Mardi 3 février 2009

- Présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président -

Application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution - Audition de M. Roger Karoutchi, secrétaire d'Etat chargédes relations avec le Parlement

La commission a entendu M. Roger Karoutchi, secrétaire d'Etat chargé des relations avec le Parlement, sur le projet de loi organique n° 183 (2008-2009) relatif à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

Après que M. Jean-Jacques Hyest, président et rapporteur, eut souligné que l'Assemblée nationale avait apporté plusieurs modifications au texte du Gouvernement, M. Roger Karoutchi, secrétaire d'Etat chargé des relations avec le Parlement, a souhaité que les travaux du Sénat puissent être menés dans un cadre plus serein qu'à l'Assemblée nationale.

Il a rappelé qu'une loi organique devait être impérativement adoptée afin que les assemblées puissent modifier leur règlement pour y introduire des dispositions relatives aux résolutions, à la présentation des projets de loi et à l'exercice du droit d'amendement.

S'agissant des résolutions, M. Roger Karoutchi a rappelé qu'il s'agissait d'un droit nouveau pour les parlementaires qui permettait de faire sortir cette pratique de l'opprobre dans laquelle elle se trouvait depuis 1958. Il a rappelé que l'article 34-1 de la Constitution avait mis en place un équilibre que le projet de loi organique avait pour objet de mettre en oeuvre.

Il a souligné que les résolutions ne pouvaient mettre en cause la responsabilité du Gouvernement ou contenir des injonctions à son égard et qu'elles ne pourraient être amendées, afin d'éviter qu'une proposition de résolution puisse être détournée de son objet au cours de la procédure parlementaire. Il a ajouté que les auteurs d'une proposition de résolution pourraient toutefois rectifier leur texte à tout moment et qu'une proposition de résolution ayant le même objet ne pourrait être examinée en séance lors de la même session.

Il a souligné que, lors de ses travaux, contrairement au dispositif initialement envisagé par le Gouvernement, l'Assemblée nationale avait supprimé l'examen en commission des propositions de résolution, les députés ayant considéré que faute d'amendements, un tel examen ne se justifiait pas.

Il a jugé que le dispositif retenu autoriserait l'adoption de résolutions permettant réellement aux parlementaires d'exprimer collectivement des points de vue politiques, tout en évitant les dérives antérieures à la Vème République.

M. Roger Karoutchi a indiqué que l'Assemblée nationale avait fortement complété le chapitre II du projet de loi organique, dont l'article 7 résultait des apports conjoints des membres de l'opposition et de la majorité. Il a précisé qu'il incombait au Gouvernement d'éclairer les parlementaires sur l'impact des projets de loi, cette obligation étant sanctionnée par le fait que la Conférence des présidents pourrait refuser l'inscription à l'ordre du jour d'un texte dont l'évaluation préalable serait jugée insuffisante, le Conseil constitutionnel étant compétent pour trancher le désaccord entre le Gouvernement et l'assemblée concernée.

Il a souligné la volonté de l'Assemblée nationale de définir précisément dans la loi organique le contenu des études d'impact, estimant cette préoccupation légitime, tout en relevant que l'insertion de telles précisions dans la loi organique semblait résulter d'une certaine appréhension de voir le Gouvernement s'affranchir de cette discipline nouvelle.

Il a indiqué que les députés avaient également souhaité que le Gouvernement présente les orientations principales des textes d'application envisagés au moment du dépôt d'un projet de loi, le Gouvernement n'étant pas très favorable à cette mesure mais n'ayant pas souhaité donner l'impression qu'il s'engageait « à reculons » dans ce dispositif d'évaluation préalable. Il a mis en exergue le fait que cette obligation d'information ne devrait pas conduire à l'abolition pure et simple de la distinction entre le domaine législatif et le domaine réglementaire, définie par les articles 34 et 37 de la Constitution.

Il a indiqué que le souci du détail dont ont témoigné les députés n'était pas en soi rédhibitoire et que ces mesures constituaient une vraie révolution pour les administrations et une forte contrainte pour l'exécutif, ce qui illustrait le fait que la loi organique n'avait pas pour objet de renforcer les pouvoirs du Gouvernement.

Abordant les dispositions du chapitre III du projet de loi organique, M. Roger Karoutchi, secrétaire d'Etat chargé des relations avec le Parlement, a souligné que l'article 44 de la Constitution imposait l'adoption d'une loi organique, rappelant que la commission des lois du Sénat avait, lors de la discussion de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, souhaité qu'il n'en fût pas ainsi.

Il a indiqué que, selon le Gouvernement, la loi organique devait contenir des dispositions ayant vocation à s'appliquer de la même manière dans les deux assemblées tout en donnant un certain nombre de facultés à celles-ci pour modifier leur règlement. Il a estimé que le projet de loi organique mettait en place un cadre juridique très souple en la matière.

Il a rappelé que l'article 11 du projet de loi organique fixait un délai pour le dépôt des amendements, qu'il a jugé nécessaire au bon fonctionnement de la procédure législative, relevant qu'une telle mesure était une pratique constante du Sénat.

Il a indiqué que cet article prévoyait également la présence du Gouvernement en commission à tous les stades de la procédure, ce qui ne devait pas être interprété comme une volonté expansionniste du Gouvernement mais comme la conséquence logique du fait que l'article 42 de la Constitution prévoit désormais la discussion en séance publique du texte de la commission. Il a précisé que le Gouvernement devait donc être en mesure, à tout moment, de faire valoir son point de vue et qu'il n'était aucunement question de faire pression sur les commissions mais seulement d'éclairer leurs membres sur les positions du Gouvernement par rapport aux amendements présentés et sur les conséquences de leurs décisions.

Il a estimé que le Gouvernement ne ferait pas, en pratique, un usage systématique de cette possibilité mais que celle-ci devait en tout état de cause être inscrite dans la loi organique. Il a considéré que l'absence d'une telle possibilité pourrait être jugée par le Conseil constitutionnel incompatible avec l'article 31 de la Constitution, aux termes duquel les membres du Gouvernement ont accès aux assemblées.

M. Roger Karoutchi a souligné que l'Assemblée nationale avait également souhaité que les amendements du Gouvernement puissent faire l'objet d'une étude d'impact préalable. Il a estimé que cette contrainte se justifiait lorsque des amendements présentant un contenu substantiel étaient déposés, mais que sa systématisation conduirait à rigidifier inutilement la procédure législative.

Il a indiqué que l'article 12 du projet de loi organique permettait aux assemblées de mettre en oeuvre des procédures d'examen simplifié des textes législatifs. Soulignant que ces procédures existaient d'ores et déjà mais étaient peu utilisées, il a indiqué que le Gouvernement souhaitait qu'elles puissent se développer pour désencombrer la séance publique mais qu'en tout état de cause leur mise en oeuvre nécessiterait un consensus au sein des assemblées.

Abordant la question du temps programmé pour l'examen des projets de loi, défini aux articles 13, 13 bis et 13 ter du projet de loi organique, M. Roger Karoutchi a souligné qu'une telle mesure avait été mise en oeuvre dès 1935 à l'initiative de Léon Blum et jusqu'en 1969. Il a insisté sur le fait que l'opportunité d'une telle mesure était largement partagée à l'étranger, citant l'exemple du Royaume-Uni et de l'Italie. Il a rappelé que la proposition de loi présentée par M. Jean-Pierre Bel en juillet 2007 contenait une disposition d'inspiration proche, bien qu'elle fût contrebalancée par un certain nombre de contreparties non reprises dans le projet de loi organique.

Il a précisé que cette mesure avait pour objet de mieux organiser les débats en séance publique dans la mesure où l'ordre du jour était désormais partagé, où le texte de la commission était examiné en séance et où le recours à l'article 49-3 de la Constitution était désormais limité.

Notant que le déroulement des débats au Sénat était souvent différent de celui de l'Assemblée nationale et que les travaux sur la réforme du Règlement du Sénat semblaient progresser de manière consensuelle, il a souligné que l'article 13 du projet de loi ouvrait une simple faculté mais n'imposait rien aux assemblées à qui il appartiendrait de décider de mettre en oeuvre un tel encadrement. Il a ajouté que l'enjeu essentiel était que le Parlement ne soit pas paralysé et incapable d'accomplir sa mission essentielle de législateur.

Il a estimé que le but ultime du projet de loi organique était de permettre à chaque assemblée de fonctionner au mieux, conformément à ses souhaits et à ses propres règles.

M. Jean-Jacques Hyest, président et rapporteur, a précisé que l'article 31 de la Constitution se bornait à dire que le Gouvernement était entendu à sa demande par les assemblées, ce qui n'impliquait pas sa présence lors des votes en commission.

Evoquant le droit de résolution, il a rappelé que le texte initial du projet de loi organique prévoyait l'intervention des commissions, même en l'absence de droit d'amendement. Il a jugé que si une commission souhaitait se saisir d'une résolution, il fallait le lui permettre, afin d'assurer un travail préalable à la discussion en séance publique qui pouvait utilement éclairer les débats.

Regrettant le manque de lisibilité des dispositions adoptées par l'Assemblée nationale sur les études d'impact, il a estimé essentiel que les documents d'évaluation transmis par le Gouvernement établissent clairement la nécessité et l'opportunité d'une modification de la législation en vigueur.

M. Jean-Jacques Hyest, président et rapporteur, s'est également interrogé sur l'obligation d'évaluation au regard des propositions de la commission saisie au fond. Il a estimé qu'une telle étude d'impact ne se justifiait que pour des modifications substantielles du texte présenté en séance publique.

Il a souligné que le projet de loi organique ne comportait pas de sanctions pour la présentation des projets de lois de finances et les projets de loi de financement de la sécurité sociale et a estimé que les dispositions concernant leur présentation devaient figurer dans la loi organique relative aux lois de finances et dans la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

Puis il a souligné que la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 n'impliquait pas, juridiquement, la présence du Gouvernement lors des votes en commission.

Il a précisé, en revanche, que la situation était différente s'il s'agissait de l'examen d'un texte selon la procédure législative simplifiée. Jugeant qu'une telle procédure pourrait être utilement employée dans le cas, par exemple, de la ratification d'ordonnances relatives à l'outre-mer, il a estimé qu'il était justifié que le Gouvernement soit effectivement présent lors des décisions et votes de la commission dans ce cadre procédural spécifique.

En réponse à M. Jean-Jacques Hyest, président et rapporteur, M. Roger Karoutchi, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, après avoir rappelé que la rédaction initiale du projet de loi organique prévoyait l'examen des propositions de résolution en commission, a indiqué que les députés avaient considéré que cet examen n'était pas indispensable, au motif qu'aucun amendement ne pouvait être déposé sur ces résolutions.

Il a souligné, d'une part, que les auteurs des résolutions auraient le loisir d'échanger avec leurs collègues sur leur dispositif et pourraient, le cas échéant, le rectifier et, d'autre part, que la rédaction du projet de loi organique devait autoriser la possibilité de règles différentes pour l'examen de ces résolutions à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Il a estimé que la raison d'être des études d'impact était de montrer la valeur ajoutée du projet de loi qu'elles accompagnaient.

Insistant sur la nécessité pour le Gouvernement d'informer les parlementaires sur les orientations générales des mesures réglementaires d'application d'un projet de loi lors de sa présentation, il a jugé que le principe de séparation des pouvoirs, ainsi que les modalités pratiques d'élaboration de ces mesures réglementaires, ne permettaient pas d'aller au-delà.

Notant que l'insertion, à l'article 11 bis du projet de loi organique, de la possibilité pour les règlements des assemblées de prévoir que les amendements du Gouvernement doivent faire l'objet d'une étude d'impact communiquée à l'assemblée avant leur discussion en séance, résultait d'un amendement de la commission des lois de l'Assemblée nationale, il a déclaré qu'elle était souhaitable pour éclairer les amendements complexes mais qu'elle ne devait et ne pouvait pas être généralisée.

Il a souscrit aux propos de M. Jean-Jacques Hyest, président et rapporteur, tendant à considérer que les mesures spécifiques relatives à l'évaluation préalable des dispositions non exclusives des projets de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale devaient être insérées dans la loi organique relative aux lois de finances et le code de la sécurité sociale.

Considérant que la révision constitutionnelle, en prévoyant l'examen du texte adopté par la commission en séance publique et en instituant un délai minimal de six semaines après le dépôt du texte pour son examen en séance dans la première assemblée saisie, tendait à renforcer les pouvoirs des commissions dans l'examen des textes législatifs, M. Roger Karoutchi a rappelé que cette réforme, répondant aux voeux de nombreux parlementaires, nécessitait en contrepartie de permettre au Gouvernement d'exprimer son avis tout au long de la procédure d'examen des textes en commission.

Il a affirmé que cette possibilité de participer aux débats des commissions ne remettrait pas en cause la sérénité des travaux de ces dernières et que, en pratique, le Gouvernement n'userait pas systématiquement de cette faculté.

M. Jean-Jacques Hyest, président et rapporteur, a précisé que, dans la nouvelle procédure d'examen des textes législatifs, le Gouvernement pourrait avoir connaissance assez tôt des amendements déposés et du texte adopté par la commission pour être en mesure de donner son avis en temps utile, par exemple lors d'une nouvelle audition par la commission et que cette expression légitime de son point de vue ne nécessitait pas qu'il assiste aux délibérations.

M. Bernard Frimat a indiqué que la rédaction de l'article 7 relatif aux études d'impact était touffue et peu compréhensible.

Il a estimé que le projet de loi organique devait fixer les grands principes de la procédure et laisser la plus grande souplesse possible aux règlements des assemblées,

Concernant la présence du Gouvernement en commission, il a souligné que si le texte examiné en séance intégrait les modifications adoptées par la commission, la loi ne serait votée que lors de la séance publique, qui constitue le lieu du débat démocratique.

Il a relevé que la réforme en cours ne devait pas avoir pour objectif et pour effet de vider la séance publique de tout intérêt, en faisant des débats en séance publique une simple réplique des débats en commission.

Rappelant que l'article 18 du Règlement du Sénat prévoyait que les ministres ont accès aux commissions, qu'ils doivent être entendus quand ils le demandent et qu'ils se retirent au moment du vote, il a jugé que cette disposition demeurerait compatible avec l'article 31 de la Constitution, dont la rédaction n'avait pas été modifiée lors de la dernière révision constitutionnelle.

Il a déclaré qu'il n'était pas concevable d'autoriser la présence permanente du Gouvernement en commission.

Après avoir manifesté la solidarité du groupe socialiste du Sénat avec la position des députés socialistes défendant la suppression de l'article 13 du projet de loi organique, M. Bernard Frimat a estimé que ce dernier posait la question de la conciliation entre l'attribution d'un « crédit temps » à chaque groupe de l'assemblée pour l'examen des textes en séance publique et le respect du droit constitutionnel reconnu à chaque parlementaire de présenter et de défendre ses amendements.

Il a considéré que cet article manifestait une volonté de diminuer la durée des débats parlementaires et de limiter le temps de parole des députés et des sénateurs.

Mme Catherine Tasca, soulignant l'ambiguïté de la position du Gouvernement tendant à affirmer, d'une part, que le rôle des commissions devait être valorisé et, d'autre part, que le Gouvernement devait assister en permanence à leurs travaux, a considéré que cette ambiguïté pouvait résulter d'une forme de suspicion à l'égard des travaux parlementaires.

Elle a affirmé qu'il convenait de distinguer, dans les travaux de la commission, le temps du débat au cours duquel le Gouvernement devait pouvoir justifier son point de vue, et le temps de la délibération et du vote, au cours duquel le Gouvernement ne devait pas être présent.

Elle a insisté sur la nécessité de laisser les parlementaires assumer leurs responsabilités au moment du vote en commission en dehors de toute influence extérieure, le Gouvernement pouvant ensuite défendre son point de vue en séance publique.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a constaté que la procédure des résolutions avait pour principal objet, dans l'esprit du Gouvernement, de « purger » les textes de loi de mesures non normatives. Elle a déploré la possibilité donnée au Premier ministre de déclarer les propositions de résolutions irrecevables, ainsi que la suppression en première lecture, par l'Assemblée nationale, de leur examen par les commissions.

Rejetant toute comparaison avec les résolutions des IIIème et IVème Républiques intervenant dans un autre contexte institutionnel, elle a défendu le droit des parlementaires de déposer et de défendre des résolutions.

Constatant que le dispositif de l'article 7, relatif aux études d'impact, tel que modifié par l'Assemblée nationale, instituait une « usine à gaz », elle a souhaité que le Sénat propose une nouvelle rédaction, plus concise, précisant que ces études doivent présenter l'apport d'un projet de loi au regard du droit en vigueur.

Notant que l'article 11, en prévoyant la présence du Gouvernement en commission lors de l'examen et du vote des amendements par cette dernière, confortait la nature présidentialiste de nos institutions, elle a souligné que cette présence en commission permettrait au Gouvernement de faire pression sur sa majorité parlementaire, afin que cette dernière suive ses avis.

Dénonçant le dispositif de l'article 13 du projet de loi organique, elle a considéré qu'il n'était pas induit par la dernière révision constitutionnelle et qu'il avait pour objet la limitation du droit d'amendement des parlementaires.

Elle a relevé que le groupe de travail sur la modification du Règlement du Sénat n'avait pas souhaité mettre en oeuvre la possibilité prévue par l'article 13 d'établir une procédure permettant de mettre aux voix des amendements sans discussion, à l'issue d'un temps global fixé pour un débat législatif en séance publique.

Elle a indiqué que la coexistence de procédures distinctes, tendant, à l'Assemblée nationale, à limiter le droit d'amendement, et, au Sénat, à permettre une discussion sans contrainte d'un texte de loi, ne lui semblait pas concevable et qu'une telle différence de pratique entre les deux chambres pourrait déplacer les comportements d'obstruction parlementaire, de l'Assemblée nationale vers la Haute assemblée.

M. Hugues Portelli a déclaré que le législateur devait toujours éviter de ne penser qu'à la situation présente en élaborant la loi et qu'il devait légiférer pour l'avenir.

Notant que le texte voté par les députés était conforme à la logique majoritaire existant à l'Assemblée nationale, il a souligné que plusieurs modifications apportées au projet de loi organique n'étaient pas pertinentes pour le Sénat, où aucun groupe politique ne dispose de la majorité absolue et dont la majorité pourrait changer dans les prochaines années.

Il a estimé que si le Gouvernement devait être en mesure d'exprimer son point de vue à tous les stades de la procédure législative, il n'avait pas à intervenir dans les délibérations de la commission sur un texte.

Il a considéré que l'article 13, prévoyant la possibilité pour les règlements des assemblées de déterminer les conditions dans lesquelles les amendements parlementaires peuvent être mis aux voix sans discussion lorsque le règlement permettait la définition d'un temps global pour l'examen d'un texte en séance, semblait contradictoire avec les articles 13 bis et 13 ter, garantissant le droit d'expression des groupes parlementaires et le droit à une explication de vote personnelle pour chaque député ou sénateur.

Rappelant que certaines dispositions de la révision constitutionnelle étaient d'application directe à compter du 1er mars 2009, à l'exemple de l'examen du texte élaboré par la commission en séance publique, et que d'autres nécessitaient l'adoption de lois organiques, M. Jean-René Lecerf s'est interrogé sur la procédure d'examen des projets de loi applicable à des textes tels que le projet de loi pénitentiaire, pour lesquels le rapport avait déjà été examiné en commission, mais qui devaient être discutés en séance publique après le 1er mars.

Prenant l'exemple d'une étude d'impact qui aurait accompagné le dépôt du projet de loi organique, ou d'un projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés, M. Jean-Pierre Sueur a réfuté la possibilité pour le Gouvernement de présenter des études d'impact objectives sur les textes qu'il soumet au Parlement et a considéré qu'il revenait plutôt à chaque parlementaire de s'exprimer librement sur les projets de loi et d'en mesurer l'impact.

Il a déploré le manque de clarté et la complexité de la rédaction de l'article 7 adoptée par l'Assemblée nationale. Estimant que les articles 13 bis et 13 ter n'étaient pas compatibles avec l'article 13, il a déclaré que le dispositif organisé par ce dernier était inspiré par une crainte du débat parlementaire.

Il a jugé paradoxal qu'un projet de loi organique permette de fixer des règles déterminant un délai à partir duquel les textes législatifs ne pourraient plus être discutés en séance publique.

Mme Alima Boumediene-Thiery a jugé contraire à la séparation des pouvoirs la présence du gouvernement au moment du vote de la commission. Elle s'est par ailleurs étonnée que le projet de loi organique ne prévoie pas l'obligation pour le Premier ministre de motiver la décision d'irrecevabilité d'une résolution. Elle a enfin estimé nécessaire de compléter l'article 10 du projet de loi organique afin que le dépôt des projets de loi d'autorisation de ratification ou d'approbation d'engagements internationaux soit accompagné de documents précisant les réserves ou déclarations interprétatives exprimées par la France.

M. Robert Badinter a déclaré que le ministre, simple « invité » de la commission et du Parlement, devait se retirer au moment du vote et que, dans le cas contraire, sa présence devait être comprise comme la volonté de s'assurer de la fidélité des membres de sa majorité.

M. Michel Mercier s'est interrogé, d'une part, sur le sens à donner à la formule « sans discussion » figurant à l'article 13 du projet de loi organique (« Les règlements des assemblées peuvent, s'ils instituent une procédure impartissant des délais pour l'examen d'un texte en séance, déterminer les conditions dans lesquelles les amendements déposés par les membres du Parlement peuvent être mis aux voix sans discussion. »), d'autre part, sur la portée de l'article 13 bis du projet de loi organique qui garantit le droit d'expression de tous les groupes parlementaires dans le cadre des dispositions relatives à la programmation de la durée des débats.

M. Roger Karoutchi a reconnu la complexité de la rédaction, fruit d'un compromis, proposée à l'article 7 du projet de loi organique relatif aux études d'impact. Il a souhaité que ces études visent essentiellement à mettre en valeur l'intérêt du projet de loi au regard de la législation en vigueur.

Estimant que la présence du gouvernement en commission, y compris au moment du vote, était la conséquence de l'engagement du débat en séance sur le texte élaboré par la commission et donc de la revalorisation de cette dernière, il a plaidé pour que le gouvernement puisse exprimer sa position sur chaque amendement avant le vote de la commission, par parallélisme avec la séance publique.

Il s'est félicité de la précision apportée par les députés selon laquelle les propositions de résolution sont examinées et votées en séance, craignant, dans l'hypothèse d'un renvoi en commission, une « asphyxie » de cette dernière.

Il a déclaré, à l'attention de Mme Borvo Cohen-Seat et de MM. Bernard Frimat et Jean-Pierre Sueur, que le gouvernement n'avait pas pour objectif de dévaloriser le travail en séance en renforçant la place des commissions. Il a précisé que la révision constitutionnelle avait précisé que le texte examiné en séance serait celui adopté par la commission, mais ne remettait pas pour autant en cause l'exercice du droit d'amendement en séance publique.

Sur la procédure du « crédit-temps » prévue à l'article 13 du projet de loi organique, il a souligné que l'objectif était de mieux organiser les débats, non de réduire le temps d'examen du texte en séance. Le temps fixé par la Conférence des présidents de l'assemblée qui organiserait un tel dispositif serait donc adapté à la nature des textes et pourrait être plus important pour les projets de loi d'intérêt majeur. Sur l'article 13 bis, il a expliqué qu'il visait à donner aux groupes d'opposition et minoritaires un temps de parole forfaitaire, supérieur à ce qui résulterait d'une répartition proportionnelle à leur importance numérique. Quant à l'article 13 ter, il vise à reconnaître un droit d'expression aux parlementaires n'appartenant à aucun groupe et à ceux qui souhaitent s'affranchir de la position de la majorité de leur groupe. L'Assemblée nationale a souhaité ajouter ces garanties en attendant les conclusions de son groupe de travail.

M. Roger Karoutchi a par ailleurs annoncé l'envoi prochain au Conseil d'Etat de trois projets de loi organique complétant la mise en oeuvre de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 : sur le Conseil économique, social et environnemental, sur l'exception d'inconstitutionnalité et sur la réforme du Conseil supérieur de la Magistrature.

En réponse à M. Jean-René Lecerf, M. Roger Karoutchi, secrétaire d'Etat chargé des relations avec le Parlement, citant une lettre adressée par le Premier ministre aux présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, a confirmé l'entrée en vigueur de l'article 42 de la Constitution le 1er mars 2009, tout en considérant que les commissions devraient statuer formellement après cette date et que le Gouvernement devrait être mis en situation de venir s'expliquer devant elles, faculté dont il n'userait pas forcément.

Enfin, il s'est déclaré ouvert à la proposition, présentée par Mme Boumediene-Thiery, de prévoir des études d'impact plus complètes pour les projets de loi autorisant la ratification ou l'approbation d'un traité ou d'un accord international mais a estimé qu'il serait difficile au Gouvernement de motiver l'irrecevabilité des résolutions si elles devaient être déposées par milliers.

M. Jean-Jacques Hyest, président et rapporteur, a souhaité que le contenu des lois organiques soit limité à la stricte application de la Constitution et a constaté qu'en application de l'article 31 de la Constitution et du Règlement du Sénat le ministre était en situation d'être entendu par la Commission.

Mercredi 4 février 2009

- Présidence de MM. Patrice Gélard, vice-président, et Jean-Jacques Hyest, président -

Application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution - Examen du rapport

La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Jacques Hyest sur le projet de loi organique n° 183 (2008-2009) relatif à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, a d'abord indiqué que le chapitre premier du projet de loi organique fixait les conditions dans lesquelles les assemblées pouvaient voter des résolutions conformément au nouvel article 34-1 de la Constitution. Il a noté que, dans sa version initiale, le texte proposé par le Gouvernement prévoyait le renvoi de la proposition de résolution à l'une des commissions permanentes ou spéciales mentionnées à l'article 43 de la Constitution, parallèlement à sa transmission sans délai au Premier ministre. Il a ajouté qu'il appartenait au Premier ministre de faire savoir au président de l'assemblée concernée que la proposition de résolution était irrecevable lorsqu'elle contenait une injonction au Gouvernement ou que son adoption ou son rejet mettait en cause la responsabilité de celui-ci. Par ailleurs, a-t-il poursuivi, une proposition de résolution ne pourrait être inscrite à l'ordre du jour avant l'expiration d'un délai de douze mois suivant la discussion en séance d'une proposition antérieure présentant le même objet. Il a relevé qu'aucun amendement ne serait recevable, le texte mis aux voix étant celui de la proposition initiale, éventuellement rectifiée par l'auteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, a relevé que l'Assemblée nationale avait modifié ce dispositif en supprimant l'examen préalable de la proposition de résolution en commission rendu inutile selon les députés par l'impossibilité de présenter des amendements. En outre, elle a prévu que l'interdiction de l'inscription à l'ordre du jour d'une proposition de résolution valait pour une proposition ayant non seulement le même objet mais aussi le même objectif qu'une proposition de résolution antérieure. En outre, a-t-il poursuivi, si l'Assemblée nationale a considéré que le Gouvernement ne pouvait plus opposer l'irrecevabilité une fois la proposition de résolution inscrite à l'ordre du jour, elle lui a donné la faculté de s'opposer à toute rectification dès lors que celle-ci rendrait une proposition de résolution irrecevable.

Selon M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, il importait, sans revenir à un examen systématique des propositions de résolution par les commissions, de conférer au règlement de chaque assemblée la possibilité de laisser à une commission permanente compétente l'initiative de se saisir d'une proposition de résolution si elle le souhaitait. Rappelant par ailleurs l'analyse développée par le professeur Guy Carcassonne lors de son audition par la commission, il a jugé souhaitable de confier la responsabilité de prononcer l'irrecevabilité non au Premier ministre mais au Gouvernement.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, a rappelé que l'article 39, troisième alinéa de la Constitution, dans sa rédaction issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, prévoyait que la présentation des projets de loi déposés devant l'Assemblée nationale ou le Sénat devait répondre aux conditions fixées par une loi organique. Précisant que la Conférence des présidents de la première assemblée saisie pourrait refuser l'inscription à l'ordre du jour d'un projet de loi dont l'étude d'impact paraîtrait insuffisante, il a souligné qu'en cas de contestation sur cette appréciation, le président de l'assemblée intéressée ou le premier ministre, pourrait saisir le Conseil constitutionnel, qui devrait alors statuer dans les huit jours. Il a relevé que le contenu des études d'impact défini par l'article 7 du projet de loi organique, devait éviter d'entrer dans des détails inutiles, afin de ne pas aboutir à une possibilité de contrôle excessif de ces documents par le Conseil constitutionnel.

Observant que les tentatives visant à rendre obligatoires, dans les années 1995 à 2003, les études d'impact préalables à l'élaboration d'une nouvelle législation, n'avaient guère été concluantes en France, il a estimé que la perspective de la sanction que pourrait représenter le refus par la première assemblée saisie d'inscrire à l'ordre du jour un projet de loi dont l'étude d'impact serait insuffisante devrait conduire le Gouvernement à remplir de façon satisfaisante la nouvelle obligation d'évaluation.

Considérant que les études d'impact accompagnant le dépôt des projets des lois devaient garantir une meilleure préparation de la législation, il a expliqué que leur contenu ne devait pas viser une impossible exhaustivité, mais comporter des éléments permettant de vérifier la nécessité de présenter un projet de loi et d'en assurer la cohérence avec le droit européen et l'ordre juridique interne. Il a estimé que la rédaction de l'article 7 adoptée par l'Assemblée nationale pouvait être simplifiée et précisée, en prévoyant que l'étude d'impact présente les raisons pour lesquelles le Gouvernement a finalement retenu, parmi plusieurs options possibles, le recours à la législation. Il s'est prononcé pour la suppression de la référence à certaines catégories comme les petites et moyennes entreprises, afin de privilégier des catégories plus globales, telles que les personnes morales.

Indiquant que les députés avaient souhaité mentionner dans les études d'impact des données précises sur les textes d'application, M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, a jugé que cette préoccupation légitime ne devait toutefois pas conduire à empiéter sur le domaine réglementaire et que le contenu de ces textes serait largement déterminé par celui de la loi adoptée par le Parlement. Il a relevé que la référence au calendrier d'évaluation de la législation devrait également être supprimée, cette évaluation incombant au Parlement, qui ne saurait suivre, pour la réaliser, un programme défini par le Gouvernement.

Abordant le troisième chapitre du projet de loi organique consacré à l'exercice du droit d'amendement, M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, a d'abord souligné la nécessité de dynamiser la séance publique. Il a rappelé que l'une des principales innovations introduites par la révision de juillet 2008 était la règle, désormais posée à l'article 42 de la Constitution, selon laquelle la discussion des projets de loi porterait en séance à compter du 1er mars 2009 sur le texte adopté par la commission et non plus sur celui présenté par le Gouvernement, à l'exception des projets de révision constitutionnelle, des projets de loi de finances et des projets de loi de financement de la sécurité sociale. Il a estimé que ce dispositif permettrait de renforcer la spécificité et la complémentarité de chacune des deux grandes étapes de la procédure législative, d'une part l'examen en commission, d'autre part la discussion en séance publique qui constitue par excellence le lieu public du débat démocratique. Il a noté que la publicité des débats en séance plénière garantie par l'article 33 de la Constitution était l'une des traductions constitutionnelles de la prééminence qui lui était reconnue en vertu de la tradition historique française.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, a rappelé que le chapitre 3 du projet de loi organique comportait trois volets consacrés d'une part à des dispositions générales relatives à l'exercice du droit d'amendement, d'autre part à l'organisation d'une procédure d'examen simplifiée d'un texte et enfin à la détermination de délais pour l'examen d'un texte en commission. Il a souligné que la loi organique n'instituait ni les procédures simplifiées ni l'organisation d'un « crédit temps » mais laissait au règlement de chaque assemblée le soin de déterminer, si elle le souhaitait, la mise en place de tels dispositifs. Revenant sur le premier de ces volets, il a jugé que la disposition permettant aux membres du Gouvernement de participer à l'ensemble des délibérations de la commission marquerait une rupture injustifiée non seulement par rapport au droit actuel -puisque le Règlement du Sénat précise que les ministres se retirent au moment du vote- mais surtout à une pratique parlementaire constante sous la Vème République ainsi que sous les Républiques antérieures selon laquelle, si le Gouvernement a accès aux commissions pour être entendu, il ne participe jamais aux délibérations de la commission.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, a estimé que la rédaction de l'article 12 du projet de loi organique consacré aux procédures d'examen simplifié était équilibrée puisqu'elle combinait l'efficacité (mise aux voix en séance du seul texte élaboré par la commission) et le respect des droits de l'opposition (avec le droit pour tout président de groupe de s'opposer à la mise en oeuvre de ce dispositif). Enfin, il a rappelé que la détermination, rendue possible par l'article 13, de délais pour l'examen d'un texte en séance publique avait soulevé de très vives contestations de la part des groupes de l'opposition à l'Assemblée nationale. Il a noté que ces mécanismes n'auraient pas lieu de s'appliquer au Sénat qui ne connaissait pas les mêmes situations de blocage. Il a estimé néanmoins que si le Sénat pouvait organiser de manière consensuelle la discussion en séance, il ne lui appartenait pas de priver l'Assemblée nationale de la possibilité de recourir à la détermination de délais préfix. Il a donc appelé la commission à voter sans modification les trois articles concernés.

M. Bernard Frimat a dénoncé un projet de loi organique, non seulement inutilement bavard et complexe, mais de plus fondé sur une démarche consistant à poser des principes tout en déclarant qu'ils ne seraient pas utilisés en pratique. Il a cité, d'une part, la disposition, figurant à l'article 11 du projet de loi organique, prévoyant la présence du Gouvernement en commission dont le ministre affirme que celui-ci ne l'utilisera pas systématiquement, d'autre part, les articles 13, 13 bis et 13 ter relatifs à la détermination de délais pour l'examen d'un texte en séance dont le rapporteur indique qu'il ne trouverait sans doute pas à s'appliquer au Sénat. Jugeant l'ouverture de ces possibilités contraire en elle-même à l'objectif, officiellement poursuivi par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, de revaloriser le rôle du Parlement, il en a demandé la suppression.

Il a marqué son opposition à la réduction des possibilités d'expression des parlementaires par la mise en place du verrouillage du temps de débat. Il a craint que les études d'impact réduisent le rôle législatif du Parlement à une mission de contrôle des textes écrits par le Gouvernement.

Il a déclaré que la séance plénière doit rester le lieu public du débat, celui où la loi se fabrique devant l'opinion. A ses yeux, le texte proposé par la commission reste le projet de loi du Gouvernement, amendé par celle-ci pour en extraire les scories et libérer le débat de fond en séance publique.

Il s'est déclaré ouvert sur le vote de résolutions, susceptible d'éviter l'adoption de lois mémorielles dépourvues de toute portée normative, dont il n'y a pas de raison d'imaginer qu'elles soient déposées par milliers.

Sur les études d'impact, prévues à l'article 7 du projet de loi organique, il a estimé qu'elles pourraient éclairer sur la plus-value attendue de la nouvelle législation qui serait à contrôler lors de son application. Il s'est toutefois étonné de la complexité de la rédaction adoptée par les députés à l'article 7, l'estimant de nature à ralentir tout Gouvernement dans ses initiatives législatives.

Il a conclu en considérant comme amendables les chapitres premier et II et en réitérant le désaccord de son groupe sur la présence du Gouvernement en commission et les articles 13 à 13 ter. Il a appelé à ce que le législateur organique n'établisse que des principes généraux sans empiéter sur les règlements et sans se fier aux dénégations d'aujourd'hui qui n'engagent pas pour l'étendue de son application demain.

Mme Borvo Cohen-Seat a souligné :

- que les dispositions de la loi organique confirmaient l'objectif principal de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, à savoir accentuer la présidentialisation du régime ;

- que les résolutions visaient à éviter le vote de lois non normatives, et non à mettre en cause la responsabilité du Gouvernement ;

- que la procédure du « crédit-temps » constituait une atteinte au droit d'amendement ; à cet égard, elle s'est étonnée que d'aucuns estiment que cette procédure ne devrait pas trouver d'application au Sénat.

M. Hugues Portelli a déclaré que le chapitre III du projet de loi organique sur le droit d'amendement aurait davantage sa place dans le règlement de l'Assemblée nationale, compte tenu de la logique majoritaire propre à cette assemblée.

Après avoir salué la revalorisation du rôle du Parlement opérée par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, M. Pierre Fauchon a :

- approuvé la proposition du rapporteur tendant à permettre le renvoi en commission des propositions de résolution, peu convaincu du risque d'engorgement évoqué par certains ;

- jugé légitime la possibilité offerte au Gouvernement d'être entendu en commission quand il le demande, mais inopportun qu'il puisse maintenir sa présence au moment du vote s'agissant des réunions des commissions qui se distinguent de la séance publique ;

- estimé trop longue l'énumération de l'article 7 sur les documents composant l'étude d'impact des projets de loi ;

- jugé prioritaire de réfléchir à des solutions consensuelles propres à revaloriser, aux yeux des sénateurs comme du grand public, les débats parlementaires en séance ;

- mis en avant la légitimité de prévoir des modes de fonctionnement différents entre les deux assemblées, eu égard à leurs spécificités.

M. Jean-Pierre Michel a déduit de l'article 28 de la Constitution en vertu duquel « les semaines de séance sont fixées par chaque assemblée » qu'aucune autre modulation dans le mode de fonctionnement des deux assemblées n'était constitutionnellement autorisée et qu'en particulier, ces dernières ne pouvaient prévoir des procédures législatives et des règles d'expression différentes, ajoutant d'ailleurs que, contrairement à une idée répandue, les oppositions politiques n'étaient pas moins marquées au Sénat qu'à l'Assemblée nationale. A cet égard, il a regretté la participation du groupe socialiste au groupe de travail sur la réforme du règlement du Sénat alors même que la loi organique était en cours d'examen par le Parlement.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, est convenu avec M. Bernard Frimat, d'une part, que l'engagement du débat en séance sur le texte élaboré par la commission permettrait de gagner du temps en évitant de présenter des amendements d'amélioration rédactionnelle, d'autre part, que la présence du Gouvernement au moment du vote de la commission n'était nullement induite par cette évolution procédurale. Sur les résolutions, il a estimé que la régulation s'effectuerait au stade de l'inscription à l'ordre du jour. Sur l'organisation des débats, il a évoqué les exemples d'autres parlements européens et constaté qu'il existait déjà des modalités d'exercice du droit d'amendement et du temps de parole.

En réponse à M. Hugues Portelli qui s'étonnait que le Gouvernement soumette au Parlement un projet de loi organique destiné à mettre en oeuvre la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 alors que la révision antérieure du 23 février 2007 sur le statut pénal du Chef de l'Etat attendait toujours une loi organique d'application, M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, a indiqué que, selon les indications données par le Gouvernement lors de la discussion budgétaire en 2008, un projet de loi organique devrait être déposé pour fixer les conditions d'application du nouvel article 67 de la Constitution.

Puis la commission a examiné les amendements du rapporteur.

Elle a tout d'abord adopté un amendement améliorant la rédaction de l'intitulé du chapitre premier.

A l'article premier (dépôt des propositions de résolution), elle a adopté un amendement de simplification rédactionnelle.

A l'article 2 (transmission de la proposition de résolution au Premier ministre), elle a adopté un amendement tendant à permettre à la commission permanente compétente de se saisir, si elle le souhaite, d'une proposition de résolution.

Notant que de nombreuses dispositions du projet de loi organique renvoyaient aux règlements des assemblées, M. Yves Détraigne s'est demandé si, a contrario, il serait possible de modifier les règlements des assemblées en l'absence de disposition dans la loi organique.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, a répondu que le projet de loi organique ne portait que sur la mise en oeuvre des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution et que les règlements des assemblées traitaient de nombreux autres sujets.

A l'article 3 (modalités d'application de l'irrecevabilité des propositions de résolution), la commission a adopté un amendement tendant à confier au Gouvernement, et non au Premier ministre, la responsabilité de déclarer l'irrecevabilité des propositions de résolution afin de respecter les termes de l'article 34-1 de la Constitution.

A l'article 4 (conditions d'inscription à l'ordre du jour), la commission a adopté un amendement rédactionnel considérant que les termes « objet » et « objectif » étaient redondants.

M. Bernard Frimat a souligné que le terme « objectif » pouvait avoir un sens différent du terme « objet », prenant l'exemple d'une résolution dont l'objet serait la peine de mort et dont l'objectif pourrait être de l'abolir ou de la maintenir.

A l'article 5 (rectification des propositions de résolution), outre un amendement rédactionnel, elle a adopté un amendement tendant à permettre la rectification de la proposition de résolution à compter de son dépôt.

Elle a également adopté un amendement tendant à supprimer une précision inutile prévoyant que les propositions de résolution doivent être adoptées à la majorité absolue des suffrages exprimés.

Elle a adopté un amendement améliorant la rédaction de l'intitulé du chapitre II.

A l'article 7 (évaluation préalable au dépôt des projets de loi), le rapporteur a présenté un amendement tendant à préciser et clarifier la rédaction adoptée par les députés, en indiquant que l'étude d'impact devait indiquer les motifs du recours à une nouvelle législation.

MM. Jean-Pierre Sueur et Pierre-Yves Collombat ont regretté que le rapporteur n'ait pas proposé une rédaction plus succincte, qui aurait pu le cas échéant être ensuite étoffée dans un souci de compromis avec l'Assemblée nationale. Ils ont jugé irréaliste d'imposer au Gouvernement la présentation d'une telle masse de documents et considéré qu'il revenait plutôt à chaque parlementaire de s'exprimer librement sur les projets de loi et d'en mesurer l'impact.

M. Pierre Fauchon a indiqué qu'il s'abstiendrait sur le vote de cet amendement.

M. Richard Yung a souligné la nécessité de mentionner, dans l'étude d'impact, comme le prévoyait l'amendement, la liste prévisionnelle des textes d'application nécessaires, leurs orientations principales et le délai prévisionnel de leur publication.

Mme Borvo Cohen-Seat, considérant que la réalisation d'études d'impact très détaillées paraissait illusoire, a néanmoins jugé utile de prévoir, d'une part, l'articulation du projet de loi avec le droit européen en vigueur ou en cours d'élaboration, et son impact sur l'ordre juridique interne, d'autre part, l'état d'application du droit sur le territoire national dans le ou les domaines visés par le projet de loi.

M. Christian Cointat s'est demandé s'il n'était pas possible de simplifier davantage la rédaction proposée par le rapporteur. Il a également regretté l'absence, à l'alinéa relatif à l'application outre-mer du projet de loi visé par l'étude d'impact, de référence à Clipperton, pourtant expressément cité à l'article 72-3 de la Constitution depuis la révision du 23 juillet 2008.

M. Bernard Frimat a relevé que la rédaction de l'article adopté par l'Assemblée nationale avait bénéficié des apports de plusieurs groupes, intégrés par la commission des lois, dans un objectif de conciliation avant d'aborder des dispositions du projet de loi organique qui suscitaient une vive opposition.

Après que M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, eut précisé que la rédaction proposée par l'amendement avait été guidée par un souci de compromis avec les députés, la commission l'a adopté.

A l'article 8 (délai d'examen des études d'impact par la Conférence des présidents), la commission a adopté un amendement visant à permettre au Parlement d'examiner véritablement les études d'impact accompagnant les projets de loi, lorsque ces textes sont déposés en dehors des périodes de session.

A l'article 9 (examen des conditions de présentation des projets de loi par le Conseil constitutionnel), la commission a adopté un amendement tendant à assurer l'information des présidents des deux assemblées lorsque le Conseil constitutionnel est saisi, en application de l'article 39 de la Constitution, pour trancher un désaccord sur l'appréciation du contenu de l'étude d'impact jointe à un projet de loi.

A l'article 10 (catégories de projets de loi échappant à l'obligation d'évaluation préalable ou soumis à des obligations de présentation spécifiques), la commission a adopté un amendement tendant à sortir du régime défini en application de l'article 39 de la Constitution l'évaluation préalable des dispositions non exclusives des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale.

Elle a également adopté trois amendements ayant pour objet de :

- préciser et compléter les conditions d'évaluation préalable des dispositions par lesquelles le Gouvernement demande une habilitation à prendre des ordonnances ;

- préciser et compléter le dispositif d'évaluation des dispositions tendant à ratifier des ordonnances ;

- compléter les documents qui devraient accompagner, lors de leur dépôt devant la première assemblée saisie, les projets de loi autorisant la ratification ou l'approbation des traités ou accords internationaux.

La commission a ensuite adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 10 afin d'assurer au Parlement le même degré d'information sur les dispositions non exclusives des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale, que ces dispositions figurent dans un texte financier ou dans un projet de loi ordinaire.

Elle a adopté un amendement améliorant la rédaction de l'intitulé du chapitre III.

A l'article 11 (conditions de présentation et délais de recevabilité des amendements - présence du Gouvernement au sein des commissions), la commission a adopté trois amendements tendant à :

- renvoyer aux règlements des assemblées la définition des conditions dans lesquelles les délais de dépôt des amendements peuvent être ouverts de nouveau pour les membres du Parlement ;

- préciser que les règlements déterminent les modalités selon lesquelles les ministres sont entendus, à leur demande, à l'occasion de l'examen d'un texte en commission, afin de reprendre une formulation directement inspirée de l'article 31 de la Constitution ;

- renvoyer aux règlements des assemblées la détermination des délais applicables au dépôt des amendements examinés lors de la réunion de la commission consacrée à l'élaboration du texte de cette dernière.

A l'article 11 bis (évaluation préalable des amendements du Gouvernement), la commission a adopté un amendement tendant à rapprocher la rédaction de l'article 11 bis de celle de l'article 11 ter, afin d'harmoniser le régime d'évaluation applicable aux amendements du Gouvernement et de la commission.

A l'article 11 ter (évaluation préalable des amendements des membres du Parlement), la commission a adopté un amendement supprimant une mention inutile.

A l'article 14 (entrée en vigueur), la commission a adopté un amendement tendant à supprimer la référence au 1er mars 2009 comme date d'entrée en vigueur des dispositions des chapitres Ier et II, l'adoption définitive de la loi organique devant intervenir après cette date.

Tout en reconnaissant certaines améliorations, M. Bernard Frimat a fait part de l'opposition du groupe socialiste au projet de loi organique ainsi amendé, principalement en raison du refus de la commission de supprimer son article 13, refus qu'il a analysé comme guidé par le souhait de ne pas rouvrir le débat sur ce point lors de la prochaine lecture à l'Assemblée nationale.

Sous le bénéfice de ces amendements, la commission a adopté le projet de loi organique relatif à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

Loi pénitentiaire - Nouvel examen du rapport

- Présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président -

Puis la commission a procédé au nouvel examen du projet de loi pénitentiaire n° 495 (2007-2008).

M. Jean-Jacques Hyest, président, a rappelé que la commission avait décidé de procéder à un nouvel examen du projet de loi sur le rapport de M. Jean-René Lecerf, en prévision de son inscription en séance publique après le 1er mars 2009. Puisque le Sénat délibérera sur la base du texte établi par la commission, celle-ci a souhaité ouvrir à ses membres la possibilité de voir examiner leurs amendements afin qu'ils soient intégrés, le cas échéant, au texte de la commission résultant de l'adoption de son rapport le 17 décembre 2008.

A l'article premier A (finalité de la peine de privation de liberté), Mme Eliane Assassi a présenté un amendement tendant à réécrire la disposition proposée.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a estimé préférable la formulation initiale qui combine les dispositions existantes de l'article 132-24 du code pénal relatives à l'individualisation de la peine avec la règle pénitentiaire européenne n° 102-1, qui prévoit que le régime des détenus condamnés doit être conçu « pour leur permettre de mener une vie responsable et exempte de crimes ».

La commission n'a pas adopté l'amendement.

A l'article premier (missions du service public pénitentiaire), Mme Eliane Assassi a présenté un amendement tendant à une nouvelle rédaction de cet article.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a observé que l'amendement ne mentionnait ni la prévention de la délinquance, ni le respect des droits des victimes -notion qu'il a jugée plus large que la seule référence à l'indemnisation- contrairement à la formulation retenue par la commission en décembre.

M. Hugues Portelli a présenté un amendement afin de compléter l'article en précisant que le service public pénitentiaire garantit à tout détenu le respect des droits fondamentaux inhérents à la personne.

La commission a rejeté l'amendement de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et adopté l'amendement de M. Hugues Portelli.

A l'article 2 (organisation du service public pénitentiaire), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement visant à interdire la possibilité de déléguer certaines fonctions liées au service public pénitentiaire à des personnes de droit privé.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a observé qu'une telle disposition ne permettrait plus la mise en oeuvre d'une gestion mixte des établissements publicitaires.

La commission a rejeté l'amendement.

A l'article 2 quinquies (participation des collectivités territoriales et des associations aux instances d'évaluation et de suivi en matière pénitentiaire), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement tendant à supprimer cet article. Elle a craint que cette disposition n'entraine une forme de compétition entre les établissements pénitentiaires et influe sur les transferts de prisonniers, considérés comme susceptibles de récidiver, dans le seul objectif de faire baisser ce taux.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a considéré que le risque évoqué était limité et qu'il importait au contraire de bénéficier de statistiques par établissement pour mieux apprécier l'impact des conditions de détention sur le risque de récidive, afin de mesurer l'intérêt de certains types de structures comme le centre pénitentiaire de Casabianda, qui demeure aujourd'hui méconnu. M. Pierre-Yves Collombat a estimé intéressant d'établir une évaluation des établissements pénitentiaires à la condition toutefois qu'elle soit conduite de manière objective, ce qui, en l'espèce, paraissait douteux. Le rapporteur a précisé que ce travail serait confié à l'Observatoire de la délinquance, qui ne dépendait pas de l'administration pénitentiaire. M. Alain Anziani a jugé que l'administration pénitentiaire ne se souciait pas suffisamment de la réinsertion et qu'une évaluation statistique par établissement pénitentiaire serait une incitation très positive pour s'engager dans cette voie.

La commission a rejeté l'amendement.

A l'article 4 bis (personnels de surveillance), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement ayant pour objet, d'une part, de supprimer la mention selon laquelle les personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire participent à l'individualisation de la peine ainsi qu'à la réinsertion des détenus « dans le cadre de leur mission de sécurité », d'autre part, d'ajouter qu'ils veillent au respect de l'intégrité physique des détenus. Elle a estimé que l'individualisation de la peine et la réinsertion des détenus ne s'inscrivaient pas dans les missions de sécurité de ces agents.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a jugé intéressant de prévoir que les personnels de surveillance veillent au respect de l'intégrité physique des détenus. Il s'est en revanche opposé à la suppression de la précision selon laquelle les personnels de surveillance participent à l'individualisation de la peine ainsi qu'à la réinsertion des personnes privées de liberté dans le cadre de leur mission de sécurité. Il convient en effet, a-t-il indiqué, de prévenir toute confusion entre les missions des personnels de surveillance et celles des conseillers d'insertion et de probation : la participation à l'individualisation de la peine et à la réinsertion des détenus constitue la mission première des conseillers d'insertion et de probation, tandis que la sécurité demeure la mission première des personnels de surveillance. Aussi a-t-il proposé de rectifier l'amendement pour prévoir que : « dans le cadre de leur mission de sécurité, ils [les personnels de surveillance] veillent au respect de l'intégrité physique des personnes privées de liberté et participent à l'individualisation de leur peine ainsi qu'à leur réinsertion. »

La commission a adopté l'amendement ainsi rectifié.

Aux articles 6, 7, 8 et 9 (création d'une réserve civile pénitentiaire), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté des amendements de suppression. Elle a marqué, à l'instar de Mmes Eliane Assassi et Josiane Mathon-Poinat, son opposition à la création d'une réserve civile pénitentiaire.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a rappelé que, le 17 décembre 2008, la commission avait non seulement approuvé la création d'une réserve civile pénitentiaire mais étendu le champ de ses missions -renforcement de la sécurité dans les établissements et bâtiments relevant du ministère de la justice et coopération internationale- au contrôle de l'exécution des mesures de surveillance électronique des personnes placées sous main de justice.

La commission n'a pas adopté ces amendements.

A l'article 10 (encadrement des restrictions dont les droits des détenus peuvent faire l'objet), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement visant à réécrire cet article afin, en particulier, d'obliger l'administration pénitentiaire à ne faire aucune discrimination entre les personnes détenues.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a observé que le second alinéa proposé par l'amendement pour cet article, comme toute énumération, présentait des lacunes -ne mentionnant pas, par exemple, la nationalité des détenus. Il a jugé plus sage de s'en tenir à la rédaction initialement proposée par la commission. M. Alain Anziani a estimé au contraire qu'il était nécessaire d'encadrer de manière précise la faculté d'appréciation de l'administration pénitentiaire. M. Jean-Jacques Hyest, président, a relevé que les précisions proposées par l'amendement n'étaient pas indispensables dès lors que la première phrase de l'article 10 fixait à l'administration pénitentiaire l'obligation de garantir, à toute personne détenue, le respect de ses droits.

La commission a rejeté l'amendement.

A l'article 10 bis (information du détenu sur ses droits et devoirs), M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a présenté un amendement tendant à supprimer la précision selon laquelle l'information du détenu sur ses conditions de détention doit être effectuée « dans une langue qu'il comprend ». Il a indiqué que, selon la commission des finances, si cette précision était maintenue, l'ensemble du dispositif adopté en décembre dernier à cet article serait considéré comme irrecevable au regard de l'article 40 de la Constitution. Afin de maintenir le droit à l'information du détenu, le rapporteur a proposé de tenir compte de ces indications, étant entendu que le droit reconnu par la loi ne serait effectif que si la personne était en mesure de comprendre les informations qui lui étaient communiquées.

MM. Alain Anziani, Richard Tuheiava, Christian Cointat et Jean-Pierre Sueur ont contesté que l'article 40 puisse être appliqué à une telle disposition. M. François Zocchetto a souhaité savoir quel était le nombre de détenus concernés par une information en langue étrangère.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a précisé que près de 15 % des détenus étaient d'origine étrangère et donc susceptibles de bénéficier de cette disposition. Il a ajouté qu'il serait envisageable de préparer des documents traduits dans plusieurs langues et diffusés au sein des établissements pénitentiaires. M. Jean-Jacques Hyest, président, a rappelé que l'examen des amendements en commission, dans le cadre de la nouvelle procédure mise en place, ne devait pas être l'occasion de rouvrir de nouveau le débat sur l'article 40.

La commission a adopté l'amendement.

A l'article 13 (aide en nature pour les détenus les plus démunis), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement tendant à octroyer une aide financière de l'État aux détenus dont les ressources sont inférieures à un montant indexé sur les minima sociaux et fixé par voie réglementaire.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a fait part de l'avis d'irrecevabilité au titre de l'article 40 de la Constitution, communiqué par le président de la commission des finances.

A l'article 14 (acte d'engagement - insertion par l'activité économique), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a proposé un amendement tendant à instaurer un contrat de travail pour les personnes détenues.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a observé que la commission avait déjà, en décembre, amélioré la rédaction du projet de loi en prévoyant la signature de l'acte d'engagement entre le chef d'établissement et la personne détenue. Selon le rapporteur, l'amendement proposé tendait à rapprocher très fortement du droit commun du travail le cadre juridique applicable aux personnes détenues (par exemple en prévoyant le versement d'une indemnité en cas de perte d'emploi) au risque de décourager l'offre de travail, déjà insuffisante, en prison. M. Hugues Portelli a évoqué la convention que la commune dont il est maire a signée avec l'administration pénitentiaire pour offrir du travail dans le cadre de contrats à durée déterminée pour des détenus bénéficiant du régime de semi-liberté.

La commission a rejeté l'amendement.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement tendant à insérer un article additionnel avant l'article 15 afin d'affirmer le droit de la personne détenue au maintien des liens familiaux.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a souhaité que la commission retienne de préférence l'amendement présenté par le même auteur à l'article 15 bis, lequel reprend ce droit de manière plus concrète.

La commission a rejeté l'amendement.

A l'article 15 (droit des détenus au maintien des relations avec leur famille), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement tendant à proposer une nouvelle rédaction de cet article.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a relevé que cet amendement prévoyait que le refus de délivrer un permis de visite ne pouvait être justifié que par une mesure d'urgence, ce qui semblait excessif. En outre, il a noté que l'intervention du juge des libertés et de la détention ne s'articulait pas avec la compétence habituellement reconnue dans ce domaine au juge de l'application des peines.

La commission a rejeté l'amendement.

A l'article 15 bis (unité de vie familiale et parloirs familiaux), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement posant le droit pour tout détenu de bénéficier d'un parloir hebdomadaire.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a suggéré de rectifier cet amendement en retenant la rédaction suivante « tout détenu doit bénéficier d'au moins un parloir hebdomadaire dont la durée doit être fixée en tenant compte de l'éloignement de la famille. Pour les prévenus, ce droit s'exerce sous réserve de l'accord de l'autorité judiciaire compétente ».

La commission a adopté l'amendement ainsi rectifié.

A l'article 19 bis (obligation de garantir la sécurité de la personne détenue), M. Jacques Mézard a présenté un amendement tendant à réparer le dommage résultant du décès ou des séquelles corporelles ayant entraîné une incapacité permanente partielle provoqué, au sein d'un établissement pénitentiaire, par l'agression d'une personne détenue.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a fait part de l'avis d'irrecevabilité au titre de l'article 40 de la Constitution, communiqué par le président de la commission des finances.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement tendant à insérer un article additionnel avant l'article 20 afin de confier à l'administration pénitentiaire la responsabilité de protéger la santé de tous les détenus dont elle a la garde.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a observé que cette responsabilité incombait au premier chef au service public hospitalier.

La commission a rejeté l'amendement.

A l'article 20 (prise en charge des soins par le service public hospitalier - restriction des informations susceptibles d'être communiquées aux proches), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement tendant à fixer à l'administration pénitentiaire plusieurs obligations relatives à la prise en charge sanitaire des personnes détenues.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a observé que cet amendement pourrait être retenu sous réserve de ne pas donner le sentiment que la responsabilité de la prise en charge sanitaire des détenus relève en priorité de l'administration pénitentiaire. Il a suggéré plusieurs rectifications afin de présenter certaines des dispositions proposées non comme des obligations pesant sur la seule administration pénitentiaire mais comme des droits reconnus aux détenus et qui, de manière implicite, doivent être garantis par l'administration pénitentiaire et les personnels dépendant du ministère de la santé.

La commission a adopté l'amendement ainsi modifié.

A l'article 24 (fouilles), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement tendant à encadrer très strictement les fouilles.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a rappelé les avancées apportées par la commission en décembre sur cet article en relevant cependant qu'il était excessif de proscrire complètement les fouilles intégrales comme le proposait l'amendement.

La commission a rejeté l'amendement.

A l'article 32 (affirmation du caractère subsidiaire de l'emprisonnement ferme et de la nécessité de prévoir son aménagement), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement rédactionnel que la commission a adopté.

A l'article 34 A (extension de l'amplitude horaire du travail d'intérêt général), Mme Josiane Mathon-Poinat a présenté un amendement de suppression. Elle a jugé irréalisable l'extension de la durée du travail d'intérêt général à 400 heures et a fait valoir que les juges de l'application des peines et les conseillers d'insertion et de probation y étaient opposés, en raison des difficultés rencontrées pour faire exécuter des travaux d'intérêt général au-delà de 120 ou 140 heures.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a rappelé que l'article 34 A, inséré par la commission le 17 décembre 2008, donnait une traduction législative à une préconisation du Comité d'orientation restreint de la loi pénitentiaire destinée à développer le travail d'intérêt général, en prévoyant que sa durée peut être comprise entre 20 et 400 heures, contre une amplitude actuelle de 40 à 210 heures.

Citant le rapport du Comité d'orientation restreint de la loi pénitentiaire, il a indiqué que la fixation à 40 heures de la durée minimum du travail d'intérêt général paraissait parfois inadaptée, notamment au regard de la durée légale hebdomadaire du travail et que la possibilité de prononcer des peines de travail d'intérêt général à partir d'un seuil de 20 heures permettrait de sanctionner de petits délits (infractions les moins graves au code de la route par exemple) commis par des prévenus désargentés et éviterait le recours à l'emprisonnement avec sursis souvent dépourvu de signification. Il a ajouté qu'à l'inverse, le maximum de 210 heures apparaissait restrictif dans quelques cas, certes limités, pour des prévenus qui pourraient, à l'occasion d'un travail d'intérêt général, être insérés dans une formation qualifiante.

En conséquence, il a jugé qu'il serait intéressant d'abaisser à 20 heures le plancher de la durée du travail d'intérêt général et qu'il serait dommage de se priver de la possibilité de dépasser le plafond actuel de 210 heures dans les rares cas où cela s'avérerait utile.

La commission n'a pas adopté l'amendement.

A l'article 35 (sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement de précision, que la commission a adopté.

A l'article 44 (suspension et fractionnement des peines en cours d'exécution), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement ayant pour objet de supprimer la possibilité, introduite par la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, de soumettre à diverses obligations et interdictions le condamné qui bénéficie d'une suspension de peine pour motif d'ordre médical, familial, professionnel ou social.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a estimé au contraire pleinement justifié le maintien de cette possibilité. Il a rappelé que les obligations susceptibles d'être imposées au condamné pouvaient par exemple consister à prévenir le travailleur social d'un changement de résidence ou d'un déplacement dont la durée excéderait quinze jours, à suivre un traitement médical, ou encore à réparer en tout ou partie, en fonction de ses facultés contributives, les dommages causés par l'infraction. Quant aux interdictions, il a observé qu'elles pouvaient consister à s'abstenir de paraître en certains lieux ou d'entrer en relation avec certaines personnes, notamment la victime de l'infraction.

La commission n'a pas adopté l'amendement.

De même, elle n'a pas adopté l'amendement, présenté par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, tendant à supprimer les possibilités données au juge par la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales, d'une part, de refuser l'octroi d'une suspension de peine pour motif médical grave en cas de risque grave de renouvellement de l'infraction, d'autre part, de soumettre le condamné auquel il accorde une telle mesure à diverses obligations et interdictions.

A l'article 47 (octroi de la libération conditionnelle), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement ayant pour objet de permettre la libération conditionnelle sans condition de délai des personnes condamnées incarcérés de plus de 65 ans.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a rappelé que la commission avait déjà décidé de permettre la libération conditionnelle sans condition de délai des personnes condamnées incarcérés de plus de 70 ans, et pas seulement de celles de plus de 75 ans, tout en subordonnant l'octroi de cette mesure à l'absence de risque grave de renouvellement de l'infraction.

Abaisser encore ce seuil, en le fixant à 65 ans, serait peut-être excessif, a-t-il estimé. Il a en effet expliqué, à la demande de Mme Alima Boumediene-Thiery, que l'inégalité de traitement entre les condamnés qui resteraient contraints d'exécuter un temps d'épreuve pour pouvoir bénéficier d'une libération conditionnelle et ceux qui en seraient dispensés ne pouvait se justifier, au regard des exigences constitutionnelles, que par une différence objective de situation : plus on baisse le seuil, moins cette différence paraît justifiée.

La commission n'a pas adopté l'amendement.

A l'article 48 (procédures simplifiées d'aménagement des peines), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement ayant pour objet de maintenir la procédure actuelle d'aménagement des peines des condamnés à de courtes peines non encore incarcérés, tout en étendant son champ aux condamnations inférieures ou égales à deux ans d'emprisonnement ainsi qu'à la révocation d'un sursis, simple, avec mise à l'épreuve ou assorti d'un travail d'intérêt général. Elle a estimé que la procédure actuelle avait permis de développer les aménagements de peine et qu'il importait de maintenir un équilibre entre le rôle du juge de l'application des peines et celui du service d'insertion et de probation en prévoyant que le condamné doit d'abord être reçu par le magistrat.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a indiqué que les amendements adoptés par la commission le 17 décembre 2008 assouplissaient, précisaient et facilitaient la mise en oeuvre des règles du code de procédure pénale permettant aux personnes condamnées à une courte peine privative de liberté mais n'ayant pas été immédiatement incarcérées à la suite de l'audience -ce qui est en principe la règle- de bénéficier d'un aménagement de leur peine avant même sa mise à exécution et d'éviter ainsi d'être écrouées. Il a estimé que l'amendement remettait en cause ces avancées, notamment la possibilité -et non l'obligation- pour le service pénitentiaire d'insertion et de probation de recevoir la personne condamnée avant le juge de l'application des peines si celui-ci est débordé, afin d'examiner sa situation et le cas échéant d'étudier avec lui les mesures d'aménagement susceptibles d'être proposées au magistrat.

La commission n'a pas adopté l'amendement.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a ensuite présenté un amendement ayant pour objet de supprimer le placement sous surveillance électronique automatique en fin de peine.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a indiqué que les amendements adoptés par la commission le 17 décembre 2008 garantissaient que la nouvelle procédure de placement sous surveillance électronique des condamnés dont la durée de détention restant à subir est inférieure ou égale à quatre mois ne constituerait pas une « grâce électronique » mais au contraire un moyen de développer les aménagements de peines adaptés à la situation et à la personnalité des intéressés.

La commission n'a pas adopté l'amendement.

A l'article 49 A (règlement cadre commun à chaque catégorie d'établissement pénitentiaire), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement tendant à compléter les dispositions de cet article en prévoyant l'abrogation de l'article 728 du code de procédure pénale.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a estimé que cet amendement visait le même objectif que son propre amendement destiné à insérer un article additionnel après l'article 56. Il a rappelé que l'article 728 du code de procédure pénale prévoyait qu'« un décret détermine l'organisation et le régime intérieur des établissements pénitentiaires ». Il a noté que, selon l'étude d'impact fournie par le gouvernement, cette « disposition législative, antérieure à 1958, reconnait au pouvoir réglementaire la faculté de restreindre les libertés des détenus, ce qui relève du pouvoir législatif en droit commun ». Il a ajouté que le projet de loi pénitentiaire permettait au législateur d'assumer pleinement sa compétence dans les domaines qui touchaient à l'exercice des libertés. Il a proposé de retenir l'amendement présenté par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat en suggérant cependant que la référence aux règlements intérieurs type constitue la nouvelle rédaction de l'article 728 du code de procédure pénale qui serait ainsi libellé : « Des règlements intérieurs type prévus par décrets en Conseil d'État déterminent les dispositions prises pour le fonctionnement de chacune des catégories d'établissements pénitentiaires ». Il a retiré en conséquence son propre amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 56.

La commission a adopté l'amendement de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat ainsi modifié.

A l'article 49 (possibilité d'un encellulement individuel ou collectif pour les prévenus), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement supprimant la possibilité de déroger à l'encellulement individuel pour les prévenus dans le cas où leur personnalité justifie dans leur intérêt qu'ils ne soient pas laissés seuls.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a rappelé que la commission avait déjà permis en décembre dernier une avancée significative en supprimant la disposition du projet de loi initial qui autorisait un placement en cellule collective au même titre qu'en cellule individuelle. Il a jugé que la rédaction alors adoptée était équilibrée en permettant, conformément au droit en vigueur, un certain nombre de dérogations au principe de l'encellulement individuel.

La commission a rejeté l'amendement.

A l'article 50 (assouplissement des conditions de maintien d'un condamné en maison d'arrêt), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement tendant à supprimer cet article.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a observé que le maintien des personnes condamnées en maison d'arrêt se justifiait au regard du maintien des liens familiaux ou de la préparation d'un aménagement de peine. Il a rappelé en outre que la commission avait déjà modifié en décembre dernier le dispositif proposé par le gouvernement afin de reconnaitre le droit à toute personne condamnée à une peine supérieure à deux ans de bénéficier, à sa demande, d'un transfèrement en établissement pour peine dans un délai maximum de neuf mois à compter du jour où sa condamnation est devenue définitive.

La commission a rejeté l'amendement.

A l'article 52 (assouplissement du principe de l'encellulement individuel pour les condamnés), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement tendant à supprimer la possibilité de déroger au principe de l'encellulement individuel pour les personnes condamnées lorsque leur personnalité justifie que, dans leur intérêt, elles ne soient pas laissées seules.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a observé que la commission avait déjà supprimé la possibilité de déroger au principe de l'encellulement individuel au titre de « l'encombrement temporaire des locaux » et qu'il convenait d'en rester à l'équilibre ainsi établi.

La commission a rejeté l'amendement.

A l'article 53 (régime disciplinaire), Mme Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement tendant à ramener la durée du placement en cellule disciplinaire à quatorze jours et, en cas de violence physique contre les personnes, à vingt jours.

M. Jean-René Lecerf a souligné que la commission, à l'issue d'un débat approfondi, avait déjà ramené la durée maximale de placement en cellule disciplinaire de quarante à trente jours en cas de violence contre les personnes et qu'il n'était sans doute pas souhaitable de remettre en cause la formule de compromis alors élaborée.

La commission a rejeté l'amendement.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a également présenté un amendement afin de garantir au détenu placé en cellule disciplinaire le droit à un parloir hebdomadaire.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a jugé opportun, en effet, de relever au niveau de la loi une disposition actuellement prévue par l'article D.251-3 du code de procédure pénale.

La commission a adopté l'amendement, sous réserve d'une rectification.

A l'article 53 bis (isolement administratif), M. Hugues Portelli a présenté un amendement afin de donner à un détenu placé à l'isolement la faculté de saisir le juge des référés sur la base de l'article 521-2 du code de justice administrative, le placement à l'isolement constituant une situation d'urgence susceptible de porter une atteinte grave à ses droits fondamentaux.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, s'est interrogé sur la portée effective de cette disposition.

La commission a adopté l'amendement.

A l'article 55 (exécution par provision de la peine de jours-amende et des mesures d'aménagement de peine - coordinations - décisions à juge unique - substitution d'une peine de jours-amende au travail d'intérêt général), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement de coordination, que la commission n'a pas adopté.

Avant l'article 58, M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a présenté un amendement tendant à insérer un article additionnel.

Il a rappelé que, le 17 décembre 2008, la commission avait adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 48 afin de faire obligation à l'État, aux communes de 10 000 habitants et plus, aux établissements publics de coopération intercommunale de 10 000 habitants et plus, aux départements, aux régions ainsi qu'aux personnes morales de droit privé chargées d'une mission de service public de proposer des travaux d'intérêt général destinés aux personnes condamnées.

Il a indiqué que la commission des finances avait jugé ces dispositions irrecevables au regard des règles de recevabilité financière de l'article 40 de la Constitution, au motif qu'elles induisaient des contraintes d'organisation pour les personnes publiques concernées.

Il a exposé que l'amendement tirait les conséquences de cette décision en prévoyant que les actions de prévention de la délinquance conduites par les personnes publiques et privées précitées ne seront éligibles au fonds interministériel de prévention de la délinquance créé par la loi du 5 mars 2007 que si elles proposent par ailleurs des travaux d'intérêt général destinés aux personnes condamnées.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a salué la cohérence des dispositions proposées.

La commission a adopté l'amendement.

A l'article 59 (moratoire de cinq ans pour l'application des dispositions relatives à l'encellulement individuel des détenus), Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a présenté un amendement supprimant cet article.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a adopté le texte du projet de loi pénitentiaire ainsi rédigé.

Restrictions à l'accès de travailleurs étrangers à certaines professions libérales ou privées - Examen du rapport

- Présidence de M. Patrice Gélard, vice-président -

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport de M. Charles Gautier sur la proposition de loi n° 176 (2008-2009), présentée par Mme Bariza Khiari et plusieurs de ses collègues, visant à supprimer les conditions de nationalité qui restreignent l'accès des travailleurs étrangers à l'exercice de certaines professions libérales ou privées.

M. Charles Gautier, rapporteur, a indiqué qu'il existait de nombreuses professions dont l'accès était difficile ou impossible aux étrangers. Ainsi, selon plusieurs rapports, près de sept millions d'emplois seraient interdits partiellement ou totalement aux étrangers, la plupart se trouvant dans la fonction publique. Concernant le secteur privé, il a estimé à une cinquantaine le nombre de professions plus ou moins fermées aux étrangers.

Il a distingué deux types de restrictions, celles liées au diplôme et celles liées à la nationalité, en précisant que la proposition de loi ne visait que les secondes.

Il a expliqué que les restrictions reposant sur la nationalité étaient apparues à partir de la fin du XIXème siècle et particulièrement au cours de l'entre-deux-guerres dans un contexte de crise économique et de tensions internationales.

M. Charles Gautier, rapporteur, a estimé que la pertinence de la condition de nationalité devait être réexaminée, d'autant plus que dans les faits, ces règles sont souvent contournées, la nécessité faisant loi.

S'agissant de la proposition de loi, il a expliqué qu'elle poursuivait deux objectifs selon ses auteurs : lutter contre les discriminations et simplifier des procédures administratives en supprimant la condition de nationalité.

Toutefois, il a jugé que le champ de la proposition de loi restait modeste, seules dix professions fermées, en totalité ou partiellement, aux étrangers non communautaires étant concernées. Il a précisé que, parmi ces dix professions, neuf étaient des professions ordinales -médecin, chirurgien-dentiste, sage-femme, pharmacien, vétérinaire, avocat, architecte, géomètre expert et expert-comptable-. La fonction publique n'est en revanche pas concernée par le présent texte.

Malgré des délais très courts, M. Charles Gautier, rapporteur, a indiqué avoir entendu des représentants de l'ensemble de ces professions -à l'exception de l'ordre des pharmaciens qui a remis des observations écrites- de manière à examiner si des motifs légitimes pouvaient encore justifier le maintien d'une condition de nationalité.

Il a ensuite présenté chacun des articles ainsi que les modifications proposées.

Il a proposé de supprimer les dispositions relatives à la profession d'avocat (article 3) et à celle de guide-interprète (article 7), les premières ne tenant pas compte de la forte concurrence internationale à laquelle sont soumis les avocats, les secondes étant sans objet.

En revanche, sous réserve de diverses coordinations, il a proposé d'approuver la suppression de la condition de nationalité pour les autres professions concernées de manière à ce que des ressortissants non communautaires titulaires de diplômes français ou communautaires soient traités de la même façon que des ressortissants communautaires.

- Présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président -

M. Jean-Jacques Hyest, président, a rappelé que l'inscription de la proposition de loi à l'ordre du jour de la séance mensuelle réservée du 11 février 2009 n'avait pas été évoquée avant la Conférence des présidents du 21 janvier 2009, la proposition de loi ayant été déposée le jour même. Il a espéré que, à l'avenir, l'ordre du jour réservé bénéficie d'une meilleure prévisibilité.

Mme Alima Boumediene-Thiery a demandé si les professionnels de santé entendus avaient distingué entre médecins libéraux et hospitaliers ou entre médecins généralistes et spécialistes.

M. Charles Gautier, rapporteur, a répondu que, à aucun moment, ces différences n'avaient été évoquées.

M. Christian Cointat s'est déclaré partagé sur la proposition de loi. D'un côté, l'ouverture de ces professions aux étrangers est un facteur d'attractivité pour les diplômes français. De l'autre, il y a le risque de se priver d'un argument de négociation pour inciter de nombreux Etats à ouvrir ces mêmes professions aux ressortissants français titulaires d'un diplôme français. Il a cité l'exemple des négociations en cours avec le Québec pour une ouverture de l'ensemble de ces professions.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a précisé que la proposition de loi ne visait qu'à reconnaître à un étranger titulaire d'un diplôme français le droit d'exercer en France, au même titre qu'un Français, ce qui était différent du cas évoqué par M. Christian Cointat. Il a indiqué que le problème de l'équivalence des diplômes était un sujet distinct.

M. Richard Yung s'est déclaré favorable à la proposition de loi, même si elle ne résolvait pas le problème des médecins étrangers diplômés en dehors de l'Union européenne qui assument des responsabilités importantes dans les hôpitaux français tout en étant beaucoup moins bien rémunérés que leurs homologues français.

Il a également estimé que la réciprocité n'était pas un argument fort pour encourager des Etats à s'ouvrir aux Français.

M. François Zocchetto a également déclaré approuver les conclusions du rapport. Il a notamment jugé nécessaire de maintenir une condition de réciprocité pour la profession d'avocats compte tenu de la concurrence dans ce secteur et des tensions très fortes avec certains Etats comme les Etats-Unis d'Amérique et la Chine. A cet égard, il a regretté que le Gouvernement ne soutienne pas plus les professions désireuses de conclure des accords de réciprocité.

Mme Catherine Troendle a observé que de nombreux pays étaient confrontés à l'émigration de leurs diplômés et a craint que la suppression de la condition de nationalité n'accentue encore ce phénomène.

M. Charles Gautier, rapporteur, a expliqué que la proposition de loi ne modifiait aucunement les règles relatives à l'entrée et au séjour des étrangers et que par conséquent la suppression de la condition de nationalité n'aurait pas d'incidence directe sur la fuite des talents de certains pays moins développés.

La commission a adopté le texte proposé par le rapporteur.