Table des matières

  • Mercredi 30 juin 1999
    • Nomination de rapporteur
    • Traités et conventions - Accord France-Ligue des Etats arabes relatif à l'établissement à Paris d'un bureau de la Ligue des Etats arabes - Examen du rapport
    • Affaires étrangères - Premiers enseignements de la crise au Kosovo
    • Traités et conventions - Adhésion de la République française à la convention internationale contre la prise d'otages - Examen du rapport

Mercredi 30 juin 1999

- Présidence de M. Xavier de Villepin, président -

Nomination de rapporteur

La commission a tout d'abord désigné M. Serge Vinçon comme rapporteur sur le projet de loi n° 456 (1998-1999) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Slovénie sur l'encouragement et la protection réciproque des investissements.

Traités et conventions - Accord France-Ligue des Etats arabes relatif à l'établissement à Paris d'un bureau de la Ligue des Etats arabes - Examen du rapport

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport de M. André Dulait sur leprojet de loi n° 371 (1998-1999) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et la Ligue des Etats arabes relatif à l'établissement, à Paris, d'un bureau de la Ligue des Etats arabes et à ses privilèges et immunités sur le territoire français (ensemble une annexe).

M. André Dulait, rapporteur, a tout d'abord précisé que la Ligue des Etats arabes, créée en 1945 par 7 pays, comptait actuellement 22 Etats du Proche-Orient, du Maghreb, de la péninsule arabique et d'Afrique, ainsi que l'Autorité palestinienne.

Il a souligné le rôle qu'avait joué le conflit israélo-arabe dans le développement de la Ligue arabe et de son rayonnement, avant que les accords de Camp David, suivis de l'exclusion de l'Egypte, n'ouvrent une longue période de division et d'effacement.

Il a assuré que la période récente, marquée par les difficultés du processus de paix au Proche-Orient, tendait à favoriser un dialogue plus dense et une concertation plus active au sein de l'organisation.

M. André Dulait, rapporteur, a alors souligné que le transfert du Caire à Tunis du siège de la Ligue des Etats arabes, durant toute la période d'exclusion de l'Egypte, avait été propice à un renforcement des relations entre l'organisation et la France, du fait de la place accrue du français dans le fonctionnement de la ligue et dans ses publications.

Il a ensuite présenté l'accord conclu le 26 novembre 1997 avec la France, qui donnera au bureau de l'organisation installé à Paris depuis 1974, ainsi qu'à ses dirigeants, un statut diplomatique. Il a ajouté que de tels accords, qui clarifient le statut juridique des locaux et des personnels, avaient déjà été conclus entre la Ligue des Etats arabes et la Belgique, l'Espagne, l'Italie et la Grèce. Il s'agira, a-t-il précisé, d'accorder au bureau parisien de l'organisation des immunités et des privilèges comparables à ceux habituellement reconnus aux organisations internationales établies dans notre pays.

Estimant que cet accord s'inscrivait dans le cadre des bonnes relations entre la France et la Ligue des Etats arabes, il a proposé à la commission d'émettre un avis favorable à l'adoption du présent projet de loi.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin, président, a demandé si tous les pays arabes étaient membres de l'organisation et si celle-ci, compte tenu des divergences internes au monde arabe sur des sujets tels que le Sahara occidental, pouvait valablement peser sur le règlement de certains conflits.

M. André Dulait, rapporteur, a alors apporté les précisions suivantes :

- tous les pays arabes appartiennent à la Ligue des Etats arabes qui compte -a-t-il rappelé- 22 membres, y compris l'Autorité palestinienne ;

- créée dans le prolongement du mouvement panarabe apparu dans les années 1930, la Ligue des Etats arabes n'a pu réaliser l'ensemble de ses objectifs initiaux et elle est demeurée impuissante, durant une longue période, à peser sur la résolution de conflits qui divisent le monde arabe.

La commission a alors approuvé le projet de loi qui lui était soumis.

Affaires étrangères - Premiers enseignements de la crise au Kosovo

M. Xavier de Villepin, président, a ensuite présenté une communication sur les premiers enseignements de l'opération " Force alliée " en Yougoslavie à la suite des auditions auxquelles a procédé la commission depuis le 9 juin dernier.

M. Xavier de Villepin, président, a d'abord estimé que, s'il était naturellement trop tôt pour apporter des réponses définitives aux questions posées par la crise au Kosovo, il était du devoir de la commission d'amorcer la réflexion indispensable et d'identifier en particulier les interrogations suscitées par les 79 jours d'opérations aériennes en Yougoslavie. Il a précisé que, sans chercher à analyser de manière critique le déroulement quotidien de la crise, l'intention de la commission était d'apporter une première contribution à ces réflexions avec le souci de tirer un certain nombre de leçons utiles pour l'avenir.

Abordant les enjeux politiques et diplomatiques révélés par le conflit du Kosovo, M. Xavier de Villepin, président, a d'abord relevé que l'action de la communauté internationale tout au long de la crise avait fait apparaître d'intéressantes adaptations du cadre diplomatique de gestion des crises. Il a souligné le rôle important joué, tout au long du processus diplomatique, par le groupe de contact, ainsi que par le G8 (groupe des pays les plus industrialisés). Tout en relevant les critiques que de telles instances peuvent susciter de la part des petits pays qui s'en trouvent exclus, il a estimé que la souplesse de ces organismes en faisait des instruments particulièrement pragmatiques. Il a jugé que ces formules soulignaient l'intérêt de " coopérations renforcées " dans le domaine diplomatique et militaire et a souhaité que la prochaine Conférence intergouvernementale européenne fasse figurer ce point à son ordre du jour.

Dans ce contexte, a relevé M. Xavier de Villepin, président, les Nations unies, et singulièrement leur Conseil de sécurité, ont été pour l'essentiel cantonnées dans le rôle minimal d'instance de légitimation de décisions prises en dehors d'elles, avant de redevenir, in fine, le cadre de légitimité internationale pour le règlement de la crise.

Revenant alors sur le rôle joué par l'OTAN, M. Xavier de Villepin, président, a analysé la portée, mais aussi les ambiguïtés, du " nouveau concept stratégique " de l'Alliance atlantique, en particulier quant au refus d'accorder explicitement à l'OTAN la possibilité de s'" auto-mandater " pour recourir à la force dans une situation ne relevant pas de la défense collective. Il a par ailleurs souligné la reconnaissance, dans le nouveau concept stratégique, de la pertinence de l'" identité européenne de sécurité et de défense " (IESD), à laquelle avaient fait rapidement écho -après les déclarations franco-britannique et franco-allemande de Saint-Malo et de Toulouse- les décisions du Conseil européen de Cologne, dont il a espéré qu'elles constituent une phase importante dans l'édification d'une Europe de la sécurité et de la défense. Il a en particulier rappelé à cet égard le nouveau dispositif décisionnel prévu à Cologne et la décision de transformer le Corps européen en un corps de réaction rapide.

M. Xavier de Villepin, président, a toutefois estimé que trois questions essentielles restaient posées en vue de la construction effective d'une défense européenne :

- d'abord, comment aboutir à une convergence entre les politiques de défense européennes ? M. Xavier de Villepin, président, a souligné, à cet égard, que la mise en place de capacités militaires européennes exigerait un effort financier substantiel et il a jugé séduisante l'idée de " critères de convergence " européens en matière militaire ;

- ensuite, comment garantir l'efficacité du nouveau processus européen en matière de défense ? Parallèlement à l'extension des coopérations renforcées au domaine de la PESC (politique étrangère et de sécurité commune), M. Xavier de Villepin, président, a insisté sur la nécessité de donner toute leur mesure aux aménagements institutionnels de Cologne en plaidant, en particulier, pour des représentants permanents au sein du futur " comité politique et de sécurité ", distincts des actuels représentants permanents de chaque nation auprès de l'Union européenne ;

- enfin, faut-il envisager, à la lumière de la crise du Kosovo, une nouvelle évolution de la relation entre la France et l'OTAN ? M. Xavier de Villepin, président, a souligné que cette crise a renforcé la singularité de la position française en permettant de mettre en avant notre souci de responsabilisation nationale et de primauté du politique, mais a estimé qu'un certain nombre de questions restaient néanmoins posées, notamment les responsabilités obtenues par des Français au sein des GFIM (groupes de forces interarmées multinationales).

Abordant alors les premiers enseignements militaires de l'opération " Force alliée ", M. Xavier de Villepin, président, a d'abord précisé la part substantielle prise par les forces françaises dans ce conflit fondé sur l'emploi de l'arme aérienne : 10,8 % de l'ensemble des missions aériennes effectuées par les alliés, et en particulier 12,8 % des missions offensives et 20,2 % des missions de reconnaissance. Il a toutefois relevé que ces opérations aériennes avaient été globalement nettement moins importantes que celles effectuées durant la guerre du Golfe.

Puis M. Xavier de Villepin, président, a relevé un certain nombre de facteurs limitatifs aux capacités de nos forces que ces opérations avaient mises en lumière :

- les contraintes imputables à la défense sol-air adverse ;

- la nécessité de capacités anti-radars dont nous ne disposons pas encore ;

- les limites du guidage laser et la nécessité d'acquérir des capacités tout temps ;

- et certaines déficiences dans le domaine de la gestion de l'espace aérien, en particulier pour l'identification des aéronefs.

M. Xavier de Villepin, président, a ensuite souligné un certain nombre d'adaptations de nos équipements qu'il a jugées nécessaires pour améliorer l'efficacité à venir des forces françaises :

- remédier à l'insuffisance de nos stocks de munitions, qui nous a conduits à acheter des bombes américaines à guidage laser ;

- doter nos forces de moyens de ravitaillement en vol plus importants ;

- acquérir un nombre accru de drones qui, malgré leur fragilité, font désormais partie intégrante des équipements militaires nécessaires ;

- enfin, adapter nos armements aériens, d'une part par l'acquisition, prévue pour 2001 et 2003, de missiles de croisière aéroportés Apache et Scalp-EG, d'autre part par l'équipement de nos forces, en 2004, d'armements air-sol modulaires (AASM).

M. Xavier de Villepin, président, a alors souligné que ces insuffisances concernent, à des degrés divers, l'ensemble des pays européens et pourraient dès lors trouver des solutions communes, moins coûteuses, à l'échelle européenne.

Au-delà de ces enseignements immédiats liés à l'emploi de l'arme aérienne, M. Xavier de Villepin, président, a ensuite formulé cinq observations complémentaires.

Il a d'abord fortement souligné que la projection de forces liée à la crise au Kosovo avait pleinement validé le choix de la professionnalisation de nos armées fait en 1996, y compris pour l'armée de terre, qui ne se trouve encore qu'à mi-parcours de son processus de professionnalisation mais dont les capacités de projection de forces, en régime normal et pour des missions de longue durée, ont néanmoins déjà doublé depuis la guerre du Golfe.

Il a ensuite estimé impérieuse l'acquisition, par les Européens, de capacités d'observation et de renseignement autonomes, compte tenu de l'extrême déséquilibre qui persiste, dans ce domaine, en faveur des Américains. Malgré les progrès très méritoires accomplis par la France pour se doter d'un ensemble de moyens relativement complet, les moyens européens demeurent globalement très insuffisants et supposent -notamment dans le domaine spatial militaire- la construction effective de capacités militaires européennes.

M. Xavier de Villepin, président, a en troisième lieu relevé que l'emploi du Foch durant l'opération " Force alliée " relançait la problématique de la commande d'un second porte-avions. Il a rappelé que la France devrait prendre cette décision à l'occasion de la prochaine programmation et que les Britanniques ont récemment manifesté leur intention de se doter, à des échéances comparables, de deux nouveaux porte-avions.

Il a en quatrième lieu estimé que la crise du Kosovo avait confirmé l'importance des actions civilo-militaires dans la gestion de la crise après la fin des opérations aériennes. Il a en particulier souligné le rôle que devait jouer cette relation civilo-militaire dans le domaine de la reconstruction.

M. Xavier de Villepin, président, a enfin précisé que les opérations au Kosovo devraient porter à environ 5,5 ou 6 milliards de francs le surcoût total des opérations extérieures pour l'année 1999. L'ampleur de cette somme et la perspective de dépenses également très élevées en l'an 2000 posaient, une nouvelle fois, en termes aigus, la question du financement de ces dépenses exceptionnelles et justifiaient, a-t-il estimé, de prévoir, dès la construction du budget, une enveloppe substantielle pour financer les opérations extérieures, en lieu et place des provisions actuelles, purement symboliques.

M. Xavier de Villepin, président, a conclu en soulignant que l'opération " Force alliée " avait surtout mis en lumière l'écart considérable séparant les capacités militaires européennes des moyens américains. Il a estimé que la France devait tenter de mettre à profit la prise de conscience favorisée chez certains de nos partenaires par cette crise au Kosovo pour donner enfin une dimension concrète aux perspectives de défense européenne et, en premier lieu, pour doter l'Europe des moyens de son autonomie stratégique.

A l'issue de l'exposé de M. Xavier de Villepin, président, un débat s'est instauré entre les commissaires.

M. Robert Del Picchia a fait observer que l'opinion publique européenne avait été, à l'occasion de la crise du Kosovo, plus fortement sensibilisée à la problématique d'une défense européenne. Il a estimé qu'il convenait de profiter de ce " déclic " survenu parmi les opinions pour relancer une initiative politique sur ce sujet.

Il a ensuite relevé que la possibilité, pour les entreprises françaises, de s'impliquer dès à présent dans la reconstruction économique du Kosovo était retardée par l'absence de structures adaptées.

Il s'est enfin interrogé sur la capacité, pour l'Union européenne, de conduire seule, sans le concours des Etats-Unis et de l'OTAN, une opération militaire telle que celle qui avait été mise en oeuvre à l'occasion de la crise au Kosovo.

M. Xavier de Villepin, président, a alors apporté les précisions suivantes :

- la crise du Kosovo avait en effet favorisé la prise de conscience des insuffisances européennes en matière militaire. Il convenait cependant d'avoir également présent à l'esprit un autre aspect de l'effort, notamment budgétaire, qu'il conviendrait d'accomplir à l'avenir, celui relatif à la reconstruction du Kosovo et de la région. Celle-ci nécessiterait un effort durable et M. Xavier de Villepin, président, s'est interrogé sur la possibilité, pour l'opinion, d'accepter facilement les conséquences financières de cette double nécessité : l'adaptation de nos capacités militaires, d'une part, et l'effort de reconstruction, d'autre part ;

- la participation française à la reconstruction avait déjà souffert, en Bosnie-Herzégovine, d'un certain retard, notamment en comparaison de nos alliés américains qui, en ce domaine, bénéficiaient d'une très grande expérience. Une coordination accrue s'imposait du côté français ;

- à l'évidence, l'Union européenne n'aurait pu conduire une opération comme " Force alliée ", sans la participation des Etats-Unis : ainsi sur quelque 1.000 aéronefs déployés lors de cette opération, près de 700 étaient américains.

Après s'être félicité du souci de rapidité manifesté par la commission pour se livrer à cette première analyse des enseignements de la crise du Kosovo, M. Michel Caldaguès a formulé plusieurs observations. Il a tout d'abord insisté sur le fait que notre participation à l'opération " Force alliée " n'aurait pu se faire si la réforme de la professionnalisation n'avait pas été mise en oeuvre ; alors même que celle-ci n'en était qu'à mi-chemin, elle avait démontré, au Kosovo, toute sa pertinence.

La problématique du second porte-avions, a poursuivi M. Michel Caldaguès, était en effet relancée à la suite du récent conflit. La capacité de permanence à la mer du groupe aéronaval impliquait -a-t-il rappelé- deux porte-avions, faute de quoi c'est notre politique méditerranéenne qui pourrait s'en trouver affectée. Par ailleurs, une autre crise régionale pourrait survenir, à plus grande distance de notre territoire, qui ne nous permettrait pas de disposer des capacités logistiques dont nous avons bénéficié en Italie. La nécessité d'une capacité aéronavale permanente n'en serait alors rendue que plus indispensable. Estimant ensuite que le porte-avions constituait un instrument de souveraineté, M. Michel Caldaguès a indiqué qu'il ne partageait pas l'idée d'une coopération en ce domaine avec nos partenaires britanniques, pas plus qu'il n'avait cru, en son temps, à l'idée d'une " dissuasion concertée ".

M. Michel Caldaguès a par ailleurs fait valoir que la vraie contrainte imposée aux forces de l'OTAN par la défense sol-air yougoslave était moins liée à cette capacité en elle-même qu'à la notion de conflit " zéro mort " mise en avant tout au long de l'opération.

Abordant enfin ce qui constituait, à ses yeux, l'essentiel du sujet, à savoir les causes et les fins de l'opération " Force alliée ", M. Michel Caldaguès a estimé que le véritable motif du déclenchement de la guerre avait été de prouver que l'OTAN avait encore une légitimité à exister. Il a considéré également que cette guerre semblait avoir été à certains égards préméditée, notamment par l'inscription, dans les accords de Rambouillet, de certaines clauses qu'aucun pays souverain ne pouvait accepter.

Enfin, a relevé M. Michel Caldaguès, l'analyse sur les enseignements de la crise devait conduire à aller au-delà de ses caractéristiques spécifiques, notamment la stratégie qui y avait été conduite, consistant notamment à détruire le potentiel civil yougoslave.

M. Xavier de Villepin, président, a, pour sa part, estimé qu'il convenait d'établir une distinction entre la notion d'indépendance du groupe aéronaval, d'une part, et celle d'indépendance dans le domaine nucléaire, d'autre part. Il a ainsi estimé qu'il n'était pas impossible, compte tenu de la communauté d'objectifs entre la Grande-Bretagne et la France, d'envisager des opérations aéronavales communes.

Il a ensuite précisé que les Serbes avaient utilisé, avec beaucoup d'efficacité, leurs radars de défense anti-aérienne, compliquant d'autant le déroulement des missions offensives des appareils de l'Alliance.

S'agissant enfin des causes véritables de la guerre, qui constituaient en effet une question fondamentale, M. Xavier de Villepin, président, a estimé souhaitable d'interroger le ministre des affaires étrangères sur ce sujet. M. Xavier de Villepin, président, a enfin indiqué que le compte rendu du présent débat serait naturellement annexé au rapport d'information prochainement publié.

M. Emmanuel Hamel a souhaité que l'analyse des carences relevées dans le présent rapport d'information puisse aboutir à une évolution de la politique gouvernementale. Il s'est déclaré soucieux qu'une action rapide et concrète soit engagée à l'égard des responsables gouvernementaux et militaires afin de ne pas perdre de temps dans la correction des insuffisances constatées.

M. Xavier de Villepin, président, a précisé que, dès la prochaine rentrée parlementaire, la commission entendrait les chefs d'état-major afin d'engager le débat avec eux et a rappelé qu'en effet, la guerre du Golfe avait, en son temps, démontré une certaine inertie de la part de la France à tirer les enseignements de la crise, notamment sur le plan des budgets militaires.

M. Jean-Guy Branger a vivement déploré la réduction constante des crédits alloués à la défense. Il a estimé qu'il revenait au Parlement de se donner les moyens d'effectuer ses propres analyses afin de formuler des propositions adaptées. Il a par ailleurs dénoncé les graves insuffisances en matière de recherche et développement, alors que les efforts en la matière conditionnaient à moyen terme les capacités futures de nos forces. Il s'est enfin inquiété de l'insuffisance structurelle des crédits d'équipement des armées.

M. Xavier de Villepin, président, s'est également déclaré convaincu de la nécessité d'un effort accru en faveur de la recherche et du développement en matière d'équipement militaire. Il a déploré que la France ait figuré parmi les derniers pays à tirer les conséquences, sur le plan de ses budgets de défense, de la chute du mur de Berlin, qui avait constitué le dernier changement stratégique majeur, et a souligné qu'une telle erreur ne devait pas se reproduire.

M. Hubert Durand-Chastel a estimé qu'une volonté politique forte s'imposait pour enrayer la diminution de nos budgets militaires. Il a toutefois relevé que beaucoup dépendait de l'activité économique générale du pays et s'est inquiété de l'incidence, en ce domaine, de réformes, comme la réduction à 35 heures du temps de travail.

Enfin, M. Charles-Henri de Cossé-Brissac a insisté sur la nécessité de faciliter la participation des entreprises françaises à la reconstruction économique du Kosovo et de la région et sur l'urgence qu'il y avait à mettre en place, à cette fin, des dispositifs adaptés.

A la suite de cet échange de vues, la commission a autorisé la publication du rapport d'information présenté par M. Xavier de Villepin, président.

Traités et conventions - Adhésion de la République française à la convention internationale contre la prise d'otages - Examen du rapport

La commission a enfin procédé à l'examen du rapport de M. André Rouvière sur leprojet de loi n° 339 (1998-1999) autorisant l'adhésion de la République française à la convention internationale contre la prise d'otages du 17 décembre 1979.

M. André Rouvière, rapporteur,
a d'abord rappelé que cette convention était entrée en vigueur dès le 3 juin 1983 entre les 77 Etats qui adhèrent déjà à cette convention.

Il a alors rappelé que deux problèmes avaient jusqu'à présent conduit la France à ne pas ratifier cette convention. Il s'agit, tout d'abord, de l'article 12 de la convention qui pourrait permettre, dans certaines conditions, de légitimer les prises d'otages, notamment quand elles sont commises pour lutter contre la domination coloniale ou l'occupation étrangère. Ensuite, la France a longtemps été réticente à reconnaître la compétence de la Cour internationale de justice pour régler, in fine, les différends entre Etats (article 16).

M. André Rouvière, rapporteur, a souligné les raisons qui justifiaient aujourd'hui la ratification, par la France, de cette convention. Il a rappelé que les prises d'otages restaient encore d'actualité et qu'un certain nombre de Français étaient aujourd'hui détenus par des groupes terroristes. Il a également fait remarquer que si, jusqu'à la fin des années 1980, les prises d'otages avaient surtout un but politique, elles étaient désormais essentiellement à finalités criminelles. Il a insisté sur le fait que le terrorisme devait être réprimé au niveau international et qu'à ce titre, la présente convention permettrait d'approfondir la coopération entre les Etats. Enfin, M. André Rouvière a estimé que la ratification, par la France, de cette convention était d'autant plus logique que notre pays avait déjà ratifié la quasi-totalité des 12 conventions internationales existantes contre le terrorisme.

M. André Rouvière, rapporteur, a ensuite exposé les principaux points de la convention. Il a relevé que la convention donnait une définition large, claire et précise de l'infraction de prises d'otages, permettant de poursuivre systématiquement les preneurs d'otages et leurs complices. Il a souligné que cette convention visait à développer la coopération entre les Etats parties pour prévenir et réprimer les prises d'otages. Il a mentionné que les Etats devaient appliquer le principe " juger ou extrader ", principe garantissant la non-impunité des coupables. Il a enfin relevé que la convention assurait le respect minimum nécessaire des droits de la défense aux personnes poursuivies.

En conclusion, M. André Rouvière, rapporteur, a exprimé sa conviction que la ratification de cette convention par notre pays devait être autorisée. Il a souligné que la France accompagnerait cette ratification de trois déclarations interprétatives ; la première précise que la France considère que la prise d'otages ne pouvait jamais être autorisée ; la deuxième, qu'aucune personne poursuivie ne serait détenue avant que des poursuites pénales ne fussent entreprises ; et la France a rappelé, par la troisième, qu'elle n'autoriserait pas l'extradition d'un de ses nationaux ou d'un étranger qui pourrait encourir la peine capitale.

A l'issue de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin, président, s'est inquiété de l'éventuelle application de l'article 12 de la convention dans des pays où sont commises des prises d'otages et s'est demandé si la convention s'appliquait aux prises d'otages organisées par des groupes mafieux.

M. Emmanuel Hamel a demandé les raisons qui avaient motivé le changement d'attitude de la France à propos de la compétence de la Cour internationale de justice.

M. André Rouvière, rapporteur, a alors apporté les précisions suivantes :

- l'article 12 ne s'appliquerait pas à la France, compte tenu de la déclaration faite par notre pays sur cette disposition. Cet article ne paraissait d'ailleurs plus devoir être appliqué, dans la mesure où il avait essentiellement un aspect " historique " ;

- la convention avait bien pour but de réprimer tous les types de prises d'otages, y compris quand elles n'ont pour objectif que le versement d'une rançon ;

- la France reconnaissait désormais, en matière de terrorisme, la compétence de la Cour internationale de justice, même si elle ne lui reconnaissait pas, pour autant, une compétence générale.

La commission a alors approuvé le projet de loi qui lui était soumis.