II. TEXTE ADOPTÉ PAR LE SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

Article 3 bis H (nouveau)

L'article 1 er de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011 est abrogé.

III. COMMISSION MIXTE PARITAIRE : DÉSACCORD

IV. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE EN NOUVELLE LECTURE DU LUNDI 5 DÉCEMBRE 2011

Article 3 bis H

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, inscrit sur l'article 3 bis H.

M. Jean-Pierre Brard. Madame la ministre, je suis très étonné que vous vous borniez à dire « favorable ». C'est comme ces gens qui ont des habitudes et à qui il manque parfois, lorsqu'on veut les emmener devant de nouveaux horizons, la curiosité pour mesurer ce qu'on leur offre. Par habitude, ils reviennent à leurs premières amours - dans votre cas particulier, l'amour des privilégiés. (Sourires.)

Au mois de juillet dernier, le Gouvernement a procédé, on s'en souvient, à un tour de passe-passe : supprimer le bouclier fiscal, devenu un véritable boulet politique, sans nuire aux intérêts de ses bénéficiaires. Votre majorité a ainsi substitué au bouclier fiscal une mesure de réduction très sensible du rendement de l'impôt de solidarité sur la fortune, en en modifiant le seuil et le taux.

Il va sans dire que cette mesure est en complet décalage avec les objectifs affichés de réduction des déficits, mais conforme à cette option préférentielle pour les plus riches, qui est, depuis 2007, la marque de fabrique du sarkozysme.

Vous avez ainsi mis tout bonnement hors du champ de l'impôt de solidarité sur la fortune plus de 300 000 contribuables qui y étaient jusqu'ici assujettis. Ces personnes disposent d'un patrimoine compris entre 800 000 et 1,3 million d'euros, ce qui doit représenter de cinq à dix fois le patrimoine moyen des Français

J'en profite d'ailleurs, madame la ministre, pour vous poser pour la vingt-neuvième fois la même question, à laquelle vous n'avez pas répondu pour l'instant, alors que cela éclairerait les gens qui nous regardent : est-il vrai que Mme Bettencourt paye cette année 42 millions d'impôts, sans compter les redressements fiscaux en cours, et que, l'année prochaine, elle ne paiera plus que 10 millions ?

M. le président. L'amendement n° 109 présenté par M. Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il s'agit, en supprimant cet article, de revenir au droit existant en matière d'impôt sur la fortune.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Je n'ai toujours pas de réponse à ma question... Depuis que je suis parlementaire, je n'ai jamais posé une question avec autant d'assiduité et de persévérance. Jamais je n'ai été confronté à un membre du Gouvernement qui fasse preuve d'autant d'entêtement pour ne pas répondre. Le fait de ne pas avoir de réponse à ma vingt-neuvième interrogation m'obligera incontestablement à poser la question une trentième fois !

M. le président. Peut-être pas, monsieur Brard !

La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Malheureusement, si ! (Sourires.)

En effet, je vais répondre à M. Brard ce que tous mes successeurs lui répondront avec la même gentillesse, la même sérénité, et en même temps les mêmes principes fondamentaux de la République au coeur : le secret fiscal participe du respect de la vie privée. Le secret fiscal, c'est comme le secret médical : la ministre du budget n'a pas le droit de l'enfreindre.

M. le président. Monsieur Brard, je vous redonne la parole par bienveillance, pour répondre brièvement à Mme la ministre.

M. Jean-Pierre Brard. Je vous remercie, monsieur le président.

Madame la ministre, pour comparer le secret fiscal au secret médical, passez-moi l'expression, il ne faut pas manquer d'air! Avec le secret médical, vous touchez à l'intime. Quand il s'agit du secret fiscal pour les plus riches, vous touchez au coffre-fort, ce que je ne mets pas dans le domaine de l'intime !

Vous avez commis un lapsus révélateur : au lieu de parler de vos prédécesseurs, vous avez parlé de vos successeurs.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Les successeurs répondront la même chose !

M. Jean-Pierre Brard. Mais l'injustice fiscale n'est pas inscrite de toute éternité dans les lois de la République.

Au demeurant, madame la ministre, je sais, moi, ce que vous payez comme impôt.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Ah ?

M. Jean-Pierre Brard. Eh oui ! Même si cela vous étonne, je sais ce que vous payez comme impôt quand vous allez acheter une baguette de pain. (Sourires.) Je ne vois pas pourquoi nous ne saurions pas combien Mme Bettencourt paie au total.

M. Jérôme Chartier. Vous savez aussi combien elle paie d'impôt sur sa baguette de pain !

M. Jean-Pierre Brard. D'ailleurs, elle réclame même maintenant, paraît-il, de payer davantage d'impôts, certes sans nous dire si elle n'a pas oublié, dans l'établissement de la liste de son patrimoine, quelque île perdue au fin fond de l'océan Indien, du Pacifique ou ailleurs. Il serait donc légitime que nous le sachions.

M. René-Paul Victoria. En tout cas, ce n'est pas à La Réunion !

M. Jean-Pierre Brard. Non, car il y a un volcan ! Elle aime les coins tranquilles... (Sourires.)

Madame la ministre, faire la transparence sur ce sujet relève de la démocratie, et non de la préservation de la vie privée. Quand on possède 15 ou 17 milliards d'euros, ce n'est plus de l'ordre de la vie privée : cela veut dire qu'on a gagné ses sous sur le dos de ceux qui travaillent !

(L'amendement n° 109 est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 3 bis H est supprimé.