Mardi 5 mai 2020

- Présidence de Mme Catherine Morin-Desailly, présidente -

La téléconférence est ouverte à 17 heures.

Conséquences de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19 sur le secteur du sport - Audition de Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports (par téléconférence)

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Nous accueillons aujourd'hui Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports, pour une audition organisée en visio-conférence. Le secteur du sport est, avec ceux de la culture et de l'éducation, un des plus touchés par la crise sanitaire. Les stades et les salles de sport ont été fermés dès la mi-mars. Les athlètes ont été privés d'entraînement. Les contrôles antidopage sont, par ailleurs, beaucoup plus difficiles à mettre en oeuvre dans ces conditions, avec les inquiétudes que cela peut créer.

Plusieurs événements qui devaient se dérouler ce printemps ou cet été ont été reportés - je pense au tournoi de Roland-Garros, au Tour de France cycliste, à l'Euro 2020 et aux jeux Olympiques de Tokyo. Si les championnats amateurs ont été rapidement écourtés, il a fallu attendre la semaine dernière pour que, à l'initiative du Gouvernement, les championnats professionnels soient à leur tour définitivement interrompus pour la saison en cours. Cette situation n'est pas sans poser des questions d'insécurité juridique, qui ont amené le Gouvernement à préparer des projets de loi d'habilitation à légiférer par ordonnances. Vous aurez l'occasion, j'imagine, de nous en dire un mot.

Vous nous présenterez aussi l'action de votre ministère dans les différents moments de cette crise : la phase d'urgence, la phase de déconfinement qui devrait intervenir partiellement la semaine prochaine, puis le plan de soutien ou de relance à destination des acteurs, dont chacun d'entre nous est convaincu de la nécessité. Nous sommes très impatients de vous entendre. Nous sommes aussi très intéressés par le sport dans les territoires. Les élus locaux et les sénateurs sont très mobilisés sur ces sujets.

À l'issue de cette présentation, je donnerai la parole à notre rapporteur chargé des crédits du sport, notre collègue Jean-Jacques Lozach, auquel vous pourrez répondre en détail, puis aux orateurs désignés par chaque groupe politique. Je précise que cette audition est ouverte à la presse et qu'elle fera l'objet d'un compte rendu publié sur le site du Sénat.

Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports. - Je vous remercie de m'avoir conviée à cet échange, après plus de deux mois de crise et au lendemain de l'intervention du Premier ministre au Sénat. Je souhaite pouvoir aborder avec vous l'ensemble des actions du ministère des sports pour faire face au Covid-19, concrètement et en toute transparence. Je vous demande un regard tout à la fois critique et bienveillant. J'ai besoin de vos observations, de vos remarques, de vos questions et de vos propositions.

Pour que les mesures de précaution sanitaire indispensables à la réussite de ce déconfinement entrent dans le quotidien des Français, elles doivent être acceptées. Pour être acceptées, elles doivent être comprises. Pour être comprises, elles doivent être entendues. Nous devons les diffuser et les expliquer, et nous comptons sur vous pour cela. Il nous appartient aussi - et c'est tout l'intérêt de notre échange - de les préciser, de les affiner et de les rendre intelligibles. Chaque ministre y travaille dans son domaine.

Notre société tout entière doit faire bloc. Nous devons être solides et inventifs, sûrs de nos valeurs et de nos priorités. En tant qu'élus de la Nation, passionnés par le sport, vous avez un rôle important à jouer pour aider le sport à relever le plus grand challenge qu'il ait jamais eu à relever.

Ce défi, depuis le début de la crise, l'ensemble des acteurs du mouvement sportif en a pris la pleine mesure. Je tiens à souligner l'esprit de solidarité et de responsabilité qui l'a constamment guidé. Cela s'est traduit par l'affirmation forte et claire de la prééminence des principes de sécurité sanitaire sur la continuité de la pratique sportive. Un esprit d'unité et une véritable volonté de collaboration ont régné autour des réflexions et dispositifs mis en place par le ministère comme par les autres acteurs. Pourtant, ce n'était pas une évidence, car, à l'image de l'ensemble de la société, l'écosystème sportif est cruellement touché par la crise. Les conséquences sont désastreuses pour sa viabilité économique et les emplois qui en dépendent. Chaque club et association, chaque fédération, chaque sportif professionnel, chaque entreprise privée en a souffert et en souffre encore. Certains sont en péril.

Les agents de mon ministère ont été exemplaires, qu'il s'agisse des agents de la direction des sports, de nos services déconcentrés ou de nos établissements. Leur engagement, leur disponibilité et leur vision de l'intérêt général ont constitué des atouts capitaux dans la gestion de cette crise.

Alors que les conditions du confinement sont désormais posées, il est impératif de conserver cet état d'esprit. L'enjeu est de partager toutes les informations disponibles, tout particulièrement auprès de notre réseau de petites associations sportives. De ce point de vue, je veux insister sur le rôle central des collectivités territoriales, proches de ces petites associations qui maillent notre pays. Représentants des collectivités, vous jouez aussi un rôle essentiel. Je compte sur vous et suis prête, avec mes équipes, à continuer à échanger avec vous. Nous pourrions d'ailleurs envisager ensemble de nouvelles modalités pour le faciliter.

Pour gérer la crise, nous avons choisi une méthode collaborative. Dès le 25 février dernier, une cellule de crise quotidienne s'est réunie avec toutes les têtes de réseaux de la gouvernance du sport en France : le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), le Comité paralympique et sportif français (CPSF), le Comité d'organisation des jeux Olympiques (COJO), l'Association nationale des directeurs techniques nationaux (AsDTN), la direction interministérielle aux grands événements sportifs (Diges), le ministère de l'Europe et des affaires étrangères via l'ambassadrice pour le sport, l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (Insep), la direction des sports, l'Agence nationale du sport (ANS) et les représentants des collectivités territoriales. Dans le même temps, le directeur des sports a engagé un plan strict de continuité de l'activité du ministère et entretenu un dialogue social étroit avec les représentants de ses agents.

Ce système de dialogue permanent nous a permis de réagir ensemble au gré des informations disponibles chaque jour et d'éviter les interventions cacophoniques ou contradictoires. La qualité de cette collaboration se fonde sur une confiance mutuelle, construite, depuis plus d'un an, au travers de l'ANS, avec les représentants de l'Association des maires de France (AMF), de l'Assemblée des départements de France (ADF), de Régions de France ou de France Urbaine. Nous pourrons évoquer, d'ailleurs à l'occasion de nos débats, à quel stade d'avancement en est la déclinaison territoriale de l'ANS.

Cette méthode collaborative a contribué à un pilotage transparent et partagé de toutes les problématiques qui ont émergé successivement. Elle a aussi permis de dégager très tôt trois principes directeurs : la primauté stricte des enjeux sanitaires sur les enjeux de continuité sportive ; le respect de la doctrine édictée par le ministère des solidarités et de la santé, sans chercher à développer une analyse sanitaire propre au ministère des sports ; et, enfin, la volonté de ne pas se substituer aux autorités préfectorales et locales, qui sont au plus près des réalités des territoires.

Dans un souci de brièveté, je n'évoquerai pas toutes les questions qui se posent à nous, comme les effets du report des jeux de Tokyo et ses éventuelles conséquences sur Paris 2024, ou encore les réformes qui étaient en gestation avant la crise, et qui sont au repos aujourd'hui : je pense notamment à la réforme de l'organisation territoriale de l'État ou aux cadres techniques sportifs. Nous y reviendrons, je pense, dans nos échanges.

J'aborderai rapidement la question de la gestion de la crise en phase de confinement, puis en phase de déconfinement, dans laquelle nous sommes, et enfin la préparation de l'après.

Grâce à la cellule de crise, nous avons pu répondre d'une même voix aux interrogations de toutes les fédérations, de centaines d'organisateurs d'événements sportifs et de dizaines de milliers de clubs.

Nous avons travaillé sport par sport, pratique par pratique, événement par événement. Nous avons aussi avancé sur de nombreuses autres dimensions. J'en détaillerai trois : l'accompagnement économique, la mise en place de dispositifs solidaires et la proposition d'offres aux Français pour faire du sport chez soi.

Les pertes du mouvement sportif sont estimées à ce stade à une vingtaine de milliards d'euros, mais ce chiffre est sans doute au-dessous de la réalité. J'ai veillé à ce que tout l'écosystème sportif bénéficie des dispositifs de soutien gouvernemental appliqués au monde économique : chômage partiel, exonérations et report de charges, prêts garantis par l'État par exemple. D'autres dispositifs de soutien sont encore en cours de réflexion.

Nous menons également un travail spécifique concernant la reprise et le soutien au sport professionnel, qui ne reprendra pas, au moins, avant août prochain. Je m'emploie beaucoup aussi à ce que les positions des diffuseurs de télévision et des ligues professionnelles se rapprochent. On note des progrès, car les positions étaient assez lointaines.

Nous avons aussi avancé sur le thème « sport et solidarité ». Nous avons mobilisé l'ensemble des ressources humaines de l'écosystème du sport, dès la mi-mars, pour des missions de solidarité, comme l'aide alimentaire par exemple. Il s'agit de nos 170 000 éducateurs sportifs et, sur la base du volontariat, des agents du ministère. Je tiens aussi à souligner la mobilisation de nombre de nos fédérations à nos côtés, comme la Fédération française de sauvetage et de secourisme, la Fédération française de tennis ou la Fédération française de football, qui ont mis certaines de leurs installations à disposition des sans-abri, ou des clubs comme l'Olympique de Marseille ou le Paris Saint-Germain. De même, l'Insep ou les centres de ressources, d'expertise et de performance sportive (CREPS) ont mis à disposition leurs locaux pour soutenir l'activité de nos hôpitaux.

J'en viens à la promotion du sport à la maison. Cette période de confinement et de télétravail a démontré plus que jamais l'importance de l'activité sportive dans l'équilibre personnel de nos concitoyens, pour leur bien-être comme pour leur santé. Elle pose plus encore la question de la place accordée au sport dans notre société. Nous avons soutenu et promu de nombreuses offres de start-up qui proposaient gratuitement des contenus visant à aider à faire du sport à la maison. Le ministère a également créé sa propre plateforme bougezchezvous.fr. Toutes ces initiatives ont été et sont toujours, je crois, très utiles pour mieux vivre cette période difficile de confinement.

Avec Jean-Michel Blanquer, Gabriel Attal et le ministère de l'éducation nationale, nous sommes aussi en train d'envisager les voies et moyens qui permettraient aux écoles de bénéficier du tissu associatif sportif et des clubs pour la reprise progressive de l'école dans les prochains temps, dans le cadre d'un nouveau dispositif appelé « Sport, santé, culture, civisme » (2S2C). Les solutions devraient être trouvées très localement, mais cela semble à notre portée et à celle des collectivités.

Nous allons rentrer dans une phase nouvelle de la gestion de la crise : une première phase de déconfinement. La pratique sportive va reprendre à compter du 11 mai, progressivement, pour limiter les risques de contamination. J'ai proposé au Premier ministre une doctrine de reprise par étapes, qui autorise d'abord uniquement la reprise des activités individuelles extérieures. Ces activités devront respecter des critères de distanciation adaptés à chaque discipline : dix mètres d'écart entre les personnes pour un footing ou le vélo, un espace de quatre mètres carrés par personne et dans un périmètre de 100 kilomètres autour de chez soi. Jusqu'au 2 juin minimum, les rassemblements autorisés seront limités à dix personnes. La reprise des activités en espace intérieur et des sports collectifs ne sera envisagée que dans une seconde phase, selon l'évolution de la pandémie.

Le ministère des sports est en train d'établir une liste précise des activités autorisées, pour que chacun puisse savoir s'il peut pratiquer son sport favori et dans quelles conditions. Plusieurs guides pratiques sont en cours de préparation avec tous nos partenaires et devraient pouvoir être publiés dans les tout prochains jours. Il s'agira de guides précis, établis sport par sport, avec les fédérations, les ligues ou les clubs professionnels, ou par typologie d'équipements, en lien avec l'Association nationale des élus en charge du sport (Andes), et l'Association nationale des directeurs et intervenants d'installations et des services des sports (Andiiss). Il y aura aussi un guide à destination de nos sportifs de haut niveau, qui a été préparé avec la cellule haute performance, et un guide sanitaire et médical. Nous publierons aussi des précisions concernant la reprise du sport à l'école. Chacun de ces guides sera validé par les autorités sanitaires.

De manière générale, autoriser à nouveau la pratique des sports à contacts ou collectifs ne semble pas aujourd'hui compatible avec la doctrine sanitaire. Les compétitions sportives, y compris professionnelles, même à huis clos, resteront interdites, au moins jusqu'au mois d'août. Les manifestations sportives rassemblant plus 5 000 personnes sur un même lieu ne seront pas possibles non plus jusqu'à fin août ou début septembre 2020.

J'échange actuellement avec mes homologues européens pour améliorer notre coordination. Chaque pays a été touché de manière différente, impliquant des réponses adaptées, mais je crois beaucoup dans les vertus de ces échanges. Ils sont essentiels pour garantir la meilleure reprise pour tous de nos championnats nationaux et européens.

Nous sommes conscients des conséquences économiques lourdes générées par le caractère progressif du déconfinement. Cela paraît néanmoins indispensable pour qu'il soit efficace et pour éviter tout risque de reprise massive des contaminations.

En fonction de l'évolution concrète de la pandémie, il conviendra de revoir ces modalités, d'ici à la fin mai. D'ores et déjà, plusieurs pistes commencent à être envisagées. Je veux rappeler toutefois que les interdictions que j'ai évoquées jusqu'à août prochain sont, pour nous, des objectifs réalisables si la situation sanitaire s'améliore conformément à nos attentes. Il nous faut donc avoir l'humilité et l'honnêteté de dire que ce calendrier pourrait être repoussé, mais certainement pas avancé. Je serai évidemment pleinement à l'écoute de vos différentes interventions et de vos retours de terrain sur ces sujets.

Nous devons aussi nous projeter sur « l'après », d'envisager les pistes qui nous permettront de soutenir l'ensemble du mouvement sportif gravement touché dans la période. Le risque, que nous devrons collectivement surmonter, est celui de l'affaiblissement des associations sportives, de leur structure financière et de leurs emplois. Le risque est aussi celui de la baisse de l'engagement sportif à la reprise, des bénévoles comme des pratiquants.

Nous devons donc penser déjà à un plan de relance global et coordonné avec l'ensemble des acteurs, notamment les collectivités territoriales. Nous avons déjà engagé ce travail avec tous nos partenaires, en identifiant plusieurs thématiques stratégiques : le soutien à la pratique ; le soutien aux fédérations et aux clubs ; les déclinaisons territoriales et l'emploi ; la place des services de l'État, des établissements, de l'ANS, de la formation et du sport de haut niveau ; enfin, le soutien économique aux acteurs et au sport professionnel, grâce à la mobilisation de Bpifrance, de France Sport Expertise, ou de Business France.

Je souhaite vous associer au mieux à toutes nos réflexions autour de ce plan de relance, qui devra aussi faire l'objet d'aménagements législatifs et réglementaires. Après la première loi d'urgence du 23 mars 2020, de nombreuses ordonnances adoptées ont concerné le sport, sur les plans administratif, social ou financier. C'était indispensable pour aider nos associations et nos agents économiques. Une seconde loi d'urgence devrait permettre de sécuriser les décisions des fédérations et des ligues professionnelles face aux risques de contentieux en ce qui concerne l'arrêt de leurs compétitions 2019-2020, sans pour autant interdire d'éventuels recours. Enfin, un décret « sport » est également en préparation pour prendre en compte les évolutions réglementaires liées à la crise et au report des jeux de Tokyo de 2020 à 2021. Il concernera en particulier la possibilité pour les fédérations de décaler jusqu'au 30 avril 2021 le renouvellement de leurs instances dirigeantes.

Au-delà de ces évolutions, nous devons déjà nous projeter un peu plus loin pour penser au sport d'après la crise et approfondir nos réflexions sur la place qu'il devrait occuper dans notre société. Là, encore, j'aurai besoin de vous.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Je vous remercie d'avoir rappelé que le sport regroupe à la fois le monde professionnel et la pratique amateur. Il s'ancre dans des territoires et les collectivités territoriales jouent un rôle important. Vous avez aussi souligné que le sport constitue un secteur économique, avec des enjeux financiers non négligeables, et l'interruption du versement des droits télévisés risque de le fragiliser.

Je vous prie de bien vouloir m'excuser, mais je dois vous quitter avant le terme de l'audition : je dois intervenir en séance, dans le cadre du débat sur la prolongation de l'état d'urgence. Je cède donc la présidence à M. Leleux.

- Présidence de M. Jean-Pierre Leleux, vice-président -

M. Jean-Jacques Lozach- Merci, madame la ministre. Vous avez détaillé l'action de votre ministère et du Gouvernement. Le sport est fortement frappé par la crise. Les clubs et les associations sont victimes d'un effet ciseau, entre la baisse de leurs recettes et le maintien de leurs charges fixes. Dès lors, pourriez-vous nous en dire plus sur les priorités du plan de relance que vous envisagez et sur ses modalités de financement ?

Vous avez dressé le bilan de la loi instituant l'Agence nationale du sport, dont notre collègue Claude Kern était le rapporteur, mais beaucoup de décrets d'application ne sont pas encore parus, qui auraient facilité la déclinaison territoriale de l'agence. Ces décrets seront-ils bientôt publiés ?

Le sport professionnel semble riche, en particulier le football et le rugby, mais, avec la crise, il apparaît un petit peu comme un colosse aux pieds d'argile. Patrick Wolff, le président de l'association des ligues de sport professionnel, nous indiquait ce matin que les clubs pourraient tenir financièrement jusqu'à la fin du mois d'août, mais craignait des difficultés par la suite. Ne faudrait-il pas repenser le modèle, très inflationniste, du sport professionnel, qui semble vivre un petit peu au-dessus de ses moyens ?

Enfin, le débat est-il définitivement clos sur le calendrier de reprise et la possibilité d'organiser des événements sportifs à huis clos en août - je pense notamment aux finales de la Coupe de France de football ou de la Coupe de la Ligue ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre. - Je veux rappeler l'importance de l'ANS, qui a permis la mise en place d'une gouvernance partagée, en associant tous les acteurs et, notamment, les collectivités territoriales. Les décrets que vous évoquez sont presque finalisés.

Le plan de relance devra s'articuler avec les actions entreprises à tous les niveaux : local, départemental, régional et national, mais aussi privé, car le sport bénéficie de financements de sources très diverses. Le ministère a pleinement défendu la place du sport. Celui-ci relève, en France, de la compétence de l'État, à la différence de certains de nos voisins. C'est ce qui nous a conduits, en toute connaissance de cause, à annoncer la suspension des compétitions. L'État jouera son rôle et nous serons attentifs à la déclinaison territoriale du plan de relance. Il s'agit de soutenir l'emploi, d'aider les petites associations tout comme le monde du sport professionnel. Les clubs souffrent de la perte des recettes de billetterie et de l'interruption du versement des droits de retransmission audiovisuelle, car les diffuseurs n'ont pas joué le jeu, alors que leurs charges fixes demeurent. Ils sont donc pris en étau. Les mesures que nous avons prises, en faveur du chômage partiel ou avec les prêts garantis, constituent une aide précieuse, mais elles ne pourront pas durer toujours.

La Ligue de football professionnel proposait de reprendre les compétitions le 13 juin, pour finir la saison le 3 août. Comme le Premier ministre l'a indiqué lors de la présentation de la stratégie de sortie du confinement, les saisons des sports professionnels, notamment celles de football ou de rugby, sont terminées. Cette décision était inéluctable dès lors que l'on veut respecter les mesures de prévention sanitaire, fondées sur la distanciation sociale, les gestes barrières et la limitation des déplacements. Il reste une incertitude pour l'organisation d'événements sportifs en août, qui peut être envisageable, avec un nombre limité de personnes, si l'évolution de l'épidémie est positive et que nous n'avons pas à redescendre d'une marche dans le confinement. Toutefois, quoi qu'il arrive, les événements qui regroupent plus de 5 000 spectateurs ne pourront se tenir avant septembre. Une inconnue tient aussi aux possibilités d'entraînement, car, avant de reprendre la compétition, les sportifs doivent pouvoir s'entraîner ensemble ; or, dans les conditions sanitaires actuelles, cela n'est pas possible. Cela vaut aussi pour les sports de contact.

Dans les sports individuels, en revanche, il sera possible de reprendre l'entraînement. C'était une mesure très attendue.

M. Michel Savin. - Les fédérations et les clubs amateurs craignent de voir le nombre de licenciés chuter l'année prochaine, de l'ordre de 5 à 10 %. Comment les soutenir ?

Le monde du sport de haut niveau est préoccupé par la baisse du nombre de contrôles antidopage. Quelles mesures allez-vous prendre pour rétablir ces contrôles ?

Vous avez évoqué l'association entre les collectivités territoriales et l'Éducation nationale à travers le dispositif 2S2C. Le Premier ministre a annoncé des aides aux collectivités territoriales. Pourriez-vous nous donner des précisions à ce sujet ? De même, pourriez-vous nous donner des précisions sur le calendrier de réouverture des piscines, car les collectivités sont en train de recruter les maîtres-nageurs ?

Une ordonnance, en préparation, prévoit d'autoriser les clubs ou les organisateurs d'événements sportifs qui ont été annulés à proposer aux titulaires de billets ou d'abonnements des avoirs, au lieu de remboursements. Pourquoi ne pas instaurer plutôt un crédit d'impôt ? Cela soulagerait la trésorerie des clubs. Les recettes des clubs professionnels reposent essentiellement sur la billetterie, plus que sur les droits de retransmission audiovisuelle. Ils craignent une baisse du nombre de spectateurs à la rentrée. Là encore, quelles mesures envisagez-vous pour les soutenir ?

M. Claude Kern. - Je me permets de vous reposer la question de Jean-Pierre Leleux sur les décrets concernant le fonctionnement territorial de l'ANS, car vous n'y avez pas répondu : quand paraîtront-ils ? Allez-vous tenir compte de nos propositions ?

Vous avez rappelé l'importance économique du sport et le nombre d'emplois directs ou indirects induits. Les clubs rencontrent des difficultés financières à cause de la crise. Certes, le Gouvernement a mis en place des aides, mais celles-ci ne suffiront pas à compenser les pertes de recettes. Ne conviendrait-il pas d'envisager d'autres solutions, comme une baisse de la TVA, une baisse des charges ou un relèvement du plafond de la réduction d'impôt au titre des dépenses de mécénat dans le sport ou de sponsoring ?

Vous avez dit que le débat sur la date de la reprise était clos. Mais avant de pouvoir reprendre, les sportifs ont besoin de plusieurs semaines d'entraînement. Autant le confinement pouvait être brutal, autant la reprise de la compétition ne pourra être que progressive. L'Union des associations européennes de football (UEFA) envisage une reprise de la Ligue des champions en août. Le Paris Saint-Germain et l'Olympique Lyonnais, qui sont encore en course, risquent d'être pénalisés, alors que les clubs espagnols, italiens ou allemands auront déjà repris l'entraînement. De même, comment envisagez-vous la reprise pour les sports en salle, comme le basketball, le handball, ou le volleyball ?

M. Jacques-Bernard Magner. - J'aurai une critique et une question. Une critique, tout d'abord : pendant le confinement, le sport n'a pas eu la part qu'il méritait. On a privilégié la restriction. Il aurait certainement été possible de maintenir la pratique d'activités sportives individuelles, avec des conditions, mais la limitation de la pratique sportive à un rayon maximal d'un kilomètre autour du domicile était pour le moins ridicule et difficile à faire respecter !

Une proposition, ensuite. Pendant des années, les petits clubs et le monde amateur ont pu bénéficier d'emplois aidés. Mais la ministre du travail a eu la bonne idée de les supprimer... Le nouveau dispositif n'est pas adapté. Or on compte beaucoup sur le monde associatif lorsqu'il y a une crise. Aujourd'hui, les besoins sont énormes. Ne pourrait-on pas rétablir ces emplois aidés pour les collectivités territoriales et les associations sportives ?

Certains clubs professionnels et certaines fédérations disposent de moyens considérables grâce aux droits de retransmission audiovisuelle et mènent grand train, mais ne soutiennent guère le monde amateur. Comment comptez-vous aider ce dernier ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre. - En ce qui concerne les associations, nous travaillons à un plan de relance, qui ne sera pas uniquement ministériel, mais qui sera réalisé en lien avec toutes les fédérations. Celles-ci ont tout à fait conscience que la situation des clubs amateurs est difficile. Monsieur Magner, je ne partage pas votre point de vue, car beaucoup de Français ont découvert le sport à l'occasion de cette crise. Le sport figurait d'ailleurs parmi les cinq exceptions de sortie autorisées - ce n'était pas le cas en Espagne ou en Italie. Le Premier ministre a insisté à plusieurs reprises sur l'importance de pratiquer un sport pour la santé. Cette reconnaissance du rôle du sport en termes de santé publique constitue un bon signal. L'enjeu aujourd'hui est de ramener le public vers les associations sportives, en surmontant la peur de la maladie. Nous devons travailler à une campagne nationale de communication en ce sens auprès du public, tout en déployant évidemment des aides pour soutenir les emplois ou contribuer aux frais de fonctionnement.

Une ordonnance est en préparation qui s'inspire du tourisme et autorise les organisateurs d'événements sportifs à proposer aux détenteurs de billets un avoir, au lieu d'un remboursement, afin de soulager leur trésorerie. Nous n'avons pas voulu aller jusqu'au cas des associations, laissant le soin aux fédérations de gérer la situation avec leurs licenciés. Je note avec intérêt votre proposition de crédit d'impôt et nous y réfléchirons avec attention. Les clubs dépendent aussi des financements privés. Or, ceux-ci risquent de diminuer avec la baisse des dépenses de publicité et de communication. C'est pourquoi nous sommes en train d'étudier avec Bercy des manières d'inciter les entreprises à maintenir leurs investissements dans le sport.

En ce qui concerne les équipements sportifs et les piscines, nous travaillons avec l'Andiiss et l'Andes à un plan de réouverture dès que les conditions sanitaires le permettront. Je sais très bien que la préparation physique ne suffit pas et que les nageurs de haut niveau ont besoin d'aller à la piscine pour s'entraîner et pouvoir exercer leur métier, au même titre que les autres professions, mais la réouverture des équipements dépendra de l'évolution de l'épidémie.

Le sport à l'école est important. C'est aussi une opportunité pour les associations de reprendre contact avec les jeunes et les familles. Son développement est au coeur du plan 2S2C sur lequel nous travaillons avec Jean-Michel Blanquer et Gabriel Attal. Nous comptons, d'ailleurs, sur vous aussi pour inciter les collectivités territoriales à rejoindre cette initiative. Nous avons même envisagé avec le mouvement sportif et les associations d'avancer la rentrée sportive, en prévoyant des vacances sportives dès le mois de juillet. Les enfants pourraient ainsi être accueillis dans des stages sportifs à la journée, parallèlement aux activités des centres de loisirs proposées par les collectivités territoriales. De même, les clubs et les associations sportives pourraient proposer des activités lors des colonies de vacances. D'habitude, les clubs s'arrêtent en juillet et en août. Il me semble que, cette année, leur activité devrait plutôt se prolonger. Profitons de l'initiative 2S2C pour nous mobiliser pour accueillir les enfants, avec un nombre d'adultes suffisant pour les encadrer et garantir le respect des normes sanitaires, afin que chacun puisse participer ou envoyer ses enfants en toute confiance.

Les fédérations de sports collectifs ont mis un terme aux saisons en cours. Les compétitions reprendront en septembre, si tout va bien. Certaines fédérations, comme la Fédération française de tennis, la Fédération française de football ou la Fédération française de cyclisme ont créé des fonds de solidarité en faveur du monde amateur. Nous appuyons ces initiatives. De même, l'ANS a maintenu toutes ses subventions et en facilite les modalités d'accès. Nous ne voulons pas non plus supprimer les aides aux organisateurs d'événements sportifs, même si ceux-ci ont dû être annulés.

En ce qui concerne les contrôles antidopage, nous avons rencontré des difficultés, car les personnels de l'Agence française de lutte contre le dopage ont été mobilisés pour faire face à la crise sanitaire. De plus, comme les compétitions ont été supprimées à cause du confinement, le nombre de contrôles a baissé mécaniquement, mais ceux-ci n'ont pas cessé et les sportifs doivent toujours transmettre leur localisation à l'agence. Nous poursuivons aussi notre effort de prévention. Nous avons ainsi préparé un guide spécifique pour le sport de haut niveau, qui explique clairement que le dopage est dangereux pour la santé.

Enfin, les décrets que vous évoquez devraient paraître avant l'été. Nous espérons pouvoir organiser des conférences régionales du sport à la rentrée, avec comme thématique prioritaire le plan de relance dans le sport.

M. Antoine Karam. - Madame la ministre, je vous parle depuis la Guyane. Les outre-mer ont beaucoup apporté au sport français, j'ai en particulier une pensée, que vous partagerez sans doute, pour Malia Metella, première vice-championne olympique de natation issue de l'outre-mer, ainsi que pour son frère Mehdy. Je suis moi-même adepte de sport amateur et je considère que le mouvement sportif est le premier parti de France !

Les associations sportives ont-elles bien bénéficié des dispositifs prévus au même titre que les entreprises en difficulté ? Beaucoup d'actions bénévoles ont été menées dans les clubs, comment s'assurer que ceux-ci ont bien été informés, afin qu'ils ne passent pas à côté des aides financières et organisationnelles auxquelles ils pourraient prétendre pour relancer leur activité dans les semaines qui viennent ? Le sport est en effet un facteur important de socialisation.

Mme Mireille Jouve. - Je partage les préoccupations de mes collègues quant au soutien aux clubs sportifs amateurs, à la baisse des subventions et à la disparition des emplois aidés.

S'agissant de la réouverture de certains équipements sportifs, l'équitation ou le golf se pratiquent dans un cadre spatial peu contraint permettant le respect de la distanciation sociale. La réouverture des parcours de golf et des centres équestres pourrait-elle être envisagée dès le 11 mai, afin de permettre à ces clubs de respirer financièrement ? La même question pourrait être posée à propos de la navigation de plaisance, des sports nautiques et d'autres activités encore.

M. Jean-Raymond Hugonet. - Madame la ministre, vous nous invitez à porter sur votre action un regard critique et bienveillant, je commencerai par la critique. Les propos que vous avez tenus le 22 avril, selon lesquels, par les temps qui courent, « le sport n'est pas prioritaire », étaient d'une grande maladresse, en particulier au vu de la diminution apparente de la surface de votre ministère. Vous avez, certes, rectifié le tir le 24 avril, mais le mal était fait. Pourtant, il n'y a pas de meilleur moment pour promouvoir le sport-santé, un axe important, auquel le Sénat est particulièrement attaché. L'occasion est inespérée : j'ai personnellement vu des gens qui ne couraient jamais s'y mettre. Pourquoi ne vous exprimez-vous pas plus à ce sujet ?

J'ai une pensée, en ce 5 mai, pour mes amis corses : ce jour-là, en 1992, des amateurs de football sont morts en assistant à un match. Pourquoi ne soutenez-vous pas plus Mme Nathalie Boy de la Tour, dans sa tentative de remettre un peu d'humanité dans ce sport populaire ? Les taux d'imposition du football professionnel ne sont pas à la hauteur de ce que celui-ci rapporte ; pourquoi ne vous entend-on pas militer pour plus de raison et de solidarité, en particulier au vu de ce que nous allons vivre après le Covid-19 ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre. - La phrase que vous citez a été reprise par L'Équipe sans être remise en contexte ; répondant à une question sur Eurosport, j'ai dit que la santé primait la reprise des compétitions : la priorité, c'est la vie et la santé des athlètes et de nos concitoyens. Je l'assume particulièrement en ce 5 mai !

On connaît les vertus du sport spectacle professionnel, qui représente la quintessence du sport populaire et son rôle dans le quotidien des Français. Ce secteur dispose d'énormément de moyens. J'ai dit il y a deux jours, provoquant la colère de certains présidents de clubs, qu'il n'était pas normal que l'on ne soit pas plus précautionneux en matière d'investissement. Voyez : en un mois de crise, cet écosystème est à genoux. Ce n'est pas possible. Il faut remettre ce fonctionnement en question. Je discute avec Mme Nathalie Boy de la Tour tous les deux jours, les décisions prises le sont en concertation avec elle et avec les instances du football amateur comme professionnel.

Ce n'est pas facile : dans cette période où les médias sont à la recherche de sujets, ils ne parlent malheureusement que du spectacle et pas du sport-santé ou du sport-inclusion. Le contexte a permis au ministère des sports de sortir des tiroirs des éléments sur ces sujets, mais nous dépendons de l'espace médiatique pour le faire savoir ; or, même pendant cette période, c'est le sport professionnel qui intéresse les médias spécialisés, plutôt que des sujets comme la santé ou l'écologie, alors que les compétitions ne peuvent avoir lieu. C'est incroyable ! Il y a pourtant beaucoup d'autres thèmes à traiter. Nous y travaillons donc, même si nous ne parvenons pas toujours à en parler.

En outre, le déconfinement scolaire est prioritaire et je suis heureuse que le sport vienne, dans ce domaine, en soutien à l'éducation nationale. Je sais qu'Olivier Véran est convaincu par le thème du sport-santé, et nous l'évoquerons avec lui dès qu'il pourra souffler. Comme nous l'avions annoncé avec Agnès Buzyn, nous venons de lancer la deuxième vague de labellisation des maisons sport-santé. Notre engagement à terme est d'en ouvrir 500 - il est tenu - et nous mettons ainsi en réseau des acteurs qui feront du sport un véritable outil de santé publique pour aider les gens, physiquement comme mentalement.

Monsieur le sénateur Karam, je vous le confirme, je me suis battue pour que les associations soient nommément inscrites dans la loi, et c'est bien le cas. Il existe 380 000 associations sportives en France, je ne suis pas en mesure d'adresser un mail à chacune d'entre elles, nous misons sur la communication publique via les fédérations pour faire passer le message, et nous comptons également sur vous, parlementaires. Les associations ont accès au Fonds de solidarité, elles peuvent bénéficier du chômage partiel, de prêts garantis par l'État, et les travailleurs indépendants, les auto-entrepreneurs, peuvent être compensés des non-rentrées d'argent, voire du manque de chiffre d'affaires.

La reprise va être possible pour ces associations et les clubs sportifs, y compris pour ceux qui proposent des sports de contact. Il s'agira alors de proposer d'autres activités, conformes aux règles sanitaires, à leurs adhérents. Nous avons besoin que le monde associatif parvienne à restaurer du lien social, par groupes de plus en plus grands.

M. Michel Laugier. - Qu'en est-il du renouvellement des instances fédérales, repoussé en fin d'année ? Ne serait-il pas préférable de le programmer après les jeux Olympiques, soit vers l'automne 2021 ?

Pourriez-vous préciser l'aide au sport amateur et aux collectivités locales ? La période a donné lieu à des dépenses imprévues et à un manque de recettes, les budgets sont donc limités. En outre, le sport amateur repose également sur l'aide des entreprises locales, lesquelles vont également faire face à des problèmes financiers. Comment envisagez-vous la reprise dans ces conditions ?

Au vu de la cacophonie qui a accompagné la décision de mettre fin aux championnats, notamment de football, ne faudrait-il pas revoir la structure des instances ? Entre fédérations et ligues, il y en a peut-être une de trop.

Mme Céline Brulin. - Le dispositif 2S2C accompagne la reprise de l'école et le ministre, M. Blanquer, ainsi que les autorités académiques fondent beaucoup d'espoir dessus pour accueillir les enfants en petits groupes. Cependant, à chaque fois qu'il est évoqué, c'est pour solliciter l'aide des collectivités territoriales dans sa mise en oeuvre. Pouvez-vous préciser quels moyens votre ministère, en particulier, serait en mesure de déployer, en lien, par exemple, avec les clubs sportifs, lesquels pourraient ainsi relancer leur activité ?

En outre, j'espère trouver en vous une alliée pour obtenir la réouverture des plages. Je suis élue de Normandie, nous disposons de très grandes plages, avec des marées, il faudrait les rouvrir à la pratique sportive, car c'est possible sans créer d'attroupements, notamment à marée basse. Nous pouvons laisser cela à l'appréciation des maires, qui sauront en décider. Ce serait de bon sens : les parcs et les jardins publics seront ouverts, il serait incompréhensible que les plages ne le soient pas, d'autant plus que, dans ce cas, la limite de 100 kilomètres désavantagerait les habitants du littoral en excluant de larges territoires de la pratique sportive.

Enfin, tout le monde réfléchit au monde d'après, certains de mes collègues ont souhaité un plus grand ruissellement des ressources du sport professionnel vers le sport amateur. La pratique sportive s'est développée durant cette période de confinement, mais souvent derrière un écran, et cela pourrait donner lieu à des comportements nouveaux. À l'avenir, comment permettre aux clubs amateurs de prendre leur part de ces nouvelles activités ? Ne pourrait-on pas envisager de créer une plateforme publique proposant des activités en ligne en s'appuyant sur la richesse du tissu associatif de nos territoires ?

Mme Céline Boulay-Espéronnier. - Les salles de sport et de fitness ont fait preuve de beaucoup de créativité et d'adaptabilité pour fonctionner à distance au profit de leurs 6 millions d'adhérents, mais plusieurs patrons d'enseignes du secteur accusent les banques de traîner les pieds pour leur accorder des suppléments de trésorerie, alors même que les salariés ont bénéficié du chômage partiel et que les coachs sportifs indépendants ont été aidés par l'État. Pourriez-vous influer pour les aider ?

Je suis une élue parisienne et je vis à proximité du stade Roland-Garros. Ce tournoi permet à la Fédération française de tennis de financer les 8 000 clubs français. Vous avez annoncé que celui-ci ne pourrait se tenir fin septembre que s'il était possible d'autoriser alors la présence de public. Envisagez-vous de lui permettre de se dérouler à huis clos, le cas échéant, afin de limiter les dégâts ? Il est important qu'il se tienne coûte que coûte en raison de l'impact social et économique de ce sport, auquel je suis moi-même particulièrement attachée.

Enfin, l'organisation des jeux Olympiques de 2024 semble menacée, puisque l'on évoque un surcoût de plus de 3 milliards de dollars en raison du report d'un an des jeux de Tokyo.

Mme Colette Mélot. - Je reviens sur la question concernant la reprise des activités équestres, qui est restée sans réponse : comme d'autres secteurs, les poneys-clubs et les centres équestres ne peuvent recevoir de public en vertu du décret du 23 mars. Malgré les annonces autorisant les groupes de dix personnes en extérieur, ces structures demeurent dans l'expectative. Or, outre les activités équestres de plein air, les manèges revêtent des caractéristiques qui rendent possible le respect des règles sanitaires. À moins d'une semaine de l'échéance, pourriez-vous faire une annonce à ce sujet ?

S'agissant des salles de sport, elles connaissent une application très inégale des règles d'encadrement et des obligations d'hygiène et de sécurité. Les salles low cost, en particulier, fonctionnent sous statut simple de loueur d'espace et s'affranchissent des règles de sécurité. C'est alarmant, d'autant que la réouverture prochaine ne tient pas compte de ces différenciations réglementaires. Ne faudrait-il pas rehausser à long terme les obligations d'hygiène et de sécurité pour l'ensemble des salles et organiser une réouverture différenciée selon le nombre d'adhérents par mètre carré ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre. - Monsieur le sénateur Laugier, le Premier ministre a annoncé la reprise individuelle du sport, amateur comme professionnel, parce que c'était simple : il suffisait d'aller au-delà de la règle du « un kilomètre » et d'élargir la limite de rassemblement à dix personnes. Il reste maintenant à prendre en compte les spécificités de chaque discipline. C'est un travail complexe que nous menons avec les représentants des différents sports : les 114 fédérations ont chacune été chargées, par avance, d'élaborer un guide spécifique. Elles étaient un peu perdues, car elles ne pouvaient pas se projeter sur une date, mais nous leur avons demandé d'y travailler.

Les sports avec animaux relèvent conjointement de mon ministère et du ministère de l'agriculture, qui a soutenu la filière de l'équitation, par exemple, pour tout ce qui concerne la nécessité de nourrir les animaux. Nous travaillons sur leur reprise. S'agissant des pratiques dans les grands espaces : montagnes, mer, lacs, plans d'eau, forêts, la question relève d'un arbitrage interministériel, car, dans les zones rouges, ces espaces resteront fermés, ou seront refermés. Selon le code couleur, il restera possible, pour les préfets, d'aller au-delà ou en deçà des préconisations. Nous étudions, par exemple, la possibilité de mettre en place des plages dynamiques, comme les parlementaires nous l'ont proposé, qui ne soient que des lieux de passage et non des endroits où déposer sa serviette, car il faut se battre contre le relâchement. Nous ne retrouverons pas le bien-vivre ensemble tout de suite.

Nous sommes toutefois conscients que les sportifs de haut niveau doivent pratiquer en mer, de même, les nageurs ont besoin, à défaut de piscines, d'avoir accès à des lacs, à des plans d'eau en plein air, voire à la mer.

La troisième étape sera l'ouverture des équipements au grand public, lorsque cela sera possible. Nous y travaillons, les sportifs, les associations et les fédérations de marche, d'équitation ou d'escalade, qui ont l'habitude des grands espaces, ont besoin d'être rassurés et nous sommes en contact avec eux. Je comprends leur impatience, mais cela ne revêt aucun caractère d'urgence, contrairement au déconfinement scolaire. Il s'agit de sortir progressivement du confinement afin d'éviter l'afflux de populations. Je vous rappelle que le sport est à la jonction entre plaisir, loisir, passion, et métier.

Concernant les salles de sport et de fitness, elles sont considérées comme les autres établissements recevant du public (ERP) et sont contrôlées. Malgré le caractère privé plus qu'associatif de ces structures, les agents de mon ministère ont vocation à opérer ces contrôles et ces salles ne pourront rouvrir qu'en respectant les règles que le secteur aura lui-même édictées. Comme les hôtels et les restaurants, ces établissements auront besoin d'un accompagnement plus important de l'État : ils sont inclus dans le plan de continuation économique jusqu'à la fin du mois de juin, qui prévoit un report de charges, voire une annulation des charges fiscales et patronales, dans des proportions qui vont au-delà de ce qui est prévu pour d'autres secteurs. Nous suivons cette situation de très près.

Vous m'interrogez sur Roland-Garros et sur les grands événements, comme les jeux Olympiques. Notez que les mesures qui s'imposeront pour l'organisation de ces derniers avaient déjà été prévues avant la crise, car nous avions conçu un projet inclusif, écologique et économique puisque 5 % seulement des équipements devront être construits. Il y aura sans doute des dépassements de coûts, mais la situation est contrôlée activement de manière collaborative par l'État et les collectivités territoriales concernées et les ajustements éventuellement nécessaires seront décidés conjointement. Le report des jeux de Tokyo et l'incertitude sur les compétitions à l'avenir sont inquiétants, nous faisons ce que nous pouvons pour rassurer les acteurs concernés.

À mon sens, Roland-Garros n'a de sens que si le public peut y assister. Si ce n'était pas possible, il faudrait au moins que les joueurs puissent s'entraîner, se rencontrer et voyager. Tous les scénarios sont à l'étude, mais ce sont les organisateurs qui ont proposé des reports tant que la tenue du tournoi en configuration classique n'était pas envisageable.

S'agissant du Tour de France, l'Union cycliste internationale (UCI) a annoncé un calendrier prévoyant des compétitions préparatoires en août. Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour que les compétitions puissent reprendre, avec pour priorité la sécurité des sportifs et en anticipant la reprise des entraînements en amont.

La date des élections fédérales a fait l'objet d'un consensus général de toutes les fédérations et du Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et a été fixée au 30 avril de l'année prochaine. Nous pensions aussi que l'on nous proposerait de les tenir après les jeux Olympiques, mais nous avons apprécié cette décision commune comme un geste démocratique marquant l'attachement au respect des mandats et aux modalités d'élection. Les élections au CNOSF auront ainsi lieu au mois de juin ; l'ANS devra donc jouer pleinement son rôle pour assurer la continuité technique et sportive, dans la mesure où la gouvernance sera susceptible de changer quelques mois avant les jeux Olympiques, afin de garantir la stabilité des préparations comme des critères de sélection.

Je n'ai pas l'intention de m'immiscer dans la gouvernance des instances sportives, qui relève d'une réflexion commune à mener entre le sport professionnel, les clubs, la Fédération et la Ligue. Le lien est très fort entre le sport et l'État, je le réaffirme, ainsi qu'entre les ligues professionnelles et les fédérations. Ce sont ces dernières qui signent un contrat de subdélégation avec les ligues, lesquelles ne sont donc pas des entités privées et indépendantes : il existe bien un lien entre le sport professionnel et le monde amateur avec des modalités de redistribution financière et d'équité, dont on peut discuter. Le contexte est en effet propice à réfléchir à tout cela, et j'aurais préféré que les quelques mois de confinement permettent aux acteurs de se poser les bonnes questions plutôt que de se demander quel jour il fallait arrêter le championnat.

Enfin, en ce qui concerne le protocole 2S2C, nous avons mobilisé l'ANS pour réorienter des moyens vers l'éducation nationale ; les fédérations sont très intéressées, car elles recherchent depuis longtemps ce lien avec l'éducation nationale, et le mouvement sportif est très heureux d'y être associé. Les modalités de cette mobilisation feront l'objet de discussions avec les collectivités territoriales.

La téléconférence est close à 18 h 40.

Jeudi 7 mai 2020

- Présidence de Mme Catherine Morin-Desailly, présidente -

La téléconférence est ouverte à 14 h 30.

Conséquences de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19 sur le secteur de l'enseignement agricole - Audition de M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation (en téléconférence)

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Nous continuons notre série d'auditions consacrées à la crise sanitaire en accueillant aujourd'hui Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation, pour évoquer la situation de l'enseignement agricole.

Monsieur le ministre, vous le savez, notre commission est particulièrement attachée à cet enseignement. Il constitue un formidable outil pour les jeunes avec des taux d'insertion professionnelle que je souhaite une fois encore saluer : selon les derniers chiffres, le taux net d'emploi à trois ans après la fin de la formation initiale atteint 76 % chez les titulaires d'un CAP agricole, 82 % pour les titulaires d'un bac pro agricole et 90 % pour ceux titulaires d'un BTS agricole.

Surtout, les établissements de formation agricole sont des laboratoires d'innovation, ancrés dans nos territoires et acteurs de la proximité. Nous avons tous des exemples dans nos départements de lycées agricoles, de maisons familiales rurales dont nous sommes particulièrement fiers.

Toutefois, nous avons noté que ni le Président de la République, ni, plus récemment, le Premier ministre dans ses interventions devant l'Assemblée nationale ou le Sénat n'avaient évoqué la situation particulière des établissements d'enseignement agricole. Déjà, les précisions apportées début avril par Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, sur les modalités du bac 2020, ont suscité de nombreuses critiques parmi les syndicats enseignants de la filière agricole. Ils dénonçaient une décision unilatérale de la part du ministère de l'éducation nationale s'imposant à l'enseignement agricole.

Pouvez-vous nous en dire plus sur l'état de la concertation avec les syndicats, tant au niveau national qu'au niveau régional ? Il semblerait qu'il y ait des difficultés au niveau local avec certaines directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt.

Par ailleurs, pouvez-vous nous faire un état des lieux du suivi pédagogique des élèves pendant la période de confinement ? On parle de 5 à 8 % d'élèves en situation de décrochage dans l'éducation nationale, mais des taux plus élevés pour les lycées professionnels. Qu'en est-il dans l'enseignement agricole ? Quelles solutions ont été mises en place pour permettre cette continuité pédagogique pour les élèves qui ne pouvaient accéder à un enseignement numérique ?

Comment se prépare la réouverture des établissements agricoles et dans quelles conditions ? Les problématiques des transports scolaires, de la restauration et de l'internat y sont particulièrement importantes. Une date est-elle envisagée ?

Toujours dans le domaine de l'enseignement, mais cette fois-ci concernant le supérieur, comment vont se dérouler les concours d'accès aux écoles nationales d'agronomie, vétérinaires ou de paysage ?

Enfin, nous souhaiterions savoir comment la recherche en agriculture, par l'intermédiaire du nouvel Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae), se mobilise contre le Covid-19.

Monsieur le ministre, nous vous écoutons.

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. - Merci madame la présidente, mesdames les sénatrices et messieurs les sénateurs. Je suis très heureux de pouvoir échanger avec vous sur l'enseignement agricole et supérieur, aussi précisément que possible compte tenu des constantes évolutions.

La mise en place des mesures de déconfinement dans l'enseignement en général se fait dans le cadre de concertations avec Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, et Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur. Personne ne comprendrait que chacun reste dans son silo ! Nous avons dans l'enseignement agricole 200 000 apprenants. Il y en a plus de 10 millions dans l'éducation nationale.

Nous travaillons ensemble avec Jean-Michel Blanquer et Frédérique Vidal, mais nous menons parallèlement des réunions spécifiques avec l'ensemble des syndicats et les Directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) qui sont l'équivalent de nos recteurs. Le déconfinement ne sera réussi que s'il est progressif, à l'inverse du confinement qui a été brutal. Et je tiens à vous assurer, madame la présidente, que nous travaillons en bonne intelligence et en totale concertation, j'y suis très attaché.

Je vous précise que quelques membres de mon équipe assistent à cette visioconférence : Mme Chmitelin, la nouvelle directrice générale de l'enseignement et de la recherche (DGER) qui était précédemment ma directrice de cabinet, M. Bonaimé jusqu'alors conseiller en charge de l'enseignement agricole et maintenant directeur de cabinet adjoint, M. Ginez, mon nouveau conseiller pour l'enseignement agricole, la recherche, l'innovation et l'installation des jeunes qui était précédemment au ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, ainsi que Bénédicte Bergeaud, ma conseillère parlementaire.

Je tiens à saluer le travail accompli par les fonctionnaires de mon ministère, par toutes les personnes en « deuxième ligne » comme l'a évoqué le Président de la République, ainsi que le fort engagement de la « première ligne », représentée par l'ensemble de nos soignants et scientifiques, sans oublier les familles endeuillées et les personnes qui ont souffert.

La « deuxième ligne » a tenu parce que la production et l'ensemble de la filière alimentaire et agroalimentaire ont tenu mais aussi parce que l'enseignement agricole, supérieur et technique a mené ses missions essentielles en assurant la continuité pédagogique. Nos plus de 16 000 enseignants et intervenants n'ont pas failli, même si cela n'était pas simple - j'ai pu le constater lors des comités techniques ministériels qui réunissent les organisations syndicales et le secrétariat général du ministère. La DGER est en constante discussion avec les organisations syndicales.

Nos 138 363 élèves, nos 35 086 apprentis et nos 35 278 étudiants ont tenu.

L'enseignement agricole, une pépite dont je fais une priorité, a su s'adapter à cette crise, parce qu'il est agile. Il est un atout pour l'alimentation et l'agriculture, au moment où cette dernière n'a jamais été autant dans les discussions de nos concitoyens. Nous le savons, c'est par la formation, par l'enseignement technique agricole, la recherche et l'enseignement supérieur que nous y arriverons.

Il me semble important de ne pas oublier : en effet comme je le dis depuis dix ans, et je l'ai récemment rappelé lors d'une précédente audition, l'enseignement agricole perdait des effectifs. Or, si à la rentrée 2018/2019, il y avait 3 000 élèves en moins par rapport à l'année scolaire précédente, il y en a eu 3 000 de plus à la rentrée 2019/2020 ! Nous avons réussi notre pari, grâce à des orientations fortes lancées en totale concertation avec les cadres, les enseignants, les directeurs d'établissements, les collectivités, les élus et les professionnels.

Avant cette crise, j'avais lancé un certain nombre d'orientations pour changer cet enseignement agricole, non pas de fond en comble mais en termes qualitatifs. Nous avons d'abord lancé « L'aventure du vivant » qui a permis de « raccrocher » des élèves. Ils ont ainsi perçu l'enseignement agricole non plus comme un second choix mais comme un primo choix, permettant de leur assurer un travail et des métiers intéressants. La réforme des diplômes a aussi été un choix fort et je souhaite que la Direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER) continue d'y travailler. Nous avons voulu « enseigner pour produire autrement » ou plutôt « enseigner à produire autrement » parce que notre formation ne peut être déconnectée de la réalité.

Nous avons également beaucoup travaillé sur la refondation de l'enseignement vétérinaire, pour notamment pallier le manque de vétérinaires en zones rurales.

Enfin, nous avons fait évoluer la doctrine au sein du ministère avec la réforme, absolument indispensable, de la recherche et de l'enseignement supérieur en matière agricole et environnementale, qui s'est traduite par cette magnifique fusion de l'Inra et de l'Irstea, devenus Inrae, l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement, et avec le lancement du très beau chantier de regroupement des sites franciliens d'AgroParisTech et de l'Inra sur le campus Paris-Saclay.

Enfin, j'ai veillé à ce qu'il n'y ait aucune fermeture d'établissements ou de classes. Je ne fais pas de différence entre les trois familles de l'enseignement agricole, elles sont toutes indispensables. J'ai bien sûr la responsabilité de l'enseignement public mais l'enseignement privé ou les maisons familiales rurales (MFR) jouent aussi un rôle essentiel de maillage sur tout le territoire.

Nous avons souhaité repositionner la formation au plus près des attentes sociétales : la transition agroécologique, qui doit être enseignée et mieux enseignée, le bien-être animal, qui est une préoccupation forte, l'élargissement du champ des compétences transversales : le digital, le numérique, ....

Ces réformes, lancées il y a dix-huit mois, ont été percutées par la crise sanitaire actuelle mais je tiens à affirmer devant votre commission que celle-ci ne doit pas arrêter la dynamique réformatrice du ministère. L'enseignement agricole a su s'adapter, à la fois au niveau de la continuité pédagogique qui est une problématique essentielle, notamment pour les parents, mais aussi au niveau de la continuité productive de nos exploitations agricoles. Je crois que cette visioconférence est retransmise, je tiens donc à préciser que nos exploitations agricoles et nos fermes travaillent et que plus de 95 % des jeunes ont ainsi pu poursuivre leur formation pendant cette période.

Je veux à nouveau saluer la mobilisation sans faille de nos équipes, et contrer les critiques et dénigrements trop faciles envers les fonctionnaires, sur lesquels on peut s'appuyer pourtant en temps de crise. La DGER a fourni un travail remarquable pour permettre l'enseignement à distance, soit par internet - 12 000 classes virtuelles ont été ouvertes, ce qui est conséquent au regard de la taille de notre ministère - soit par les services de Docaposte. J'ai bien entendu les remarques émises par certains sénateurs sur le fonctionnement de La Poste durant cette crise, mais il n'empêche que leurs services ont permis de faciliter l'échange de documents entre les enseignants et les élèves en rupture numérique, souvent parce qu'ils résident en zones blanches, ou n'ont pas accès à internet.

En totale coordination avec les trois ministères concernés, une Foire aux questions a été mise en place sur internet pour répondre aux nombreux questionnements des jeunes : le passage du bac, la fin de leur stage, l'organisation de la rentrée dans le supérieur, ...

J'ai veillé à ce que l'enseignement agricole soit présent tout au long de cette crise, même si bien sûr certaines de ses spécificités empêchent l'apprentissage à distance, comme la partie service à la personne, notamment dans les MFR.

La mobilisation des écoles vétérinaires dans la réserve sanitaire pour contribuer à la santé de nos concitoyens, celle de nos laboratoires vétérinaires pour les tests et celle de certains de nos internats pour l'accueil des personnes sans domicile fixe et isolées, ont été des actions fortes de solidarité.

Cette crise ne sera pas sans impact sur les effectifs. Nous allons devoir y retravailler, recréer la dynamique que nous avions initiée comme par exemple relancer à la rentrée prochaine le tour de France des territoires, en utilisant le camion de l'Aventure du vivant qui devait aller au plus près des jeunes. L'impact est également social car, comme l'a dit le Président de la République, les conséquences de cette crise n'ont pas été les mêmes selon votre lieu de vie (maison ou appartement, zones rurales ou urbaines) et votre niveau d'équipement (internet, ...).

Je conclurai en rappelant que pour réussir, le déconfinement doit être progressif et être accepté par tous, effectué en coordination entre nos ministères précédemment cités mais également celui du travail en ce qui concerne nos Centres de formation des apprentis (CFA) et nos centres de formation professionnelle et de promotion agricole (Cfppa). Il doit aussi inclure, M. Karam sait que nous y veillerons, les territoires d'outre-mer.

Cette concertation devra également se faire en interne et tenir compte des spécificités, dont celles de nos lycées multi-pôles et multi-sites qui regroupent les Cfa, Cfppa, exploitations, centres équestres, ... ; l'internat par exemple représente 100 000 de nos 200 000 apprenants, soit 50 % d'entre eux, contre 10 % dans l'éducation nationale. Il faudra continuer de les loger en appliquant les mesures sanitaires, la sécurité des enseignants, des élèves et de tous les personnels étant une priorité. Il n'y aura pas de reprise des cours si la sécurité sanitaire ne peut pas être assurée.

Cette crise a révélé l'importance de la souveraineté alimentaire qui ne pourra se faire qu'avec le renouvellement des générations auxquelles nous devons donner des perspectives positives.

L'enseignement agricole doit continuer à jouer un rôle moteur pour l'économie et la population. Si nous sommes capables de jumeler formation, éducation, recherche avec compétitivité et innovation, et ce à tous les échelons, national, régional, local, et en concertation avec les enseignants et les syndicats, nous atteindrons notre objectif principal qui est de voir nos jeunes continuer à apprendre. Vous avez évoqué, madame la présidente, le taux de 5 % de décrocheurs : il nous faut impérativement le diminuer.

Nos lycées agricoles, techniques, les MFR, les CFA, vont donc ré-ouvrir progressivement et tranquillement, dans le cadre de la prévention et de la sécurité sanitaire, et nous suivrons individuellement tous ceux qui ne pourront être présents physiquement.

Je suis prêt à répondre à vos questions, en vous rappelant combien notre ministère, mon cabinet et la DGER sont à votre disposition madame la présidente ainsi qu'à celle des membres de votre commission.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Je vous remercie monsieur le ministre pour ce propos liminaire complet. Je tiens à vous dire que notre commission a à coeur de suivre de très près les conséquences de cette crise sanitaire, secteur par secteur. Nous avons ainsi constitué un groupe de travail transpartisan, animé par notre collègue, Antoine Karam, qui auditionne et consulte, en lien avec votre ministère. Cette audition vise à approfondir le travail mené par ses membres qui partagent une passion commune pour l'enseignement agricole. Je donne donc la parole à Antoine Karam, avec nous depuis la Guyane.

M. Antoine Karam, rapporteur en charge des crédits « enseignement agricole ». - Je vous remercie, monsieur le ministre, au nom du groupe de travail que je pilote, pour l'ensemble des précisions que vous nous avez apportées.

J'en profite pour saluer l'ensemble de vos collaborateurs et collaboratrices et particulièrement M. Olivier Ginez, qui était il y a peu de temps encore en Guyane dans le cadre d'autres fonctions.

Ce groupe de travail sur l'enseignement agricole, mis en place à l'initiative de la présidente, a auditionné un certain nombre d'acteurs de l'enseignement agricole : des syndicats enseignants, des syndicats des personnels, des représentants de parents d'élèves, des MFR ou encore le Conseil national de l'enseignement agricole privé (CNEAP). Il en ressort une grande inquiétude pour l'avenir de l'enseignement agricole. Les établissements d'enseignement agricole connaissent des pertes financières importantes. Le CNEAP a ainsi évoqué une perte de 15 millions d'euros. Or, un certain nombre d'exploitations agricoles et d'établissements d'enseignement étaient déjà dans des situations financières compliquées avant même la crise de Covid-19.

À cela s'ajoutent des problèmes de recrutement des élèves : l'enseignement agricole est mal connu. Je sais que votre ministère y travaille pour y remédier. Les journées portes ouvertes, mais aussi l'orientation et l'information en fin d'année scolaire jouent un rôle fondamental pour faire découvrir cette voie d'enseignement. À peine un tiers des élèves inscrits dans les lycées agricoles se destine à des métiers en lien avec le secteur de l'agriculture ! Or, cette année, de nombreux établissements n'ont pas pu organiser de journées portes ouvertes et faire connaitre la diversité des formations proposées. Quant aux conseils de classe et à l'information des élèves, ils se font dans des conditions plus dégradées que les années précédentes.

Enfin, les familles hésitent à inscrire leurs enfants dans l'enseignement agricole, en raison des grandes incertitudes pesant sur leur projet pédagogique : je pense à la tenue des stages, mais aussi aux conditions logistiques d'accueil à la rentrée de septembre 2020. Les établissements ne savent pas si elles doivent accepter le même nombre d'inscription en internat ou bien un nombre plus faible.

Difficulté financière, interrogation sur le maintien du projet pédagogique dans des conditions satisfaisantes, moindre information sur cette filière : l'enseignement agricole est aujourd'hui en grande précarité. De ce constat découlent plusieurs questions :

Premièrement, à combien s'élèvent les pertes financières pour l'ensemble de l'enseignement agricole depuis le début du confinement ? Un soutien financier est-il prévu ? Il en va de l'attractivité de l'enseignement agricole : comment attirer des jeunes alors qu'au même moment l'exploitation agricole de l'établissement dépose le bilan ?

Deuxièmement, pour la première fois depuis de nombreuses années, on a constaté à la rentrée 2019 une augmentation du nombre d'élèves inscrits dans l'enseignement agricole, notamment en raison d'une action volontariste de votre ministère ainsi que du ministère de l'éducation nationale, que je salue. Or, cette dynamique risque d'être cassée. Quelles mesures vont être prises pour faire connaître l'enseignement agricole dans le contexte particulier actuel ?

Troisièmement, que pouvez-vous répondre aux chefs d'établissement et aux familles qui s'interrogent sur des questions logistiques très concrètes mais renvoyant directement au projet pédagogique des lycées agricoles : le maintien d'un nombre suffisant de lits en internat dans le respect des conditions sanitaires, les stages. Sur ce dernier point, votre ministère est-il en négociation avec les branches professionnelles et les entreprises pour permettre le retour des élèves, dans des conditions de formation et de protection satisfaisantes ?

Enfin, quatrième et dernière question : le Gouvernement s'était engagé à porter un plan de requalification et de revalorisation salariale pour les agents de catégorie 3 de l'enseignement agricole privé sous contrat. Revalorisation intégrée au budget lors de l'examen de la loi de finances pour 2020. Cependant, le décret de mise en oeuvre de ce plan n'a visiblement pas encore été pris. Pouvez-vous nous donner votre éclairage ?

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. - Je vous remercie, monsieur le rapporteur, pour ces questions très claires.

Les pertes financières pour l'ensemble de l'enseignement agricole depuis le début du confinement s'élèvent à une centaine de million d'euros.

Les Journées portes ouvertes (JPO) n'ont en effet pu avoir lieu mais les JPO virtuelles mises en place se sont très bien passées et ont permis d'informer nos jeunes le mieux possible.

En ce qui concerne les internats, chaque inscription pour l'année scolaire 2020/2021 sera prise en compte et nous ferons le point en septembre, nous ne pouvons le faire avant. S'il nous faut diviser par deux, voire par trois, le nombre de lits, il faudra trouver d'autres modalités pour nos internes. En revanche, je tiens à le souligner : pour la rentrée 2020-2021, nous inscrivons tout le monde.

Le problème qui s'est posé sur les stages et les apprentis a pu être décalé. Et nous travaillons bien sûr, monsieur Karam, en lien avec les filières professionnelles pour que toutes nos formations, initiales et continues, soient en adéquation avec elles.

S'agissant de la revalorisation financière, le Gouvernement s'y était engagé à travers la loi ASAP, mais celle-ci étant stoppée par la crise, la revalorisation est décalée mais ne doutons pas qu'elle sera mise en place dès que possible.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Je vais maintenant donner successivement la parole à nos deux rapporteurs : Mme Laure Darcos pour la recherche, puis M. Stéphane Piednoir, pour l'enseignement supérieur.

Mme Laure Darcos. - Je souhaite insister, monsieur le ministre, sur le nouvel établissement public, l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae), qui prend toute sa part dans les projets de recherche sur le Covid-19. Je voudrais que vous puissiez nous parler de cette fameuse protéine qui aurait été trouvée par un laboratoire américain et l'Inrae, démontrant la manière dont celle-ci infecte les cellules et génère ce coronavirus.

Je ne suis pas scientifique, et vous non plus monsieur le ministre, mais cela intéresse nos collègues et je suis fière de voir que l'Inrae contribue à la mobilisation de notre recherche et à cette course contre la montre pour trouver des solutions.

Par ailleurs, à titre personnel, je tenais à vous remercier car vous avez été le premier membre du Gouvernement à défendre les marchés et à dire qu'il fallait les ré-ouvrir, combat pour lequel je me suis beaucoup engagée, et qui a permis de desserrer un peu l'étau pour nos préfets.

M. Stéphane Piednoir. - J'ai quelques questions ciblées sur l'enseignement supérieur. Vous avez évoqué la continuité pédagogique : pouvez-vous nous faire état des difficultés éventuelles rencontrées par les étudiants dans l'enseignement agricole, pour lequel les aspects pratiques sont différents des autres enseignements ? En outre, comment l'interruption de certains stages va-t-elle être prise en compte pour la validation des bacs professionnels, la partie professionnelle étant essentielle dans ce diplôme ?

Pour les BTS agricoles, il a été convenu qu'ils soient évalués de manière continue. Avez-vous connaissance de réticences car c'est justement sur le dernier trimestre de l'année scolaire qu'étaient concentrées certaines pratiques ?

Dernière question sur le recrutement au sein de nos écoles d'agronomie ? Comment se passe-t-il, sachant qu'il existe des difficultés pour examiner les dossiers ? L'ensemble des établissements supérieurs ayant choisi de fermer leurs portes jusqu'en septembre, comment se réunissent les jurys ?

Je partage vos propos quant à la revalorisation du métier et au terme de primo choix que vous avez employé. Ne faudrait-il pas lancer une action de communication sur tous les métiers de l'agriculture pour favoriser l'augmentation des effectifs que vous avez évoquée ?

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. - Chère Laure Darcos, vous n'êtes pas scientifique mais vous connaissez beaucoup plus de choses que moi dans le domaine de la recherche ! Je suis dans l'impossibilité de vous répondre, mais je vais demander à M. Philippe Mauguin, le président-directeur général de l'Inrae, à l'issue de cette audition, de vous fournir des informations, qu'il faudrait peut-être insérer dans les Faq de notre site internet.

Nos laboratoires vétérinaires travaillent depuis longtemps sur la famille des coronavirus - et ces derniers sont nombreux ! -. Je pense notamment à l'École nationale vétérinaire de Toulouse, et ce n'est pas parce que leur ancienne directrice n'est autre que notre nouvelle directrice générale de l'enseignement et de la recherche ! Mme Chmitelin a mis en place un gros travail de partenariat avec l'Institut Pasteur sur la question de l'air ambiant dans certains locaux hospitaliers, notamment au CHU de Purpan, en lien avec l'Inserm. Je tiens également à citer l'action de l'École nationale vétérinaire d'Alfort dans le cadre du consortium de recherche REACTing.

Je sais d'ailleurs que vos connaissances, madame Darcos, sont telles que vous êtes en mesure de répondre beaucoup mieux que moi à vos questions, mais j'espère que mes réponses vous conviennent !

Je vous remercie, monsieur Piednoir, pour vos questions concrètes auxquelles je vais essayer de répondre tout aussi concrètement. Nos étudiants sont, comme nous, victimes de cette situation mais ils ne doivent pas l'être deux fois plus. Cela a engendré beaucoup de discussions, mais je me suis engagé, à partir du moment où certains élèves étaient en difficulté en terme de stage ou de validation de concours, à ce qu'ils ne soient pas empêchés d'obtenir leur diplôme. Ceci concerne également les BTS agricoles.

Concernant le recrutement pour l'enseignement supérieur et les concours d'accès à nos écoles, la directrice générale de l'enseignement supérieur et de la recherche m'a assuré que le nécessaire avait été fait pour s'adapter aux circonstances, à l'instar des autres concours d'accès aux grandes écoles. Pour exemple, les épreuves du concours A par voie principale après la classe préparatoire, qui réunissent plus de 3 000 candidats, sont devenues des épreuves uniquement écrites.

En revanche, pour les concours parallèles, ceux qui permettent une diversification des profils de recrutement - par exemple, devenir vétérinaire après avoir fait un BTS ou devenir ingénieur agronome par apprentissage -, soit environ 15 000 candidats répartis sur six concours, j'ai obtenu à ce que les entretiens de motivation soient maintenus en juillet, au besoin de manière dématérialisée. Ils jouent en effet un rôle très important pour recruter les futurs vétérinaires et ingénieurs sur des aptitudes et non sur des critères purement académiques.

En ce qui concerne la question de la communication sur les métiers de l'agriculture, nous avions amorcé une grande campagne et je tiens à vous assurer que nous la remettrons en place dès que possible. Cette crise aura au moins permis de mettre en évidence l'agriculture, souvent décriée, toutes les entreprises agroalimentaires, tous les métiers de l'agriculture et notamment ceux liés à la recherche et à l'innovation.

Au sein de mon ministère, sur les 1 000 dossiers qu'il faut gérer quotidiennement, le plus essentiel est l'avenir de nos jeunes, et pour reprendre l'expression du Président de la République, il faut « quoi qu'il en coûte » amener ces jeunes à avoir la meilleure formation possible aux métiers de demain.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Nous partageons votre avis sur cet enjeu pour les jeunes. Je vais maintenant donner la parole à notre rapporteur chargé de la jeunesse, M. Jacques-Bernard Magner, qui représente le groupe socialiste et républicain.

M. Jacques-Bernard Magner. - Monsieur le ministre, je tiens à vous féliciter pour la réussite de l'opération de soutien aux agriculteurs pour les récoltes que vous avez lancée. Il semblerait que cette réserve sollicitée en l'absence de main-d'oeuvre étrangère ait bien fonctionné. Le Service national universel (SNU) qu'on adosse souvent au secteur militaire, ne pourrait-il pas finalement être utilisé dans ce cadre-là pour nos structures agricoles ? Le Président a évoqué la difficulté alimentaire mais l'agriculture a tenu et a permis que cette période se passe plutôt bien, même si certains agriculteurs n'ont pu écouler toutes leurs marchandises.

Vous souhaitez à juste titre revaloriser l'image de l'enseignement agricole. Les jeunes y vont en effet le plus souvent car ils sont issus de familles d'agriculteurs. Pourtant il y a un certain nombre de métiers aujourd'hui en tension qui attendent des bras mais aussi des têtes car il faut une technicité importante pour être agriculteur. Donc, à la lumière de cette crise, à quelles solutions avez-vous pensé pour que les métiers agricoles soient promus ?

Enfin, s'agissant des stages, qui sont de plus en plus difficiles à trouver pour les apprentis faute d'un nombre suffisant de maîtres-formateurs, ne serait-il pas bon de créer un statut du scolaire alternant pour aider à la recherche de stages auprès des professionnels de l'agriculture et permettre aux jeunes de commencer une formation scolaire en attendant de trouver un contrat d'apprentissage?

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Je vais prendre une série de questions après celles de M. Magner, si vous en êtes d'accord monsieur le ministre, et je vais donner la parole à Mme Vérien pour le groupe Union centriste.

Mme Dominique Vérien. - Monsieur le ministre, Vous parlez de pleine concertation mais les MFR, au moins dans mon département, ne l'ont pas ressenti comme tel. Elles ont même parfois reçu les instructions de votre ministère en même temps que les parents, ce qui a compliqué le fait de se préparer à leur répondre et à les rassurer. Quant aux difficultés de la rentrée, les élèves de ces structures sont parfois six par chambre. Enfin, les élèves des MFR sont parfois éloignés de la nation apprenante et ils ont plutôt besoin de choses pratiques et d'encadrement. J'espère que la concertation dont vous parlez tant va arranger la situation.

Je souhaite aussi parler des stagiaires, pas des apprentis qui, sous la coupe de leur maître de stage, sont sous la responsabilité de l'entreprise, mais des autres, ceux qui sont sous la responsabilité du chef d'établissement. Est-ce à lui de vérifier si l'accueil du stagiaire se fait dans le respect des conditions de sécurité sanitaire actuelles ?

Les portes ouvertes virtuelles réussies que vous avez évoquées n'ont pas été un grand succès pour les MFR. Elles ont donc assez peu d'inscriptions. Or, les financements attribués seront définis sur la base du nombre d'élèves au 1er octobre. Ne pourrait-on pas décaler d'un ou deux mois ce décompte, car beaucoup de choix risquent d'évoluer en septembre, et ces financements sont importants pour éviter de se séparer de formateurs ?

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - J'en profite pour excuser Mme Billon qui devait intervenir également pour le groupe Union centriste. Je donne la parole à Mme Brulin, pour le groupe CRCE.

Mme Céline Brulin. - Monsieur le ministre, le Président de la République a annoncé le déconfinement au 11 mai le 13 avril dernier, et la communauté éducative a ressenti que les semaines qui ont suivi n'ont pas été suffisamment mises à profit pour préparer très concrètement la rentrée. Celle-ci devrait s'effectuer pour les lycées, selon l'annonce du Premier ministre, au-delà du 2 juin et commencerait probablement par les lycées professionnels, ce qui ne paraît pas incongru. Si cela inclut, comme nous le pensons au sein de notre groupe de travail, les lycées agricoles, nous disposons d'un peu plus de temps pour véritablement préparer cette rentrée.

Je rejoins les propos prononcés à l'instant : il y a un certain nombre d'acteurs qui ne se sentent pas suffisamment associés. Or certaines questions relatives aux lycées agricoles sont encore plus complexes que celles de l'éducation nationale, comme le décrochage qui semble plus important en cette période d'enseignement à distance.

Il y a aussi la question des internats que vous avez à juste titre évoquée : que faire, lorsque l'on sait que 50 % des élèves sont concernés, et qu'à la reprise éventuelle de juin ou septembre, on ne pourra pas tous les loger dans des chambres collectives ? Même chose pour les transports, les périmètres de recrutement des lycées agricoles étant très larges. Je pense aussi aux demandes qui s'expriment sur le gel des stages, cette question nécessite d'être tranchée même si je conçois que ce ne soit pas simple.

Enfin, deux derniers sujets et non des moindres : avant même la crise sanitaire, la question des seuils de dédoublement étaient souvent évoquée. Celle-ci se pose aujourd'hui avec encore plus d'acuité compte tenu des circonstances qui restreignent le nombre de personnes par groupe. Qu'en sera-t-il à la rentrée ? Et qu'avez-vous également prévu pour tous les emplois directement imputés sur les budgets des établissements et qui, parce que ce sont des contrats de droit public, ne bénéficient pas des mesures de chômage partiel ?

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - La question des transports renvoie aux régions, vous allez peut-être pouvoir nous en dire plus sur la construction de ce lien avec la collectivité en charge du transport scolaire ? Je donne maintenant la parole à M. Grosperrin, rapporteur des crédits « enseignement scolaire ».

M. Jacques Grosperrin. - La présidente l'a fort bien dit dans ces propos liminaires, l'enseignement agricole est un laboratoire d'innovations, souvent en avance. J'ai le sentiment que le public qu'il concerne est un peu plus fragile et que cet enseignement a été mis un peu plus en difficulté par le confinement ; il semble donc qu'il y ait plus de décrocheurs, certainement davantage que les 5 % annoncés. Pouvez-vous nous en dire plus sur la manière dont l'enseignement agricole s'est adapté vis-à-vis de ces décrocheurs ?

En ce qui concerne la question de la suppression des stages en entreprises, ont-ils été compensés ou rattrapés, cette expérience étant primordiale ? Comment se prépare le redémarrage des Cfppa ?

Le ministre de l'éducation nationale souhaitait faire reprendre les lycéens des classes à examen uniquement et les classes charnières. Certains demandent la suppression des épreuves de français. Quelle est votre position ?

Et enfin, s'agissant du recrutement au sein des MFR, une crainte existe pour les 4e et 3e car il semble que du fait du confinement, les futurs apprenants potentiels aient moins la possibilité de découvrir les formations proposées par les MFR et se retrouvent donc un peu « bloqués » dans le système d'enseignement de l'éducation nationale.

M. Jean-Yves Roux. - Merci monsieur le ministre pour vos propos préliminaires. Mes questions portent sur les lycées et formations supérieures agricoles de type BTS agricoles. Dans le plan de déconfinement présenté récemment au Sénat, il a été annoncé que l'ouverture des lycées ne serait décidée que fin mai et que l'enseignement professionnel serait prioritaire. Pouvez-vous nous en dire plus sur la validation ou non des années et cursus lorsque les stages n'ont pas pu se tenir et sur le report éventuel de ces stages en juillet ou septembre ?

Est-il envisageable que les étudiants à partir de 16 ans et surtout les apprentis, puissent effectuer des stages dès cet été ? Le cas échéant, comment sera-t-il possible de garantir la sécurité de tous et ainsi aider les petites exploitations à continuer de prendre des stagiaires et apprentis ? Ces exploitations _ vous les connaissez bien au niveau de la Drôme - n'auront pas les moyens sur le long terme de désinfecter et de procurer des masques et des solutions hydroalcooliques.

Mme Colette Mélot. - Merci monsieur le ministre pour toutes les précisions que vous nous avez apportées. Ma première question porte sur l'épreuve orale de français en première STAV (Sciences et technologies de l'agronomie et du vivant). L'intersyndicale nous a récemment informés de sa demande de suppression de ces épreuves, les conditions de préparation compte tenu de l'épidémie ne permettant pas à l'ensemble des élèves d'aborder sereinement cette épreuve mise en place pour la première fois cette année. Quelle suite entendez-vous donner à cette demande ?

Ma deuxième question concerne la réouverture des CFA prévue le 11 mai. Or, nombre de ces centres occupent les locaux des lycées qui resteront quant à eux fermés, leur entretien étant placé sous la responsabilité des conseils régionaux. Comment sera assuré l'accueil des apprentis, des stagiaires et du personnel de ces centres dans le respect des protocoles sanitaires ?

Mme Maryvonne Blondin. - Je regrette, monsieur le ministre, que dans le protocole élaboré par l'éducation nationale, il n'y ait pas eu une fiche spécifique sur les établissements agricoles. L'internat fait véritablement partie du projet pédagogique de l'établissement agricole. Ce projet comporte à la fois un volet éducatif, de vie collective via l'internat, mais aussi un volet d'apprentissage de la vie économique : ces jeunes peuvent y développer un réseau de ventes de leurs produits qui leur permet de mettre en place différentes techniques de commercialisation, en lien avec les producteurs locaux et la population locale. Cela génère des ressources propres qui permettent aux établissements de financer d'autres projets. Or, on connait la fragilité financière de ces établissements, qui risque d'être accentuée par la crise de Covid-19.

Je voudrais également attirer votre attention sur la rentrée normalement prévue le 2 juin prochain pour ces élèves d'internat. Ils viennent de toute la France, selon les spécialités enseignées, et les transports représentent une réelle inquiétude pour les chefs d'établissement. Vont-ils devoir mettre en place une alternance hebdomadaire ?

Ma dernière question concerne l'arrêt des notes prévu pour le 10 juin, alors que la rentrée se ferait le 2 juin. Ne serait-il pas possible de le décaler ? Enfin, comme l'ont indiqué plusieurs de mes collègues, on constate sur le terrain une forte inquiétude pour la rentrée de septembre, notamment sur les effectifs : en effet, la visibilité et la valorisation de l'enseignement agricole ont été moins importantes, en particulier parce que les conseils de classe dans les collèges n'ont pas pu se tenir.

M. Max Brisson. - Je participe au groupe de travail animé par Antoine Karam, et cela m'a confirmé qu'il existe de formidables établissements d'enseignement agricole, toutes filières confondues, lieux d'innovations pédagogiques dont l'éducation nationale pourrait parfois s'inspirer.

Ma question porte sur des publics particuliers, très nombreux dans l'enseignement agricole, on ne le sait pas assez, à savoir les publics à besoins éducatifs particuliers, dont ceux en situation de handicap dont le nombre s'élève, selon les chiffres de votre ministère au 1er janvier 2019, à près de 2 400. Comment la pédagogie a-t-elle été adaptée pour eux ? Comment s'organise la présence des AESH en classe dans ce contexte de limitation du nombre de personnes et de distanciation sociale ? L'école inclusive s'applique également dans l'enseignement agricole.

Concernant le retour vers l'école, le protocole mis en place par l'éducation nationale s'applique aussi aux établissements d'enseignement agricole. Il n'empêche qu'un particularisme fort existe, ne pourrait-on pas y réfléchir ? Et comme je l'ai déjà demandé à Jean-Michel Blanquer, quels seront les objectifs pédagogiques d'ici le 4 juillet ? Comment prépare-t-on la rentrée de septembre prochain, compte tenu de cette année scolaire écourtée ?

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. - Je vous remercie pour ces questions précises et concrètes. Tout d'abord, la rentrée de nos établissements est prévue dans un mois, ce qui nous laisse du temps pour préparer et ensuite observer l'évolution pour les premiers qui ouvriront, notamment au niveau des transports. Car rassurez-vous, mesdames et messieurs les sénateurs, nous y veillerons et nous ferons en sorte pour les internats que la distanciation sociale soit appliquée. La règle de base est le principe de précaution.

Pour répondre à plusieurs de vos questions, notamment à celle de Mme Blondin, je n'ai pas souhaité que l'on ait une circulaire commune avec l'éducation nationale. Notre enseignement est spécifique et, si les consignes sanitaires sont les mêmes pour tous les établissements d'enseignement, nous mettons en place nos propres directives, circulaires et guides de bonnes pratiques, pour pouvoir être agiles, mobiles et réactifs.

S'agissant des transports, nous travaillons en étroite collaboration avec les régions, associées à toutes nos réunions, et je remercie d'ailleurs M. Morin et M. Muselier qui l'a remplacé à la tête des Régions de France. Même s'il y a parfois des tiraillements, nous avons pour même objectif l'intérêt des jeunes.

En ce qui concerne les réunions de concertations, nous tenons à ce qu'il y en ait le plus possible. Nous en avons pour exemple tenu cinq cette semaine : CHSCTM, CHSCT, CTM,... Nous concertons le mieux et le plus possible.

Monsieur Jacques-Bernard Magner, merci d'avoir évoqué « l'armée de l'ombre » qui s'est levée pour aider les agriculteurs. Plus de 200 000 personnes se sont inscrites sur la plateforme, 15 000 ont travaillé, les conditions climatiques et les restrictions sur les périmètres de déplacement à respecter ne nous ont pas permis d'aller au-delà. M. Magner a aussi évoqué à juste titre le SNU comme support pour renouveler ce type d'actions. Actuellement, dans le cadre du Service national de la jeunesse (SNJ), il est possible que des jeunes en missions d'intérêt général puissent travailler en exploitations agricoles mais nous allons réfléchir à cette suggestion.

Nous partageons votre inquiétude quant à l'avenir des stages. Pour l'instant, le nombre de contrats de stage n'a pas baissé mais la crise va bien évidemment faire des dégâts dans tous les domaines. Certaines entreprises prendront certainement moins de stagiaires. Nous suivrons cela de près.

Madame Vérien, vous avez parlé de manque de concertation, mais nous n'en menons effectivement pas avec les 800 établissements ! Nous les menons avec toutes les fédérations, les représentants de l'UMFREO (Union nationale des maisons familiales rurales d'éducation et d'orientation), charge à eux ensuite d'en référer à chaque MFR. Le ministère a édité ses propres guides de bonnes pratiques.

Par contre, lorsque vous parlez des élèves comme étant loin de la nation apprenante, je ne partage pas du tout cet avis et j'ai du mal avec cette stigmatisation. L'enseignement doit accueillir tous les enfants de la République et le rôle des MFR, que je soutiens, est justement d'intégrer ces élèves en difficulté. J'ai pu constater dans le cadre de mes fonctions d'élu départemental pendant plus de vingt ans, qu'un grand nombre de véritables décrocheurs reprenait goût à la vie professionnelle grâce aux MFR.

Je suis d'ailleurs le premier ministre de l'agriculture à avoir participé à la rentrée des classes des trois familles de l'enseignement agricole. Je ne fais pas de différence de traitement entre les enfants de la République.

Madame Vérien, je ne sais pas du tout ce qui vous permet d'affirmer que les journées portes ouvertes virtuelles des MFR n'ont pas été une réussite. Je ne partage pas cet avis. Par définition, elles ne pouvaient accueillir du monde ! Elles étaient virtuelles, nous n'avons pas eu le choix qu'il en soit autrement, et les retours que j'ai eus de la DGER, de mon cabinet et d'élus, sont très positifs quant au fait de les avoir maintenues de manière dématérialisée.

Je tiens à rassurer Mme Brulin : nous préparons bien évidemment la rentrée et nous ferons en sorte d'être prêts pour début juin. Cinq séances de concertation avec toutes les instances du ministère associant tous les acteurs sont prévues. Je n'ai vraiment pas le sentiment qu'il ne se soit rien passé depuis l'annonce du Président de la République du 13 avril, en tout cas les fonctionnaires de mon ministère travaillent 7 jours sur 7.

Nous allons maintenir les seuils de dédoublement car nous avons eu plus d'élèves et je veux saluer les enseignants car cela a été difficile à mettre en place.

Comme je l'ai indiqué à M. Karam, nous évaluons pour la partie enseignement de mon ministère le coût à cent millions d'euros. Cela inclut le soutien à nos personnes sous contrat qui n'ont pas pu bénéficier du chômage partiel. La situation était dramatique et nous avons fait en sorte de n'arrêter aucun contrat.

Monsieur Grosperrin, les données sur les décrocheurs proviennent des 800 établissements, compilées par la DGER. Je vous confirme que le taux d'élèves décrocheurs s'élève à 5 %.

Vous êtes nombreux à avoir évoqué les Cfppa et les CFA : dès le 11 mai, il est possible de les ouvrir même s'ils ne le seront sans doute pas tous. Il faut déconnecter la possibilité d'ouvrir les Cfppa de l'ouverture globale des lycées, et tenir compte des multi-sites et multi-pôles dont je parlais en introduction. Les Cfppa avec les CFA n'ouvriront bien sûr que si les conditions sanitaires le permettent, et si les instances locales se sont réunies.

M. Jean-Yves Roux évoquait la continuité pédagogique : l'enseignement agricole supérieur a fait le choix du maintien des stages en entreprises. Quant aux masques et solutions hydroalcooliques, ils seront fournis par l'État pour les collégiens des classes de 4e et 3e. Les lycéens devront venir avec leurs propres masques. Certaines régions ont annoncé qu'elles équiperaient les lycéens. Les gels hydroalcooliques seront mis à disposition de tous les apprenants et enseignants et les procédures seront précisées dans le cadre des guides de bonnes pratiques et d'une circulaire nationale émise par la DGER.

Madame Mélot, nous avons parlé avec Jean-Michel Blanquer de l'éventuelle suppression des épreuves orales de français pour les 1ere STAV. Cette réflexion implique l'ouverture de tous les lycées, la cohérence de toutes les filières entre régions. Toutefois, pour l'instant, nous ne sommes pas favorables à leur suppression.

Madame Blondin, la fragilité financière des établissements est en effet bien réelle. Cette crise est terrible pour tous. Vous évoquiez aussi le fait de décaler les notes après le 10 juin. Cela ne sera pas possible car il faut respecter le calendrier de Parcoursup mais mon objectif et celui du Gouvernement est bien qu'aucun jeune ne soit pénalisé par cette crise.

Monsieur Brisson, je connais votre engagement en faveur de l'éducation inclusive qui est en effet très importante. Les situations sont plus ou moins compliquées suivant le handicap pour respecter au mieux la distanciation sociale, mais la priorité fixée à mes services est qu'il n'y ait pas là encore de double peine. Il va falloir faire en sorte que les jeunes handicapés puissent être accueillis. Les établissements d'enseignement agricole scolarisent environ 8 500 élèves à besoins éducatifs particuliers, parmi lesquels 4 916 bénéficient d'un Projet personnalisé de scolarisation (PPS). La Dger a mis en ligne dès le 20 mars des préconisations à destination des équipes éducatives ainsi qu'un appui pédagogique.

Les équipe pédagogiques s'en sont saisies et ont mis en place un contact hebdomadaire voire quotidien au téléphone avec un seul interlocuteur référent. La logique d'accompagnement du handicap se poursuivra selon la logique du déconfinement, soit dans l'établissement si le jeune ne présente aucune pathologie considérée facteur à risque, soit à distance.

Je rappelle que la reprise des lycées agricoles ne se fera en juin que si les conditions épidémiologiques le permettent. La décision sera prise fin mai. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation se prépare donc à accueillir les jeunes dans ses 800 établissements. Nous ne prendrons de décisions qu'après avoir considéré la situation de chaque établissement, chaque région, chaque secteur. Je suis favorable, pour des raisons d'équité sociale, à ces réouvertures. Il faut rouvrir les établissements même si nos jeunes n'ont pas arrêté de travailler grâce au travail à distance et à Docaposte.

En lien avec le personnel enseignant et les organisations syndicales, nous allons tout faire pour mener à bien ce redémarrage. J'ai fixé un cap clair, celui de la réussite éducative et pour le suivre - en utilisant encore le langage marin - il faut que tout l'équipage soit à bord. Cet équipage est constitué de l'administration, des parlementaires, des élus des conseils d'administration, de l'ensemble des organisations syndicales, du personnel enseignant, mais aussi de l'ensemble du personnel des régions mis à disposition, comme les agents d'entretien, de restauration. Nous sommes tous dans le même navire et malgré la tempête qui s'est abattue sur nous, le navire France a tenu !

Malgré nos appréciations divergentes et nos débats politiques intenses, nous avons tous pour même objectif la réussite éducative de nos jeunes et le rayonnement de notre enseignement agricole. Nous devons tous ramer dans le même sens pour mener à bon port toute notre communauté éducative, les apprenants, les enseignants, les agents qui travaillent dans nos lycées et exploitations.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Merci monsieur le ministre, vous avez des propos toujours très enthousiastes et une belle force de conviction. Je vous souhaite donc le meilleur temps possible pour cette traversée sans trop de remous ! Nous restons extrêmement mobilisés sur ce sujet, d'autant que, vous l'avez compris, nous avons mis en place un groupe de travail animé par Antoine Karam que je remercie à nouveau. Je compte sur lui et l'ensemble des collègues de la commission pour poursuivre les travaux et être attentifs à ce bilan fin mai qui permettra la réouverture ou non des établissements début juin, c'est ce que je vous souhaite en tout cas.

La téléconférence est close à 16 heures.