Mardi 25 septembre 2007

- Présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président.

Délégation parlementaire au renseignement - Examen des amendements en deuxième lecture

La commission a procédé, sur le rapport de M. René Garrec, à l'examen en seconde lecture des amendements au projet de loi n° 422  (2006-2007), adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en première lecture, portant création d'une délégation parlementaire au renseignement.

A l'article unique (création d'une délégation parlementaire au renseignement), la commission a examiné les amendements n°s 1, 2, 3 et 4 présentés par MM. Jean-Claude Peyronnet, Didier Boulaud, Pierre-Yves Collombat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés tendant à :

- porter de quatre à cinq le nombre respectif de députés et sénateurs membres de la délégation ;

- préciser que la délégation recueille les informations utiles à l'accomplissement de sa mission ;

- permettre l'audition par la délégation d'agents des services de renseignement en dehors de la présence de leurs directeurs ;

- autoriser la délégation à connaître d'activités opérationnelles passées.

La commission a donné un avis défavorable sur ces quatre amendements rappelant que tous avaient été soit rejetés, soit repoussés lors de la première lecture au Sénat. M. Jean-Jacques Hyest, président, a invoqué la règle dite de « l'entonnoir » entre la première et la seconde lecture. Il a toutefois précisé qu'il serait répondu sur le fond à ces amendements lors de leur examen en séance publique.

Après l'article unique, la commission a examiné l'amendement n° 5 présenté par MM. Jean-Claude Peyronnet, Didier Boulaud, Pierre-Yves Collombat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés tendant à insérer un article additionnel prévoyant la transmission à la délégation du rapport de la commission de vérifications des fonds spéciaux. Pour les mêmes raisons, la commission a donné un avis défavorable.

Immigration - Audition de M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement

La commission a procédé à l'audition de M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement sur le projet de loi n° 461 (2006-2007) relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a souligné que le projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile, préparé dès l'installation du gouvernement, était passé de 18 à 47 articles à l'Assemblée nationale, alors que la volonté du gouvernement n'avait pas été de présenter un texte de grande ampleur.

Il a indiqué que le projet de loi s'inscrivait dans le cadre de la volonté, qui avait également présidé à la création d'un ministère de l'immigration et de l'intégration, d'appliquer les engagements du président de la République tendant à instaurer une véritable politique de maîtrise des flux migratoires afin d'assurer une meilleure intégration des immigrés. Il a rappelé que cette politique reposait sur le choix d'une immigration choisie et concertée qui était tout le contraire d'une immigration zéro qui, comme le montrait l'exemple des Etats-Unis, n'était si souhaitable ni praticable.

Il a insisté sur le fait que l'immigration choisie s'opposait à l'immigration subie tant par les nationaux que par les étrangers en situation régulière ou les clandestins, ces derniers étant les premières victimes des réseaux d'immigration irrégulière.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a expliqué qu'une réelle politique de maîtrise des flux était nécessaire, car :

- le système d'intégration des immigrés en France a globalement échoué, comme le montre le fait que 60 % de la population étrangère se concentrent dans trois des vingt-deux régions françaises, et que le taux de chômage des immigrés atteint 20 à 22 % de la population active alors que celui des nationaux est de l'ordre de 8 %, ce taux étant même de 24 % pour les immigrés ayant suivi des études supérieures, contre 6 % pour les nationaux placés dans cette même situation ;

- la situation de la France est très différente de celles d'autres Etats, puisqu'elle dispose d'un des taux de fécondité les plus élevés d'Europe, notre pays n'ayant donc pas besoin de soutenir sa démographie par des flux extérieurs, à l'inverse d'autres pays ;

- la capacité d'accueil de la France est limitée, le déficit actuel de logements ne permettant pas, en particulier, l'hébergement des nouveaux arrivants ;

- les politiques de régularisation massives qui ont pu être pratiquées antérieurement, même si elles pouvaient apparaître légitimes en théorie, ont été en pratique un échec, induisant des effets d'appel d'air. Le ministre a souligné que certains responsables politiques de pays ayant appliqué de telles politiques, comme le sénateur italien D'Amato, y étaient désormais opposés. Il a constaté que, du fait de la régularisation intervenue en 1997, la demande d'asile en France avait explosé et que, malgré le quadruplement des places en centres d'accueil des demandeurs d'asile depuis 2002, 45 millions d'euros devaient être trouvés chaque année pour loger certains demandeurs dans des hôtels ;

- les Etats d'origine des immigrés souhaitaient eux-mêmes voir une nouvelle politique de régulation des flux se développer afin que leurs élites ne quittent pas en masse leur pays ;

- la France, contrairement à d'autres pays européens, tels l'Espagne et le Portugal, a une grande tradition d'immigration et a accueilli jusqu'à 400.000 immigrants par an sur son territoire, ce qui en fait, en valeur absolue, l'Etat ayant la population étrangère la plus importante des Etats européens.

Le ministre a souligné que le projet de loi entendait rééquilibrer l'immigration familiale et l'immigration de travail, relevant que sur 165.000 titres de séjour délivrés en 2005, 92.000 l'avaient été pour motif familial et 11.000 pour des motifs professionnels, précisant que la mission qui lui avait été confiée par le président de la République était de parvenir à un rééquilibrage dans les cinq ans.

Détaillant les principales mesures du projet de loi, M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a indiqué qu'était prévue l'obligation pour les demandeurs d'un titre de séjour de se soumettre à un test de langue dans leur pays d'origine. Il a précisé que ce test, qui serait en pratique d'une durée de 15 minutes, conduirait, si le demandeur n'a pas un niveau satisfaisant, à l'obligation de suivre une formation de 80 à 180 heures dont l'assiduité serait un élément déterminant.

Il a insisté sur l'importance de disposer d'un niveau de langue suffisant, car il s'agit du vecteur essentiel d'intégration de l'étranger dans la société française. Il a relevé que, selon une enquête d'opinion, 74 % des personnes sondées approuvaient cette initiative. Il a ajouté que ce test et cette formation seraient financés par une augmentation générale des droits de timbre perçus sur les titres de séjours et les visas. Il a souligné qu'un tel test avait déjà été institué aux Pays-Bas.

Le ministre a souligné que le projet de loi prévoyait d'adapter les ressources nécessaires à l'obtention d'un regroupement familial, soulignant qu'une telle mesure avait déjà été adoptée par l'Allemagne, le Danemark, les Pays-Bas et l'Italie. Il a souligné que cette disposition se justifiait par la nécessité d'assurer que la famille du demandeur au regroupement familial puisse avoir les moyens financiers de vivre dans des conditions satisfaisantes. Il a mis en exergue que si la version initiale du projet de loi prévoyait un plancher de ressources pouvant aller jusqu'à 1,2 SMIC, l'Assemblée nationale avait souhaité que ce plancher soit porté à 1,33 SMIC pour les familles de six personnes ou plus.

Il a indiqué que le projet de loi instaurait un contrat d'accueil et d'intégration pour la famille, destiné à mieux assurer l'intégration des enfants. Il a précisé que cette formation, assurée par l'Agence nationale d'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), porterait sur les obligations attachées à l'autorité parentale, les obligations scolaires, la protection de l'enfance ainsi que les comportements réprimés tels que le mariage forcé, l'excision ou la polygamie. Il a souligné que le non-respect de ce contrat entraînerait la mise en place d'un accompagnement social, voire de manière progressive de la saisine du juge des enfants et la mise sous tutelle des allocations familiales.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a exposé que le second objet du projet de loi était de conforter la procédure d'examen des demandeurs d'asile. Soulignant qu'il était également chargé de l'asile, il a indiqué qu'il tenait à ce que la tradition d'accueil des réfugiés politiques en France soit respectée, insistant sur l'indépendance entre la régulation des flux migratoires et l'accueil des réfugiés.

Il a rappelé qu'en 2005, la France avait reçu 31.000 demandes d'asile, ce qui la plaçait au premier rang des Etats européens, alors que l'Allemagne et le Royaume-Uni n'avaient examiné respectivement que 21.000 et 28.000 demandes. Il a précisé que 124.000 personnes bénéficiaient en France du statut de réfugié.

Abordant les modifications apportées par l'Assemblée nationale, M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a souligné que les députés avaient décidé à l'unanimité :

- l'institution d'une carte de résident permanent, d'une durée illimitée, à destination des étrangers séjournant en France depuis longtemps ;

- la généralisation, pour tout primo-arrivant signataire d'un contrat d'accueil et d'intégration, d'un bilan de compétences professionnelles personnalisé ;

- la régularisation, à titre exceptionnel, dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour, d'immigrés sans papiers travaillant dans des domaines d'activité économiquement sous tension.

Le ministre a indiqué que l'Assemblée nationale avait également instauré un livret épargne codéveloppement, qui complétait le compte épargne codéveloppement prévu en 2006 à l'initiative du Sénat. Il a précisé que ce livret, ouvert à l'ensemble des étrangers résidant régulièrement en France, bénéficierait tant aux étrangers imposables qu'aux étrangers non imposables à l'impôt sur le revenu.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a souligné que l'Assemblée nationale, à l'initiative de deux députés désignés par leur assemblée pour siéger à la Commission nationale de l'informatique et des libertés, avait prévu la conduite, sous le contrôle de cette commission, d'études sur la mesure de la diversité des origines des personnes, de la discrimination et de l'intégration. Il a insisté sur la nécessité de pouvoir mesurer les discriminations fondées sur l'origine afin de mieux lutter contre elles.

Il a indiqué que les députés avaient abaissé d'un mois à 15 jours le délai de recours devant la Commission de recours des réfugiés contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Il a relevé que cette mesure avait pour effet d'aligner le droit français sur celui de l'ensemble des Etats européens, le gouvernement s'en étant néanmoins remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.

S'agissant du dispositif introduit par M. Thierry Mariani, permettant de recourir à un test ADN afin de prouver le lien de filiation dans le cadre d'une procédure de regroupement familial, M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a indiqué que cette mesure ne figurait pas dans le texte initial du gouvernement, mais s'appuyait sur un état de fait incontestable : l'absence d'état civil fiable dans de nombreux pays.

Il a rappelé que le récent rapport d'information de M. Adrien Gouteyron au nom de la commission des finances du Sénat avait mis en exergue le fait que 30 à 80 % des actes vérifiés dans des pays tels que le Sénégal, la Côte d'Ivoire, la République démocratique du Congo, le Congo-Brazzaville, le Togo, Madagascar et les Comores étaient des faux, le rapport d'information de MM. Jean-René Lecerf et Charles Guené sur la nouvelle génération de documents d'identité et la fraude documentaire ayant également souligné, en 2005, cet état de fait. Il a indiqué que l'Etat et plusieurs collectivités territoriales aidaient déjà financièrement certains Etats d'émigration pour moderniser et renforcer l'efficacité de leur état-civil.

Il a exposé que le gouvernement avait souhaité encadrer le dispositif en précisant que le recours au test ADN ne pouvait qu'être une démarche volontaire de la part du demandeur et qu'à l'instar de ce que prévoit la législation suédoise, le coût de ce test serait remboursé si le visa est délivré. Il a ajouté qu'une « clause de rendez-vous » avait été prévue en 2010 pour que le Parlement puisse à nouveau débattre de cette mesure et que les conditions de mise en oeuvre de ce dispositif seraient évaluées par une commission composée de parlementaires, de magistrats et de personnalités qualifiées.

Il a précisé que, dans le cadre d'un regroupement familial concernant un enfant adopté, la procédure classique s'appliquerait, se fondant sur les actes d'état civil du pays d'origine.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a indiqué qu'au delà du projet de loi, deux questions devaient être soulevées qui devraient conduire, le cas échéant, à une révision de la Constitution :

- la possibilité de définir des plafonds chiffrés d'immigration à caractère normatif, soulignant que selon des sondages, 64 % des électeurs de Mme Ségolène Royal et 80 % des électeurs de M. Nicolas Sarkozy se montraient favorables à ce type de mesure ;

- la redéfinition de la compétence juridictionnelle en matière d'entrée, de séjour et d'éloignement des étrangers, actuellement répartie entre le juge administratif et le juge judiciaire.

M. François-Noël Buffet, rapporteur, s'est tout d'abord interrogé sur les évolutions de la commission de recours des réfugiés, en particulier quant à son autonomie budgétaire et administrative, mettant en exergue l'importance de cette instance au sein de la politique par la France en matière d'asile.

Il s'est ensuite félicité de la création d'un recours suspensif pour les demandeurs d'asile à la frontière, soulignant que l'Assemblée nationale avait amélioré le dispositif initial du projet de loi en adoptant une procédure inspirée de celle applicable aux arrêtés de reconduite à la frontière.

Il a enfin souhaité des précisions sur l'évaluation des tests accomplis par les primo-arrivants dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration, relevant les résultats encourageants dudit contrat après sa visite à l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM).

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a expliqué, d'une part, qu'afin de clarifier le rôle de la commission de recours des réfugiés, le projet de loi prévoyait d'en modifier le nom, en devenant la « Cour nationale du droit d'asile » et, d'autre part, qu'elle disposerait désormais d'une autonomie budgétaire.

S'agissant de l'instauration d'un recours suspensif contre les décisions de refus d'entrée au titre de l'asile, il a réaffirmé que le dispositif adopté par l'Assemblée nationale avait obtenu l'aval du gouvernement et qu'il était pleinement conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme.

Insistant sur les difficultés d'obtenir des statistiques récentes sur le regroupement familial, M. Jean-Jacques Hyest, président, a souhaité savoir combien de personnes étaient concernées par ce mode d'acquisition d'un titre de séjour et quelle était sa répartition entre les conjoints et les enfants.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a confirmé qu'il était actuellement difficile d'obtenir des chiffres fiables en la matière, indiquant qu'environ 92.000 premiers titres de séjour auraient été délivrés en 2005, au titre de l'immigration familiale dans son ensemble à des ressortissants de pays tiers à l'Union européenne ; au titre du seul regroupement familial, environ 8.600 enfants en 2006 auraient été admis au séjour en France selon l'ANAEM. Il a expliqué que l'établissement des statistiques en matière d'immigration et d'asile serait désormais de la responsabilité du secrétaire général du ministère.

Mme Alima Boumediene-Thiery s'est tout d'abord interrogée sur le caractère urgent du projet de loi alors que toutes les mesures d'application de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration ne sont pas encore parues.

Rejoignant le constat du ministre sur l'échec de la politique d'intégration de la France, elle a constaté que le projet de loi ne prévoyait pour autant aucune évolution en la matière.

S'agissant de la maîtrise des flux migratoires, elle a ensuite souhaité savoir quelle était la politique des visas envisagée par le projet de loi.

Elle a également estimé contradictoire que le gouvernement souhaite lutter contre le « pillage », bien réel, des élites de certains pays tout en conservant la délivrance de la carte de séjour « compétences et talents ».

Elle s'est enfin demandé comment s'effectuait l'évaluation des connaissances des valeurs républicaines des primo-arrivants, cette appréciation lui paraissant très subjective.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, lui a indiqué que tous les décrets d'application de la loi du 24 juillet 2006 étaient parus, à l'exception d'un seul, relatif aux étrangers stagiaires.

Il a souligné que l'adoption du projet de loi aurait des conséquences sur la politique des visas puisque le bénéfice du regroupement familial serait, à l'avenir, refusé aux étrangers n'ayant pas suivi la formation linguistique et civique de deux mois prévue par le projet de loi.

Il a exposé que la carte de séjour portant la mention « compétence et talents », instituée par la loi du 24 juillet 2006 et accordée pour une durée de trois ans renouvelable une fois seulement, contribuerait non pas au pillage des élites des pays d'émigration mais à l'enrichissement de leur expérience professionnelle. Relevant que les professionnels de santé béninois étaient plus nombreux en France qu'au Bénin, il a souligné la nécessité d'aider les immigrés qualifiés à rentrer dans leur pays d'origine en soutenant les micro-projets.

M. Pierre Fauchon a déclaré que la mise en place de quotas d'immigration ne le choquerait pas, compte tenu notamment de l'expérience canadienne en la matière.

Il a exprimé le souhait qu'une solution puisse être trouvée dès l'examen du projet de loi en première lecture par le Sénat pour unifier le contentieux de l'entrée, du séjour et de l'éloignement des étrangers, actuellement partagé entre les juridictions judiciaires et administratives.

Enfin, il a souligné que l'amendement adopté par l'Assemblée nationale, permettant à un étranger candidat au regroupement familial de solliciter son identification par ses empreintes génétiques afin d'apporter un élément de preuve d'une filiation déclarée avec au moins l'un de ses deux parents, était contestable en raison, moins de l'atteinte somme toute minime à l'intégrité du corps humain, que du risque de remise en cause de la paix des familles. Après avoir rappelé qu'à la différence de la maternité, la paternité était généralement établie, selon l'adage pater is est, sur le fondement d'une simple présomption, il a observé que bien des hommes élevaient leurs enfants en croyant à tort être leur père biologique. Aussi, jugeant désastreuses les conséquences potentielles de cette analyse des empreintes génétiques sur la vie privée des candidats au regroupement familial, M. Pierre Fauchon s'est-il demandé si la mesure proposée n'était pas disproportionnée au regard du faible nombre d'enfants étrangers admis chaque année sur le territoire national.

Abondant en ce sens, M. Patrice Gélard a ajouté que la législation nationale de maints pays d'émigration interdisait le recours à l'analyse des empreintes génétiques. Le dispositif retenu par l'Assemblée nationale lui a donc semblé de nature à susciter d'insolubles conflits de loi. Il s'est de surcroît interrogé sur sa conformité à la Constitution du 4 octobre 1958, en rappelant que les analyses des empreintes génétiques ne pouvaient actuellement être réalisées, en France, que dans le cadre d'une procédure judiciaire, donc sous le contrôle d'un juge.

Souscrivant aux propos des deux orateurs précédents, M. Henri de Richemont a estimé en outre que la liberté de choix du candidat au regroupement familial serait inexistante si les modalités d'application du dispositif proposé par l'Assemblée nationale consistaient à ce qu'il soit informé par l'autorité diplomatique ou consulaire française qu'en l'absence de recours à une analyse de ses empreintes génétiques pour prouver son lien de filiation, sa demande de visa serait refusée. Par ailleurs, il s'est interrogé sur le sort réservé aux familles recomposées.

M. Jacques Mahéas a dénoncé les conséquences désastreuses du recours à une analyse des empreintes génétiques pour les enfants qui découvriraient à cette occasion avoir été élevés par un homme qu'ils croyaient à tort être leur père biologique. Rappelant que « science sans conscience n'est que ruine de l'âme », il a estimé qu'il s'agissait là d'une bien mauvaise utilisation de la science.

M. Hugues Portelli a rappelé que l'analyse des empreintes génétiques, dans la mesure où elle constituait une atteinte au principe du respect du corps humain posé à l'article 16 du code civil, n'avait jusqu'à présent été introduite et admise que dans le cadre d'actions judiciaires aux fins d'établissement ou en contestation d'une filiation. Observant que la cellule familiale n'avait pas la même structure par exemple dans les pays africains qu'en France, il a souligné la nécessité de respecter les traditions de ces pays. Enfin, il a estimé que le dispositif adopté par l'Assemblée nationale était soit inutilement coûteux soit dangereux, et risquait en tout état de cause de porter préjudice à l'image de la France dans les pays d'émigration.

Mme Catherine Troendle s'est elle aussi interrogée sur le sort réservé aux familles recomposées dans le dispositif proposé par l'Assemblée nationale.

M. Patrice Gélard a ajouté que ce dispositif contribuerait à aggraver les dysfonctionnements des services consulaires français. Il a déploré les conditions d'accueil et les obligations parfois aberrantes imposées aux étrangers souhaitant obtenir un visa ou un titre de séjour, tant dans les consulats français, particulièrement en Russie, qu'à la préfecture de police de Paris.

En réponse à ces interventions, M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a tout d'abord observé que le contentieux de l'entrée, du séjour et de l'éloignement des étrangers représentait 40 % de l'augmentation de l'ensemble du contentieux devant les tribunaux administratifs en 2006. Il a indiqué que ce constat avait conduit le vice-président du Conseil d'Etat à s'interroger sur l'opportunité de créer des juridictions administratives spécialisées. L'unification du contentieux de l'entrée, du séjour et de l'éloignement des étrangers pouvant nécessiter une révision préalable de la Constitution, il a annoncé la création prochaine d'une commission de réflexion composée de parlementaires, de représentants des deux ordres de juridiction, de spécialistes du droit constitutionnel et d'experts des questions d'immigration.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a ensuite estimé que le recours à l'analyse des empreintes génétiques pour établir la filiation d'un candidat au regroupement familial pouvait s'avérer utile mais devait être encadré. A cet égard, il a suggéré de prévoir un avis du Comité consultatif national d'éthique sur le projet de décret d'application du dispositif proposé par l'Assemblée nationale.

Il a rappelé que ce dispositif s'inspirait de ceux retenus par douze pays membres de l'Union européenne.

M. Hugues Portelli a fait valoir que ces pays n'étaient pas confrontés aux mêmes flux migratoires que la France.

S'il a observé que le recours à l'analyse des empreintes génétiques était effectivement jusqu'à présent placé sous le contrôle du juge, M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a estimé qu'il ne s'agissait pas là d'un principe constitutionnel.

Constatant que le manque de fiabilité de l'état civil pénalisait les ressortissants de certains Etats désireux de se rendre en France au titre du regroupement familial, il a souligné que l'analyse de leurs empreintes génétiques leur permettrait, à l'avenir, de faire rapidement la preuve de leur filiation pour obtenir un visa et un titre de séjour.

Il a observé qu'en mai 2007, le Haut comité pour les réfugiés, tout en rappelant que le regroupement familial constituait un droit pour les étrangers ayant migré, avait pris acte du développement inéluctable du recours à l'analyse des empreintes génétiques pour la mise en oeuvre de ce droit.

Enfin, convenant de la nécessité d'améliorer l'accueil des étrangers dans les consulats et dans les préfectures, M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a indiqué que l'attention des préfets avait été attirée sur ce point.

M. Pierre-Yves Collombat a souligné que le taux élevé de chômage de la population immigrée signait l'échec de la politique économique du Gouvernement, plus que la faillite de sa politique d'immigration. Il s'est interrogé sur l'opportunité de dispenser aux étrangers qui souhaitent venir en France une formation sur la langue française et les valeurs républicaines. Il s'est demandé si ce stage serait assorti d'une évaluation. Il a souhaité savoir pour quelle raison le projet de loi proposait de supprimer la possibilité -introduite au Sénat sur la proposition du regretté Jacques Pelletier dans la loi du 24 juillet 2006- pour un conjoint de ressortissant français de solliciter et d'obtenir en France un visa de long séjour. Il a jugé mesquin d'obliger ce demandeur à retourner dans son pays d'origine pour adresser sa demande de visa au consulat.

Après s'être félicité du renforcement de l'autonomie statutaire et budgétaire de la commission de recours des réfugiés, M. Jean-René Lecerf s'est inquiété de l'impact de cette réforme sur l'activité du conseil d'administration de l'OFPRA qui s'intéresse actuellement au fonctionnement tant de l'OFPRA que de la commission de recours des réfugiés. Il a craint que cette structure -qui fait l'honneur de notre démocratie- ne puisse plus traiter de la politique en matière d'asile.

Abordant la question de la définition d'un référentiel national de typologies ethno-raciales, M. Jean-René Lecerf a rappelé que lors de l'examen en première lecture de la loi relative à l'égalité des chances du 31 mars 2006, le Sénat -sur la proposition de la commission des lois- avait proposé un dispositif alternatif à celui de l'Assemblée nationale afin de permettre aux autorités publiques et aux personnes morales de droit privé d'utiliser un cadre de référence pour mesurer en leur sein la diversité des origines.

Ce cadre de référence aurait été établi conjointement par la HALDE, l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) et l'Institut national d'études démographiques (INED). Il aurait comporté une typologie des groupes de personnes susceptibles d'être discriminées à raison de leurs origines raciales ou ethniques. L'utilisation de ce dispositif pour le traitement de données à caractère personnel se serait accompagnée d'une procédure d'anonymisation reconnue certifiée conforme par la CNIL.

M. Jean-René Lecerf a fait valoir que la proposition du Sénat, plus opérationnelle, lui semblait meilleure que celle des députés, plus complexe.

En écho aux interrogations de son collègue Pierre-Yves Collombat, M. Jean-Pierre Sueur s'est déclaré surpris de ce que le projet de loi revienne sur l'avancée introduite par le Sénat en 2006 en faveur des conjoints de ressortissants français. Il a jugé la solution retenue par le Gouvernement très contraignante dans la mesure où elle conduirait ces derniers à retourner dans leur pays d'origine pour obtenir un visa de long séjour. Il a appelé l'attention du ministre sur la situation des mauritaniens en situation irrégulière sur le territoire français confrontés à l'impossibilité de retourner dans leur pays d'origine, ce dernier refusant de les accueillir sur son territoire.

Tout en estimant normal que le Gouvernement adresse des instructions aux préfets pour l'application de sa politique, M. Jean-Pierre Sueur a cependant jugé choquant la récente convocation par le ministre de l'immigration d'une vingtaine de préfets n'ayant pas atteint un certain quota de reconduites à la frontière. Il a dénoncé plus particulièrement la publicité donnée à cet évènement.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'est également élevée contre la récente convocation des préfets par le ministre de l'immigration. S'il lui a semblé justifié que le Gouvernement demande aux préfets d'appliquer la loi, elle a jugé préoccupant de leur assigner des objectifs chiffrés pour y parvenir.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a exprimé la même réticence que ses collègues à l'égard de l'utilisation des empreintes génétiques pour établir l'existence d'une filiation, invitant le ministre à tenir compte des réserves précédemment formulées. Cette procédure ne lui a pas paru de nature à assurer un traitement digne des êtres humains.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a demandé au ministre de lui fournir un récapitulatif de l'évolution des entrées des étrangers sur le territoire français depuis 1974 ainsi qu'une estimation du nombre d'enfants étrangers présents en France au titre du regroupement familial. Elle a en effet estimé que seules les statistiques, à condition d'être fiables, permettaient d'avoir une idée du volume des flux migratoires. Elle s'est par ailleurs demandé quelle serait la réaction de la France si elle se voyait appliquer des mesures analogues à celles prévues par le projet de loi (maîtrise de la langue du pays d'accueil, utilisation des empreintes génétiques pour établir la filiation) par les pays accueillant ses ressortissants.

M. Jacques Gautier a estimé que l'utilisation de tests ADN pouvait apporter une réponse pragmatique pour prouver l'existence d'une filiation, faisant valoir que cette procédure fiable permettrait peut-être même aux consulats d'accorder plus facilement des visas.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a fait valoir que la possibilité pour les conjoints de Français d'obtenir un visa de long séjour en France introduite en 2006 s'était révélée complexe à appliquer. Il a justifié la suppression de cette mesure par le souci d'assurer le respect du principe selon lequel l'obtention d'un visa de tourisme ne saurait constituer un droit à s'établir durablement sur le territoire national. Il a jugé nécessaire de mieux distinguer la procédure applicable aux demandes de visa de tourisme et celle applicable aux demandes de visa de long séjour, afin notamment de lutter contre les mariages de complaisance susceptibles de favoriser l'immigration clandestine. En outre, il a souligné la lourdeur de la procédure instituée en 2006 qui obligeait les préfets -qui n'étaient pas en mesure de traiter les demandes de visa- à recourir aux services consulaires.

Le ministre a enfin précisé que ceux des nouveaux conjoints de Français qui sont titulaires d'une carte de séjour temporaire, comme étudiant ou visiteur par exemple, pourraient changer de statut sans avoir à solliciter un visa de long séjour. L'étranger en situation irrégulière qui épouse en toute bonne foi un ressortissant français et se trouve dans l'impossibilité évidente de faire l'aller et retour avec son pays d'origine pour y solliciter un visa de long séjour pourrait en effet solliciter une admission exceptionnelle au séjour.

Il a précisé que le projet de loi n'interdisait pas au conseil d'administration de l'OFPRA d'examiner le fonctionnement et l'activité de la commission de recours des réfugiés, ajoutant que le projet de loi ne proposait pas d'en modifier la composition.

M. Jean-René Lecerf a souhaité que le ministre confirme cette analyse en séance publique lors de l'examen du texte.

S'agissant de la conduite d'études sur la diversité des origines des personnes, le ministre a insisté sur le rôle-clef de la Commission nationale informatique et libertés.

Il a ensuite souligné les efforts actuels pour conclure avec chacun des pays sources de l'immigration des accords bilatéraux traitant de tous les aspects de la politique d'immigration, l'objectif étant d'associer ces pays à notre politique de maîtrise des flux. Il a indiqué qu'un accord avait déjà été conclu et que plusieurs accords étaient en cours de négociation, notamment avec le Congo-Brazzaville et le Bénin.

Répondant à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Jean-Pierre Sueur, le ministre a déclaré que la publicité faite autour de la réunion de vingt préfets n'avait pas été programmée. Il a précisé que cette réunion visait à mieux comprendre les situations locales et à remobiliser les services de l'Etat dans la lutte contre l'immigration irrégulière, mais en aucun cas à pointer du doigt certains préfets.

Enfin, il a rappelé que la lutte contre l'immigration irrégulière passait également par la répression des employeurs de clandestins. A cet égard, il a mis en exergue que depuis le 1er juillet dernier les employeurs avaient l'obligation de s'assurer auprès de la préfecture de l'authenticité des autorisations de travail de leurs employés étrangers et qu'ils ne pouvaient donc plus échapper à leur responsabilité en déclarant avoir cru de bonne foi que leurs employés étaient en règle.

Mercredi 26 septembre 2007

- Présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président.

Nomination de rapporteurs

La commission a nommé :

- M. Hugues Portelli, rapporteur sur le projet de loi n° 171 (A. N. XIIIè lég.) relatif à la lutte contre la corruption ;

- M. Christian Cointat, rapporteur sur les projets de loi relatifs à la Polynésie (sous réserve de leur dépôt) ;

- M. Bernard Saugey, rapporteur sur la proposition de loi n° 177 (AN XIIIè lég.), relative à la simplification du droit, sous réserve de son adoption et de sa transmission par l'Assemblée nationale.

Etat civil - Service central - Examen du rapport d'information

Puis la commission a procédé à l'examen du rapport d'information de MM. Christian Cointat, Richard Yung et Yves Détraigne sur l'état civil des Français nés, résidant ou ayant vécu à l'étranger.

A titre liminaire, M. Christian Cointat, co-rapporteur, a rappelé que l'état civil enregistrait et consignait les attributs de la personne (prénoms, nom, filiation, sexe) et faisait quotidiennement la preuve de son statut civil (mariage, divorce, pacte civil de solidarité...) ainsi que de sa capacité juridique à l'occasion de démarches administratives, sociales, commerciales ou de relations privées. Les services qui en ont la charge, a-t-il souligné, sont confrontés à une double exigence : prévenir la fraude, dont plusieurs rapports sénatoriaux ont récemment souligné l'importance grandissante, tout en délivrant rapidement aux usagers les documents dont ils ont besoin.

Il a exposé que, pour répondre à cette double exigence, des règles et une organisation particulières avaient été définies pour les Français nés, ayant vécu ou résidant encore à l'étranger : les actes de l'état civil concernant des événements survenus à l'étranger peuvent ainsi être établis tant par les agents diplomatiques ou consulaires français que par les autorités locales étrangères ; la conservation, la mise à jour et l'exploitation des actes français sont assurées non seulement par les consulats et ambassades, mais également par un service central d'état civil, installé à Nantes et placé sous l'autorité du ministre des affaires étrangères ; le contrôle de la régularité de ces actes est exercé par le tribunal de grande instance de Nantes ; enfin, le tribunal d'instance du 1er arrondissement de Paris est chargé de délivrer aux Français nés et résidant à l'étranger des certificats de nationalité qui, s'ils ne constituent pas des actes de l'état civil, sont fréquemment requis à l'occasion de diverses démarches administratives.

Il a indiqué que les trois rapporteurs issus des principaux groupes politiques du Sénat, avaient dressé le constat suivant : l'état civil des Français de l'étranger est bien tenu et rigoureusement contrôlé, mais les conditions de délivrance des certificats de nationalité ne sont pas satisfaisantes.

M. Christian Cointat, co-rapporteur, a tout d'abord présenté le service central d'état civil (SCEC), service à compétence nationale du ministère des affaires étrangères, créé en 1965, rattaché au directeur des Français à l'étranger et des étrangers en France et installé à Nantes en 1986.

Ce service, a-t-il expliqué, assure la conservation, la mise à jour et l'exploitation de trois grands ensembles d'actes :

- les actes de l'état civil des Français de l'étranger, établis et transcrits par les ambassades et consulats (4 millions d'actes au total et entre 100.000 et 150.000 nouveaux actes chaque année) ;

- les actes de l'état civil des Français établis dans les pays anciennement sous souveraineté française, avant leur indépendance ou, le cas échéant, avant l'organisation d'un service consulaire français (8 millions d'actes), le SCEC étant compétent pour reconstituer lui-même les actes manquants ;

- les actes de l'état civil qu'il est chargé d'établir pour les personnes ayant acquis ou recouvré la nationalité française, par déclaration ou par décret (3 millions d'actes).

Il a ajouté que le SCEC enregistrait également, dans un but de publicité, certaines décisions judiciaires prises en France mais concernant un événement d'état civil survenu à l'étranger (divorces, adoptions, jugements déclaratifs de naissance ou de décès...) et tenait le « répertoire civil », qui permet d'assurer la publicité de décisions judiciaires prononcées en France et touchant à la capacité (tutelle, curatelle) de personnes nées à l'étranger.

Enfin, il a souligné que, malgré une forte augmentation de son activité, le service central d'état civil était parvenu jusqu'à présent, à moyens constants, à répondre aux demandes des usagers dans des délais satisfaisants, grâce au recours à l'informatique.

Il a ainsi précisé que, sur les 15 millions d'actes conservés, 7,5 millions étaient numérisés, correspondant à 96 % des demandes de copie ou d'extrait et qu'en 2006, les 372 agents du service avaient :

- délivré 1.726.000 copies ou extraits d'actes, dans un délai n'excédant généralement pas cinq jours ouvrés, hors acheminement postal ;

- apposé 163.000 mentions (mariages, divorces, décès, etc.) ;

- mis à jour ou délivré 46.000 livrets de famille, dans des délais compris entre deux et quatre jours ouvrés, pour les plus courts, et quinze à vingt jours ouvrés, pour les plus longs ;

- établi 150.000 actes, principalement au bénéfice de personnes ayant acquis ou recouvré la nationalité française, dans des délais de trois à quatre jours ouvrés, pour les plus courts, et de quinze à vingt jours ouvrés, pour les plus longs.

M. Christian Cointat, co-rapporteur, a ensuite indiqué que l'installation à Nantes du service central d'état civil avait entraîné la spécialisation du tribunal de grande instance de cette ville dans les aspects internationaux du droit de l'état civil.

Il a exposé que le procureur de la République, autorité de tutelle du service central d'état civil et des services d'état civil des 250 postes diplomatiques ou consulaires français à l'étranger, devait veiller à leur bon fonctionnement et faire rectifier les erreurs ou omissions matérielles des actes de l'état civil figurant sur leurs registres. Les rectifications plus importantes, a-t-il précisé, supposent une décision du président du tribunal.

Il a souligné que le tribunal de grande instance assurait également un contrôle, au moment de leur transcription sur les registres français, de la validité des actes de l'état civil étrangers : mariages, divorces, adoptions, reconnaissances. Cette transcription, a-t-il observé, constitue la condition de l'opposabilité en France, à l'égard des tiers, du mariage d'un Français célébré par une autorité étrangère ; les autres actes étrangers de l'état civil sont en principe opposables de plein droit, mais leur transcription permet de s'adresser aux consulats et au SCEC pour en assurer la mise à jour et en obtenir des copies ou des extraits.

Il observé que, confronté à une activité elle aussi en forte augmentation, le tribunal de grande instance de Nantes n'avait pas reçu des renforts suffisants et accumulait en conséquence un retard préoccupant dans le traitement des affaires.

Il a ainsi précisé qu'en 2006, le parquet avait traité 7.000 demandes de rectification d'actes de l'état civil, reçu des consulats 1.739 demandes d'annulation de mariages, saisi la première chambre civile pour faire annuler 825 mariages célébrés à l'étranger, reçu 4.194 demandes de mention sur les registres de l'état civil français d'un divorce prononcé à l'étranger et opposé 90 refus à ces demandes, examiné 1.841 demandes de transcription d'un jugement étranger d'adoption et refusé 11 % d'entre elles, mais que 5.253 dossiers restaient en attente de traitement en juillet 2007.

Enfin, M. Christian Cointat, co-rapporteur, a rappelé que le certificat de nationalité française pouvait être demandé dans les cas suivants : établissement d'une première carte d'identité ou d'un passeport, candidature à un emploi dans la fonction publique, liquidation de droits à pension. Cette contrainte, a-t-il relevé, se justifie à la fois par la valeur juridique conférée à la carte nationale d'identité et au passeport et par la progression de la fraude documentaire.

Le certificat de nationalité, a-t-il ajouté, est délivré gratuitement par le greffier en chef du tribunal d'instance territorialement compétent ; depuis 2005, tous les Français nés et établis hors de France doivent s'adresser au tribunal d'instance du 1er arrondissement de Paris, alors que cette compétence était partagée auparavant entre plusieurs tribunaux d'instance.

Il a souligné qu'en raison d'une mauvaise évaluation des effectifs nécessaires, de la pratique abusive de certains postes diplomatiques ou consulaires consistant à exiger presque systématiquement la production d'un certificat de nationalité française à l'appui d'une demande de carte nationale d'identité ou de passeport et de l'interruption de l'aide des autorités consulaires à la constitution des dossiers de demandes de certificat en 2005, le service de la nationalité des Français nés et établis hors de France du tribunal d'instance du 1er arrondissement de Paris s'avérait incapable de traiter des demandes de plus en plus nombreuses dans un délai raisonnable, ce qui causait des préjudices considérables aux usagers et constituait une atteinte à leur liberté d'aller et de venir.

Il a ainsi précisé que le service avait reçu 36.000 demandes en 2006, contre 9.000 deux ans auparavant, délivré 1.984 certificats, opposé 6.830 refus, le délai minimum de traitement des demandes étant de 14 à 18 mois. Il s'est étonné et a regretté que les dossiers soient traités selon leur ordre d'arrivée, sans considération ni de leur caractère complet ou incomplet, ni de leur degré d'urgence.

M. Richard Yung, co-rapporteur, a ensuite présenté les 23 recommandations de la mission d'information. Il a indiqué qu'elles étaient destinées à simplifier les démarches des usagers tout en améliorant la lutte contre la fraude documentaire et s'articulaient autour de trois axes :

- renforcer les obligations des administrations publiques ;

- recourir davantage aux nouvelles technologies de l'information et de la communication ;

- constituer à Nantes un grand pôle compétent en matière de droit international de l'état des personnes.

Il a insisté sur la nécessité :

- d'impliquer davantage les postes diplomatiques ou consulaires dans les tâches d'instruction des dossiers administratifs qui leur sont confiées (délivrance des cartes nationales d'identité et des passeports, contrôle de la validité des mariages célébrés par une autorité locale, des adoptions internationales, ainsi que des actes de naissance ou de reconnaissance étrangers) et de rapprocher leur fonctionnement de celui des sous-préfectures et des mairies ;

- d'instaurer un guichet unique pour les demandes de documents administratifs en obligeant toute administration en charge de l'instruction d'un tel dossier, par exemple une demande de carte nationale d'identité ou de passeport, à solliciter directement les services concernés pour obtenir les pièces nécessaires, notamment une copie ou un extrait d'un acte de l'état civil ou un certificat de nationalité française ;

- de mettre fin aux pratiques abusives de certains postes diplomatiques ou consulaires consistant à exiger presque systématiquement la production d'un certificat de nationalité française à l'appui d'une demande de carte nationale d'identité ou de passeport, citant en exemple le cas d'un homme âgé de 70 ans, ancien colonel de l'armée française ayant également exercé les fonctions de sous-préfet, invité pourtant à produire un certificat de nationalité pour pouvoir obtenir un passeport au seul motif qu'il était né au Laos, ou encore les demandes de « certificat de judaïcité » opposées par certaines administrations françaises à des usagers ayant résidé en Algérie ;

- d'autoriser la transmission dématérialisée des copies et extraits d'actes de l'état civil ;

- d'envisager une dématérialisation de l'un des deux registres de l'état civil, le second exemplaire des registres communaux étant actuellement conservé, mais pas mis à jour au greffe des tribunaux de grande instance ;

- d'autoriser les services de la nationalité des tribunaux d'instance et le bureau de la nationalité du ministère de la justice à accéder, en simple consultation, à la base de données du service central d'état civil ;

- de transférer à Nantes le service de la nationalité des Français nés et établis hors de France du tribunal d'instance du 1er arrondissement de Paris ;

- de réorganiser le service de la nationalité des Français nés et établis hors de France, compte tenu de la compétence qui serait donnée aux postes diplomatiques ou consulaires de constituer et de transmettre eux-mêmes les dossiers de demande de certificat de nationalité française pour le compte des demandeurs d'un passeport ou d'une carte nationale d'identité ;

- d'établir des critères d'ordre de traitement des demandes de certificat de nationalité française adressées au service de la nationalité des Français nés et établis hors de France, permettant un examen prioritaire des demandes motivées par l'urgence ;

- de renforcer les effectifs du service central d'état civil, du tribunal de grande instance et du service de la nationalité des Français nés et établis hors de France ;

- de supprimer les dispositions de l'article 185 du code civil interdisant la contestation de la validité du mariage d'une mineure en cas de grossesse survenue dans un délai de six mois, afin d'éviter que de jeunes françaises soient mariées de force dans des pays où l'âge nubile est inférieur à dix-huit ans puis abusées pour que leur grossesse empêche l'annulation du mariage en France.

MM. Jean-Jacques Hyest, président, Patrice Gélard et Michel Dreyfus-Schmidt ont eux aussi insisté sur le fait que les administrations en charge de l'instruction d'un dossier administratif comme une demande de carte nationale d'identité ou de passeport, qu'il s'agisse des consulats ou des sous-préfectures, devaient cesser d'exiger abusivement des certificats de nationalité française mais, au contraire, aider les demandeurs à constituer leurs dossiers et tenir compte des situations d'urgence.

M. Patrice Gélard a en outre dénoncé les graves dysfonctionnements des consulats français, explicables pour partie par un manque de moyens.

La commission a alors adopté l'ensemble des recommandations des rapporteurs et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information.

Maîtrise de l'immigration, intégration et asile - Examen du rapport

La commission a procédé ensuite, sur le rapport de M. François-Noël Buffet, à l'examen du projet de loi n° 461 (2006-2007) relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile.

M. François-Noël Buffet, rapporteur, a présenté les principales dispositions du projet de loi, précisant que plusieurs dispositifs avaient profondément évolué lors de l'examen par l'Assemblée nationale, notamment en matière d'asile. Il a également indiqué que de nombreuses dispositions nouvelles avaient été introduites, en particulier la création d'un livret épargne codéveloppement, l'élargissement des possibilités de procéder à des études sur la mesure de la diversité et de la discrimination sous le contrôle de la Commission nationale informatique et libertés ainsi que la faculté de recourir à des tests ADN pour prouver une filiation à l'appui d'une demande de visa de long séjour pour motifs familiaux.

M. François-Noël Buffet, rapporteur, a rappelé les circonstances dans lesquelles l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de sa commission des lois, avait inséré un article 5 bis autorisant un demandeur de visa de long séjour pour raisons familiales à prouver au moyen d'un test ADN sa filiation avec un de ses parents lorsque ce demandeur est ressortissant d'un pays dont l'état civil présente des carences.

Il a indiqué que plusieurs sous-amendements déposés par le gouvernement avaient sensiblement modifié le dispositif initial, en précisant que :

- seul, le demandeur pouvait avoir l'initiative du recours au test ADN ;

- le dispositif était mis en place à titre expérimental sous le contrôle d'une commission d'évaluation ;

- l'Etat prenait les frais des tests à sa charge en cas de délivrance du visa ;

- le recours à ces tests ne serait possible que pour le demandeur ressortissant d'un pays dont l'état civil présente des carences et figurant sur une liste arrêtée par décret en Conseil d'Etat.

Il a ensuite annoncé qu'il proposerait à la commission deux amendements tendant à renforcer encore l'encadrement du dispositif, le premier prévoyant l'avis préalable du Comité consultatif national d'éthique sur le décret d'application et le second réduisant la durée de l'expérimentation à deux ans à compter de la publication dudit décret.

M. Michel Dreyfus-Schmidt a vivement regretté que le rapporteur ne présente pas un amendement de suppression pure et simple de l'article 5 bis.

M. Pierre Fauchon a déclaré qu'il avait été surpris et choqué par les dispositions introduites à l'Assemblée nationale. Il a indiqué que sa réaction était guidée avant tout par le bon sens plutôt que par des considérations sur le caractère sacré ou non de l'ADN.

Il a tout d'abord rappelé que le regroupement familial n'avait concerné en 2006 que 8.607 mineurs, ce qui représentait moins de 10 % de l'immigration dite familiale et à peine 5% des flux d'entrée annuels de migrants.

Il a ensuite alerté la commission à propos des drames familiaux que le recours à des tests ADN ne manquerait pas de créer lorsqu'un demandeur de bonne foi découvrirait ne pas être le père biologique de son enfant. Il a rappelé que notre droit respectait la présomption de filiation afin précisément de préserver la paix des familles.

Mettant en balance, d'une part, l'intérêt assez dérisoire de ces tests au regard des flux concernés et, d'autre part, l'atteinte terrible qui serait portée à des familles, il a jugé que le bon sens plaidait incontestablement en faveur de l'abandon d'une disposition inutile.

Approuvant les propos de M. Pierre Fauchon, M. Hugues Portelli a indiqué que le cas du Royaume-Uni cité par le ministre lors de son audition par la commission était l'exemple à suivre. Il a expliqué que ce pays avait conclu avec les Etats posant des difficultés en matière d'état civil des accords bilatéraux respectueux de leur souveraineté, évitant ainsi de leur imposer unilatéralement le recours à des tests ADN parfois méconnus ou interdits par leur législation.

Concernant l'amendement proposé par votre rapporteur et prévoyant l'avis du Comité consultatif national d'éthique sur le décret d'application, il a estimé que le Comité aurait du être saisi avant que le législateur ne se prononce.

Mme Catherine Troendle a indiqué que les exemples étrangers qui avaient pu être cités à l'appui de l'amendement de l'Assemblée nationale devaient être examinés avec précaution, les conditions du recours au test ADN y étant diverses. Citant le cas de l'Allemagne, elle a précisé que les tests ADN étaient pratiqués exclusivement sur une base volontaire.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a indiqué que dans le projet de loi tel que sous-amendé par le gouvernement, il incombait au demandeur de solliciter une identification par les empreintes génétiques.

M. Robert Badinter a soulevé plusieurs difficultés constitutionnelles importantes.

En premier lieu, il a remarqué que ce dispositif aboutissait à une situation paradoxale dans laquelle un étranger aurait en définitive le droit d'établir ou de prouver sa filiation par des moyens dont ne disposent pas les citoyens français.

En second lieu, il a estimé que le critère retenu de la carence de l'état civil ferait varier l'application de la loi dans le temps et dans l'espace en fonction d'un état de fait sur lequel notre pays n'a aucune prise, posant ainsi un problème d'égalité devant la loi.

En dernier lieu, citant le professeur Axel Kahn, il a déclaré que ce dispositif créait une inégalité de fait honteuse entre ceux qui pourront avancer, voire payer les frais des tests et les autres.

M. Philippe Arnaud a jugé ce texte dangereux et a réclamé la suppression pure et simple du présent article. Il a déclaré que le volontariat affiché par le projet de loi était un leurre et qu'en pratique les consulats dans ces pays demanderaient quasi systématiquement un test ADN.

En outre, il s'est indigné de la discrimination entre les enfants biologiques et les enfants adoptés que créerait ce dispositif. Il a expliqué que dans les Etats dépourvus d'état civil, les enfants adoptés ou recueillis seraient dans l'incapacité de faire valoir leur filiation.

Mme Michèle André a souligné l'image déplorable de la France que ce débat sur les tests ADN renvoyait dans les pays francophones.

Elle a en outre attiré l'attention sur d'autres dispositions du projet de loi, estimant que ce projet de loi allait une nouvelle fois, après plusieurs lois récemment adoptées, dans le sens d'un durcissement général des règles de l'entrée et du séjour des étrangers en France. Elle a en particulier dénoncé la situation dramatique des conjoints de Français et a souligné les moyens très insuffisants de nos consulats. Elle a jugé que l'image de la France était en jeu.

Puis la commission a examiné les amendements proposés par le rapporteur.

A l'article premier (préparation à l'intégration des bénéficiaires du regroupement familial dans leur pays d'origine), la commission a adopté un amendement tendant à :

- supprimer la création d'une commission administrative provisoire chargée d'élaborer le contenu de l'évaluation portant sur la connaissance des valeurs de la République ;

- à préciser que l'évaluation et la formation linguistiques et civiques préalables à l'entrée en France des bénéficiaires du regroupement familial sont mises en oeuvre à compter du dépôt du dossier complet de demande de regroupement familial en préfecture.

M. Bernard Frimat a demandé si cet amendement supprimait le second test à l'issue de la formation introduit par l'Assemblée nationale. M. François-Noël Buffet, rapporteur, lui a répondu par la négative, en notant qu'en revanche, un amendement à l'article 4 bis ne laissait à cette seconde évaluation qu'un objet pédagogique.

A l'article 2 (modulation en fonction de la taille de la famille des conditions de ressources exigées pour bénéficier de la procédure de regroupement familial), la commission a adopté un amendement réaffirmant le principe du SMIC pour satisfaire à la condition de ressources exigée pour bénéficier du regroupement familial, tout en admettant une modulation modérée jusqu'à 1,2 SMIC pour les seules familles de six personnes ou plus.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a indiqué qu'en pratique très peu de demandes de regroupement familial concernaient des familles nombreuses, la plupart étant le fait de jeunes couples.

M. Bernard Frimat s'est étonné que l'on fasse des lois pour des situations marginales.

A l'article 2 bis (modulation des conditions de ressources en fonction de la taille de la famille pour permettre aux titulaires de la carte de résident longue durée-CE de bénéficier du regroupement familial), la commission a adopté un amendement de coordination avec l'amendement précédent à l'article 2.

A l'article 2 quater (maintien du titre de séjour malgré la rupture de la vie commune en cas de violences conjugales), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 3 (création d'un contrat d'accueil et d'intégration à destination des familles), la commission a adopté deux amendements tendant respectivement à :

- préciser que les parents concluent « conjointement » le contrat d'accueil et d'intégration pour la famille avec l'Etat ;

- ajouter aux obligations liées à la conclusion de ce contrat le respect de l'obligation scolaire.

Elle a également adopté un amendement rétablissant le texte du projet de loi initial qui prévoyait la saisine du président du Conseil général par le préfet en cas de non-respect du contrat d'accueil et d'intégration pour la famille afin de mettre en oeuvre un contrat de responsabilité parentale. Elle a jugé que cette solution respectait mieux la gradation des sanctions ainsi que les compétences du président du Conseil général en matière de protection de l'enfance.

A l'article 3 bis (ajustements relatifs au contrat d'accueil et d'intégration), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 4 (préparation à l'intégration des conjoints de Français dans leur pays d'origine), la commission a examiné deux amendements tendant respectivement à :

- supprimer, comme à l'article premier, la création d'une commission administrative provisoire chargée d'élaborer le contenu de l'évaluation portant sur la connaissance des valeurs de la République ;

- préciser et clarifier les délais de délivrance des visas de long séjour aux conjoints de Français.

M. Christian Cointat a déclaré que l'entrée en France d'un étranger dans le cadre du regroupement familial et celle d'un conjoint de Français étaient deux cas très différents devant être traités selon des règles distinctes.

Il a rappelé que plusieurs lois récentes avaient déjà considérablement renforcé le contrôle des mariages mixtes conclus en France ou à l'étranger. Il a jugé que notre pays avait désormais l'une des législations les plus restrictives en ce domaine et que la vie de nombreux citoyens s'en trouvait gâchée.

Citant des exemples concrets, il a jugé que l'article 4 du projet de loi compliquerait encore les choses et soumettrait les conjoints de Français à des obligations d'évaluation et de formation linguistiques et civiques disproportionnées et inutiles. Bien que comprenant les préoccupations du gouvernement, il a estimé que la méthode suivie était mauvaise et qu'elle portait atteinte à la liberté du mariage et au respect de la vie privée.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a déclaré que le mariage avec un Français constituait déjà en soi un signe fort d'intégration et que le conjoint devait bénéficier d'une présomption d'intégration.

Intervenant à propos d'une autre disposition prévue au même article, M. Bernard Frimat a regretté que le rapporteur ne présente pas un amendement maintenant le dispositif introduit par le Sénat dans la loi du 24 juillet 2006 à l'initiative du regretté Jacques Pelletier. Grâce à ce dispositif, un conjoint de Français dépourvu de titre de séjour peut déposer sa demande de visa de long séjour auprès de la préfecture sans être ainsi obligé de retourner dans son pays afin d'y obtenir un visa et se trouver ainsi séparé de son conjoint pendant plusieurs mois, à condition qu'il soit entré régulièrement en France, s'y soit marié et y ait séjourné plus de six mois avec son conjoint français.

M. François-Noël Buffet, rapporteur, a indiqué que ce système ne fonctionnait malheureusement pas en pratique.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a estimé que ce dispositif ne permettait pas de lutter contre les mariages de complaisance, le mariage ayant déjà eu lieu et le conjoint étranger étant intégré.

M. Patrice Gélard a indiqué partager l'opinion de son collègue Christian Cointat et soutenir un amendement de suppression de ce dispositif.

M. Bernard Frimat a regretté que le projet de loi assimile les conjoints de Français aux conjoints d'étrangers.

M. François-Noël Buffet, rapporteur, a indiqué qu'il ne voterait pas un tel amendement de suppression.

A l'issue de ce débat, la commission a rejeté les deux amendements du rapporteur et a adopté un amendement supprimant la préparation à l'intégration des conjoints de Français dans leur pays d'origine.

A l'article 4 bis (évaluation du besoin de formation linguistique dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration), la commission a adopté un amendement précisant que, seuls, les bénéficiaires du regroupement familial qui ont été dispensés de suivre une formation linguistique dans le pays où ils sollicitent le visa sont réputés ne pas avoir besoin d'une formation linguistique dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration en France.

A l'article 5 bis (recours au test ADN pour prouver une filiation en cas de carence de l'état civil dans le cadre de la procédure de regroupement familial), la commission, après une suspension, a rejeté les deux amendements présentés par le rapporteur. Elle a alors adopté un amendement de suppression de l'article 5 bis.

A l'article 5 ter (maintien du titre de séjour malgré la rupture de la vie commune en cas de violences conjugales), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

La commission a ensuite adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 5 quater ayant pour objet de mieux protéger le conjoint victime de violences conjugales contre un chantage au titre de séjour en cas de rupture de la vie commune.

A l'article 6 A (information des demandeurs d'asile à la frontière sur la possibilité d'introduire un recours suspensif contre un refus d'entrée au titre de l'asile), la commission a adopté un amendement de précision.

A l'article 6 (caractère suspensif du référé-liberté dirigé contre une décision de refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile), la commission a adopté deux amendements tendant à :

- allonger de 24 à 48 heures le délai pour déposer un recours suspensif contre une décision de refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile ;

- préciser la procédure d'appel.

A l'article 7 (prorogation d'office du maintien en zone d'attente en cas de demande tardive de référé à l'encontre d'un refus d'entrée en France au titre de l'asile), la commission a adopté deux amendements tendant à :

- faire passer de quatre à six jours la durée de prorogation d'office du maintien en zone d'attente en cas de dépôt tardif d'une demande d'asile afin de tenir compte de l'allongement des délais de recours contre une décision de refus de cette demande ;

- préciser que le juge des libertés et de la détention peut mettre un terme à la prorogation d'office du maintien en zone d'attente.

A l'article 8 (codification dans le code de justice administrative des dispositions procédurales spécifiques aux demandes de référé-liberté à l'encontre d'un refus d'asile à la frontière), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 9 ter (délai de recours devant la commission des recours des réfugiés), la commission a adopté un amendement tendant à rétablir à un mois le délai de recours devant la Commission des recours des réfugiés.

A l'article 12 (suppression de l'opposabilité de l'emploi aux salariés en mission), la commission a adopté un amendement permettant d'ajuster la durée de validité de la carte « salarié en mission » en fonction de la durée de la mission en France.

A l'article 12 bis (appel contre la libération d'un étranger maintenu en rétention ou en zone d'attente), la commission a adopté un amendement de suppression de l'article, estimant le dispositif contraire à la Constitution.

La commission a ensuite adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 12 sexies et limitant aux seuls titulaires d'une carte de séjour temporaire « salarié » le bénéfice du renouvellement de la carte en cas de licenciement dans les trois mois précédant ce renouvellement.

Elle a également adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 12 sexies et relatif à la codification d'une disposition intéressant les commerçants étrangers non résidents.

A l'article 13 (conditions du recours à la visio-conférence devant le juge des libertés et de la détention), la commission a adopté un amendement de coordination.

A l'article 20 (traitements de données nécessaires à la conduite d'études sur la diversité), la commission a adopté deux amendements tendant à :

- préciser que les résultats des traitements de données nécessaires à la conduite d'études sur la mesure de la diversité et de la discrimination ne devaient en aucun cas permettre l'identification directe ou indirecte des personnes concernées ;

- permettre à d'autres services producteurs d'informations statistiques que l'INSEE de réaliser des traitements statistiques sur la mesure de la diversité après autorisation de la CNIL.

M. Jean-René Lecerf, tout en saluant l'effort pour développer les études sur la mesure de la diversité et des discriminations, a indiqué qu'il présenterait des sous-amendements inspirés des amendements qu'il avait défendus en tant que rapporteur de la loi relative à l'égalité des chances.

La commission a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.