ARTICLE 4 BIS (DEVENU ARTICLE 11 DE LA LOI DE FINANCES POUR 2012)
RENFORCEMENT DES CLAUSES ANTI-ABUS DU RÉGIME DE TAXATION RÉDUITE DES CONCESSIONS DE BREVETS

I. DÉBATS AN PREMIÈRE LECTURE (DEUXIÈME SÉANCE DU JEUDI 20 OCTOBRE 2011)

http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2011-2012/20120021.asp#P590_118246

Article additionnel après l'article 4

M. le président. L'amendement n° 50 rectifié présenté par M. Carrez, Rapporteur général au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer l'article suivant :

I. - L'article 39 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa du 12 est ainsi rédigé :

« 12. Lorsqu'il existe des liens de dépendance entre l'entreprise concédante et l'entreprise concessionnaire, le montant des redevances prises en compte pour le calcul du résultat net imposable selon le régime mentionné au 1 de l'article 39 terdecies n'est déductible du résultat imposable de l'entreprise concessionnaire que dans le rapport existant entre le taux réduit prévu au cinquième alinéa du I de l'article 219 et le taux normal prévu au deuxième alinéa du même I. Le présent alinéa n'est pas applicable lorsque l'entreprise concessionnaire apporte, dans le cadre de la documentation mentionnée à l'avant-dernière phrase du dixième alinéa de l'article 39 terdecies , la preuve que l'exploitation de la licence ou du procédé concédé, d'une part, lui crée, sur l'ensemble de la période de concession, une valeur ajoutée et, d'autre part, est réelle et ne peut être regardée comme constitutive d'un montage artificiel dont le but serait de contourner la législation fiscale française.»

2° Il est ajouté un 12 bis ainsi rédigé :

« 12 bis . Le montant des redevances dues par une entreprise concédant une licence ou un procédé pris en concession n'est déductible que du résultat net de cette entreprise imposable selon le régime mentionné au 1 de l'article 39 terdecies .

« L'excédent du montant total des redevances sur le résultat net mentionné au premier alinéa n'est déductible du résultat imposable de l'entreprise mentionnée au premier alinéa que dans le rapport existant entre le taux réduit prévu au cinquième alinéa du I de l'article 219 et le taux normal prévu au deuxième alinéa du même I.

« Une fraction égale à 18/33,33 ème du montant des redevances déduites du résultat imposable au taux normal et afférentes à des licences et procédés donnés en concession au cours d'un exercice ultérieur est rapportée au résultat imposable au taux normal de l'exercice en cours à la date à laquelle l'entreprise qui en est concessionnaire les concède, sauf si cette entreprise satisfait la condition mentionnée à la deuxième phrase du premier alinéa du 12 à raison de la période couverte par les exercices au cours desquels ces redevances ont été déduites au taux normal. Le présent alinéa est applicable au montant des redevances déduites au cours des exercices couvrant l'une des trois années précédant la date à laquelle l'entreprise concessionnaire concède les licences ou procédés. »

II. - Le I est applicable aux exercices ouverts à compter du 13 octobre 2011.

La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° 50 rectifié.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement s'inscrit dans le cadre du travail que nous avons conduit sur l'impôt sur les sociétés, qui a d'ailleurs donné lieu à des mesures dès le collectif de septembre, dont la limitation des reports déficitaires.

Je souhaiterais d'abord vous remercier, madame la ministre, ainsi que vos collaborateurs, car le sujet était assez délicat et vous nous avez beaucoup aidés. J'ai déjà dit de quoi il retourne dans mon rapport du mois de juillet. Il y a aujourd'hui des risques d'optimisation fiscale liés à une disposition récente - adoptée il y a un an, elle n'est pas encore vraiment entrée en application - qui porte sur les sous-concessions de brevets.

De quoi s'agit-il ? Lorsqu'une entreprise détient un brevet qu'elle loue à une autre société, celle-ci, qui devient concessionnaire du brevet, peut déduire de ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés le loyer qu'elle paye à l'entreprise propriétaire. La déduction est de 33 %. Mais, pour encourager l'élaboration et le maintien de brevets en France, nous avons depuis longtemps déjà mis en place un dispositif selon lequel la redevance dont bénéficie l'entreprise louant un brevet est, quant à elle, imposée à un taux de 15 %.

Il y a donc une dissymétrie : on peut déduire la charge du brevet à 33 %, tandis que la recette tirée de la location est à 15 %. Or dans le régime de sous-concession, on peut avoir la situation suivante : l'entreprise qui loue le brevet déduit la redevance à 33 % et peut servir de boîte aux lettres pour sous-concéder à une autre entreprise. À ce moment, celle-ci bénéficiera du taux de 15 %. Vous voyez l'avantage : si je sers simplement de boîte aux lettres, je déduis à 33 % et ne suis imposé, au titre de la sous-concession, qu'à 15 %. Dès qu'il existe de telles dissymétries entre le taux de réduction des charges et l'imposition des recettes, on risque d'avoir des comportements d'optimisation.

L'amendement vise donc à n'accepter l'application du taux réduit de la recette à 15 % qu'au titre de la valeur ajoutée apportée par le concessionnaire qui sous-loue. Par exemple, dans l'industrie pharmaceutique, un brevet d'une entreprise peut être concédé à une autre entreprise, qui va à son tour concéder le principe actif. L'entreprise concessionnaire va apporter une innovation, par exemple dans le conditionnement. Dès lors, elle sous-concédera ce brevet. Au titre de son innovation, la redevance de la sous-concession restera bien imposée à 15 %, mais le principe actif, qui relevait de la première entreprise, reste, lui, imposé à 33 %. Ai-je été clair ? (Sourires.)

M. Jérôme Chartier. Très clair !

M. Patrice Martin-Lalande. Comme toujours !

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Je l'espère.

Un autre sujet, sans rapport avec la sous-concession, est également traité dans cet amendement. Il s'agit d'harmoniser les conditions qui permettent à l'entreprise de déduire au taux normal lorsque c'est une entreprise liée.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Le Gouvernement s'en remettra à la sagesse du rapporteur général.

M. Charles de Courson. Qui est grande !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Il s'agit d'un régime qui a été modifié dans le cadre de la loi de finances pour 2011.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Voilà !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Vous savez que le Gouvernement a voulu donner une impulsion très forte en faveur de l'exploitation des brevets en France.

Il reste aujourd'hui des zones d'ombre, que le rapporteur général a très bien identifiées, s'agissant notamment des concessions de brevets entre entreprises liées et des sous-concessions.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Je vous propose une adaptation du dispositif.

Mme Valérie Pécresse, ministre. L'objectif du rapporteur général est de faire en sorte que l'exploitation des brevets soit réalisée en France. Le Gouvernement s'en remettra donc à sa sagesse pour l'amélioration du dispositif voté en 2011.

(L'amendement n° 50 rectifié est adopté.)