Table des matières

  • Mercredi 9 décembre 1998
    • Nomination de rapporteurs
    • Cinquième protocole (services financiers) (Pjl n° 22) : Examen du rapport
    • Suppression graduelle des contrôles aux frontières communes (Pjl n°s 568, 569, 570 et 571) : Examen du rapport
    • Conventions d'assistance administrative mutuelle (Pjl n°s 32, 33 et 34) : Examen des rapports
    • Exécution du budget de la défense en 1998 : Communication du président

Mercredi 9 décembre 1998

- Présidence de M. Xavier de Villepin, président.-

Nomination de rapporteurs

La commission a d'abord procédé à la nomination de rapporteurs. Elle a désigné :

- M. Hubert Durand-Chastel sur les projets de loi n° 72 (1998-1999) autorisant la ratification de la convention entre la République française et la Confédération suisse portant rectification de la frontière franco-suisse suite au raccordement des autoroutes entre Saint-Julien-en-Genevois (département de la Haute-Savoie) et Bardonnex (canton de Genève), et n° 73 (1998-1999) autorisant la ratification de la convention entre la République française et la Confédération suisse portant rectification de la frontière franco-suisse entre le département du Doubs et le canton de Vaud ;

- M. Daniel Goulet sur la proposition de loi n° 109 (1998-1999)), en cours d'examen par l'Assemblée nationale, relative à la validation législative d'actes pris après avis du comité technique paritaire du ministère des affaires étrangères.

Cinquième protocole (services financiers) (Pjl n° 22) : Examen du rapport

La commission a ensuite examiné le rapport de M. André Boyer sur le projet de loi n° 22 (1998-1999) autorisant l'approbation du cinquième protocole (services financiers) annexé à l'accord général sur le commerce des services.

M. André Boyer, rapporteur, a d'abord rappelé que ce cinquième protocole, qui concerne la libéralisation des services financiers -banques, assurances, services boursiers- , constitue l'ultime épisode d'une longue négociation sur ce sujet qui avait déjà conduit à l'adoption, le 21 juillet 1995, d'un accord intérimaire et donc provisoire, sur les services financiers. Cet accord provisoire devant arriver à échéance le 31 décembre 1997, un troisième cycle de négociations a été engagé le 10 avril 1997 ; il a abouti le 12 décembre 1997 sous la forme d'un cinquième protocole, qui fait l'objet du présent projet de loi.

S'agissant des services financiers, a précisé le rapporteur, deux domaines particulièrement importants sont couverts par l'accord général sur le commerce des services (AGCS) et concernent les modes de fournitures de ces services :

- les échanges transfrontaliers de services financiers, permettant par exemple de souscrire un contrat d'assurance auprès d'une compagnie étrangère ;

- les conditions d'établissement des entreprises étrangères, plus ou moins contraignantes selon les législations relatives à l'investissement étranger ou les restrictions posées à l'activité d'entreprises bancaires ou d'assurances par rapport aux entreprises nationales.

M. André Boyer, rapporteur, a ensuite décrit l'enjeu économique considérable du secteur des services financiers. Le marché mondial de l'assurance a atteint -a-t-il souligné- 15.000 milliards de francs en 1997. En croissance forte, son chiffre d'affaires a quadruplé en dix ans ; il se structure autour de trois régions principales qui représentent 95 % du total : l'Asie, l'Amérique du Nord, enfin l'Union européenne qui équivaut à 28 % du total des cotisations (23 % en 1985). Le développement de ce secteur a largement bénéficié de l'harmonisation et de la déréglementation du marché dans le cadre communautaire.

La France, a précisé le rapporteur, occupe dans ce domaine le cinquième rang mondial(6,5 %), avec un chiffre d'affaires de 1.000 milliards de francs, derrière les Etats-Unis (31 %), le Japon (25 %), l'Allemagne (7 %), et à égalité avec le Royaume-Uni (6,5 %). Les cotisations collectées par les sociétés françaises représentent désormais 25 % de leur chiffre d'affaires global, en croissance rapide (+ 11 % en 1997, contre 5 % sur le marché national). S'agissant du secteur des services bancaires et boursiers, les banques françaises, malgré les récentes restructurations, poursuivent leur mouvement d'internationalisation. Le stock d'investissement français à l'étranger s'élève à 93 milliards de francs et les flux ont atteint 12 milliards en 1997.

Abordant les acquis, au demeurant contrastés, du cinquième protocole, M. André Boyer, rapporteur, a estimé que la France et l'Union européenne avaient davantage d'intérêts offensifs dans la négociation que de positions à défendre compte tenu des législations européenne et française dans ce domaine, déjà largement conformes aux obligations de l'accord.

L'offre de l'Union européenne, a relevé le rapporteur, préserve certaines dispositions protectrices. Ainsi la France a-t-elle introduit certaines réserves destinées à protéger les réglementations nationales qui limitent l'accès à son marché des entreprises non communautaires. L'engagement de la France dans le cadre de l'accord se fait donc à législation constante.

Les acquis positifs de la négociation, inclus dans le cinquième protocole, proviennent essentiellement, a précisé M. André Boyer, rapporteur, des offres présentées par les pays émergents. Ainsi le principe du maintien du régime d'investissement existant a-t-il été intégralement confirmé par l'Indonésie, les Philippines et la Thaïlande, et partiellement par la Malaisie. Les Philippines, la Corée du Sud, le Brésil, l'Argentine et le Mexique ont par ailleurs autorisé les participations étrangères majoritaires. De nouvelles licences d'implantation ont en outre été octroyées par l'Indonésie et la Malaisie. Faisant l'objet d'une "consolidation" dans l'accord, ces concessions revêtent -a souligné le rapporteur- un caractère irréversible.

Par delà ces motifs de satisfaction, des dispositions restrictives demeurent : le degré d'ouverture de ces marchés demeure limité pour les entreprises européennes et quelques pays émergents (Corée du sud, Mexique, Egypte) ont maintenu d'importantes réserves de précaution.

Les offres de pays importants, a fait observer M. André Boyer, rapporteur, ont été décevantes. Il en est ainsi de l'Inde et du Pakistan, dont les marchés demeurent très fermés aux étrangers. Le marché japonais reste par ailleurs hermétique, même si ce pays a accepté de consolider -c'est-à-dire de garantir et d'étendre- les accords conclus bilatéralement avec les Etats-Unis dans les secteurs de la banque et de l'assurance. Enfin, le Canada et les Etats-Unis ont eu une attitude très prudente.

Le rapporteur a alors relevé que l'inquiétude liée à la crise financière sur le sort de ce cinquième protocole ne s'est pas concrétisée. Les pays émergents d'Asie du sud-est ou d'Amérique Latine, touchés par cette crise, ont pu percevoir l'intérêt que représenterait, pour eux, une ouverture de leurs marchés aux opérateurs occidentaux du secteur financier. La concurrence étrangère sur leur territoire, en contraignant leurs propres établissements financiers à une rigueur accrue, est finalement apparue de nature à prémunir ces pays à l'avenir contre des stratégies financières hasardeuses dont la crise qui les frappe a été la sévère sanction.

Concluant son propos, M. André Boyer, rapporteur, a rappelé que plus de 70 nations ont souscrit à cet accord qui, comme l'a déclaré le négociateur pour l'Union européenne, Sir Leon Brittan, "va contribuer à restaurer la confiance en Asie et va offrir d'importantes possibilités pour l'Europe et les Etats-Unis". A partir de l'an prochain, les activités internationales des sociétés financières seront libéralisées dans 95 % du marché mondial.

L'Union européenne et la France ayant beaucoup à attendre des conséquences de cette libéralisation, le rapporteur a alors invité la commission à donner un avis favorable à l'adoption du projet de loi.

A l'issue de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin, président, a fait observer que les rachats de banques américaines par des établissements français n'avaient pas été importants au cours de la période récente. Il a relevé que la situation très concurrentielle des banques françaises sur le territoire national les avait incitées à s'engager en Asie du sud-est pour trouver des débouchés qui s'étaient révélés dangereux.

La commission a alors, suivant l'avis de son rapporteur, approuvé le projet de loi qui lui était soumis.

Suppression graduelle des contrôles aux frontières communes (Pjl n°s 568, 569, 570 et 571) : Examen du rapport

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Paul Masson sur les projets de loi n° 569 (1997-1998) autorisant l'approbation de l'accord d'adhésion du Royaume de Danemark à la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, n° 570 (1997-1998) autorisant l'approbation de l'accord d'adhésion de la république de Finlande à la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, n° 571 (1997-1998) autorisant l'approbation de l'accord d'adhésion du Royaume de Suède à la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, et n° 568 (1997-1998) autorisant l'approbation de l'accord de coopération entre le Royaume de Belgique, la République fédérale d'Allemagne, la République française, le Grand-Duché de Luxembourg, le Royaume des Pays-Bas, la République italienne, le Royaume d'Espagne, la République portugaise, la République hellénique, la république d'Autriche, le Royaume de Danemark, la république de Finlande, le Royaume de Suède, parties contractantes à l'accord et à la convention de Schengen, et la république d'Islande et le Royaume de Norvège, relatif à la suppression des contrôles de personnes aux frontières communes.

M. Paul Masson, rapporteur
, a d'abord dressé un bilan de l'application des accords de Schengen. Il a relevé, parmi les différents acquis, le recours plus fréquent aux "commissions de visite" aux frontières extérieures, la signature, s'agissant de la coopération aux frontières intérieures, d'un nombre croissant d'accords bilatéraux -afin de permettre notamment le développement d'un contrôle en profondeur exercé à partir de postes fixes permanents répartis de part et d'autre de la frontière-, l'harmonisation de la politique des visas et enfin le fonctionnement satisfaisant du "système d'information Schengen". Il a souligné toutefois que l'application des accords de Schengen soulevait de nombreuses difficultés : l'insuffisance de la coopération policière transfrontalière, les difficultés propres à la lutte contre le trafic des stupéfiants et le problème particulier que posait à cet égard la production de drogue aux Pays-Bas, la vulnérabilité des frontières extérieures, en particulier des frontières italiennes et grecques. M. Paul Masson, rapporteur, a rappelé à cet égard la nécessité de ratifier le plus rapidement possible l'accord de réadmission entre l'Italie et la France signé en 1997.

Le rapporteur a ensuite présenté les conditions et les conséquences possibles de l'intégration de l' "acquis de Schengen" dans le cadre de l'Union européenne décidée par le traité d'Amsterdam. Il a en particulier mentionné les problèmes liés à l'intégration du personnel du secrétariat Schengen et a attiré l'attention de la commission sur la définition de la base juridique applicable à l' "acquis de Schengen" (règles communautaires dans le cadre du nouveau titre IV relatif à la libre circulation des personnes, à l'asile et à l'immigration ou coopération intergouvernementale dans le cadre du titre VI relevant du "troisième pilier").

M. Paul Masson, rapporteur, a ensuite évoqué les accords d'adhésion du Danemark, de la Finlande et de la Suède aux accords de Schengen. Il a souligné que la frontière extérieure de la Finlande avec la Russie avait toujours fait l'objet d'une attention particulière et que, par ailleurs, les trois pays concernés remplissaient déjà, pour une large part, les conditions fixées par la convention d'application de 1990 à l'intégration au sein de l'espace Schengen.

Le rapporteur a ensuite indiqué que l'accord de coopération entre les Etats signataires de la convention de Schengen d'une part, et l'Islande et la Norvège d'autre part, avait permis de concilier deux exigences contradictoires : d'une part, la volonté manifestée par les Etats nordiques de préserver la liberté de circulation au sein de l'Union nordique des passeports, d'autre part, le principe selon lequel seuls les Etats membres de l'Union européenne peuvent adhérer à la convention d'application de l'accord de Schengen ; la solution de compromis retenue repose sur une association systématique de l'Islande et de la Norvège au processus de décision, sans toutefois que le droit de vote soit reconnu à ces deux pays. M. Paul Masson, rapporteur, a cependant rappelé que cet accord de coopération avait été négocié avant la signature du traité d'Amsterdam et n'avait pas pu tenir compte de l'intégration de l' "acquis de Schengen" dans le cadre de l'Union européenne ; or, si la participation active de l'Islande et de la Norvège pouvait se concevoir dans le cadre d'institutions spécialisées comme celles liées aux accords de Schengen, elle n'apparaît en revanche pas compatible avec le fonctionnement de l'Union européenne : des Etats extérieurs à l'Union ne sauraient en effet interférer dans le processus décisionnel européen.

M. Paul Masson, rapporteur, a relevé qu'en conséquence les modalités d'association de l'Islande et de la Norvège devraient être modifiées dans le cadre d'un nouvel accord dont l'entrée en vigueur devrait coïncider avec celle du traité d'Amsterdam. Même si l'intérêt pratique de la ratification du présent accord de coopération peut apparaître contestable, ce texte constitue néanmoins, a estimé le rapporteur, avec les trois accords d'adhésion, un ensemble cohérent qui répond aux préoccupations de nos partenaires nordiques. C'est pourquoi le rapporteur a invité la commission a donner un avis favorable aux quatre présents projets de loi.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Christian de La Malène s'est demandé si la mise en oeuvre des accords de Schengen ne risquait pas de favoriser le développement d'une criminalité transfrontalière. Il a souhaité par ailleurs obtenir des précisions sur les conditions d'intégration de l' "acquis de Schengen" dans le cadre de l'Union européenne.

M. Paul Masson, rapporteur, a observé que les accords de Schengen n'avaient pas directement vocation à régler les problèmes de criminalité qui ne pourraient trouver de véritable réponse que dans la constitution d'un espace judiciaire européen, aujourd'hui encore embryonnaire. Il a en outre indiqué que la délégation du Sénat pour l'Union européenne demanderait, à son initiative, que le Gouvernement français communique au Parlement des informations plus complètes sur les conditions de transfert de l' "acquis de Schengen" dans les traités européens. Il a souligné que l'ensemble du dispositif Schengen était aujourd'hui placé sous le régime de la coopération intergouvernementale, mais que le rattachement possible d'une partie des dispositions concernées au traité comunautaire entraînerait des modifications importantes du processus de décision (initiative de la Commission, consultation du Parlement européen, contrôle de la Cour de justice). M. Paul Masson, rapporteur, a rappelé en particulier les difficultés que soulevait la définition de la base juridique pour le "système d'information Schengen" d'une part, et la clause de sauvegarde prévue à l'article 2, § 2 de la convention d'application de l'accord de Schengen d'autre part. Il a estimé que le Parlement français devait appuyer la position de notre Gouvernement qui plaidait, sur ces deux points, pour un rattachement au troisième pilier intergouvernemental.

M. Xavier de Villepin, président, a alors indiqué qu'il partageait l'appréciation du rapporteur sur le bilan de l'application des accords de Schengen. Il a notamment évoqué, malgré d'indéniables progrès, la préoccupation qu'inspiraient la situation insuffisante des contrôles aux frontières italiennes ainsi que les tensions entre la Grèce et la Turquie qui interdisaient la mise en place d'une véritable coopération entre ces deux pays dans le domaine des flux migratoires. Il a par ailleurs souhaité savoir si, pour le rapporteur, le passage à la majorité qualifiée -dans un délai de cinq ans et si le Conseil de l'Union européenne en décide ainsi à l'unanimité- pour les questions liées à la libre circulation dans le cadre du nouveau titre IV du traité d'Amsterdam permettrait d'obtenir des Pays-Bas qu'ils alignent leur politique en matière de stupéfiants sur les positions défendues par la majorité des Etats membres de l'Union européenne.

M. Paul Masson, rapporteur, a d'abord relevé que la mise en place de l'espace Schengen, encore imparfaite, s'inscrivait dans le cadre d'un processus lent qui demandait beaucoup de persévérance. S'agissant de la drogue, il a constaté que le groupe de travail qui avait été constitué dans le cadre des accords de Schengen, sur ce sujet, n'avait jamais fonctionné et que la position des Néerlandais dans le domaine des stupéfiants, inspirée principalement par des considérations d'ordre commercial, avait bénéficié de certaines complicités dans d'autres pays de l'Union européenne. Aussi, d'après le rapporteur, l'application de la majorité qualifiée dans ce domaine risque de se heurter à une grande résistance.

La commission a alors, suivant l'avis de son rapporteur, approuvé les quatre projets de loi qui lui étaient soumis.

Conventions d'assistance administrative mutuelle (Pjl n°s 32, 33 et 34) : Examen des rapports

La commission a ensuite examiné les rapports de M. Robert Del Picchia sur les projets de loi n° 32 (1998-1999) autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement français et le Gouvernement macédonien pour la prévention, la recherche, la constatation et la sanction des infractions douanières, n° 33 (1998-1999) autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie pour la prévention, la recherche et la poursuite des fraudes douanières, et n° 34 (1998-1999) autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle en matière douanière entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République hongroise.

M. Robert Del Picchia, rapporteur, a tout d'abord précisé que les trois conventions d'assistance administrative mutuelle en matière douanière conclues avec la Macédoine, la Russie et la Hongrie comportaient un dispositif pratiquement identique et s'inspiraient de la trentaine de conventions bilatérales comparables, déjà signées par la France et permettant de donner une base juridique solide à la coopération entre les administrations douanières dans la lutte contre les infractions douanières et les trafics illicites.

Il a précisé qu'au cours des dernières années, la conclusion de telles conventions avec les pays d'Europe centrale et orientale avait constitué une priorité, en raison des nombreux trafics transitant par ces pays en direction de l'Union européenne, en particulier le trafic de stupéfiants.

M. Robert Del Picchia a ensuite présenté le dispositif de ces trois conventions qui prévoit en particulier l'échange de renseignements entre administrations, la transmission de documents, la possibilité pour les agents des douanes de comparaître comme témoin ou expert dans une procédure relevant de l'autre pays, ou encore l'exercice d'une surveillance spéciale au profit de l'autre pays.

Enfin, en ce qui concerne le trafic de stupéfiants, le rapporteur a précisé que les trois conventions permettaient le recours à des "livraisons surveillées" dans le cadre d'une coopération des deux Etats concernés, afin d'infiltrer et de démanteler les réseaux de trafiquants.

Puis M. Robert Del Picchia a commenté les évolutions récentes de la situation intérieure de la Macédoine, de la Hongrie et de la Russie, ainsi que des relations bilatérales entre la France et ces pays.

Le rapporteur a tout d'abord relevé l'importance de la crise au Kosovo dans l'actualité intérieure de la Macédoine, du fait de la présence d'une forte minorité albanaise dans la population macédonienne. M. Robert Del Picchia a noté la récente implantation, sur le territoire macédonien, de la "force d'extraction" de l'OTAN chargée, le cas échéant, d'assurer l'évacuation des observateurs internationaux au Kosovo. Le rapporteur a également souligné l'importance, pour la Macédoine, de son rapprochement avec l'Union européenne, à laquelle elle est liée par un accord de coopération, la Macédoine étant désormais éligible au programme communautaire d'assistance PHARE. Puis, M. Robert Del Picchia, commentant les relations entre la Macédoine et la France, a relevé un certain dynamisme des relations culturelles bilatérales, et a fait observer que la France était considérée par la Macédoine comme un partenaire important dans la perspective du rapprochement avec l'Union européenne.

Abordant alors la situation en Hongrie, M. Robert Del Picchia a souligné l'importance déterminante, pour ce pays, de l'adhésion à l'Union européenne et, dès 1999, à l'OTAN. A cet égard, le rapporteur a noté l'incidence de l'adhésion à l'Alliance atlantique pour le budget de la défense hongrois, appelé à augmenter très sensiblement dans les prochaines années. M. Robert Del Picchia a, par ailleurs, relevé les conséquences favorables des ambitions de la Hongrie à l'égard de l'Union européenne sur la stabilité régionale, mentionnant notamment la signature de traités d'amitié bilatéraux avec la Roumanie et la Slovaquie, ainsi que l'apaisement survenu dans la protection, pour la Hongrie, de la minorité magyare de Slovaquie, et dans le contentieux sur le barrage de Gabcikovo-Nagymaros. M. Robert Del Picchia a enfin souligné que l'économie hongroise, considérée comme la plus performante de la zone d'Europe centrale et orientale, faisait de la Hongrie la première destination des investissements étrangers dans la région.

Evoquant les relations franco-hongroises, M. Robert Del Picchia a successivement relevé la régularité des échanges politiques, le dynamisme des relations culturelles, la densité des coopérations sectorielles entre les deux pays, notamment dans le domaine juridique et en ce qui concerne les jumelages, et les progrès récemment accomplis dans le domaine économique, la France étant aujourd'hui le troisième investisseur étranger en Hongrie.

Abordant enfin les évolutions récentes de la situation en Russie, M. Robert Del Picchia a présenté un rapide bilan de la crise d'août-septembre 1998. Il a notamment relevé le rôle joué, dans le déclenchement de cette crise, par l'absence de système fiscal fiable. Le rapporteur a également relevé le développement de féodalités locales susceptibles d'altérer l'avenir de la Fédération russe, féodalités dont la crise récente a confirmé la puissance. M. Robert Del Picchia a relevé, entre autres conséquences de la crise économique et financière, l'aggravation très sensible des difficultés des groupes sociaux les plus exposés, sans que ces difficultés aient pour autant conduit à l'explosion sociale prévue par certains. Le rapporteur a estimé que le gouvernement dirigé par M. Primakov poursuivrait vraisemblablement les réformes économiques auxquelles est subordonnée l'attribution du soutien financier international.

En ce qui concerne les relations bilatérales franco-russes, M. Robert Del Picchia a souligné la densité et le dynamisme des échanges culturels, de la coopération scientifique et technique, des échanges politiques, ainsi que des échanges interparlementaires. Le rapporteur a fait observer que le caractère relativement modeste des relations économiques bilatérales avait limité l'incidence de la crise économique et financière sur les implantations françaises sur le marché russe, par rapport aux conséquences subies par les pays plus engagés sur ce marché. Ainsi les banques françaises, a poursuivi M. Robert Del Picchia, sont-elles quatre fois moins engagées en Russie que les banques allemandes. M. Robert Del Picchia a estimé que la crise russe pourrait se traduire par une baisse non négligeable des échanges commerciaux franco-russes, essentiellement parce que les postes traditionnellement importants des exportations françaises en Russie (biens de consommation courante et produits agroalimentaires) sont tributaires du pouvoir d'achat des consommateurs.

M. Robert Del Picchia a alors invité la commission à donner un avis favorable à l'adoption de ces trois projets de loi.

A l'issue de l'exposé de M. Robert Del Picchia, Mme Josette Durrieu a évoqué les travaux effectués par l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe sur le dossier moldave, ainsi que dans le domaine du nucléaire civil et militaire en Russie par l'assemblée parlementaire de l'Union de l'Europe occidentale. Elle a fortement souligné l'importance du stock d'armes accumulées en Transdniestrie à partir des armes de la XIVe armée russe et de trafics originaires de Pologne, de Hongrie et de l'ex-République démocratique allemande. Mme Josette Durrieu a fait observer le rôle joué par les armes stockées en Transdniestrie dans les trafics constatés à destination du Kosovo et du Caucase.

M. Robert Del Picchia a estimé que certains des armements en question étaient en effet originaires de Hongrie.

M. Xavier de Villepin, président, a alors rappelé le rôle également joué par des trafics d'armes en provenance d'Europe de l'Est et de Russie dans l'instabilité de la région des grands lacs en Afrique, ces armes étant désormais négociées à des tarifs très bon marché.

Il a jugé très fragile l'accalmie actuellement constatée au Kosovo et a estimé que la situation en ex-Yougoslavie justifiait un certain pessimisme sur l'avenir de cette zone.

S'agissant de la Hongrie, M. Xavier de Villepin, président, a commenté le caractère incertain des échéances relatives à l'élargissement de l'Union européenne et a relevé les difficultés prévisibles dans le domaine des fonds structurels et de l'Agenda 2000.

Puis M. Xavier de Villepin, président, a relevé le rôle de la baisse du prix du pétrole dans la crise économique et financière russe. Il a souligné l'importance décisive, pour l'avenir de la Russie, de la mise en place d'une administration fiscale fiable, déplorant l'absence de progrès accomplis à ce jour dans ce domaine. Il est enfin revenu, avec le rapporteur, sur la "résignation" du peuple russe en dépit des épreuves traversées au cours de la dernière période.

La commission a alors, suivant l'avis de son rapporteur, successivement approuvé les trois projets de loi qui lui étaient soumis.

Exécution du budget de la défense en 1998 : Communication du président

La commission a enfin entendu une communication de M. Xavier de Villepin, président, sur l'exécution du budget de la défense en 1998.

M. Xavier de Villepin, président, a présenté les différents mouvements de crédits intervenus au cours de l'année 1998 sur le budget de la défense, en précisant qu'ils conduisaient à majorer les crédits du titre III de 4,5 milliards de francs alors que sur le titre V, les annulations s'élevaient à 7,3 milliards de francs. Il a toutefois ajouté que le ministère de la défense avait obtenu le report de crédits représentant 3,8 milliards de francs sur le titre V, qui provenaient de l'exercice 1997.

Evoquant d'abord les ouvertures de crédits au titre III, qui concernaient à hauteur de 3,8 milliards de francs les rémunérations et charges sociales et de 700 millions de francs les crédits de fonctionnement, M. Xavier de Villepin, président, a indiqué qu'elles visaient tout d'abord à financer le surcoût des opérations extérieures, qui s'élèverait en 1998 à 1,6 milliard de francs, chiffre moins élevé que l'an passé en raison du resserrement du dispositif militaire en Afrique et de la révision du mode de rémunération des personnels en opérations extérieures. Ces ouvertures, a-t-il poursuivi, sont également destinées à couvrir l'insuffisance des dotations en crédits de fonctionnement, en particulier pour la gendarmerie, ainsi qu'une évolution plus rapide que prévu des rémunérations et charges sociales et un besoin de financement supplémentaire relatif aux appelés volontaires pour un service long, dont le nombre a dépassé les effectifs budgétaires initialement autorisés.

M. Xavier de Villepin, président, a ensuite évoqué les annulations de crédits au titre V, qui ont atteint 7,3 milliards de francs et ont été partiellement compensées par l'octroi de crédits de report à hauteur de 3,8 milliards de francs. Il a observé que le dernier train d'annulations, au mois de novembre, se caractérisait par un solde négatif de 2,5 milliards de francs pour le ministère de la défense, montant dont il a relevé qu'il était rigoureusement identique à la dotation inscrite au budget des charges communes pour une nouvelle recapitalisation de GIAT-Industries. Il s'est inquiété de cet état de fait, dès lors que la loi de programmation militaire 1997-2002 exclut précisément que le budget de la défense soit ponctionné pour financer les recapitalisations des entreprises publiques de défense.

M. Xavier de Villepin, président, a par ailleurs souligné les grandes difficultés rencontrées par le ministère de la défense pour consommer ses crédits compte tenu de la réforme de la nomenclature budgétaire et des procédures d'investissement. Il a précisé que, sur un total de 77 milliards de francs de crédits d'équipements disponibles au titre V, 70 milliards de francs seulement pourront être consommés. Il s'est alors interrogé sur les conséquences d'un tel niveau de dépenses sur le déroulement des programmes, sur la possibilité pour le ministère de la défense d'obtenir en 1999 le report des 7 milliards de francs non consommés en 1998 et sur sa capacité, l'an prochain, à engager la totalité des crédits disponibles.

En conclusion, il a estimé que l'exécution du budget de la défense pour 1998 avait révélé les tensions de plus en plus vives s'exerçant sur le titre III, tout en mettant en lumière de sérieuses difficultés dans la gestion des crédits d'équipement.

M. Michel Caldaguès a alors considéré que l'ampleur des écarts entre le budget voté et le budget effectivement réalisé conduisait à s'interroger sur le rôle du Parlement dans le domaine des crédits de la défense. Il a douté que la réforme de la nomenclature budgétaire et ses incidences sur le rythme de consommation des crédits expliquent à elles seules le faible niveau des crédits effectivement engagés en 1998. Faisant remarquer que le ministère de la défense avait su, par le passé, gérer un volume de crédits beaucoup plus élevé, il s'est étonné que l'on évoque aujourd'hui une impossibilité de consommer l'intégralité des crédits d'un budget d'un montant plus réduit. S'agissant de la mise en oeuvre de la professionnalisation, il a relevé que le pouvoir politique n'avait pas su vaincre les résistances aux transferts vers les armées, prévus par la loi de programmation, de personnels civils des établissements de la délégation générale pour l'armement. En ce qui concerne le surcoût des opérations extérieures, il a déploré que, pour une part importante, il corresponde à des opérations non directement liées à nos intérêts nationaux. Il s'est enfin interrogé sur l'incidence de la révision des rémunérations sur l'attractivité des emplois concernés par les opérations extérieures.

M. Gérard Roujas s'est félicité d'avoir pu, au travers de la communication du président, mieux cerner les conditions réelles de l'exécution du budget de la défense. Il a considéré que c'est au vu de tels éléments que l'on pouvait juger en toute pertinence des choix effectués en matière de défense.

M. Christian de La Malène a vivement déploré que l'exécution du budget s'écarte une nouvelle fois des choix opérés par le Parlement. Il a estimé que ce dernier se trouvait ainsi déjugé et que les engagements qu'il avait pris, devant la Nation et la communauté militaire, lors du vote de la loi de programmation, n'étaient pas tenus.

M. Xavier de Villepin, président, a estimé que les conclusions d'exécution du budget de la défense suscitaient d'importantes interrogations, en particulier sur la consommation effective des crédits disponibles. Il a souhaité que le ministre de la défense puisse prochainement apporter sur ce point les éclaircissements nécessaires à la commission.