Table des matières




Mercredi 22 mai 2002

- Présidence de M. Gérard Larcher, président. -

Audition de M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville auprès du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité

La commission a procédé à l'audition de M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville auprès du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

Après avoir salué, en la personne du ministre, le premier des membres du nouveau gouvernement entendu par une commission parlementaire, M. Gérard Larcher, président, a précisé que cette audition s'inscrivait dans le cadre de la réflexion sur les zones franches urbaines (ZFU) menée par un groupe de travail de la commission, dont le rapporteur est M. Pierre André, et rappelé l'accueil cordial et très fructueux qu'avait réservé en 1996 M. Jean-Louis Borloo, en tant que maire de Valenciennes, à une délégation de la commission qui travaillait sur le Pacte de relance de la ville.

A titre d'observations liminaires, M. Jean-Louis Borloo a estimé, d'une part, que l'efficacité de la politique de la ville dépendait plus d'une réflexion sur la méthode que de questions budgétaires, les financements disponibles étant de son point de vue satisfaisants, et, d'autre part, que la réussite de cette politique, qu'il a qualifiée de « Nouvelle bataille de France », était un objectif crucial pour la République compte tenu de ses implications sur le lien social, du nombre des personnes (plus de 6,5 millions) et des associations (15.500 environ) concernées, et des conséquences politiques d'un éventuel échec pour la République elle-même.

Pour M. Jean-Louis Borloo, les quatre volets essentiels d'une politique de la ville sont :

- la recherche de l'équité dans la protection des populations, qui obligera la République à redéployer ses forces de sécurité au profit des quartiers concernés ou à augmenter ses capacités bien au-delà même de ce qu'avait prévu le Pacte de relance de la ville ;

- la coordination immédiate des partenaires pour repenser l'habitat et l'urbanisation, le ministre insistant notamment sur l'implication des pouvoirs publics, en particulier locaux, sur la nécessaire fermeté de ceux-ci à l'égard de ceux des bailleurs privés dont la gestion des sites est, parfois, scandaleusement destructrice (au besoin en disposant d'un outil législatif nouveau), et sur la rénovation de la culture des administrations de l'Etat en matière de politique urbaine, qui doit en particulier davantage se préoccuper de la gestion des sous-sols (assainissement, passage des fluides, ...), de l'environnement et du cadre de vie, une logique de village devant se substituer à la « verticalité » du bâti, peu adaptée aux territoires difficiles ;

- la réduction des disparités dans les capacités d'intervention des communes et la réappropriation de la problématique de la ville par le pouvoir démocratique local, en particulier par une réflexion sur les critères d'attribution de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et sur la logique de la péréquation opérée par la dotation de solidarité urbaine (DSU), ainsi que par la mise à disposition des communes de moyens en ingénierie, M. Jean-Louis Borloo s'engageant, à cet égard, à soutenir toute initiative susceptible d'y contribuer ;

- le développement économique des sites relevant de la politique de la ville grâce aux différents dispositifs possibles, à commencer par les zones franches urbaines (ZFU). A ce sujet, considérant qu'en raison de la date à laquelle il a été fait le rapport de l'inspection générale de l'administration (IGAS), déposé en 1998, n'était plus pertinent, M. Jean-Louis Borloo a précisé que le rapport présenté la même année par l'Inspection générale des finances était plus ouvert et il a préconisé une nouvelle analyse quantitative et qualitative des effets des ZFU, notamment afin de comprendre leurs disparités.

Il s'est déclaré convaincu de la nécessité de renouveler des dispositifs d'aides de cette nature, de sensibiliser les entreprises pour cibler les recrutements sur les habitants des quartiers concernés, d'encourager, d'encadrer et de développer l'économie solidaire, de soutenir également dans ces sites le développement de pépinières dans le domaine des nouvelles technologies, et enfin de promouvoir des mesures d'accompagnement par les collectivités publiques de tous niveaux.

Concluant, M. Jean-Louis Borloo a indiqué se préoccuper de la position de son département ministériel au sein du dispositif gouvernemental et avoir invité à déjeuner ses prédécesseurs qui se sont heurtés à ce problème crucial, ceux-ci ayant accepté bien volontiers.

Observant que l'importance de la politique de la ville se mesurait au fait qu'elle concerne plus de 75 % de la population et pas seulement les quartiers dits sensibles, M. Pierre André, rapporteur, en a voulu pour preuve les résultats obtenus par les communes en difficulté (Valenciennes et Saint-Quentin) qui ont été transformées à force de volonté politique. A cet égard, estimant que le problème politique majeur était la part de responsabilité et les moyens d'intervention accordés aux maires, qui lui paraissent être les mieux au fait des problèmes que rencontrent les citoyens et des moyens propres à les résoudre, il s'est élevé contre les Contrats de ville, qu'il a considérés comme une façon, pour l'Etat, de faire financer par les communes ce qu'il ne veut pas assumer et dont il a contesté les prétendus « effets de levier » pour les communes les plus pauvres. Il a dénoncé la multiplication des intervenants, qui accroît inutilement les coûts et dilue les responsabilités, et a enfin réclamé une vigoureuse simplification des procédures afin de renforcer la lisibilité de la politique de la ville.

Considérant que cette politique ne saurait être réduite à son contenu social et que, seule, la mixité économique permettrait la mixité sociale, M. Pierre André, rapporteur, a insisté sur l'importance du développement économique et rappelé combien la politique des ZFU avait été exemplaire en la matière, par sa simplicité, sa rapidité et son efficacité indiscutable en termes d'emplois créés. A cet égard, il a demandé à M. Jean-Louis Borloo selon quel calendrier la promesse faite pendant la campagne électorale par le Président Chirac de remettre en place les ZFU serait tenue. Observant ensuite que les travaux menés et les personnes rencontrées dans le cadre de la préparation de son rapport contredisaient les conclusions négatives des rapports gouvernementaux quant à l'efficacité et à l'intérêt présentés par les ZFU, y compris en ce qui concerne leurs coûts, M. Pierre André, rapporteur, a demandé au ministre de lui fournir le rapport de l'IGAS, les statistiques de l'évolution de la délinquance et du redéploiement des effectifs de police dans les ZFU, ainsi que le bilan des moyens mis en oeuvre par la délégation interministérielle à la ville pour suivre le dossier des ZFU.

Estimant urgent d'ébaucher des orientations compte tenu de la gravité des problèmes, M. Pierre Hérisson a interrogé M. Jean-Louis Borloo sur les perspectives de modifications de la loi SRU, dont la mise en oeuvre semble rencontrer de nombreuses difficultés, et sur sa position à l'égard des zones frontalières qui, en raison de l'arrivée massive de populations étrangères, connaissent des difficultés particulières pour satisfaire aux besoins comme aux obligations légales en matière de logement social, compte tenu du coût tant du foncier que de la construction.

Après avoir félicité le ministre pour sa détermination, manifestée notamment par le recours à l'image forte de la « Nouvelle bataille de France », et estimé que certains bailleurs étaient parvenus à des réalisations remarquables grâce au soutien et à l'implication des élus locaux, M. Ladislas Poniatowski s'est demandé comment le ministère de la ville pouvait pleinement assurer sa mission si le logement ne relevait pas de sa compétence. Il a invité M. Jean-Louis Borloo à revendiquer la responsabilité de ce secteur.

Approuvant les interventions de ses collègues, M. Jean-Paul Émin a souhaité que M. Jean-Louis Borloo indique comment il entendait renforcer le rôle des élus pour favoriser la politique de la ville.

S'agissant de la place et de l'action de son ministère au sein de l'équipe gouvernementale, M. Jean-Louis Borloo a estimé que s'il n'y avait pas de réelles difficultés budgétaires, le système et les procédures étaient « à bout de souffle », l'interministérialité supposant un poids suffisant pour être efficace.

Quant aux rapports entre son département ministériel et les collectivités locales, M. Jean-Louis Borloo s'est engagé à travailler avec ses collègues Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales, et Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, pour remettre les élus au premier plan, estimant au passage nécessaire d'envisager une véritable révolution de la politique fiscale locale et reconnaissant que la participation de tous les acteurs à toutes les réunions et opérations n'était pas toujours indispensable en termes d'efficacité.

En ce qui concerne les ZFU, M. Jean-Louis Borloo s'est déclaré favorable à une relance des projets, qui ne s'effectue pas « à l'aveugle ». Il a annoncé que deux réunions interministérielles successives se tiendraient d'ici à dix jours et que le Premier ministre rendrait alors des arbitrages. En tout état de cause, une analyse quantitative et qualitative sera entreprise dans les deux mois, et elle portera sur toutes les questions utiles, y compris par conséquent sur le bilan des moyens mis en place par la DIV et sur l'efficacité globale et sectorielle des ZFU. A cet égard, M. Jean-Louis Borloo s'est déclaré très intéressé par l'aide que pourrait lui apporter la commission des affaires économiques du Sénat au travers du rapport d'information de M. Pierre André.

Enfin, M. Jean-Louis Borloo a indiqué qu'il se pencherait sur les problèmes spécifiques des zones frontalières, dont il ne connaissait pas l'acuité.

S'appuyant sur les difficultés rencontrées en tant que président de la Communauté d'agglomération de Mantes en Yvelines, M. Dominique Braye a souhaité que la politique de la ville se caractérise désormais par une plus grande confiance accordée aux élus, qui doivent disposer de réels moyens, notamment vis-à-vis des associations, par davantage de lisibilité et de simplicité, en particulier sur les fonds disponibles, sur leurs critères d'attribution et sur la possibilité de mobiliser des financements pluriannuels, par une réelle prime à l'action des collectivités qui ne doivent pas être pénalisées par une diminution des abondements de droit commun sous prétexte qu'elles disposent de fonds « politique de la ville », et enfin par une correcte évaluation des résultats de nature à récompenser les collectivités qui s'impliquent et qui savent utiliser les fonds disponibles.

Après avoir salué la nomination d'un praticien ayant réussi en tant que maire, M. Daniel Raoul a, tout comme le précédent orateur, estimé que le rattachement du logement au ministère de la ville était un enjeu majeur, dans la mesure où le ministère de l'équipement ne savait pas intégrer l'économique et le social à sa politique urbaine. En revanche, s'agissant du débat « verticalité/horizontalité », il a souhaité éviter tout dogmatisme en rappelant la nécessité, pour la préservation de l'espace rural, d'un équilibre entre la densification urbaine et le maintien d'exploitations agricoles encore actives. Enfin, il a demandé si la DSU devait concerner les villes ou les intercommunalités, observant au passage que le niveau de 6 % était bien faible par rapport aux objectifs.

Portant pour sa part un regard positif sur la ville, M. Christian Gaudin a insisté sur la nécessité de lier politique de la ville et aménagement du territoire en tenant compte de l'environnement, et d'éviter la sectorisation en mettant en relation tous les acteurs.

Enfin, M. Gérard Larcher, président, a demandé à M. Jean-Louis Borloo des précisions sur sa récente proposition d'instituer un service d'aide aux victimes fonctionnant de manière analogue au SAMU.

En réponse, M. Jean-Louis Borloo a :

- observé que la mutualisation des crédits provenant de différents ministères était d'ores et déjà possible mais qu'elle n'était pas mise en oeuvre, faute d'une réelle volonté des départements ministériels concernés ;

- estimé que si l'objectif général de la loi SRU était, de son point de vue, légitime, plusieurs modalités d'application n'étaient pas pertinentes et pouvaient conduire à des effets pervers ou dépressifs, notamment sur l'habitat social des communes avoisinant une ville attractive assumant ses obligations légales ;

- considéré qu'au-delà du débat « horizontalité/verticalité », l'essentiel était la réappropriation de la rue et de l'espace urbain par leurs habitants grâce à une politique de l'habitat menée par les maires et la suppression des blocages techniques, ce qui pouvait se faire dans 80 % des cas sans opposer développement urbain et ruralité sur le problème du foncier ;

- reconnu que les problèmes de DGF, de DSU et d'intercommunalité devaient être réexaminés de manière à permettre aux collectivités qui le souhaitent de disposer des moyens indispensables à leur politique, de même que les définitions et zonages réalisés par l'INSEE pouvaient être affinés ;

- précisé que le service d'aide aux victimes, qui n'est pas spécifique à la politique de la ville, était une expérience menée dans cinq ou six communes pour apporter aux victimes de tous délits l'aide d'un juriste et d'un psychologue.


Table des matières




Mercredi 22 mai 2002

- Présidence de M. Gérard Larcher, président. -

Audition de M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville auprès du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité

La commission a procédé à l'audition de M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville auprès du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

Après avoir salué, en la personne du ministre, le premier des membres du nouveau gouvernement entendu par une commission parlementaire, M. Gérard Larcher, président, a précisé que cette audition s'inscrivait dans le cadre de la réflexion sur les zones franches urbaines (ZFU) menée par un groupe de travail de la commission, dont le rapporteur est M. Pierre André, et rappelé l'accueil cordial et très fructueux qu'avait réservé en 1996 M. Jean-Louis Borloo, en tant que maire de Valenciennes, à une délégation de la commission qui travaillait sur le Pacte de relance de la ville.

A titre d'observations liminaires, M. Jean-Louis Borloo a estimé, d'une part, que l'efficacité de la politique de la ville dépendait plus d'une réflexion sur la méthode que de questions budgétaires, les financements disponibles étant de son point de vue satisfaisants, et, d'autre part, que la réussite de cette politique, qu'il a qualifiée de « Nouvelle bataille de France », était un objectif crucial pour la République compte tenu de ses implications sur le lien social, du nombre des personnes (plus de 6,5 millions) et des associations (15.500 environ) concernées, et des conséquences politiques d'un éventuel échec pour la République elle-même.

Pour M. Jean-Louis Borloo, les quatre volets essentiels d'une politique de la ville sont :

- la recherche de l'équité dans la protection des populations, qui obligera la République à redéployer ses forces de sécurité au profit des quartiers concernés ou à augmenter ses capacités bien au-delà même de ce qu'avait prévu le Pacte de relance de la ville ;

- la coordination immédiate des partenaires pour repenser l'habitat et l'urbanisation, le ministre insistant notamment sur l'implication des pouvoirs publics, en particulier locaux, sur la nécessaire fermeté de ceux-ci à l'égard de ceux des bailleurs privés dont la gestion des sites est, parfois, scandaleusement destructrice (au besoin en disposant d'un outil législatif nouveau), et sur la rénovation de la culture des administrations de l'Etat en matière de politique urbaine, qui doit en particulier davantage se préoccuper de la gestion des sous-sols (assainissement, passage des fluides, ...), de l'environnement et du cadre de vie, une logique de village devant se substituer à la « verticalité » du bâti, peu adaptée aux territoires difficiles ;

- la réduction des disparités dans les capacités d'intervention des communes et la réappropriation de la problématique de la ville par le pouvoir démocratique local, en particulier par une réflexion sur les critères d'attribution de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et sur la logique de la péréquation opérée par la dotation de solidarité urbaine (DSU), ainsi que par la mise à disposition des communes de moyens en ingénierie, M. Jean-Louis Borloo s'engageant, à cet égard, à soutenir toute initiative susceptible d'y contribuer ;

- le développement économique des sites relevant de la politique de la ville grâce aux différents dispositifs possibles, à commencer par les zones franches urbaines (ZFU). A ce sujet, considérant qu'en raison de la date à laquelle il a été fait le rapport de l'inspection générale de l'administration (IGAS), déposé en 1998, n'était plus pertinent, M. Jean-Louis Borloo a précisé que le rapport présenté la même année par l'Inspection générale des finances était plus ouvert et il a préconisé une nouvelle analyse quantitative et qualitative des effets des ZFU, notamment afin de comprendre leurs disparités.

Il s'est déclaré convaincu de la nécessité de renouveler des dispositifs d'aides de cette nature, de sensibiliser les entreprises pour cibler les recrutements sur les habitants des quartiers concernés, d'encourager, d'encadrer et de développer l'économie solidaire, de soutenir également dans ces sites le développement de pépinières dans le domaine des nouvelles technologies, et enfin de promouvoir des mesures d'accompagnement par les collectivités publiques de tous niveaux.

Concluant, M. Jean-Louis Borloo a indiqué se préoccuper de la position de son département ministériel au sein du dispositif gouvernemental et avoir invité à déjeuner ses prédécesseurs qui se sont heurtés à ce problème crucial, ceux-ci ayant accepté bien volontiers.

Observant que l'importance de la politique de la ville se mesurait au fait qu'elle concerne plus de 75 % de la population et pas seulement les quartiers dits sensibles, M. Pierre André, rapporteur, en a voulu pour preuve les résultats obtenus par les communes en difficulté (Valenciennes et Saint-Quentin) qui ont été transformées à force de volonté politique. A cet égard, estimant que le problème politique majeur était la part de responsabilité et les moyens d'intervention accordés aux maires, qui lui paraissent être les mieux au fait des problèmes que rencontrent les citoyens et des moyens propres à les résoudre, il s'est élevé contre les Contrats de ville, qu'il a considérés comme une façon, pour l'Etat, de faire financer par les communes ce qu'il ne veut pas assumer et dont il a contesté les prétendus « effets de levier » pour les communes les plus pauvres. Il a dénoncé la multiplication des intervenants, qui accroît inutilement les coûts et dilue les responsabilités, et a enfin réclamé une vigoureuse simplification des procédures afin de renforcer la lisibilité de la politique de la ville.

Considérant que cette politique ne saurait être réduite à son contenu social et que, seule, la mixité économique permettrait la mixité sociale, M. Pierre André, rapporteur, a insisté sur l'importance du développement économique et rappelé combien la politique des ZFU avait été exemplaire en la matière, par sa simplicité, sa rapidité et son efficacité indiscutable en termes d'emplois créés. A cet égard, il a demandé à M. Jean-Louis Borloo selon quel calendrier la promesse faite pendant la campagne électorale par le Président Chirac de remettre en place les ZFU serait tenue. Observant ensuite que les travaux menés et les personnes rencontrées dans le cadre de la préparation de son rapport contredisaient les conclusions négatives des rapports gouvernementaux quant à l'efficacité et à l'intérêt présentés par les ZFU, y compris en ce qui concerne leurs coûts, M. Pierre André, rapporteur, a demandé au ministre de lui fournir le rapport de l'IGAS, les statistiques de l'évolution de la délinquance et du redéploiement des effectifs de police dans les ZFU, ainsi que le bilan des moyens mis en oeuvre par la délégation interministérielle à la ville pour suivre le dossier des ZFU.

Estimant urgent d'ébaucher des orientations compte tenu de la gravité des problèmes, M. Pierre Hérisson a interrogé M. Jean-Louis Borloo sur les perspectives de modifications de la loi SRU, dont la mise en oeuvre semble rencontrer de nombreuses difficultés, et sur sa position à l'égard des zones frontalières qui, en raison de l'arrivée massive de populations étrangères, connaissent des difficultés particulières pour satisfaire aux besoins comme aux obligations légales en matière de logement social, compte tenu du coût tant du foncier que de la construction.

Après avoir félicité le ministre pour sa détermination, manifestée notamment par le recours à l'image forte de la « Nouvelle bataille de France », et estimé que certains bailleurs étaient parvenus à des réalisations remarquables grâce au soutien et à l'implication des élus locaux, M. Ladislas Poniatowski s'est demandé comment le ministère de la ville pouvait pleinement assurer sa mission si le logement ne relevait pas de sa compétence. Il a invité M. Jean-Louis Borloo à revendiquer la responsabilité de ce secteur.

Approuvant les interventions de ses collègues, M. Jean-Paul Émin a souhaité que M. Jean-Louis Borloo indique comment il entendait renforcer le rôle des élus pour favoriser la politique de la ville.

S'agissant de la place et de l'action de son ministère au sein de l'équipe gouvernementale, M. Jean-Louis Borloo a estimé que s'il n'y avait pas de réelles difficultés budgétaires, le système et les procédures étaient « à bout de souffle », l'interministérialité supposant un poids suffisant pour être efficace.

Quant aux rapports entre son département ministériel et les collectivités locales, M. Jean-Louis Borloo s'est engagé à travailler avec ses collègues Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales, et Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, pour remettre les élus au premier plan, estimant au passage nécessaire d'envisager une véritable révolution de la politique fiscale locale et reconnaissant que la participation de tous les acteurs à toutes les réunions et opérations n'était pas toujours indispensable en termes d'efficacité.

En ce qui concerne les ZFU, M. Jean-Louis Borloo s'est déclaré favorable à une relance des projets, qui ne s'effectue pas « à l'aveugle ». Il a annoncé que deux réunions interministérielles successives se tiendraient d'ici à dix jours et que le Premier ministre rendrait alors des arbitrages. En tout état de cause, une analyse quantitative et qualitative sera entreprise dans les deux mois, et elle portera sur toutes les questions utiles, y compris par conséquent sur le bilan des moyens mis en place par la DIV et sur l'efficacité globale et sectorielle des ZFU. A cet égard, M. Jean-Louis Borloo s'est déclaré très intéressé par l'aide que pourrait lui apporter la commission des affaires économiques du Sénat au travers du rapport d'information de M. Pierre André.

Enfin, M. Jean-Louis Borloo a indiqué qu'il se pencherait sur les problèmes spécifiques des zones frontalières, dont il ne connaissait pas l'acuité.

S'appuyant sur les difficultés rencontrées en tant que président de la Communauté d'agglomération de Mantes en Yvelines, M. Dominique Braye a souhaité que la politique de la ville se caractérise désormais par une plus grande confiance accordée aux élus, qui doivent disposer de réels moyens, notamment vis-à-vis des associations, par davantage de lisibilité et de simplicité, en particulier sur les fonds disponibles, sur leurs critères d'attribution et sur la possibilité de mobiliser des financements pluriannuels, par une réelle prime à l'action des collectivités qui ne doivent pas être pénalisées par une diminution des abondements de droit commun sous prétexte qu'elles disposent de fonds « politique de la ville », et enfin par une correcte évaluation des résultats de nature à récompenser les collectivités qui s'impliquent et qui savent utiliser les fonds disponibles.

Après avoir salué la nomination d'un praticien ayant réussi en tant que maire, M. Daniel Raoul a, tout comme le précédent orateur, estimé que le rattachement du logement au ministère de la ville était un enjeu majeur, dans la mesure où le ministère de l'équipement ne savait pas intégrer l'économique et le social à sa politique urbaine. En revanche, s'agissant du débat « verticalité/horizontalité », il a souhaité éviter tout dogmatisme en rappelant la nécessité, pour la préservation de l'espace rural, d'un équilibre entre la densification urbaine et le maintien d'exploitations agricoles encore actives. Enfin, il a demandé si la DSU devait concerner les villes ou les intercommunalités, observant au passage que le niveau de 6 % était bien faible par rapport aux objectifs.

Portant pour sa part un regard positif sur la ville, M. Christian Gaudin a insisté sur la nécessité de lier politique de la ville et aménagement du territoire en tenant compte de l'environnement, et d'éviter la sectorisation en mettant en relation tous les acteurs.

Enfin, M. Gérard Larcher, président, a demandé à M. Jean-Louis Borloo des précisions sur sa récente proposition d'instituer un service d'aide aux victimes fonctionnant de manière analogue au SAMU.

En réponse, M. Jean-Louis Borloo a :

- observé que la mutualisation des crédits provenant de différents ministères était d'ores et déjà possible mais qu'elle n'était pas mise en oeuvre, faute d'une réelle volonté des départements ministériels concernés ;

- estimé que si l'objectif général de la loi SRU était, de son point de vue, légitime, plusieurs modalités d'application n'étaient pas pertinentes et pouvaient conduire à des effets pervers ou dépressifs, notamment sur l'habitat social des communes avoisinant une ville attractive assumant ses obligations légales ;

- considéré qu'au-delà du débat « horizontalité/verticalité », l'essentiel était la réappropriation de la rue et de l'espace urbain par leurs habitants grâce à une politique de l'habitat menée par les maires et la suppression des blocages techniques, ce qui pouvait se faire dans 80 % des cas sans opposer développement urbain et ruralité sur le problème du foncier ;

- reconnu que les problèmes de DGF, de DSU et d'intercommunalité devaient être réexaminés de manière à permettre aux collectivités qui le souhaitent de disposer des moyens indispensables à leur politique, de même que les définitions et zonages réalisés par l'INSEE pouvaient être affinés ;

- précisé que le service d'aide aux victimes, qui n'est pas spécifique à la politique de la ville, était une expérience menée dans cinq ou six communes pour apporter aux victimes de tous délits l'aide d'un juriste et d'un psychologue.