Mardi 15 janvier 2008

- Présidence de M. Nicolas About, président -

Pouvoir d'achat- Audition de M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, et de Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville

La commission a procédé à l'audition de M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, et de Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville, sur le projet de loi n° 151 (2007-2008), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, pour le pouvoir d'achat.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, a tout d'abord rappelé que le Président de la République a souhaité, à la fin du mois de novembre, que des mesures soient prises rapidement pour permettre le rachat de jours de repos obtenus au titre de la réduction du temps du travail (jours de RTT), le déblocage de la participation et le versement d'une prime de 1 000 euros.

Ces mesures ont été transcrites dans le projet de loi pour le pouvoir d'achat, examiné en décembre à l'Assemblée nationale et maintenant présenté au Sénat. Elles ont pour caractéristique d'avoir sur le pouvoir d'achat un effet direct et concentré dans le temps, même si l'Assemblée nationale a choisi d'élargir la période de référence retenue pour le rachat des jours de RTT. Le projet de loi ne prévoit pas de dispositions contraignantes mais ouvre des facultés nouvelles aux employeurs et aux salariés, dont il devrait accroître sensiblement le pouvoir d'achat. A titre d'illustration, la monétisation de cinq jours de RTT permet à un salarié payé au Smic de gagner 370 euros supplémentaires.

Le projet de loi prévoit également une mesure de déblocage anticipé de la participation, sans remettre en cause toutefois les fonds investis dans les entreprises. Un projet de loi procédant à une réforme de la participation et des autres dispositifs d'épargne salariale sera présenté prochainement au Parlement. Dans les entreprises non couvertes par un accord de participation, les salariés pourront bénéficier d'une prime de 1 000 euros, exonérée de cotisations sociales.

M. Nicolas About, rapporteur, a souhaité obtenir des précisions sur les raisons qui ont conduit le Gouvernement à proposer à l'Assemblée nationale un régime fiscal et social différent pour les jours de RTT stockés au 31 décembre 2007 et pour ceux que les salariés vont obtenir au premier semestre de 2008. Puis il a demandé si l'on dispose d'éléments de bilan sur les mesures de déblocage de la participation votées en 2004 et 2005, notamment sur la répartition entre épargne et consommation.

Après avoir rappelé qu'elle siège au Conseil supérieur de la participation, Mme Isabelle Debré s'est déclarée opposée au déblocage anticipé de la participation. En effet, la participation n'a pas vocation à répondre à des besoins de consommation immédiate, mais s'inscrit dans un projet de vie. A tout le moins, les salariés qui choisissent de disposer de manière anticipée de leurs avoirs devraient bénéficier d'un régime fiscal moins avantageux que celui applicable aux salariés qui feraient le choix d'attendre le terme normal de la période d'indisponibilité des fonds.

Si elle s'est déclarée favorable à la diffusion de la participation dans les petites entreprises, elle a ensuite estimé qu'il serait injuste de prévoir des dispositions différentes pour les salariés selon que l'entreprise compte plus ou moins de cinquante salariés. Enfin, elle a rappelé que, lors des précédents déblocages, les deux tiers des sommes retirées par les salariés avaient été à nouveau épargnées, parfois pour être placées sur un plan d'épargne d'entreprise, ce qui ouvre droit au versement d'un abondement de l'employeur.

M. Alain Gournac s'est également dit défavorable au déblocage anticipé, qui n'aura sans doute qu'un impact limité sur l'activité : d'une part, parce qu'une grande partie des sommes sera épargnée, d'autre part parce que l'achat de biens semi-durables risque surtout de stimuler les importations.

Sur le fond, il a regretté que cette mesure aille à l'encontre du sens de l'épargne et de l'économie auquel il s'est dit attaché, tout comme le passage aux trente-cinq heures avait porté atteinte à la « valeur travail ».

Rappelant qu'il est l'auteur d'un rapport sur les moyens de développer la participation dans les petites entreprises, il a suggéré de permettre à l'employeur, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, de bénéficier de la participation au même titre que les salariés.

Mme Gélita Hoarau a souligné que le coût de la vie à la Réunion est plus élevé qu'en métropole. L'Etat lui-même reconnaît cet état de fait puisqu'il accorde à ses fonctionnaires une prime de vie chère de 35 %. L'isolement géographique de l'île n'en est pas la seule cause : il convient de rétablir la transparence dans la formation des prix en luttant contre les monopoles. Elle a regretté que le prix des médicaments ait fait l'objet d'une mesure de réduction autoritaire sans qu'il ait été procédé à un état des lieux préalable.

M. Guy Fischer a jugé le projet de loi peu lisible et a douté qu'il ait des conséquences tangibles sur le niveau de vie des Français, qui sont confrontés à un effondrement de leur pouvoir d'achat, notamment les fonctionnaires et les retraités dont les revenus ont été insuffisamment revalorisés l'an passé. Il s'est ensuite inquiété de l'explosion de la précarité, qui conduit à une forte augmentation du nombre de travailleurs pauvres. Evoquant le revenu de solidarité active (RSA), il a souhaité que l'on étudie attentivement le parcours des titulaires de minima sociaux qui s'engagent dans ce dispositif, afin de s'assurer qu'il leur est réellement bénéfique. En conclusion, le groupe communiste républicain et citoyen votera contre ce projet de loi.

M. Claude Domeizel a demandé si les exonérations de charges seront compensées à la sécurité sociale et qui assumera finalement le coût de ces mesures.

Répondant au rapporteur, M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, a indiqué que l'Assemblée nationale a souhaité porter au 30 juin 2008 la période de référence retenue pour le rachat des jours de RTT. Cependant, comme le régime d'exonération prévu par le projet de loi est plus avantageux pour l'employeur, mais moins avantageux pour le salarié, que celui issu de la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (Tepa), il existait un risque que les employeurs n'effectuent, entre ces deux dispositifs, un arbitrage défavorable aux salariés.

C'est pourquoi le Gouvernement a proposé de réserver le régime d'exonération prévu par le projet de loi au rachat des jours acquis par le salarié à la date du 31 décembre 2007. Pour les jours acquis au cours du premier semestre 2008, c'est en revanche le régime de la loi Tepa qui s'appliquera.

Ces questions vont faire l'objet d'une concertation avec les partenaires sociaux pour établir un système durable.

Abordant ensuite la question de la participation, le ministre a indiqué que, lors des déblocages intervenus en 2004 et 2005, les deux tiers des sommes débloquées avaient été épargnés tandis que le tiers restant avait été consommé, sachant que 7 milliards d'euros avaient été débloqués en 2004, pour un encours de participation de l'ordre de 57 milliards. Ce déblocage n'a d'ailleurs pas nui à l'essor de la participation dont l'encours est aujourd'hui de 100 milliards.

Le fait de rendre cette épargne plus directement disponible répond au besoin de sécurité de nos concitoyens. En liaison avec le ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, un projet de loi relatif à la participation, à l'intéressement et aux autres dispositifs d'épargne salariale est en cours d'élaboration. Sur les stock-options, leurs conditions d'attribution doivent être plus transparentes et davantage liées à la performance de l'entreprise, et il est envisageable que des actions soient attribuées à tous les salariés de l'entreprise. Il a rappelé que le Président de la République a évoqué, lors de sa conférence de presse, un doublement ou un triplement de la réserve spéciale de participation, ce qui atteste de l'ambition des pouvoirs publics en la matière.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, a ensuite regretté que l'essentiel de l'effort productif repose, dans notre pays, sur les personnes âgées de trente-cinq à cinquante ans, ce qui entraîne des problèmes de pénibilité du travail. Il a appelé de ses voeux une refondation du rapport au travail, pour faire reculer les accidents du travail, les inégalités entre les femmes et les hommes ou encore le recours abusif aux stages.

Sur la question de la durée du travail, il est clair que les trente-cinq heures obligatoires posent un problème à l'économie française. Ceci étant, il n'est pas envisagé de supprimer la notion de durée légale du travail, car cela serait contradictoire avec les dispositions votées l'été dernier en matière d'heures supplémentaires. En revanche, une réflexion peut être engagée sur le niveau du contingent d'heures supplémentaires. Soulignant sa détermination à lutter contre le chômage et la précarité dans l'emploi, il a souligné que le travail à temps partiel n'est pas une fatalité et s'est félicité de l'issue favorable de la négociation sur la modernisation du marché du travail.

Répondant à Mme Gélita Hoarau, il a indiqué s'être rendu cinq fois à la Réunion dans le cadre de ses différentes responsabilités ministérielles et a souligné que cette île n'est pas la seule à être confrontée à un problème de coût de la vie. Il s'est engagé à transmettre ses observations à ses collègues Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, Hervé Novelli, secrétaire d'Etat chargé des entreprises et du commerce extérieur, et Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, qui seront mieux à même d'y apporter des réponses précises.

En réponse à M. Guy Fischer, il a indiqué, au sujet du RSA, que le Gouvernement souhaite faire disparaître, grâce à ce dispositif, la crainte du déclassement social qu'éprouvent de nombreux salariés, en garantissant à chacun que le travail vaudra augmentation des ressources. Il a ensuite rappelé que la revalorisation des retraites est effectuée en tenant compte du rythme de l'inflation et qu'elles seront donc à nouveau augmentées en cas de hausse des prix plus rapide que prévu. Il a également confirmé que les engagements pris pendant la campagne présidentielle, alors qu'il était porte-parole du candidat Nicolas Sarkozy, en matière de revalorisation des petites retraites et des pensions de réversion, seront bien tenus.

Sur la question de la compensation évoquée par M. Claude Domeizel, il a souligné que le rachat de jours de RTT acquis en 2007, qui n'auraient autrement pas été rémunérés et donc soumis à cotisations sociales, ne prive la sécurité sociale d'aucune ressource. S'agissant des jours acquis au cours du premier semestre 2008, il s'est engagé à tirer toutes les conséquences de l'application de la loi dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances pour 2009 et à procéder, si nécessaire, à une compensation du manque à gagner par la sécurité sociale, qui percevra en tout état de cause des recettes via la CSG et la CRDS.

Puis Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville, a présenté les deux mesures se rapportant au secteur du logement : l'indexation des loyers sur le seul indice des prix à la consommation et la réduction du dépôt de garantie de deux à un mois de loyer.

Ces deux mesures concrètes auront un effet direct sur le pouvoir d'achat. Les locataires du parc privé économiseront chaque année 1,2 milliard d'euros, soit 600 millions grâce à la nouvelle indexation et 600 millions avec la diminution du dépôt de garantie. Cette dernière mesure bénéficiera surtout aux personnes qui déménagent souvent, soit pour leurs études, soit pour leur activité professionnelle.

Certains souhaitaient le maintien des deux mois de dépôt de garantie et d'autres plaidaient au contraire pour sa suppression totale. Le dispositif proposé est un bon compromis qui contribue à équilibrer les rapports entre bailleurs et locataires. Un pas supplémentaire sera franchi dans les prochains mois avec la généralisation de l'avance Loca-Pass, officialisée par la signature le 21 décembre dernier d'un accord avec le 1 % logement. Les locataires qui ne peuvent payer le mois de dépôt de garantie pourront bénéficier, grâce à ce dispositif, d'un prêt à taux zéro remboursable sur trente-six mois.

M. Nicolas About, président, a rappelé que, dans la mesure où plusieurs mesures favorables ont été adaptées les années précédentes en faveur des propriétaires, il est normal de faire un geste aujourd'hui en faveur des locataires. Toutefois, la diminution du dépôt de garantie suscite des craintes légitimes chez les propriétaires. Il faut espérer que la prochaine mise en place de la garantie des risques locatifs puisse les lever.

Mme Brigitte Bout s'est inquiétée des difficultés que rencontrent les petites communes pour faire fonctionner le Pass foncier. Celui-ci vise à faciliter l'acquisition d'un terrain et d'une maison, grâce à un prêt unique, financé par la banque et la commune. L'acheteur doit d'abord rembourser l'établissement bancaire qui a prêté les fonds pour la construction de la maison, et ensuite la commune qui a avancé la trésorerie nécessaire à l'acquisition du terrain. Comment les communes où le prix du foncier est élevé peuvent-elles s'engager dans cette démarche ?

M. Guy Fischer a regretté que le projet de loi ne s'adresse qu'aux locataires du parc privé. Les loyers des logements sociaux ont fortement augmenté ces dernières années : deux hausses par an, en janvier et en juillet, sont imposées aux locataires, sans que le préfet puisse intervenir utilement. Quelles sont les propositions du Gouvernement en ce domaine ?

Mme Bernadette Dupont a souhaité connaître le détail du dispositif, récemment annoncé par la ministre, de « la maison à 15 euros par jour ». Par ailleurs, que faire contre les recours abusifs qui retardent les constructions de logement ?

M. Alain Gournac a évoqué le cas des ménages attributaires d'un logement social de quatre ou cinq pièces lorsqu'ils y vivaient avec leurs enfants et qui ne souhaitent pas le quitter une fois leurs enfants partis, car on leur propose un logement plus petit pour un loyer plus élevé. Ce dysfonctionnement dans la gestion du parc HLM retarde l'accession des familles nombreuses aux logements qui leur sont destinés. Cette situation nécessite la révision des règles de gestion des HLM, d'autant qu'il peut aussi arriver que certains locataires obtiennent, dans un premier temps, un logement social en fonction de la modicité de leurs revenus mais continuent d'y vivre même lorsque ceux-ci dépassent largement le plafond de ressources. Parfois, ces locataires sont aussi propriétaires de résidences secondaires où ils vivent une partie de l'année, laissant leur HLM inoccupée. Ces occupations abusives sont inadmissibles et doivent être rapidement et fermement combattues.

Mme Raymonde Le Texier a relevé que la nouvelle indexation ne freinera que partiellement la hausse des loyers du parc privé, puisque la moitié de cette hausse est imputable aux augmentations pratiquées au moment d'une relocation, sur laquelle l'indice ne joue pas. L'indexation aura d'autant moins d'influence que les ménages ont tendance à déménager plus fréquemment que par le passé. Elle pourrait même avoir un effet pervers, en incitant les propriétaires à changer régulièrement de locataires pour augmenter plus facilement le loyer. Enfin, elle a déclaré partager le souhait de régler le problème des personnes bénéficiant d'une HLM de cinq pièces, qui se voient proposer un logement plus petit mais plus cher, car cette situation est incompréhensible pour l'immense majorité des citoyens.

Mme Sylvie Desmarescaux a indiqué que l'obligation faite aux communes de plus de 3 500 habitants de compter au moins 20 % de logements sociaux continue de poser des problèmes pratiques. C'est le cas des villes entourées de remparts qui, par définition, ne peuvent s'étendre et donc accroître le parc social. Il en résulte l'impossibilité de vendre des logements sociaux aux locataires qui souhaitent en devenir propriétaires. Est-il possible de prévoir une dérogation pour ces cas particuliers ?

Mme Isabelle Debré a constaté que beaucoup de logements privés restent vides en raison des réticences des propriétaires à les louer. C'est le cas par exemple à Boulogne, où 1 400 logements sont inoccupés alors que 3 000 demandes sont recensées. Dans ces conditions, il est urgent d'étendre la garantie des risques locatifs pour sécuriser les propriétaires et faire ainsi revenir sur le marché de nombreux locaux vacants.

Mme Bernadette Dupont a souligné le paradoxe des logements accessibles aux personnes handicapées : ces logements, en raison des équipements qu'ils requièrent, sont plus coûteux que les autres et sont donc souvent trop chers pour les personnes handicapées. Comment résoudre cette situation absurde ?

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville, a déclaré que l'objectif du Gouvernement est que tout le monde puisse être logé et que tous les instruments disponibles doivent être utilisés pour l'atteindre.

Le projet de loi est effectivement très favorable aux locataires et appelle donc une mesure pour rassurer également les bailleurs. C'est la finalité du système de garantie des risques locatifs (GRL), dont la mise en oeuvre fait l'objet d'une négociation, qui devrait aboutir au mois de février. L'obligation d'y recourir pour les propriétaires, moyennant une très légère cotisation, est encore en discussion. Cependant, le dispositif sécurisera les locataires et les propriétaires, si bien que les expulsions ne toucheront plus que les locataires de mauvaise foi.

Les communes où le foncier est cher ne sont pas pénalisées par le mode de financement du Pass foncier, car celui-ci n'est pas lié au coût du foncier mais est fondé sur un forfait, qui va de 3 000 à 500 000 euros par logement.

L'opération « une maison à 15 euros » vise à encourager les ménages modestes à devenir propriétaires. Le dispositif est donc réservé aux personnes dont les revenus sont inférieurs à 1,5 Smic. Il prévoit que l'acheteur pourra s'adresser à sa banque en vue d'obtenir un prêt et un plan de financement concernant à la fois l'acquisition d'un terrain et la construction d'une maison. Il sera opérationnel dans le courant de l'année.

M. Nicolas About, président, a précisé que cette opération consiste à concrétiser la proposition de Jean-Louis Borloo d'« une maison à 100 000 euros ».

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville, a ensuite confirmé que les recours abusifs retardent considérablement la construction de logements neufs et qu'ils sont souvent le fait de personnes ou d'associations irresponsables et inconscientes de la gravité de la situation du logement. La pénalisation de ces recours, votée il y a trois ans, n'a pas eu l'effet escompté.

Les logements équipés pour être accessibles aux personnes handicapées sont effectivement très coûteux. La difficulté que rencontrent les personnes handicapées pour les acheter ou y demeurer pose le problème du niveau des allocations qui leur sont versées. C'est donc davantage auprès du ministre des solidarités que la question doit être soulevée.

L'absence de mobilité dans le monde HLM est un problème fondamental qui explique en grande partie la crise du logement en France. Deux accords avec les offices HLM ont récemment été signés pour faire évoluer la situation. Le premier engage les offices à vendre 40 000 logements par an et le second prévoit de modifier le mode de gestion des HLM, en substituant la notion de « maintien dans le parc » à celle de « maintien dans les lieux ». Ces accords devraient remettre en mouvement un monde HLM jusqu'ici caractérisé par la lourdeur.

Il est dangereux d'encadrer entièrement les loyers du parc privé car cela conduirait à asphyxier le marché. Or, étant donné le poids du logement privé, soit 55 % du parc locatif, une politique efficace du logement ne peut se faire sans les bailleurs privés.

Enfin, Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville, a affirmé, même si elle comprend la situation particulière et difficile de certaines communes, qu'elle sera le ministre de l'application stricte de la loi SRU. Les communes ont jusqu'à 2012 pour se mettre en conformité avec la loi ; aucun délai supplémentaire ne sera accordé. Après cette date, des arrêtés de carence seront pris.

Mesures de réduction et exonération de cotisations et contributions de sécurité sociale - Examen du rapport

Enfin, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Alain Vasselle sur la proposition de loi organique n° 140 (2007-2008) de MM. Alain Vasselle et Nicolas About tendant à prévoir l'approbation par les lois de financement de la sécurité sociale des mesures de réduction et d'exonération de cotisations et de contributions de sécurité sociale adoptées en cours d'exercice.

En préambule, M. Alain Vasselle, rapporteur, a rappelé que la question des exonérations, allégements et autres réductions de charges sociales est devenue un sujet essentiel pour les finances sociales en raison des montants en cause.

Ainsi, les allégements généraux de charges sociales, allégements Fillon et allégements au titre des heures supplémentaires, mobilisent désormais près de 30 milliards d'euros, compensés à la sécurité sociale par un panier de recettes fiscales. Les allégements de charges ciblés sur certains publics, certaines professions ou certaines zones du territoire représentent plus de 3 milliards d'euros de moindres recettes pour la sécurité sociale, compensés, de façon insuffisante et avec retard, par des dotations budgétaires.

Enfin, les nombreuses exemptions d'assiette, dites « niches sociales », font échapper plus de 40 milliards d'euros à toute contribution, comme vient de le chiffrer le Gouvernement dans un récent rapport. Ce montant est à comparer avec la masse salariale, soit environ 400 milliards d'euros. Les principaux dispositifs concernés sont la participation, l'intéressement, diverses aides directes consenties aux salariés, comme les titres restaurant ou les chèques vacances, la prévoyance complémentaire, les retraites supplémentaires et les indemnités de licenciement. Dans son dernier rapport sur la sécurité sociale, la Cour des comptes a consacré un long développement à ces exemptions d'assiette en matière de prélèvements sociaux. Elle y a vu une possible source de financement pour la sécurité sociale et a particulièrement mis en évidence la question de la taxation des stock-options.

La Mecss a également étudié cette question dans son rapport présenté à l'occasion du débat sur les prélèvements obligatoires au mois de novembre dernier. Plusieurs pistes ont été analysées, notamment la remise en cause de la pertinence de certaines niches au regard de leur efficacité économique et sociale et du manque à gagner qu'elles entraînent pour la sécurité sociale. La possibilité de taxer à un faible niveau l'ensemble des assiettes exonérées a d'ailleurs fait l'objet d'un amendement de la commission au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.

En effet, l'existence de ces dispositifs d'exonération pose deux questions : une question de fond tenant à leur utilité et à leur justification, et une question de procédure relative à leurs modalités d'adoption et à leur évaluation par le législateur. Sur ce dernier aspect, la Mecss a mis en évidence l'insuffisance du contrôle exercé tant par les ministères sociaux que par les commissions des affaires sociales. En effet, dans la mesure où ces exonérations peuvent être insérées dans tout texte législatif, il est fréquent qu'elles soient adoptées sans expertise préalable, et sans l'avis du gestionnaire, en l'occurrence l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) et les Urssaf. D'après une étude menée par la direction de la sécurité sociale, sur la cinquantaine de mesures d'exonération ou de réduction d'assiette de cotisations sociales votées entre le début 2005 et le début 2007, 40 % ne résultaient pas d'un arbitrage interministériel impliquant le ministère des affaires sociales. Or, l'impact de ces mesures sur les comptes sociaux est de plus en plus lourd.

Afin de corriger cette anomalie, la Mecss a donc suggéré de donner aux lois de financement un rôle central en matière de contrôle des niches sociales en en faisant le « passage obligé » de l'ensemble des mesures d'exonération ou d'allégement de charges. Cette suggestion reprend une proposition de la commission faite en 2005 à l'occasion de l'examen de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale. Une solution identique a également été défendue dans le rapport de la mission conjointe des inspections des finances et des affaires sociales sur l'articulation entre les finances de l'Etat et de la sécurité sociale.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a déclaré que la présente proposition de loi organique a simplement pour objet de traduire cet objectif commun. Elle ne remet pas en cause la possibilité pour les lois ordinaires de contenir des mesures de création ou de modification d'exonération de charges sociales. Mais elle prévoit que toute prorogation au-delà de l'exercice en cours nécessitera une approbation en loi de financement. Cela permettra d'accompagner les dispositifs adoptés d'une première étude d'impact et offrira au Parlement la possibilité de s'assurer d'un niveau adéquat de compensation. Cette procédure devrait surtout interdire le contournement trop souvent constaté du principe, de valeur organique, selon lequel il ne peut être dérogé à la règle générale de compensation qu'en loi de financement de la sécurité sociale.

Ce dispositif a d'ailleurs reçu par avance l'approbation du Gouvernement puisque, lors du débat sur les prélèvements obligatoires et à l'occasion de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, les ministres en charge des finances et des comptes publics en ont approuvé la démarche et ont souligné tout l'intérêt qui s'attachait à son adoption.

M. Nicolas About, président, a précisé qu'il a obtenu, au nom de la commission, l'inscription de ce texte sur la séance mensuelle réservée du 22 janvier prochain.

Après que M. Guy Fischer eut fait part de ses réserves sur la proposition de loi, la commission a approuvé les conclusions de son rapporteur.

Mercredi 16 janvier 2008

- Présidence de M. Nicolas About, président -

Pouvoir d'achat - Examen du rapport

La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Nicolas About sur le projet de loi n° 151 (2007-2008), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, pour le pouvoir d'achat.

M. Nicolas About, rapporteur, a d'abord souligné que, depuis 2002, la croissance du pouvoir d'achat des ménages a été modérée, de l'ordre d'1,9 % par an en moyenne, à comparer au rythme de progression moyen de 5,7 % par an au cours de la période 1960-1974. Ces données agrégées ne reflètent toutefois pas parfaitement la situation concrète de chaque ménage au sein des différentes catégories sociales. Le conseil d'analyse économique a d'ailleurs annoncé pour la première quinzaine du mois de février un rapport approfondi sur la mesure du pouvoir d'achat dans notre pays.

La question de la relance du pouvoir d'achat et des moyens d'y parvenir a été au coeur de la campagne présidentielle de 2007. La majorité sortie des urnes considère que cette relance, pour être durable, ne peut résulter que d'un surcroît de travail et d'investissement. La loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (Tepa) de l'été dernier a marqué une première étape décisive pour garantir un gain accru de pouvoir d'achat aux salariés travaillant davantage. Les premières données statistiques montrent que 40 % des entreprises de plus de dix salariés ont eu recours au dispositif de la loi Tepa dès son premier mois d'application. 20 millions d'heures supplémentaires correspondant à environ 250 millions d'euros de rémunération ont ainsi bénéficié d'exonérations fiscales et sociales. A la fin de l'année 2007, le Président de la République a décidé de donner une nouvelle impulsion à cette politique en annonçant un ensemble de mesures plus conjoncturelles en faveur du pouvoir d'achat. Celles-ci trouvent leur traduction législative dans le présent projet de loi.

Ces mesures s'organisent autour de trois axes principaux : la possibilité offerte au salarié de demander à son employeur le rachat de jours de réduction du temps de travail (RTT), une mesure de déblocage anticipée de la participation, enfin deux dispositifs destinés à contenir la hausse des loyers dans le parc privé et à faciliter l'accès à la location.

La possibilité de racheter des jours de RTT ou des droits accumulés sur un compte épargne-temps sera possible dans toutes les entreprises quels que soient leurs effectifs, dès lors qu'il y aura accord du salarié et du chef d'entreprise. Ces jours seront payés à un taux majoré qui devra être négocié par les partenaires sociaux et ne pourra être inférieur à 10 %. Cette mesure concernera les jours non pris par les salariés à la date du 31 décembre 2007 mais aussi, à l'initiative de l'Assemblée nationale, ceux que les salariés obtiendront au cours du premier semestre 2008. Le rachat des jours de RTT non pris en 2007 sera exonéré de charges sociales, à l'exception de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS). Pour les jours acquis au titre de 2008, c'est le régime d'exonération prévu par la loi Tepa, moins avantageux pour l'employeur, mais plus avantageux pour le salarié, qui s'appliquera. L'Assemblée nationale a supprimé toute restriction au nombre de jours pouvant être rachetés afin de donner plein effet au dispositif.

Elle a également adopté deux articles additionnels, le premier pour rendre obligatoire dans les entreprises la mise en place d'un dispositif de garantie de la part des droits accumulés par les salariés dans un compte épargne-temps non couverte par l'assurance pour la garantie des salaires, le deuxième pour permettre la conversion d'un repos compensateur de remplacement en une majoration salariale.

M. Nicolas About, rapporteur, a ensuite présenté la deuxième mesure phare du projet de loi qui consiste à autoriser le déblocage anticipé, à la demande du salarié, de la participation, alors que celle-ci reste normalement indisponible pendant cinq ans. Le projet de loi apporte toutefois trois restrictions à cette possibilité. Tout d'abord, dans le cas des accords de participation plus avantageux pour le salarié que le régime légal, le déblocage est subordonné à la conclusion d'un accord d'entreprise ou à défaut à la décision unilatérale de l'employeur. Ensuite, si les fonds de la participation sont investis dans l'entreprise, il est proposé de subordonner le déblocage à la conclusion d'un accord collectif. Enfin, il ne sera pas possible de disposer des sommes issues de la participation placées dans les plans d'épargne pour la retraite collectifs (Perco). Les sommes débloquées ne pourront excéder 10 000 euros et bénéficieront du régime fiscal et social de la participation, c'est-à-dire une exonération d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales, à l'exception de la CSG et de la CRDS. Cette mesure, de nature ponctuelle, paraît entourée de suffisamment de garanties pour éviter qu'elle ne porte préjudice au développement de la participation. Celui-ci devrait d'ailleurs faire l'objet d'une réforme plus ambitieuse au cours des prochains mois.

Pour les entreprises non couvertes par un accord de participation, le projet de loi prévoit la possibilité du versement d'une prime exceptionnelle d'un montant maximum de 1 000 euros par salarié. Cette prime pourra être modulée selon les salariés en fonction de critères objectifs définis dans un accord. Elle ne pourra en aucun cas se substituer à des éléments de rémunération ou à des augmentations de rémunération décidées dans le cadre de conventions ou d'accords de branches. Elle ne bénéficiera pas d'exonérations fiscales, mais d'une exonération de charges sociales, à l'exception de la CSG et de la CRDS. L'exonération de charges sociales ne sera pas compensée à la sécurité sociale.

A l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale est par ailleurs une nouvelle fois revenue sur la question de l'exonération de la redevance audiovisuelle pour les personnes âgées disposant de faibles revenus. Pour 2008, cette exonération, qui devait être de 50 %, sera reconduite à 100 %. Le Gouvernement devra néanmoins remettre un rapport au Parlement sur cette question avant le 15 octobre prochain.

Puis M. Nicolas About, rapporteur, a présenté le volet logement du texte. Le projet de loi prévoit deux mesures destinées à dégager du pouvoir d'achat pour les locataires résidant dans le parc privé, c'est-à-dire environ 60 % des locataires : l'indexation des loyers sur l'indice des prix à la consommation au lieu de l'indice composite actuel, qui progresse plus vite que l'inflation ; la fixation à un mois de loyer, au lieu de deux, du montant maximum du dépôt de garantie qui peut être exigé du locataire par le bailleur.

Enfin, l'examen de ce projet de loi sur le pouvoir d'achat fournit l'occasion d'analyser la proposition de loi n° 116 (2007-2008) de M. Jean-Pierre Bel et des membres du groupe socialiste et apparentés en faveur du pouvoir d'achat, déposée sur le même sujet par le groupe socialiste. Si les objectifs de ces deux textes sont communs, les solutions avancées par la proposition de loi n'emportent pas la conviction.

En premier lieu, plusieurs mesures sont d'ores et déjà satisfaites par le projet de loi ou par d'autres dispositions législatives en cours d'adoption : par exemple la limitation à un mois de loyer du dépôt de garantie, l'exonération de redevance audiovisuelle pour les personnes âgées ayant un faible revenu ou le retour aux tarifs réglementés d'électricité et de gaz. Certaines dispositions, comme la conditionnalité des allégements de charges, font actuellement l'objet d'une concertation avec les partenaires sociaux, ce qui rend prématuré de légiférer dès à présent sur ce sujet. D'autres paraissent difficiles à mettre en oeuvre à court terme, notamment parce qu'elles supposent qu'un accord soit trouvé au niveau communautaire : tel est le cas des propositions formulées en matière de TVA. Certaines dispositions sont par ailleurs clairement contraires aux choix effectués par la majorité, par exemple, la proposition de supprimer les franchises médicales, le blocage des loyers pendant un an ou encore le rétablissement du mécanisme de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) « flottante », supprimée en 2002. Certaines mesures n'ont pas de lien direct avec la question du pouvoir d'achat : par exemple l'introduction en droit français du recours collectif ou le relèvement du plafond du livret A. Enfin, les dispositions proposées pour financer la proposition de loi du groupe socialiste - la taxation des compagnies pétrolières et des entreprises de transport aérien ainsi que l'abrogation de la loi Tepa - ne peuvent évidemment emporter l'adhésion.

En conclusion, M. Nicolas About, rapporteur, a proposé le rejet de la proposition de loi du groupe socialiste et l'approbation du projet de loi déposé par le Gouvernement sous réserve de l'adoption des amendements qu'il présente.

M. Alain Gournac s'est félicité de ce que le rapporteur ait tenu compte des réserves exprimées la veille par plusieurs commissaires au sujet du déblocage anticipé de la participation. Il a réitéré son opposition de principe à cette mesure, considérant qu'elle encourage la consommation immédiate aux dépens de l'épargne, mais s'est déclaré rassuré par les précisions apportées.

Il a ensuite estimé que le problème du logement ne pourra être résolu par le seul développement du parc social et qu'il convient donc également d'inciter les propriétaires privés à louer des logements laissés vacants par crainte des impayés de loyers. Il a néanmoins approuvé la réduction du montant du dépôt de garantie, dans la mesure où il est difficile pour les jeunes ménages de rassembler les sommes nécessaires pour s'installer.

Mme Isabelle Debré s'est dite en accord avec les propos tenus par M. Alain Gournac au sujet de la participation, puis a insisté sur l'essor des plans d'épargne pour la retraite collectifs (Perco) qui permettent de disposer d'un complément de revenu pendant la retraite. Elle a fait part de son intention d'intervenir sur le thème de la participation lors du débat en séance publique et indiqué que le Conseil supérieur de la participation, dont elle est membre, prendra part à la réflexion sur la réforme des dispositifs d'épargne salariale annoncée par le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, Xavier Bertrand.

M. André Lardeux a déclaré que les mesures proposées par le texte sont de faible portée et de surcroît peu adaptées à la situation de notre pays qui ne souffre pas d'une insuffisance de la demande, mais d'un manque de compétitivité de l'offre. Il a regretté que les personnes les plus fragiles ne soient pas concernées par ces mesures, citant les retraités, les salariés contraints de travailler à temps partiel et les familles nombreuses.

Sur ce dernier point, il a incidemment fait observer que la taxation des véhicules les plus polluants, dans un but de préservation de l'environnement, risque de pénaliser les familles nombreuses obligées d'acquérir de grandes voitures.

Le déblocage anticipé de la participation envoie un mauvais signal à la population, alors qu'il faudrait au contraire encourager l'épargne longue en prévision de la retraite. En outre, cette mesure risque de favoriser l'achat de biens semi-durables importés, dégradant ainsi encore le solde du commerce extérieur.

Sur le volet logement, il a souligné que les logements du parc privé appartiennent principalement à des petits propriétaires, pour qui les loyers représentent un important complément de revenu, notamment lorsqu'ils sont retraités. Ces propriétaires doivent être mieux protégés contre les locataires de mauvaise foi qui ne s'acquittent pas de leurs obligations. Il faut rappeler que la loi Quillot du 22 juin 1982, relative aux droits et aux obligations des locataires et des bailleurs, a provoqué une crise du logement en déséquilibrant les règles du marché en faveur des locataires. Enfin, on ne peut exclure que la réduction du montant du dépôt de garantie, qui transfère du pouvoir d'achat des propriétaires vers les locataires et sera donc sans effet au niveau macroéconomique, conduise les propriétaires à exiger davantage de cautions solidaires de la part de leurs locataires.

M. Louis Souvet a demandé si toutes les entreprises pourront répondre favorablement aux demandes de rachat de jours de RTT exprimées par leurs salariés et ce qu'il adviendrait en cas de refus de l'employeur. Il a également souhaité savoir si les entreprises mutualistes sont couvertes par le dispositif relatif à la prime de 1 000 euros, ce qui semble ne pas être le cas. Il a ensuite exprimé des réserves sur l'abandon de l'actuel indice de référence pour les loyers, estimant qu'il permettait de lisser dans le temps leur évolution et que les petits propriétaires risquent d'être pénalisés par son remplacement par l'indice des prix à la consommation.

M. Guy Fischer a estimé que ce projet de loi est un texte d'affichage qui poursuit des buts contradictoires. L'amélioration du pouvoir d'achat du plus grand nombre reste un objectif à atteindre. Or, la revalorisation des retraites, des allocations familiales ou des traitements dans la fonction publique est insuffisante au regard de l'accélération de l'inflation, qui a atteint 2,6 % en 2007. L'encouragement à épargner dans un Perco, en vue de la retraite, ou à souscrire des assurances complémentaires va à l'encontre de l'amélioration du pouvoir d'achat des ménages.

Sur le logement, il a regretté que le texte ne s'intéresse qu'au parc privé. Les dispositifs de défiscalisation en faveur de l'investissement locatif ont conduit à la multiplication des logements vacants. Il a souligné que les dépenses incompressibles représentent une proportion de plus en plus importante du budget des ménages. Pour ces raisons, le groupe communiste républicain et citoyen votera contre ce texte.

Mme Janine Rozier a déclaré partager les réserves de certains sur la participation ainsi que les remarques très justes de M. André Lardeux sur le sort des familles et des plus modestes. En ce qui concerne la réduction à un mois du dépôt de garantie, elle a fait observer que les locataires omettent souvent de payer le dernier mois de loyer lorsqu'ils quittent leur logement. Il serait peut-être plus judicieux de maintenir le deuxième mois de garantie, mais en étalant son versement dans le temps. Plus généralement, elle a regretté que trop de gens succombent aux tentations de la société de consommation et se retrouvent ainsi dans une situation difficile sur le plan financier. Elle a enfin indiqué que le rachat des jours de RTT se heurte parfois à des obstacles dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.

Mme Muguette Dini a confirmé que les locataires ne payent souvent pas le dernier mois de loyer et soutenu l'idée d'étaler, par exemple sur dix ou douze mois, le versement d'un deuxième mois de garantie, sous réserve que le dépôt de garantie soit rapidement remboursé au locataire lorsqu'il quitte le logement. Rappelant que les logements vacants sont taxés dans certaines communes, elle a souhaité que l'on réfléchisse à des solutions moins pénalisantes. Elle a enfin souligné que les impayés de loyers constituent un véritable problème pour les petits propriétaires retraités.

Mme Sylvie Desmarescaux s'est enquise de la situation des employés communaux, et des fonctionnaires de manière plus générale, au regard du rachat des jours de RTT.

M. Marc Laménie a indiqué que la réduction du dépôt de garantie sera une source de difficultés pour les propriétaires souvent confrontés à des mauvais payeurs. De plus, les logements loués sont souvent rendus dans un état dégradé et leur propriétaire ne dispose alors que de peu de voies de recours. Il a également déploré une certaine dérive des dépenses de consommation, dont l'augmentation se fait au détriment des dépenses essentielles de logement et d'alimentation.

M. Nicolas About, rapporteur, a d'abord déclaré comprendre les appréhensions exprimées sur le déblocage anticipé de la participation, contraire au principe d'indisponibilité des droits pendant cinq ans. Cependant, ce déblocage est assorti de garanties, notamment pour les Perco.

Sur le rachat des jours de RTT, l'employeur aura le droit de le refuser, par exemple en cas de situation fragile de l'entreprise. Par ailleurs, les sociétés mutualistes entrent bien dans le champ d'application du texte. En revanche, les agents des trois fonctions publiques, qui relèvent d'autres statuts, ne sont pas concernés par le projet de loi ; ceci étant, un accord vient justement d'aboutir pour le paiement des jours de RTT accumulés par les praticiens hospitaliers.

Il a dit partager le souci de tenir compte des difficultés des familles nombreuses, pour lesquelles d'autres dispositifs devront être imaginés. S'il est vrai que la réduction du dépôt de garantie ne crée pas de pouvoir d'achat au niveau macroéconomique, elle opère cependant une redistribution au profit des plus modestes et n'est donc pas illégitime.

Il convient ensuite de réfléchir à la meilleure manière de protéger les propriétaires contre les impayés. A l'Assemblée nationale, un amendement qui poursuivait cet objectif a été rejeté à la demande du Gouvernement, qui a mis en avant le développement du dispositif de cautionnement Loca-pass. Concernant l'évolution des loyers, le rapporteur a rappelé que leur augmentation ne s'explique que pour moitié par les actuelles règles d'indexation, le solde étant dû aux augmentations décidées au moment du changement de locataire.

Il s'est déclaré en désaccord avec l'analyse de M. Guy Fischer, selon laquelle il ne s'agirait que d'un texte d'affichage, estimant au contraire qu'il était indispensable pour démontrer la volonté du Gouvernement d'agir sur le pouvoir d'achat, même si ce projet de loi n'apporte pas de réponses à toutes les difficultés. Il a fait remarquer que le groupe communiste républicain et citoyen dénonce aujourd'hui la revalorisation insuffisante des allocations familiales au regard de l'inflation, mais n'a jamais émis de protestation quand elle était plus favorable... Il semble, au total, qu'un rééquilibrage s'opère.

Il s'est enfin déclaré ouvert aux amendements des groupes, notamment sur le volet logement, afin d'encourager davantage les propriétaires privés à proposer leurs logements à la location.

La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements présentés par le rapporteur.

A l'article 1er (modalités de conversion en argent d'un certain nombre de droits à congés), elle a adopté sept amendements tendant :

- à préciser que le rachat des jours de RTT peut porter non seulement sur une partie, mais encore sur la totalité des jours de RTT dont dispose le salarié ;

- à indiquer que le taux de majoration applicable au rachat de ces jours est celui applicable dans l'entreprise à la première heure supplémentaire ;

- à harmoniser la rédaction des dispositions relatives aux salariés soumis à une convention de forfait en jours avec celle prévue pour les salariés soumis au régime de droit commun ;

- à fixer au 30 septembre 2008 la date limite pour le paiement des jours acquis en 2007 ;

- à plafonner, pour le calcul de l'exonération de cotisations sociales, le montant de la majoration au niveau du taux de majoration le plus élevé appliqué aux heures supplémentaires dans l'entreprise ;

- à préciser que les demandes des salariés doivent être formulées au plus tard le 31 juillet 2008, et non avant cette date ;

- à préciser que le régime d'exonération prévu par la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat s'applique bien, dans tous les cas, au rachat de jours acquis au premier semestre de 2008.

La commission a adopté les articles 1er bis (garantie des droits accumulés dans un compte épargne-temps) et 1er ter (conversion du repos compensateur de remplacement en une majoration salariale) sans modification.

A l'article 2 (déblocage anticipé des sommes attribuées au titre de la participation aux résultats de l'entreprise), la commission a adopté deux amendements : le premier pour modifier, par cohérence avec l'amendement adopté à l'article précédent, la référence aux deux dates figurant à cet article, le second pour supprimer la possibilité donnée à l'employeur de décider unilatéralement le déblocage de la réserve de participation en cas d'accord dérogatoire.

La commission a adopté les articles 3 (versement d'une prime exceptionnelle aux salariés des entreprises non assujetties au régime de la participation), 3 bis (dégrèvement de redevance audiovisuelle pour les personnes âgées disposant de faibles revenus), 4 (nouvelle définition de l'indice de référence des loyers) et 5 (réduction du montant maximum du dépôt de garantie exigible par le bailleur) sans modification.

Après l'article 5, elle a adopté un amendement portant article additionnel tendant à permettre le versement au propriétaire des aides au logement perçues par le locataire.

La commission a enfin adopté le texte ainsi amendé.

Travail - Santé au travail - Examen du rapport

Enfin la commission a procédé à l'examen du rapport de Mme Sylvie Desmarescaux sur la proposition de loi n° 47 (2007-2008) de Mme Michèle Demessine et plusieurs de ses collègues, visant à améliorer la santé au travail des salariés et à prévenir les risques professionnels auxquels ils sont exposés.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a exposé le contenu de la proposition de loi en regroupant ses dispositions en quatre grands thèmes.

Abordant en premier lieu la médecine du travail, elle a indiqué qu'un récent rapport des professeurs de médecine Françoise Conso et Paul Frimat, ainsi que des inspections générales des affaires sociales et des finances, a dressé un bilan très sévère du système, préconisant de progresser sur trois grands axes : la démographie des médecins du travail et les ressources des services de santé au travail ; le caractère prioritaire de la prévention ; la nécessité de passer d'une logique de moyens à une logique de résultats et de régulation.

Les propositions de ce rapport ont été soumises aux partenaires sociaux par Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, qui a demandé parallèlement au Conseil économique et social de rendre un avis dans ce domaine d'ici à la fin du mois de février. Le ministre s'est engagé à présenter un plan de réforme à la fin du premier semestre.

Dans ce domaine, la proposition de loi tend tout d'abord, aux articles 16 à 18, à créer dans le dossier médical personnalisé (DMP) un volet santé au travail renseigné par les médecins du travail. Cette disposition, déjà rejetée par le Sénat lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2008, pose des problèmes de faisabilité. La branche accidents du travail - maladies professionnelles (AT-MP) a, au demeurant, mis en place au sein de la commission des accidents du travail et maladies professionnelles (CATMP) un groupe de travail sur la traçabilité qui doit remettre en juin des propositions susceptibles de résoudre le problème du suivi des salariés en longue période.

L'article 19 propose d'instituer dans chaque caisse régionale d'assurance maladie (Cram) une cellule chargée d'accueillir les victimes. La convention d'objectifs et de gestion en cours pour la branche AT-MP le prévoit cependant déjà.

Les articles 20 à 22 proposent des éléments de réforme du droit de l'inaptitude. Les nombreux problèmes concrets que celui-ci pose sont actuellement étudiés par les partenaires sociaux et devront être résolus dans le cadre de la réforme des services de santé au travail qui sera annoncée à la fin du premier semestre.

Les articles 28 à 32 proposent la coordination des services de santé au travail par une agence nationale, une définition des missions des médecins du travail et la diminution de la périodicité des examens médicaux obligatoires pour chaque salarié.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a tout d'abord jugé nécessaire d'améliorer sensiblement la coordination des services de santé au travail. Evoquant la solution d'une étatisation de la médecine du travail et celle de son rattachement à la branche AT-MP, elle a noté que la conservation du lien actuel entre les services de santé au travail et les entreprises ne devait pas être écartée, les médecins du travail, conseillers des chefs d'entreprise dans le domaine de la santé au travail, étant appelés à renforcer la prévention grâce à leur présence accrue sur les lieux de travail. Rappelant que le rapport Conso et Frimat, préconise de son côté l'octroi aux services de l'Etat des moyens de conduire une politique fondée sur des objectifs de santé au travail et plus seulement sur des indicateurs de moyens et d'activité, elle a estimé utile d'explorer l'ensemble des pistes disponibles avant de légiférer.

Elle a jugé par ailleurs souhaitable que les missions des services de santé au travail soient inscrites dans la loi en fonction des choix qui seront effectués ultérieurement dans le domaine de la gouvernance, et a estimé qu'une périodicité annuelle de la visite médicale obligatoire pour tous les salariés, très consommatrice de temps médical et relativement peu contributive au maintien de la santé au travail, entrerait en concurrence avec la mission de prévention des médecins du travail.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a ensuite abordé le deuxième thème de la proposition de loi, la prévention des risques, indiquant que les partenaires sociaux viennent d'engager une négociation dans ce domaine à la demande du ministre du travail, à la suite des travaux de la conférence tripartite sur les conditions de travail du 4 octobre dernier. Trois dossiers seront examinés dans ce cadre : la mise en place d'un cadre pour le dialogue social sur les conditions de travail dans les PME et dans les très petites entreprises (TPE) ; le rôle et les missions des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ainsi que la durée des mandats et la formation des représentants du personnel dans cette instance ; les modalités d'alerte sur les conditions de travail.

Elle a illustré l'ampleur des questions à résoudre en rappelant la faible implantation actuelle des CHSCT et le fonctionnement insatisfaisant de ces organismes face aux nouveaux enjeux de la santé au travail, en insistant sur la nécessité d'améliorer leur couverture et de favoriser le dialogue social dans les PME et TPE, et en mentionnant l'opportunité de revoir les modalités d'alerte sur les conditions de travail, le fonctionnement de l'alerte dépendant actuellement de l'existence d'un CHSCT ou de délégués du personnel dans l'entreprise.

Situant la proposition de loi dans la perspective de ces différents besoins, elle a indiqué que ses articles 9 à 11 visent à améliorer l'information des salariés sur les risques pour la santé et la sécurité.

L'article 9 donne une valeur législative au document unique d'évaluation des risques, prévoit la « remise » de ce document aux instances représentatives et au médecin du travail au lieu de sa simple « mise à disposition », et sa transmission dématérialisée à l'inspecteur du travail. Il crée par ailleurs de nouvelles sanctions pénales et prévoit une cotisation supplémentaire si la transmission prévue n'est pas effectuée.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a estimé ces différentes mesures soit insuffisamment justifiées, soit susceptibles d'alourdir les charges administratives des entreprises sans bénéfice notable pour les salariés.

Sur les articles 10 et 11, qui prévoient la réalisation d'un livret d'information sur les risques délivré à chaque salarié, elle a rappelé que le Sénat a rejeté cette mesure lors de l'examen du PLFSS pour 2008 et que le document unique d'évaluation des risques remplit la fonction d'information.

S'agissant des articles 12 et 13, qui posent le problème de l'équilibre entre le risque de dispersion des responsabilités en matière de prévention des risques et la nécessité de tenir compte du fait que la dangerosité et la complexité de certaines activités nécessitent parfois un degré de coresponsabilité, il serait souhaitable de disposer de l'expertise des partenaires sociaux.

Sur l'article 14, qui permet à l'inspecteur du travail d'imposer la mise en place d'un CHSCT en cas de risques graves et d'étendre les compétences d'un CHSCT à d'autres entreprises, et qui prévoit la création de représentants des salariés en matière de prévention, de santé au travail dans les entreprises de moins de cinquante salariés, elle a rappelé le rejet d'une disposition identique lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 et a remarqué que le code du travail permet à l'inspecteur du travail d'imposer la création d'un CHSCT en raison de la nature, de l'agencement ou de l'équipement des travaux, ce qui englobe les situations de risques graves. Elle a aussi estimé contestable qu'un CHSCT élu par les salariés d'une entreprise puisse être également compétent pour les salariés d'autres entreprises et a rappelé que, les missions du CHSCT étant exercées par les délégués du personnel dans les entreprises de moins de cinquante salariés, il ne paraît pas utile de créer une nouvelle catégorie de représentants.

Sur l'article 15, qui crée une infraction dans le cas où l'employeur ne répond pas au problème révélé en cas d'exercice par un salarié du droit de retrait de son poste de travail, la négociation sur les conditions de travail doit traiter de la procédure d'alerte et envisagera donc les suites apportées à une alerte transmise au chef d'entreprise.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a alors abordé le troisième thème de la proposition de loi, le régime des accidents du travail et des maladies professionnelles, notant que les chiffres d'accidents ne décroissent pas de façon suffisante et que le plan de modernisation et de développement de l'inspection du travail lancé en 2006 a permis de relancer fortement une activité de contrôle particulièrement cruciale dans ce domaine.

Elle a mentionné le phénomène de la sous-déclaration et la question de la tarification, relevant la nécessité de progresser sur la tarification dans un souci de pragmatisme identique à celui de l'accord du 12 mars 2007 sur la prévention, la tarification et la réparation des risques professionnels. Celui-ci recommande que toute proposition fasse l'objet de simulations pour veiller à sa faisabilité technique et évaluer son impact sur les cotisations.

Dans ce domaine, la proposition de loi propose deux séries de dispositions.

D'une part, les articles 1er à 8 traitent de la gouvernance et des ressources de la branche AT-MP.

Ainsi, l'article 1er inscrit dans la loi l'existence et les missions du fonds national de prévention des accidents du travail et maladies professionnelles, institue des aides à l'implantation de délégués prévention dans les entreprises de moins de cinquante salariés, triple les ressources que la CATMP verse actuellement au fonds sur le produit des cotisations AT-MP et instaure une nouvelle ressource issue des sanctions financières contre les entreprises. L'article 4 crée de son côté deux cotisation supplémentaires.

Jugeant ces propositions globalement satisfaites par le droit positif, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a estimé inutile de donner une valeur législative au fonds national de prévention des AT-MP et a demandé que l'évolution éventuelle du financement du fonds fasse l'objet d'une consultation des partenaires sociaux. Une proposition de cotisation supplémentaire a déjà été rejetée lors de l'examen du PLFSS pour 2008. Par ailleurs, les contrôleurs de sécurité ont déjà la possibilité d'imposer cette sanction en cas de risque exceptionnel ou révélé par une infraction aux règles de sécurité. En ce qui concerne le non-respect de l'obligation de déclaration d'un accident du travail, elle a indiqué que la caisse d'assurance maladie peut poursuivre l'employeur en vue du remboursement de la totalité des dépenses engagées.

Elle a aussi rappelé que la loi de financement pour 2008 a satisfait les articles 2 et 3, qui suppriment ou conditionnent les exonérations de cotisations dans le champ de la branche AT-MP et estimé satisfait lui aussi l'article 5, qui subordonne la décision d'octroi de ristournes sur les cotisations à l'avis du CHSCT, les ristournes étant déjà accordées, sur décision de la Cram, après avis du CHSCT.

Elle a ensuite jugé nécessaire de consulter les partenaires sociaux sur l'article 6, qui modifie la répartition du coût des AT-MP entre les entreprises utilisatrices et les entreprises de travail temporaire, et a estimé difficile à mettre en oeuvre la proposition, à l'article 7, visant à répartir au cas par cas le coût des AT-MP entre les entreprises sous traitantes et les entreprises utilisatrices.

Elle a enfin exprimé son opposition au dispositif de l'article 8, qui propose de porter à deux tiers la proportion des représentants des salariés dans la CATMP et contredit ainsi le principe de la gestion paritaire de la branche AT-MP.

D'autre part, un second volet de propositions figure dans les articles 37 à 45.

L'article 37 pose le principe de la réparation intégrale des AT-MP, ce qui conduirait à revenir sur le système de réparation forfaitaire. Or, les partenaires sociaux, dans leur accord du 12 mars 2007, ont proposé d'évoluer vers une réparation forfaitaire personnalisée tout en souhaitant que les mesures proposées soient inspirées par une préoccupation d'optimisation des dépenses et soient conditionnées à la capacité de financement de la branche. Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a proposé à la commission de s'inscrire dans une démarche identique. Elle s'est donc opposée aux articles 37 et 38, qui appliquent le principe de la réparation intégrale.

L'article 39, qui prévoit d'aligner le taux des rentes sur le taux d'incapacité permanente partielle (IPP), conduit, a-t-elle observé, à renoncer à un mécanisme permettant de mieux indemniser les victimes graves. En revanche, la proposition d'étendre le bénéfice de la majoration pour tierce personne, quel que soit ce taux, est intéressante et mérite une expertise afin de vérifier sa portée concrète et son coût.

L'article 40 permet, dans la logique de la réparation intégrale, le versement à la victime ou à chacun des ayants droit d'une indemnité en capital fixée en proportion de la gravité de la faute commise par l'employeur.

L'article 41, qui aligne le montant de l'indemnité journalière sur le salaire réel et non plus sur une fraction de ce salaire, serait fortement déstabilisateur de l'équilibre financier de la branche.

L'article 42, qui traite de la date d'ouverture des droits en matière de maladie professionnelle, est intéressant sous réserve d'une étude technique préalable des conséquences de l'abandon du parallélisme traditionnel entre le régime d'indemnisation des accidents du travail et celle des maladies professionnelles.

L'article 43 propose d'assouplir les conditions de reconnaissance de la maladie professionnelle pour les affections non mentionnées au tableau des maladies professionnelles, ce qui aboutirait à l'effacement du système du tableau.

A l'article 44, qui prévoit la suppression du forfait d'un euro pour les victimes d'AT-MP, Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a évoqué ses interrogations sur la possibilité d'appliquer une telle mesure à l'ensemble des bénéficiaires du régime des AT-MP.

En ce qui concerne enfin l'article 45, prévoyant la prise en charge des frais médicaux et paramédicaux des victimes d'AT-MP sur la base des frais engagés, elle a indiqué que, dans l'accord du 12 mars 2007, les partenaires sociaux n'ont proposé l'amélioration de cette prise en charge que pour certains postes tels que l'appareillage dentaire, optique ou auditif. Elle s'est ralliée à cette démarche.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a conclu sa présentation avec le dossier de l'amiante, qui continue de poser de graves problèmes d'efficacité, d'équité et de financement.

Elle a estimé intéressantes les mesures proposées dans les articles 33 à 36. Ceux-ci tendent à renforcer la protection des salariés contre les risques liés à l'amiante en permettant à l'inspecteur du travail de prescrire l'arrêt temporaire des opérations de confinement ou de retrait d'amiante dans un certain nombre de cas nouveaux ; en donnant au préfet la possibilité d'imposer à une personne ayant mis à disposition des locaux ou des installations, ou à celle qui en a l'usage, de rendre leur utilisation conforme ; en limitant le nombre d'interventions sur site avec port des équipements de protection individuelle et en restreignant chaque intervention à 2 heures 30 au maximum ; en créant dans chaque Cram un registre des salariés étant ou ayant été exposés à l'inhalation de poussière d'amiante, l'inscription à ce registre ouvrant droit à un suivi national spécifique ou à la surveillance médicale post-professionnelle.

En ce qui concerne les articles 46 à 52, relatifs au régime de cessation anticipée d'activité des salariés et anciens salariés de l'amiante, un groupe de travail entre les associations et les partenaires sociaux sera installé le 21 janvier prochain et disposera de quatre mois pour rendre des conclusions en vue du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.

L'article 46, qui propose de prendre en compte les périodes d'activité exercées dans les établissements de construction et de réparation navales du ministère de la défense pour la détermination des droits à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata), est de nature réglementaire.

En ce qui concerne l'article 47, qui propose d'étendre l'accès de cette même allocation à de nouvelles catégories de salariés et anciens salariés, il serait utile de disposer de l'expertise des partenaires sociaux.

Elle a exprimé son opposition à l'article 48, qui propose de donner un caractère indicatif à la liste des établissements ouvrant droit au fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata) et de confier la gestion de cette liste à une commission créée au sein de chaque Cram, estimant que le caractère indicatif de la liste impliquerait de demander aux victimes d'apporter la preuve de leur exposition à l'amiante et s'interrogeant sur la possibilité pour les Cram de gérer la liste à la place de la direction générale du travail.

Elle a approuvé, à l'article 49, l'institution d'une obligation de motiver la décision de refus d'inscription d'un établissement dans la liste ouvrant droit au Fcaata, disposition précédemment adoptée dans le PLFSS pour 2008, mais censurée par le Conseil constitutionnel.

A l'article 50, qui propose de déterminer le montant de l'Acaata sur la base des douze meilleurs mois de la carrière professionnelle du bénéficiaire et non plus des douze derniers mois, elle a jugé nécessaire que le coût de la mesure soit évalué.

A l'article 51, qui porte de quatre à trente ans le délai de prescription des demandes d'indemnisation adressées au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), elle a indiqué que la prescription quadriennale a soulevé pour les victimes décédées avant la création du Fiva des problèmes résolus dans le cadre juridique existant.

A l'article 52, relatif à la suppression des plafonds de la contribution des employeurs au Fcaata, elle a estimé que la mesure mettrait en danger la survie d'un certain nombre d'entreprises en situation fragile.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, a ensuite estimé que la proposition de loi, aboutissement d'un travail important, présente des pistes plausibles et mérite donc un examen détaillé, des réponses circonstanciées et des prolongements tangibles. Le Gouvernement et les partenaires sociaux élaborent actuellement des propositions sur la plupart des points abordés. A l'issue de l'examen de la proposition de loi « Santé au travail », le Sénat sera mieux armé pour étudier ces propositions. Il serait en revanche inopportun de légiférer, même partiellement, sans attendre celles-ci, pour la cohérence d'ensemble du dispositif. C'est pourquoi, tout en saluant la qualité du travail des signataires de la proposition de loi, elle a proposé à la commission de rejeter celle-ci.

Après que M. Nicolas About, président, eut salué l'ampleur du travail effectué par les signataires de la proposition de loi sur ce dossier important et sensible, M. Guy Fischer a indiqué que ce texte est l'aboutissement d'un travail de deux années, conduit par Michelle Demessine et Roland Muzeau en concertation avec l'ensemble des spécialistes concernés, en particulier des représentants des syndicats et des juristes, dans le but de marquer l'engagement du groupe communiste républicain et citoyen en faveur de la santé au travail. Le contenu de la proposition de loi issue de ces travaux est naturellement discutable en fonction des engagements des uns et des autres ; il n'en offre pas moins une base de discussion solide dans la perspective des évolutions à venir. Aussi est-il satisfaisant que la commission ait pris le temps de l'examiner de façon approfondie.

Les dispositions déjà présentées dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale traduisent la volonté du groupe communiste républicain et citoyen d'agir dans le domaine des AT-MP.

Par ailleurs, le lancement de négociations sur plusieurs volets abordés dans la proposition de loi montre l'actualité des questions abordées. En l'occurrence, le fait que 100 000 vies soient actuellement menacées par l'amiante et l'existence d'autres problèmes, tels que l'exposition aux éthers de glycol, prouvent amplement l'importance des enjeux. Le débat en séance publique sur la proposition de loi apportera ainsi des éléments susceptibles de contribuer à l'avancée de l'ensemble des dossiers.

Mme Janine Rozier a critiqué la démarche consistant à imposer sans cesse des obligations et des entraves nouvelles aux entreprises. Elle a regretté que la réglementation impose à certains salariés le port d'équipements diminuant leur mobilité. Les entreprises qui traitent l'amiante devant être agréées, elle a aussi estimé que les infractions à la réglementation relevées dans le passé ne se reproduiront vraisemblablement plus.

Mme Anne-Marie Payet a souhaité l'interdiction complète dans le code du travail, sans distinction entre les alcools forts et les autres, de la consommation d'alcool dans les entreprises.

M. Jean-Pierre Godefroy a estimé que la proposition de loi fournit d'excellentes bases sur lesquelles il est possible de s'appuyer pour faire évoluer le dossier de la santé au travail, tout en relevant la nécessité de recueillir la position des partenaires sociaux avant de légiférer. Ce texte apparaît en fait comme une « proposition d'appel » et remplit ce rôle de façon très efficace.

Les dispositions relatives à l'amiante apparaissent pertinentes et s'inscrivent dans la logique des analyses et des propositions de la mission commune d'information sur le bilan et les conséquences de la contamination par l'amiante.

Il convient par ailleurs de ne pas renoncer aux propositions qui avaient été présentées et rejetées lors de l'examen du PLFSS pour 2008.

Enfin, il est inexact, à son sens, que les salariés travaillent moins ou moins bien quand ils sont protégés contre les risques du travail, et l'alcool constitue bien un facteur très important d'accidents sur les lieux de travail, qu'il faudrait combattre.

Notant que la proposition de loi comporte des éléments utiles, M. Marc Laménie a estimé important de progresser sur le dossier de l'amiante et a approuvé l'attitude ouverte du rapporteur sur la plupart des questions abordées.

M. Jean-Claude Etienne a approuvé le volet de la proposition de loi concernant l'amiante. Confirmant à son tour l'importance de la proportion des accidents du travail imputable à la consommation d'alcool sur les lieux de travail, il a jugé nécessaire d'aborder cette question.

Il a enfin estimé que la procédure de l'aptitude au travail pose des problèmes que de nombreuses instances s'attachent à résoudre. A titre d'illustration, les procédures d'aptitude doivent tenir compte du fait que le traitement des lombalgies a profondément évolué.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur, s'est réjouie que l'ensemble des membres de la commission se rejoignent sur l'importance de réfléchir aux questions de santé au travail avec l'ambition de faire avancer des dossiers cruciaux tels que celui de la réparation de l'exposition à l'amiante.

Elle a approuvé la proposition de poursuivre la lutte contre l'alcoolémie.

Elle s'est félicitée de ce que la proposition de loi offre au Sénat l'occasion de lancer le débat sur les différents volets de la santé au travail.

Suivant les conclusions de son rapporteur, la commission a ensuite rejeté la proposition de loi.