Travaux de la commission des affaires étrangères



Mercredi 6 avril 2005

- Présidence de M. Serge Vinçon, président -

Traités et conventions - Modalités de l'exercice par l'Etat de ses pouvoirs de police en mer - Examen du rapport

La commission a tout d'abord examiné le rapport de M. André Boyer sur le projet de loi n° 253 (2004-2005), adopté par l'Assemblée nationale, modifiant certaines dispositions législatives relatives aux modalités de l'exercice par l'Etat de ses pouvoirs de police en mer.

M. André Boyer, rapporteur, a tout d'abord rappelé que le principe de la liberté de navigation et son corollaire d'exclusivité de la loi du pavillon restaient un impératif essentiel pour une puissance maritime comme la France. La convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982 ne prévoit que de rares exceptions à ce principe, qui portent sur les actes de piraterie, la traite des esclaves et les émissions de radio non autorisées. Le droit international a également apporté des aménagements au principe de la loi du pavillon pour lutter contre deux formes de criminalité en mer : le trafic de stupéfiants et le trafic de migrants.

M. André Boyer, rapporteur, a indiqué qu'en droit interne, les modalités de l'exercice par l'Etat de ses pouvoirs en mer étaient définies par la loi du 15 juillet 1994. Cette loi a été adaptée une première fois en 1996, pour tenir compte des stipulations particulières issues de la convention de Vienne contre le trafic de stupéfiants. Elle permet l'exercice de pouvoirs de contrôle, c'est-à-dire l'identification du navire, sa visite et éventuellement son déroutement, mais aussi de pouvoirs de coercition, sous forme de tirs d'avertissement, d'actions de vive force et éventuellement de tirs au but. La loi déroge aux règles de la procédure pénale pour prendre en considération des spécificités de la police des stupéfiants en haute mer. Elle habilite les commandants de bord à rechercher, à constater les infractions et à prendre les mesures nécessaires pour qu'une suite judiciaire puisse leur être donnée.

M. André Boyer, rapporteur, a souligné que deux raisons principales justifiaient une nouvelle adaptation de la loi de 1994 : le besoin de certaines précisions pour assurer la sécurité juridique des opérations effectuées en mer et la nécessité de transposer les stipulations du protocole du 15 décembre 2000 relatif à la lutte contre le trafic de migrants. L'Assemblée nationale a modifié ce texte par des amendements rédactionnels, mais a aussi apporté des précisions de nature à sécuriser la procédure, en prévoyant que l'absence de remise d'une copie du procès-verbal à la personne intéressée en matière de trafic de migrants n'entachait pas de nullité, pour autant, la procédure. Elle a également prévu la possibilité, pour le Procureur de la République, d'ordonner, dans les collectivités d'outre-mer, la destruction des embarcations dépourvues de pavillon ayant servi à commettre le trafic de stupéfiants ou le trafic de migrants. M. André Boyer, rapporteur, a estimé que l'effet de cette mesure de destruction était très dissuasif, à l'exemple des destructions opérées en Guyane en matière d'orpaillage clandestin. Placée sous le contrôle du Procureur de la République, cette procédure reste une faculté et ne sera pas systématique.

M. André Boyer, rapporteur, a ensuite détaillé les précisions apportées par le texte de nature à assurer la sécurité juridique des opérations. Il a indiqué qu'elles devaient être appréciées au regard de l'arrêt de la Cour de cassation du l5 janvier 2003 sur l'arraisonnement du Winner. Ce navire, battant pavillon cambodgien, avait été arraisonné par un bâtiment de la marine nationale au mois de juin 2002, après que le Cambodge eut donné son accord à cette intervention. Le trafic de stupéfiants a été constaté à bord après une intervention des commandos-marine en raison du comportement inamical de l'équipage. L'équipage a formé un recours au double motif que le Cambodge n'était pas signataire de la convention de Vienne et que la rétention des hommes dans leurs cabines pendant quinze jours était contraire aux règles classiques de la garde à vue. La Cour de cassation a validé l'opération d'arraisonnement du Winner, mais a fait apparaître la nécessité de préciser le texte.

M. André Boyer, rapporteur, a ainsi indiqué qu'en supprimant toute référence à la convention de Vienne, le projet de loi élargissait les possibilités d'intervention à l'égard de tout navire dont l'Etat du pavillon aurait sollicité ou agréé l'intervention des autorités françaises. Le texte précise également que pendant la durée du transit nécessaire aux opérations de déroutement, les agents de l'Etat dûment habilités pouvaient prendre les mesures de coercition nécessaires et adaptées en vue d'assurer la préservation du navire et de sa cargaison et la sécurité des personnes se trouvant à bord.

M. André Boyer, rapporteur, a ensuite évoqué l'adaptation de la loi aux nouvelles possibilités offertes par le droit international. Il a tout d'abord indiqué qu'en vertu d'accords régionaux pris sur la base de la convention de Vienne, des Etats pouvaient s'accorder sur la possibilité d'intervention des navires d'autres Etats dans leurs eaux territoriales pour réprimer le trafic de stupéfiants. L'accord signé à San José le 10 avril 2003 entre les pays de la Caraïbe prévoit ainsi la possibilité pour les Etats de donner un accord a priori à l'intervention des navires des autres parties sur un navire battant leur pavillon ou navigant dans leurs eaux territoriales. Le projet de loi élargit donc le champ d'intervention des autorités habilitées aux navires situés dans les espaces maritimes sous souveraineté d'un Etat étranger en accord avec celui-ci.

La possibilité d'intervenir en haute mer sur des navires battant pavillon d'un autre Etat pour lutter contre le trafic de migrants fait l'objet de l'insertion d'un titre spécifique dans le texte, qui reprend des dispositions similaires à celles en vigueur pour la lutte contre le trafic de stupéfiants. En matière de trafic de migrants, le texte concerne les navires battant pavillon d'un Etat qui a sollicité l'intervention de la France ou agréé sa demande d'intervention, ainsi que les navires n'arborant aucun pavillon ou sans nationalité. Lorsqu'il existe des motifs raisonnables de soupçonner qu'un navire se livre au trafic de migrants, les personnels habilités chargés de la surveillance en mer peuvent prendre les mesures de contrôle et de coercition prévues par la loi. Le commandant peut faire procéder à la saisie des objets ou des documents liés aux infractions, les placer sous scellés et ordonner le déroutement du navire. Tout comme pour le trafic de stupéfiants, le texte établit la compétence des juridictions françaises lorsque des accords internationaux le prévoient ou avec l'accord de l'Etat du pavillon.

M. André Boyer, rapporteur, a estimé que le projet de loi assurait et complétait de façon opportune le dispositif existant. Il a recommandé l'adoption du projet de loi dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Robert Bret a estimé que le projet de loi consistait, pour l'essentiel, en une transposition des stipulations de textes internationaux. Il s'est interrogé sur la répartition entre les compétences nationales et les compétences européennes en mer. Il a par ailleurs relevé que si l'action de la marine semblait se développer dans le domaine des contrôles en mer, les services des douanes, en revanche, ne paraissaient plus être en mesure de répondre à ces missions.

Mme Catherine Tasca a considéré que le projet de loi améliorait la sécurité juridique, mais qu'il convenait que les moyens mis en oeuvre soient concordants ; or, a-t-elle estimé, la réduction des moyens des services des douanes est significative.

M. André Boyer, rapporteur, a rappelé que la commission l'avait chargé, avec M. Jean-Guy Branger, de préparer un rapport d'information sur l'action de l'Etat en mer, qui devrait apporter des réponses au sujet des moyens mis en oeuvre. Evoquant la réforme des moyens maritimes de la douane, il a insisté sur la nécessité d'apprécier l'évolution de la présence à la mer effective des moyens des douanes, et non le seul nombre de bâtiments affectés à ses missions.

La commission a ensuite adopté le projet de loi.

Nomination d'un rapporteur

Puis la commission a désigné M. Daniel Goulet comme rapporteur sur le projet de loi n° 246 (2004-2005),adopté par l'Assemblée nationale,autorisant l'approbation du protocole additionnel à la convention sur letransfèrement des personnes condamnées.

Loi organique relative aux lois de finances - Mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 - Audition de M. Jean Arthuis, président de la commission des finances

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation, sur la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

Après que M. Serge Vinçon, président, l'eut remercié de venir présenter devant la commission les implications de la mise en oeuvre de la nouvelle structure budgétaire, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a souligné que la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) ne devait pas être considérée comme un texte austère et complexe, mais comme un outil permettant aux parlementaires de mieux appréhender la réalité du budget de l'Etat. Il a rappelé que l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 n'était plus adaptée au contexte actuel et ne permettait pas un contrôle suffisant de l'efficacité de la dépense publique. Il a estimé que le nouveau cadre budgétaire, adopté sur une initiative parlementaire supra-partisane, visait pour sa part à améliorer la gestion publique tout en assurant une meilleure information et un meilleur contrôle du Parlement, ce dernier pouvant mieux mesurer la performance et les résultats, au-delà d'une approche strictement quantitative.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a ensuite commenté la nouvelle présentation du budget de l'Etat, telle qu'elle résulte de la mise en oeuvre de la LOLF.

La nouvelle nomenclature budgétaire substitue une logique d'efficacité à une logique de régularité de la dépense publique. Elle regroupe les crédits par finalité, au sein de 34 missions ministérielles ou interministérielles, elles-mêmes subdivisées en 132 programmes ministériels visant à mettre en oeuvre ces politiques.

Chaque mission correspond à une politique publique et ne peut être créée que par la loi de finances, sur initiative gouvernementale. La mission constitue l'unité de vote du Parlement qui, sans en majorer le montant global, peut modifier la répartition des crédits entre les programmes qui la composent.

Chaque programme regroupe pour sa part les crédits destinés à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère et auquel sont associés des objectifs précis, ainsi que des résultats attendus faisant l'objet d'une évaluation. Au sein du programme, la gestion des crédits est soumise au principe de la fongibilité dite « asymétrique », des transferts de crédits pouvant intervenir à l'intérieur du programme à condition, toutefois, de ne pas majorer les crédits de personnel.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a commenté la nouvelle « maquette » budgétaire présentée en juin 2004, en précisant que dans les domaines de compétence de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, les crédits relèveraient des missions interministérielles « aide publique au développement » et « sécurité » et des missions ministérielles « action extérieure de l'Etat », « défense » et « mémoire et liens avec la Nation ». Il a détaillé le contenu de la future mission « défense », comprenant quatre programmes : environnement et prospective de la politique de défense, préparation et emploi des forces, soutien de la politique de défense, équipement des forces.

Abordant les enjeux de la nouvelle structure budgétaire, il a considéré qu'elle devait renouveler le rôle du Parlement en lui permettant de tenir un débat budgétaire enrichi et en mettant davantage l'accent sur le contrôle de l'exécution des lois de finances. Il a souligné, à cet égard, le déséquilibre entre le temps réservé à l'examen du projet de loi de finances et celui consacré aux lois de règlement, qui traduisent cependant la réalité de la gestion budgétaire de l'Etat. Il a ajouté qu'il ne serait pas anormal de disposer, chaque printemps, d'une semaine complète pour discuter de l'exécution budgétaire de l'année précédente.

Il a d'autre part souligné la réforme de la comptabilité de l'Etat induite par la LOLF et le besoin de renforcer les moyens d'information et de contrôle du Parlement, notamment avec l'appui de la Cour des comptes.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a estimé que la LOLF permettait un renforcement du rôle des commissions pour avis, en reliant les moyens budgétaires à la mise en oeuvre d'une politique publique, en augmentant le nombre des informations transmises au Parlement et en recentrant le travail de ce dernier sur la performance et l'analyse des résultats en loi de règlement. Le débat budgétaire sera considérablement enrichi et modernisé, la totalité des crédits devant alors être justifiée et discutée par mission « dès le premier euro », alors que jusqu'à présent 94 % des crédits étaient reconduits presque automatiquement d'une année sur l'autre. L'exécution budgétaire bénéficiera, quant à elle, d'un suivi mieux assuré. Les virements de crédits, consistant à modifier la répartition de ces derniers entre les programmes en changeant l'objet de la dépense, ne pourront pas porter sur plus de 2 % des crédits initiaux de chaque programme. Les annulations de crédits ne pourront dépasser 1,5 % des crédits ouverts par les lois de finances de l'année en cours et les reports de crédits d'un exercice à l'autre seront limités à 3 % des crédits initiaux du programme. Les commissions permanentes concernées seront informées de toute modification de la répartition des crédits ou de leur annulation au cours de l'exécution du budget.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a précisé que la LOLF allait s'accompagner d'une réforme de la comptabilité de l'Etat visant à appliquer le principe de sincérité, ainsi que les principes de la comptabilité des entreprises. Il a insisté sur l'impact que devrait avoir la mise en place d'une comptabilité analytique, ainsi que la certification de la régularité et de la sincérité des comptes de l'Etat par la Cour des comptes. A cet égard, rappelant que les crédits de la Cour des comptes étaient rattachés à la mission « gestion et contrôle des finances publiques », il a estimé que les crédits alloués à l'autorité de certification ne devaient pas être rattachés à ceux du certifié. Il a déclaré que la commission des finances serait par conséquent favorable au souhait du premier président de la Cour des comptes de placer cette instance à équidistance de l'exécutif et du Parlement. Il a considéré que cette nouvelle comptabilité apporterait aux comptes de l'Etat davantage de transparence en rattachant les charges et les produits à l'exercice, en offrant une meilleure connaissance du patrimoine de l'Etat et en présentant ses engagements hors bilan, tels que la dette de certaines entreprises publiques.

S'agissant de l'information du Parlement sur l'efficacité de la dépense publique, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a indiqué que pour chaque programme devrait être mis en place, dans le cadre du projet de loi de finances de l'année, un projet annuel de performances présentant la stratégie, les objectifs, les indicateurs de résultats et les dépenses prévisionnelles, et dans le cadre du projet de loi de règlement, un rapport annuel de performances établissant le compte rendu des dépenses effectuées. Il a ajouté que les indicateurs de performance permettraient de vérifier si les objectifs avaient été atteints, en appréciant l'efficacité socio-économique et la pertinence de la dépense par rapport à l'intérêt général, la qualité du service rendu à l'usager et l'efficience de la gestion.

Il a estimé que le succès de la nouvelle « Constitution financière » supposait que le culte des indicateurs ne se substitue pas, dans une dérive technocratique, à la culture de la performance. Il a par ailleurs souligné la nécessité de vaincre les résistances au changement et de disposer d'un outil informatique fiable pour le suivi budgétaire et comptable de l'Etat. Il a souhaité une mobilisation de toutes les commissions parlementaires dans la mise en oeuvre de cette réforme.

En conclusion, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a précisé qu'une première réforme de la loi organique était en cours, en vue notamment d'encadrer l'affectation des éventuels surplus de recettes, d'améliorer l'information du Parlement sur les emplois rémunérés par les organismes bénéficiaires d'une subvention pour charge de service public et de veiller à ce que les partenariats public-privé et autres « financements innovants » fassent l'objet devant le Parlement d'une autorisation d'engagement couvrant la totalité de la dépense et figurent au sein de la dette des administrations publiques lorsque l'Etat supporte la plupart des risques liés à la propriété des actifs. Considérant que la LOLF devait être un outil de réforme de l'Etat, il a souhaité qu'elle entraîne une rationalisation de l'organisation administrative afin d'améliorer la performance de l'action publique. Il a jugé que la nouvelle maquette budgétaire pourrait aboutir à une délimitation plus pertinente des portefeuilles ministériels et qu'elle apporterait une plus grande souplesse à la gestion des ressources humaines, facilitant une évolution des corps de l'administration.

M. Serge Vinçon, président, se référant au programme : « préparation et emploi des forces », figurant dans la mission « défense », a posé le problème du financement des OPEX (opérations extérieures) dont le surcoût est, pour la première fois, prévu dans le projet de loi de finances à hauteur de 100 millions d'euros, alors que cette somme ne représente que le sixième des besoins réels. Il s'est également interrogé sur le principe de fongibilité asymétrique.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a indiqué qu'auparavant le surcoût des OPEX, et notamment la rémunération supplémentaire des militaires y participant, n'était pas prévue dans le budget initial et ne figurait que dans le collectif budgétaire de fin d'année. Or, il faut que le Gouvernement expose clairement ses arbitrages au moment de la présentation de la loi de finances initiale en y incluant une évaluation sincère du coût des OPEX. Il a ajouté qu'il était par ailleurs nécessaire de clarifier les reports budgétaires et précisé que la fongibilité asymétrique des crédits permettait au gestionnaire d'affecter des dépenses de personnel à des dépenses de fonctionnement, d'investissement ou d'intervention, alors que l'opération inverse était impossible.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis des crédits des relations culturelles extérieures, a demandé s'il n'était pas nécessaire que le Gouvernement fournisse aux parlementaires des tableaux de concordance entre les budgets votés pour l'année 2005 et le projet de loi de finances pour 2006, en les présentant tous deux en « format » LOLF. Elle a également abordé le problème du contrôle de l'aide publique française au développement, dont plus de 50 % relève du traitement de la dette des pays bénéficiaires. Or, seule une faible part de ces dépenses figure dans la mission interministérielle « aide au développement ». Comment pourrait-on assurer une meilleure information du Parlement sur ce type de dépense ?

Elle a enfin regretté que le ministère des affaires étrangères ait calqué la structuration de ses programmes LOLF sur les services et structures administratifs existants, ce qui ne permet pas par exemple de contrôler les crédits émanant de l'Education nationale concourant à l'action extérieure.

En ce qui concerne l'aide au développement, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a précisé que l'une des treize missions correspondant à des comptes spéciaux du Trésor était intitulée « prêt à des Etats étrangers » et qu'il conviendrait de joindre l'analyse de ces crédits à celle de la mission « aide au développement » à l'occasion de la discussion budgétaire. Il a estimé que le regroupement de tous les crédits consacrés à l'action extérieure de l'Etat était un objectif vers lequel il fallait tendre, mais qu'il serait difficile à réaliser, compte tenu de l'importance des crédits gérés par le ministère de l'Education nationale.

M. André Boyer, rapporteur pour avis des crédits de la Marine, a abordé le problème d'éventuels financements dits « innovants », qui ne sont pas intégrés dans le budget et s'est demandé à quel moment et de quelle manière, dans la mesure où la LOLF exigeait que des autorisations d'engagement soient mobilisées dès la commande, ces financements innovants seraient affectés à la dette de l'Etat.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a estimé que les financements innovants pouvaient être un moyen d'échapper à la sincérité budgétaire. L'autorisation d'engagement est une prérogative du Parlement qui doit s'appliquer à tous les engagements financiers de l'Etat, y compris lorsqu'ils sont opérés selon une formule de financements innovants. Il a jugé que les dettes résultant de tels financements devaient être inscrites en totalité dans le budget.

M. André Boyer, rapporteur pour avis des crédits de la Marine, a exprimé ses inquiétudes sur le report des autorisations d'engagement : la LOLF les limite strictement à l'échelle du programme. Or, des programmes importants comme ceux des Frégate de la Marine ou du second porte-avions ont fait l'objet de décalage. Comment est appréciée dans ce cas la notion d'autorisations d'engagements disponibles, sachant que le programme « équipement des forces » regroupe l'ensemble des crédits d'équipement de la Défense ?

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a répondu qu'il y avait un décalage entre les autorisations d'engagement portant sur une opération, éventuellement pluriannuelle, et les crédits de paiement inscrits annuellement dans la loi de finances. Ces reports de crédits sont plafonnés à 3 % au maximum des crédits initiaux du programme concerné.

M. André Boyer, rapporteur pour avis des crédits de la Marine, a abordé le problème de la différence des indicateurs de performance relatifs à une même politique au sein de ministères différents : ainsi le décompte des heures de mer pour les administrations intervenant dans le cadre de l'action de l'Etat en mer n'est pas le même pour les douanes, la marine, les transports.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a confirmé qu'il était indispensable de demander aux différents ministères de se plier à des règles de coordination en distinguant ce qui pouvait leur être vraiment spécifique de ce qui leur était commun.

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis des crédits du ministère des affaires étrangères, s'est félicité que la LOLF constitue un progrès considérable pour le contrôle parlementaire et s'est inquiété de savoir si, dès 2006, tous les moyens de sa mise en oeuvre seraient disponibles.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a indiqué que, pour l'essentiel, tout serait prêt à temps et que cette réforme ne concernait d'ailleurs pas seulement les administrations, mais aussi le Parlement, qui devait renforcer sa fonction de contrôle, faisant valoir que les services ministériels eux-mêmes pouvaient tirer un grand bénéfice de cette démarche parlementaire active.

M. Jacques Pelletier s'est interrogé sur la justification de deux programmes distincts dédiés à l'aide publique au développement ; il a souhaité savoir qui « labellisait » les indicateurs de performance et a estimé, par ailleurs, que l'application de la LOLF devrait s'accompagner d'un desserrement du « carcan » de Bercy.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a répondu, d'une part, que l'existence de deux programmes au sein de la mission « aide publique au développement » s'expliquait par la participation de deux ministères, le ministère des affaires étrangères et celui de l'économie et des finances ; d'autre part, il a précisé que la définition des indicateurs de performance était de la responsabilité du Gouvernement. Il a indiqué que dans un récent rapport d'information, la commission des finances avait relevé que certains de ces indicateurs s'apparentaient à des « leurres », sans lien avec le budget, alors que l'objectif de la nouvelle architecture est de mesurer l'efficacité de la dépense publique. Quant au « carcan de Bercy », il a souligné que la construction budgétaire relevait en fait d'un arbitrage gouvernemental.

M. Jean François-Poncet s'est interrogé sur les conséquences d'une non- certification de la sincérité des comptes de l'Etat par la Cour des Comptes. Par ailleurs, il a demandé des précisions sur la prise en compte de l'aménagement du territoire dans la nouvelle architecture budgétaire.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a précisé qu'avant de refuser éventuellement une certification des comptes, la Cour des Comptes serait amenée à demander, en amont, la correction des anomalies constatées. Il a ajouté que deux autres types de sanction pourraient survenir : celle de l'opinion publique d'abord, mais aussi des agences de notation indépendantes.

Il a observé que le nouveau rôle de certification des comptes publics par la Cour des Comptes rendait indispensable un nouveau positionnement de celle-ci par rapport à l'Etat, à équidistance de l'exécutif et du Parlement, comme la commission des finances l'avait demandé l'an dernier.

L'aménagement du territoire est inclus dans la mission interministérielle « politique des territoires ». Chaque programme ne pouvant dépendre que d'un ministère, l'aménagement du territoire constitue un programme au sein de cette mission.

M. Yves Pozzo di Borgo s'est demandé si l'une des conséquences positives de la LOLF ne devrait pas être le changement de l'architecture gouvernementale et de l'organisation administrative, avec 34 ministres (pour les 34 missions) et 132 directeurs d'administration centrale (pour les 132 programmes). Il a proposé que toutes les commissions du Sénat oeuvrent conjointement avec la commission des finances dans leurs relations avec les services de l'Etat.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a convenu que la définition du périmètre de l'Etat posait problème. Il est possible de confier à un ministre plusieurs missions, mais il serait bon, dans bien des cas, de modifier les organigrammes des ministères pour identifier un responsable pour chaque programme, regrettant que plusieurs programmes puissent être gérés par un même responsable. Il a ajouté que la commission des finances travaillerait en étroite collaboration avec les commissions saisies pour avis, y compris à l'occasion des contrôles sur pièce et sur place effectués par ses rapporteurs spéciaux.

M. Didier Boulaud a espéré que la LOLF permettrait enfin d'exécuter intégralement les lois de programmation militaire ; il a par ailleurs évoqué l'inquiétude des agents de l'Etat non formés à l'utilisation des systèmes comptables ou informatiques liés à la mise en oeuvre de la LOLF.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a confirmé qu'il lui semblait indispensable de procéder à des expertises régulières en amont de toutes les lois de programmation afin de s'assurer de leur cohérence avec les lois de finances annuelles ; il a par ailleurs jugé nécessaire que la comptabilité publique mette ses agents à la disposition des autres fonctionnaires, afin de les assister dans la mise en oeuvre des nouvelles procédures.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a précisé à Mme Hélène Luc que la commission des finances, dans le cadre de sa mission de contrôle budgétaire, pouvait recourir à des cabinets extérieurs spécialisés pour effectuer une étude sur un thème identifié. Il a rappelé, à cet égard, qu'aux Etats-Unis, le GAO (General Accounting Office) disposait de 4 000 auditeurs.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a souhaité que la nouvelle procédure du débat budgétaire permette d'écourter la discussion de la loi de finances initiales (LFI) pour consacrer plus de temps à la loi de règlement, dont l'examen correspond bien au contrôle de l'utilisation effective des crédits. Mme Hélène Luc a souhaité, pour sa part, conserver au débat sur la LFI sa durée actuelle, nécessaire à l'analyse de la politique gouvernementale.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a indiqué à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, qu'il était parfaitement disposé à associer la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées à des travaux d'intérêt commun conduits par la commission des finances. Il a suggéré le principe d'auditions communes, à l'exemple de la prochaine audition contradictoire à laquelle donnerait lieu le rapport sur la direction des constructions navales (DCN) réalisé par la Cour des Comptes à la demande de la commission des finances du Sénat dans le cadre des dispositions de l'article 58-2 de la LOLF.

A Mme Dominique Voynet qui s'inquiétait de l'absence de compatibilité des systèmes informatiques employés par les divers services comptables, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a répondu que la normalisation était en cours et qu'il était nécessaire de l'activer. Il lui a également précisé que les 13 missions, hors budget général de l'Etat et correspondant pour la plupart aux comptes spéciaux du Trésor, ne couvraient que des budgets ne comportant pas d'enjeux budgétaires majeurs et ne concernaient pas, en tout état de cause, les agences de l'eau.