IV. DÉBATS SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE (SÉANCE DU LUNDI 5 DÉCEMBRE 2011)

Article 47 quater

M. le président. « Art. 47 quater . - Après le e du 1° de l'article 1464 A du code général des impôts, il est inséré un f ainsi rédigé :

« f) Les spectacles musicaux et de variétés. »

M. le président. L'amendement n° II-358, présenté par Mme Bricq, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. L'article 47 quater vise à ajouter les « spectacles musicaux et de variétés » à la liste des spectacles vivants pouvant faire l'objet d'une exonération de cotisation foncière des entreprises sur décision d'une commune ou d'un établissement public de coopération intercommunale.

La commission des finances propose, par cet amendement, de supprimer cet article inséré par l'Assemblée nationale, susceptible, selon nous, d'introduire une inégalité entre les collectivités.

En effet, les communes qui pourraient décider cette exonération sont plutôt celles qui disposent de ressources suffisantes. Mais je ne vais pas vous expliquer à vous, chers collègues, les conséquences de la réforme de la taxe professionnelle : les communes doivent se débrouiller avec les impôts ménages, car une exonération de ce type ne serait pas compensée par l'État...

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. En réalité, lorsque cet amendement a été examiné par l'Assemblée nationale, nous étions à front renversé.

Comme vous, madame la rapporteure générale, j'aurais plutôt été défavorable à la création d'une énième niche...

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Il ne s'agit pas d'une niche !

Mme Valérie Pécresse, ministre. ... disons à la création d'une énième exonération de cotisation foncière des entreprises si je n'avais pas réalisé, grâce à Richard Dell'Agnola, qu'il existait déjà une longue liste d'activités relevant du spectacle vivant pouvant d'ores et déjà bénéficier d'une telle exonération. Seuls les « spectacles musicaux et de variétés » n'étaient pas concernés.

C'est pour cette raison que le Gouvernement, à contre-emploi, puisqu'il n'a pour habitude de faire preuve de laxisme et d'accepter la multiplication d'exonérations de toutes sortes, est convenu qu'il n'était pas possible de maintenir les « spectacles musicaux et de variétés » en dehors de cette liste.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je ne pense pas que l'Assemblée nationale soit laxiste ; elle a eu raison d'insérer cet article additionnel que nous aurions tort de supprimer. Cette disposition se situe en effet dans le droit fil de la doctrine de l'ancienne commission des finances. Jean Arthuis et moi-même, nous disions toujours qu'une collectivité peut décider, en toute responsabilité, de voter une exonération de taxes locales, mais celle-ci ne donne lieu à aucune compensation. Cela nous semblait être un principe de bonne administration, auquel l'Assemblée nationale s'est convertie. Suivons-la sur ce chemin.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Madame la ministre, Philippe Marini vient de faire la démonstration que seules les collectivités qui en auront les moyens pourront décider cette exonération, qui ne fera l'objet d'aucune compensation.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Mais puisque nous allons faire la péréquation, tous les problèmes seront réglés...

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Finalement, en nous expliquant que, jusqu'à présent, seul un type de spectacle échappait à cette possibilité d'exonération, vous présentez cet article comme la réparation d'une erreur matérielle qu'aurait commise le Gouvernement.

Je vous répondrai alors qu'il lui appartenait, lorsque la taxe professionnelle a été réformée, d'être vigilant sur ce point en prenant l'initiative de corriger cette erreur. Pourquoi donc est-ce l'Assemblée nationale qui en a pris l'initiative ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Elle a eu raison !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. En réalité, je ne pense pas qu'il s'agisse d'une erreur matérielle, précisément parce que cette exonération n'est pas compensée.

Vous le comprendrez aisément, notre logique n'est pas celle de l'ancienne majorité sénatoriale.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Voilà !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. On regarde à deux fois avant d'exercer une liberté qui coûte de l'argent, surtout quand elle doit être financée par une augmentation des impôts ménages.

Je le répète, madame la ministre, monsieur le président de la commission, je comprends la logique que vous défendez, mais ce n'est pas la nôtre.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

M. Philippe Dominati. Madame la rapporteure générale, je ne comprends pas votre argumentation.

La semaine dernière, lorsqu'a été examiné mon amendement visant à supprimer la taxe sur les spectacles appliquée aux réunions sportives et à lui substituer l'application d'une TVA à taux réduit, vous m'avez répondu que, au nom de la libre administration des collectivités, les communes devaient disposer d'une totale liberté en la matière.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Ce n'est pas la même chose !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Grâce à la péréquation, il n'y aura plus ni riches ni pauvres...

M. Philippe Dominati. Nous sommes exactement dans le même cas de figure : il y a des communes riches et des communes pauvres, des communes qui veulent soutenir leur club de football et d'autres qui ne le veulent pas. Mais vous faites le raisonnement radicalement inverse...

J'aimerais qu'une doctrine se dégage de nos débats, car, pour le moment, c'est la contradiction la plus totale, et je ne comprends absolument pas comment, d'une semaine à l'autre, le raisonnement peut à ce point varier.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-358.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 47 quater est supprimé.