II. TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE

Article 5 bis (nouveau)

I. - Le code du cinéma et de l'image animée est ainsi modifié :

1° L'article L. 115-6 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Est également regardée comme distributeur de services de télévision toute personne proposant un accès à des services de communication au public en ligne ou à des services de téléphonie, dès lors que la souscription à ces services permet de recevoir, au titre de cet accès, des services de télévision. » ;

2° Le 2° de l'article L. 115-7 est ainsi rédigé :

« 2° Pour les distributeurs de services de télévision :

« a) Des abonnements et autres sommes acquittés par les usagers, à l'exclusion de ceux qui sont passibles de l'impôt sur les sociétés, en rémunération d'un ou plusieurs services de télévision. Le produit de ces abonnements et autres sommes fait l'objet d'une déduction de 10 % ;

« b) Des abonnements et autres sommes acquittés par les usagers, à l'exclusion de ceux qui sont passibles de l'impôt sur les sociétés, en rémunération des offres, composites ou de toute autre nature, donnant accès à des services de communication au public en ligne ou à des services de téléphonie, dès lors que la souscription à ces services permet de recevoir, au titre de cet accès, des services de télévision. Le produit de ces abonnements et autres sommes fait l'objet d'une déduction de 55 %. » ;

3° L'article L. 115-9 est ainsi modifié :

a) Les a à i du 2° sont remplacés par des a à d ainsi rédigés :

« a) 0,5 % pour la fraction supérieure à 10 000 000 € et inférieure ou égale à 250 000 000 € ;

« b) 2,10 % pour la fraction supérieure à 250 000 000 € et inférieure ou égale à 500 000 000 € ;

« c) 2,80 % pour la fraction supérieure à 500 000 000 € et inférieure ou égale à 750 000 000 € ;

« d) 3,50 % pour la fraction supérieure à 750 000 000 € ; »

b) Après le mot : « au », la fin de la dernière phrase du 3° est ainsi

rédigée : « d du 2° est majoré de 5,25. »

II. - Le I entre en vigueur à une date fixée par décret qui ne peut être postérieure au 1er janvier 2013.

III. RAPPORT SÉNAT N°107 (2011-2012) TOME II

Commentaire : le présent article, introduit par l'Assemblée nationale, aménage le barème, précise le champ des redevables et redéfinit l'assiette de la taxe sur les services de télévision (TST) affectée au Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC).

I. LE DISPOSITIF INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article additionnel a été adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, sur avis favorable de la commission des finances.

A. LA TAXE SUR LES SERVICES DE TÉLÉVISION

1. Le régime de la taxe

Codifiée aux articles L. 115-6 et L. 115-7 du code du cinéma et de l'image animée, la taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision 1 ( * ) (TST) est due par deux types de redevables que sont les éditeurs de services de télévision (les chaînes) et les distributeurs de ces services, soit les commercialisateurs de programmes, par exemple sous forme de bouquets de chaînes.

La part « distributeurs » de la taxe, seule concernée par le présent article , a pour assiette 90 % du montant hors TVA des abonnements et autres sommes acquittés par les usagers en rémunération d'un ou plusieurs services de télévision . A cette assiette est appliqué le barème suivant, avec une franchise de 10 millions d'euros :

Fraction du chiffre d'affaires

Taux

Supérieure à 10 millions d'euros et inférieure ou égale à 75 millions d'euros

0,5 %

Supérieure à 75 millions d'euros et inférieure ou égale à 140 millions d'euros

1 %

Supérieure à 140 millions d'euros et inférieure ou égale à 205 millions d'euros

1,5 %

Supérieure à 205 millions d'euros et inférieure ou égale à 270 millions d'euros

2 %

Supérieure à 270 millions d'euros et inférieure ou égale à 335 millions d'euros

2,5 %

Supérieure à 335 millions d'euros et inférieure ou égale à 400 millions d'euros

3 %

Supérieure à 400 millions d'euros et inférieure ou égale à millions d'euros

3,5 %

Supérieure à 465 millions d'euros et inférieure ou égale à 530 millions d'euros

4 %

Supérieure à 530 millions d'euros

4,5 %

Les offres composites proposées par les fournisseurs d'accès à internet (FAI), c'est-à-dire associant services de télévision, accès à internet et téléphonie, sont soumises à la taxe. Dans ce cas particulier, elle est assise sur la seule part de cette offre correspondant aux services de télévision . Cette part était, avant la loi de finances pour 2011, forfaitairement fixée à 50 % du prix global de l'offre composite, par décalque du régime de TVA à taux réduit applicable à ces mêmes offres. Une réfaction de 10 % était opérée sur cette assiette forfaitaire, qui portait son montant exact à 45 % du prix de l'offre composite.

La loi de finances ayant supprimé le taux réduit de TVA applicable à 50 % du prix des offres composites proposées par les fournisseurs d'accès à internet, le taux réduit ne s'appliquera désormais plus qu'aux services de télévision acquis en supplément par l'abonné. Par coordination, la loi de finances a donc prévu que les FAI seraient désormais assujettis à la TST sur la totalité du prix de l'offre composite, mais moyennant une réfaction de 55 % opérée sur l'assiette. Cette modification était donc neutre en termes de pression fiscale.

2. Une taxe affectée au CNC

Le produit de la TST est, parmi d'autres, affecté au Compte de soutien à l'industrie de programmes (COSIP) tenu par le CNC. Ce compte finance les soutiens que le CNC apporte à la production et à la création cinématographique et audiovisuelle, aux industries techniques et à l'innovation, à la distribution, la diffusion et la promotion du cinéma, ainsi qu'à la numérisation des salles et des oeuvres. Ces soutiens sont estimés à 750 millions d'euros en 2011 et à 701 millions d'euros en 2012 , selon le document de performance transmis annuellement au Parlement par la CNC.

Avec 539 millions d'euros de recettes prévues en 2012, la TST est de loin la taxe la plus importante affectée au COSIP, devant la taxe sur les entrées en salle (TSA, 130 millions d'euros) et la taxe sur les vidéogrammes (32 millions d'euros). Cette taxe a en outre connu une progression très dynamique au cours de la période récente, puisque son produit exécuté a augmenté de 27,4 % entre 2009 et 2010, passant de 451 à 575 millions d'euros. Bien que beaucoup moins forte, cette tendance à la hausse ne devrait pas se démentir en 2011 (+1,5 %).

Taxes affectées au COSIP

(en euros)

NB : Le tableau qui précède tient compte, pour le produit 2012 de TST, de la simplification du barème proposée par le présent article (cf. infra) et de l'écrêtement des ressources du CNC prévu à l'article 16 bis du présent projet de loi de finances.

Source : commission des finances, d'après les documents de performance du CNC

Selon des chiffrages transmis par le CNC, la part distributeurs de la TST représenterait 300 millions d'euros au titre de 2011 , sur la base d'une assiette nette estimée à 8,6 milliards d'euros. Au sein de ces 300 millions d'euros, la contribution des FAI serait de 180 millions d'euros environ.

B. LES AMÉNAGEMENTS PROPOSÉS PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article poursuit deux finalités : il adapte la définition des redevables et de l'assiette de la TST-distributeurs, afin de faire échec à certaines pratiques d'optimisation fiscale constatées en 2011, et il simplifie et allège son barème afin de modérer la progression de son produit .

Votre rapporteure générale rappelle, à cet égard, qu'un amendement similaire avait déjà été proposé par le Gouvernement lors de l'examen de la première loi de finances rectificative pour 2011, au mois de juin dernier. Cet amendement avait été retiré au motif que la rédaction proposée n'était pas suffisamment aboutie et le Gouvernement s'était engagé à traiter cette question dans le cadre du projet de loi de finances pour 2012.

1. Remédier à des pratiques d'optimisation fiscale

Depuis plusieurs mois, un opérateur important se livre à une pratique d'optimisation fiscale qui consiste à dégrouper ses offres composites . Cet opérateur propose une offre sans services de télévision (donc hors assiette de la TST), et propose l'accès au service de télévision en supplément, pour un montant très modique (1,99 euro par mois). Cette pratique permet de réduire considérablement l'assiette de la TST, qui ne porte plus que sur 1,99 euro au lieu de 30 euros, et de minimiser le chiffre d'affaires au titre des services de télévision et, par conséquent, de profiter des tranches les plus basses du barème progressif . A l'occasion de l'examen du premier projet de loi de finances pour 2011, le CNC avait chiffré à 20 millions d'euros la perte de recettes annuelle liée à ce seul opérateur et à 140 millions d'euros la perte totale si les autres opérateurs délivrant des offres composites adoptaient la même stratégie.

Afin de sécuriser le produit de la taxe, le présent article (1° du I) prévoit donc de préciser que sont également regardées comme distributeur de services de télévision les personnes qui proposent un accès à des services de communication au public en ligne ou à des services de téléphonie, dès lors que la souscription à ces services permet de recevoir, au titre de cet accès, des services de télévision .

Le 2° du I dispose ensuite que l'assiette de la TST-distributeurs comprend, outre les abonnements acquittés en rémunération d'un ou plusieurs services de télévision, les abonnements et autres sommes acquittés par les usagers en rémunération des offres, composites ou de toute autre nature, donnant accès à des services de communication au public en ligne ou à des services de téléphonie, dès lors que la souscription à ces services permet de recevoir, au titre de cet accès, des services de télévision . Il est enfin précisé que les abonnements professionnels ne sont pas concernés.

2. Simplifier et alléger le barème

Le 3° du I simplifie et allège le barème de la TST : son nombre de tranches passe de 9 à 4, son taux minimal (0,5 %) s'applique jusqu'à 250 millions d'euros de chiffre d'affaires et non plus jusqu'à 75 millions d'euros, et son taux maximal est plafonné à 3,5 % au lieu de 4,5 % 2 ( * ) . Cet allègement se justifie par le produit très dynamique de la TST, dont il convenait de modérer la progression pour ne pas faire peser sur les opérateurs une pression fiscale excessive.

L'ensemble de ces modifications doivent, aux termes du II, entrer en vigueur à une date fixée par décret et en tout état de cause avant le 1 er janvier 2013. Ce délai est rendu nécessaire par la notification préalable des aménagements opérés au régime de la taxe à la Commission européenne.

Comparaison des ancien et nouveau barèmes de la TST-distributeurs

Source : commission des finances

En application de ce nouveau barème, le produit de la TST distributeurs devrait avoisiner les 300 millions d'euros en 2012, soit un montant stabilisé par rapport à 2011. A barème inchangé, ce produit aurait avoisiné les 330 millions d'euros. Indépendamment de ces aménagements, l'article 16 ter du présent projet de loi de finances prévoit d'écrêter le produit de la TST-distributeurs à hauteur de 229 millions d'euros en 2012, le reliquat (70 millions d'euros) étant reversé au budget général dans le cadre du milliard d'euros d'économies supplémentaires annoncé par le Gouvernement à l'ouverture de la discussion du PLF. Votre rapporteure générale revient sur l'opportunité d'un tel écrêtement dans le cadre du commentaire de l'article 16 ter .

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Sans préjudice de considérations plus générales sur l'évolution des recettes affectées au CNC, et qui seront développées au commentaire de l'article 16 ter , le dispositif proposé par le présent article paraît susceptible de permettre la consolidation de l'assiette de la TST et la modération de la progression de ses recettes.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.


* 1 Cette taxe est également appelée taxe « COSIP » en ce qu'elle alimente le Compte de soutien à l'industrie de programmes tenu par le CNC.

* 2 Par coordination, la majoration de taxe appliquée aux éditeurs auto-distribués (Canal+) est adaptée en valeur pour que son rendement ne soit pas affecté par la révision du barème.