Table des matières




Mardi 12 mars 2002

- Présidence de M. Gérard Larcher, président. -

Energie - Electricité - Audition de M.Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie - programmation prévisionnelle des investissements

La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, sur le projet de programmation prévisionnelle des investissements.

Après avoir rappelé qu'en application de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, le ministre chargé de l'énergie rendait publique la programmation pluriannuelle des investissements de production d'électricité (PPI), M. Christian Pierret a indiqué que l'avant-projet de PPI, adressé au Parlement, a été élaboré par un groupe de travail composé de représentants des ministères intéressés, présidé par le commissaire au Plan, et dont le secrétariat a été assuré par la direction de la demande et des marchés énergétiques. Sur la base de nombreuses auditions, ce groupe de travail a établi un rapport dont le ministre a présenté les principales conclusions.

Il a notamment indiqué que selon les estimations de ses services, en 2010, la demande d'électricité avoisinerait, en France, 510 térawatts-heure (TWh) par an. Or, a-t-il précisé, pour favoriser la protection de l'environnement, une part importante du parc thermique existant sera déclassé, alors même que des efforts devront être poursuivis pour améliorer la sécurité de l'approvisionnement national en électricité et éviter des pénuries analogues à celle observée en Californie.

Il a estimé que le parc de production étant suffisant pour satisfaire les besoins d'électricité en base et en semi-base, les engagements de la France en matière de développement des énergies renouvelables (ENR) et de réduction des émissions atmosphériques allaient durablement orienter l'évolution de la structure de ce parc. C'est pourquoi, à l'horizon 2010, l'outil de production nucléaire demeurera « pleinement opérationnel ». Toutefois, a-t-il souligné, le maintien de l'option nucléaire sur le long terme suppose de préparer, dès à présent, le renouvellement des centrales prévu au cours des dix à quinze prochaines années. Dès lors, la décision de construire une installation-pilote sur le modèle du réacteur « EPWR » (European pressurized water reactor), à eau pressurisée, « devra être prise très prochainement », l'examen par le Parlement d'un projet de loi d'orientation sur l'énergie à la fin de l'année 2002 constituant l'occasion privilégiée d'un débat sur ce sujet.

Puis M. Christian Pierret a insisté sur la nécessité de promouvoir les ENR qui, à l'horizon 2010, devront couvrir 21 % de la consommation d'électricité française, contre 15 % actuellement, principalement grâce à l'éolien, dont la puissance installée passera de 96 MW à une fourchette de 7.000 à 14.000 Mégawatts (MW), pour une production supplémentaire estimée de 20 à 35 TWh. Il a ajouté que des études seront menées afin de déterminer comment une partie de la production éolienne pourrait être garantie, malgré les aléas climatiques et atmosphériques. La production hydroélectrique pourrait, quant à elle, augmenter, au mieux, de 8 TWh d'ici à 2010, notamment grâce au développement des microcentrales.

Par ailleurs, a souligné le ministre, des actions de maîtrise de la demande d'électricité devront être entreprises, tant pour diminuer la demande totale que pour favoriser le traitement des « pointes de consommation », auxquelles le parc thermique est essentiellement destiné. A partir de 2008, en effet, la nécessité de déclasser les équipements thermiques classiques imposera de trouver de nouvelles solutions pour satisfaire les besoins en période de pointe, ce qui rendra nécessaire d'envisager une réduction du solde exportateur pendant ces périodes ou, à défaut, de construire des capacités de production supplémentaires.

En concluant, M. Christian Pierret a enfin annoncé que sur la base des observations du Parlement et de celles émanant du Conseil supérieur de l'électricité et du gaz, il lui reviendrait d'arrêter la PPI, laquelle serait suivie, le cas échéant, par le lancement d'appels d'offres visant à susciter de nouvelles capacités de production, notamment dans le domaine de l'éolien offshore et grâce à l'utilisation du « charbon propre » en région Provence-Côte d'Azur.

Après avoir remercié le ministre, M. Gérard Larcher, président, a annoncé que la commission des affaires économiques organiserait, le 26 juin 2002, un grand colloque international sur la politique énergétique de la prochaine législature. Il a souligné, en outre, d'une part, la nécessité d'assurer la sécurité des approvisionnements en France, grâce au renouvellement du parc électro-nucléaire et, d'autre part, les difficultés tenant au financement des investissements éoliens.

En réponse, M. Christian Pierret a précisé que le nouveau réacteur « EPWR » permettrait de décupler la sûreté, de diminuer le volume des déchets et de faciliter leur évacuation, tout en assurant un taux de disponibilité des équipements de production proche de l'optimum. Le délai nécessaire pour mettre en service un tel réacteur se décompose, a-t-il ajouté, en trois phases, puisqu'il faut environ 60 mois (cinq ans) pour obtenir les autorisations administratives préalables, cinq autres années pour construire le réacteur et, au moins cinq ans pour le tester. S'agissant de la production éolienne, il a souligné que l'ambition de la France était de favoriser, de façon volontariste, l'apparition d'une industrie concurrentielle, grâce à un renforcement du parc de production qui devrait atteindre de 10 à 14.000 installations.

Après s'être interrogé sur l'opportunité de procéder au renouvellement du parc nucléaire sur d'anciens ou sur de nouveaux sites, M. Pierre Hérisson a souligné la nécessité d'éviter tout discours démagogique en ce qui concerne le développement de la production d'ENR, tout en insistant sur l'utilité du recours à des sources telles que la biomasse. Quant aux perspectives en matière d'accroissement des capacités de production hydraulique, il a évoqué les difficultés rencontrées pour construire de nouveaux barrages, du fait des résistances opposées au nom de la protection de l'environnement, et alors même que cette source de production permet de faire face aux besoins avec une grande réactivité, grâce au faible « temps d'appel » de ces installations.

En réponse, le ministre a indiqué que l'utilisation de sites existants pour le renouvellement du parc nucléaire lui apparaissait vraisemblable, même s'il considérait comme prématuré de se prononcer sur ce point. S'agissant de l'énergie éolienne, il a souligné que la forte variabilité du vent constituait un frein au développement de cette filière.

M. Hilaire Flandre s'est interrogé, à son tour, sur l'éventualité de la construction de nouvelles centrales sur des sites existants avant de juger souhaitable que les régions qui enregistrent un déficit de production acceptent de recevoir de nouvelles installations.

Après avoir rappelé le coût élevé de l'électricité d'origine éolienne, M. François Gerbaud a interrogé le ministre sur les modalités d'un accroissement de la production d'énergie hydraulique, et notamment sur l'incidence réelle, ou supposée, des « microclimats » que pourraient susciter les barrages.

M. Christian Pierret a indiqué, en réponse, que le prix de rachat de l'électricité produite par de petites installations hydrauliques était, désormais, favorable à leur développement, puisqu'il atteint 60 euros par mégawatt/heure (MWh) pour les installations dont la puissance est inférieure à 500 KW, à comparer avec un coût moyen de production d'un peu plus de 30 euros par MWh pour les installations fonctionnant au charbon ou au gaz, le pétrole étant nettement plus cher. Il a précisé que le coût final payé par les consommateurs en 2010, au titre du développement des ENR, serait majoré d'environ 5 % par rapport au tarif actuel, soit une augmentation progressive et, finalement, très modique.

A M. Jacques Bellanger, qui émettait des doutes sur l'opportunité d'établir une PPI exclusivement française, le ministre a répondu qu'il souhaitait, tout au contraire, que cette méthode soit étendue à l'Europe, sur le fondement des conclusions du Livre vert récemment élaboré par la Commission de Bruxelles, notamment afin de faire évoluer certains de nos partenaires, dont l'attitude est quelque peu pusillanime en ce qui concerne la réalisation de nouvelles installations de transport ou de production d'électricité.

Tout en exprimant des interrogations sur le devenir des énergies renouvelables, M. Bruno Sido s'est déclaré préoccupé par la perspective d'une politique française cédant à la facilité que constitue le recours au gaz et par la nécessité de prendre rapidement une décision sur le renouvellement du parc nucléaire.

M. Christian Pierret a indiqué, en réponse, que le Gouvernement n'avait jamais cédé à la facilité, pas plus qu'aux engouements ou aux modes en matière énergétique. Sa politique, a-t-il précisé, est empreinte d'équilibre, puisqu'elle prévoit à la fois de conserver le socle que constitue la production nucléaire, tout en accroissant le recours aux ENR, dans un esprit raisonnable et non polémique. Puis il a ajouté qu'il avait demandé à l'Agence nationale des fréquences de réaliser une étude sur les perturbations électromagnétiques suscitées par l'existence de fermes éoliennes.

Après avoir pris acte de ce que le concept de politique énergétique « équilibrée » reposait, selon le ministre, sur un recours important à l'énergie nucléaire, M. Gérard Larcher, président, a fait part de ses vives préoccupations quant aux conséquences environnementales et écologiques du développement des éoliennes, notamment du fait de leur incidence sur les oiseaux, et spécialement sur les oiseaux migrateurs.

Audition de M. Dominique Baert, président du Haut conseil du secteur financier public et semi-public

La commission, conjointement avec le groupe d'étude sur La Poste et les télécommunications, a ensuite procédé à l'audition de M. Dominique Baert, président du Haut conseil du secteur financier public et semi-public.

M. Dominique Baert
a présenté le rapport intitulé « Un secteur public, pour quoi faire ? » qu'a publié le Haut Conseil du secteur financier public et semi-public, à l'issue d'un travail de dix-huit mois, et qu'il a remis au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en décembre 2001.

Il a rappelé que la création du Haut Conseil du secteur public datait des lois de nationalisation de 1982, lesquelles avaient chargé le Haut Conseil de suivre les évolutions du secteur public. Évoquant la diversité des personnalités composant cette institution (six députés, quatre sénateurs, cinq représentants syndicaux, cinq personnalités qualifiées et cinq directeurs d'administration centrale), il a fait part de l'intérêt spécifique de cet organisme comme lieu de débat.

Il s'est félicité des nombreux points de convergence qu'avaient mis au jour les échanges au sein du Haut Conseil occasionnés par l'élaboration des trois rapports relatifs aux services publics en réseau, à la régulation du secteur de l'eau et, dernièrement, au secteur financier public. Il a jugé que l'institution qu'il présidait n'était pas seulement spectatrice, mais actrice, et qu'elle préparait les débats de demain.

M. Dominique Baert a rappelé que la loi sur l'épargne et la sécurité financière de juin 1999 avait ensuite créé le Haut Conseil du secteur financier public et semi-public, dont la composition reprend celle du Haut Conseil du secteur public en y ajoutant cinq personnalités qualifiées du monde bancaire et financier, et dont la mission est d'évoquer en amont les préoccupations du secteur public et financier. Le rapport récemment publié répond, a-t-il jugé, à cette mission. Après avoir souligné que les versions liminaires de ce rapport, diffusées dans la presse, n'étaient que des documents de travail internes, M. Dominique Baert est revenu sur les deux principaux sujets dont la presse s'était fait l'écho : l'avenir de l'Alliance entre la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) et les Caisses d'épargne, et celui des services financiers de La Poste.

S'agissant de l'Alliance, dénommée Eulia, M. Dominique Baert a fait observer que le Haut Conseil la considérait comme une avancée intéressante du point de vue industriel, stratégique et capitalistique : industriel, parce qu'il est légitime de rapprocher une banque d'affaires et d'investissement et un grand réseau ; stratégique, parce que les partenaires de l'Alliance se devaient de définir leur stratégie commerciale dans un contexte de restructuration bancaire ; capitalistique enfin, parce qu'un mariage entre du capital public et une structure coopérative représente une innovation prometteuse. S'il a convenu que l'Alliance était un montage financier, il a observé qu'elle était adossée à de strictes règles de gouvernance d'entreprise, fondées sur la parité des prises de décision, et qu'un tel système équilibré aurait, en l'état actuel des choses, des difficultés à intégrer éventuellement un troisième partenaire, La Poste.

Confirmant son intérêt pour la démarche de l'Alliance, il a tenu toutefois à faire part de sa réserve, convaincu que le montage demeurerait incomplet tant que n'aurait pas été traité le devenir de la Caisse nationale de prévoyance (CNP) et de La Poste. Se fondant sur les préceptes de la théorie générale des organisations, il s'est interrogé sur les scénarios possibles de cette Alliance à deux, depuis la désagrégation jusqu'à l'Alliance élargie à trois, en passant par le scénario « n° 7 » du rapport, dont il a convenu qu'il avait sa préférence : celui d'une double alliance Eulia d'un côté, CDC-La Poste de l'autre, et assortie de ponts à caractère commercial entre ces deux alliances. Il s'est donc dit confiant en la coopération entre les acteurs du monde financier public et en la pérennisation d'Eulia.

Concernant l'avenir des services financiers de La Poste, dont il a jugé qu'il était lié à celui d'Eulia, mais en était aussi, pour partie, indépendant, M. Dominique Baert a d'abord noté qu'après avoir joué un rôle fondamental pendant plus d'un siècle et demi, ces services financiers se trouvaient désormais en marge du grand mouvement de bancarisation de l'économie française qui a marqué la seconde moitié du vingtième siècle. Il a estimé que le fait de ne pas jouir d'un statut de banque de plein exercice exposait les services financiers de La Poste à un risque de dépérissement et menaçait La Poste de devenir la « banque des pauvres » et la « banque des vieux », comme l'avait déjà analysé M. Gérard Larcher, président, dans ses précédents rapports.

Estimant indispensable de mener une réflexion sur le contenu des missions de service public et d'intérêt général que les institutions publiques ont naturellement vocation à remplir, il a précisé que le Haut Conseil avait identifié, parmi ces missions, la lutte contre les exclusions financières et la satisfaction des besoins collectifs, dont l'aménagement du territoire. Il a regretté que la réalité des charges induites par l'accomplissement de ces missions, pourtant incontestable, ne soit pas reconnue comme telle et s'est dit sensible, au nom du Haut Conseil, à la solution « pay or play » préconisée par le président Gérard Larcher, qui veut que des contreparties, notamment financières, soient apportées à La Poste, dès lors qu'il est avéré qu'elle assume pleinement des missions spécifiques de service public.

M. Dominique Baert a confirmé que pour l'avenir de La Poste, il lui paraissait indispensable qu'une banque postale également puisse se structurer. Evoquant la concurrence accrue que connaîtront prochainement les activités de fret et de courrier, il s'est inquiété de ce que les activités financières sur lesquelles repose largement la densité du réseau postal ne soient pas dotées des moyens de se pérenniser. Après avoir qualifié La Poste de « colosse aux pieds d'argile », il a fait observer que ses activités financières ne pouvaient rester en l'état sans s'affaiblir dans le temps. Il a également jugé que La Poste ne pouvait pas non plus être isolée de la scène financière internationale, comme l'illustre d'ailleurs son insertion dans la Caisse Nationale de Prévoyance. Loin de présager de l'éclatement du service public postal et de la privatisation des services financiers de La Poste, l'accès de ces derniers au statut de banque de plein exercice représente, selon lui, un moyen de renforcer l'unité de l'exploitant public et de lui reconnaître des missions d'intérêt général spécifiques dans le domaine financier. Il a donc fait observer que la banque postale ne saurait être une institution banalisée, mais qu'elle devait être un outil de reconquête de la clientèle et de renforcement de l'ensemble du réseau postal, pour la satisfaction de ses missions d'intérêt général.

Pour conclure, M. Dominique Baert a fait part de sa triple conviction : que La Poste gagnerait à rechercher des stratégies de partenariat ; que les diverses voies d'un partenariat, notamment avec Eulia mais sans marginalisation de La Poste, étaient à explorer ; et enfin que les activités financières de La Poste devraient être structurées autrement, afin de lui donner les moyens de son développement.

Après avoir remercié M. Dominique Baert de sa présentation, M. Gérard Larcher, président, a rappelé que, depuis cinq ans, il évoquait également les risques pour La Poste du célibat, la question du service universel bancaire et les diverses formules d'alliance auxquelles La Poste pourrait recourir. Il a partagé la préoccupation centrale de M. Dominique Baert, estimant que la santé de ses services financiers conditionnait largement l'avenir de La Poste.

M. Pierre Hérisson, président du groupe d'étude « Poste et télécommunications », a rappelé que le Sénat réfléchissait depuis 1990 à la manière de faire évoluer La Poste et qu'en 2002, il devenait urgent d'agir. Au sujet de l'éventualité de la création d'une banque postale de plein exercice, il s'est inquiété de savoir avec quels moyens serait capitalisée une telle banque.

M. Bruno Sido a souhaité obtenir l'assurance que, pour le cas où les services financiers de La Poste accéderaient au statut de banque de plein exercice, celle-ci serait soumise aux mêmes contraintes que ses consoeurs.

En réponse, M. Dominique Baert s'est d'abord félicité de la réactivité de l'acteur postal face au développement de la concurrence, citant notamment l'amélioration de l'efficacité du processus industriel du fret postal. Au sujet des services financiers, il a insisté sur la nécessité d'examiner les modalités de compensation du surcoût assumé par l'opérateur chargé des missions de service public. Il a notamment estimé que le prochain contrat de plan de La Poste se devait de prendre cet aspect en considération. Comme M. Bruno Sido, il a estimé que la mise en place d'une banque postale asservirait nécessairement celle-ci aux ratios en vigueur dans le secteur bancaire.

Reprenant l'interrogation de M. Pierre Hérisson sur les moyens de capitaliser l'opérateur postal, il a rappelé qu'il était favorable plutôt à une double alliance qu'à une alliance élargie (à trois), mais que deux méthodes subsistaient pour faire émerger une banque postale : soit un partenariat avec la CDC, laquelle détient des fonds publics, soit un partenariat extérieur avec une banque nationale classique ou une banque étrangère, ce qui restait encore plausible dans un contexte de restructuration bancaire encore inachevée.

Mme Marie-Claude Beaudeau, membre de la commission des finances, invitée à cette audition, a fait part de sa très grande inquiétude. Rappelant que le groupe communiste de l'Assemblée nationale avait insisté, en 1999, pour que soit créé le Haut conseil du secteur financier public et semi-public, elle a demandé à M. Dominique Baert dans quelle mesure le Haut Conseil avait atteint les objectifs qui lui étaient assignés et, notamment, quels moyens il avait mobilisés pour la relance de l'économie. Abordant ensuite la question de l'Alliance-Eulia, qu'elle a qualifiée de banque privée, elle s'est interrogée sur le devenir des sommes considérables que représentent les encours des comptes chèques postaux.

M. Jean-Pierre Vial, se référant à l'audition récente du président de La Poste, M. Martin Vial, a noté qu'à l'évocation du secteur public il était souvent répondu que La Poste était désormais entrée dans une démarche concurrentielle et qu'inversement, pour légitimer les médiocres résultats de La Poste, étaient souvent invoquées les obligations de service public du groupe. Il s'est donc prononcé en faveur d'une définition précise du service public, d'une évaluation plus fine de son coût et d'une réflexion sur les acteurs susceptibles de le supporter, estimant que toutes ces précisions renforceraient le service public. Evoquant la récente interdiction des dépôts financiers des personnes privées auprès du Trésor public, il a souhaité savoir à qui avait bénéficié la réorientation de ces dépôts.

En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Dominique Baert s'est félicité de la participation active et fidèle des parlementaires communistes au sein du Haut conseil du secteur financier public et semi-public. Rappelant qu'à une phase de nationalisation du secteur bancaire dans les années 1980, avait succédé, dans la deuxième moitié des années 1990, une vague de privatisations, il a jugé légitime de s'interroger sur les missions de service public. Convenant que le travail du Haut conseil pouvait paraître académique, voire doctrinal, il s'est toutefois félicité d'avoir obtenu un certain consensus sur l'identification des missions de service public et sur l'idée que ces missions pouvaient être remplies par d'autres opérateurs que publics, dans des « conditions de clarté et de transparence absolues ». Il a insisté sur la nécessité que les autorités publiques restent vigilantes sur la mission de service public qu'ils auraient confiée aux opérateurs privés.

Revenant sur les encours des comptes chèques postaux, il a rappelé que La Poste, notamment à travers sa filiale Efiposte, les avaient placés, mais a estimé envisageable qu'elle puisse les utiliser à des fins de transformation bancaire, ce qui lui est aujourd'hui refusé, bien que les populations modestes pourraient en tirer parti.

En réponse à M. Jean-Pierre Vial, il a confirmé partager son attachement au réseau, tout en regrettant que ce dernier présente localement une offre insuffisante. Il a ainsi déploré qu'existent, localement, des exclus du service bancaire classique. Il a enfin estimé qu'il avait invité les syndicats à réfléchir sur les voies et moyens susceptibles de renforcer les services financiers de La Poste.

Groupe de réflexion sur la politique de l'eau - Désignation des commissaires

Puis la commission a désigné MM. Gérard César, Yves Detraigne, Mme Evelyne Didier, MM. Paul Raoult, Charles Revet et Daniel Soulage en qualité de commissaires appelés à participer au groupe de réflexion sur la politique de l'eau conduit par M. Bruno Sido.

Bureau de la commission - Communication

Enfin, M. Gérard Larcher, président, a brièvement présenté les principales conclusions de l'examen du rapport sur la politique de communication de la commission, qu'il avait présenté à son Bureau. Indiquant qu'un compte rendu de ces travaux serait adressé à chaque sénateur, il en a résumé les lignes directrices : création de réseaux de journalistes autour des grands secteurs suivis, mise en place d'un Club de la presse, développement de liens avec la presse régionale et la presse spécialisée, organisation de débats publics en province. Il a souligné que le Bureau de la commission avait souhaité demander les moyens de réaliser ce projet à la Présidence du Sénat. Il a conclu en estimant que si la commission voulait faire mieux connaître ses travaux, il lui fallait agir en conséquence et que si elle n'entreprenait rien, elle n'aboutirait pas.


Table des matières




Mardi 12 mars 2002

- Présidence de M. Gérard Larcher, président. -

Energie - Electricité - Audition de M.Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie - programmation prévisionnelle des investissements

La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, sur le projet de programmation prévisionnelle des investissements.

Après avoir rappelé qu'en application de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, le ministre chargé de l'énergie rendait publique la programmation pluriannuelle des investissements de production d'électricité (PPI), M. Christian Pierret a indiqué que l'avant-projet de PPI, adressé au Parlement, a été élaboré par un groupe de travail composé de représentants des ministères intéressés, présidé par le commissaire au Plan, et dont le secrétariat a été assuré par la direction de la demande et des marchés énergétiques. Sur la base de nombreuses auditions, ce groupe de travail a établi un rapport dont le ministre a présenté les principales conclusions.

Il a notamment indiqué que selon les estimations de ses services, en 2010, la demande d'électricité avoisinerait, en France, 510 térawatts-heure (TWh) par an. Or, a-t-il précisé, pour favoriser la protection de l'environnement, une part importante du parc thermique existant sera déclassé, alors même que des efforts devront être poursuivis pour améliorer la sécurité de l'approvisionnement national en électricité et éviter des pénuries analogues à celle observée en Californie.

Il a estimé que le parc de production étant suffisant pour satisfaire les besoins d'électricité en base et en semi-base, les engagements de la France en matière de développement des énergies renouvelables (ENR) et de réduction des émissions atmosphériques allaient durablement orienter l'évolution de la structure de ce parc. C'est pourquoi, à l'horizon 2010, l'outil de production nucléaire demeurera « pleinement opérationnel ». Toutefois, a-t-il souligné, le maintien de l'option nucléaire sur le long terme suppose de préparer, dès à présent, le renouvellement des centrales prévu au cours des dix à quinze prochaines années. Dès lors, la décision de construire une installation-pilote sur le modèle du réacteur « EPWR » (European pressurized water reactor), à eau pressurisée, « devra être prise très prochainement », l'examen par le Parlement d'un projet de loi d'orientation sur l'énergie à la fin de l'année 2002 constituant l'occasion privilégiée d'un débat sur ce sujet.

Puis M. Christian Pierret a insisté sur la nécessité de promouvoir les ENR qui, à l'horizon 2010, devront couvrir 21 % de la consommation d'électricité française, contre 15 % actuellement, principalement grâce à l'éolien, dont la puissance installée passera de 96 MW à une fourchette de 7.000 à 14.000 Mégawatts (MW), pour une production supplémentaire estimée de 20 à 35 TWh. Il a ajouté que des études seront menées afin de déterminer comment une partie de la production éolienne pourrait être garantie, malgré les aléas climatiques et atmosphériques. La production hydroélectrique pourrait, quant à elle, augmenter, au mieux, de 8 TWh d'ici à 2010, notamment grâce au développement des microcentrales.

Par ailleurs, a souligné le ministre, des actions de maîtrise de la demande d'électricité devront être entreprises, tant pour diminuer la demande totale que pour favoriser le traitement des « pointes de consommation », auxquelles le parc thermique est essentiellement destiné. A partir de 2008, en effet, la nécessité de déclasser les équipements thermiques classiques imposera de trouver de nouvelles solutions pour satisfaire les besoins en période de pointe, ce qui rendra nécessaire d'envisager une réduction du solde exportateur pendant ces périodes ou, à défaut, de construire des capacités de production supplémentaires.

En concluant, M. Christian Pierret a enfin annoncé que sur la base des observations du Parlement et de celles émanant du Conseil supérieur de l'électricité et du gaz, il lui reviendrait d'arrêter la PPI, laquelle serait suivie, le cas échéant, par le lancement d'appels d'offres visant à susciter de nouvelles capacités de production, notamment dans le domaine de l'éolien offshore et grâce à l'utilisation du « charbon propre » en région Provence-Côte d'Azur.

Après avoir remercié le ministre, M. Gérard Larcher, président, a annoncé que la commission des affaires économiques organiserait, le 26 juin 2002, un grand colloque international sur la politique énergétique de la prochaine législature. Il a souligné, en outre, d'une part, la nécessité d'assurer la sécurité des approvisionnements en France, grâce au renouvellement du parc électro-nucléaire et, d'autre part, les difficultés tenant au financement des investissements éoliens.

En réponse, M. Christian Pierret a précisé que le nouveau réacteur « EPWR » permettrait de décupler la sûreté, de diminuer le volume des déchets et de faciliter leur évacuation, tout en assurant un taux de disponibilité des équipements de production proche de l'optimum. Le délai nécessaire pour mettre en service un tel réacteur se décompose, a-t-il ajouté, en trois phases, puisqu'il faut environ 60 mois (cinq ans) pour obtenir les autorisations administratives préalables, cinq autres années pour construire le réacteur et, au moins cinq ans pour le tester. S'agissant de la production éolienne, il a souligné que l'ambition de la France était de favoriser, de façon volontariste, l'apparition d'une industrie concurrentielle, grâce à un renforcement du parc de production qui devrait atteindre de 10 à 14.000 installations.

Après s'être interrogé sur l'opportunité de procéder au renouvellement du parc nucléaire sur d'anciens ou sur de nouveaux sites, M. Pierre Hérisson a souligné la nécessité d'éviter tout discours démagogique en ce qui concerne le développement de la production d'ENR, tout en insistant sur l'utilité du recours à des sources telles que la biomasse. Quant aux perspectives en matière d'accroissement des capacités de production hydraulique, il a évoqué les difficultés rencontrées pour construire de nouveaux barrages, du fait des résistances opposées au nom de la protection de l'environnement, et alors même que cette source de production permet de faire face aux besoins avec une grande réactivité, grâce au faible « temps d'appel » de ces installations.

En réponse, le ministre a indiqué que l'utilisation de sites existants pour le renouvellement du parc nucléaire lui apparaissait vraisemblable, même s'il considérait comme prématuré de se prononcer sur ce point. S'agissant de l'énergie éolienne, il a souligné que la forte variabilité du vent constituait un frein au développement de cette filière.

M. Hilaire Flandre s'est interrogé, à son tour, sur l'éventualité de la construction de nouvelles centrales sur des sites existants avant de juger souhaitable que les régions qui enregistrent un déficit de production acceptent de recevoir de nouvelles installations.

Après avoir rappelé le coût élevé de l'électricité d'origine éolienne, M. François Gerbaud a interrogé le ministre sur les modalités d'un accroissement de la production d'énergie hydraulique, et notamment sur l'incidence réelle, ou supposée, des « microclimats » que pourraient susciter les barrages.

M. Christian Pierret a indiqué, en réponse, que le prix de rachat de l'électricité produite par de petites installations hydrauliques était, désormais, favorable à leur développement, puisqu'il atteint 60 euros par mégawatt/heure (MWh) pour les installations dont la puissance est inférieure à 500 KW, à comparer avec un coût moyen de production d'un peu plus de 30 euros par MWh pour les installations fonctionnant au charbon ou au gaz, le pétrole étant nettement plus cher. Il a précisé que le coût final payé par les consommateurs en 2010, au titre du développement des ENR, serait majoré d'environ 5 % par rapport au tarif actuel, soit une augmentation progressive et, finalement, très modique.

A M. Jacques Bellanger, qui émettait des doutes sur l'opportunité d'établir une PPI exclusivement française, le ministre a répondu qu'il souhaitait, tout au contraire, que cette méthode soit étendue à l'Europe, sur le fondement des conclusions du Livre vert récemment élaboré par la Commission de Bruxelles, notamment afin de faire évoluer certains de nos partenaires, dont l'attitude est quelque peu pusillanime en ce qui concerne la réalisation de nouvelles installations de transport ou de production d'électricité.

Tout en exprimant des interrogations sur le devenir des énergies renouvelables, M. Bruno Sido s'est déclaré préoccupé par la perspective d'une politique française cédant à la facilité que constitue le recours au gaz et par la nécessité de prendre rapidement une décision sur le renouvellement du parc nucléaire.

M. Christian Pierret a indiqué, en réponse, que le Gouvernement n'avait jamais cédé à la facilité, pas plus qu'aux engouements ou aux modes en matière énergétique. Sa politique, a-t-il précisé, est empreinte d'équilibre, puisqu'elle prévoit à la fois de conserver le socle que constitue la production nucléaire, tout en accroissant le recours aux ENR, dans un esprit raisonnable et non polémique. Puis il a ajouté qu'il avait demandé à l'Agence nationale des fréquences de réaliser une étude sur les perturbations électromagnétiques suscitées par l'existence de fermes éoliennes.

Après avoir pris acte de ce que le concept de politique énergétique « équilibrée » reposait, selon le ministre, sur un recours important à l'énergie nucléaire, M. Gérard Larcher, président, a fait part de ses vives préoccupations quant aux conséquences environnementales et écologiques du développement des éoliennes, notamment du fait de leur incidence sur les oiseaux, et spécialement sur les oiseaux migrateurs.

Audition de M. Dominique Baert, président du Haut conseil du secteur financier public et semi-public

La commission, conjointement avec le groupe d'étude sur La Poste et les télécommunications, a ensuite procédé à l'audition de M. Dominique Baert, président du Haut conseil du secteur financier public et semi-public.

M. Dominique Baert
a présenté le rapport intitulé « Un secteur public, pour quoi faire ? » qu'a publié le Haut Conseil du secteur financier public et semi-public, à l'issue d'un travail de dix-huit mois, et qu'il a remis au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en décembre 2001.

Il a rappelé que la création du Haut Conseil du secteur public datait des lois de nationalisation de 1982, lesquelles avaient chargé le Haut Conseil de suivre les évolutions du secteur public. Évoquant la diversité des personnalités composant cette institution (six députés, quatre sénateurs, cinq représentants syndicaux, cinq personnalités qualifiées et cinq directeurs d'administration centrale), il a fait part de l'intérêt spécifique de cet organisme comme lieu de débat.

Il s'est félicité des nombreux points de convergence qu'avaient mis au jour les échanges au sein du Haut Conseil occasionnés par l'élaboration des trois rapports relatifs aux services publics en réseau, à la régulation du secteur de l'eau et, dernièrement, au secteur financier public. Il a jugé que l'institution qu'il présidait n'était pas seulement spectatrice, mais actrice, et qu'elle préparait les débats de demain.

M. Dominique Baert a rappelé que la loi sur l'épargne et la sécurité financière de juin 1999 avait ensuite créé le Haut Conseil du secteur financier public et semi-public, dont la composition reprend celle du Haut Conseil du secteur public en y ajoutant cinq personnalités qualifiées du monde bancaire et financier, et dont la mission est d'évoquer en amont les préoccupations du secteur public et financier. Le rapport récemment publié répond, a-t-il jugé, à cette mission. Après avoir souligné que les versions liminaires de ce rapport, diffusées dans la presse, n'étaient que des documents de travail internes, M. Dominique Baert est revenu sur les deux principaux sujets dont la presse s'était fait l'écho : l'avenir de l'Alliance entre la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) et les Caisses d'épargne, et celui des services financiers de La Poste.

S'agissant de l'Alliance, dénommée Eulia, M. Dominique Baert a fait observer que le Haut Conseil la considérait comme une avancée intéressante du point de vue industriel, stratégique et capitalistique : industriel, parce qu'il est légitime de rapprocher une banque d'affaires et d'investissement et un grand réseau ; stratégique, parce que les partenaires de l'Alliance se devaient de définir leur stratégie commerciale dans un contexte de restructuration bancaire ; capitalistique enfin, parce qu'un mariage entre du capital public et une structure coopérative représente une innovation prometteuse. S'il a convenu que l'Alliance était un montage financier, il a observé qu'elle était adossée à de strictes règles de gouvernance d'entreprise, fondées sur la parité des prises de décision, et qu'un tel système équilibré aurait, en l'état actuel des choses, des difficultés à intégrer éventuellement un troisième partenaire, La Poste.

Confirmant son intérêt pour la démarche de l'Alliance, il a tenu toutefois à faire part de sa réserve, convaincu que le montage demeurerait incomplet tant que n'aurait pas été traité le devenir de la Caisse nationale de prévoyance (CNP) et de La Poste. Se fondant sur les préceptes de la théorie générale des organisations, il s'est interrogé sur les scénarios possibles de cette Alliance à deux, depuis la désagrégation jusqu'à l'Alliance élargie à trois, en passant par le scénario « n° 7 » du rapport, dont il a convenu qu'il avait sa préférence : celui d'une double alliance Eulia d'un côté, CDC-La Poste de l'autre, et assortie de ponts à caractère commercial entre ces deux alliances. Il s'est donc dit confiant en la coopération entre les acteurs du monde financier public et en la pérennisation d'Eulia.

Concernant l'avenir des services financiers de La Poste, dont il a jugé qu'il était lié à celui d'Eulia, mais en était aussi, pour partie, indépendant, M. Dominique Baert a d'abord noté qu'après avoir joué un rôle fondamental pendant plus d'un siècle et demi, ces services financiers se trouvaient désormais en marge du grand mouvement de bancarisation de l'économie française qui a marqué la seconde moitié du vingtième siècle. Il a estimé que le fait de ne pas jouir d'un statut de banque de plein exercice exposait les services financiers de La Poste à un risque de dépérissement et menaçait La Poste de devenir la « banque des pauvres » et la « banque des vieux », comme l'avait déjà analysé M. Gérard Larcher, président, dans ses précédents rapports.

Estimant indispensable de mener une réflexion sur le contenu des missions de service public et d'intérêt général que les institutions publiques ont naturellement vocation à remplir, il a précisé que le Haut Conseil avait identifié, parmi ces missions, la lutte contre les exclusions financières et la satisfaction des besoins collectifs, dont l'aménagement du territoire. Il a regretté que la réalité des charges induites par l'accomplissement de ces missions, pourtant incontestable, ne soit pas reconnue comme telle et s'est dit sensible, au nom du Haut Conseil, à la solution « pay or play » préconisée par le président Gérard Larcher, qui veut que des contreparties, notamment financières, soient apportées à La Poste, dès lors qu'il est avéré qu'elle assume pleinement des missions spécifiques de service public.

M. Dominique Baert a confirmé que pour l'avenir de La Poste, il lui paraissait indispensable qu'une banque postale également puisse se structurer. Evoquant la concurrence accrue que connaîtront prochainement les activités de fret et de courrier, il s'est inquiété de ce que les activités financières sur lesquelles repose largement la densité du réseau postal ne soient pas dotées des moyens de se pérenniser. Après avoir qualifié La Poste de « colosse aux pieds d'argile », il a fait observer que ses activités financières ne pouvaient rester en l'état sans s'affaiblir dans le temps. Il a également jugé que La Poste ne pouvait pas non plus être isolée de la scène financière internationale, comme l'illustre d'ailleurs son insertion dans la Caisse Nationale de Prévoyance. Loin de présager de l'éclatement du service public postal et de la privatisation des services financiers de La Poste, l'accès de ces derniers au statut de banque de plein exercice représente, selon lui, un moyen de renforcer l'unité de l'exploitant public et de lui reconnaître des missions d'intérêt général spécifiques dans le domaine financier. Il a donc fait observer que la banque postale ne saurait être une institution banalisée, mais qu'elle devait être un outil de reconquête de la clientèle et de renforcement de l'ensemble du réseau postal, pour la satisfaction de ses missions d'intérêt général.

Pour conclure, M. Dominique Baert a fait part de sa triple conviction : que La Poste gagnerait à rechercher des stratégies de partenariat ; que les diverses voies d'un partenariat, notamment avec Eulia mais sans marginalisation de La Poste, étaient à explorer ; et enfin que les activités financières de La Poste devraient être structurées autrement, afin de lui donner les moyens de son développement.

Après avoir remercié M. Dominique Baert de sa présentation, M. Gérard Larcher, président, a rappelé que, depuis cinq ans, il évoquait également les risques pour La Poste du célibat, la question du service universel bancaire et les diverses formules d'alliance auxquelles La Poste pourrait recourir. Il a partagé la préoccupation centrale de M. Dominique Baert, estimant que la santé de ses services financiers conditionnait largement l'avenir de La Poste.

M. Pierre Hérisson, président du groupe d'étude « Poste et télécommunications », a rappelé que le Sénat réfléchissait depuis 1990 à la manière de faire évoluer La Poste et qu'en 2002, il devenait urgent d'agir. Au sujet de l'éventualité de la création d'une banque postale de plein exercice, il s'est inquiété de savoir avec quels moyens serait capitalisée une telle banque.

M. Bruno Sido a souhaité obtenir l'assurance que, pour le cas où les services financiers de La Poste accéderaient au statut de banque de plein exercice, celle-ci serait soumise aux mêmes contraintes que ses consoeurs.

En réponse, M. Dominique Baert s'est d'abord félicité de la réactivité de l'acteur postal face au développement de la concurrence, citant notamment l'amélioration de l'efficacité du processus industriel du fret postal. Au sujet des services financiers, il a insisté sur la nécessité d'examiner les modalités de compensation du surcoût assumé par l'opérateur chargé des missions de service public. Il a notamment estimé que le prochain contrat de plan de La Poste se devait de prendre cet aspect en considération. Comme M. Bruno Sido, il a estimé que la mise en place d'une banque postale asservirait nécessairement celle-ci aux ratios en vigueur dans le secteur bancaire.

Reprenant l'interrogation de M. Pierre Hérisson sur les moyens de capitaliser l'opérateur postal, il a rappelé qu'il était favorable plutôt à une double alliance qu'à une alliance élargie (à trois), mais que deux méthodes subsistaient pour faire émerger une banque postale : soit un partenariat avec la CDC, laquelle détient des fonds publics, soit un partenariat extérieur avec une banque nationale classique ou une banque étrangère, ce qui restait encore plausible dans un contexte de restructuration bancaire encore inachevée.

Mme Marie-Claude Beaudeau, membre de la commission des finances, invitée à cette audition, a fait part de sa très grande inquiétude. Rappelant que le groupe communiste de l'Assemblée nationale avait insisté, en 1999, pour que soit créé le Haut conseil du secteur financier public et semi-public, elle a demandé à M. Dominique Baert dans quelle mesure le Haut Conseil avait atteint les objectifs qui lui étaient assignés et, notamment, quels moyens il avait mobilisés pour la relance de l'économie. Abordant ensuite la question de l'Alliance-Eulia, qu'elle a qualifiée de banque privée, elle s'est interrogée sur le devenir des sommes considérables que représentent les encours des comptes chèques postaux.

M. Jean-Pierre Vial, se référant à l'audition récente du président de La Poste, M. Martin Vial, a noté qu'à l'évocation du secteur public il était souvent répondu que La Poste était désormais entrée dans une démarche concurrentielle et qu'inversement, pour légitimer les médiocres résultats de La Poste, étaient souvent invoquées les obligations de service public du groupe. Il s'est donc prononcé en faveur d'une définition précise du service public, d'une évaluation plus fine de son coût et d'une réflexion sur les acteurs susceptibles de le supporter, estimant que toutes ces précisions renforceraient le service public. Evoquant la récente interdiction des dépôts financiers des personnes privées auprès du Trésor public, il a souhaité savoir à qui avait bénéficié la réorientation de ces dépôts.

En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Dominique Baert s'est félicité de la participation active et fidèle des parlementaires communistes au sein du Haut conseil du secteur financier public et semi-public. Rappelant qu'à une phase de nationalisation du secteur bancaire dans les années 1980, avait succédé, dans la deuxième moitié des années 1990, une vague de privatisations, il a jugé légitime de s'interroger sur les missions de service public. Convenant que le travail du Haut conseil pouvait paraître académique, voire doctrinal, il s'est toutefois félicité d'avoir obtenu un certain consensus sur l'identification des missions de service public et sur l'idée que ces missions pouvaient être remplies par d'autres opérateurs que publics, dans des « conditions de clarté et de transparence absolues ». Il a insisté sur la nécessité que les autorités publiques restent vigilantes sur la mission de service public qu'ils auraient confiée aux opérateurs privés.

Revenant sur les encours des comptes chèques postaux, il a rappelé que La Poste, notamment à travers sa filiale Efiposte, les avaient placés, mais a estimé envisageable qu'elle puisse les utiliser à des fins de transformation bancaire, ce qui lui est aujourd'hui refusé, bien que les populations modestes pourraient en tirer parti.

En réponse à M. Jean-Pierre Vial, il a confirmé partager son attachement au réseau, tout en regrettant que ce dernier présente localement une offre insuffisante. Il a ainsi déploré qu'existent, localement, des exclus du service bancaire classique. Il a enfin estimé qu'il avait invité les syndicats à réfléchir sur les voies et moyens susceptibles de renforcer les services financiers de La Poste.

Groupe de réflexion sur la politique de l'eau - Désignation des commissaires

Puis la commission a désigné MM. Gérard César, Yves Detraigne, Mme Evelyne Didier, MM. Paul Raoult, Charles Revet et Daniel Soulage en qualité de commissaires appelés à participer au groupe de réflexion sur la politique de l'eau conduit par M. Bruno Sido.

Bureau de la commission - Communication

Enfin, M. Gérard Larcher, président, a brièvement présenté les principales conclusions de l'examen du rapport sur la politique de communication de la commission, qu'il avait présenté à son Bureau. Indiquant qu'un compte rendu de ces travaux serait adressé à chaque sénateur, il en a résumé les lignes directrices : création de réseaux de journalistes autour des grands secteurs suivis, mise en place d'un Club de la presse, développement de liens avec la presse régionale et la presse spécialisée, organisation de débats publics en province. Il a souligné que le Bureau de la commission avait souhaité demander les moyens de réaliser ce projet à la Présidence du Sénat. Il a conclu en estimant que si la commission voulait faire mieux connaître ses travaux, il lui fallait agir en conséquence et que si elle n'entreprenait rien, elle n'aboutirait pas.