Mardi 13 novembre 2007

- Présidence de M. Robert del Picchia, vice-président.

PJLF pour 2008 - Audition de Mme Anne Gazeau-Secret, directeur général de la coopération internationale et du développement du ministère des Affaires étrangères et européennes

La commission a procédé à l'audition de Mme Anne Gazeau-Secret, directeur général de la coopération internationale et du développement, sur le projet de loi de finances pour 2008.

Accueillant Mme Anne Gazeau-Secret, M. Robert del Picchia, président, a rappelé que la direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID) du ministère des Affaires étrangères et européennes était responsable de trois programmes intéressant la commission : le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » de la mission « Aide publique au développement », le programme 185 « Rayonnement culturel et scientifique » de la mission « Action extérieure de l'Etat » et le programme 115 « Audiovisuel extérieur » de la mission « Medias », qui représentent au total plus de 2,6 milliards d'euros, soit 60 % du budget du ministère des Affaires étrangères.

Il a invité Mme Anne Gazeau-Secret à s'exprimer sur les principales orientations du projet de loi de finances pour 2008 concernant ces trois programmes, ainsi que sur les projets de réforme de l'organisation de cette direction générale et de ses relations avec les différents opérateurs.

En ce qui concerne le programme 185 « Rayonnement culturel et scientifique », qui recouvre la coopération avec les pays développés au sens de l'OCDE et le service public d'enseignement français à l'étranger, Mme Anne Gazeau-Secret a indiqué que le montant de la dotation s'élève à 490 millions d'euros en 2008.

L'enseignement français à l'étranger mis en oeuvre par l'AEFE représente à lui seul 59 % de cette dotation et 73 % , hors rémunérations. Les montants alloués aux autres actions (comme la promotion du français) en 2008, sont globalement identiques à ceux de 2007.

Le mouvement de rationalisation du réseau culturel et de coopération, caractérisé par un redéploiement des centres et instituts culturels d'Europe occidentale vers les pays émergents, se poursuit en 2008. Il s'accompagne d'un redéploiement des personnels.

D'ores et déjà, environ un tiers des centres et instituts culturels ont été supprimés au cours de ces dix dernières années et des réflexions sont en cours concernant d'éventuelles fermetures de centres ou d'instituts culturels au Royaume-Uni (Edimbourg, Glasgow), en Allemagne (Stuttgart), ou en Italie (Florence, Turin).

Ces fermetures ont parfois un coût élevé, à l'image de la fermeture du centre culturel de Bilbao qui a coûté un million d'euros, a indiqué Mme Anne Gazeau-Secret, mais elles permettent de redéployer les moyens vers les pays d'Europe centrale et orientale ou vers les pays émergents.

Concernant l'AEFE, Mme Anne Gazeau-Secret a rappelé que cet opérateur avait été doté d'un plan d'orientation stratégique qui arrive à échéance à la fin de cette année. Il a été décidé d'organiser des Etats généraux de l'enseignement français à l'étranger, probablement au premier semestre 2008, qui rassembleront l'ensemble des acteurs concernés, notamment les syndicats d'enseignants et les associations de parents d'élèves. Ils devraient permettre de déterminer les attentes en vue des futures orientations stratégiques, lesquelles devaient figurer dans un futur contrat d'objectifs et de moyens entre l'Etat et l'AEFE.

Conformément à l'engagement pris par le Président de la République, les frais de scolarité des élèves français des établissements français à l'étranger seront progressivement pris en charge par l'Etat, pour un coût de 5 millions d'euros dès la rentrée de 2007 pour les élèves de terminale et de 20 millions d'euros en 2008 pour l'extension aux classes de première.

Enfin, une dotation supplémentaire de 8,5 millions d'euros est prévue pour l'immobilier de l'agence.

Mme Anne Gazeau-Secret a ensuite évoqué le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement », qui fait partie de la mission « Aide publique au développement », dont il représente 49 % des autorisations d'engagement et 67 % des crédits de paiement. Les pays bénéficiaires de ces crédits sont les pays figurant dans la liste de l'OCDE, c'est-à-dire les 77 pays les plus pauvres de la planète, dont les 55 pays de la zone de solidarité prioritaire (ZSP), ainsi que les principaux pays émergents d'Asie et d'Amérique.

Les autorisations d'engagement devraient augmenter de 3,2 % en 2008, grâce à la progression des dons-projets de l'AFD, alors que les crédits de paiement (hors rémunérations) sont reconduits de 2007 sur 2008. Le montant global de l'aide publique au développement devait être maintenu à son niveau de 2006, qui était de 8,5 milliards d'euros, soit environ 0,47 % du PNB.

L'objectif fixé reste d'atteindre 0,7 % en 2015 et il convient de relever que nos partenaires britannique, allemand et espagnol ont augmenté fortement leur contribution, avec des mesures nouvelles de l'ordre de 750 millions d'euros au Royaume-Uni ou en Allemagne.

Les crédits destinés aux dons-projets de l'Agence française de développement (AFD) sont de 320 millions d'euros en autorisations d'engagement et 195 millions d'euros en crédits de paiement en 2008.

Mme Anne Gazeau-Secret a indiqué que, au début du mois de novembre, l'AFD n'avait engagé que 50 % de ses crédits pour 2007, ce qui soulevait des interrogations sur le fonctionnement de cette structure.

L'aide multilatérale, qui regroupe le FED, le Fonds mondial SIDA, les contributions volontaires aux organisations des Nations unies ou encore les contributions aux organisations de la francophonie, occupe une place croissante au sein du programme 209, de l'ordre de 56 %. On peut relever, en particulier, la montée en puissance du FED, qui devrait représenter 775 millions d'euros en 2008, alors que les contributions volontaires aux organisations des Nations unies, de l'ordre de 90 millions d'euros, demeurent au même niveau qu'en 2007.

Les principaux axes stratégiques de la politique française en faveur du développement sont, pour les 55 pays de la zone de solidarité prioritaire (ZSP), de susciter la croissance, réduire la pauvreté et faciliter l'accès aux biens publics mondiaux, en contribuant ainsi à atteindre les objectifs du millénaire pour le développement à l'horizon 2015. En ce qui concerne les autres pays, la France accompagne les pays émergents dans leur transition en soutenant leur développement économique et humain, notamment par des cofinancements. La coopération technique, culturelle, universitaire et scientifique y est la traduction de sa politique dédiée au renforcement de l'attractivité de son territoire.

A cet égard, Mme Anne Gazeau-Secret s'est interrogée sur la pertinence de regrouper au sein de ce programme des pays aussi divers que les pays en développement et les pays émergents, comme la Chine, le Brésil ou l'Inde. Elle a rappelé que les financements destinés aux pays en développement représentaient 91 % des crédits du programme, contre 9 % seulement pour les pays émergents. Elle a considéré pourtant comme prioritaire un effort en matière de coopération technique et scientifique vers ces pays et une meilleure articulation avec les pôles de compétitivité constitués en France.

Enfin, évoquant le programme « Audiovisuel extérieur », Mme Anne Gazeau-Secret a rappelé que ce programme avait pour objet de financer les trois opérateurs audiovisuels extérieurs placés sous la tutelle du ministère des affaires étrangères et européennes, c'est-à-dire le groupe RFI, TV5 Monde et Canal France International et d'apporter un soutien à la radio maroco-française Médi1.

Le projet de loi de finances pour 2008 prévoit une reconduction à l'identique de la loi de finances pour 2007, soit 159 millions d'euros. Toutefois, il est prévu, grâce à une réduction de la trésorerie de CFI qui se traduira par une reprise de provision de 3 millions d'euros, d'abonder les subventions de TV5 Monde et de RFI de 1,5 million d'euros chacune, afin de mettre en oeuvre partiellement deux priorités : l'augmentation du sous-titrage sur TV5 et l'accompagnement d'un contrat d'objectifs et de moyens avec RFI.

L'ensemble du dispositif audiovisuel extérieur français fait actuellement l'objet d'une réflexion approfondie qui devrait déboucher, d'ici à la fin de l'année, sur des propositions de réorganisation en profondeur, a indiqué Mme Anne Gazeau-Secret.

Evoquant ensuite les réflexions actuellement en cours sur l'organisation et le rôle de la DGCID et ses liens avec les opérateurs dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) lancée par le gouvernement, Mme Anne Gazeau-Secret a indiqué qu'il ne s'agissait à ce stade que de réflexions préparatoires et qu'aucune décision définitive n'avait été encore prise.

Plusieurs réflexions sont en cours, en particulier sur le transfert des compétences de la DGCID à des opérateurs et la création d'une direction des affaires globales au sein du ministère des Affaires étrangères et européennes.

Concernant ce dernier point, Mme Anne Gazeau-Secret considère que, par ses missions, la DGCID se trouve au coeur du traitement des grandes questions globales (santé, changement climatique, diversité culturelle, inégalités nord / sud, mobilité des compétences et des savoirs, etc.).

Concernant le transfert de compétences à des opérateurs, Mme Anne Gazeau-Secret a souligné à plusieurs reprises le risque que cela comporterait (perte de cohérence de la politique d'influence de la France, éclatement des responsabilités). Elle estime au contraire préférable de renforcer le réseau aujourd'hui géré par le ministère des Affaires étrangères et européennes en créant de véritables opérateurs de service locaux et interministériels, déconcentrés sous l'autorité des ambassadeurs.

Il convient donc de regrouper les moyens disponibles en définissant de véritables priorités au niveau de chaque poste, en s'appuyant sur les personnels qui feraient le lien entre la demande locale et l'offre française, dans le cadre d'une logique partenariale. Pour ce faire, on pourrait étendre la formule des centres de coopération culturelle et de coopération, issus de la fusion des SCAC et des établissements à autonomie financière, déjà testés avec succès dans dix capitales, améliorer la formation managériale des agents, développer les partenariats avec le privé et utiliser de manière plus efficace les financements multilatéraux.

Cette création d'opérateurs locaux devrait s'accompagner d'une véritable géographisation des missions en fonction des priorités d'action de la France dans les diverses catégories de pays.

Mme Anne Gazeau-Secret estime enfin nécessaire de renforcer les capacités de pilotage des opérateurs de la DGCID, actuellement insuffisantes faute de moyens et de compétences appropriées.

M. Jean-Guy Branger a remercié Mme Anne Gazeau-Secret pour son exposé et l'a encouragée à poursuivre dans cette voie.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis, a regretté le manque de lisibilité des documents budgétaires et les changements de périmètre, qui rendent difficiles les comparaisons d'une année sur l'autre.

Bien que l'exercice d'audit soit utile, Mme Monique Cerisier-ben Guiga s'est interrogée sur le fait de savoir si la multiplication de ce type d'exercice ces dernières années, à l'image de la révision générale des politiques publiques, qui a succédé au plan de modernisation, n'aboutissait pas en définitive à ce que la réflexion prenne le pas sur l'action concrète sur le terrain. Elle a également souhaité que le Parlement soit associé à ces travaux.

Elle a aussi considéré que confier la responsabilité de l'aide au développement à l'AFD aboutirait à ressusciter le ministère de la coopération, tout en le soustrayant au contrôle du Parlement, l'AFD n'ayant pas le statut d'opérateur au sens de la LOLF.

Elle a ensuite posé trois questions.

Tout d'abord, elle a souhaité savoir s'il serait possible de rééquilibrer le programme 185 sans pour autant porter atteinte au financement de l'AEFE.

Ensuite, elle a rappelé que l'audit relatif à l'état des bâtiments scolaires des 73 établissements en gestion directe avait estimé à 240 millions d'euros les crédits à mobiliser sur cinq ans pour réhabiliter ce parc immobilier et le mettre aux normes de sécurité, soit 48 millions d'euros par an. Or, elle a fait observer que, dans le projet de loi de finances pour 2008, seuls 8,5 millions d'euros sont inscrits. Mme Monique Cerisier-ben Guiga a donc souhaité savoir si des moyens de financement autres que l'augmentation des frais de scolarité sont possibles, compte tenu de l'échec des procédures de partenariat public/privé.

Enfin, Mme Monique Cerisier-ben Guiga a souhaité connaître les résultats de la réunion avec les partenaires francophones organisée à Lucerne, où la réforme de l'audiovisuel extérieur français a été évoquée.

En réponse, Mme Anne Gazeau-Secret a considéré que, dans le contexte budgétaire actuel, seule, une logique de partenariat pourrait permettre une relance de la coopération culturelle.

Concernant l'immobilier, elle a admis que les partenariats public- privé n'avaient pas donné les résultats escomptés.

Enfin, concernant la réunion de Lucerne sur l'audiovisuel extérieur, Mme Anne Gazeau-Secret a indiqué que la discussion n'avait pas été facile avec les partenaires francophones.

En réponse à une question de M. Robert del Picchia, président, qui s'est félicité de l'excellent partenariat avec les Alliances françaises, Mme Anne Gazeau-Secret a indiqué qu'elle voyait de manière très favorable cette intégration avec le dispositif culturel. Les Alliances françaises seront bien prises en compte dans la réforme du réseau culturel à l'étranger. Si des progrès ont été réalisés ces dernières années, comme la création d'une fondation et le regroupement des Alliances françaises, il reste encore quelques doublons, comme Londres ou Mexico.

Mercredi 14 novembre 2007

- Présidence de M. Robert Del Picchia, vice-président

PJLF pour 2008 - Mission « Défense » - « Environnement et soutien de la politique de défense » - Examen du rapport pour avis

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Didier Boulaud sur les crédits des programmes « Environnement et soutien de la politique de défense » de la mission « Défense », inscrits au projet de loi de finances pour 2008.

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a rappelé que le programme « Soutien de la politique de défense » couvrait l'administration générale, l'informatique d'administration et de gestion et l'essentiel de la politique immobilière du ministère de la défense, sous la responsabilité du secrétaire général pour l'administration. Il a précisé que la progression sensible (11 % pour les autorisations d'engagement et près de 9 % pour les crédits de paiement) des dotations de ce programme, qui atteindront 3,4 milliards d'euros en 2008, provenait en grande partie de l'évolution de certaines charges inéluctables, comme la subvention d'équilibre au Fonds de pension des ouvriers d'Etat ou de mesures techniques de transferts de crédits qui modifient le périmètre du programme.

Au titre de la politique immobilière, le rapporteur pour avis a signalé la progression sensible des dotations d'investissement destinées au logement familial, qui ont doublé sur cinq ans, alors que les opérations d'infrastructure représenteront près d'1,2 milliard d'euros. L'année 2008 sera marquée par une nouvelle étape dans la mise en place des loyers budgétaires (153 millions d'euros, contre 67 millions d'euros en 2007) et par le début du transfert de l'Ecole nationale supérieure des techniques avancées de Paris à Palaiseau. Menée selon la formule de la location avec option d'achat, cette opération nécessite un montant de 120 millions d'euros d'autorisations d'engagement en 2008, pour la notification du marché, alors que le versement du loyer n'interviendra qu'à compter de la livraison des bâtiments en 2012.

Le rapporteur pour avis a estimé que la réforme de la gestion des crédits d'infrastructure, désormais placés sous une responsabilité unique pour la plus large part d'entre eux, avait notablement amélioré le taux de consommation des crédits. Il a en revanche estimé que le fonctionnement du nouveau service d'infrastructure de la défense n'était sans doute pas optimal, en raison de certaines difficultés liées aux disparités de statuts entre ingénieurs militaires et personnels civils et des interrogations sur la bonne prise en compte des besoins spécifiques liés à certaines activités opérationnelles jusqu'alors traitées par les services d'armée.

S'agissant des autres actions du programme « Soutien de la politique de défense », M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a mentionné la dotation d'un peu plus de 60  millions d'euros correspondant à l'externalisation des véhicules de la gamme commerciale du ministère de la défense, le marché emporté fin 2006 par une filiale du groupe américain General Electric représentant 20 000 véhicules.

Le rapporteur pour avis a également relevé que les crédits d'accompagnement des restructurations des armées et de DCN diminueraient de 186 à 145 millions d'euros de 2007 à 2008, du fait d'une réduction du nombre de bénéficiaires. Il a observé que ce poste pourrait de nouveau s'alourdir si une nouvelle étape de restructurations, et notamment de réduction des implantations territoriales du ministère de la défense, venait à se confirmer dans les prochains mois.

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a ensuite évoqué le programme « Environnement et prospective de la politique de défense », placé sous la responsabilité du directeur chargé des affaires stratégiques.

Il a tout d'abord indiqué que les dotations des deux actions relatives à la recherche et technologie (prospective des systèmes de forces et maintien des capacités technologiques) s'élèveraient en 2008 à un peu plus d'1 milliard d'euros, soit un niveau strictement identique à celui de 2007.

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a noté qu'en raison de la multiplicité des agrégats, de la modification de leur périmètre ou encore de l'apparition de nouvelles définitions, comme les études de défense, il était extrêmement difficile de suivre l'effort financier consacré à la recherche de défense, aucune de ces notions ne recoupant d'ailleurs la présentation des crédits telle qu'elle résulte de la LOLF.

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a noté qu'après un relèvement significatif à compter de 2005, les dotations consacrées à la recherche avaient désormais tendance à plafonner. Le budget des études-amont restera en 2008 situé autour de 640 millions d'euros, alors que le ministère de la défense souhaite progressivement parvenir à 1 milliard d'euros par an.

Il a évoqué les différents plans d'études-amont en cours ou à venir. Il a précisé notamment que seront lancés en 2008 deux micro-satellites à titre de démonstrateur d'alerte spatiale sur les tirs de missiles balistiques.

Soulignant la nécessité d'accentuer les recherches menées en coopération internationale, et en premier lieu européenne, le rapporteur pour avis a signalé une évolution positive, la part de celles-ci dans notre effort de recherche passant de 15 % en 2006 à 17 % en 2007. Il a mentionné le lancement par l'Agence européenne de défense du premier programme de recherche dont elle assurera la gestion, ce programme portant sur la protection des forces en milieu urbain et ralliant 20 pays. Il a ajouté que l'Agence pouvait aussi servir de cadre à des projets de recherche dont elle n'assume pas directement la gestion, comme tel sera le cas pour le programme d'études-amont sur la radio logicielle, qui regroupe autour de la France cinq autres pays (Suède, Italie, Pologne, Finlande, Espagne).

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a ensuite abordé les actions relatives au renseignement de sécurité.

S'agissant de la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD), il s'est interrogé sur les raisons de l'ouverture prochaine d'un nouveau détachement à Kourou, auprès du Centre spatial guyanais.

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a ensuite présenté les principales évolutions du budget de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), dont les crédits inscrits à la mission « Défense » s'élèveront à 440 millions d'euros en 2008.

Le rapporteur pour avis a tout d'abord relevé qu'à la différence des lois de finances précédentes, qui prévoyaient une augmentation lente mais continue des effectifs de la DGSE, le projet de loi de finances pour 2008 s'alignait sur le niveau réel des effectifs constatés à la mi-2007 et n'escomptait pas de création de postes. Il a regretté que l'effort réalisé ces dernières années ne soit pas poursuivi, d'autant plus que les comparaisons avec les services britanniques, et même allemands, confirment que le niveau actuel des effectifs de la DGSE ne peut être considéré comme satisfaisant au regard des besoins. Il a également considéré que la structure des personnels restait déséquilibrée au détriment des emplois de cadres, la mise en adéquation des moyens humains de la DGSE avec ses missions restant donc largement à opérer.

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a noté la progression des crédits d'investissement (+ 12 % pour les autorisations d'engagement et + 6,5 % pour les crédits de paiement). Il a signalé que la mise en service d'un nouveau centre de calcul induisait une augmentation très importante de la consommation électrique qui n'a pas donné lieu à l'attribution de crédits de fonctionnement supplémentaires pour 2008. Il a douté que la recherche d'économies internes soit suffisante pour faire face à cette dépense.

Il a estimé qu'en dépit des efforts réalisés, l'amélioration des équipements dédiés au renseignement technique peinait à suivre le rythme des besoins d'interception et de stockage des données, le renforcement des moyens techniques du renseignement extérieur constituant l'un des défis à relever dans le cadre de la prochaine loi de programmation.

En conclusion, M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, a observé que les dotations prévues pour 2008 sur les programmes « Soutien » et « Environnement » de la politique de défense ne marquaient pas d'évolution particulièrement significative. Il a estimé que dans des domaines comme la recherche ou le renseignement extérieur, où les besoins étaient loin d'être satisfaits, cette stabilité ne pouvait manquer de provoquer une certaine déception.

Le rapporteur pour avis s'est également demandé dans quelle mesure les dotations prévues en loi de finances initiale se traduiraient en opérations réelles au cours de l'exercice 2008, notamment pour le lancement d'opérations d'infrastructure ou de plans d'études-amont, l'engagement effectif des montants inscrits étant suspendu aux conclusions de la revue de programmes en cours et aux arbitrages sur la future loi de programmation.

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis, s'en est remis à la sagesse de la commission sur le projet de budget.

La commission a ensuite émis un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes « Soutien de la politique de défense » et « Environnement de la politique de défense ».

PJLF pour 2008 - Mission « Défense » - « Préparation et emploi des forces » - Examen du rapport pour avis

Puis la commission a examiné le rapport pour avis de MM. André Dulait et Philippe Nogrix sur les crédits de la mission « Défense » du projet de loi de finances pour 2008, affectés à la « Préparation et emploi des forces » (programme 178).

M. André Dulait, rapporteur pour avis, a tout d'abord indiqué que le programme 178 regroupait près de 90 % des personnels civils et militaires de la défense, ce qui lui permettrait d'évoquer plus largement la problématique des effectifs du ministère.

Il a souligné qu'après une phase de montée en puissance des effectifs, liée à la mise en place de l'armée professionnelle à partir de 1997, la défense était entrée dans une phase différente, marquée par la volonté de maîtriser la masse salariale en agissant sur les effectifs. Ce changement a coïncidé, en 2006, avec la mise en oeuvre de la LOLF et le passage d'une logique de postes budgétaires à une logique de masse salariale globale.

Il a noté qu'en 2008 les dépenses de personnels de la défense étaient marquées par les mêmes orientations que celles de la fonction publique d'Etat : il s'agissait de ne pas remplacer l'ensemble des départs en retraite, tout en améliorant la rémunération des personnels en poste. A ce titre, 2.426 équivalents temps plein (ETPT) sont supprimés sur la mission « Défense », dont 1.872 militaires et 554 civils, ce qui correspond au non-remplacement, sur deux ans, d'un départ à la retraite sur deux.

Il a rappelé que le ministère de la défense restait le deuxième employeur de l'Etat, derrière l'enseignement scolaire, avec 14,52 % des effectifs et 15,26 % des crédits de rémunération et charges sociales. Il a indiqué que les crédits destinés à la masse salariale passaient de 18 milliards d'euros, en 2007, à 18,3 milliards d'euros en 2008 et que l'évolution à la baisse du plafond d'emploi permettait le financement de mesures catégorielles au profit des personnels civils et militaires. 44,82 millions d'euros sont ainsi consacrés à l'amélioration de la solde des militaires du rang et des sergents, en application des recommandations du haut comité d'évaluation de la condition militaire. Ces mesures s'ajoutent à la poursuite du plan d'amélioration de la condition militaire, qui porte en grande partie sur le logement, et aux crédits du fonds de consolidation de la professionnalisation qui supporte diverses mesures en faveur de la condition militaire.

M. André Dulait, rapporteur pour avis, a souligné que les orientations générales en matière de personnel se déclinaient en fonction des spécificités propres à la défense, qui se caractérisent, d'une part, par la coexistence de personnels civils et militaires à la gestion totalement cloisonnée et, d'autre part, pour les militaires, par l'importance de la proportion des personnels sous contrat (près de 54 %) et par la nécessité opérationnelle d'entretenir un volume régulier de départs et de recrutement pour maintenir une moyenne d'âge peu élevée (31,5 ans en moyenne, 26 ans pour les militaires du rang).

Il a relevé qu'en l'absence de réformes plus vastes, les armées allaient répartir l'effort dans les services de soutien et décaler ou geler les recrutements dans certaines spécialités. Il a observé que les deux processus de réduction d'effectifs, militaire et civil, étaient menés de façon parallèle, sans aucune articulation. Plus généralement, ces deux populations sont gérées de façon totalement cloisonnée et ne sont soumises ni à la même autorité de gestion, ni aux mêmes règles de mobilité et de calendrier de mutation. Il a considéré que le ministère de la défense devrait ouvrir ce chantier afin de s'adapter de façon plus souple aux contraintes d'effectifs.

Il a souligné que l'autre chantier d'importance était celui de la révision des schémas d'implantation, qui devrait être, à la suite de la révision générale des politiques publiques et du nouveau Livre blanc, placée au coeur de la prochaine loi de programmation militaire. En mutualisant davantage les services de soutien, les armées pourront préserver leur efficacité opérationnelle dans un contexte de réduction des effectifs.

Il a précisé que, dans l'attente de cette réforme, les solutions adoptées étaient peu satisfaisantes. Les recrutements sont utilisés comme variables d'ajustement, ce qui est très dommageable à court terme, mais surtout à moyen terme car un arrêt des recrutements accentue la vulnérabilité des armées à toute modification de leur environnement, comme des départs massifs vers de grandes entreprises publiques ou privées.

Il a souligné qu'en outre les armées seraient très certainement exposées à des difficultés croissantes de recrutement pour des raisons démographiques. Il a relevé que l'indicateur fourni par le projet de loi de finances ne rendait pas compte de la dégradation du taux de sélectivité, mais qu'il s'érodait de fait, notamment pour les militaires du rang. Il a cependant souligné qu'à la différence d'autres secteurs marqués par de fortes contraintes, les armées pourvoyaient dans l'immédiat à leurs besoins de recrutement.

Dans ce contexte, il a estimé que le plan pour l'égalité des chances, qui visait à ouvrir plus largement les lycées et les écoles militaires aux jeunes socialement défavorisés, était tout à fait dans l'intérêt des armées, en permettant de mieux refléter la diversité de la société française après la suspension du service national, mais aussi de recruter des personnes dans un vivier plus large.

Il a remarqué que l'élargissement du champ du recrutement se traduisait par un effort particulier sur la formation, qu'une part limitée des personnels recrutés avait vocation à faire une carrière longue et que, par conséquent l'accent devait être mis sur la reconversion. Sur ce dernier point, il a estimé que, là encore, l'indicateur fourni était très insuffisant.

Evoquant la problématique des retraites, il a indiqué qu'en dépit de limites d'âge assez basses, compte tenu des possibilités de retraite à jouissance immédiate à 15 et 25 ans de service, rares étaient les militaires qui faisaient liquider leur pension à la limite d'âge statutaire. Ces règles spécifiques se traduisent par un taux de cotisation employeur de 103 % en application duquel la contribution au compte d'affectation spéciale sur les pensions s'élevait à 5 milliards d'euros sur le programme 178. Il a indiqué que, pour 2008, la charge des pensions militaires était estimée à 8,5 milliards d'euros.

Abordant enfin les opérations extérieures, il a noté que le processus de budgétisation des surcoûts marquait le pas avec une stabilisation de la provision à 360 millions d'euros. Il a rappelé que, pour 2007, ce surcoût était estimé à 650 millions d'euros et souligné que rien ne laissait présager une diminution du niveau d'engagement de la France en 2008. En 2008, comme en 2007, quelque 300 millions d'euros de dépenses devraient donc trouver un financement en cours d'année, ce qui représente un risque pour les programmes d'armement qui ont longtemps été la variable d'ajustement aux surcoûts des opérations extérieures. Il a estimé, en conclusion, que le Sénat s'apprêtait à voter un budget de transition dans l'absence de réformes substantielles. La commission devrait veiller à ce que ces réformes soient accompagnées de façon satisfaisante tant sur le plan social que sur celui des infrastructures ou encore des équipements.

M. André Dulait, rapporteur pour avis, s'exprimant également au nom de M. Philippe Nogrix, rapporteur pour avis, empêché, a ensuite présenté les crédits de fonctionnement du programme 178.

Avant d'analyser ces crédits, il a rappelé le caractère spécifique du projet de loi de finances pour 2008 dans le domaine de la défense : il s'agit d'un budget de transition, qui clôt l'exécution de la loi de programmation militaire (LPM) 2003-2008, et qui a été construit dans l'attente des conclusions des travaux menés, tant par la commission du « Livre blanc » que par l'audit de l'ensemble des ministères. Pour accompagner cet audit, le ministre de la Défense a installé, le 4 septembre 2007, un groupe de travail composé de sept chefs d'entreprise chargés d'analyser les propositions d'économie et de réorganisation qui vont être proposées par cet audit.

Le but recherché est d'inscrire le ministère de la Défense dans une logique de maîtrise de la dépense publique, a souligné M. André Dulait.

Cette maîtrise portera, selon les termes du ministre, « sur différentes fonctions sans lien avec l'activité opérationnelle des armées, notamment la logistique, les transports, les achats, la communication et l'informatique ». L'ensemble de ces fonctions relève du titre 3, dont l'essentiel des crédits est cependant affecté au financement du maintien en condition opérationnelle (MCO) des différents équipements utilisés par les trois armées.

M. André Dulait, rapporteur pour avis, s'est félicité qu'un effort marqué ait été accompli depuis 2000 pour en rationaliser l'organisation et en réduire les coûts. Il a précisé que les financements affectés au MCO des divers équipements en service dans les armées aient été nettement accrus depuis 2002, en contraste avec leur trop faible volume antérieur. Cet effort budgétaire, destiné à redresser des taux de disponibilité parfois inférieurs à 50 %, s'est accompagné d'une rationalisation, qui n'est pas achevée, de l'organisation et des modalités de réalisation des opérations de MCO. Le Service de Soutien de la Flotte (SSF) a été créé, a-t-il rappelé, en 2000 puis, en 2002, la structure interarmée de maintenance des matériels aéronautiques de défense (SIMMAD), qui a beaucoup contribué à mutualiser et rationaliser les opérations de maintenance aéronautique, et donc à freiner l'impressionnante croissance de leurs coûts. Le Service industriel de l'aéronautique (SIAé), sera institué au 1er janvier 2008 pour en prolonger l'action. Il aura pour tâche d'organiser la délégation au secteur privé des activités de soutien générales, et donc de limiter la maintenance au sein des forces aux activités de proximité.

Enfin, l'armée de terre mettra en oeuvre, durant l'année 2008, une politique d'emploi et de gestion des parcs (PEGP) qui vise à rationaliser l'utilisation de ses matériels et à réduire le coût de leur soutien.

A ces restructurations s'ajoute la création, depuis décembre 2003, de la Direction interarmée des réseaux d'infrastructures et des systèmes d'information de la Défense (DIRISI), pour gérer l'ensemble des systèmes d'information et de communication de la défense.

Ces efforts dans les domaines des matériels et des réseaux ont été accompagnés par la réforme intervenue en 2003 de l'économat des armées, qui est chargé du soutien logistique et de la fourniture de services, de denrées et de marchandises diverses aux formations militaires en France et à l'étranger.

M. André Dulait, rapporteur pour avis, a ensuite estimé que l'ensemble de ces actions, pour la plupart destinées à restructurer et à mutualiser des moyens destinés aux trois armées, doit être salué, car il démontre que nos forces ne cessent, depuis la professionnalisation, de réfléchir à leur organisation et de l'optimiser, grâce à une démarche interarmées pragmatique.

Puis il a abordé la présentation synthétique des perspectives ouvertes par les crédits de fonctionnement pour 2008 pour chacune des armées. Pour l'armée de terre, il a souligné que les services du commissariat, chargés des commandes des effets de protection, vêtements de combat, ainsi que des tenues diverses, ont besoin au minimum d'un an pour notifier un marché public, éventuellement accru de la durée des recours des industriels écartés. De plus, l'industriel ayant remporté l'appel d'offres n'est pas toujours fiable, les livraisons n'étant pas toujours conformes aux échantillons fournis à cette occasion.

M. André Dulait a constaté que les premiers bilans tirés des expériences d'externalisation, qui se sont multipliées depuis la professionnalisation, sont contrastés : 230 millions d'euros ont été ainsi affectés, en 2007, par l'armée de terre, à la réalisation de tâches non militaires (gardiennage et entretien de locaux). Or, le résultat n'est pas toujours satisfaisant, et chaque renouvellement triennal des contrats est l'occasion d'augmentations de leurs coûts, parfois très fortes, allant jusqu'à 30 % dans certains cas.

Le caractère récurrent de la maintenance des matériels lourds de l'armée de terre, comme la croissance continue de son coût, notamment du fait de leur sophistication accrue, devraient être mieux pris en compte avec la nouvelle répartition des parcs décidée pour 2008.

Pour les forces navales, le budget de fonctionnement représente10 % de l'ensemble du budget de la marine, soit environ 440 millions d'euros. La part de ces crédits affectée aux produits pétroliers est, sans surprise, en hausse, et a crû d'un montant d'environ 12 % du fonctionnement en 2004 à 19 % en 2007. Les 20 % prévus en 2008 sont probablement inférieurs à la réalité. La Marine procède elle-même à l'achat et la gestion des carburants de sa flotte, autonomie qui lui est nécessaire du fait de la dispersion de ses bâtiments dans le monde.

M. André Dulait, rapporteur pour avis, a rappelé que le MCO naval était spécifique, puisqu'à la différence des autres armées, qui fonctionnent selon une logique distinguant les matériels en parc et ceux en ligne, la flotte est utilisée en permanence. Elle compte 11 bâtiments à propulsion nucléaire (4 SNLE, 6 SNA et un porte-avions), dont l'entretien programmé consomme environ 70 % des ressources financières affectées au MCO.

Cet entretien passe par un partage des tâches entre industriels et équipages, dont le maintien des compétences est capital pour une flotte dont la centaine de bâtiments sont dispersés dans le monde, loin de leur base. La création du SSF, en 2000, conjuguée à des ressources financières apportées par la LPM 2003-2008, a permis de définir une stratégie, planifiée sur trois ans, de demande à l'industriel d'un nombre de jours de disponibilité (Plan Cap 2005). La visibilité ainsi assurée permet à ce dernier d'organiser et planifier ce travail dans la durée, et cette procédure va être renouvelée pour 3 nouvelles années (Cap 2008). Mais ces taux de disponibilité affichés ne portent que sur la plate-forme, et non sur le système d'arme dont elle est dotée, qui répond à d'autres critères. L'entretien des 240 aéronefs, de 19 types différents, et de 23 ans d'âge moyen est, lui, assuré par la SIMMAD. Tous les moyens techniques dont disposait la marine y ont été affectés, à l'exception des mécaniciens chargés de la maintenance des aéronefs embarqués.

L'entretien des infrastructures est source de préoccupation, car si elles ne couvrent que 3 % du domaine militaire, elles sont à la fois concentrées et disparates. La priorité incontestable étant l'entretien des installations nucléaires, celui des casernements en pâtit. De plus, les infrastructures héritées de DCN, relayée en 1995 par la DGA, sont dégradées, entraînant des risques majeurs, avec des fluides sous tension, ou des grues vieillissantes.

Pour les forces aériennes, l'essentiel du titre 3 est consacré au MCO, dont les crédits sont alloués à la SIMMAD. Les crédits consacrés à l'entraînement des personnels sont calculés en fonction d'hypothèses budgétaires sur le coût des carburants, aujourd'hui dépassées. Les objectifs retenus, dans ce domaine, par la LPM 2003/2008 risquent d'en pâtir ; tel est également le cas pour les autres armées. Jusqu'à présent, les niveaux d'activité pour les pilotes des différents aéronefs en service dans l'armée de l'air ont été globalement tenus. Ainsi, l'activité moyenne en heures de vol d'un pilote de combat était-elle de 171 h en 2005, 175 h en 2006 et était prévue à 178 h en 2007, alors que l'objectif était de 180. L'écart entre objectifs et heures réalisées est plus marqué pour les pilotes de transport : les heures effectives tournent autour de 300, contre 400 prévues. Cela est largement dû au vieillissement de cette flotte, notamment composée de Transall, que l'on s'efforce de ménager le plus possible.

Les crédits affectés à l'entretien des infrastructures existantes, dont les 38 bases aériennes situées en métropole, ne permettent pas de les entretenir de façon convenable. Ce déficit récurrent peut s'évaluer à environ 100 millions d'euros par an. Plusieurs éléments concourent à une réflexion spécifique sur les implantations de l'armée de l'air. En cinq ans, de 2000 à 2005, les flottes ont été réduites de 20 %, et l'armée de l'air retirera du service 500 appareils anciens de 2000 à 2012, alors que 150 appareils nouveaux lui seront livrés dans le même temps. A cette contraction du volume des flottes s'ajoute le caractère multinational des 50 avions de transport européens A 400 M, qui devraient être en service à partir de 2010. Cette construction en coopération devrait conduire à une mutualisation, entre les pays partenaires, des activités de soutien des appareils. L'ensemble de ces éléments conduira probablement à un resserrement des implantations de l'armée de l'air, qui ne sera d'ailleurs source d'éventuelles économies qu'au terme d'un processus coûteux étalé sur plusieurs années.

Avant de conclure, M. André Dulait, rapporteur pour avis, a mis l'accent sur les problématiques principales qui sous-tendent l'appréciation des financements consacrés au soutien des armées :

- le poste de dépense le plus important, le MCO, notamment aéronautique, a fait l'objet depuis 2002 d'une forte restructuration, fondée sur une « interarmisation » pragmatique avec la création de la SIMMAD. Cette structure doit encore améliorer son fonctionnement pour réduire les coûts d'entretien des matériels, mais beaucoup a déjà été fait ;

- en matière de dépenses courantes de fonctionnement, la sous-traitance d'activités non militaires présente, à l'usage, de dérives financières importantes faute de concurrence et de compétences suffisantes au sein des armées en matière de négociation de ce type de contrat. L'adjudication, la gestion de marchés publics comme la location de services sont des métiers à part entière, et l'on ne saurait reprocher aux militaires d'avoir besoin de temps pour les maîtriser. Cependant, il semble acquis que la location de services est coûteuse, et qu'elle le sera de plus en plus, car elle fait appel à de la main-d'oeuvre qui, même peu qualifiée, voit ses rémunérations croître régulièrement. L'efficacité des services ainsi accomplis n'en est pas pour autant garantie : l'entretien des locaux et des espaces verts, par exemple, présente des résultats très disparates. Or, des locaux dégradés pèsent notablement sur le moral des personnels. La seule piste réaliste pour réduire ces coûts passe, elle aussi, par le resserrement des implantations militaires. En conclusion, et suivant l'avis du rapporteur pour avis, la commission a adopté les crédits affectés, au sein du programme 178, au soutien des forces.

PJLF pour 2008 - Mission « Défense » - Equipement des forces - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite examiné le rapport pour avis de MM. Xavier Pintat et André Boyer sur les crédits du programme « Equipement des forces » de la mission « Défense », inscrits au projet de loi de finances pour 2008.

M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis, a tout d'abord précisé qu'il s'exprimait également au nom de M. André Boyer, rapporteur pour avis, empêché, et a ensuite présenté les actions relatives aux capacités de projection et de mobilité, d'engagement et de combat et de protection, avant d'évoquer les deux actions qui lui incombent plus particulièrement dans le rapport pour avis, à savoir la dissuasion nucléaire et les capacités de commandement et la maîtrise de l'information.

Au nom de M. André Boyer, M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis, a tout d'abord effectué quelques observations générales sur le programme « Equipement des forces » qui représente environ 10 milliards d'euros, soit à peu près 28 % de l'ensemble de la mission défense et 60 % de l'annuité de la loi de programmation militaire, c'est-à-dire l'essentiel des crédits de développement et de fabrication des matériels.

Il a précisé qu'en 2008, les autorisations d'engagement inscrites au programme s'élèveraient à 9,9 milliards d'euros, soit 3 % de moins qu'en 2007, et les crédits de paiement à 10,4 milliards d'euros, soit 0,4 % de plus.

Ces montants se situent légèrement en retrait par rapport au niveau prévu par la loi de programmation, puisque sur l'ensemble du périmètre de cette dernière, qui représente près de 16 milliards d'euros, l'écart sera de 250 millions d'euros par rapport à une stricte application de la loi qui prévoyait une progression de 0,8 % d'une année à l'autre, majorée de la prise en compte de l'inflation. Sur l'ensemble de la période de programmation 2003-2008, et malgré cette légère entorse sur la dernière année, les lois de finances initiales auront globalement permis de mettre à la disposition du ministère un niveau de ressources quasi conforme à celui prévu par la loi de programmation. Les annulations de crédits d'équipement en cours d'exercice ont en outre été jusqu'à présent extrêmement limitées. Les crédits disponibles mais non consommés, qui atteignaient 2,8 milliards d'euros début 2005, ont été ramenés à 1,5 milliard d'euros début 2007, dont 1,3 milliard d'euros sur le seul programme équipement des forces. Il semble cependant exclu de poursuivre cet apurement en 2007, ces crédits étant donc susceptibles d'être à nouveau reportés sur l'exercice suivant.

Le montant des autorisations d'engagement reportées s'élève quant à lui, début 2007, à 3,2 milliards d'euros. Le montant réel des engagements passés sur l'année 2007 n'est pas encore connu, ni les conditions dans lesquelles les autorisations d'engagement disponibles mais non consommées sur 2007 pourront être reportées sur 2008. Les autorisations d'engagement prévues pour 2008 s'élèvent à 9,9 milliards d'euros et incluent un montant conditionnel de 3 milliards d'euros au titre du second porte-avions. Ces différents éléments conduisent à considérer avec prudence la décomposition des commandes dont la passation est envisagée pour 2008, mais qui seront en grande partie suspendues aux conclusions de la revue de programmes et aux arbitrages de la future loi de programmation.

Abordant, au nom de M. André Boyer, rapporteur pour avis, les différents programmes pour l'équipement « classique », M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis, a tout d'abord évoqué ceux qui participent à la fonction « projection - mobilité ».

Le projet de budget pour 2008 prévoit l'annuité nécessaire au financement de l'A400M, soit 460 millions d'euros, mais les besoins de paiement pourraient être moindres que prévus sur 2008 et 2009, compte tenu du retard annoncé par Airbus, qui décale à 2010 la livraison du premier appareil à l'armée de l'air. Sur le plan opérationnel, ce retard aura sans doute des incidences sur le calendrier du retrait des Transall, qui a commencé en 2006 et doit se poursuivre jusqu'en 2015. En matière de transport stratégique, le contrat opérationnel n'est actuellement tenu qu'à 40 %.

La commande de la rénovation de l'avionique des 11 ravitailleurs Boeing C135, prévue cette année, est reportée au début de 2008. L'avenir de cette composante est suspendu au lancement du programme d'avions multi-rôles MRTT (Multi-role transport tanker) destiné à remplacer les ravitailleurs actuels, mais aussi les cinq avions de transport de personnel. Les conditions de réalisation devront être définies dans la prochaine loi de programmation, pour des livraisons qui en tout état de cause ne sont pas envisagées avant 2012. L'une des solutions envisagée est l'achat ou la location d'Airbus A330 - neufs ou d'occasion - cet appareil ayant déjà été choisi par l'Australie, le Royaume-Uni et les Emirats arabes unis.

En ce qui concerne les hélicoptères de transport, le projet de budget prévoit une dotation en autorisations d'engagement de près de 620 millions d'euros au titre des NH90 de l'armée de terre, afin d'ajouter 22 appareils supplémentaires aux 12 qui doivent être commandés avant la fin 2007. La rénovation du parc de Cougar, composé de 24 appareils, est en attente de lancement, avec 2 commandes d'ici à la fin de l'année et 4 prévues pour 2008. Une mise aux normes de la circulation aérienne générale d'un peu moins de la moitié du parc d'hélicoptères Puma (45 appareils) doit également être lancée en 2008.

M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis, a rappelé que la commission s'était inquiétée depuis plusieurs années des faiblesses capacitaires sur l'aéromobilité. Le contrat opérationnel n'est actuellement tenu qu'à 70 %, et la situation s'aggravera dans les cinq prochaines années, le chef d'état-major de l'armée de terre ayant même évoqué la possibilité de faire provisoirement appel à nos alliés, en cas de besoin exceptionnel, en opération ou sur le territoire national. Cela ne rend que plus nécessaire le respect du calendrier de livraison du NH90.

Abordant la fonction « engagement et combat », le rapporteur pour avis a évoqué en premier lieu le programme Rafale, dont les dotations pour 2008 s'élèvent à 800 millions d'euros d'autorisations d'engagement et près d'1,3 milliard d'euros de crédits de paiement. Il a précisé qu'en 2008 seraient commandés les 8 appareils qui avaient été retirés de la précédente tranche pour financer un complément de développement sur le radar, ce qui porterait à 120 le nombre total des appareils commandés. Par ailleurs, 14 appareils, s'ajoutant à la cinquantaine déjà en service, seront livrés en 2008. Alors que l'ensemble des missiles de croisière Scalp-EG ont été livrés, les premières livraisons de l'armement air-sol modulaire (AASM) à l'aviation de combat doivent intervenir en fin d'année et se poursuivre en 2008.

S'agissant des conditions de la poursuite du programme Rafale, le rapporteur pour avis a précisé qu'elles devront être définies dans le cadre de la prochaine loi de programmation militaire. L'étape suivante devrait être une nouvelle commande de 60 appareils en 2009, qui permettrait de retirer du service plusieurs modèles d'avions anciens et de tirer pleinement profit de la polyvalence du Rafale. Toutefois, ses conditions de réalisation devront être évaluées au regard de l'ensemble des autres besoins financiers, les annuités du programme Rafale, au rythme actuel des livraisons, dépassant le milliard d'euros.

Le rapporteur pour avis a ensuite abordé les équipements navals en signalant que cette année encore, le projet de loi de finances ne comportait qu'environ le tiers des dotations relatives au programme de frégates multi-missions (FREMM), soit 182 millions d'euros, alors que les financements complémentaires, soit 338 millions d'euros, sont attendus dans le projet de loi de finances rectificative pour 2007. Il a également précisé que les crédits inscrits pour le programme de sous-marin nucléaire d'attaque Barracuda, dont 1 exemplaire a été commandé sur 6 normalement prévus, s'élèveraient à 330 millions d'euros.

S'agissant du second porte-avions, pour lequel 3 milliards d'euros sont inscrits en autorisations d'engagement dans le projet de budget, à titre de provision, il a rappelé qu'un contrat de près de 50 millions d'euros avait été passé avec les Etats-Unis au printemps pour l'acquisition de catapultes, ce contrat prévoyant un délai d'un an pour se retirer sans pénalités. Par ailleurs, environ 140 millions d'euros ont déjà été engagés sur le programme porte-avions n°2 à titre de contribution aux travaux de développement britanniques auxquels la France a pu en conséquence être associée.

A l'issue de cette phase de coopération, la part commune aux projets britannique et français représenterait 85 % du besoin militaire. Londres a annoncé cet été la commande de ses 2 porte-avions, pour un coût de 5,8 milliards d'euros, mais le contrat n'a toujours pas été officiellement notifié. La coque de ces 2 bâtiments sera entièrement réalisée dans les chantiers britanniques, ce qui n'exclut pas néanmoins une coopération industrielle franco-britannique sur les systèmes embarqués.

Le rapporteur pour avis a ajouté que la décision, relevant désormais de l'entier ressort du gouvernement français, devait mettre en balance les nécessités opérationnelles et les implications financières, le programme étant susceptible de représenter une annuité moyenne de l'ordre de 500 millions d'euros sur la prochaine loi de programmation militaire.

Il a rappelé la position exprimée cet été par le président Serge Vinçon dans son rapport sur les équipements militaires, à savoir que dans le cadre d'un simple maintien à son niveau actuel du budget d'équipement, le lancement du second porte-avions conduirait inévitablement à affecter la réalisation d'autres programmes essentiels. Aussi avait-il souhaité que cette décision soit liée à la mise en place de ressources supplémentaires.

Le rapporteur pour avis a jugé difficile, pour la commission, de se prononcer sur l'opportunité de ce projet tant que les perspectives financières de la prochaine loi de programmation militaire ne sont pas connues.

Il a ensuite évoqué les équipements terrestres, pour lesquels l'année 2008 marquera une étape importante, avec l'arrivée dans les forces de plusieurs matériels qui concrétisent une modernisation attendue de longue date : 41 premiers véhicules blindés de combat d'infanterie (VBCI), un peu plus de 300 équipements Felin pour les fantassins, 16 systèmes d'artillerie Caesar. Parallèlement, les rénovations de blindés à roues AMX10RC et ERC90 Sagaie, se poursuivront. Enfin, l'hélicoptère de combat Tigre, qui avait connu quelques difficultés techniques lors des premières sorties d'usine en 2005 et dont les premiers exemplaires étaient réservés à l'instruction au Luc, va désormais arriver dans les forces, au 5e RHC de Pau. 6 nouveaux hélicoptères sont attendus en 2008, ce qui portera le parc à 22 hélicoptères, sur 80 actuellement commandés.

Le rapporteur pour avis a mentionné les interrogations portant sur la poursuite de la modernisation des équipements des forces terrestres au cours de la prochaine loi de programmation militaire, les programmes concernés se prêtant plus que d'autres à la réduction des cibles ou aux étalements calendaires. Il a aussi évoqué les programmes de cohérence opérationnelle, dont la visibilité est réduite, mais dont la réalisation est essentielle à l'efficacité opérationnelle des forces sur le terrain.

Enfin, en ce qui concerne la fonction « protection et sauvegarde », il a indiqué que le programme principal en termes financiers était celui des systèmes de défense sol-air articulés autour de deux versions du missile Aster, l'Aster 15 et l'Aster 30, le premier à courte portée et le second à moyenne portée.

Les systèmes destinés à la défense terrestre, qu'il s'agisse de défense d'une infrastructure, d'un point sensible, ou des forces déployées sur un théâtre, ont été intégralement placés sous la responsabilité de l'armée de l'air, alors qu'ils devaient initialement être partagés entre celle-ci et les unités d'artillerie de l'armée de terre. Cette rationalisation s'accompagne d'une réduction de la cible du programme, qui revient de 12 à 10 systèmes, chaque système étant composé de 4 lanceurs. Un 1er système a été livré cette année, deux autres étant prévus en 2008. Ils utilisent l'Aster 30, qui dote la France d'une capacité de défense antimissile de théâtre permettant, dans un premier temps, d'intercepter des missiles balistiques dits « rustiques », d'une portée inférieure à 600 kilomètres.

Par ailleurs, la marine recevra à la mi-2008 la première de ses 2 frégates antiaériennes Horizon, le Forbin, qui a commencé ses essais à la mer l'an dernier. Son système d'armes principal reposera sur des missiles Aster 15 et Aster 30, dont les caractéristiques ont été adaptées à la menace aérienne et aux missiles antinavires.

En conclusion, M. Xavier Pintat, s'exprimant au nom de M. André Boyer, rapporteur pour avis, a estimé que dans les différents domaines de l'équipement classique, le projet de budget pour 2008 mettait en place les crédits de paiement nécessaires à la poursuite de la livraison, dans de bonnes conditions, des matériels commandés. Il a en revanche estimé, s'agissant des autorisations d'engagement, que leur traduction en engagements effectifs restait en partie suspendue aux décisions qui seront prises pour la prochaine loi de programmation militaire, le projet de budget d'équipement pour 2008 pouvant de ce fait être qualifié de « budget d'attente ».

A la suite de cet exposé, M. Didier Boulaud a demandé des précisions sur le déroulement du programme VBCI et sur la vocation de ce nouvel équipement.

Mme Dominique Voynet a souhaité savoir où en était la coopération franco-britannique sur le projet de second porte-avions. Elle s'est interrogée sur le processus décisionnel qui serait suivi sur ce projet, et sur son articulation avec l'approbation parlementaire en matière budgétaire, à travers la dotation provisionnelle de 3 milliards d'euros inscrite au projet de budget.

M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis, a précisé que le programme VBCI associait Nexter (ex-GIAT-Industries) et Renault Trucks Defense. Il a ajouté que ce blindé à roues destiné au transport de l'infanterie était prioritairement destiné à remplacer le blindé chenillé AMX10P. Le VBCI pourrait également remplacer une partie du parc de véhicules de l'avant blindés (VAB).

A propos du second porte-avions, il a rappelé que dans une première phase, désormais achevée, la coopération franco-britannique avait consisté à rapprocher autant que possible les spécifications des bâtiments envisagés par les deux pays. Sur cette base, la décision de lancement est actuellement entièrement du ressort des autorités françaises. La dotation provisionnelle de 3 milliards d'euros inscrite au budget vise à mettre en place les autorisations d'engagement nécessaires à la passation de la commande en cas de décision positive.

M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis, a ensuite présenté les dotations du programme « Equipement des forces » relatives à la dissuasion nucléaire, au commandement et à la maîtrise de l'information.

Il a indiqué qu'en 2008, les crédits de paiement relatifs à la dissuasion nucléaire, en hausse de 3 %, s'élèveraient à 3,3 milliards d'euros, soit 21 % de l'enveloppe affectée aux crédits d'équipement, ce qui se situe dans la moyenne des six années de la loi de programmation. Il a rappelé à ce propos que le rapport sur l'exécution de la loi de programmation militaire, transmis au Parlement, faisait état d'un dépassement financier sur l'agrégat nucléaire et il a précisé que ces dépassements représentaient environ 7 % de l'enveloppe initialement prévue sur l'ensemble de la période, les incidences fiscales du changement de statut de DCN sur les coûts de construction et d'entretien des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins y ayant contribué de manière significative.

Le rapporteur pour avis a indiqué que l'année 2008 verrait une très forte diminution des autorisations d'engagement, qui reviendront de 3,3 à 2,3 milliards d'euros, en raison de besoins moindres qu'en 2007.

Il a ensuite détaillé les principales évolutions des différents programmes. En ce qui concerne la composante océanique, il a estimé que le respect du calendrier de livraison du quatrième sous-marin nucléaire lanceurs d'engins de nouvelle génération (SNLE-NG), attendu pour 2010 était d'autant plus nécessaire qu'avec le retrait de l'Inflexible en 2008, la France ne disposerait plus, provisoirement, que de trois SNLE à compter de l'an prochain. Pour la composante aéroportée, il a indiqué que la fabrication de la nouvelle tête nucléaire TNA avait commencé au printemps, et qu'un deuxième lot de missiles ASMP/A, sur 3 prévus, devait être commandé d'ici la fin de l'année. Enfin, s'agissant des moyens de simulation, il a souligné les avancées très significatives déjà réalisées pour les capacités de calcul ainsi que le démarrage de la mise en place de la première ligne laser du futur laser mégajoule.

M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis, a souligné que le renouvellement des moyens liés à la dissuasion était très largement avancé, la plupart des programmes ayant dépassé le stade du développement et se trouvant en phase de réalisation. Il a estimé qu'il s'agissait là, indépendamment des raisons de fond militant en faveur de notre posture actuelle, d'un élément supplémentaire pour considérer que, pour la période couverte par la prochaine loi de programmation, il n'y avait pas lieu d'envisager une remise en cause des programmes concernant la dissuasion nucléaire. Il a également évoqué le débat récurrent sur le maintien de la composante aérienne et rappelé que du fait de l'arrivée prochaine d'un nouveau missile pour lequel les investissements ont été en grande partie réalisés, une éventuelle suppression de cette composante génèrerait peu d'économies immédiates, mais priverait la France d'un volet appréciable de sa capacité de dissuasion, notamment vis-à-vis des puissances régionales.

M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis, a ensuite évoqué les équipements spatiaux. Il a souligné la nécessité de préparer rapidement la succession du système d'observation optique Helios, et a mentionné à ce propos les études engagées en ce sens, dans le cadre du projet MUSIS (Multinational space based imaging system) par les six pays européens qui y coopèrent, à savoir la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, la Belgique et la Grèce. Dans le domaine des télécommunications par satellites, il a indiqué que la réalisation d'un troisième satellite Syracuse III, envisagée dans la loi de programmation militaire, avait été reconsidérée, deux voies ayant été choisies pour répondre au besoin : pour les communications protégées, une participation française à la construction du satellite italien Sicral 2, et pour les communications haut débit peu protégées, une coopération franco-italienne pour l'utilisation d'un système à vocation duale, civile et militaire.

Le rapporteur pour avis a indiqué qu'au plan financier, l'année 2008 marquait un point bas pour le budget spatial militaire, avec environ 400 millions d'euros en crédits de paiement, soit 13 % de moins que la moyenne des cinq premières années de la loi de programmation, et 155 millions d'euros seulement pour les autorisations d'engagement. Il a estimé qu'en matière spatiale militaire, la France se trouvait dans une phase transitoire, en attente de perspectives pour les prochaines années, dans une situation qui offrait encore peu de visibilité. Il a rappelé qu'à la suite des travaux du groupe d'orientation stratégique de la politique spatiale de défense, Mme Alliot-Marie avait estimé devant la commission que le niveau du budget spatial militaire français mériterait d'être progressivement porté à 650 millions d'euros par an, ce qui permettrait, si d'autres pays européens amplifiaient également leur effort dans ce domaine, de doter l'Europe de capacités spatiales militaires réellement adaptées aux enjeux actuels.

M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis, a également évoqué les capacités liées au renseignement, et notamment les drones d'observation. Il a rappelé les conclusions du rapport d'information de M. Philippe Nogrix et de Mme Maryse Bergé-Lavigne qui a mis en exergue les échecs rencontrés dans ce domaine, par rapport aux objectifs de la loi de programmation.

Le système intérimaire de drone moyenne altitude longue endurance (SIDM), dérivé du drone israélien Eagle, sera opérationnel dans l'armée de l'air au printemps prochain, avec 5 ans de retard. Quant au programme Euromale, il a été réorienté dans le cadre du projet Advanced UAV, auquel sont associées l'Allemagne et l'Espagne. Celui-ci rencontre quelques difficultés d'harmonisation des spécifications entre les différents partenaires et n'aboutirait en tout état de cause qu'à l'horizon 2015. Aussi sera-t-il nécessaire, dans la prochaine loi de programmation, d'envisager un renforcement de nos capacités dans ce domaine, par exemple par l'acquisition de drones Eagle supplémentaires.

Le rapporteur pour avis a également évoqué les différents programmes en cours en matière de systèmes d'information liés au commandement et à la conduite des opérations, auxquels le budget consacre plus de 500 millions d'euros.

En conclusion, M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis, a considéré que dans les domaines de la dissuasion et de la maîtrise de l'information, les dotations inscrites au projet de budget pour 2008 permettaient de poursuivre dans de bonnes conditions les programmes en cours.

En ce qui concerne la dissuasion, il a souligné que les perspectives au-delà de 2008 étaient clairement tracées, avec, à très proche échéance, l'arrivée du missile ASMP/A, l'achèvement du programme SNLE-NG et l'arrivée du missile M51. En revanche, dans les domaines de l'espace et les drones, il incombe à la prochaine loi de programmation de fixer de telles perspectives pour le renouvellement et le renforcement de nos capacités.

Il a proposé à la commission d'émettre un avis favorable sur les crédits du programme « Equipement des forces ».

A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, M. Didier Boulaud a regretté la faiblesse de l'engagement financier en matière spatiale. D'une manière plus générale, il a constaté que ce projet de budget pour 2008, qui constitue la dernière annuité de la loi de programmation militaire, paraît en décalage total avec certains besoins prioritaires, que ce soit les équipements spatiaux ou les moyens dévolus au renseignement.

M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis, a souligné que l'espace constituait effectivement un enjeu stratégique.

La commission a ensuite émis un avis favorable sur les crédits du programme « Equipement des forces », puis sur l'ensemble des crédits de la mission « Défense », les membres du groupe socialiste s'abstenant et Mme Dominique Voynet votant contre.

Union interparlementaire - Audition annuelle auprès de l'ONU - Communication

Puis, M. Robert del Picchia a informé la commission qu'il se rendrait les 19 et 20 novembre prochains à l'ONU, dans le cadre de l'audition annuelle qu'organise l'Union Interparlementaire (UIP) qui a le statut d'observateur auprès des Nations unies.

Le thème principal de l'audition est « Renforcer l'état de droit dans les relations internationales : le rôle clé des parlements ». Les thèmes qui y seront débattus sont le désarmement et la non-prolifération, le terrorisme, et la justice pénale internationale.

M. Robert del Picchia a proposé de présenter une communication sur cette réunion à la commission.

Nominations de rapporteurs

La commission a nommé rapporteurs :

- M. Jean-Pierre Plancade sur le projet de loi n° 77 (2007-2008) autorisant l'approbation de l'accord-cadre entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des États-Unis d'Amérique relatif à la coopération dans le domaine de l'exploration et de l'utilisation de l'espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques ;

- M. Jacques Blanc sur le projet de loi n° 78 (2007-2008) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Turquie sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements ;

- M. André Rouvière sur le projet de loi n° 79 (2007-2008) autorisant la ratification d'une convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme.

Gendarmerie - Création d'un groupe de travail

Au cours d'une seconde réunion, tenue dans l'après-midi, M. Jean François-Poncet, président, a rappelé que la commission, sur proposition de plusieurs de ses membres, avait décidé, à l'unanimité, de constituer, en son sein, un groupe de travail sur l'avenir de l'organisation et des missions de la gendarmerie. Ce groupe, qui sera présidé par M. Jean Faure, comportera des représentants de l'ensemble des groupes politiques du Sénat représentés à la commission. A la suite de ses travaux, un rapport d'information sera présenté dans le courant du premier semestre 2008.

Organisation internationale - Mission à la 62e assemblée de l'ONU - Communication

M. Jean François-Poncet, président, a ensuite présenté une communication sur la mission effectuée par une délégation de la commission à New York à l'occasion de la 62e assemblée générale de l'ONU.

M. Jean François-Poncet a tout d'abord rappelé que cette délégation, qu'il conduisait, était composée de Mme Monique Cerisier-ben Guiga et de MM. Robert del Picchia, Jean-Pierre Plancade, et Yves Pozzo di Borgo, M. Jacques Legendre s'étant joint à la délégation au titre de la francophonie.

Puis il a présenté les personnes que la délégation avait rencontrées :

- pour l'ONU :

- M. Ban Ki Moon, Secrétaire général de l'ONU ;

- M. Jean-Marie Guéhenno, Secrétaire général adjoint chargé du département des opérations de maintien de la paix ;

- M. Orr, Secrétaire général adjoint pour la coordination des politiques et de la planification stratégique ;

- M. Kemal Dervis, administrateur du PNUD ;

- M. Richard Barrett, chef du groupe des experts auprès du comité des sanctions contre Al-Quaïda et les talibans.

- pour les représentants permanents :

- M. Vitaly Churkin, représentant permanent de Russie ;

- M. Zalmay Kalilzad, représentant permanent des Etats-Unis ;

- M. Riyad Mansour, observateur permanent de Palestine ;

- M. Richard Carmon, représentant permanent adjoint d'Israël ;

- M. Nirupam Sen, représentant permanent de l'Inde ;

- M. Joao Manuel Guerra Sagueiro, représentant permanent du Portugal, au titre de la présidence de l'Union européenne ;

- M. Thomas Matussek, représentant permanent de l'Allemagne.

Par ailleurs, des entretiens ont eu lieu avec M. Jean-Maurice Ripert, représentant permanent de la France, avec M. Jean-François Dobelle, représentant permanent de la France auprès de la conférence du désarmement, et avec le général Tranchand, chef de la mission militaire.

M. Jean François-Poncet, président, a indiqué que le principal enseignement des entretiens était qu'après une période d'éclipse, l'ONU était indiscutablement de retour, mais qu'elle demeurait une organisation fragile.

Après les difficultés rencontrées au cours des années 90 en Somalie, au Rwanda, en Bosnie et en Irak, l'ONU est replacée au coeur de l'actualité avec 18 opérations de maintien de la paix auxquelles se rajouteront celles prévues au Darfour et ou Tchad. Ces 20 opérations compteront 140 000 hommes sur le terrain et utiliseront un budget de 7,5 milliards de dollars. L'ONU et ses agences sont impliquées dans la plupart des grands dossiers planétaires (terrorisme, changements climatiques, sida, développement, désarmement, diversité culturelle etc.).

Il existe pourtant également des causes de fragilité et en particulier l'enlisement de la réforme du Conseil de sécurité. Aucun des nouveaux grands pays émergents, comme l'Inde ou le Brésil, ou de grands pays industriels, comme le Japon et l'Allemagne, n'y sont présents ; de même l'Afrique et les pays arabes n'y sont suffisamment représentés. Il existe donc un très réel problème de légitimité du Conseil de sécurité. L'exclusion de ces pays et, en particulier de l'Inde, pourrait aboutir à des décisions de développement des relations bilatérales hors ONU.

Pour sortir de l'impasse, on envisage une solution intermédiaire de 10 ou 15 ans, qui permettrait d'augmenter le nombre de sièges des membres permanents sans droit de veto, en maintenant le nombre total des membres du Conseil de sécurité à 24 au maximum, de manière à permettre l'exercice d'une présidence tournante en deux ans. A l'issue de cette période intermédiaire, une conférence d'examen devrait aboutir à une structure définitive du Conseil de sécurité.

De plus, certains des autres organismes de la famille onusienne ne correspondent plus à la réalité internationale. Tel est le cas, en particulier, du FMI. L'ONU est confrontée à un véritable problème de représentativité.

En second lieu, la multiplication des opérations de maintien de la paix, si elle a permis de replacer l'ONU au centre de l'activité internationale, suscite également des inquiétudes qui se cristallisent sur la question du Darfour et la mise en place de la force hybride. Rien n'indique aujourd'hui que le gouvernement soudanais, qui n'a accepté que du bout des lèvres le déploiement de cette force, coopérera pleinement au succès de cette mission. La composition même de cette force, entre des contingents venant de l'Union africaine et ceux venant d'autres parties du monde, pose problème. De plus, des difficultés sont apparues sur la fourniture de certains matériels, notamment les moyens de transport héliportés, qui sont indispensables à la mobilité de cette force.

D'autres difficultés existent et, en premier lieu, le fait que la décision de la mise en place d'une opération de maintien de la paix est prise par le Conseil de sécurité, mais que les décideurs ne sont pas les fournisseurs de contingents, qui proviennent majoritairement de pays comme l'Inde, le Pakistan ou le Bangladesh. En second lieu, la scission, décidée par le nouveau Secrétaire général de l'ONU, du département des opérations de maintien de la paix (DOMP) et la création d'un département consacré au soutien logistique (le DAM) ont entraîné des interrogations qui ont conduit un certain nombre de pays a réaffirmer la prééminence du DOMP sur l'ensemble du dispositif, y compris sur le soutien. Enfin, on ne peut que constater la faiblesse de l'expertise militaire du Conseil de sécurité. Il existe bien un comité militaire auprès du DOMP, composé de 50 experts, mais dont le Conseil ne peut dépendre. Il est nécessaire de créer auprès du Conseil de sécurité une expertise autonome, solution soutenue par la France, alors que la Russie lui préférerait une réactivation du comité des chefs d'état-major prévu à l'article 47 de la charte des Nations unies.

D'autres fragilités sont apparues, comme par exemple la crise du régime de non-prolifération avec le nucléaire iranien. En dernier lieu, et malgré le développement très inégal des pays appartenant au groupe G77, on continue de trouver une césure nord-sud qui oppose les pays développés aux pays en développement et aux pays émergents.

En conclusion, M. Jean François-Poncet, président, a constaté que la France était extrêmement active à l'ONU et avait un grand intérêt à promouvoir la réforme de cette institution dont elle est l'un des membres importants, avec un siège permanent au Conseil de sécurité, assorti du droit de veto. Son statut de membre permanent lui permet d'exercer son influence au-delà de l'ONU, au sein de l'Union européenne ou du G8. Outre l'absence de réformes, une autre cause de fragilisation de la position française se trouve dans la faiblesse des contributions volontaires qui restent marginales (de l'ordre de 90 millions d'euros), montant très inférieure à celui des contributions de la Grande-Bretagne et des autres pays européens.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga a souligné le grand intérêt de la mission effectuée par la commission, qui permet de confronter les analyses des principaux représentants permanents à New York et d'obtenir ainsi une vision globale sur les principales questions internationales actuelles.

Elle a partagé les analyses de M. Jean François-Poncet sur la fragilité de l'ONU et la nécessité de renforcer cette organisation, qui existe principalement aujourd'hui par le maintien de la paix et la coordination opérationnelle du développement. Elle a également relevé les faiblesses des opérations qui sont en cours de mise en place au Darfour et au Tchad, notamment en raison de la lenteur du processus de décision. Elle a enfin souligné que le PNUD était sans doute l'organisme des Nations unies qui fonctionnait le mieux et obtenait le plus de résultats.

M. Yves Pozzo di Borgo a également manifesté son inquiétude quant à la réussite de l'installation de la force hybride au Darfour. S'agissant de la représentation de la France aux postes de responsabilité de l'ONU, il a constaté qu'on arrivait à un changement de génération et a souhaité que la commission suive attentivement cette question.

S'agissant des opérations de maintien de la paix, M. Robert del Picchia a fait remarquer que l'un des problèmes qu'elle pouvait rencontrer tenait au fait que l'ONU ne payait pas directement les soldats des contingents mis à sa disposition, mais les Etats.

M. Robert del Picchia a souligné la grande compétence de l'administrateur du PNUD, mais il a relevé que le plan stratégique qu'il avait présenté avait été repoussé par les pays du Sud, ce qui entraînait une certaine fragilisation de cet organisme.

Mme Catherine Tasca, tout en constatant qu'il n'était pas anormal qu'une institution vieille de 60 ans ne soit plus adaptée, a souhaité que les observations sur l'affaiblissement de la structure soient soulignées dans le rapport de la commission et qu'il importait de redonner légitimité et représentativité à l'ONU.

A M. Robert Hue, qui constatait la détérioration, deux ans auparavant, des rapports entre les Etats-Unis et l'ONU, M. Jean François-Poncet, président, a indiqué que les déboires rencontrés en Irak et dans la résolution du conflit israélo-palestinien avaient entraîné une grande impopularité des Etats-Unis dans le monde. La prise de conscience de l'administration actuelle ne signifiait néanmoins pas une conversion au multilatéralisme. Les réticences des Etats-Unis sur le protocole de Kyoto ou la Cour internationale de justice subsistent.

Arche de Zoé - Audition de Mme Rama Yade, secrétaire d'État aux affaires étrangères et aux droits de l'homme

Puis la commission a procédé à l'audition de Mme Rama Yade, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères et aux droits de l'homme sur l'affaire de l'Arche de Zoé.

M. Jean François-Poncet a rappelé que la commission avait souhaité entendre Mme Rama Yade sur les conséquences de l'affaire de l'Arche de Zoé, qui a eu un certain nombre d'incidences sur les relations entre la France, le Tchad et le Soudan. Il a ajouté que cette affaire montrait la nécessité d'un système d'alerte efficace quand les ONG, dont le rôle et l'action sont globalement utiles, s'engagent dans des dérives importantes.

Mme Rama Yade a rappelé l'historique d'une affaire qui est au coeur de l'actualité depuis le 25 octobre. Depuis six mois, le ministère des affaires étrangères a mis en garde cette association contre le caractère illégal de ses projets et a alerté, à de nombreuses reprises, les familles. Les organisations humanitaires ont été mobilisées. Le ministère a signalé l'association l'Arche de Zoé au Parquet de Paris, le 9 juillet, et a contribué à l'enquête de la brigade de la protection des mineurs, au mois d'août. Le responsable de l'association a été convoqué pour de nouvelles mises en garde qui se sont heurtées à une fin de non-recevoir. Enfin, les ministères dont la compétence étaient en relation avec l'opération annoncée, et notamment le ministère de l'intérieur et le ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, ont été alertés. L'ambassadeur au Soudan, puis au Tchad a été mobilisé, puisqu'il s'est avéré le 27 septembre que l'Arche de Zoé pourrait agir au Tchad, et non au Soudan comme cela avait été envisagé initialement.

Il convient de signaler que, dans ces deux pays, les organisations humanitaires consultées, et en particulier, au Tchad, le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR), ont indiqué, à de multiples reprises, que l'association « Arche de Zoé » était inconnue et n'opérait pas sur place. Ceci parce que ce n'était pas l'Arche de Zoé qui agissait au Tchad, mais une autre association, « Children Rescue ». Cette dernière affirmait ne pas préparer l'expatriation d'orphelins, mais travailler au traitement sanitaire et à l'instruction d'enfants. Cette association disposait des autorisations tchadiennes reposant sur la description d'un projet utile.

Au traumatisme subi par les enfants et aux conséquences internationales de ces actes irresponsables s'ajoute la perte de confiance dans les acteurs de l'humanitaire.

Mme Rama Yade a indiqué qu'une cellule de crise, de suivi et d'information avait été mise en place au Quai d'Orsay sous son autorité et qu'elle s'est d'abord préoccupée de la santé et du bien-être des enfants installés à l'orphelinat d'Abéché. L'une des premières tâches a été de suivre le travail de la commission quadripartite travaillant à l'identification des enfants, en majorité d'origine tchadienne et qui n'étaient pas des orphelins.

Parallèlement, les Français arrêtés ont été mis sous protection consulaire renforcée. La justice tchadienne a décidé de libérer les journalistes qui n'étaient intervenus que dans le cadre de leur profession. Le Président de la République s'est impliqué fortement. Les familles d'accueil ont été rencontrées ainsi que les familles des Français arrêtés. Le lieu de leur jugement n'est pas encore fixé, la justice tchadienne étant souveraine. Toutefois, la convention de coopération judiciaire franco-tchadienne sera mise en oeuvre autant que possible. Le président de la République a clairement indiqué sa préférence pour un jugement en France.

De plus, le Président Déby a assuré que cette affaire n'affectait pas le déploiement de l'opération Eufor. Le ministère des affaires étrangères a engagé une intense activité diplomatique, en particulier pour informer nos partenaires européens de notre position et des actions qui avaient été engagées par la France. Il convient également de réagir aux tentatives d'instrumentalisation de cette affaire par le gouvernement soudanais auprès de l'ONU, où il la dénonce comme un « crime contre l'humanité ».

En conclusion, Mme Rama Yade a appelé à la sérénité, à éviter les polémiques inutiles et les surenchères, dans l'intérêt de la justice et de notre pays.

A la suite de cette intervention, M. Didier Boulaud s'est interrogé sur les conditions de transport des membres de l'Arche de Zoé par avion militaire.

M. Robert del Picchia a souhaité obtenir des informations sur les conséquences de cette affaire sur la communauté française au Tchad et dans d'autres pays africains.

M. Robert Hue a rappelé les termes de la lettre qu'il avait adressée au président de la commission pour demander l'audition du ministre des affaires étrangères et du ministre de la défense. Il a rappelé que cette affaire s'inscrivait dans un contexte particulier, puisque les Etats-Unis avaient qualifié les événements au Darfour de génocide, ce qui avait bien évidemment entraîné un accroissement de la tension internationale. Il a souligné que cette dramatisation était dangereuse et que le terme de génocide était galvaudé depuis le Rwanda afin de conforter des thèses au niveau international. Il a constaté la grande discrétion du ministre des affaires étrangères sur cette affaire.

A M. Didier Boulaud, Mme Rama Yade a indiqué que, comme l'avait indiqué le ministre de le Défense, l'armée était habituée à transporter les ONG et leur matériel quand celles-ci disposent des autorisations nécessaires du pays où elles exercent leur activité. C'était bien le cas de Children Rescue, dont la feuille de route n'était pas d'exfiltrer des enfants, mais de les soigner et de les éduquer sur place.

S'agissant des ONG, la secrétaire d'Etat a considéré qu'il serait normal que les ONG acceptent un droit de regard dès lors que l'Etat apporte un certain nombre de facilités financières ou matérielles, notamment en termes de transports. Elle a ajouté qu'elle avait proposé une réflexion en ce sens aux ONG, à laquelle pourraient être associés les parlementaires.

Elle a estimé que l'affaire de l'Arche de Zoé (Children Rescue) pouvait avoir des conséquences importantes sur la situation et la sécurité des 1 500 Français au Tchad et sur nos compatriotes en Afrique. Des instructions de grande prudence ont été données à nos ressortissants.

A M. Robert Hue, Mme Rama Yade a rappelé que M. Bernard Kouchner s'était exprimé avant et pendant son séjour en Asie et qu'il avait notamment rappelé que l'action humanitaire ne pouvait se faire dans l'anarchie. La secrétaire d'Etat a indiqué que le gouvernement français, contrairement à celui des Etats-Unis à des organisations comme «Urgence Darfour », ne qualifiait pas les événements au Darfour de génocide. En revanche, la France considère que des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre ont été commis. C'est du reste sur ce fondement que la Cour pénale internationale a été saisie et a inculpé un certain nombre de personnes. Elle a rappelé qu'en quatre ans le conflit avait fait 200 000 morts. Aujourd'hui le gouvernement soudanais instrumentalise cette affaire en retournant contre l'Arche de Zoé les accusations de crimes contre l'humanité.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga s'est interrogée sur le niveau réel des informations dont disposaient les autorités françaises. Elle a constaté que la communauté française appliquait déjà des règles de prudence du fait de la nature du régime politique au pouvoir au Tchad. Elle regretté que cette affaire détériore encore l'image de la France en Afrique. Elle a appelé à veiller à ce que les aspects humanitaires du soutien aux prévenus ne donnent pas l'impression qu'on légitimait une action de type criminel.

Mme Catherine Tasca a partagé les interrogations de Mme Cerisier-ben Guiga sur l'identification et le suivi des responsables par les autorités françaises sur place. Elle s'est interrogée sur les mesures concrètes de soutien aux familles des enfants et aux familles d'accueil. Elle a appelé à une grande vigilance de la France sur les adoptions négociées hors des circuits officiels et en violation absolue du droit international.

Faisant état de témoignages qu'il avait reçus, M. André Trillard a indiqué que les familles d'accueil avaient été sciemment abusées par les responsables de l'Arche de Zoé.

Mme Rama Yade a rappelé que les autorités françaises intervenaient dans le cadre d'un Etat souverain, le Tchad, qui connaissait de plus une certaine instabilité. Elles ne disposaient donc pas de toutes les facilités d'information qu'on leur prête improprement.

Compte tenu de l'impact sur l'image de la France et sur la sécurité de nos ressortissants que peuvent avoir les actions de certaines ONG, il est normal que ces dernières prennent conscience de leurs devoirs et de leurs responsabilités. Un certain nombre de réflexions, engagées bien avant l'affaire de l'Arche de Zoé, portent sur une auto-régulation efficace ou peut-être l'obtention d'un label à certaines conditions.

L'assistance apportée aux prévenus ne signifie en aucune façon une absolution de leurs responsabilités. En tout état de cause, si l'application de la convention de coopération judiciaire le permet, et avec l'accord des autorités tchadiennes, un jugement en France sera rendu, dans le respect de la procédure en vigueur au Tchad.

S'agissant des enfants, une commission quadripartite (HCR, Unicef, Croix-Rouge et autorités tchadiennes) a procédé à leur identification. Dans une deuxième phase, il s'agit d'identifier et de retrouver leurs familles. Ce processus est en cours.

M. Jean François-Poncet a considéré qu'il n'y avait pas lieu de mettre en cause les services et les militaires français qui se sont trouvés en présence de personnes qui ont sciemment cherché à tromper et qui disposaient des autorisations nécessaires à l'exercice de leurs activités au Tchad. Il a rappelé que les responsables de l'association étaient poursuivis pour exercice illégal de l'activité d'adoption.