Jeudi 3 octobre 2013

- Présidence de Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente -

Avenir et justice du système de retraites - Nomination d'un rapporteur

La délégation procède à la nomination d'un rapporteur sur les dispositions du projet de loi n° 1376 (XIVème législature) (procédure accélérée) garantissant l'avenir et la justice du système de retraites (sous réserve de son adoption par l'Assemblée nationale et de sa transmission au Sénat), dont la délégation a été saisie par la commission des Affaires sociales.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente. - Je suis heureuse de reprendre avec vous aujourd'hui les travaux de la délégation pour la session 2013-2014 qui vient de commencer.

Pour nous, la rentrée est déjà loin puisque nous avons été sollicités dès le mois de septembre, pendant la session extraordinaire, avec l'examen en séance publique du projet de loi sur l'égalité entre hommes et femmes. Le travail que nous avons effectué sur ce projet de loi a été un temps fort de la précédente session, et nous lui avons consacré un rapport ambitieux.

Je suis fière que la délégation ait, en séance publique, obtenu l'adoption de dix amendements !

J'ai le plaisir d'accueillir ce matin Mme Corinne Bouchoux, qui fait désormais partie de la délégation, ce dont je me réjouis tout particulièrement : je souhaite la bienvenue à notre nouvelle collègue en notre nom à tous.

J'aimerais que la réunion d'aujourd'hui nous permette d'avoir un échange sur l'organisation de nos travaux au cours de cette année un peu spéciale, puisqu'elle sera marquée par une interruption de plusieurs semaines liée aux élections, puis par la préparation du renouvellement de septembre 2014.

Je propose que nous parlions d'ores et déjà de certaines orientations de nos travaux à venir, au cours d'un échange de vues qui pourrait avoir lieu à l'issue de la seconde audition.

Nous sommes donc réunis ce matin pour commencer nos travaux sur le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système des retraites, dont la commission des affaires sociales nous a officiellement saisis.

L'Assemblée nationale devrait procéder au vote solennel sur ce texte le 15 octobre 2013. Chez nous, l'examen en séance publique est prévu à partir du 28 octobre 2013 jusqu'au 6 novembre 2013.

La commission des affaires sociales examinera ce projet de loi le mercredi 23 octobre 2013. Ceci nous oblige à conduire nos travaux très rapidement, et je vous propose de prévoir l'examen du rapport de la délégation le mardi 22 octobre 2013, à 15 h 30.

Nous allons donc, aujourd'hui et jeudi prochain, consacrer deux séries d'auditions à ce sujet.

Il nous faut préalablement désigner notre rapporteur(e) sur ce projet de loi.

J'ai reçu la candidature de Mme Laurence Rossignol.

Y a-t-il d'autres candidatures ?

Je propose donc de confier à notre collègue Laurence Rossignol la responsabilité d'être notre rapporteure sur ce projet de loi : il s'agit d'une lourde charge car vous connaissez tous la particulière complexité de la problématique des retraites féminines.

La délégation a désigné Mme Laurence Rossignol rapporteure sur les dispositions du projet de loi n° 1376 (XIVème législature) (procédure accélérée) garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

Avenir et justice du système de retraites - Audition de l'Union nationale des associations familiales (UNAF)

La délégation auditionne tout d'abord M. François Fondard, président de l'Union nationale des associations familiales (UNAF) et Mme Guillemette Leneveu, directrice générale, accompagnés de Mme Claire Ménard, chargée des relations avec le Parlement.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente. - Nous débutons nos travaux sur le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraite par l'audition des représentants de l'Union nationale des associations familiales (UNAF) : M. François Fondard, son président, Mme Guillemette Leneveu, sa directrice générale, accompagnés de Mme Claire Ménard, chargée des relations avec le Parlement.

L'UNAF avait été auditionnée dans le cadre des réflexions préalables au projet de loi menées notamment par la commission présidée par Mme Yannick Moreau qui a rendu son rapport le 12 juin 2013.

Je vous précise que notre collègue Laurence Rossignol sera la rapporteure de la délégation et que nous sommes aujourd'hui particulièrement intéressés de savoir comment l'UNAF évalue les réponses apportées par ce texte à la problématique spécifique de la retraites des femmes.

M. François Fondard, président de l'Union nationale des associations familiales. - La question des droits des femmes revêt une importance particulière au regard du rôle qu'elles jouent dans la famille et qui, de temps partiels en interruptions de carrière, aboutit à d'énormes différences de pensions : elles perçoivent 950 euros de pension en moyenne contre 1 450 pour les hommes. Le temps partiel ne se limite pas à l'âge de la maternité ; la question est plus globale et les dispositifs relatifs à la retraite ne suffiront pas à combler les écarts creusés pendant la vie professionnelle. Il faut agir en amont en faveur d'une meilleure intégration de la vie professionnelle et de la vie familiale ; ce sera d'ailleurs le thème d'un colloque que nous organisons au Conseil économique, social et environnemental (CESE) le 21 novembre 2013 et auquel nous vous convions.

Quelques chiffres relatifs aux mesures actuelles : l'assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) coûte 4,5 milliards d'euros, les majorations de pensions 3,75 milliards et les majorations de durée d'assurance (MDA) s'élèvent à 4 milliards, tandis que les majorations de pensions des régimes Agirc et Arrco représentent 1,5 milliard. Quant aux majorations dans la fonction publique, elles coûtent 610 millions pour les agents territoriaux et 1,2 milliard pour les personnels de l'État. Conformément aux prévisions du Haut conseil de la famille, les deux premières dépenses représentent donc 8 milliards d'euros, à la charge de la branche famille.

La réforme des droits familiaux est légitime car ces droits ont vieilli quand bien même les objectifs qui les fondent demeurent d'actualité.

S'agissant tout d'abord des pensions de réversion, le gouvernement n'a pas souhaité engager de réforme dans ce domaine et nous donnons, pour notre part, la priorité au rapprochement entre les régimes.

Pour ce qui est de l'AVPF et des MDA, force est de constater que si la retraite des mères de famille est aujourd'hui particulièrement faible du fait de cotisations inférieures. Une correction de cette situation est attendue à l'échéance de 2020 : à cette période, elles devraient toutes pouvoir bénéficier d'une retraite à taux plein. Leur période de cotisation validée sera même supérieure à celle des hommes du fait précisément de l'AVPF et de la MDA. L'hypothèse d'une fusion de la MDA et de l'AVPF envisagée par le rapport Moreau mérite examen, même s'il faut être très prudent quant à ses modalités. Il faut regarder les choses au cas par cas car ces deux dispositifs ne se cumulent pas toujours : leur fusion pourrait avoir pour conséquence, lors de la liquidation des droits, des carrières non complètes pour certaines mères de famille.

Je terminerai par les majorations de pensions évoquées par l'article 13 du projet de loi. Conscients de la nécessaire réforme des majorations, nous avions proposé leur fiscalisation dans le cadre du débat sur les économies de la branche famille - ces mesures ont été annoncées par le Premier ministre le 3 juin 2013. La majoration est bien prévue par le projet de loi de finances mais nous regrettons qu'elle ne bénéficie pas précisément à la branche famille.

Dans la mesure où les majorations de pensions profitent davantage aux hommes - aussi bien dans le cadre du régime général que dans celui des régimes complémentaires - nous sommes favorables à sa forfaitisation. Nous sommes toutefois opposés à son extension aux familles d'un ou de deux enfants envisagée par l'article 13 du projet de loi. Il convient en effet de reconnaître l'investissement réalisé par les familles de trois enfants et plus, dont on sait que le niveau de vie moyen est de plus de 25 % inférieur à celui des familles de deux enfants.

Mme Laurence Rossignol, rapporteure. - Qu'entendez-vous par niveau de vie ? Cette différence se poursuit-elle au moment de la retraite, une fois que les enfants ne sont plus à charge ?

M. François Fondard. - C'est difficile à évaluer.

Mme Laurence Rossignol, rapporteure. - Le niveau de vie de ces familles reste-t-il inférieur au moment de la retraite ?

M. François Fondard. - Il est certain qu'à niveau de revenu égal, une famille de trois enfants dispose de moins de patrimoine, notamment immobilier, qu'une famille de deux enfants. C'est vrai en particulier depuis la disparition des aides à la pierre, il y a une vingtaine d'années.

Du fait du temps partiel et des différences de salaires, la majoration de pension pour enfant, qui représente 10 % de la pension versée par le régime général, bénéficie davantage aux hommes. Cette inégalité serait corrigée par la forfaitisation, le montant aujourd'hui envisagé pour le forfait étant de 122 euros. Il ne s'agit bien sûr pas de mettre fin, par cette seule mesure, à toutes les différences qui affectent le niveau des pensions car ces différences résultent fondamentalement des écarts de salaires.

En résumé, oui à la forfaitisation, mais non à son élargissement aux familles de moins de trois enfants, qui la dénaturerait.

Le quotient conjugal est aussi remis en cause au motif qu'il serait néfaste à l'activité professionnelle des femmes. Mais nous n'en sommes pas convaincus.

Mme Guillemette Leneveu, directrice générale de l'Union nationale des associations familiales. - La rédaction de l'article 13 du projet de loi pose effectivement problème. Que la loi annonce un rapport, soit. Mais tel qu'il est rédigé, le texte semble retenir d'ores et déjà l'option d'une forfaitisation dès le premier enfant. Si l'article était maintenu, mieux vaudrait une rédaction ouverte à plusieurs scenarios. L'élargissement de cet avantage à un plus grand nombre de familles affecterait son montant ; quid des conséquences sur les familles modestes ?

Mme Françoise Laborde. - Il est vrai que cette affaire de majoration et de forfaitisation n'est pas simple. Il faut l'égalité entre hommes et femmes, mais ce sont, à ma connaissance, ces dernières qui portent les enfants... Il y a quand même une petite différence !

Monsieur le Président, pouvez-vous revenir sur les projections en matière de retraites à taux plein pour les femmes en 2020 ? Quelles femmes ne seraient pas concernées ?

Mme Gisèle Printz. - Comment s'explique la différence dans le montant des pensions ? Selon quelles modalités la majoration pour trois enfants peut-elle bénéficier à l'homme ?

Mme Laurence Rossignol, rapporteure. - Si chacun des membres du couple touche une pension de retraite, ils bénéficient tous les deux de la majoration pour trois enfants. Mais si dans un couple l'écart dans le montant des pensions est très marqué, la bonification accroît cet écart. Comment cela impacte-t-il la réversion ? La femme ne percevra qu'une pension de réversion dans laquelle la majoration est plafonnée. N'aurait-elle pu percevoir un montant plus important si elle avait pu bénéficier directement de la totalité de la majoration ?

M. François Fondard. - Sur une pension moyenne de 950 euros, une femme perçoit 600 euros en provenance du régime général, soit une majoration de 60 euros au titre de ce régime, si elle a eu trois enfants et plus. Pour un homme, le régime général versant une pension moyenne de 1 000 euros sur 1 450, la majoration sera alors de 100 euros. Notre proposition serait donc de rendre la majoration forfaitaire, par exemple en l'établissant à 122 euros pour chaque parent comme proposé par le Conseil d'orientation des retraites (COR). La forfaitisation continuerait donc à réduire les inégalités.

Quant à l'idée, que vous évoquez, consistant à porter ce chiffre à 244 euros au seul bénéfice de la femme, je vous rappelle que la Cour de justice de l'Union européenne a rendu un jugement aux termes duquel notre ancien dispositif de MDA était discriminatoire pour les hommes. Ceci a contraint notre pays à instaurer pour les pères la possibilité de demander une année de MDA, qui est, fort heureusement, peu connue par ces derniers. La décision de la Cour nous a semblée scandaleuse mais c'est ainsi : si nous ne réservions les majorations de pensions qu'aux femmes, il y aurait discrimination.

En matière de réversion, les femmes vivant en moyenne six années de plus que les hommes, perçoivent effectivement 54 % de la pension du régime général avec sa majoration, mais plafonnée, et la même part de la pension au titre des régimes complémentaires, elle aussi majorée, mais non soumise à plafond. Ce principe n'est pas remis en cause et nous considérons qu'il n'y a pas lieu de le faire.

La différence de pensions moyennes entre les femmes et les hommes s'explique d'abord par un écart de salaires de 25 % ...

M. Roland Courteau. - ... de 27 % !

M. François Fondard. - Elle tient aussi à une perte de trimestres d'assurance pour les femmes qui n'ont bénéficié ni de l'AVPF - qui génère aujourd'hui des trimestres de cotisations pour celles qui arrêtent de travailler pour se consacrer à l'éducation des enfants -, ni de la valorisation pendant toute la durée du congé parental d'éducation, ni de la majoration de durée d'assurance.

Une part de l'écart résulte aussi du recours au temps partiel.

Toutefois, comme je l'ai dit, en 2020, ce sont bien toutes les femmes qui devraient bénéficier d'une retraite à taux plein, comme l'indiquait un rapport du Sénat publié il y a trois ou quatre ans.

Mme Laurence Rossignol, rapporteure. - Concernant l'argument de la discrimination en matière de majoration, n'oublions pas que la Cour de justice prend aussi en compte les différences de situation. Or, on pourrait tout à fait plaider que c'est bien la retraite à taux réduit des femmes qui a permis celle à taux plein de leur conjoint. Ne pourrait-on pas dire qu'il s'agit pour ces derniers d'une forme d'enrichissement sans cause ? D'autant qu'il a pu y avoir séparation ; ce n'est pas toujours la vie commune, la caisse commune et le conte de fées.

M. François Fondard. - Vous avez raison, la situation des femmes après une séparation peut être très difficile. On sait que 50 % des couples mariés se séparent. Et il n'est pas rare qu'une mère de trois ou quatre enfants ne perçoive qu'une pension de 800 euros quand celle de son mari dépasse les 3 000. C'est à la pension compensatoire qu'il devrait revenir de compenser ce type d'inégalités au moment de la séparation. Or, il y a souvent un manque d'information sur ces sujets. Soyons-y très attentifs car dans 98 % des cas, ce sont les femmes qui sont pénalisées.

Certes, même en cas de séparation, le conjoint a droit à une pension de réversion mais il est tout de même délicat de considérer que l'on doive attendre le décès de son ex-conjoint pour disposer de ressources convenables.

Mme Corinne Bouchoux. - Comment les familles homoparentales sont-elles prises en compte dans le cadre de votre organisation et de ces travaux ?

M. François Fondard. - Certaines associations de parents de même sexe ont demandé à être agréées par l'UNAF et leurs dossiers sont en cours d'instruction. Dès lors que leurs statuts respectent le code de l'action sociale et des familles et qu'elles se conforment à la pratique de notre organisation, il sera fait droit à leur demande.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente. - Je vous remercie.

Avenir et justice du système de retraites - Audition du Conseil d'orientation des retraites (COR)

La délégation auditionne ensuite M. Yves Guégano, secrétaire général, et M. Jean-Michel Hourriez, responsable des études du Conseil d'orientation des retraites (COR).

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente. - Je remercie MM. Yves Guégano, secrétaire général, et Jean-Michel Hourriez, responsable des études, représentants du Conseil d'orientation des retraites (COR), d'avoir répondu à notre invitation pour nous aider à préparer notre réflexion sur le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

J'informe MM. Guégano et Hourriez que notre collègue Mme Laurence Rossignol a été désignée pour être la rapporteure de la délégation.

Je rappelle que le COR a pour mission première d'assurer le suivi permanent du système des retraites. Il s'appuie pour cela sur une structure associant parlementaires, experts, partenaires sociaux et représentants de l'État français. Le COR constitue ainsi un lieu permanent d'études et de concertation entre les principaux acteurs des retraites.

Son rapport annuel, dont la publication fait partie de ses missions, a porté en 2013 sur un « état des lieux » du système de retraites français destiné à servir de base, entre autres expertises, à l'élaboration de la réforme dont le projet de loi qui nous est soumis est le préalable législatif.

Je rappelle qu'un précédent rapport du COR avait, en 2008, été consacré aux droits familiaux et conjugaux, sujet qui bien évidemment nous intéresse tout particulièrement.

Messieurs, je vous laisse la parole pour nous présenter vos conclusions sous l'angle des retraites féminines.

M. Yves Guégano, secrétaire général du Conseil d'orientation des retraites. - Je vous remercie de nous avoir conviés à cette audition, l'une des missions dévolues au COR étant une mission d'information sur l'état des travaux concernant la question des retraites.

Je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de M. Hadas-Lebel, président du COR.

Pour dresser un état des lieux de la situation des femmes à l'égard des retraites, nous nous appuierons sur les deux rapports du COR publiés en 2008 et en 2013, que Madame la Présidente vient de mentionner. Je préciserai tout d'abord que le COR n'a pas vocation à se prononcer sur le projet de réforme en cours d'examen.

M. Jean-Michel Hourriez, responsable des études. - Les analyses du COR s'intéressent aux facteurs explicatifs des écarts persistants entre les pensions de retraites des hommes et des femmes et proposent des voies de réflexion sur l'évolution des droits familiaux et conjugaux.

Si l'on considère les dernières statistiques publiées sur les personnes retraitées de plus de 65 ans, on constate des écarts très importants entre la pension moyenne des femmes et celle des hommes, la pension moyenne d'une femme étant de 879 euros par mois alors que celle d'un homme s'élève à 1 657 euros par mois. Ce rapport d'un sur deux vaut pour l'ensemble des générations qui sont actuellement à la retraite. On ne prend en considération que les droits à retraite propres, sans tenir compte des pensions de réversion. Les droits directs issus de l'activité professionnelle sont donc, de manière générale, beaucoup plus faibles pour les femmes que pour les hommes, ces écarts étant encore plus marqués pour les populations les plus âgées alors qu'ils ont déjà diminués pour les générations suivantes. Ainsi, pour les femmes nées après 1945, qui ont pris récemment leur retraite, on constate que ces écarts se sont sensiblement réduits.

Par ailleurs, des projections, réalisées conjointement avec l'INSEE, montrent que ces écarts vont continuer à diminuer. Ainsi, pour les générations nées dans les années 1950, qui prennent leur retraite aujourd'hui, ces écarts ne seront plus que de 30 %. Pour ceux qui ont actuellement 30-40 ans, ils se réduiront à 20 %.

Malgré cette amélioration, les pensions moyennes des femmes demeureront sensiblement inférieures à celles des hommes, même pour les générations actives les plus jeunes. Il n'y aura pas de résorption spontanée de ces écarts, du moins à l'horizon prévisible des trente ou quarante prochaines années. Cette persistance des écarts de pension de droit direct a amené le COR à s'interroger sur la question des droits familiaux, qui permettent de les compenser partiellement.

Pour appréhender complètement la situation des femmes au moment de la retraite, outre l'examen de leurs droits directs, il faut aussi prendre en considération leur situation conjugale et matrimoniale, qui influe fortement sur leur niveau de vie à la retraite. La situation d'une femme au moment de la retraite est très différente selon qu'elle est soit mariée ou veuve, soit célibataire ou divorcée. Les femmes mariées bénéficient en effet de la pension de leur conjoint vivant ; les veuves perçoivent la pension de réversion de leur conjoint décédé ; les femmes célibataires disposent de leurs seuls droits propres.

Les travaux du COR menés en 2008 sur les droits conjugaux et familiaux ont permis de vérifier que le mécanisme français de la pension de réversion permet en moyenne de garantir le maintien du niveau de vie antérieur au décès : le niveau de vie moyen d'une veuve demeure sensiblement identique au niveau de vie du couple antérieur au décès.

En revanche, la situation en termes de niveau de vie des femmes célibataires ou divorcées pourrait être plus préoccupante, surtout si elles vivent seules sans conjoint de fait, car elles ne bénéficieront que de leur retraite propre.

Si l'on s'intéresse au niveau de vie actuel des femmes retraitées, 15 % de celles-ci sont en situation de pauvreté. Ce taux est comparable à celui observé pour l'ensemble de la population française, mais demeure supérieur à celui de l'ensemble des retraités qui n'est que de 10 %. À titre de comparaison, le taux de pauvreté des femmes jeunes qui élèvent seules leurs enfants est de 30 % environ.

Si pour l'instant, la situation des femmes âgées en termes de niveau de vie ne semble pas inquiétante, l'avenir est incertain. Qu'est-ce qui, de l'amélioration des pensions individuelles des femmes relativement aux hommes ou de la détérioration des situations conjugales au fil des générations, va influer de manière prépondérante sur les pensions futures des femmes ?

Au fil des générations, le modèle du couple stable perd de sa prédominance : si les femmes âgées de plus de 65 ans aujourd'hui sont, à plus de 90 %, mariées ou veuves, trois femmes sur dix, dans la génération qui arrive aujourd'hui à la retraite, sont divorcées ; quant aux femmes plus jeunes (moins de 40 ans), elles sont nombreuses à rester célibataires. Selon certains démographes, un tiers de femmes seront encore célibataires au moment de la retraite dans ces générations. Elles ne bénéficieront donc pas de droits à réversion.

Voilà donc pour le constat d'ensemble.

Il faut maintenant que nous nous interrogions sur l'origine de cette persistance prévisible d'un écart de l'ordre de 20 % entre retraites des hommes et retraites des femmes. Une part de l'explication est à rechercher dans le mode de calcul des retraites, le montant de la pension étant fonction, d'une part de la durée d'assurance validée tous régimes, d'autre part du salaire de référence - par exemple, au régime général, le salaire des 25 meilleures années.

Les écarts de pension entre hommes et femmes proviennent des deux éléments combinés. Les femmes qui partent aujourd'hui à la retraite sont désavantagées par rapport aux hommes tant en termes de durée d'assurance que de salaire de référence. Néanmoins, pour les générations futures de retraités, notamment les femmes nés après 1960 qui prendront leur retraite après 2020, on s'attend, sur la base de la législation actuelle en matière de retraite, à une certaine convergence des durées moyennes validées par les hommes et les femmes. La source principale des écarts résultera donc de l'infériorité des salaires féminins.

Mais il faut aussi considérer le taux d'activité des femmes, qui restera inférieur à celui des hommes, même si le différentiel entre taux d'activité masculin et féminin tend à décroître chez les jeunes générations.

Aujourd'hui, si les femmes travaillent pendant presque toute leur vie active, elles persistent toutefois à interrompre leur activité au moment des naissances : après une première naissance, 38 % des femmes ne travaillent pas, chiffre qui passe respectivement à 51 % et à 69 % après une seconde et une troisième naissance. Il y a donc un comportement persistant d'inactivité féminine après les naissances ; ces interruptions demeurent toutefois temporaires et leur durée a tendance à baisser (de l'ordre de trois années, pendant lesquelles les femmes bénéficient du complément de libre choix d'activité).

Si le taux d'activité des femmes demeure inférieur à ceux des hommes entre l'âge de 25 et 45 ans, les taux d'activité féminin et masculin deviennent similaires après 45 ans. Les durées cotisées par les femmes demeureront donc inférieures.

Les droits familiaux permettent de valider des trimestres supplémentaires au titre des enfants : la majoration de durée d'assurance (MDA) de deux ans par enfant bénéficie de fait aux femmes, même si elle a été ouverte récemment en droit aux hommes, et l'allocation vieillesse des parents au foyer (AVFP) permet aux femmes qui ont interrompu leur activité de valider des trimestres à hauteur de la durée d'interruption, sachant que le nombre de trimestres validés est extrêmement variable puisque certaines femmes mère de 3 enfants peuvent valider au titre de l'AVPF jusqu'à 21 ans.

Ces droits familiaux que sont l'AVPF et la MDA permettront, à terme, que les durées validées par les femmes et les hommes soient à peu près identiques ; cela ne vaut cependant pas encore pour les générations qui partent actuellement à la retraite.

L'autre paramètre qui influe sur le calcul de la pension de retraite, le salaire de référence, demeure inférieur pour les femmes. Les salaires horaires des femmes, tant dans le secteur privé que dans la fonction publique, restent inférieurs à ceux des hommes, de 15 à 20 % en équivalent temps complet.

Le travail à temps partiel des femmes (une femme sur trois) qui s'est beaucoup développé depuis les années 1990, contribue aussi à accroître l'écart entre les salaires de référence des femmes et des hommes.

Ces deux effets, écart de salaire horaire et activité à temps partiel, conduisent à des écarts de salaires de référence entre les hommes et les femmes ; heureusement, le système de retraite corrige en partie certains écarts salariaux car un dispositif (minimum contributif dans le régime général ; minimum garanti dans la fonction publique) permet aux femmes à très bas salaires de percevoir une pension portée à hauteur d'un montant minimum. Au régime général, le minimum contributif est de l'ordre de 600 euros par mois, ce qui a permis d'atteindre un objectif fixé par la loi de 2003 sur les retraites consistant à garantir 85 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) à toute personne qui a travaillé pendant 40 ans.

Ces correctifs ne concernent toutefois que les salaires de références trop bas.

Dans ses rapports de 2008 et 2013, le COR a avancé plusieurs pistes de réflexion sur les droits familiaux et conjugaux. S'agissant des droits conjugaux, le COR a pris conscience que l'évolution des structures conjugales pourrait conduire à adapter le mécanisme de la réversion, notamment, en cas de divorce, en la proratisant en fonction de la durée du mariage, ou en l'étendant à certains couples non mariés.

Le COR a aussi indiqué des pistes beaucoup plus radicales de réformes de la réversion, parmi lesquelles l'introduction de dispositifs de partage des droits, inspiré de certains exemples étrangers comme celui de l'Allemagne, où est opéré un partage égal et systématique des droits à la retraite propres entre les deux conjoints au moment d'un divorce.

Le COR a néanmoins émis des réserves sur de tels dispositifs de partage des droits, d'autant qu'ils ne sont pas systématiquement favorables aux femmes. Par ailleurs, si la mise en oeuvre d'un tel système est aisée dans des régimes de retraite à points, elle serait complexe en France qui connaît principalement des régimes de retraite à annuités.

La tendance au fil des générations est à des unions de plus en plus fragiles, les unions mariées se raréfiant et s'abrégeant, de même que la cohabitation - sous forme de pacte civil de solidarité (PACS) ou d'union libre - tend à devenir plus brève.

Cette tendance de fond conduit à une perte d'efficacité des droits conjugaux pour compenser les inégalités hommes-femmes.

De ce fait, on a pu observer une tendance, dans les pays étrangers qui ont depuis 20 ou 30 ans développé des droits familiaux liés aux enfants, à majorer directement les droits propres des femmes indépendamment de leur situation conjugale.

Les droits familiaux recouvrent essentiellement trois types de dispositifs : la majoration de durée d'assurance (MDA) de deux ans par enfant, l'allocation vieillesse de parent au foyer (AVPF) qui compense les périodes d'interruption sous certaines conditions, et un troisième dispositif, sous la forme d'une majoration de pension (en général de 10 %), pour les parents d'au moins trois enfants. Ce dispositif concerne à la fois les hommes et les femmes.

L'évolution à moyen ou long terme de la MDA conduit le COR à envisager de privilégier des majorations de montant afin de compenser les écarts de salaire de référence qui persistent entre les hommes et les femmes, en dépit de la convergence progressive des durées d'assurance. Le bénéfice de la MDA peut en effet inciter certaines femmes ayant élevé plusieurs enfants sans interrompre leur activité professionnelle à prendre leur retraite prématurément, ce qui va à l'encontre d'objectifs d'augmentation du taux d'emploi des seniors.

S'agissant de l'AVPF, il faudrait plutôt simplifier ce dispositif dont les conditions d'ouverture de droits sont assez complexes, et privilégier des durées d'interruption plus courtes mais qui seraient davantage compensées. Ainsi l'AVPF accorde-t-elle actuellement des droits sur la base du SMIC : on peut imaginer qu'elle s'oriente sur une base salariale plus favorable. En compensation, la durée de l'AVPF pourrait être limitée à trois ans par enfant.

Quant aux majorations pour les parents d'au moins trois enfants, qui concernent à la fois les hommes et les femmes, elles ne permettent pas de réduire les écarts de pension entre les hommes et les femmes : elles les accroissent même légèrement.

L'idée serait, dans une logique de redistribution entre retraités, de remplacer ces majorations proportionnelles au montant de la pension par des majorations forfaitaires, qui permettraient de mieux réduire les inégalités entre hauts et bas revenus.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente. - La question des droits familiaux et conjugaux a un grand intérêt pour compenser les inégalités de retraites entre hommes et femmes.

Mais ces compensations ne sont pas une solution pour les femmes qui n'ont pas eu d'enfants et qui sont néanmoins pénalisées parce qu'elles subissent des inégalités au travail.

La délégation aux droits des femmes est particulièrement sensibilisée aux difficultés liées aux temps partiel et au temps de travail que je qualifierais d'« hachuré »,

Je voudrais revenir avec vous sur les projections dont vous avez fait état concernant le taux d'activité des femmes, qui ne progresserait pas à l'avenir : cette stagnation se traduira sur le montant de leurs droits propres, indépendamment des droits familiaux et conjugaux.

La question de la retraite des femmes rejoint celles de la politique familiale et de l'organisation de la garde des enfants : il s'agit d'un problème global.

Le projet de loi prévoit la création d'un « compte personnel pénibilité » : or il faudrait améliorer la reconnaissance de la pénibilité de certaines professions féminisées. Autant la reconnaissance de la pénibilité de certains métiers, essentiellement masculins, va de soi - c'est le cas par exemple des hommes qui travaillent dans les hauts-fourneaux - autant il ne semble pas évident de qualifier de pénibles des situations de travail essentiellement féminines, comme par exemple les institutrices de maternelle en fin de carrière, les caissières, ou les femmes subissant des temps partiels impliquant une forte amplitude horaire. Y a-t-il une réflexion sur le sujet ?

Mme Laurence Rossignol, rapporteure. - Sur quelles raisons s'appuie ce postulat de la non-progression, à l'avenir, du taux d'activité des femmes ?

Mme Corinne Bouchoux. - Je voudrais souligner à quel point notre système des retraites a été conçu sur des bases aujourd'hui dépassées : celles de la famille nucléaire stable, du plein emploi et de la prospérité économique. Nous savons désormais que la famille est évolutive et que l'emploi est soumis à de nombreux aléas. Dans mon département, on observe actuellement une hausse significative du nombre de divorces chez les plus de 60 ans. Or, dans de nombreux cas, les intéressés n'ont pas nécessairement mesuré les conséquences de ce choix... Tenez-vous compte, dans vos projections, de ce phénomène, qui concerne des seniors qui sont parfois des retraités aisés ?

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Disposez-vous de données comparées s'agissant des droits familiaux, et plus particulièrement des majorations de durée d'assurance ? Par ailleurs, je suis particulièrement sensibilisée à la situation des épouses d'expatriés qui, pour suivre leur mari dans une affectation à l'étranger, interrompent parfois leur carrière : l'amélioration de l'information de ces personnes est un réel progrès et je suis heureuse d'y avoir contribué, par le passé, à travers un amendement.

M. Jean-Michel Hourriez. - Cette projection des taux d'activité est effectuée par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) tous les cinq ans à partir des tendances observées. Certes, le taux d'activité des femmes progresse, mais on peut anticiper un maintien des comportements concernant les interruptions de carrière à l'occasion des naissances, qui touche les femmes de 30-35 ans. Mais après 45 ans, on observe une hausse de l'activité des femmes qui permet de prévoir à l'avenir des taux d'activité équivalents des hommes et des femmes de cette tranche d'âge. En 1975, le taux d'activité des femmes était de 60 % au moment de la maternité, puis il passait à 50 % vers 50 ans. Les statistiques de 2010 montrent un taux d'activité global de 80 % ; en 2050-2060, on devrait donc atteindre un taux d'activité de 80 % vers 30 ans et de 95 % vers 50 ans.

Ces projections ne sont pas figées : on s'attend à une hausse du taux d'activité, sauf pour les femmes jeunes.

Mme Laurence Rossignol, rapporteure. - Le taux global d'activité va donc rester inférieur à celui des hommes pour les femmes relevant des tranches d'âge concernées par la maternité. Or, le fait de prendre en compte les conséquences de cette situation sur les retraites, par exemple avec les droits familiaux, revient en quelque sorte à encourager les femmes à interrompre leur activité professionnelle plus fréquemment que les hommes.

J'espère que les congés maternité ne sont pas considérés, dans ces statistiques, comme une interruption d'activité.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente. - Le congé maternité permet de valider des trimestres. On ne peut donc le considérer comme une période d'interruption d'activité professionnelle.

Mme Laurence Rossignol, rapporteure. - C'est un sujet complexe : en atténuant les conséquences négatives, sur le niveau des retraites des femmes, des interruptions d'activité, on encourage des choix qui ne sont pas favorables au maintien des femmes dans l'emploi.

M. Yves Guégano. - C'est bien là toute l'ambiguïté de la politique familiale et des choix effectués en matière de retraite. L'idée est à la fois d'encourager les femmes à rester sur le marché du travail et de compenser les inégalités entre hommes et femmes : or, les compensations mises en oeuvre à cet effet en matière de retraite sont de nature à conforter des comportements qui ne semblent pas tournés vers l'avenir.

Mme Laurence Rossignol, rapporteure. - Peut-être faudrait-il se limiter, en matière de compensation, aux situations pour lesquelles les femmes n'avaient pas le choix...

M. Yves Guégano. - On rejoint là la réflexion sur le temps partiel, subi ou choisi.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente. - Le choix du temps partiel est souvent lié à des soucis concernant la garde des enfants. Est-il alors subi ou contraint ?

M. Jean-Michel Hourriez. - L'accroissement du nombre de divorces chez les retraités n'a à ce jour pas fait l'objet, à ma connaissance, d'une étude au plan national. Les statistiques attestent néanmoins que le comportement matrimonial des générations nées après 1945 est différent de celui des générations précédentes. Il n'est pas étonnant que la banalisation du divorce (qui concerne aujourd'hui trois couples sur dix) se poursuive après la retraite. On constate également une augmentation du nombre de couples de retraités - divorcés ou veufs - en situation de cohabitation.

M. Yves Guégano. - Les critères de pénibilité se réfèrent aux conséquences de l'activité professionnelle sur l'espérance de vie. Ces critères, dont la définition est particulièrement complexe, pourraient-ils prendre en compte des différences entre les hommes et les femmes ? À l'étranger, ce sujet n'est pas traité.

Mme Françoise Laborde. - Ces critères s'appliquent donc indifféremment aux hommes et aux femmes.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente. -Je voudrais que l'on réfléchisse à la pénibilité spécifique, et pourtant invisible semble-t-il, de certaines professions féminisées. Si l'on pense assez spontanément aux infirmières, on pense moins spontanément, comme je le disais tout à l'heure, aux caissières ou aux professeures des écoles en fin de carrière. Ces critères me semblent « aveugles » au regard de certaines situations professionnelles.

M. Yves Guégano. - Ces situations doivent trouver une solution dans le cadre des relations de travail ; je pense notamment au temps « haché ».

M. Jean-Michel Hourriez- Je voudrais revenir sur les comparaisons internationales en matière de droits familiaux. Il y a environ 25 ans, le système français était sur ce point très spécifique. Son originalité tenait pour une grande part à l'intégration d'éléments de politique familiale dans le système des retraites, dont témoigne la majoration de pension pour les parents ayant élevé trois enfants ou plus. On constate cependant, désormais, une tendance d'autres pays à compenser l'incidence des maternités sur les retraites des femmes.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Je voudrais revenir sur la situation des conjoints d'expatriés : il a des pays où les femmes n'ont pas le droit de travailler. Elles sont donc extrêmement pénalisées quand elles suivent leur conjoint affecté à l'étranger. J'ajoute qu'aujourd'hui cette mobilité internationale est devenue obligatoire pour certains salariés. Quelle compensation peut-on envisager pour leurs conjoints ? La situation de ces personnes est évidemment encore plus difficile quand les conséquences d'un divorce s'ajoutent à ces interruptions de carrière...

M. Yves Guégano- Ces situations sont en effet très complexes. Je voudrais souligner qu'une retraite peu élevée n'est pas nécessairement synonyme de faible niveau de vie : les difficultés résultent souvent de l'instabilité des couples. Les séparations ont des conséquences importantes en termes de niveau de vie.

Les règles de calcul des retraites (salaire de référence, décote, surcote...) créent des redistributions entre retraités au détriment de ceux qui ont eu des carrières courtes, et donc principalement aux dépens des femmes. Pour réévaluer les droits des femmes en matière de retraite, il faudrait agir sur les méthodes de calcul des droits à pension. Or, le projet de loi apporte peu de précisions sur ce point.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente. - Certes, l'instabilité des couples affecte le train de vie des retraités. Mais idéalement, la femme devrait à l'avenir pouvoir s'assumer comme un acteur économique à part entière : c'est donc à la revalorisation des droits propres des femmes qu'il faut penser.

M. Yves Guégano. - Il faut également tenir compte des différences entre hommes et femmes en matière d'espérance de vie.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente. - Je vous remercie.

Questions diverses

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente. - Je voudrais maintenant vous présenter des orientations possibles de nos travaux pendant la session qui commence.

En ce qui concerne le thème à choisir pour nos travaux annuels, je souhaiterais que dans un premier temps, notre bureau ait un échange de vues sur les sujets envisageables. Je propose pour cela, si cela vous convient, un petit-déjeuner qui pourrait avoir lieu le 17 octobre à 8 h 30. Puis ces thèmes feront l'objet d'un débat en réunion de délégation.

En attendant ce débat, je suis déjà en mesure de vous proposer deux orientations de nos travaux.

La première pourrait nous occuper jusqu'à la fin de 2013. Il s'agirait de mettre à l'honneur la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, à laquelle, comme vous le savez, la date du 25 novembre est dédiée. Le thème des violences faites aux femmes pourrait donner lieu à quelques auditions et tables rondes, essentiellement avec des organisations non gouvernementales (ONG) et des associations.

J'aimerais que la présentation des travaux de la délégation ait lieu à une date proche du 20ème anniversaire de la déclaration de l'Organisation des nations Unies (ONU) sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes : ce texte a en effet été adopté par l'Assemblée générale de l'ONU le 20 décembre 1993.

Ces auditions et tables rondes, et le document de la délégation qui les conclurait, seraient donc notre contribution à la fois à la commémoration de la journée du 25 novembre et à l'anniversaire de l'adoption d'un texte international qu'il faut saluer.

Le thème des violences à l'encontre des femmes est particulièrement vaste : nous sommes donc obligés de nous centrer sur une problématique assez précise. Je vous soumets, entre autres possibilités, l'idée des violences faites aux femmes dans les territoires en situation de conflit, mais nous pouvons préciser notre projet dans les semaines qui viennent.

Si d'autres sollicitations nous parvenaient pour la journée du 25 novembre 2013, nous pourrions les intégrer.

Même si ces sujets peuvent paraître à certains un peu « rebattus », leur gravité nous impose de ne pas affaiblir notre vigilance et de donner un signal fort de notre implication à toutes les associations qui ont fait de cette lutte leur quotidien.

Ces travaux pourraient donc se dérouler entre la mi-novembre et fin décembre. Je vous propose que la présentation de notre rapport ait lieu, par exemple, le mercredi 18 décembre 2013.

J'en viens à une autre orientation de nos travaux qui pourrait nous conduire jusqu'à la fin du mois de mai 2014, et pour laquelle je voudrais recueillir votre sentiment.

Comme vous le savez, le Sénat a adopté, le 28 mars 2013, une proposition de loi de notre collègue Jean-Jacques Mirassou, signée par les membres du groupe socialiste, afin d'instaurer une Journée nationale de la Résistance, et de fixer cette journée à la date du 27 mai, jour où Jean Moulin a réuni pour la première fois le Conseil national de la Résistance. Cette proposition de loi est devenue la loi du 20 juillet 2013.

Le Sénat se doit donc, je crois, d'organiser un événement important pour participer à la première commémoration de cette journée nationale, le 27 mai 2014.

Je vous propose donc que notre délégation organise un colloque sur les femmes résistantes à l'occasion de cette journée. L'après-midi du 27 mai 2014 pourrait donc lui être consacrée. Si ce projet reçoit votre aval, la publication des actes du colloque se fera sous forme d'un rapport de la délégation.

Il me semble que ce colloque pourrait être l'occasion de réunir au Palais du Luxembourg des spécialistes du sujet, venus notamment du monde de l'Université, mais aussi des témoins de cette période - ou plutôt, malheureusement, leurs descendants -. Ces rencontres pourraient porter, entre autres thèmes, sur la vie de ces héroïnes après la Libération : vous savez qu'un certain nombre d'entre elles a siégé au Conseil de la République, au début de la IVème République. L'évocation de leur engagement dans la vie politique - et nous savons que pour la plupart de ces femmes, cet engagement a été bref - pourrait être l'occasion d'un dialogue entre des historiens et nous, les sénatrices et sénateurs, de manière à rendre ce colloque interactif.

Il pourrait être d'autant plus interactif que je salue en Corinne Bouchoux une spécialiste du sujet... Ma chère collègue, nous connaissons tous votre discrétion, mais votre expertise serait très utile à la délégation.

Je vous proposerai, dans les prochaines semaines, de revenir au cours d'une réunion sur les thématiques à aborder pendant ce colloque et sur son organisation.

M. le Président du Sénat sera sollicité pour parrainer cette manifestation pour lui donner l'éclat qui convient.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Je me félicite du choix de ces deux orientations pour nos travaux, que j'appuie sans réserve. En ce qui concerne le projet de tables rondes et de rencontres en vue de la commémoration de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes du 25 novembre et de l'adoption de la résolution onusienne du 20 décembre 1993, je voudrais souligner que notre délégation a en effet une responsabilité importante vis-à-vis des associations de femmes qui agissent à l'étranger. La dimension internationale de nos réflexions me semble fondamentale.

S'agissant de cette initiative sur les femmes résistantes, dont l'apport à la libération de notre pays a été trop longtemps ignoré, je me souviens d'avoir rencontré des résistantes françaises il a une quinzaine d'années, à l'occasion de la présentation du livre d'une historienne américaine sur le sujet. Cette étude - sans précédent à l'époque - a d'ailleurs beaucoup contribué à faire connaître l'héroïsme de ces femmes, qui sont restés trop modestes et discrètes.

Mme Corinne Bouchoux. - J'adhère aussi pour ma part au choix de ce sujet. Je voudrais également suggérer que le Sénat mette en valeur la biographie des anciennes sénatrices encore en vie : leurs témoignages, extrêmement riches, devraient absolument être recueillis sous une forme audiovisuelle. Je regrette que ce travail ne soit pas systématiquement effectué.