Jeudi 8 mars 2018

- Présidence conjointe de M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, et de M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes -

La réunion est ouverte à 16 h 40.

Rencontre avec des parlementaires de la Chambre des Communes

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. - Nous sommes très heureux de vous accueillir, monsieur le président Tugendhat, ainsi que l'ensemble de la délégation de la commission des affaires étrangères de la Chambre des Communes, après votre réception à l'Assemblée nationale, pour un entretien sur l'avenir des relations diplomatiques avec le Royaume-Uni, dans le contexte du Brexit. En ces moments particuliers de la relation entre le Royaume-Uni et l'Union européenne, plus nous nous voyons, mieux nous nous comprenons et cela est très positif.

Nous suivons avec la plus grande attention les conséquences de la décision prise par le peuple britannique lors du référendum du 23 juin 2016 : nous avons constitué, pour ce faire, un groupe de suivi sur le retrait du Royaume-Uni et la refondation de l'Union européenne, composé de 20 membres, issus de nos commissions des affaires étrangères et des affaires européennes.

Le Royaume-Uni a choisi la voie du Brexit. Nous avons été nombreux à le regretter. Cette voie est difficile, mais nous respectons bien évidemment le choix du peuple britannique. Si le calendrier est respecté, le 30 mars 2019, le Royaume-Uni deviendra un pays tiers de l'Union européenne. Nous devons tout faire pour que les négociations entre l'Union européenne et le Royaume-Uni aboutissent à un bon accord, qui doit permettre ce que nous appelions de nos voeux il y a un an, c'est-à-dire une « séparation ordonnée ». Rien ne serait plus préjudiciable qu'un échec des négociations, et pour le Royaume-Uni et pour l'Union européenne.

Nous avons été particulièrement attentifs au récent discours, très attendu, de Mme Theresa May, Première ministre. Ce discours exprime, nous semble-t-il, la vision britannique de ce que pourrait être l'accord commercial post-Brexit entre l'Union européenne et le Royaume-Uni. Cette vision est ambitieuse, et suggère des pistes très intéressantes. Nous nous en réjouissons.

Nous ne méconnaissons pas, néanmoins, les nombreuses difficultés qui sont encore loin d'être résolues. La possible résurgence d'une frontière en Irlande, notamment, nous inquiète quant au maintien des acquis de l'accord du vendredi saint. Comment maintenir un espace de circulation commun dans l'île irlandaise, tout en permettant la sortie du Royaume-Uni de l'union douanière et du marché unique ? La proposition d'un double tarif, en fonction du lieu de destination final des biens importés soulève de nombreuses difficultés. Vos éclaircissements seront les bienvenus.

Nous n'oublions pas que l'avenir des relations entre le Royaume-Uni et l'Europe ne saurait rester uniquement commercial. Nous sommes préoccupés par le risque d'affaiblissement, voire d'éclatement de l'Europe, pour reprendre le mot de certains, alors même que la région constitue un enjeu géostratégique essentiel, face au retour des États-puissance et à l'émergence des « pays-continents ». Par chance, beaucoup nous reste en commun. C'est le résultat de l'histoire mais aussi d'une très longue et très profonde amitié.

Le Royaume-Uni et la France partagent, notamment, une culture stratégique commune et des valeurs communes face à une situation internationale très tendue. Je n'oublie pas que nos deux pays sont détenteurs de l'arme nucléaire et membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. Nous appelons à préserver et à cultiver cette entente, qui constitue une ligne de force du continent européen, et je crois que nous nous retrouverons là-dessus sans difficulté. Nos deux armées sont susceptibles d'intervenir pour la paix et la sécurité de ce continent. Comme le rappelait Mme Theresa May lors du récent sommet franco-britannique du 19 janvier 2018 à Sandhurst, « Le Royaume-Uni se prépare à quitter l'Union européenne, mais le Royaume-Uni ne quitte pas l'Europe ».

L'accord ou les accords futurs entre l'Union européenne et le Royaume-Uni devront aussi permettre de maintenir et renforcer les coopérations dans les domaines de la politique étrangère et de la sécurité, mais aussi dans d'autres domaines qu'évoquera sans doute mon collègue Jean Bizet.

Puissent nos rencontres se poursuivre tout au long de la négociation, car je crois à la liberté de ton des parlementaires, qui peuvent dire ce que parfois les ministres ou les diplomates ne peuvent pas dire. Nous avons tiré profit de chacune de nos rencontres ; soyez, encore une fois, les bienvenus au Sénat.

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. - Nous sommes heureux de vous accueillir au Sénat, et je me réjouis de votre présence parmi nous. Nous devons tous tirer les conséquences du choix qui a été le vôtre, un choix démocratique, mais qui reste, pour nous, incompréhensible. Car nous pensons que le Brexit est un non-sens géostratégique. A l'heure où partout s'affirment de grands ensembles qui prétendent user des armes de la puissance, ce serait une erreur fondamentale d'organiser la désunion des européens. Permettez-moi de rappeler les propos tenus il y a quelques heures, à Bruxelles, par le président du Conseil européen, qui considérait que le futur accord qui règlera les relations entre nous sera, pour la première fois dans l'histoire, un accord chargé de distendre les liens commerciaux entre nos pays.

Nous souhaitons donc, puisque tel est votre choix, la conclusion d'un accord de retrait. Mais cet accord doit répondre aux trois conditions posées par l'Union européenne sur la situation des citoyens, la délicate problématique de l'Irlande et le règlement financier. Tous les engagements pris dans le rapport conjoint des négociateurs devront être juridiquement formalisés. Leur respect conditionnera l'accord sur les relations futures. Une période de transition paraît inévitable. Mais le Royaume-Uni devra respecter toutes ses obligations, et ceci sans pouvoir participer au processus de décision puisqu'il sera devenu un Etat tiers.

Pour ce qui concerne les relations futures, le Conseil européen devra fixer précisément ses objectifs en veillant à garantir l'intégrité du marché unique, premier marché économique mondial, qui, avec 500 millions de consommateurs, devance encore les marchés asiatique et américain, et qui a été central dans nos relations depuis 1973. Les Vingt-sept feront tout pour préserver ce marché unique.

A côté de la question des échanges commerciaux, nous devrons aussi veiller à mettre en place un partenariat qui permette de gérer nos intérêts communs, notamment en matière de sécurité. Il est évident que des accords sectoriels s'élaboreront au fil du temps, parce que, sur un certain nombre de points, nous n'avons pas d'autre solution et considérons que l'union sera la meilleure des solutions. Nous avons bien noté, dans le discours de Mme May à Munich, son insistance pour une coopération sécuritaire privilégiée après le Brexit. Nous avons aussi pris connaissance des analyses intéressantes de votre commission sur l'avenir de la diplomatie britannique en Europe. C'est évidemment sur ce point que nous vous écouterons avec le plus grand intérêt.

A notre sens, il n'est pas possible d'accorder à un Etat tiers les mêmes droits qu'à un Etat membre. Le Normand que je suis voit un ciel identique au vôtre, et seule la Manche nous sépare, mais il fait toujours plus beau sous le ciel qui nous abrite. Tel sera le fil de nos négociations : n'y voyez aucune mauvaise pensée. Il s'agit néanmoins de construire avec votre pays un partenariat étroit qui permette de faire prévaloir, chaque fois que possible, notre communauté d'intérêts.

Comment y parvenir ? Je sais que les Anglais nous ont toujours stupéfiés dans leurs méthodes de réflexion ou leurs solutions, mais j'avoue que je suis un peu dans le brouillard. Comment concilier le nouveau statut d'Etat tiers qu'aura le Royaume-Uni avec la mise en place d'un partenariat étroit ? Je reconnais que je me pose la question depuis longtemps. Peut-être aurons-nous la réponse aujourd'hui.

M. Tom Tugendhat (parti conservateur), président de la délégation. - C'est un grand plaisir que de nous retrouver parmi vous dans ce magnifique Palais du Luxembourg, devant ces beaux jardins où j'ai eu l'immense privilège de me promener si souvent. Ce lieu, l'un des plus beaux de France, nous rappelle les liens étroits qui nous ont unis non pas seulement ces quarante dernières années, mais bien des centaines d'années durant. Nous ne sommes pas la première délégation britannique à vous rendre visite, et nous ne serons pas la dernière. Je vous remercie de votre accueil chaleureux.

Alors que le sujet du Brexit domine, sans surprise, la vie politique britannique, notre commission parlementaire n'a pas charge de se pencher sur le processus du Brexit mais sur « le jour d'après ». Car nous avons la chance d'avoir une commission distincte de la commission du Brexit, ce qui me donne liberté de ne pas évoquer les négociations du Brexit pour regarder un peu plus loin, vers l'après.

La décision est prise, et il ne serait pas sage d'espérer un changement de circonstances. Bien que certains de mes collègues le considèrent possible, l'espérer nous laisserait, à mon sens, impréparés pour le futur.

Un changement de statut se prépare, mais nous ne quittons pas l'Europe : la Manche ne va pas s'élargir et nos amis normands nous resteront aussi proches qu'ils le sont aujourd'hui. Ce changement de statut s'inscrit, au vrai, dans une longue continuité historique, au cours de laquelle le statut des relations entre la France et le Royaume-Uni a bien des fois varié, au long d'un cheminement qui commence avec les pourparlers qui ont jalonné le processus engagé par l'entrée des Français à Hastings, puis passe par ceux qui ont ponctué la guerre de Cent Ans, se poursuit par le sommet du Camp du Drap d'Or, puis par la construction de l'Entente cordiale, jusqu'aux négociations engagées dans les années 1970. Autant dire que les relations entre nos pays ont changé à bien des reprises ; nous en sommes à un nouveau changement, qui n'est cependant qu'un nouveau contrat politique et non pas un changement dans notre relation d'amitié. J'y insiste, car on a beaucoup entendu dire que ce vote était un vote contre la France, contre l'Europe : il n'en est rien.

Il est vrai que notre relation n'est pas tout entière commerciale, même si vous avez eu raison de souligner que l'enjeu commercial est primordial. La coopération en matière de renseignement et de sécurité entre nos deux pays est forte et étroite, et personne ne songe à la remettre en cause. La Première ministre a été d'emblée très claire sur ce point, qui n'est contesté ni au sein du Parlement ni au sein de la population. Lors du récent sommet au cours duquel le Président Macron nous a fait l'amitié de nous rendre visite à Londres, il a été très clair que cet aspect de nos relations, qui engage nos services de sécurité et de renseignement respectifs, serait clairement conforté. Nous sommes, au reste, dans une situation assez unique, puisqu'un brigadier français est commandant en chef adjoint d'une division britannique, tandis qu'un brigadier britannique est commandant en chef adjoint d'une division française. Un tel niveau de coopération est inédit, puisqu'on ne l'a pas même connu lors des deux conflits mondiaux, où nous avons combattu côte à côte.

Si je parle avec passion de ces questions de défense, c'est que je n'oublie pas qu'à l'Académie militaire de Sandhurst, qui forme les officiers de l'armée britannique, nos marches militaires passaient devant un monument commémoratif sur lequel vous auriez reconnu les lauriers napoléoniens, en souvenir du prince impérial Napoléon IV, mort sous le drapeau de la reine Victoria dans une expédition contre les Zoulous. Et nous marchions sur l'air du « Ça ira », ce qui n'est pas sans me faire sourire.

Le moment de transformation dans lequel nous entrons se ressent dans toute l'Europe, et pas seulement au Royaume-Uni. A l'Est, on perçoit un changement profond dans la perception de l'Union européenne, en particulier dans les pays du groupe de Viegrad. Mais en Italie aussi on constate un changement dans l'humeur européenne. Votre Président de la République a lui-même dit, dans un entretien qu'il a récemment accordé lors de son séjour à Londres, qu'un référendum mené en France aurait pu donner le même résultat.

Ce changement, spectaculaire, s'inscrit dans un mouvement d'ensemble qui touche le continent européen : si le Brexit est un enjeu majeur pour le Royaume-Uni, il ne serait pas sage ne n'y voir qu'un enjeu national, car il est européen et mondial. C'est un enjeu qui touche, pour les gouvernements, les parlements, les citoyens, à la légitimité. Nous devons nous souvenir de la leçon de Rousseau dans le Contrat social : ce contrat ne procède pas de gouvernements, d'Etats, de représentants, mais il émane de la souveraineté populaire. C'est pourquoi je suis optimiste pour l'avenir. Vous avez raison d'évoquer le problème de la frontière avec l'Irlande et de souligner l'importance de l'accord du vendredi saint, car il est essentiel au bien-être des Irlandais, dont j'ai le privilège d'être un représentant, et même à celui de tout le continent. Le concept de la représentation, l'idée de la liberté que nous partageons ont développé des liens culturels profonds. Les liens d'amitié que nous partageons, et qui se traduisent plus fort encore, pour moi, dans les liens de mon mariage, puisque ma femme est française, sont à mon sens les pierres d'assise sur lesquelles se bâtira notre future relation.

Il est vrai, bien sûr, que les défis sont devant nous, et il est également vrai que nos gouvernements peinent à percevoir comment les relever avec des idées nouvelles, ainsi que l'a justement souligné le président Cambon. C'est pourquoi j'ai la conviction que le temps est venu pour le Parlement de jouer tout son rôle. Et notre comité, dans notre réunion d'aujourd'hui, est avide de connaître votre sentiment sur la manière de relever le défi du changement. Car il n'y a pas, en Europe, deux pays qui n'aient tant en commun que le Royaume-Uni et la France. Nos économies sont de taille similaires, nos perspectives sur le monde comparables, notre investissement en matière de défense et de sécurité de niveau analogue. La sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne ne saurait avoir sa réplique dans d'autres pays. L'idée que nouer un « bon accord » pourrait en provoquer une n'est pas crédible. L'idée qui voudrait qu'un pays comme le Luxembourg pourrait être amené à quitter l'Union dans les mêmes termes n'est pas réaliste. Si nous voulons bâtir une relation durable, nous devons avant tout considérer les relations qui ont été les nôtres au cours des soixante-dix années passées, sans sauter par dessus. Nous devons nous souvenir que cette relation est fondée sur l'amitié, et ne se mesure pas en livres et shillings ou en rivalités, comme on l'a trop souvent entendu dire par certains à la Commission européenne, dans les années récentes.

Aussi est-ce pour nous un immense privilège que d'être parmi vous aujourd'hui et mes collègues travaillistes, conservateurs, membres du parti national écossais vous livreront leur opinion, qu'ils n'hésitent jamais à exprimer franchement.

M. Simon Sutour. - Vous avez insisté, monsieur le président, sur « le jour d'après ». C'est en effet ce qui compte dans notre rencontre. Je suis de ceux qui regrettent le choix souverain du peuple britannique, d'autant plus que ma mère en vient - une marque de plus des liens qui sont les nôtres. Je suis convaincu que l'Europe et le Royaume-Uni, auraient tout à perdre à ne pas conserver des relations étroites. Nous sommes dans un monde qui compte 7 à 8 milliards d'habitants ; l'Union européenne, avec vous, en compte 500 millions, 440 millions sans vous. Ces 500 millions, qui partagent une culture et une histoire commune doivent conserver une action commune en matière commerciale - c'est votre voeu et c'est pourtant ce qui sera le plus difficile à établir, car lorsque l'on n'est plus dans l'Union européenne, on n'est plus dans le marché unique. Ils doivent conserver une action commune en matière de défense. Nous sommes, en ce domaine, les deux grandes puissances européennes. Nous devons, enfin, préserver les droits de nos nationaux établis de part et d'autre de la Manche.

Je me félicite qu'après un début assez chaotique, les choses commencent à avancer. Nous sommes fiers que le négociateur européen, Michel Barnier, sorte de nos rangs, puisqu'il a été le premier président de notre commission des affaires européennes. Nous avons aussi beaucoup apprécié le discours prononcé il y a quelques jours par Mme Theresa May. Il faut avoir conscience que, comme elle l'a indiqué, le Royaume-Uni n'aura pas tout ce qu'il demande et l'Union européenne non plus.

Ce n'est pas notre dernière réunion, ni la dernière visite parmi nous d'une délégation de la Chambre des Communes. Je veux dire mon plaisir de cette rencontre et mon espoir que les choses se déroulent au mieux pour nos deux pays.

M. Mike Gapes (parti travailliste). - Je suis enchanté d'être à nouveau parmi vous et de poursuivre une coopération et des discussions engagées depuis des années, mais je suis triste, aussi, de l'être dans de telles circonstances.

L'an dernier, en février, vos deux commissions ont publié un rapport commun intitulé Relancer l'Europe : Retrouver l'esprit de Rome. J'aimerais savoir si, à la suite de l'élection présidentielle, qui a recomposé le paysage politique français, les positions que vous exprimiez dans cet intéressant rapport sont toujours les vôtres.

M. Ladislas Poniatowski. - J'ai beaucoup apprécié, monsieur le président, votre intervention, dans laquelle vous insistez sur l'après Brexit. Mais je suis tenté de dire que tous les problèmes demeurent. Sur la sécurité et la défense, je suis très optimiste. La lutte contre le terrorisme passe par des relations étroites en matière de renseignement. Lors du sommet de Sandhurst, vos trois services de renseignement et les trois nôtres étaient présents, et ont clairement montré que le travail très étroit, notamment pour lutter contre le terrorisme, se poursuivait. Car nous sommes à une nouvelle étape, celle du retour des combattants de Syrie et d'Irak, qui est une bombe potentielle pour nos deux pays.

Dans le secteur de la défense, nous continuons à travailler très étroitement ensemble. Au sein de la coalition qui poursuit le combat contre Daesh en Irak et en Syrie, nous sommes des partenaires très proches, tant pour l'aviation que pour les troupes au sol. Je pense, cependant, que l'on pourrait aller plus loin, et c'est en quoi le sommet de Sandhurst m'a déçu. Nous avons des drones de renseignement, mais pas de combat. Pourquoi ne pas engager un projet commun ? Il existe un projet, j'espérais qu'on le sortirait du tiroir, mais tel n'a pas été le cas.

M. Stephen Gethins (parti national écossais). - Je suis membre du Parti national écossais et, comme plusieurs de mes collègues ici présents, je regrette les résultats du référendum, même si je suis très attaché au principe de souveraineté. Je souhaite que nous puissions conserver une relation aussi étroite que possible et que nous retenions les enseignements des erreurs qui ont pu être commises.

Pour autant, comme le disait notre président, Tom Tugendhat, il serait peu avisé de ne pas préparer les prochaines étapes. C'est notre responsabilité en tant que parlementaires. Il nous faut préparer l'avenir, d'où l'intérêt de réunions telles que celle d'aujourd'hui.

Il est vrai que les négociations actuelles ne se passent pas particulièrement bien, en partie à cause du Gouvernement britannique. Or, les pays européens et le Royaume-Uni sont confrontés à des problèmes communs, en particulier en termes économiques, d'éducation ou d'emploi.

Enfin, pour revenir à l'histoire, je voudrais rappeler que Français et Écossais ont partagé une citoyenneté commune durant 700 ans et qu'au Parlement écossais, des monarques français sont toujours présents sur certains tableaux, tout simplement parce qu'ils régnaient aussi sur l'Écosse... Les relations entre nos deux pays sont donc très profondes.

M. Richard Yung. - Nous avons nous-mêmes failli avoir un monarque anglais...

Plus sérieusement, je dois dire que nous sommes dans une période difficile. Oui, nous devons maintenir des liens étroits, mais force est de constater que les négociations n'avancent pas, tout au moins sur les grands dossiers.

Plusieurs questions importantes sont encore sur la table, je n'en citerai que quelques-unes.

Il est globalement convenu que nous aurons une période de transition d'environ deux ans, mais elle ne pourra avoir lieu que dans le cas où nous trouvons un accord de sortie... Et s'il n'y a pas d'accord, je dirais volontiers : What a mess ! Comment organiser nos relations dans les différentes hypothèses ? Je suis quelque peu inquiet à ce sujet.

La Première ministre britannique, Mme May, a indiqué clairement que le Royaume-Uni sortirait de l'union douanière, mais comment faire concrètement ? Votre pays adoptera-t-il son propre code douanier et comment s'articulera-t-il avec celui de l'Union européenne ?

Il y a aussi la question du règlement financier, du « I want my money back »...

En ce qui concerne les citoyens communautaires, le Royaume-Uni envisage de fixer une période de cinq ans à partir de la date de sortie de l'Union européenne, ce qui créerait deux catégories de citoyens, certains avec moins de droits que d'autres. Vous comprendrez que nous sommes peu enthousiastes à cette perspective.

Enfin, je ne peux manquer d'évoquer la question de l'Irlande. Je comprends les efforts fournis par Mme May, mais qu'est-ce qui est véritablement sur la table ? Allons-nous vers un double tarif, ce qui serait délicat ? Quelles sont les solutions possibles ? Il est difficile de voir comment avancer sur cette question.

En tout cas, nous devons désormais avancer rapidement, car la date de sortie se rapproche. Je suis désolé de paraître aussi négatif, mais entre amis, il vaut mieux se dire les choses...

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. - Ce type de réunion sert aussi à cela !

M. Andrew Rosindell (parti conservateur). - Prenons une autre perspective. L'Union européenne et le Royaume-Uni vont devoir se quitter en mars 2019. Nous avons eu des avis différents sur cette question, mais nous pensons tous que les relations étroites que le Royaume-Uni et la France entretiennent depuis si longtemps doivent se poursuivre. Le processus en cours doit être regardé, d'une certaine façon, comme une occasion à saisir.

Je rappelle que le Royaume-Uni a rejoint l'Union européenne à un moment où celle-ci était d'abord un marché commun. Le problème auquel nous avons été confrontés, c'est qu'au fil des années, le processus d'intégration a dérivé vers une union politique. Au fond, le peuple britannique n'a pas compris cette évolution et il me semble que beaucoup d'autres peuples européens s'interrogent, eux aussi, sur la légitimité démocratique de ce processus sans fin.

Cette remise en question de l'évolution de l'Union européenne doit nous amener à coopérer selon de nouvelles modalités, davantage fondées sur le principe de souveraineté des États et sur le droit des citoyens à prendre les décisions qui les concernent. C'est dans ce contexte que nous devons discuter de la coopération bilatérale entre nos pays, afin de construire ensemble un meilleur avenir.

M. Didier Marie. - L'amitié n'empêche pas le réalisme ! Il reste moins de treize mois avant la date de sortie du Royaume-Uni, le 29 mars 2019, qui marquera le début de la période de transition. Or, beaucoup de questions difficiles restent à traiter : le rôle de la Cour de justice de l'Union européenne, le règlement financier, les expatriés, la future coopération économique...

Sur ce dernier point, Mme May a clarifié les choses : elle refuse le marché unique et l'union douanière et souhaite un accord commercial, éventuellement sur le modèle de certains accords existants, comme celui avec le Canada. Cette position pose toutefois des difficultés, notamment au regard de la situation en Irlande du Nord. Comment voyez-vous les choses de ce point de vue ? Je comprends qu'au-delà des considérations juridiques ou économiques, un problème politique se pose, le Parti unioniste démocrate (DUP), qui a passé un accord avec le parti conservateur, refusant tout statut particulier pour l'Irlande du Nord.

M. Tom Tugendhat, président. - Il n'est pas le seul ! Le parti conservateur non plus !

M. Didier Marie. - On le voit, la situation est donc très compliquée, d'autant que Jeremy Corbyn, leader du parti travailliste, a pris le contrepied de la Première ministre, en soutenant le maintien dans l'union douanière, ce qui - il est vrai - irait à l'encontre du Brexit en tant que tel... En effet, le Royaume-Uni ne pourrait pas, dans ce cas, passer d'accords commerciaux avec des pays tiers. Comment démêler ce noeud de contradictions ?

M. Ian Murray (parti travailliste). - J'ai fait campagne contre le Brexit et je suis élu d'une circonscription d'Édimbourg, où 78 % des électeurs ont voté pour le maintien dans l'Union européenne, mais le résultat est celui que nous connaissons ! À ce stade, je crois qu'il est important que nos collègues français comprennent ce qui s'est passé pour ne pas renouveler les mêmes erreurs. Il faut vraiment que l'Union européenne se saisisse des questions qui ont abouti au Brexit.

Par ailleurs, beaucoup d'hommes politiques européens estiment que la situation actuelle est d'une grande confusion - notre collègue a parlé de « mess » ! La raison de cette confusion vient de la position du Gouvernement britannique, qui a fixé des lignes rouges de facto incompatibles, à mon sens, avec les objectifs affichés... Par exemple, en Irlande du Nord, comment avoir des frontières libres et ouvertes, tout en se retirant de l'union douanière et du marché unique ?

Enfin, je voudrais poser une question à nos collègues français : quelle sera leur position s'ils estiment que le résultat final des négociations entre l'Union européenne et le Royaume-Uni n'est pas du meilleur intérêt pour la France ?

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Je vis une partie de l'année à Londres, puisque je suis mariée à un Anglais depuis trente-trois ans...

M. Tom Tugendhat. - Toutes mes félicitations !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - J'ai d'abord été représentante des Français de Grande-Bretagne et d'Irlande au sein du Conseil supérieur des Français de l'étranger, puis sénatrice élue par les Français de l'étranger. Je me suis battue pendant des années contre les idées pernicieuses contre l'Union européenne répandues en Grande-Bretagne. De ce fait, je n'ai pas été surprise par le mauvais résultat du référendum, auquel je m'attendais un peu.

En tant que Française, mais comme tous mes amis de Grande-Bretagne, j'ai constaté le travail pernicieux de la presse. Jacques Delors, haï en Grande-Bretagne du fait de cette presse, m'avait dit ne pas comprendre les journalistes britanniques : selon lui, ils étaient les meilleurs, les plus au fait des dossiers, posaient les questions les plus pertinentes, mais leurs articles allaient systématiquement au rebours de ce qui leur avait été dit et de ce qu'ils avaient compris. Cette observation me semble symbolique de la situation et explique la détérioration de l'image de l'Union européenne dans votre pays.

Comment faire pour répondre aux inquiétudes des ressortissants français, très nombreux en Grande-Bretagne, et à celles des ressortissants britanniques, très nombreux dans l'Union européenne, notamment en France et en Espagne ? Certes, lors de la réception qui a eu lieu à l'occasion du sommet franco-britannique, Mme Theresa May a assuré que personne chez vous ne voulait voir les ressortissants européens partir, mais comment répondre concrètement à leur inquiétude ? Comment utiliser cette question pour peser sur les négociations et essayer d'obtenir plus que les cinq années qu'elle a évoquées ? Comment vous aider ?

M. Chris Bryant (parti travailliste). - Nous allons devoir faire preuve de « sagesse normande » ! Il faut que vous compreniez que nous voulons deux choses qui s'excluent mutuellement : nous voulons récupérer le contrôle de nos frontières, mais nous ne voulons pas de contrôles à la frontière entre l'Irlande et le Royaume-Uni. C'est incohérent du point de vue logique, c'est comme croire aux licornes ! De nombreux responsables politiques, chez nous, essaient de trouver comment résoudre ce problème de frontière. Inévitablement, la Commission européenne nous dit qu'elle a une réponse : rester dans le marché unique.

Nous nous trouvons bêtes face à cette question. Mme May a déclaré la semaine dernière, dans le discours le plus détaillé qu'elle ait prononcé jusqu'à présent, que nous serions perdants et que nous n'aurions plus un plein accès au marché unique, contrairement à ce qui se disait il y a un an. Je n'ai pas le souvenir qu'un seul Premier ministre dans notre histoire ait jamais promu une politique dont il était convaincu qu'elle n'allait pas dans le sens de l'intérêt économique du pays. On pourrait dire la même chose du parti travailliste... Cela nous prépare de grandes difficultés politiques.

La seule demande que je vous adresserai, c'est que nos deux pays continuent de travailler ensemble dans les nombreux domaines de politique étrangère où ils ont des intérêts communs, comme c'est le cas au Moyen-Orient, au Maghreb, en Russie, en Afrique - par exemple, au large des côtes africaines, les marines française et britannique constituent la force européenne qui lutte contre la piraterie et permet au trafic maritime et au commerce international de se poursuivre. Je suis sûr que cette action perdurera. Nous sommes les deux seuls pays européens qui peuvent mener ce type d'opérations. La Grande-Bretagne devra trouver les moyens, si elle veut rester impliquée dans ces actions, de participer aux décisions. Les institutions, telles qu'elles existent actuellement, ne le permettent pas, mais nous devrons trouver une solution et je pense que les Français devront en parler aux Allemands - et aux autres - pour faire en sorte que cela soit possible.

M. Mike Gapes (parti travailliste). - Je voudrais savoir si le document que j'ai évoqué tout à l'heure a été mis à jour.

M. Tom Tugendhat, président de la délégation. - Vous avez eu raison de poser la question des drones. Le partage de nos équipements militaires n'en est qu'à ses débuts, mais nous devons développer des armements ensemble. Nous avons signé les accords de Lancaster House en 2010 et commencé à réfléchir ensemble au développement de matériels militaires. Il serait bon que cette réflexion se poursuive. Nous avons déjà les drones américains Reapers qui sont excellents, mais construire de tels équipements ensemble serait très intéressant.

Je suis pleinement conscient du problème posé par le futur statut des citoyens français résidant en Grande-Bretagne et des citoyens britanniques résidant dans un autre pays européen. Le problème reste à résoudre. Comme vous le savez, je suis personnellement très impliqué et le Parlement britannique suivra la question de très près. Même si les nouveaux arrivants sont soumis à un nouveau statut, qui reste à définir, nous allons rester un pays ouvert. Il y aura peut-être des contrôles pour certaines professions, mais la porte sera toujours ouverte pour les Français à Londres.

Quand on parle de l'immigration européenne en Angleterre, on parle surtout de l'immigration d'Europe de l'Est. C'est dû à une erreur politique de Tony Blair - en tant que président de commission, je ne devrais pas exprimer un jugement politique - qui n'a pas voulu appliquer le délai de sept ans que l'Allemagne, la France ou l'Italie ont utilisé pour protéger leur marché du travail : il a ainsi provoqué une sorte d'attraction magnétique qui a changé la démographie de plusieurs villes britanniques, ce qui a choqué beaucoup de nos concitoyens et créé une peur qui a influé sur le vote.

En ce qui concerne l'Irlande du Nord, nous avons conscience de demander quelque chose d'énorme. Ce serait une erreur de se dire que tout est la faute du parti unioniste. Il serait inacceptable pour n'importe quel député britannique qu'une partie du Royaume-Uni fasse l'objet d'un traitement différent de celui du reste du pays : comment pourriez-vous traiter la Bretagne ou la Normandie différemment de l'Île-de-France ? C'est un défi énorme, mais nous avons aussi une histoire très forte avec l'Irlande. L'essentiel est de voir que nous ne devons pas construire une Europe qui nuise gravement à l'économie de l'un de ses membres, c'est-à-dire l'Irlande. Une frontière « dure » entre le Royaume-Uni et l'Irlande ne serait pas favorable au Royaume-Uni, mais elle aurait des effets bien pires pour la République d'Irlande, qui dépend énormément du commerce. Nous sommes pleinement conscients de la nécessité de trouver une réponse spécifique et je sais que nous adressons peut-être une requête très exigeante à l'Union européenne en demandant une solution qui ne serait peut-être pas applicable à l'Ukraine ou à un autre pays. Nous le demandons pour nous-mêmes, mais aussi pour nos partenaires et amis irlandais, qui sont aussi vos partenaires et vos amis.

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. - Monsieur le président Tugendhat, je voudrais tout d'abord saluer votre honnêteté intellectuelle. Vous êtes l'un des premiers responsables politiques anglais qui ait osé dire : « Nous allons rester un pays ouvert et nous sommes conscients que les décisions prises par Tony Blair ne sont pas totalement étrangères au résultat du référendum de juin 2016. » Lorsque David Cameron a fait le tour des 27 capitales en préparant ce référendum, il a obtenu un certain nombre d'avancées, dans ce que l'on a appelé le « paquet Tusk ». Si vous étiez resté dans l'Union, celle-ci ne serait plus la même aujourd'hui. Était prévue, par exemple, la définition de clauses de sauvegarde avec des systèmes de cliquet, susceptibles d'être mises en oeuvre lorsque le nombre de ressortissants d'Europe de l'Est risquait d'être déstabilisant. Le peuple britannique en a décidé autrement, dont acte.

Vous avez choisi de sortir et vous êtes de grands démocrates. Vous êtes donc obligés de légiférer sur une décision « populiste », parce qu'un certain nombre de grandes figures politiques anglaises ont eu recours à la désinformation - je ne citerai pas de noms...

Pour répondre à M. Mike Gapes sur le document que nous avons édité : nous n'avons pas changé de vision depuis l'élection de M. Macron. Ce document fera l'objet d'un suivi et sera affiné au fil de nos consultations. Je n'ai pas fait campagne pour M. Macron, mais il faut reconnaître qu'il a été le seul candidat à tenir un discours européen courageux. Le discours de la Sorbonne du 26 septembre trace de belles orientations, sur lesquelles nous pouvons nous retrouver.

En ce qui concerne l'Écosse, je comprends le dilemme de M. Stephen Gethins : vous êtes embarqués dans une Grande-Bretagne qui a fait un choix. Pour répondre indirectement à MM. Rosindell et Murray, puisque les Anglais ont demandé à partir, c'est à eux de formuler le mode d'accord économique qu'ils souhaitent : « Messieurs les Anglais, tirez les premiers ! » Nous tenons au marché unique comme à la prunelle de nos yeux, ce qui implique le respect des quatre libertés. Je me réjouis que vous envisagiez de rester un pays ouvert - nous l'avions déjà pressenti lors de nos discussions avec les milieux économiques. Vous pratiquerez une immigration positive en fonction de vos besoins, notamment pour les emplois les moins qualifiés - bâtiment, restauration, etc.

Je ne suis absolument pas inquiet pour la coopération militaire, la lutte contre le terrorisme, car il y aura des accords et des politiques sectorielles. Quelques esprits malins prédisent que les choses seront plus faciles, car vous tomberez plus facilement d'accord sur une politique spécifique. Les valeurs qui nous unissent - en tant que Normand, je me souviens de ce qui s'est passé il y a soixante-dix ans - font que les échanges d'informations, de données essentielles pour la protection de vos ressortissants et des nôtres sont des enjeux qui dépassent le vote du 26 juin - heureusement !

En ce qui concerne l'économie, le passeport européen, il y aura des équivalences, mais ce ne sera pas pareil. Sur les échanges, il n'y aura pas de droits de douane, selon nos dernières informations, mais attention aux barrières non tarifaires, qui ont un coût.

La balle est dans votre camp et notre intérêt à tous est de trouver le meilleur accord. Il ne nous reste que quelques mois pour déclencher la période de transition. En l'absence de proposition, il n'y aura pas de période de transition et ce sera la « falaise »...

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. - Tout d'abord, il me semble que ces rencontres sont tout à fait essentielles. Dans ce débat, les Parlements ne font pas assez entendre leur voix. Nous rencontrons régulièrement vos collègues de la commission de la défense, mais il serait utile d'en faire autant avec vous. La dimension démocratique et parlementaire, dans deux pays qui ont une longue tradition dans ce domaine, doit peser de tout son poids. J'ai suivi le débat entre votre gouvernement et votre Parlement sur l'accord Brexit pour définir les rôles respectifs : vous avez fait entendre votre voix. Certains d'entre vous ont demandé ce que ferait notre Parlement si les négociations n'aboutissaient pas ou si leur résultat ne lui convenait pas : celui-ci conserverait sa liberté d'appréciation.

L'observation de Ian Murray est très juste : nous devons, nous aussi, bien comprendre ce qui a pu mener au vote du Brexit. J'accompagnais Jean-Pierre Raffarin à la Chambre des communes quelques jours avant le vote, et nous pensions tous que l'issue serait favorable. Nous avons été surpris, mais plusieurs d'entre vous avaient attiré notre attention sur le risque profond d'un vote négatif, eu égard notamment à la problématique de l'immigration. L'Union européenne n'a pas encore fait l'examen complet des difficultés qui l'assaillent. Quand notre groupe de travail suit le Brexit, mais réfléchit aussi à la refondation de l'Europe, c'est bien de ces sujets qu'il convient de parler. Nous avons attendu la formation du nouveau gouvernement allemand pour pouvoir recommencer à travailler avec nos collègues allemands et, comme vous, nous éprouvons quelques inquiétudes au vu du résultat des élections italiennes.

Nous allons, nous aussi, nous livrer à cet examen de conscience, parce que l'Europe, telle qu'elle continue à fonctionner, s'est séparée de l'opinion publique. Nous avons pu le voir au fil des élections européennes : près d'un quart des députés européens français sont issus d'une formation extrême, c'est déjà un signal très fort.

Il faut un accord, le meilleur possible. Chacun fera des efforts. Nous comprenons bien la problématique de l'Irlande : nous nous sommes d'ailleurs rendus à la frontière pour voir comment les choses se passent. Ce n'est qu'en se penchant sur la réalité concrète que l'on peut comprendre la situation et l'expliquer correctement à l'opinion publique. Nous entendons trop souvent dire dans nos circonscriptions : « S'ils veulent partir, qu'ils s'en aillent ! » Mais, quand ils commencent à réfléchir, les gens comprennent l'intérêt de continuer à travailler ensemble.

Un mot sur la défense : nous avons absolument besoin d'approfondir et d'intensifier notre travail. Nous sommes les seuls pays d'Europe à disposer d'une armée susceptible de relever les défis de la sécurité ; il faut donc aller plus loin.

Je me réjouis de ces rencontres et souhaite qu'elles s'intensifient. Puisque plusieurs d'entre nous ont fait état de leurs liens familiaux, je vous rappellerai que mon arrière-grand-oncle, l'ambassadeur Paul Cambon, a signé le traité de l'Entente cordiale, ce qui lui avait valu de danser avec la reine !

La réunion est close à 17 heures 45.