvisionnement sont perturbés : comment les aider ?

Mme Monique Lubin. - Les départements, par leurs compétences en matière de solidarité, sont en première ligne dans cette crise, alors même que leurs finances sont mises à mal, du fait de moindres rentrées des droits de mutation. Le Gouvernement avait desserré les taux du « pacte de Cahors » sur l'encadrement des dépenses locales : êtes-vous maintenant disposé à y renoncer complètement ? Quand bien même le Gouvernement mise sur un rebond, il y aura des faillites, du chômage, donc des dépenses nouvelles pour les départements dans les mois à venir : il faut les aider à remplir leurs missions, que comptez-vous faire ?

Mme Laurence Cohen. - Vous annoncez débloquer des milliards d'euros pour acquérir des matériels de protection. C'est nécessaire, mais la situation de l'hôpital avant l'épidémie de Covid-19 était déjà très tendue après des années de gestion principalement comptable, liée à la T2A. Les professionnels hospitaliers n'ont cessé de le dire haut et fort tout au long d'un mouvement social qui a duré depuis plus d'un an, sans être entendus. L'argent public, débloqué aujourd'hui dans l'urgence, ne va pas redresser l'hôpital, et la question reste donc entière. J'aurais souhaité un PLFRSS plus tôt, car il faut prendre en compte l'état de l'hôpital tel qu'il sera au lendemain de la crise sanitaire.

Ensuite, face à cette crise inédite qui est sanitaire, économique et sociale, et qui nous invite à ne pas persévérer dans de mauvaises politiques publiques, vous ne proposez que des primes, là où les salariés demandent des augmentations de salaire. Qui plus est, vous incluez ces primes dans l'Ondam, alors qu'il était déjà insuffisant, calculé au plus juste - je rappelle que le Gouvernement l'avait limité à 2,5 %, alors que nous avions demandé une progression de 4,5 %, seuil minimal pour tenir compte des besoins. Aujourd'hui, le Gouvernement autorise une progression d'au moins 7 % de cet objectif, ce qui démontre bien que « quand on veut, on peut! », contrairement à ce qu'on nous disait au moment de l'examen du PLFSS...

Les collectivités territoriales font un effort très important dans cette crise, avec des dépenses nouvelles de solidarité, des distributions alimentaires, des aides. Elles nous alertent sur le fait que leurs finances ne sont pas extensibles. Comment en tiendrez-vous compte ? Les associations sont, elles aussi, très mobilisées, aussi bien le secteur caritatif que les associations familiales, ou encore celles qui luttent contre les violences faites aux femmes. Elles ont, par exemple, engagé des dépenses pour se mettre au télétravail, et celles-ci n'ont évidemment pas été budgétisées : allez-vous les aider ?

Enfin, vous reprochez à nos propositions de « surfiscaliser » notre économie, mais nous proposons seulement de taxer davantage ceux qui en ont les moyens, par solidarité avec ceux qui sont les plus touchés par la crise : c'est, effectivement, une différence d'analyse.

Mme Martine Berthet. - Les domaines skiables n'entrent pas dans le champ du décret obligeant à la fermeture, au 17 mars, des établissements recevant du public (ERP), mais ils ont été mis de fait à l'arrêt, l'État ayant organisé dès le 15 mars le retour des vacanciers dans leurs foyers, laissant les professionnels sans activité. Au-delà des salariés des stations de ski, c'est la vie économique de territoires entiers qui se trouve mise à l'arrêt, sans compensation, puisque la fermeture n'a pas été contrainte par l'administration : comment allez-vous tenir compte de cette situation spécifique ?

M. Olivier Henno. - Si nous examinions un PLFRSS aujourd'hui, quelle progression de l'Ondam proposeriez-vous ?

Le Gouvernement présente des chiffres vertigineux pour la dette, mais le coût de l'endettement n'augmente pas grâce à la solidité de l'euro et au maintien de taux bas? Si ce n'était pas le cas, comme cela s'est produit à d'autres périodes, nos réserves de change auraient fondu. Ce facteur est décisif, ce qui fait nous interroger : avez-vous toute confiance dans la solidité de l'euro et le maintien de taux bas ?

M. Gérald Darmanin, ministre. - Le tourisme est effectivement un secteur très touché, et pas seulement dans l'immédiat, vous avez raison. On doit également tenir compte de la diversité des situations que connaissent les agriculteurs : certains peuvent s'adapter, d'autres pas du tout, selon les productions, les circuits de distribution, la consommation... Au-delà des allégements de charges et des mesures de chômage partiel que nous prenons aujourd'hui pour parer au plus urgent, la réponse que nous apporterons relève du plan de relance. Nous travaillons sur de nombreuses pistes, avec des mesures sectorielles précises. Il ne m'appartient pas de les présenter ici. Du reste, le Président de la République réunira les acteurs du tourisme vendredi prochain.

Ce que l'on a qualifié de « Pacte de Cahors », qui encadrait contractuellement les objectifs de dépenses des collectivités locales, est révolu : la contrainte est levée. Le département est effectivement la collectivité la plus directement touchée par les conséquences sociales de la crise, qui vont se développer dans les mois à venir d'autant que, vous l'avez dit, les recettes des départements vont diminuer, parce qu'elles sont directement liées aux impôts de production et aux droits de mutation. L'État s'est déjà fortement engagé sur le terrain social, sans le clamer haut et fort, par exemple en prolongeant tous les dispositifs dont bénéficiaient des personnes arrivées en fin de droits, et ce pour ne pas pénaliser ces personnes en temps de crise. Les départements auront des solutions à trouver, nous devrons y travailler. J'aurai prochainement un échange sur le sujet avec Dominique Bussereau.

Les collectivités territoriales sont loin d'être toutes dans la même situation, et si certaines sont affectées très directement par la crise, d'autres ne le sont guère. Elles disposent, globalement, de 40 milliards d'euros de trésorerie. Nous avons maintenu les dotations et une partie de la fiscalité locale est dynamique - nous y avons travaillé ces dernières années. On ne saurait donc parler des collectivités comme d'un ensemble homogène pour lequel tout irait mal : certaines se portent bien, et il existe des différences très importantes entre les types de collectivités et entre les territoires, selon leurs caractéristiques, les entreprises qui s'y trouvent, leurs équipements. Un indicateur de la situation actuelle : au total, à peine 40 communes sur plus de 35 000 ont demandé des avances de trésorerie à l'État, ce qui est très peu et même moins qu'à l'ordinaire. Les collectivités territoriales jouent le jeu, les communes en particulier. C'est tout à fait leur rôle et, je le rappelle, les maires sont aussi des agents de l'État, dotés de responsabilités publiques, fonctions auxquelles s'ajoutent celles qu'ils tirent de leur légitimité d'élus et de leurs organes délibératifs, ce qui leur permet d'aller plus loin.

Nous prévoyons des primes pour les professionnels hospitaliers. Vous me dites, madame Cohen, qu'il vaudrait mieux augmenter les salaires, mais le Président de la République envisage aussi cette piste, comme il l'a explicitement indiqué. Je crois que nous avons effectivement une différence d'analyse : vous appelez à taxer davantage, je dis que cela revient à surfiscaliser.

Les stations de sports d'hiver ont été arrêtées, avec toutes les difficultés que cela pose, mais cela s'est produit plutôt à la fin de la saison. Je n'établis pas de hiérarchie dans les difficultés, mais la comparaison est possible avec les secteurs qui sont touchés de plein fouet en pleine saison, voire sur toute leur saison. La fermeture n'a pas été administrative ? Certes, mais les stations de ski ne sont pas seules dans ce cas : voyez les hôtels que personne n'a obligé à fermer, mais qui ont dû le faire, faute de clients. Le critère de l'aide, me semble-t-il, est moins administratif qu'économique et social. L'aide sera versée à ceux qui ont le plus de difficultés.

Monsieur Henno, si nous devions fixer une progression de l'Ondam aujourd'hui, nous anticiperions une hausse de 6,5 %, soit bien au-delà de ce que nous proposait le groupe communiste lors de l'examen du dernier PLFSS. Cependant, ce chiffre ne signifierait pas grand-chose, puisqu'il y a beaucoup de mouvements contraires dont on ne connaît pas encore l'ampleur. C'est pourquoi une loi de financement rectificative de la sécurité sociale serait prématurée aujourd'hui.

Enfin, vous avez parfaitement raison de souligner que la stabilité de l'euro est décisive ; il faut le dire au moment où le sentiment antieuropéen est si fort. Il y a un débat de fond, stratégique, sur les conséquences de la dette : faudra-t-il, comme va le faire la Grande-Bretagne, rétablir la situation par de l'inflation au risque de ruiner une partie de son économie ou bien, comme l'ont déjà fait les États membres de l'Union européenne, stocker de la dette, bénéficier d'une inflation basse, mais au prix de certaines difficultés à lancer des politiques volontaristes et dispendieuses ? À l'intérieur même de la zone euro, il existe des différences : voyez les écarts de taux d'intérêt entre l'Allemagne et l'Italie ! Nous notons aussi que les traités européens sont assez souples et qu'ils nous permettent d'agir de manière souple. L'euro nous aide, il continuera de nous aider dans la gestion du stock de dettes. Et si le remboursement d'une dette ne peut constituer un projet de société, il ne faut pas perdre de vue que ne pas rembourser sa dette décrédibilise pour longtemps l'emprunteur... Il nous faudra collectivement y réfléchir, notre avenir commun en dépend.

M. Alain Milon, président- Merci pour vos réponses. Je ne suis pas sûr que la T2A soit la seule cause des difficultés de l'hôpital. J'en veux pour preuve que les établissements psychiatriques ont aussi des problèmes, alors qu'ils ne sont pas à la T2A. Les difficultés actuelles relèvent d'un ensemble de facteurs, organisationnels, administratifs, venus de l'intérieur et de l'extérieur de l'hôpital, parmi lesquels on trouve, par exemple, la mauvaise application des 35 heures dans les établissements.

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