Mardi 12 décembre 2006

- Présidence de M. Jean Puech, président. -

Charte européenne de l'autonomie locale - Communication

L'Observatoire a entendu une communication de M. Jean Puech, président, sur la Charte européenne de l'autonomie locale.

M. Jean Puech, président, a d'abord rappelé que la Charte avait été ouverte à la signature dès le 15 octobre 1985 -date à laquelle la France a signé le texte- et qu'elle avait été ratifiée à ce jour par 41 Etats du Conseil de l'Europe. Ce traité, a-t-il relevé, souligne que l'existence des collectivités locales est un des principaux fondements de tout régime démocratique. Son article 4 pose le principe général que l'exercice des responsabilités publiques doit être, sauf exception, décentralisé.

Puis M. Jean Puech, président, a évoqué les grandes lignes de la Charte. Celle-ci définit tout d'abord le concept d'autonomie locale : l'autonomie locale est le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité, et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques.

La Charte prévoit, aussi, les conditions « politiques » de l'exercice de la responsabilité locale. Celle-ci doit être exercée par des conseils ou des assemblées composés de membres élus au suffrage libre, secret, égalitaire, direct et universel et « pouvant » disposer d'organes exécutifs responsables devant eux.

Il a signalé que du point de vue du Gouvernement français, le mot « pouvant » devait être entendu comme une faculté, et non comme une obligation. En effet, à ce jour, notre organisation administrative territoriale ne reconnaît pas la responsabilité des exécutifs locaux devant les assemblées délibérantes, sauf dans le cas de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et de la collectivité territoriale de Corse.

La Charte, a-t-il ajouté, précise ce qu'elle considère comme le fondement de l'indépendance des élus locaux : un statut assurant aux élus le libre exercice de leur mandat, d'une part, et, une compensation financière correspondant exactement aux frais exposés, une rémunération du travail accompli, ainsi qu'une couverture sociale adéquate, d'autre part.

M. Jean Puech, président, a encore indiqué que la Charte distinguait les compétences « de base » et les compétences « spécifiques » des collectivités locales. Le texte préconise l'attribution aux collectivités de « blocs de compétences » que le législateur est appelé à clarifier afin que les pouvoirs confiés soient normalement pleins et exclusifs.

Puis M. Jean Puech, président, a souligné que le traité mettait l'accent sur les moyens humains et financiers nécessaires au bon fonctionnement des collectivités locales. Celles-ci doivent être mises en mesure d'organiser leurs structures administratives internes en vue de les adapter à leurs besoins spécifiques et dans un souci d'efficacité.

S'agissant des moyens financiers, la Charte définit les principes de l'autonomie financière des collectivités locales.

M. Jean Puech a rappelé, à cet égard, que l'article 72-2 de notre Constitution, issu de la réforme constitutionnelle de 2003, avait consacré dans l'ordre juridique constitutionnel les règles d'autonomie financière préconisées par le traité.

M. Jean Puech, président, a ensuite insisté sur le caractère tardif du processus de ratification française : la loi n° 2006-823 du 10 juillet 2006 autorisant la ratification n'a été adoptée, en effet, que plus de vingt ans après la signature de la Charte.

Il a relevé que le Conseil d'Etat, saisi en 1991 d'un projet de loi d'approbation de la Charte, avait rendu un avis négatif en considérant que certaines stipulations du traité « semblaient susceptibles de créer des contentieux et que d'autres apparaissaient comme en contradiction avec les pratiques françaises ». Le Conseil d'Etat plaidait « pour la préservation de l'équilibre et du consensus auquel avaient abouti les premières lois de décentralisation ».

Douze ans après cet avis, est intervenu l'Acte II de la décentralisation, qui a notamment conforté plusieurs principes :

- le principe selon lequel l'échelon pertinent pour l'action publique est, sauf exception, l'échelon décentralisé ;

- celui du droit à l'expérimentation pour les collectivités territoriales ;

- celui de l'interdiction de la tutelle d'une collectivité sur une autre ;

- celui de l'autonomie financière des collectivités ;

- celui de la correction des inégalités territoriales.

Ces réformes ont placé désormais notre pays en conformité avec les prescriptions de la Charte.

M. Jean Puech, président, s'est étonné du fait que les instruments de ratification n'aient toujours pas été déposés à Strasbourg, quelque six mois après l'adoption, par le Parlement français, de la loi portant autorisation d'approbation de la Charte. Il a indiqué qu'il avait demandé au Premier ministre, dans une question écrite, quelles mesures il comptait prendre pour accélérer les délais de la ratification définitive du traité.