Les troisièmes rencontres sénatoriales de la justice



Colloque organisé par M. Christian Poncelet, président du Sénat - Palais du Luxembourg - 7 juin 2005

TROISIÈMES RENCONTRES SÉNATORIALES DE LA JUSTICE

SÉNAT - Palais du Luxembourg

MARDI 7 JUIN 2005

M. Robert BADINTER , sénateur des Hauts-de-Seine, ancien Président du Conseil constitutionnel - Nous attendons le Président du Sénat, Monsieur Poncelet, qui, à juste titre, tient à vous souhaiter la bienvenue, avant que nous entendions trois collègues exposer très rapidement - je souligne cet adverbe - leur expérience au sein des juridictions et le sentiment qu'ils en ont tiré. Rien ne m'autorise à me targuer d'une délégation, que je ne suis d'ailleurs pas sûr de pouvoir obtenir puisque seul le Président Poncelet peut le faire, mais en l'attendant, nous allons commencer l'audition de nos amis sénateurs.

A. TÉMOIGNAGES DES SÉNATEURS

M. Yves DÉTRAIGNE, sénateur de la Marne .- Merci, monsieur le Président, de me donner la parole. Je vais être rapide parce que le thème principal de la matinée n'est pas de rendre compte des stages que nombre de sénateurs ont pu faire dans les juridictions, mais il est important que vous, les magistrats qui nous avez fait le plaisir de nous accueillir, puissiez avoir un retour sur ces stages que nous avons effectués.

Pour ma part, le stage que j'ai fait a été un peu particulier, parce que je suis, à la Commission des lois du Sénat, le rapporteur du budget de la justice ou, plus exactement, des moyens généraux de la justice. Ce stage avait donc un double objectif pour moi : d'une part, connaître les juridictions de l'intérieur et, d'autre part, alimenter ma réflexion en tant que rapporteur du budget de la justice.

Autre particularité : j'ai fait ce stage fin avril auprès de la Cour d'appel de Douai alors qu'en général, ces stages sont faits, jusqu'ici, plutôt dans des juridictions de premier degré. Quoi qu'il en soit, j'en tire un bilan extrêmement positif à plusieurs titres.

Tout d'abord par la qualité de l'accueil qui m'a été réservé et par l'intérêt du programme et des rencontres que j'ai faites à cette occasion.

Positif aussi parce que ce stage a été l'occasion de découvrir le fonctionnement de l'institution judiciaire de l'intérieur. Alors qu'il se dit et s'écrit beaucoup de choses sur elle, lorsqu'on est à l'intérieur, ou presque, lorsqu'on est au coeur de son fonctionnement, on est amené à relativiser les choses.

Positif enfin parce que, en tant que rapporteur du budget, une partie de ce stage m'a permis d'avoir des échanges et de recueillir un certain nombre de réactions sur la mise en oeuvre de la fameuse LOLF, dont je sais qu'elle vous préoccupe. Sachez qu'elle est aussi l'objet de toutes les attentions des parlementaires.

J'en viens en quelques mots aux appréciations que je porte sur ce stage et, au-delà, non pas sur l'ensemble de l'institution judiciaire mais au moins sur ce que j'ai pu voir.

J'ai rencontré des hommes et des femmes qui ont un sens aigu du service public et de l'intérêt général, et je crois que cela mérite d'être dit parce qu'on ne le dit sûrement pas suffisamment. En tant que rapporteur du budget, j'ai évidemment procédé à un certain nombre d'auditions, j'ai entendu à plusieurs reprises des responsables dire que la justice manquait de moyens mais, malgré cette absence de moyens, j'ai constaté que les acteurs au quotidien de l'institution judiciaire font preuve d'une grande conscience professionnelle et d'un très haut sens du service public. Ils exercent au mieux leur fonction, avec un sens de l'écoute tout à fait réel.

(Arrivée de Monsieur le Président du Sénat, Christian Poncelet.)

Excusez-moi, Monsieur le Président : je ne faisais pas l'ouverture de la séance. On m'a simplement demandé d'anticiper sur le déroulement du programme.

M. Christian PONCELET - Je vous en prie : terminez.

M. Yves DÉTRAIGNE - J'ai rencontré aussi des personnes qui ont une parfaite conscience du poids de leur responsabilité et de l'application de la loi. On applique la loi avec du matériel humain et cela ne se fait pas aveuglément. L'ensemble des magistrats que j'ai pu rencontrer et des audiences auxquelles j'ai pu assister m'a montré la qualité de ces hommes et de ces femmes et la parfaite conscience qu'ils avaient du poids de leurs lourdes responsabilités.

J'ai vu aussi une volonté d'atteindre une certaine efficience dans le fonctionnement de l'institution judiciaire, non seulement dans la volonté d'apurer les dossiers qui se sont empilés et les affaires en instance, mais véritablement de rechercher une justice de qualité avec l'affectation des moyens la mieux adaptée possible aux priorités de la juridiction. On comprend tout à fait, quand on fait un stage comme celui-ci, l'intérêt d'avoir, dans les juridictions, ce que je vais appeler une politique de la juridiction. Les soucis ne sont pas les mêmes, que l'on soit dans le nord, le sud, l'est ou l'ouest.

Voilà les réflexions que je voulais vous présenter. Au total, pour le parlementaire que je suis, cette expérience permet de corriger certaines idées toutes faites que l'on peut lire ou entendre assez facilement sur le fonctionnement de la justice, notamment le fait que la justice ne mesure pas toujours l'impact de ses décisions. Au contraire, je peux dire que j'ai vu des hommes et des femmes parfaitement en phase avec la réalité et conscients de la nécessité de ne pas appliquer aveuglément le code pénal ou le code civil.

L'institution judiciaire gagne et gagnera à être mieux connue non seulement des parlementaires mais de la population. Je ne dis pas cela pour faire la transition avec le thème de cette matinée. Je sais que l'entrée des médias dans l'institution judiciaire ne va pas de soi et qu'en tout état de cause, elle doit se faire avec discernement, mais, sans aucun doute, au-delà de mon appréciation de parlementaire je suis convaincu qu'une meilleure connaissance de l'institution judiciaire serait bénéfique à notre société dans son ensemble.

Je vous remercie de votre attention.

(Applaudissements.)

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