Table des matières




Mercredi 19 décembre 2001

- Présidence de M. Gérard César, vice-président. -

Résolutions européennes - Livre vert sur l'avenir de la politique commune de la pêche (E-1711) - Nomination d'un rapporteur - examen du rapport

La commission a tout d'abord procédé à la nomination de M. Alain Gérard en qualité de rapporteur sur la proposition de résolution n° 97 (2001-2002) de M. Jacques Oudin sur le Livre vert sur l'avenir de la politique commune de la pêche (n° E-1711) et à l'examen de son rapport.

M. Alain Gérard, rapporteur, a rappelé que le Sénat avait été saisi, dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution, du « Livre vert » de la Commission européenne proposant des évolutions profondes de la Politique commune de la pêche (PCP) et que, le 21 novembre 2001, M. Jacques Oudin avait présenté, au nom de la Délégation pour l'Union européenne, une proposition de résolution n° 97 relative à ce Livre vert, dont la commission des affaires économiques était saisie.

M. Alain Gérard, rapporteur, a noté que le Livre vert sur l'avenir de la Politique commune de la pêche (PCP), publié par la Commission européenne le 20 mars 2001, répondait à la nécessité de réformer la PCP à l'horizon 2002. Il a estimé que la nécessité de cette réforme tenait à la fois à l'échéance du règlement de base n° 3760/92 du 20 décembre 1992 et à l'incapacité de la PCP, en sa forme actuelle, à atteindre l'objectif d'une exploitation durable des ressources. Enfin, il a jugé que les nouveaux défis que devait relever la Politique commune de la Pêche (élargissement de l'Union européenne, mondialisation, considérations environnementales...) nécessitaient également une réforme, indépendamment des faiblesses inhérentes au système.

Il a précisé que la Commission européenne avait ouvert un large débat en vue de la révision de la Politique commune de la pêche et recueillait jusqu'au 31 décembre 2001 les réactions de toutes les parties intéressées au Livre vert qu'elle avait publié.

A ce titre, il a souligné l'opportunité pour la commission de se prononcer avant cette échéance, afin que le Gouvernement connaisse la position du Sénat, en amont des négociations à venir sur les textes que la Commission européenne proposera en 2002.

Avant d'analyser le Livre vert, M. Alain Gérard, rapporteur, a tenu à revenir brièvement sur l'origine et les principes de la PCP. Relevant que la politique commune de la pêche avait été conçue comme centralisée et avait été reconnue dès 1976 par la Cour de justice des Communautés européennes comme l'une des rares compétences exclusives de la Communauté, au même titre que la politique agricole commune ou la politique commerciale, il a fait valoir qu'un élément central de la construction européenne était donc en cours de réforme.

Il a ensuite présenté les quatre volets que comprend aujourd'hui la politique commune de la pêche, dont les fondements ont été posés en 1983 :

- la conservation des ressources : rappelant que, chaque année, sont fixés des totaux admissibles de captures (TAC) pour les stocks des principales espèces et que ces TAC sont ensuite répartis en quotas nationaux en suivant le principe de la « stabilité relative », c'est-à-dire en fonction de références historiques, il a précisé que ces limitations de captures étaient complétées par des mesures techniques réglementant les engins et les méthodes de pêche ;

- les actions structurelles, qui s'appuient principalement sur les programmes d'orientation pluriannuels (POP), lesquels prévoient notamment des réductions des capacités de pêche en contrepartie d'aides financières ;

- l'organisation commune des marchés (OCM), largement inspirée de celle des fruits et légumes. M. Alain Gérard, rapporteur, a expliqué qu'elle était mise en oeuvre par des organisations nationales de producteurs (OP) et comportait principalement des normes de commercialisation et un régime commun des prix, permettant le retrait du marché d'une partie de la production lorsque les prix reviennent en deçà d'un certain seuil ;

- le volet externe, constitué par les accords de pêche négociés par la Commission afin de garantir l'accès des navires de l'Union dans les eaux des pays tiers, généralement en contrepartie de compensations financières.

M. Alain Gérard, rapporteur, a souligné que le Livre vert analysait, souvent avec lucidité, les insuffisances de la PCP et déplorait :

- les difficultés à endiguer la surpêche : M. Alain Gérard, rapporteur, a indiqué que, selon la Commission, la durabilité d'un grand nombre de stocks était menacée si l'intensité de l'exploitation se maintenait au niveau actuel, notamment celle des stocks de cabillaud et de merlu, lesquels étaient en moyenne de 90% supérieurs au début des années 1970 par rapport à la fin des années 1990. La Commission, a-t-il poursuivi, relève que les instruments actuels de la PCP (TAC, mesures techniques et gestion de la flotte) n'ont pas fait la preuve de leur efficacité et ne se sont pas suffisamment inscrits dans une stratégie environnementale ;

- les défaillances du processus décisionnel : M. Alain Gérard, rapporteur, a précisé que la commission regrettait le manque d'implication des professionnels dans ce processus et expliquait ainsi leur difficile adhésion aux décisions communautaires ;

- les insuffisances de la surveillance et du contrôle : partageant l'analyse de la Commission, M. Alain Gérard, rapporteur, a noté que le contrôle de l'application de la PCP était décentralisé, ce qui ne garantissait pas l'égalité de traitement, et que les sanctions aux infractions n'étaient pas harmonisées ;

- un résultat économique et social décevant : M. Alain Gérard, rapporteur, a évoqué le rapprochement opéré par la Commission entre le montant de fonds publics versés à la pêche européenne chaque année -1,1 milliard d'euros, consacrés à la protection tarifaire et aux investissements- et le maigre résultat de cet effort (défaut de rentabilité économique, déclin du nombre d'emplois) ;

- une articulation délicate entre la politique extérieure de la pêche et la politique de développement durable : M. Alain Gérard, rapporteur, a noté que la Commission s'inquiétait des conséquences des « accords de pêche », que la Communauté a conclus avec des pays tiers, sur les ressources halieutiques et sur le développement du potentiel de pêche local.

S'il a reconnu que la noirceur du tableau, ainsi dressé par la commission, était largement fondée, M. Alain Gérard, rapporteur, a jugé que les propositions du Livre vert pour réformer la PCP étaient loin d'être pleinement satisfaisantes.

Il a relevé d'abord deux sujets d'interrogation : d'une part, la Commission, a-t-il noté, appelle à hiérarchiser les objectifs assignés à la PCP, pour en résoudre les contradictions internes, et laisse entendre que la conservation des ressources doit l'emporter sur toute autre considération. Or, a fait valoir M. Alain Gérard, rapporteur, garantir une pêche durable devrait être l'objectif premier de la PCP, ce qui passe évidemment par la protection simultanée de la ressource. Il a souligné que la viabilité à long terme de l'activité de pêche, comme celle de la ressource, pouvaient être garanties simultanément, et non alternativement. D'autre part, il s'est interrogé sur la façon dont la Commission appréhendait la dimension environnementale. Précisant que les professionnels s'accordaient avec la Commission pour dire que la PCP devait mieux intégrer l'exigence de protection raisonnée de l'environnement, il a toutefois fait observer qu'ils étaient souvent les victimes, et non les responsables, des atteintes à l'environnement.

M. Alain Gérard, rapporteur, a ensuite affirmé que quelques pistes ouvertes par le Livre vert méritaient, quant à elles, d'être approfondies : ainsi, il a considéré le renforcement et l'amélioration de la politique de conservation de la ressource par les totaux admissibles de captures et autres mesures complémentaires  comme un moyen primordial d'accroître l'efficacité de la PCP. Il a souligné que la France s'accordait avec la Commission pour juger que le régime communautaire des TAC et quotas était un bon moyen de conservation et de gestion des ressources, de même qu'un instrument pertinent de régulation de la production et de répartition des accès, reposant sur des bases historiques objectives et simples, à condition toutefois d'être réellement respecté par tous. Il a toutefois jugé que plusieurs améliorations au système des quotas devaient être soutenues : élargissement à d'autres espèces, programmation pluriannuelle, participation des professionnels à la fixation des TAC, intensification de la recherche. Enfin, le système des quotas lui a paru devoir être complété par des mesures techniques (arrêts temporaires de pêcheries, pêche sélective...). A ce propos, M. Alain Gérard, rapporteur, a insisté sur le renforcement de la recherche : d'une part, pour autoriser un débat scientifique autour de l'évaluation des ressources et des interférences entre écosystème  et pêche, notamment minotière, c'est-à-dire destinée à la fabrication de farines de poissons ; d'autre part, pour estimer et affiner la sélectivité des engins et techniques de pêche, évoquant, à ce sujet, les filets maillants dérivants, dont l'interdiction lui semble reposer sur des fondements scientifiques très discutables.

M. Alain Gérard, rapporteur, a souhaité également qu'une deuxième orientation du Livre vert soit approfondie : l'harmonisation et le renforcement de l'efficacité de la politique de contrôle. A cette fin, il a proposé de développer le corps des inspecteurs communautaires et de lui donner les moyens de se substituer aux inspecteurs nationaux, ce qui garantirait une application équitable et uniforme des règles communautaires. Rappelant que M. Jacques Oudin proposait même la création d'une agence communautaire de contrôle, il a préféré, dans la proposition de résolution qu'il a soumise à la commission, présenter cette solution comme un dernier recours en raison du coût financier d'une telle agence.

Enfin, il a déclaré soutenir la préoccupation exprimée dans le Livre vert de mettre en place les conditions d'une meilleure qualité et d'une sécurité sanitaire pour les produits de la mer, tant dans l'organisation interne des marchés qu'à l'importation.

Toutefois, M. Alain Gérard, rapporteur, s'est dit préoccupé par plusieurs suggestions du Livre vert. La priorité que ce dernier persiste à accorder à un encadrement brutal de la flotte l'inquiète au plus haut point : en effet, a-t-il souligné, le Livre vert juge nécessaire de réduire de 40 % la capacité de la flotte, alors que ce système a fait la preuve de son inefficacité et de ses effets pervers et déstructurants. Il a estimé qu'il n'était pas concevable de centrer la PCP sur les plans d'orientation pluriannuels (POP). Outre leur extraordinaire coût administratif, et, surtout, social et humain, les POP -observe-t-il- ne semblent pas avoir d'effet direct sur l'état des stocks : il a expliqué ceci par l'absence de concordance entre les compartiments du POP (segments de flottilles) et ceux des ressources (stocks) et par une inadéquation entre les critères actuels de capacité (jauge et puissance) et la mortalité par pêche. Convaincu de la nécessité de rechercher une adéquation entre les potentialités de la ressource et l'effort de pêche déployé pour son exploitation, il a déclaré que cette adéquation pouvait être obtenue, plutôt qu'en « cassant du bateau », en améliorant et en articulant mieux les différents instruments disponibles  -contingentement des quantités, mesures techniques et contrôles- et en veillant au respect du principe de subsidiarité pour la gestion de la flotte.

En outre, M. Alain Gérard, rapporteur, a regretté que le Livre vert néglige la dimension sociale de la pêche, et notamment son rôle essentiel dans l'aménagement du territoire des Etats membres. Il a fait observer que la proposition de résolution qu'il soumettait à la commission appelait le Gouvernement à insister sur ce point à Bruxelles. Il a souhaité que la France prenne des initiatives visant à promouvoir l'amélioration des conditions de travail à la pêche et l'harmonisation de certains volets de droit du travail entre Etats membres ou à prendre en compte les spécificités de la petite pêche, laquelle anime les côtes françaises.

Enfin, M. Alain Gérard, rapporteur, a déploré que le Livre vert remette en cause, en termes voilés, la politique d'accords de pêche que mène la Communauté européenne avec les pays tiers, alors que ces accords, a-t-il souligné, représentent une opportunité importante pour les pêcheurs communautaires, et notamment français. En outre, il a relevé que ces accords contribuaient à favoriser une pêche durable et responsable, en luttant contre la pêche illégale, et représentaient un apport financier appréciable pour quelques pays peu développés, allant jusqu'à 15 % des recettes budgétaires de certains pays africains.

Au terme de ces observations sur le Livre vert et sur l'avenir de la politique commune de la pêche, il a proposé à la commission d'adopter la proposition de résolution qui lui avait été distribuée.

M. Patrick Lassourd a estimé que l'Europe semblait avoir fait le choix de soutenir la pêche portugaise et espagnole, aux dépens de la pêche française. Relevant que, par ailleurs, la production française de lait et de viande bovine bénéficiait du soutien communautaire, il s'est interrogé sur l'existence d'une politique européenne s'apparentant au « troc ».

M. Alain Gérard, rapporteur, a estimé qu'une telle crainte était légitime et a évoqué les débats qui avaient animé en ce sens la commission lors de l'examen du budget de la pêche pour 2002.

M. Gérard César, président, a fait état de la forte inquiétude des marins-pêcheurs face aux orientations du Livre vert. Il a toutefois insisté sur la réalité de l'épuisement de la ressource.

M. Alain Gérard, rapporteur, a fait remarquer que les professionnels de la pêche étaient tout à fait conscients de la nécessité de préserver la ressource, mais qu'ils jugeaient la « casse des bateaux » inefficace et même dangereuse, puisqu'un de ses effets pervers est d'encourager le vieillissement de la flotte, au détriment de la sécurité, comme l'atteste le récent naufrage d'un navire de pêche.

M. Gérard Le Cam a déclaré qu'on ne pouvait que partager l'ensemble des propositions du rapporteur. Il a jugé de l'intérêt de la France de voir perdurer la pêche, surtout en Bretagne, région qu'il représentait ainsi que le rapporteur. Soulignant que la difficulté résidait dans l'équilibre à trouver entre la protection de la ressource et l'activité de pêche en vue de sa durabilité, il a suggéré que soit interdite la pêche minotière. Il s'est par ailleurs félicité des très récentes propositions du ministre de l'agriculture et de la pêche en vue d'accroître la sécurité du métier de marin-pêcheur, dont le récent accident prouve les insuffisances. Il a estimé indispensable de progresser en matière de formation, de sécurité et de conditions sociales -sujets dont il a déploré l'absence dans le Livre vert- en vue d'attirer les jeunes vers ce métier.

M. Alain Gérard a partagé ce point de vue, qu'il a jugé commun à tout breton.

La commission a ensuite adopté à l'unanimité la proposition de résolution.

Collectivités locales - Démocratie de proximité - Examen du rapport pour avis

La commission a enfin examiné le rapport pour avis de M. Patrick Lassourd sur le projet de loi n° 415 (2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la démocratie de proximité.

M. Patrick Lassourd, rapporteur pour avis, a indiqué que le projet de loi relatif à la démocratie de proximité avait pour ambition, selon ses auteurs, « d'approfondir la décentralisation dans un sens plus légitime, plus efficace et plus solidaire, en un mot plus citoyen ».

Il a précisé que la saisine pour avis de la commission des affaires économiques portait essentiellement sur le titre IV du projet de loi consacré à la participation du public à l'élaboration des grands projets et porté par le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement et, plus précisément, sur son chapitre Ier renforçant la concertation avec le public et son chapitre III modifiant les règles des procédures d'enquête publique.

Mais il a ajouté s'être également intéressé à certains des très nombreux amendements adoptés par l'Assemblée nationale en première lecture, qui, a-t-il regretté, faisaient perdre de sa cohérence au dispositif initial, celui-ci se transformant en « texte fourre-tout » portant diverses mesures relatives aux collectivités territoriales !

Désormais, a-t-il indiqué, la saisine de la commission porte également sur une partie du volet, ajouté par le Gouvernement par voie d'amendements, qui organise certains transferts de compétence aux régions.

Sur ce point, le rapporteur pour avis a dénoncé la méthode retenue qui, sous couvert d'engagements pris lors du débat sur la Corse, manquait singulièrement d'ambition et de cohérence. Ce dispositif de circonstance, parcellaire et inachevé, a-t-il regretté, ne s'inscrit pas dans une vision d'ensemble de la décentralisation et prive le Parlement, et tout particulièrement le Sénat, d'un débat attendu et nécessaire sur les moyens à mettre en oeuvre pour relancer la dynamique de la décentralisation.

Parmi les compétences transférées aux régions, le rapporteur pour avis a indiqué que l'article 43 A proposait une réforme partielle du cadre légal d'intervention économique des collectivités locales et que les articles 43 B et 43 C confiaient aux régions la gestion des ports et des infrastructures aéroportuaires, dans le cadre d'une expérimentation qui s'achèvera fin 2006.

M. Patrick Lassourd, rapporteur pour avis, a relevé que l'article 43 G, en matière d'environnement, entendait confier à la région l'élaboration des plans régionaux pour la qualité de l'air, des plans régionaux pour l'élimination des déchets industriels, des inventaires faunistiques et floristiques, ainsi que la création et la gestion des réserves naturelles.

Il a considéré que certaines dispositions allaient dans le bon sens et méritaient d'être conservées, dès lors que le mécanisme de transfert était simplifié et ne créait pas de tutelle d'une collectivité territoriale sur une autre, tout en mettant en oeuvre le principe d'un « chef de file ».

Evoquant enfin plusieurs articles additionnels, qu'il s'agisse des comités de massifs (articles 12 bis et 12 ter), des transports (articles 55 bis et 55 ter), des installations classées (articles 58 bis et 58 ter), ou encore de la mise en oeuvre de la loi « SRU » (articles 58 quater et 58 quinquies), il a indiqué que ses propositions d'amendement s'inscrivaient dans la ligne des principes traditionnellement défendus par la commission.

En ce qui concerne l'examen du titre IV du projet de loi relatif à la participation du public, le rapporteur pour avis a fait valoir que les procédures actuelles d'information et de participation du public, qu'il s'agisse de la Commission nationale du débat public mise en place par la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, ou encore du mécanisme des enquêtes publiques de la loi du 13 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques, n'atteignaient plus leur objectif.

Le public, a-t-il ajouté, a l'impression, à travers ces procédures, d'être invité à donner son avis sur un projet dont toutes les composantes, ainsi que la décision finale, sont déjà arrêtées, d'où la multiplication des contestations et des contentieux.

M. Patrick Lassourd, rapporteur pour avis, a considéré que la procédure du débat public, en amont, faute de moyens suffisants reconnus à la Commission nationale du débat public semblait, dans les faits, réservée à quelques sujets phares.

En outre, il a rappelé que les collectivités territoriales porteuses de projets, et les maîtres d'ouvrage se plaignaient de la multiplicité des contentieux et de la paralysie des procédures, tout en reconnaissant qu'il fallait désormais mettre en oeuvre des procédures de concertation plus approfondies avec le public, c'est-à-dire les citoyens de la commune, les riverains concernés, les associations d'usagers ou de protection de l'environnement, pour agir sur le niveau d'acceptabilité sociale du projet qu'ils défendaient.

Il a souligné, à ce propos, que la circulaire du 15 décembre 1992, sur les infrastructures, avait mis en place des circuits de concertation et d'information, tout au long du processus de décision puis de réalisation du projet, mais que son champ d'application restait limité.

De plus, a-t-il ajouté, la charte de la concertation rédigée par Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement en 1996, qui préconisait une plus grande participation du public, est restée lettre morte.

Outre ce diagnostic de blocage établi sur le plan interne, le rapporteur pour avis a rappelé qu'il fallait également prendre en compte les obligations de la France en ce qui concerne la transposition de la Convention d'Aarhus signée en 1998, qui traite du droit à l'information et à la participation du public au processus décisionnel et à l'accès à la justice.

Présentant les points forts du titre IV du projet de loi, M. Patrick Lassourd, rapporteur pour avis, a alors évoqué l'élargissement significatif du champ de compétences de la Commission nationale du débat public (CNDP), sa transformation en autorité administrative indépendante, l'augmentation sensible de ses moyens de fonctionnement pour garantir des règles d'indépendance satisfaisantes et, enfin, le renforcement des responsabilités des collectivités locales à travers notamment la déclaration de projet prévue à l'issue de l'enquête publique, qui leur permettait d'affirmer le caractère d'intérêt général du projet qu'elles défendent.

Le rapporteur pour avis a indiqué avoir abordé l'examen de ce titre relatif à la participation du public avec la volonté de garantir un véritable équilibre entre le souci légitime d'associer le public et de le tenir informé, et la nécessité de préserver la responsabilité de la décision qui appartient, en dernier ressort, au maître d'ouvrage ou à la collectivité publique compétente. Les amendements proposés, a-t-il ajouté, entendent également sauvegarder le caractère spécifique du débat public organisé par la CNDP, en le réservant à l'examen de projets ayant un intérêt national, et ont également pour ambition d'affirmer le caractère interministériel de la CNDP.

Il a également fait valoir la nécessité d'encadrer les différentes phases du processus de participation, afin d'éviter que des délais trop longs ou mal définis ne paralysent ce processus, retardant ainsi la prise de décision finale.

M. Patrick Lassourd, rapporteur pour avis, a enfin conclu sur la nécessité de confirmer et de renforcer la prééminence du rôle de la démocratie représentative, qui conserve toute sa légitimité, parallèlement au nécessaire développement de la démocratie participative.

La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements.

A l'article 12 ter (nouveau) du projet de loi (présidence du comité de massif), elle a adopté un amendement tendant à préciser que la coprésidence du Comité de massif est exercée par le président de la commission permanente.

A l'article 43 A (régime des aides économiques des collectivités locales), la commission a adopté un amendement prévoyant que le montant des dotations ou des souscriptions versées par une ou plusieurs régions ne pouvaient excéder 50 % du montant total du fonds d'investissement régional.

A l'article 43 B (expérimentation du transfert à la région de la gestion des ports), elle a adopté un amendement réécrivant cet article, précisant, notamment, que l'expérimentation est ouverte à toutes les collectivités territoriales et que la durée des concessions est prorogée jusqu'au 1er juin 2007.

A l'article 43 C (expérimentation du transfert aux collectivités locales de la gestion des aérodromes à vocation régionale), la commission a adopté un amendement de réécriture autorisant toutes les collectivités territoriales à participer à l'expérimentation et prorogeant des concessions arrivant à échéance pendant la durée de cette expérimentation jusqu'au 1er juin 2007.

A l'article 43 G (transfert de compétences en matière de protection de l'environnement) :

- au paragraphe I (élaboration des plans régionaux pour la qualité de l'air), elle a adopté un amendement de coordination prenant en compte l'élaboration d'un schéma de cohérence territoriale, ainsi qu'un amendement rédactionnel ;

- au paragraphe II (procédure de classement des réserves naturelles), elle a adopté six amendements tendant à maintenir le réseau des réserves naturelles nationales relevant de la responsabilité de l'Etat, et autorisant la création d'un réseau de réserves naturelles régionales relevant de la compétence du conseil régional ;

- au paragraphe III (procédure d'élaboration des inventaires du patrimoine faunistique et floristique), elle a adopté un amendement de suppression.

A l'article 48 (élargissement de la définition du principe de participation), la commission a adopté un amendement précisant que le public est associé au processus d'élaboration des projets d'aménagement.

A l'article 49 (débat public) :

- à l'article L. 121-1 du code de l'environnement (nature et missions de la Commission nationale du débat public (CNDP)), elle a adopté un amendement précisant que les projets d'aménagement ou d'équipement soumis à l'avis de la Commission nationale du débat public doivent être d'intérêt national, un amendement rédactionnel et, après les interventions de MM. Dominique Braye, Francis Grignon, Philippe Leroy, André Trillard, Patrick Lassourd et Jean-Pierre Bel, un amendement précisant que la CNDP ne se prononce pas sur le fond des projets qui lui sont soumis ;

- à l'article L. 121-3 du même code (composition de la CNDP), la commission a adopté un amendement supprimant la limite d'âge fixée à 65 ans, imposée au président et aux vice-présidents de la CNDP ;

- à l'article L. 121-6 du même code (budget de fonctionnement), elle a déposé un amendement précisant que les crédits de la CNDP sont inscrits au budget général de l'Etat sur proposition du Premier ministre ;

- elle a inséré un article additionnel L.121-6-1, instaurant le principe d'un rapport d'activité élaboré par la CNDP et transmis au Gouvernement et au Parlement ;

- à l'article L.121-7 (nouveau) du même code (modalités de saisine de la CNDP), outre trois amendements rédactionnels, elle a déposé un amendement rétablissant la saisine de la CNDP par vingt députés ou vingt sénateurs, et autorisant la également cette saisine par une commune territorialement intéressée, ainsi qu'un amendement fixant à deux mois le délai dans lequel doit intervenir la saisine de la commission ;

- à l'article L. 121-8 (nouveau) du même code (suites données à la saisine de la CNDP), la commission a adopté, outre un amendement rédactionnel et un amendement de cohérence, un amendement fixant à deux mois le délai laissé à la CNDP pour se prononcer sur l'opportunité d'un débat public ;

- à l'article L. 121-9 (nouveau) du même code (saisine de la CNDP par les ministres), elle a adopté un amendement de suppression de cet article ;

- à l'article L. 121-10 (nouveau) du même code (durée du débat public et de restitution du bilan), la commission a adopté un amendement précisant que la décision de prolonger le débat public doit être motivée par la CNDP ;

- à l'article L. 121-11 (nouveau) du même code (date d'ouverture de l'enquête publique), elle a adopté un amendement précisant les raisons pour lesquelles, au-delà d'un délai de cinq ans après la fin du débat public, la CNDP peut décider de relancer la concertation avec le public.

Elle a supprimé l'article 55 bis (nouveau) (composition du conseil d'administration de Réseau ferré de France), et l'article 55 ter (nouveau) (déclassement de lignes ou de sections de lignes ferroviaires).

A l'article 57 (article L. 11-1-1 (nouveau) du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique (procédure et portée juridique de la déclaration de projet dans le cadre d'une DUP)), la commission a adopté un amendement précisant le contenu de l'acte déclarant d'utilité publique une opération lorsque celui-ci est pris au profit de l'Etat ou de l'un de ses établissements publics.

Avant l'article 58 bis (nouveau), la commission a adopté un article additionnel précisant les conditions d'élaboration des règles générales et prescriptions techniques applicables aux installations classées.

A l'article 58 bis (nouveau) (délais de recours à l'encontre de décisions applicables aux installations classées), la commission a adopté un amendement harmonisant les délais de recours des tiers dans le cadre de la réglementation applicable aux installations classées.

A l'article 58 ter (nouveau) (protection des périmètres autour des centres de stockage de déchets), elle a adopté un amendement de précision.

A l'article 58 quater (incidence de la déclaration de projet sur les documents d'urbanisme), la commission a adopté un amendement sur la mise en conformité du schéma de cohérence territoriale, lorsque la déclaration de projet comporte des dispositions incompatibles avec ce schéma, et un amendement appliquant le même dispositif dans le cas d'un plan local d'urbanisme.

A l'issue de cet examen, et sous réserve des amendements proposés, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des articles du projet de loi relatif à la démocratie de proximité, dont elle est saisie pour avis.


Table des matières




Mercredi 19 décembre 2001

- Présidence de M. Gérard César, vice-président. -

Résolutions européennes - Livre vert sur l'avenir de la politique commune de la pêche (E-1711) - Nomination d'un rapporteur - examen du rapport

La commission a tout d'abord procédé à la nomination de M. Alain Gérard en qualité de rapporteur sur la proposition de résolution n° 97 (2001-2002) de M. Jacques Oudin sur le Livre vert sur l'avenir de la politique commune de la pêche (n° E-1711) et à l'examen de son rapport.

M. Alain Gérard, rapporteur, a rappelé que le Sénat avait été saisi, dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution, du « Livre vert » de la Commission européenne proposant des évolutions profondes de la Politique commune de la pêche (PCP) et que, le 21 novembre 2001, M. Jacques Oudin avait présenté, au nom de la Délégation pour l'Union européenne, une proposition de résolution n° 97 relative à ce Livre vert, dont la commission des affaires économiques était saisie.

M. Alain Gérard, rapporteur, a noté que le Livre vert sur l'avenir de la Politique commune de la pêche (PCP), publié par la Commission européenne le 20 mars 2001, répondait à la nécessité de réformer la PCP à l'horizon 2002. Il a estimé que la nécessité de cette réforme tenait à la fois à l'échéance du règlement de base n° 3760/92 du 20 décembre 1992 et à l'incapacité de la PCP, en sa forme actuelle, à atteindre l'objectif d'une exploitation durable des ressources. Enfin, il a jugé que les nouveaux défis que devait relever la Politique commune de la Pêche (élargissement de l'Union européenne, mondialisation, considérations environnementales...) nécessitaient également une réforme, indépendamment des faiblesses inhérentes au système.

Il a précisé que la Commission européenne avait ouvert un large débat en vue de la révision de la Politique commune de la pêche et recueillait jusqu'au 31 décembre 2001 les réactions de toutes les parties intéressées au Livre vert qu'elle avait publié.

A ce titre, il a souligné l'opportunité pour la commission de se prononcer avant cette échéance, afin que le Gouvernement connaisse la position du Sénat, en amont des négociations à venir sur les textes que la Commission européenne proposera en 2002.

Avant d'analyser le Livre vert, M. Alain Gérard, rapporteur, a tenu à revenir brièvement sur l'origine et les principes de la PCP. Relevant que la politique commune de la pêche avait été conçue comme centralisée et avait été reconnue dès 1976 par la Cour de justice des Communautés européennes comme l'une des rares compétences exclusives de la Communauté, au même titre que la politique agricole commune ou la politique commerciale, il a fait valoir qu'un élément central de la construction européenne était donc en cours de réforme.

Il a ensuite présenté les quatre volets que comprend aujourd'hui la politique commune de la pêche, dont les fondements ont été posés en 1983 :

- la conservation des ressources : rappelant que, chaque année, sont fixés des totaux admissibles de captures (TAC) pour les stocks des principales espèces et que ces TAC sont ensuite répartis en quotas nationaux en suivant le principe de la « stabilité relative », c'est-à-dire en fonction de références historiques, il a précisé que ces limitations de captures étaient complétées par des mesures techniques réglementant les engins et les méthodes de pêche ;

- les actions structurelles, qui s'appuient principalement sur les programmes d'orientation pluriannuels (POP), lesquels prévoient notamment des réductions des capacités de pêche en contrepartie d'aides financières ;

- l'organisation commune des marchés (OCM), largement inspirée de celle des fruits et légumes. M. Alain Gérard, rapporteur, a expliqué qu'elle était mise en oeuvre par des organisations nationales de producteurs (OP) et comportait principalement des normes de commercialisation et un régime commun des prix, permettant le retrait du marché d'une partie de la production lorsque les prix reviennent en deçà d'un certain seuil ;

- le volet externe, constitué par les accords de pêche négociés par la Commission afin de garantir l'accès des navires de l'Union dans les eaux des pays tiers, généralement en contrepartie de compensations financières.

M. Alain Gérard, rapporteur, a souligné que le Livre vert analysait, souvent avec lucidité, les insuffisances de la PCP et déplorait :

- les difficultés à endiguer la surpêche : M. Alain Gérard, rapporteur, a indiqué que, selon la Commission, la durabilité d'un grand nombre de stocks était menacée si l'intensité de l'exploitation se maintenait au niveau actuel, notamment celle des stocks de cabillaud et de merlu, lesquels étaient en moyenne de 90% supérieurs au début des années 1970 par rapport à la fin des années 1990. La Commission, a-t-il poursuivi, relève que les instruments actuels de la PCP (TAC, mesures techniques et gestion de la flotte) n'ont pas fait la preuve de leur efficacité et ne se sont pas suffisamment inscrits dans une stratégie environnementale ;

- les défaillances du processus décisionnel : M. Alain Gérard, rapporteur, a précisé que la commission regrettait le manque d'implication des professionnels dans ce processus et expliquait ainsi leur difficile adhésion aux décisions communautaires ;

- les insuffisances de la surveillance et du contrôle : partageant l'analyse de la Commission, M. Alain Gérard, rapporteur, a noté que le contrôle de l'application de la PCP était décentralisé, ce qui ne garantissait pas l'égalité de traitement, et que les sanctions aux infractions n'étaient pas harmonisées ;

- un résultat économique et social décevant : M. Alain Gérard, rapporteur, a évoqué le rapprochement opéré par la Commission entre le montant de fonds publics versés à la pêche européenne chaque année -1,1 milliard d'euros, consacrés à la protection tarifaire et aux investissements- et le maigre résultat de cet effort (défaut de rentabilité économique, déclin du nombre d'emplois) ;

- une articulation délicate entre la politique extérieure de la pêche et la politique de développement durable : M. Alain Gérard, rapporteur, a noté que la Commission s'inquiétait des conséquences des « accords de pêche », que la Communauté a conclus avec des pays tiers, sur les ressources halieutiques et sur le développement du potentiel de pêche local.

S'il a reconnu que la noirceur du tableau, ainsi dressé par la commission, était largement fondée, M. Alain Gérard, rapporteur, a jugé que les propositions du Livre vert pour réformer la PCP étaient loin d'être pleinement satisfaisantes.

Il a relevé d'abord deux sujets d'interrogation : d'une part, la Commission, a-t-il noté, appelle à hiérarchiser les objectifs assignés à la PCP, pour en résoudre les contradictions internes, et laisse entendre que la conservation des ressources doit l'emporter sur toute autre considération. Or, a fait valoir M. Alain Gérard, rapporteur, garantir une pêche durable devrait être l'objectif premier de la PCP, ce qui passe évidemment par la protection simultanée de la ressource. Il a souligné que la viabilité à long terme de l'activité de pêche, comme celle de la ressource, pouvaient être garanties simultanément, et non alternativement. D'autre part, il s'est interrogé sur la façon dont la Commission appréhendait la dimension environnementale. Précisant que les professionnels s'accordaient avec la Commission pour dire que la PCP devait mieux intégrer l'exigence de protection raisonnée de l'environnement, il a toutefois fait observer qu'ils étaient souvent les victimes, et non les responsables, des atteintes à l'environnement.

M. Alain Gérard, rapporteur, a ensuite affirmé que quelques pistes ouvertes par le Livre vert méritaient, quant à elles, d'être approfondies : ainsi, il a considéré le renforcement et l'amélioration de la politique de conservation de la ressource par les totaux admissibles de captures et autres mesures complémentaires  comme un moyen primordial d'accroître l'efficacité de la PCP. Il a souligné que la France s'accordait avec la Commission pour juger que le régime communautaire des TAC et quotas était un bon moyen de conservation et de gestion des ressources, de même qu'un instrument pertinent de régulation de la production et de répartition des accès, reposant sur des bases historiques objectives et simples, à condition toutefois d'être réellement respecté par tous. Il a toutefois jugé que plusieurs améliorations au système des quotas devaient être soutenues : élargissement à d'autres espèces, programmation pluriannuelle, participation des professionnels à la fixation des TAC, intensification de la recherche. Enfin, le système des quotas lui a paru devoir être complété par des mesures techniques (arrêts temporaires de pêcheries, pêche sélective...). A ce propos, M. Alain Gérard, rapporteur, a insisté sur le renforcement de la recherche : d'une part, pour autoriser un débat scientifique autour de l'évaluation des ressources et des interférences entre écosystème  et pêche, notamment minotière, c'est-à-dire destinée à la fabrication de farines de poissons ; d'autre part, pour estimer et affiner la sélectivité des engins et techniques de pêche, évoquant, à ce sujet, les filets maillants dérivants, dont l'interdiction lui semble reposer sur des fondements scientifiques très discutables.

M. Alain Gérard, rapporteur, a souhaité également qu'une deuxième orientation du Livre vert soit approfondie : l'harmonisation et le renforcement de l'efficacité de la politique de contrôle. A cette fin, il a proposé de développer le corps des inspecteurs communautaires et de lui donner les moyens de se substituer aux inspecteurs nationaux, ce qui garantirait une application équitable et uniforme des règles communautaires. Rappelant que M. Jacques Oudin proposait même la création d'une agence communautaire de contrôle, il a préféré, dans la proposition de résolution qu'il a soumise à la commission, présenter cette solution comme un dernier recours en raison du coût financier d'une telle agence.

Enfin, il a déclaré soutenir la préoccupation exprimée dans le Livre vert de mettre en place les conditions d'une meilleure qualité et d'une sécurité sanitaire pour les produits de la mer, tant dans l'organisation interne des marchés qu'à l'importation.

Toutefois, M. Alain Gérard, rapporteur, s'est dit préoccupé par plusieurs suggestions du Livre vert. La priorité que ce dernier persiste à accorder à un encadrement brutal de la flotte l'inquiète au plus haut point : en effet, a-t-il souligné, le Livre vert juge nécessaire de réduire de 40 % la capacité de la flotte, alors que ce système a fait la preuve de son inefficacité et de ses effets pervers et déstructurants. Il a estimé qu'il n'était pas concevable de centrer la PCP sur les plans d'orientation pluriannuels (POP). Outre leur extraordinaire coût administratif, et, surtout, social et humain, les POP -observe-t-il- ne semblent pas avoir d'effet direct sur l'état des stocks : il a expliqué ceci par l'absence de concordance entre les compartiments du POP (segments de flottilles) et ceux des ressources (stocks) et par une inadéquation entre les critères actuels de capacité (jauge et puissance) et la mortalité par pêche. Convaincu de la nécessité de rechercher une adéquation entre les potentialités de la ressource et l'effort de pêche déployé pour son exploitation, il a déclaré que cette adéquation pouvait être obtenue, plutôt qu'en « cassant du bateau », en améliorant et en articulant mieux les différents instruments disponibles  -contingentement des quantités, mesures techniques et contrôles- et en veillant au respect du principe de subsidiarité pour la gestion de la flotte.

En outre, M. Alain Gérard, rapporteur, a regretté que le Livre vert néglige la dimension sociale de la pêche, et notamment son rôle essentiel dans l'aménagement du territoire des Etats membres. Il a fait observer que la proposition de résolution qu'il soumettait à la commission appelait le Gouvernement à insister sur ce point à Bruxelles. Il a souhaité que la France prenne des initiatives visant à promouvoir l'amélioration des conditions de travail à la pêche et l'harmonisation de certains volets de droit du travail entre Etats membres ou à prendre en compte les spécificités de la petite pêche, laquelle anime les côtes françaises.

Enfin, M. Alain Gérard, rapporteur, a déploré que le Livre vert remette en cause, en termes voilés, la politique d'accords de pêche que mène la Communauté européenne avec les pays tiers, alors que ces accords, a-t-il souligné, représentent une opportunité importante pour les pêcheurs communautaires, et notamment français. En outre, il a relevé que ces accords contribuaient à favoriser une pêche durable et responsable, en luttant contre la pêche illégale, et représentaient un apport financier appréciable pour quelques pays peu développés, allant jusqu'à 15 % des recettes budgétaires de certains pays africains.

Au terme de ces observations sur le Livre vert et sur l'avenir de la politique commune de la pêche, il a proposé à la commission d'adopter la proposition de résolution qui lui avait été distribuée.

M. Patrick Lassourd a estimé que l'Europe semblait avoir fait le choix de soutenir la pêche portugaise et espagnole, aux dépens de la pêche française. Relevant que, par ailleurs, la production française de lait et de viande bovine bénéficiait du soutien communautaire, il s'est interrogé sur l'existence d'une politique européenne s'apparentant au « troc ».

M. Alain Gérard, rapporteur, a estimé qu'une telle crainte était légitime et a évoqué les débats qui avaient animé en ce sens la commission lors de l'examen du budget de la pêche pour 2002.

M. Gérard César, président, a fait état de la forte inquiétude des marins-pêcheurs face aux orientations du Livre vert. Il a toutefois insisté sur la réalité de l'épuisement de la ressource.

M. Alain Gérard, rapporteur, a fait remarquer que les professionnels de la pêche étaient tout à fait conscients de la nécessité de préserver la ressource, mais qu'ils jugeaient la « casse des bateaux » inefficace et même dangereuse, puisqu'un de ses effets pervers est d'encourager le vieillissement de la flotte, au détriment de la sécurité, comme l'atteste le récent naufrage d'un navire de pêche.

M. Gérard Le Cam a déclaré qu'on ne pouvait que partager l'ensemble des propositions du rapporteur. Il a jugé de l'intérêt de la France de voir perdurer la pêche, surtout en Bretagne, région qu'il représentait ainsi que le rapporteur. Soulignant que la difficulté résidait dans l'équilibre à trouver entre la protection de la ressource et l'activité de pêche en vue de sa durabilité, il a suggéré que soit interdite la pêche minotière. Il s'est par ailleurs félicité des très récentes propositions du ministre de l'agriculture et de la pêche en vue d'accroître la sécurité du métier de marin-pêcheur, dont le récent accident prouve les insuffisances. Il a estimé indispensable de progresser en matière de formation, de sécurité et de conditions sociales -sujets dont il a déploré l'absence dans le Livre vert- en vue d'attirer les jeunes vers ce métier.

M. Alain Gérard a partagé ce point de vue, qu'il a jugé commun à tout breton.

La commission a ensuite adopté à l'unanimité la proposition de résolution.

Collectivités locales - Démocratie de proximité - Examen du rapport pour avis

La commission a enfin examiné le rapport pour avis de M. Patrick Lassourd sur le projet de loi n° 415 (2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la démocratie de proximité.

M. Patrick Lassourd, rapporteur pour avis, a indiqué que le projet de loi relatif à la démocratie de proximité avait pour ambition, selon ses auteurs, « d'approfondir la décentralisation dans un sens plus légitime, plus efficace et plus solidaire, en un mot plus citoyen ».

Il a précisé que la saisine pour avis de la commission des affaires économiques portait essentiellement sur le titre IV du projet de loi consacré à la participation du public à l'élaboration des grands projets et porté par le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement et, plus précisément, sur son chapitre Ier renforçant la concertation avec le public et son chapitre III modifiant les règles des procédures d'enquête publique.

Mais il a ajouté s'être également intéressé à certains des très nombreux amendements adoptés par l'Assemblée nationale en première lecture, qui, a-t-il regretté, faisaient perdre de sa cohérence au dispositif initial, celui-ci se transformant en « texte fourre-tout » portant diverses mesures relatives aux collectivités territoriales !

Désormais, a-t-il indiqué, la saisine de la commission porte également sur une partie du volet, ajouté par le Gouvernement par voie d'amendements, qui organise certains transferts de compétence aux régions.

Sur ce point, le rapporteur pour avis a dénoncé la méthode retenue qui, sous couvert d'engagements pris lors du débat sur la Corse, manquait singulièrement d'ambition et de cohérence. Ce dispositif de circonstance, parcellaire et inachevé, a-t-il regretté, ne s'inscrit pas dans une vision d'ensemble de la décentralisation et prive le Parlement, et tout particulièrement le Sénat, d'un débat attendu et nécessaire sur les moyens à mettre en oeuvre pour relancer la dynamique de la décentralisation.

Parmi les compétences transférées aux régions, le rapporteur pour avis a indiqué que l'article 43 A proposait une réforme partielle du cadre légal d'intervention économique des collectivités locales et que les articles 43 B et 43 C confiaient aux régions la gestion des ports et des infrastructures aéroportuaires, dans le cadre d'une expérimentation qui s'achèvera fin 2006.

M. Patrick Lassourd, rapporteur pour avis, a relevé que l'article 43 G, en matière d'environnement, entendait confier à la région l'élaboration des plans régionaux pour la qualité de l'air, des plans régionaux pour l'élimination des déchets industriels, des inventaires faunistiques et floristiques, ainsi que la création et la gestion des réserves naturelles.

Il a considéré que certaines dispositions allaient dans le bon sens et méritaient d'être conservées, dès lors que le mécanisme de transfert était simplifié et ne créait pas de tutelle d'une collectivité territoriale sur une autre, tout en mettant en oeuvre le principe d'un « chef de file ».

Evoquant enfin plusieurs articles additionnels, qu'il s'agisse des comités de massifs (articles 12 bis et 12 ter), des transports (articles 55 bis et 55 ter), des installations classées (articles 58 bis et 58 ter), ou encore de la mise en oeuvre de la loi « SRU » (articles 58 quater et 58 quinquies), il a indiqué que ses propositions d'amendement s'inscrivaient dans la ligne des principes traditionnellement défendus par la commission.

En ce qui concerne l'examen du titre IV du projet de loi relatif à la participation du public, le rapporteur pour avis a fait valoir que les procédures actuelles d'information et de participation du public, qu'il s'agisse de la Commission nationale du débat public mise en place par la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, ou encore du mécanisme des enquêtes publiques de la loi du 13 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques, n'atteignaient plus leur objectif.

Le public, a-t-il ajouté, a l'impression, à travers ces procédures, d'être invité à donner son avis sur un projet dont toutes les composantes, ainsi que la décision finale, sont déjà arrêtées, d'où la multiplication des contestations et des contentieux.

M. Patrick Lassourd, rapporteur pour avis, a considéré que la procédure du débat public, en amont, faute de moyens suffisants reconnus à la Commission nationale du débat public semblait, dans les faits, réservée à quelques sujets phares.

En outre, il a rappelé que les collectivités territoriales porteuses de projets, et les maîtres d'ouvrage se plaignaient de la multiplicité des contentieux et de la paralysie des procédures, tout en reconnaissant qu'il fallait désormais mettre en oeuvre des procédures de concertation plus approfondies avec le public, c'est-à-dire les citoyens de la commune, les riverains concernés, les associations d'usagers ou de protection de l'environnement, pour agir sur le niveau d'acceptabilité sociale du projet qu'ils défendaient.

Il a souligné, à ce propos, que la circulaire du 15 décembre 1992, sur les infrastructures, avait mis en place des circuits de concertation et d'information, tout au long du processus de décision puis de réalisation du projet, mais que son champ d'application restait limité.

De plus, a-t-il ajouté, la charte de la concertation rédigée par Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement en 1996, qui préconisait une plus grande participation du public, est restée lettre morte.

Outre ce diagnostic de blocage établi sur le plan interne, le rapporteur pour avis a rappelé qu'il fallait également prendre en compte les obligations de la France en ce qui concerne la transposition de la Convention d'Aarhus signée en 1998, qui traite du droit à l'information et à la participation du public au processus décisionnel et à l'accès à la justice.

Présentant les points forts du titre IV du projet de loi, M. Patrick Lassourd, rapporteur pour avis, a alors évoqué l'élargissement significatif du champ de compétences de la Commission nationale du débat public (CNDP), sa transformation en autorité administrative indépendante, l'augmentation sensible de ses moyens de fonctionnement pour garantir des règles d'indépendance satisfaisantes et, enfin, le renforcement des responsabilités des collectivités locales à travers notamment la déclaration de projet prévue à l'issue de l'enquête publique, qui leur permettait d'affirmer le caractère d'intérêt général du projet qu'elles défendent.

Le rapporteur pour avis a indiqué avoir abordé l'examen de ce titre relatif à la participation du public avec la volonté de garantir un véritable équilibre entre le souci légitime d'associer le public et de le tenir informé, et la nécessité de préserver la responsabilité de la décision qui appartient, en dernier ressort, au maître d'ouvrage ou à la collectivité publique compétente. Les amendements proposés, a-t-il ajouté, entendent également sauvegarder le caractère spécifique du débat public organisé par la CNDP, en le réservant à l'examen de projets ayant un intérêt national, et ont également pour ambition d'affirmer le caractère interministériel de la CNDP.

Il a également fait valoir la nécessité d'encadrer les différentes phases du processus de participation, afin d'éviter que des délais trop longs ou mal définis ne paralysent ce processus, retardant ainsi la prise de décision finale.

M. Patrick Lassourd, rapporteur pour avis, a enfin conclu sur la nécessité de confirmer et de renforcer la prééminence du rôle de la démocratie représentative, qui conserve toute sa légitimité, parallèlement au nécessaire développement de la démocratie participative.

La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements.

A l'article 12 ter (nouveau) du projet de loi (présidence du comité de massif), elle a adopté un amendement tendant à préciser que la coprésidence du Comité de massif est exercée par le président de la commission permanente.

A l'article 43 A (régime des aides économiques des collectivités locales), la commission a adopté un amendement prévoyant que le montant des dotations ou des souscriptions versées par une ou plusieurs régions ne pouvaient excéder 50 % du montant total du fonds d'investissement régional.

A l'article 43 B (expérimentation du transfert à la région de la gestion des ports), elle a adopté un amendement réécrivant cet article, précisant, notamment, que l'expérimentation est ouverte à toutes les collectivités territoriales et que la durée des concessions est prorogée jusqu'au 1er juin 2007.

A l'article 43 C (expérimentation du transfert aux collectivités locales de la gestion des aérodromes à vocation régionale), la commission a adopté un amendement de réécriture autorisant toutes les collectivités territoriales à participer à l'expérimentation et prorogeant des concessions arrivant à échéance pendant la durée de cette expérimentation jusqu'au 1er juin 2007.

A l'article 43 G (transfert de compétences en matière de protection de l'environnement) :

- au paragraphe I (élaboration des plans régionaux pour la qualité de l'air), elle a adopté un amendement de coordination prenant en compte l'élaboration d'un schéma de cohérence territoriale, ainsi qu'un amendement rédactionnel ;

- au paragraphe II (procédure de classement des réserves naturelles), elle a adopté six amendements tendant à maintenir le réseau des réserves naturelles nationales relevant de la responsabilité de l'Etat, et autorisant la création d'un réseau de réserves naturelles régionales relevant de la compétence du conseil régional ;

- au paragraphe III (procédure d'élaboration des inventaires du patrimoine faunistique et floristique), elle a adopté un amendement de suppression.

A l'article 48 (élargissement de la définition du principe de participation), la commission a adopté un amendement précisant que le public est associé au processus d'élaboration des projets d'aménagement.

A l'article 49 (débat public) :

- à l'article L. 121-1 du code de l'environnement (nature et missions de la Commission nationale du débat public (CNDP)), elle a adopté un amendement précisant que les projets d'aménagement ou d'équipement soumis à l'avis de la Commission nationale du débat public doivent être d'intérêt national, un amendement rédactionnel et, après les interventions de MM. Dominique Braye, Francis Grignon, Philippe Leroy, André Trillard, Patrick Lassourd et Jean-Pierre Bel, un amendement précisant que la CNDP ne se prononce pas sur le fond des projets qui lui sont soumis ;

- à l'article L. 121-3 du même code (composition de la CNDP), la commission a adopté un amendement supprimant la limite d'âge fixée à 65 ans, imposée au président et aux vice-présidents de la CNDP ;

- à l'article L. 121-6 du même code (budget de fonctionnement), elle a déposé un amendement précisant que les crédits de la CNDP sont inscrits au budget général de l'Etat sur proposition du Premier ministre ;

- elle a inséré un article additionnel L.121-6-1, instaurant le principe d'un rapport d'activité élaboré par la CNDP et transmis au Gouvernement et au Parlement ;

- à l'article L.121-7 (nouveau) du même code (modalités de saisine de la CNDP), outre trois amendements rédactionnels, elle a déposé un amendement rétablissant la saisine de la CNDP par vingt députés ou vingt sénateurs, et autorisant la également cette saisine par une commune territorialement intéressée, ainsi qu'un amendement fixant à deux mois le délai dans lequel doit intervenir la saisine de la commission ;

- à l'article L. 121-8 (nouveau) du même code (suites données à la saisine de la CNDP), la commission a adopté, outre un amendement rédactionnel et un amendement de cohérence, un amendement fixant à deux mois le délai laissé à la CNDP pour se prononcer sur l'opportunité d'un débat public ;

- à l'article L. 121-9 (nouveau) du même code (saisine de la CNDP par les ministres), elle a adopté un amendement de suppression de cet article ;

- à l'article L. 121-10 (nouveau) du même code (durée du débat public et de restitution du bilan), la commission a adopté un amendement précisant que la décision de prolonger le débat public doit être motivée par la CNDP ;

- à l'article L. 121-11 (nouveau) du même code (date d'ouverture de l'enquête publique), elle a adopté un amendement précisant les raisons pour lesquelles, au-delà d'un délai de cinq ans après la fin du débat public, la CNDP peut décider de relancer la concertation avec le public.

Elle a supprimé l'article 55 bis (nouveau) (composition du conseil d'administration de Réseau ferré de France), et l'article 55 ter (nouveau) (déclassement de lignes ou de sections de lignes ferroviaires).

A l'article 57 (article L. 11-1-1 (nouveau) du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique (procédure et portée juridique de la déclaration de projet dans le cadre d'une DUP)), la commission a adopté un amendement précisant le contenu de l'acte déclarant d'utilité publique une opération lorsque celui-ci est pris au profit de l'Etat ou de l'un de ses établissements publics.

Avant l'article 58 bis (nouveau), la commission a adopté un article additionnel précisant les conditions d'élaboration des règles générales et prescriptions techniques applicables aux installations classées.

A l'article 58 bis (nouveau) (délais de recours à l'encontre de décisions applicables aux installations classées), la commission a adopté un amendement harmonisant les délais de recours des tiers dans le cadre de la réglementation applicable aux installations classées.

A l'article 58 ter (nouveau) (protection des périmètres autour des centres de stockage de déchets), elle a adopté un amendement de précision.

A l'article 58 quater (incidence de la déclaration de projet sur les documents d'urbanisme), la commission a adopté un amendement sur la mise en conformité du schéma de cohérence territoriale, lorsque la déclaration de projet comporte des dispositions incompatibles avec ce schéma, et un amendement appliquant le même dispositif dans le cas d'un plan local d'urbanisme.

A l'issue de cet examen, et sous réserve des amendements proposés, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des articles du projet de loi relatif à la démocratie de proximité, dont elle est saisie pour avis.