Mardi 30 avril 2024

Présidence de M. Jean-François Longeot, président --

La réunion est ouverte à 13 h 30.

Bilan d'activité - Audition de M. Stanislas Bourron, directeur général de l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT)

M. Jean-François Longeot, président. -- Nous avons le plaisir d'accueillir M. Stanislas Bourron, qui assure la direction de l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) depuis maintenant seize mois.

C'est la troisième fois, monsieur le directeur général, que vous venez devant notre commission : en octobre 2022, avant votre nomination, nous vous avions entendu en votre qualité de candidat à vos fonctions en application de l'article 13 de la Constitution. En mai 2023, nous vous avions de nouveau entendu, dans le cadre d'un cycle d'auditions consacré à l'ANCT.

Nous souhaitons, sur la proposition de Louis-Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis sur les crédits consacrés à la cohésion des territoires, entendre chaque année le directeur général de l'ANCT, afin d'exercer un suivi des réalisations de l'Agence, au titre de notre mission de contrôle de l'action gouvernementale.

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable entretient en effet un lien particulier avec l'Agence : en 2019, nous avions été chargés de l'examen de la proposition de loi d'initiative sénatoriale relative à la création de l'ANCT, dont le rapporteur était également Louis-Jean de Nicolaÿ, au titre de notre compétence en matière d'aménagement du territoire.

Je le répéterai tout à l'heure dans le cadre du bilan de l'application des lois : les dernières mesures d'application manquantes ayant été prises, la loi du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires est enfin pleinement applicable. J'avais dénoncé l'année dernière une certaine inertie dans l'application de ce texte, car deux mesures restaient en attente d'application depuis plusieurs années, il s'agissait de la transmission au Parlement des conventions conclues entre l'ANCT et ses opérateurs, et de la conclusion d'une convention définissant les moyens et ressources dont disposera l'ANCT pour reprendre les missions de l'Agence du numérique. Un an plus tard, je constate que ces deux dernières mesures d'application, importantes pour la bonne information du Parlement, ont été prises.

Maintenant que la loi est pleinement applicable, il est temps de dresser le bilan de l'action de l'Agence.

Nous nous étions déjà livrés à cet exercice en mai dernier. Ma première question, monsieur le directeur général, portera donc sur l'évolution de la situation depuis cette dernière audition. Quel bilan faites-vous de l'exercice de l'ANCT depuis mai 2023 ? Quels ont été les principaux chantiers de l'Agence ? Quelles sont ses perspectives pour 2024 et 2025 ?

Lors de votre précédente audition, l'ANCT était à un moment charnière : vous étiez à l'aube d'une nouvelle phase pour l'Agence, avec la présentation de la feuille de route 2023-2026 par la ministre Dominique Faure et l'annonce du plan France Ruralités. Un an plus tard, où en sommes-nous dans la mise en oeuvre de cette feuille de route ? Et qu'en est-il du plan France Ruralités, plus particulièrement du programme Villages d'avenir ?

M. Stanislas Bourron, directeur général de l'ANCT. -- Vous m'entendez en audition seize mois après ma prise de fonctions et un an après les derniers échanges que nous avons eus dans le cadre de votre commission. C'est un bon moment pour vous rendre compte de l'action de l'Agence.

Je vous disais l'année dernière que la feuille de route de l'ANCT devait être arrêtée prochainement. Le 29 juin 2023, le conseil d'administration a déterminé les thématiques stratégiques qui seront déployées par l'Agence dans les années à venir :

- premier axe de cette feuille de route : gagner en proximité et se déployer au plus près du terrain ;

- deuxième axe : poursuivre les programmes existants et en déployer de nouveau ;

- troisième axe : se montrer plus lisible et compréhensible, afin d'être mieux identifiée par les acteurs intéressés.

Commençons par le premier axe. Depuis un an, nous avons multiplié les leviers pour favoriser la proximité. Aux termes de la loi de 2019, les préfets sont les délégués territoriaux de l'Agence dans leur département ; ils sont souvent assistés par un délégué territorial adjoint. Au cours de l'année qui vient de s'écouler, nous nous sommes appuyés sur ce réseau pour renforcer les relations de l'Agence avec les territoires. En mai dernier, nous avons réuni la totalité des membres de notre réseau et nous veillons à maintenir une relation régulière avec eux grâce aux outils dématérialisés, les fameux webinaires. Nous avons également revu nos conditions de communication avec eux.

Afin de leur apporter le soutien nécessaire pour qu'ils puissent mieux déployer l'action de l'Agence sur le terrain, nous avons doublé notre équipe de chargés de mission territoriaux. Nous avions pris cet engagement au début de l'année 2023 et nous l'avons tenu. Désormais, une vingtaine de personnes sont en soutien exclusif des préfets et de leurs équipes, pour les aider notamment en matière d'ingénierie de proximité.

Nous avons obtenu que M. Béchu et Mme Faure signent la circulaire du 28 décembre 2023, ce qui était un enjeu majeur car notre agence n'avait rien communiqué aux préfets depuis mai 2020. Cette circulaire a permis d'adresser quatre recommandations fondamentales aux préfets, afin de veiller à ce que tout élu ayant un projet puisse trouver le chemin pour se faire accompagner. Le texte prévoit notamment la création d'un guichet unique d'accès à l'ingénierie dans tous les départements de France, grâce à une adresse standardisée. Ce guichet existe déjà dans les deux tiers des départements où nous assurons un suivi très régulier. Il s'agit aussi de mettre en oeuvre des forums d'ingénierie au moins une fois dans l'année : 70 forums sont ainsi déjà organisés ou prévus dans l'ensemble des départements pour faire connaître l'offre technique existante. Le texte prévoit également de procéder à un recensement de l'ingénierie locale, ce qui correspond à une mesure législative dont l'application restait déficiente. Nous avons donc souhaité que tous les départements mettent à la disposition des élus un guide de l'ingénierie locale. Enfin, la mobilisation des acteurs locaux passe par les comités locaux de cohésion territoriale (CLCT) qui se réunissent régulièrement dans 95 % des départements.

Pour que le réseau puisse s'animer, il faut lui donner des moyens. Les crédits d'ingénierie de l'ANCT ont été doublés par la loi de finances pour 2024, de sorte que l'Agence bénéficie d'une enveloppe supplémentaire de 20 millions d'euros. Ces crédits ont été pour l'essentiel déconcentrés auprès des préfets. En effet, le contact doit se faire au plus près du terrain, dans chaque département, entre les services de l'État départementaux sous la direction du préfet et les élus directement concernés, à travers le guichet unique, l'organisation d'échanges réguliers et de déplacements. Nous avons donc délégué environ 150 000 euros de crédits à chaque préfet afin qu'ils accompagnent des projets d'ingénierie dans leur département. Le dispositif est opérationnel depuis le 1er mars dernier.

Le ministre Béchu a également souhaité que nous revienne le pilotage des crédits d'ingénierie du fonds vert. Une enveloppe de ce fonds est donc déconcentrée auprès des préfets pour cofinancer des postes autour de la transition écologique. Le fait que cette enveloppe soit sous notre responsabilité favorise la cohérence d'action du soutien de l'État au niveau local.

Développer la proximité, c'est aussi mobiliser les grands opérateurs de l'État qui apportent des compétences d'accompagnement en matière d'ingénierie, mais qui restent parfois difficilement accessibles. En plus du guichet unique, nous avons beaucoup travaillé avec l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), l'Agence nationale de l'habitat (Anah), l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) et la Banque des territoires, qui sont les cinq grands acteurs que nous réunissons tous les mois, conformément à la loi. Nous avons signé, à la fin du mois de novembre dernier, de nouvelles conventions quadriennales qui prévoient des engagements réciproques impliquant notamment des opérateurs qui ne bénéficient pas d'un maillage territorial. Les acteurs ont tous accepté de passer par le guichet départemental tenu par les préfets en cas de besoin.

Nous avons aussi procédé à un recensement intégral de l'offre d'ingénierie de ces opérateurs, pour répondre à une demande du Parlement. Ce document a été communiqué aux services de l'État à la fin du mois de novembre dernier et il a été présenté quand les nouvelles conventions ont été signées lors du salon des maires et des collectivités locales.

Cette coopération renforcée avec tous les opérateurs nous permet aussi d'offrir aux services de l'État qui sont sollicités par un élu de proximité la possibilité de leur expliquer la totalité de la gamme des soutiens que l'État peut apporter.

La proximité, c'est aussi aller au plus près du terrain. Tel est du moins le mandat que l'on nous a donné lorsque le président Christophe Bouillon et moi avons pris nos fonctions. Nous avons donc engagé un tour de France qui nous a amenés à visiter déjà près de cinquante départements. Nous sommes allés au contact des élus, des préfets, des directeurs départementaux des territoires et des chefs de projet. Nous avons fait le constat d'une dynamique très forte portée par les élus sur les actions que nous avons proposées dans les dispositifs. En outre, l'Agence commence à être de plus en plus connue sur le terrain.

J'en viens au deuxième axe de notre stratégie, sur le déploiement des grands programmes. Le dispositif France Ruralités, très large, se définit comme un plan interministériel. Le programme d'ingénierie Villages d'avenir se déploie aujourd'hui dans chaque département. En effet, nous avions travaillé sur les villes moyennes dans le cadre du programme Action coeur de ville, qui connaît un grand succès, puisque 8 milliards d'euros ont été consommés à ce jour. Le programme Petites Villes de demain est également en phase opérationnelle avec 1 600 communes et 900 chefs de projet. Il connaît également un grand succès avec 1,7 milliard d'euros consommés. Toutefois, il restait une strate de villages et de bourgs centres qui n'avaient pas trouvé place dans ces grands programmes et qui méritaient d'être accompagnés. Une première vague de 2 500 communes a donc été retenue à la fin de l'année dernière, qui sera accompagnée par 120 chefs de projet financés intégralement par l'État et positionnés dans les services départementaux de l'État. Nous avons recruté ces chefs de projet et nous en avons déjà formé une centaine. Ils seront deux dans les départements les plus ruraux et il y en aura un seul dans les autres, sauf à Paris. Ils nous permettent d'identifier plus de 7 500 projets qui sont portés par ces 2 500 communes et qui seront accompagnés pendant une durée plus ou moins longue selon la complexité du dossier. Ils serviront d'interface avec les autres services de l'État et interviendront en appui des maires et des élus de la commune, qui manquent souvent de moyens.

Nous avons actualisé la géographie de la politique de la ville à la fin de 2023. Nous avons pour cela mené un travail itératif avec les préfets et les élus, de manière à arrêter une nouvelle cartographie des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), au début de 2024. Nous avons recensé 1 362 QPV, dont 110 nouveaux -- 40 sont sortants --, constatant ainsi une grande stabilité des territoires concernés par la politique de la ville. Quelque 60 % des nouveaux contrats de ville ont été signés. Le déploiement des cités éducatives est également en cours. Elles seront généralisées, conformément à la décision du comité interministériel de la ville du 27 octobre dernier.

Le réseau France Services a été relancé, il y a quelques jours, par le Premier ministre. L'objectif était d'ouvrir 2 500 maisons France Services à la fin de 2022. Il a été tenu, puisque l'on en comptait déjà 2 700 en 2023. Le Premier ministre a annoncé qu'il souhaitait ajouter 300 maisons France Services d'ici à 2026, pour arriver à un total de 3 000. Il prévoit également l'extension du bouquet de services. Depuis 2024, les dispositifs MaPrimeRénov' et MaPrimeAdapt' peuvent être sollicités dans le cadre de France Services. C'est aussi le cas du chèque énergie, mis en place par le ministère de la transition écologique. En 2025, nous ferons entrer l'Urssaf au titre des particuliers employeurs et des auto-entrepreneurs. Enfin, le soutien de l'État aux maisons France Services a été accru, passant de 35 000 à 40 000 euros, et il montera à 60 000 euros en 2026.

En 2023, nous avons continué de déployer et de structurer l'inclusion numérique grâce aux 4 000 postes de conseillers numériques répartis dans les collectivités locales. Ces conseillers ont un rôle clé pour faciliter l'accès aux démarches administratives et pour former la partie de la population en difficulté face aux systèmes numériques et dématérialisés. Ce développement se fait en étroite collaboration avec les collectivités territoriales. Le dispositif, mis en oeuvre en 2023, favorise une organisation structurée dans chaque département. Nous avons ainsi pu développer de nombreux outils numériques en open data pour les collectivités les moins bien dotées.

Je conclus avec le troisième axe de notre feuille de route : pour renforcer la lisibilité de notre action, nous avons lancé l'« ANCTour », grande réunion qui a réuni 4 000 personnes, en mai dernier. Cela nous a permis de présenter la totalité de notre offre de services. Un autre ANCTour est prévu le 11 juin prochain en Occitanie. Plus globalement, nous avons opéré une refonte complète de nos outils de communication, afin de rendre l'offre de l'Agence plus simple et plus synthétique. Enfin, nous avons continué de nous rendre sur le terrain à toutes les assemblées générales des maires ainsi qu'aux réunions d'associations d'élus auxquelles nous étions invités, et nous avons cherché à être en contact avec tous les acteurs de terrain pour faciliter l'appropriation des outils. Notre objectif est en effet de faire connaître aux acteurs locaux notre boîte à outils, afin de pouvoir les aider.

Quant aux perspectives pour l'année à venir, il s'agira de déployer tous les outils de proximité en matière d'ingénierie et de poursuivre nos grands programmes comme Villages d'avenir.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux politiques des territoires. -- Ma première question porte sur la visibilité de l'ANCT auprès des élus locaux. Le bilan de votre tour de France a été mitigé, même s'il semble que la présence de l'Agence commence à être connue. Quelles sont les questions essentielles que vous ont posées les élus locaux ?

Deuxième question : avez-vous assisté au cours de votre tour de France à certains comités locaux de cohésion territoriale ? Ont-ils partout la même teneur ou bien faut-il les améliorer dans certains endroits ? S'agit-il d'une simple chambre d'enregistrement où le préfet explique ce qu'il fait ou bien y a-t-il une vraie stratégie d'action ?

Ma troisième question concerne la gouvernance de l'ANCT. Le conseil d'administration se résume à une explication de ce que fait l'Agence sans aborder le sujet de ses orientations pour améliorer son efficacité ou créer une certaine cohésion entre les agences. Il me semblerait souhaitable d'organiser une fois par an au moins un comité stratégique entre les élus et l'Agence pour permettre une réflexion collective sur ses orientations.

Ensuite, les conventions ont été renouvelées, mais quels apports nouveaux comportent-elles ? En quoi ont-elles été améliorées pour une plus grande lisibilité, une plus large intégration des acteurs et une meilleure compréhension du rôle de l'Agence ?

Enfin, les appels à manifestation d'intérêt ont-ils été supprimés au profit d'une discussion directe entre l'Agence et les territoires ?

Je relaie également la question de Rémy Pointereau sur les zones de revitalisation rurale (ZRR). Dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2024, le Gouvernement a proposé une réforme de ce zonage auquel les élus locaux sont particulièrement attachés. Elle entrera en vigueur au 1er juillet 2024, de nombreux élus locaux parlent déjà d'un fiasco en raison des aberrations du nouveau régime de zonage. Les inégalités territoriales qui subsistent risquent de s'aggraver. En réponse à une question d'actualité au Gouvernement du président Longeot du 29 février dernier, la ministre Dominique Faure a annoncé qu'elle ne laisserait aucun maire sans solution. Nous en déduisons qu'un accompagnement sera proposé aux nombreuses communes exclues du dispositif à partir du 1er juillet 2024. L'ANCT sera-t-elle associée à l'accompagnement de ces communes ? Si ce n'est pas le cas, un appui de l'Agence en ce domaine vous paraît-il souhaitable ?

M. Stanislas Bourron. -- Au cours de nos déplacements dans les territoires, nous avons constaté que la dynamique était indéniable. Elle est portée par les élus et nous pouvons l'accompagner avec les services de l'État, les opérateurs et les grands acteurs. La difficulté reste plutôt de savoir si les outils que nous mettons à disposition des acteurs permettent de répondre à toutes les situations ou si nous devons mobiliser des accompagnements spécifiques.

Le sujet de l'habitat concerne toutes les communes, des plus grandes aux plus petites, en particulier dans les zones où la démographie n'est pas très forte. La question des logements vacants est complexe et cela prend du temps de la traiter. Il faut une ingénierie spécialisée, qui intervient notamment dans le cadre des opérations programmées d'amélioration de l'habitat (Opah). Les outils juridiques méritent d'être retravaillés. Nous devons continuer de porter l'effort sur les besoins de logement de la population. Si nous voulons nous inscrire dans une logique de densification, il faut remettre sur le marché les logements qui constituent les fameux « volets fermés ». Quels outils et quels leviers financiers utiliser pour cela ? La question est essentielle, en particulier dans les communes de taille moyenne.

Plus de 90 % des départements font vivre les CLCT de manière dynamique et régulière. Initialement, l'outil servait surtout à la présentation des dispositifs. J'ai participé à une dizaine de CLCT au cours de mes déplacements. Il est important que ce comité local devienne le lieu de détermination d'une stratégie territoriale, comme vous l'avez dit, monsieur le rapporteur pour avis, et que cette stratégie soit accompagnée en ingénierie, voire en investissements financiers. En effet, tous les grands acteurs y participent. Les outils, les difficultés et les contraintes varient énormément selon les départements, de sorte que le produit « clés en main » n'existe pas. Il faudra toujours trouver une réponse adaptée au contexte local. Il me semble que les préfets ont compris l'intérêt de suivre une telle logique et sont prêts à travailler davantage sur la stratégie.

Quant à la gouvernance de l'Agence, nous avons modifié le fonctionnement du conseil d'administration pour insister davantage sur les points d'information à débattre que sur les points statutaires. Peut-être faudrait-il organiser un conseil d'administration entièrement consacré à la stratégie ?

Les conventions signées avec les opérateurs en novembre dernier ne sont pas du tout identiques aux précédentes. En effet, celles qui portaient sur des engagements financiers ont été très compliquées à mettre en oeuvre. Nous avons donc privilégié une logique différente, reposant sur la reconnaissance systématique d'un guichet unique départemental en cas de besoin. Nous avons insisté pour que les opérateurs acceptent que le chemin d'accès à l'information se situe au niveau départemental. Et puis nous avons insisté pour qu'ils partagent avec nous la totalité de leur offre d'ingénierie. Nous avons organisé et classé ces informations, par thématiques et par types, recensé les différents acteurs et les outils disponibles. Ces données sont reprises dans un petit document synthétique, mis à disposition des préfets, afin qu'ils puissent guider les collectivités. Il s'agissait d'une exigence législative. Les informations forment une sorte de bible des soutiens divers, sont exploitables et accessibles sur la plateforme aides-territoires.beta.gouv.fr, qui doit nous en transférer la gestion dans quelques mois.

Pour ce qui concerne les appels à projets impliquant une décision à l'échelle nationale, nous souhaitons consulter les préfets de département et parfois de région, de façon systématique. À titre d'exemple, lorsque l'Agence a travaillé sur le plan de transformation des zones commerciales, le ministère du commerce avait mis à sa disposition une enveloppe nationale et nous avons demandé aux préfets de procéder à une première évaluation des projets proposés par les collectivités.

En ce qui concerne France Ruralités Revitalisation (FRR), nous suivons le sujet avec attention, même si nous ne sommes pas directement à la manoeuvre. Les communes classées en ZRR mais qui ne seront plus couvertes par le zonage FRR continueront de bénéficier d'un certain nombre d'exonérations fiscales et sociales pendant quelques années ; il n'y aura pas d'effet couperet immédiat. Néanmoins, comme tous les critères, ceux qui ont été retenus pourront créer des effets de seuil et nous serons aux côtés des communes qui ne seraient plus éligibles pour accompagner leurs projets. De plus, les préfets leur prêteront une attention particulière.

M. Sébastien Fagnen. -- Ma première question concerne le déploiement du plan France Très Haut Débit, dont nous constatons qu'il marque le pas, puisque le nombre de raccordements opérés a diminué entre 2022 et 2023. De plus, des inquiétudes sont nées des réductions de crédits engagées il y a quelques semaines. Quel rôle entend jouer l'ANCT dans l'accompagnement des collectivités, notamment au travers des réseaux d'initiative publique (RIP), afin d'accompagner nos concitoyens dans le raccordement à la fibre, dans le contexte de la fin programmée du réseau cuivre, qui devrait advenir à la fin de la décennie ?

Cette question est liée aussi à celle de la résilience des réseaux. La Banque des territoires nous a interpellés à ce sujet et nous avons pu observer, de façon empirique, la fragilité des réseaux au cours de l'automne et de l'hiver, marqués par de nombreuses tempêtes. Cette fragilité peut mettre en danger nos concitoyens et à l'arrêt nos services publics, notamment les services d'urgence, lorsque nous en avons le plus besoin.

J'en viens au « zéro artificialisation nette » (ZAN) et au rôle que l'ANCT entend jouer dans sa mise en oeuvre et dans la planification écologique. Vous avez abondamment évoqué l'ingénierie. Nous avons déjà mentionné les écueils nés d'une vision presque exclusivement programmatique, d'une ingénierie à distance, liée à une politique de guichet. De quelle façon envisagez-vous le rôle de l'Agence dans l'accompagnement des élus locaux ? Le lien pourrait être plus ténu entre les directions départementales des territoires (DDT) et les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM), afin de renouer avec une ingénierie concrète et de proximité, ainsi qu'avec une vision planificatrice au long cours, alors que nous avons plus que jamais besoin d'une vision prospective pour réussir à mettre en oeuvre une politique de sobriété foncière à l'échelle nationale.

M. Guillaume Chevrollier. -- En amont de cette audition, j'ai consulté les maires de mon département pour connaître leur point de vue sur l'ANCT. Les retours ont été nombreux et ceux qui connaissent l'Agence sont plutôt satisfaits des services rendus. Cependant, certains ne la connaissent pas, notamment parmi les maires des communes de petite taille, qui sont pourtant ceux qui ont le plus besoin d'ingénierie et de financement. Tous, même ceux qui sont satisfaits de vos services, attendent, à l'issue de leurs réunions avec les chargés de projet, les moyens financiers nécessaires pour mettre en oeuvre leurs projets de revitalisation. Ils se disent confrontés à une « jungle » de dispositifs et d'interlocuteurs.

Le sujet touche aussi les acteurs économiques de nos territoires et je pense notamment au fonds de soutien au commerce rural, que vous avez porté et dont les dotations sont attendues. Le décalage entre l'annonce du déblocage des fonds et la situation concrète des entreprises crée des inquiétudes, notamment pour de jeunes entrepreneurs.

Je souhaite également évoquer le dispositif Fabrique de territoires, dans lequel l'ANCT s'est investie sur la question des tiers lieux, qui constituent des outils de dynamisation pour nos communes. Lorsque ces structures relèvent d'associations, la question du financement dans la durée se pose  ; quelles réponses pouvez-vous apporter ?

Enfin, nombre de nos concitoyens et certains élus sont critiques à l'égard du grand nombre d'agences que compte la France et de leurs 107 milliards d'euros de budget. Le directeur général du Cerema a évoqué une possible fusion entre le centre qu'il dirige, l'Ademe et l'ANCT ; que penseriez-vous d'une telle opération ? Une stabilité est nécessaire pour que les structures et les dispositifs soient bien identifiés par les élus. Il faudrait peut-être sortir de la politique du slogan - Action coeur de ville, Petites Villes de demain, France Ruralités... --, pour laisser place à l'action.

M. Pierre Barros. -- Beaucoup de collectivités sont confrontées à de nombreux dispositifs, qui sont notamment mis en place pour accompagner la désertification des services publics. Il est toujours bon de rapprocher le service public des publics et ce travail porte ses fruits, les collectivités progressent, deviennent plus attractives, et nous observons une évolution de l'indice de position sociale.

Cependant, la construction de logements et le développement de la mixité peuvent conduire de très bons élèves à avoir de mauvaises surprises. Si, grâce à cette attractivité, la population d'une commune augmente un peu, passe d'un seuil à un autre, de 9 900 à un peu plus de 10 000 habitants par exemple, c'est la punition et on tombe dans le syndrome de la classe moyenne. La commune, qui bénéficiait d'un certain accompagnement et de la dotation de solidarité rurale (DSR), touche la dotation de solidarité urbaine (DSU) et sa dotation globale de fonctionnement (DGF) diminue. Ne crée-t-on pas les conditions de l'échec en mettant en place des mesures vertueuses ? Comment poursuivre l'accompagnement, qui constitue le juste prolongement du travail des élus, sans être les victimes d'un effet de seuil, qui casse une dynamique mise en oeuvre de façon volontaire et en partenariat avec les agences et les services de l'État ?

M. Simon Uzenat. -- Vous évoquez les crédits consommés par des dispositifs tels que Petites Villes de demain ou Action coeur de ville. Mais que représentent précisément les sommes fléchées vers des projets concrets et l'investissement ? De nombreux élus nous rapportent qu'une part importante de cet argent, mais aussi de temps et d'énergie, est consacrée à des études préparatoires, parfois mêmes à des études sur des études. La même question se pose pour Villages d'avenir. Quelle peut être l'efficacité du recrutement d'un chef de projet par département ? L'effet de levier sera-t-il atteint ?

Pour ce qui concerne la politique de la ville, vous avez dit qu'une quarantaine de communes sortiraient du dispositif, dont certaines sont en Bretagne. Nous avons défendu l'idée d'une politique de la ville en archipel, pour agir au plus près des territoires et pouvoir accompagner les quartiers comptant un petit nombre d'habitants. Quelle offre de service mettez-vous en place pour ces quartiers, qui sortent de la géographie prioritaire ?

En ce qui concerne France Services, la participation de l'État a beau être en hausse, elle reste insuffisante. Je rappelle que, jusqu'à récemment, les services concernés étaient pris en charge par l'État. Aujourd'hui, les collectivités locales, en particulier le bloc communal, assument plus de la moitié des charges.

L'augmentation des moyens de l'ANCT représente une évolution positive, mais le nombre de projets accompagnés s'élève à environ 800. La progression est significative mais, rapporté au nombre de communes qui ont besoin d'accompagnement, ce chiffre reste marginal. Comment considérez-vous cette montée en charge ?

M. Ronan Dantec. -- Quels crédits d'ingénierie liés au fonds vert et à la transition gérez-vous ?

Je souhaiterais insister sur les efforts fournis pour que l'architecture globale soit compréhensible par les communes, même si certaines d'entre elles ignorent encore ce qu'est l'ANCT. Globalement, un dispositif complet a été imaginé par l'État, un guichet unique est en place et l'ensemble des opérateurs se mettent d'accord. Ma question est peut-être prématurée mais pouvez-vous déjà appréhender les demandes des collectivités auxquelles vous réussissez à répondre et celles que vous ne parvenez pas à traiter ? Quel regard portez-vous sur l'efficacité du dispositif ?

M. Jean-François Longeot, président. -- Je souhaite vous interroger sur les milliards d'euros d'économie programmés ou qui le seront prochainement ; quels programmes seront impactés en 2024 et en 2025 par ces baisses de crédits ? Dans quels volumes ? Ces décisions vous paraissent-elles conformes aux besoins des populations et des collectivités ?

M. Jean-Claude Anglars. -- En ce qui concerne le ZAN, nous avons mis en place un comité de suivi, qui vise à évaluer ce qui fonctionne et à identifier des propositions. Cette question constitue une préoccupation pour les élus ; vous y intéressez-vous ?

Nous sommes heureux que le fonds vert ait été mis en place pour les collectivités et sommes convaincus qu'il faut faire la même chose pour les aides à l'habitat privé. Il faut imaginer comment refondre les aides existantes pour les particuliers, afin d'atteindre cet objectif.

La loi du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables (Aper) intéresse aussi les élus, qui se posent des questions et essayent de trouver des solutions ; travaillez-vous sur le sujet ?

M. Stanislas Bourron. -- En ce qui concerne le plan France Très Haut Débit, le raccordement atteint déjà 85 % ou 86 % dans les RIP et, dans de nombreux départements que j'ai visités, ce chiffre s'élève à 97 % ou 98 %. Cependant, ce pourcentage reste bien plus bas dans certaines zones, où la mobilisation de tous les acteurs constitue un enjeu important.

Quand le pourcentage approche 100 %, la marge restante est difficile à combler et les efforts qui restent à fournir soulèvent des questions techniques, pour lesquelles d'autres solutions devront être envisagées.

Dans le cas des RIP, qui continuent de constituer notre priorité, je rappelle que nous sommes partis de très loin puisque la couverture était d'environ 15 % il y a douze ans. Le travail accompli par les collectivités locales, avec le soutien du fonds national pour la société numérique, a permis de changer la façon dont ces territoires peuvent envisager leur avenir. La fracture numérique a disparu dans de nombreux endroits.

En ce qui concerne la résilience des réseaux, nous avons travaillé avec les équipes locales pour tenter d'apporter des solutions et de comprendre comment parvenir à donner des conseils. Nous avons notamment développé des guides pratiques sur la méthodologie, pour faire valoir les bonnes pratiques et assurer le partage d'expérience. Quand la couverture sera autour de 98 % partout, la qualité de service et la résilience deviendront les sujets de préoccupation principaux.

La fin du cuivre ne peut être envisagée tant que tout le monde n'est pas rattachable à un réseau fibre. À titre expérimental, Orange a engagé des travaux dans quelques communes. L'entreprise porte aussi un dispositif d'accompagnement, que nous devons contribuer à faire connaître. Dans les départements, on explique comment les choses doivent se passer dans les centres locaux d'information et de concertation (Clic). Sur ce sujet, la pédagogie est très importante. Il faut prendre le temps de mettre en oeuvre le dispositif dans de bonnes conditions et il s'agit d'un sujet d'attention pour l'Agence. Par ailleurs, les préfets sont très mobilisés pour demander à Orange de présenter ses offres de service et de garantir qu'il n'y aura pas de rupture.

J'en viens à la question du ZAN. Avant même que l'objectif ne soit fixé par la loi, un programme comme Action coeur de ville, porté par des élus, visait déjà à reconquérir des centres-villes. Une ville est un lieu d'échanges et vit grâce à son centre, qui a besoin d'activité commerciale et d'une densité de population minimale. Le modèle qui consiste à se déployer vers la périphérie n'est pas soutenable et il faut réattaquer par le centre, réinvestir les coeurs de ville, qui sont déjà artificialisés, réinvestir les logements vacants, les espaces non utilisés et les friches économiques. Les élus le font et nous les y aidons, grâce à des dispositifs portés par Action Logement, l'Anah ou la Banque des territoires. Ce travail de restructuration, qui vise à développer le logement et les commerces dans le coeur de ville, sans construire en périphérie ni grappiller les espaces agricoles, relève de la sobriété foncière. Depuis leurs débuts, Action coeur de ville et Petites Villes de demain font vivre cette logique de sobriété foncière. Afin de les soutenir, nous portons le dispositif territoire pilote de sobriété foncière (TPSF), dans le cadre duquel j'ai assisté à des restitutions remarquables, qui montraient que les élus ont bien compris que le bâti était truffé d'espaces à développer. En dehors de quelques cas, où la tension foncière peut justifier de nouvelles constructions, la reconquête des zones bâties reste la priorité de ces programmes, qui concernent plusieurs milliers de communes.

Je vous rejoins : nous avons besoin de planification et d'une stratégie territoriale. Dans le cadre des contrats de relance et de transition écologique (CRTE), le territoire et l'État partagent une vision pour un bassin de vie et une stratégie sur le moyen terme. Tous les programmes existants entrent dans ce cadre. L'Agence animera ce dispositif et mettra à disposition un outil numérique pour faire vivre les CRTE. La réussite d'un territoire passe par sa capacité d'avoir une stratégie partagée, soutenue par l'État.

Certaines communes ne nous connaissent pas, ce qui est normal. Nos déplacements visent à faire connaître les dispositifs que nous portons. Notre objectif n'est pas d'être connus mais de nous assurer que, si un projet mérite d'être accompagné et bute sur une difficulté, nous puissions être utiles. Si vous identifiez, en tant que sénateurs, des dossiers bloqués, vous pouvez proposer à l'élu concerné de s'adresser au préfet ou au sous-préfet, parce que le chemin existe. Parfois, les projets sont bloqués à cause de la complexité des dossiers à préparer. Nous sommes là pour faire en sorte que ce ne soit plus la « jungle », que les choses soient les plus simples possible pour les élus qui ne sont pas armés pour faire face à la complexité, notamment dans les petites collectivités. C'est à l'État d'amortir cette complexité et ses services départementaux se montrent de plus en plus à l'écoute sur cette question.

Notre budget est modeste, il s'élève à environ 200 millions d'euros, dont les trois quarts financent l'intervention. Nous voyons transiter les crédits, comme pour le fonds de soutien au commerce rural, notre rôle étant d'animer et de reverser. Ce transfert crée parfois, en début d'année, des délais liés au conventionnement, qui sont pénibles et que nous subissons aussi.

La politique des tiers lieux a été largement portée par la Fabrique de territoires et Manufactures de proximité, notamment dans le cadre du plan de relance, grâce à des crédits importants. Cette année, nous pouvons encore accompagner quelques dizaines de projets. Les crédits sont alloués sur trois ans, ce qui doit permettre de couvrir le lancement du dispositif. Ensuite, le modèle doit s'installer, ce qui n'est pas toujours simple. Dans certains cas, les tiers lieux trouvent un modèle économique, notamment grâce à des financements liés au paiement de loyers. Mais les modèles associatifs ne s'équilibrent pas. Cependant, nous nous concentrons sur l'aide au démarrage et n'avons pas de solution de soutien pérenne. Il faut organiser des tours de table locaux. Ces dispositifs contribuent à animer nos territoires et rencontrent un vrai succès.

J'en viens aux propos tenus sur d'éventuelles fusions. Les directeurs généraux d'établissements publics n'ont pas le mandat pour parler de ces questions. L'Agence, qui a quatre ans d'ancienneté, est issue de la fusion de cinq structures et a réussi à stabiliser sa situation financière. Je vous rejoins : la stabilité et la lisibilité sont cruciales, et nous ne les favoriserons pas en fusionnant tous les trois mois. La création d'une structure de 4 000 agents ne m'apparaît pas forcément comme une bonne solution. La mission de l'Agence est différente de celles des autres structures, même si nous avons des points de proximité, autour desquels nous faisons en sorte de dépasser nos difficultés. À titre d'exemple, nous sommes tous mobilisés sur la question de l'adaptation au changement climatique. Nous avons un mandat ministériel et nous engageons en fonction de nos moyens et compétences propres : le Cerema avec des agents, l'Ademe avec des moyens financiers et l'ANCT avec des crédits d'ingénierie. Nous déployons tous un soutien pour les collectivités qui le demandent. Cependant, nous avons besoin d'une stratégie partagée avec l'Ademe et le Cerema, avec lesquels nous avons signé des conventions et avec lesquels les choses se passent bien.

Sur la question des communes sortant du dispositif QPV, leur nombre est limité puisqu'elles sont quarante. Pour la grande majorité, elles sont sorties en raison du critère du revenu médian et on observe parfois un « effet de yoyo ». Dans l'application par décret, nous avons recherché un maximum de souplesse afin d'éviter les effets de seuil, que nous n'avons pas pu faire disparaître. Comment gérer cette situation ? La ministre Agresti-Roubache a souhaité que nous puissions réserver une partie des crédits du contrat de ville aux QPV sortants. Ces crédits, à la main du préfet, permettent d'accompagner des territoires qui méritent encore une attention importante.

Pour ce qui est des effets de seuil entre DSR et DSU, nous avons tenté de créer des dispositifs d'atténuation pour éviter les effets de cliquet, en prévoyant une progressivité de sortie pluriannuelle. Certes, ce passage peut avoir un impact sur la DGF, mais le maximum est fait pour le réduire.

J'en viens à la question des crédits consommés pour financer l'ingénierie. Les 8,4 milliards d'euros engagés pour Action coeur de ville se répartissent ainsi : les 3,8 milliards d'euros de la Banque des territoires financent, pour leur immense majorité, des investissements en direct ou des prêts ; les 2,5 milliards d'euros d'Action Logement ont essentiellement été versés pour financer des opérations d'investissement afin de reconquérir des logements ; l'Anah a investi 890 millions d'euros dans les Opah ; et l'État a contribué, à travers ses dotations d'investissement, à hauteur de 663 millions d'euros. Ainsi, 95 % ou 96 % de la somme totale correspondent à des crédits d'investissement dans le logement et le commerce, à de l'emprunt ou à des subventions d'investissement. Des crédits sont aussi consacrés à l'ingénierie et il en faut. En effet, pour qu'un projet réussisse, il doit être bien préparé afin de tenir la route. Nous menons des études pour que les dossiers soient bons et crédibles, qu'ils puissent obtenir des financements de l'État, mais aussi du département et de la région. L'ingénierie sert à renforcer la qualité des projets.

J'en viens aux chefs de projet du programme Villages d'avenir. Les premiers ont été recrutés en décembre et les derniers ne sont pas encore arrivés. Je suis très impressionné par le niveau de recrutement. Dans leur grande majorité, ils ont une vraie expérience professionnelle et viennent du terrain, surtout des collectivités, mais aussi du service de l'État et de structures parapubliques ou d'opérateurs. Leur bonne connaissance du terrain leur permet d'aller vite et l'effet de levier est déjà net. La ministre Dominique Faure a demandé un recensement des projets prêts et des « projets pépites », qui mériteront une attention particulière et que nous pourrons présenter lors du conseil d'administration. Ces projets de toutes natures relèvent des domaines de l'équipement, du logement, de la culture ou du patrimoine. Il faudra les évaluer dans le temps et nous assurons un suivi très précis, les chefs de projets devant remplir un tableau de reporting sur tous les projets qu'ils accompagnent. Nous pourrons rendre compte de la typologie de ces 7 500 projets. Nous accompagnons en tant qu'agence 800 projets. La montée en charge est en cours puisque nous avons quasiment atteint 300 projets en quelques mois. Certains projets concernent aussi plusieurs communes. Nous sommes très attentifs à ce que les moyens budgétaires mis à notre disposition soient pleinement utilisés.

Le fonds vert permet d'avoir des financements d'ingénierie sur des projets, par exemple en matière de friches. Une ligne d'environ 20 millions d'euros est consacrée à l'ingénierie de cofinancement de poste ou au financement d'études. Cette ligne est transverse. Nous la suivons donc pour nous assurer qu'elle est bien mobilisée, en articulation avec nos propres crédits. Y a-t-il trop de demandes ? À l'instant où je vous parle, je constate simplement qu'un certain nombre de communes auraient besoin de nous solliciter, mais ne le font pas. Nous cherchons donc à nous appuyer sur les associations d'élus : Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF), Association des maires ruraux de France (AMRF). Je vous invite également à nous signaler tous les projets bloqués.

En ce qui concerne les économies budgétaires, l'Agence n'a subi aucune annulation de crédits. Grâce au vote du Parlement, les crédits du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et du programme 147 « Politique de la ville » sont même en augmentation. Les annulations et les gels portent en effet essentiellement sur des crédits non utilisés, de surcroît complémentaires. Nous sommes donc en mesure de mener la plupart de nos opérations, d'autant que les crédits de la politique de la ville ont fortement augmenté.

Sur les questions des énergies renouvelables, même si ce n'est pas un sujet sur lequel nous sommes à proprement parler en première ligne, nous accompagnons déjà certaines collectivités, notamment en matière de participation citoyenne.

M. Cédric Chevalier. -- J'avais peu de visibilité sur l'ANCT dans mon département. Soyez certain qu'à l'avenir je ne manquerai pas de vous consulter !

Le réseau France Services est en grande partie à la charge des communes. L'évolution de la dotation concerne-t-elle les maisons déjà en place ou seulement celles qui seront créées ? Pour beaucoup de communes, il s'agit d'un vrai gouffre financier. Il est aussi grandement question des nouveaux dispositifs Villages d'avenir, Action coeur de ville, etc. Quid pour les communes qui n'y ont pas accès ? Avez-vous identifié des trous dans la raquette ?

M. Simon Uzenat. -- Pour les QPV, le seuil est de 1 000 habitants. Pouvez-vous nous communiquer les chiffres de la ventilation du programme Petites Villes de demain ?

M. Jean-François Longeot, président. -- Dans quel département y a-t-il un laboratoire piloté par le préfet pour la mise en oeuvre de France Ruralités ? Ce modèle se déploiera-t-il de manière équitable sur d'autres territoires ?

M. Stanislas Bourron. -- Y a-t-il des trous dans la raquette ? J'ai parlé des grands programmes de la première vague : 250 communes Action coeur de ville, 1 600 communes Petites Villes de demain, 2 500 communes Villages d'avenir. La ministre a annoncé une nouvelle vague. Mais, effectivement, cela ne couvre pas absolument tout le monde. En revanche, notre capacité d'accompagnement est réelle et peut concerner la totalité des communes, notamment si le dossier est complexe. N'hésitez donc pas à nous solliciter. Pour tout vous dire, nous accompagnons même des métropoles ! Pour les communes de 3 500 habitants ou moins, en l'absence de solution locale, notre financement peut aller jusqu'à 100 %. Idem pour les intercommunalités de moins de 15 000 habitants. Il suffit pour cela de s'adresser au sous-préfet, à la DDT ou au préfet.

Le financement des nouvelles maisons France Services se fera au fur et à mesure des créations : 40 000 euros aujourd'hui, 50 000 euros l'année prochaine, etc.

M. Cédric Chevalier. -- Uniquement pour les nouvelles ?

M. Stanislas Bourron. -- Non, pour l'ensemble du stock ! Dans un certain nombre de cas, la Banque des territoires ou l'État localement, via la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), peuvent également participer aux financements.

En ce qui concerne le seuil de 1 000 habitants, nous avons travaillé sur des périmètres. Nous avons fait tout ce que nous avons pu, nous avons même fourni un outil de tracé aux préfets. Malgré cela, nous n'avons pas réussi à trouver des solutions pour certains quartiers de quelques centaines d'habitants. Quoi qu'il en soit, le dispositif de soutien que j'ai évoqué peut tout de même s'appliquer.

Quant au laboratoire de la ruralité, monsieur le président, il a été créé dans les Vosges. Il a été soutenu par Michel Fournier, vice-président de l'ANCT, et par l'État. Il a mis en place un certain nombre de dispositifs et a animé une dynamique locale. La ministre a souhaité dupliquer l'expérimentation dans l'Aude, en s'adaptant au contexte local. Un autre préfet étudie également la possibilité de mettre sur pied un dispositif de même nature. À ma connaissance, nous ne systématiserons pas forcément ces laboratoires. Il s'agit plutôt de tirer les leçons de ce qui fonctionne ou pas, avant de l'appliquer ensuite au reste du territoire national.

M. Jean-François Longeot, président. -- Merci, monsieur le directeur général, d'avoir répondu à nos questions. Nous relaierons le message de l'ANCT dans nos départements. Cette agence mérite d'être mieux connue, les collectivités ont réellement besoin d'un guichet unique.

Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Bilan annuel de l'application des lois - Communication

M. Jean-François Longeot, président. - Mes chers collègues, comme chaque année à cette époque, la commission doit remplir l'une des missions qui lui sont dévolues, celle qui consiste à rendre compte du suivi de l'application des lois qu'elle a instruites. Cet exercice, loin d'être anodin, procède en effet d'une exigence constitutionnelle, en application de l'article 24 de la Constitution, et constitue l'une des facettes de la mission de contrôle de l'action du Gouvernement par le Parlement.

Pour ce faire, notre règlement - ses articles 19 bis A et 19 bis B en particulier - s'affûte au fil des années pour permettre aux commissions de mieux remplir leur office.

Chaque année, leur président et les rapporteurs des lois concernées procèdent en conséquence à un bilan de l'application des lois relevant de leurs compétences au 31 mars 2024, soit six mois après la fin de la session précédente. Naturellement, nous ne nous empêcherons pas de préciser, le cas échéant, si de nouvelles mesures d'application ont été publiées depuis cette date.

Ces informations font ensuite l'objet d'un rapport de synthèse écrit, puis d'un débat en séance publique. À cet égard, je vous indique que ce débat aura lieu mardi 28 mai à seize heures quinze et sera, je l'espère, l'occasion d'interpeller directement le Gouvernement sur les insuffisances constatées dans la mise en application des lois que nous avons adoptées.

Le bilan que je vous présente porte donc sur les lois promulguées au cours des dix dernières années jusqu'au 30 septembre 2023.

À titre liminaire, je souhaite appeler l'attention de notre commission sur quelques constats généraux.

Deux lois examinées au fond par notre commission sont entrées en vigueur au cours de la session parlementaire 2022-2023, contre quatre durant la session précédente. Il s'agit de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables (ENR), et de la loi n° 2023-305 du 24 avril 2023 portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) d'emballages ménagers et des producteurs de papier.

Parmi ces deux textes, le second, celui sur la fusion des filières REP d'emballages ménagers et de papier, est déjà pleinement applicable. Je précise toutefois que ce texte ne prévoyait qu'un nombre très limité de mesures d'application, deux décrets en l'occurrence.

La loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables prévoyait 58 mesures d'application, dont 48 attendues au 31 mars 2024. Elle n'a fait l'objet que de 15 mesures publiées. Même si 7 nouvelles mesures ont été prises en avril et donc ne sont pas prises en compte dans le présent bilan, le taux d'application reste très faible et inférieur à 50 % un an après la promulgation de la loi. Nous ne pouvons que le déplorer, surtout dans le contexte actuel, qui impose des efforts accrus pour faire face à l'urgence climatique : le signal politique à envoyer doit être sans équivoque, quel que soit le secteur concerné. Je laisserai nos collègues revenir sur ce texte tout à l'heure.

Pour ce qui concerne les textes plus anciens, parmi les 30 lois promulguées entre le 1er octobre 2013 et le 30 septembre 2022 relevant des domaines de compétence de notre commission et nécessitant des mesures d'application, 11 devaient encore faire l'objet d'une ou de plusieurs mesures d'application au 1er avril 2023. Entre le 1er avril 2023 et le 31 mars 2024, 28 mesures d'application de ces lois ont été prises.

La progression est cependant très inégale selon les textes.

La loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), dont nous venons d'entendre le directeur général faire le bilan des quatre années d'activité, est enfin applicable à 100 % avec la signature le 28 juillet dernier de la convention-cadre entre l'État et l'ANCT définissant les mesures et moyens permettant à l'agence de reprendre les missions de l'Agence du numérique.

Le taux d'application de la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi Climat et résilience, du 22 août 2021 a sensiblement progressé, passant en un an de 58 % à 70 % et celui de la loi visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France (REEN) est passé de 33 % à 50 %, mais sur un total de seulement six mesures.

Je profite de cette occasion pour vous indiquer que la loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique (Asap), élaborée par une commission spéciale que j'avais eu l'honneur de présider, est enfin applicable à 100 % pour ce qui concerne les articles suivis par notre commission, grâce à une mesure intervenue en septembre 2023. Toutefois, l'ensemble du texte n'est lui applicable qu'à 70 %.

Quatre autres textes connaissent, par contraste, une progression plus timide.

La loi du 20 juin 2016 pour l'économie bleue, la loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM), la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (Agec) et la loi du 8 octobre 2021 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne (Ddadue) dans le domaine des transports, de l'environnement, de l'économie et des finances voient leur taux d'application progresser lentement, passant respectivement de 88 % à 92 %, de 92 % à 93 %, de 83 % à 89 % et de 74 % à 78 %. On peut regretter que, plusieurs années après leur promulgation, ces lois ne soient toujours pas encore totalement applicables. Un regret également en ce qui concerne la LOM, celui du nombre de rapports remis par le Gouvernement : à ce jour, seulement 9 sur 16 attendus...

Plus préoccupant, encore quatre textes plus anciens - la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, dite loi Biodiversité ; la loi du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, dite loi Montagne ; la loi 29 décembre 2016 relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le secteur du transport public particulier de personnes (T3P) ; et la loi du 24 juillet 2019 portant création de l'Office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l'environnement (OFB) - non seulement ne sont toujours pas applicables en totalité, mais, de surcroît, n'ont fait l'objet d'aucune mesure d'application supplémentaire prise au cours des douze derniers mois.

Sur un autre sujet, je rappelle que, l'an dernier, notre commission, comme d'autres, s'était émue de la tendance préoccupante d'accélération du recours aux ordonnances dans de très nombreux domaines. Nous avions également déploré que l'exécutif, souvent, ne fût pas capable de publier les ordonnances dans les délais auxquels il s'était lui-même soumis.

Ainsi, lors de l'année parlementaire 2021-2022, deux habilitations étaient devenues obsolètes faute d'avoir donné lieu à des ordonnances dans les délais.

Sur l'année parlementaire 2022-2023, le bilan est plus positif : les deux ordonnances qui devaient être prises dans le cadre des habilitations données par les lois Climat et résilience et ENR ont été publiées dans les délais impartis, et les projets de loi de ratification ont été déposés sur le bureau de l'Assemblée nationale.

Après ces remarques liminaires très chiffrées, je vais maintenant céder la parole à nos rapporteurs, afin qu'ils complètent cette analyse par une approche plus « qualitative ». Je rappelle qu'en application de l'article 19 bis B du règlement du Sénat, les rapporteurs sont chargés de suivre l'application de chacune des lois promulguées.

À ce propos, je souhaite appeler votre attention sur la mission d'information en cours, chargée d'évaluer l'action de l'Office français de la biodiversité depuis sa création : à cette fin, le rapporteur Jean Bacci procède à un bilan qualitatif de la loi de 2019, en menant un cycle d'auditions et de déplacements de terrain. Cette mission a vocation à élaborer des recommandations pour faciliter les relations entre cet établissement public et les acteurs qui interagissent avec lui et accroître la perception de la légitimité de ses missions.

Je cède maintenant la parole à nos rapporteurs, d'abord à Marta de Cidrac et à Pascal Martin, rapporteurs de la loi Climat et résilience, à Guillaume Chevrollier, rapporteur de la loi REEN et à Didier Mandelli, rapporteur de la loi ENR.

Je donnerai enfin la parole à Jean Bacci et à Pascal Martin, respectivement président et rapporteur de la commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie, afin qu'ils nous fassent un premier bilan de cette loi promulguée le 23 juillet 2023.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure de la loi Climat et résilience. - Venons-en à l'application de la loi Climat et résilience du 22 août 2021, dont nous Philippe Tabarot, Pascal Martin et moi-même étions rapporteurs. Commençons par le bilan statistique.

Près de trois ans après sa promulgation, la loi affiche un taux d'application de 70 %. Sur les 141 mesures attendues, 42 manquent encore à l'appel. Compte tenu de l'urgence climatique et de la nécessité de réduire fortement nos émissions de gaz à effet de serre d'ici à la fin de la décennie, nous ne pouvons que déplorer les retards pris dans l'application de cette loi.

Avant d'entrer dans le détail de certains articles, j'aimerais faire un point sur le rythme de rédaction des émissions de gaz à effet de serre, car c'était l'objectif principal du texte.

Selon le Centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (Citepa), les émissions ont baissé de 4,8 % en 2023 par rapport à 2022, pour atteindre 385 millions de tonnes équivalent CO2, soit 29 % de moins que le niveau enregistré en 1990. Cette baisse est notable à plusieurs égards.

Tout d'abord, il s'agit de la plus forte diminution depuis 2015 - exception faite de l'année de la pandémie, en 2020. De surcroît, les budgets carbone de la deuxième stratégie nationale bas-carbone (SNBC2) sont atteints. Par ailleurs, la baisse constatée en 2023 est, pour la première fois, commune à l'ensemble des grands secteurs, y compris le transport routier.

Toutefois, le Citepa juge difficile de déterminer la part prise par les effets conjoncturels et structurels dans la baisse constatée. Le rôle joué par les politiques publiques, notamment par les dispositions de la loi Climat et résilience, semble donc particulièrement difficile à évaluer, comme l'a d'ailleurs constaté la Cour des Comptes dans son rapport public annuel du 15 mars dernier.

De plus, je rappelle que, pour réduire les émissions nettes de l'Union européenne de 55 % d'ici à 2030, la performance de l'année 2023 devra être renouvelée jusqu'à la fin de la décennie. Ce n'est visiblement pas le chemin pris par la France, même en tenant compte des mesures supplémentaires envisagées par l'exécutif dans le cadre de la SNBC3 : selon les estimations du ministère de la transition écologique de novembre dernier, si l'objectif de réduction de 50 % brut est susceptible d'être atteint, la sous-performance des puits carbone - en raison principalement de la mauvaise santé de la forêt française - compromettrait l'atteinte de l'objectif d'une baisse de 55 % net ; la diminution enregistrée serait de 51,5 %.

Pour combler cet écart, la France devra donc envisager des mesures additionnelles, afin d'accélérer la réduction de ses émissions sectorielles. Cet accroissement de l'effort devra être engagé dans un contexte difficile, marqué par un « risque de recul de l'ambition de la politique climatique » de la France, pointé dans un courrier du Haut Conseil pour le climat adressé au Premier ministre le 2 avril dernier, et marqué notamment par les retards pris dans la publication des troisièmes SNBC et programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).

Cela étant, je vais à présent me faire le porte-voix de Philippe Tabarot, rapporteur du titre IV « Se déplacer », lors de l'examen du projet de loi Climat et résilience.

Il souhaite, vous vous en doutez, nourrir les réflexions de la commission sur un sujet qui lui tient beaucoup à coeur : celui des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m), dont l'article 119 de la loi Climat et résilience prévoit l'accélération du déploiement. Plus précisément, la loi prévoyait l'obligation, pour toutes les agglomérations situées sur le territoire métropolitain et comptant plus de 150 000 habitants, d'instaurer une ZFE-m d'ici au 31 décembre 2024, ainsi que l'obligation, pour les ZFE-m créées en application de la LOM qui connaissent des dépassements réguliers des normes de qualité de l'air de mettre en oeuvre le schéma d'interdiction de circulation des véhicules à quatre roues de plus de 3,5 tonnes suivant : véhicules classés Crit'air 5 au 1er janvier 2023 ; véhicules Crit'air 4 au 1er janvier 2024 ; véhicules Crit'air 3 au 1er janvier 2025.

Notre commission avait alerté, dès l'examen du projet de loi, sur les difficultés d'acceptation sociale qu'un déploiement trop brutal des ZFE-m était susceptible de poser. Ces craintes se sont vues confirmées par les conclusions de la mission d'information conduite par Philippe Tabarot, qui dans son rapport Zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) : sortir de l'impasse plaidait pour un assouplissement du calendrier de mise en oeuvre des restrictions de circulation conjugué à une accélération du verdissement du parc de véhicules et à un soutien plus large aux alternatives à la voiture. Les collectivités territoriales concernées se trouvaient en effet au pied du mur puisqu'il leur était imposé de mettre en oeuvre les restrictions de circulation, sans pour autant bénéficier de politiques d'accompagnement suffisantes ni des modalités de contrôle associées.

Le Gouvernement n'avait pour autant pas jugé opportun de retenir les évolutions proposées par notre commission. Quelle ne fut donc pas notre surprise lorsque nous avons appris, à la suite de la réunion du comité ministériel qualité de l'air en ville du 20 mars dernier, que Rouen, Marseille et Strasbourg sortaient du dispositif le plus contraignant s'appliquant aux agglomérations en dépassement des seuils de qualité de l'air, compte tenu de l'amélioration des normes de qualité de l'air dans ces villes. Si nous pouvons nous réjouir que la qualité de l'air s'améliore dans ces agglomérations, les évolutions de la politique conduite par le Gouvernement ainsi que le manque de visibilité et d'anticipation donnée aux collectivités intéressées peuvent laisser songeur...

En outre, Paris et Lyon restent quant à elles soumises aux obligations de mettre en place des interdictions de circulation des véhicules Crit'air 3 d'ici au 1er janvier 2025. Or les politiques d'accompagnement sont encore largement insuffisantes pour soutenir ces collectivités dans cette démarche, comme en témoigne l'arrêt du dispositif de leasing social, moins de deux mois après son lancement.

Le prêt à taux zéro ZFE-m, pour lequel nous nous étions battus lors de la commission mixte paritaire, a quant à lui mis beaucoup de temps à se mettre en place, le Gouvernement ayant publié les dernières mesures d'application en juin 2023, soit plus de six mois après la date à laquelle devait être concrétisée cette mesure.

En définitive, les difficultés de mise en oeuvre des ZFE-m restent encore loin d'être réglées.

M. Pascal Martin, rapporteur de la loi Climat et résilience. - Je souhaite aborder le volet de la loi Climat et résilience relatif à l'adaptation des territoires littoraux face au recul du trait de côte, qui touche 20 % des côtes françaises. Sur ce sujet, la loi prévoyait un dispositif en trois temps :

- premièrement, l'identification des communes littorales exposées au recul du trait de côte qui sont volontaires pour adapter leurs politiques d'aménagement à ce phénomène ;

- deuxièmement, la réalisation par ces communes de cartes locales évaluant l'exposition de leur territoire au recul du trait de côte et la traduction de ce zonage dans les documents d'urbanisme dans un délai maximal de quatre ans ;

- troisièmement, la conduite d'opérations d'aménagement pour relocaliser les biens les plus menacés vers des zones rétro-littorales.

Pour l'heure, la mise en oeuvre de la réforme se heurte, comme nous l'avions prédit lors de l'examen de la loi Climat et résilience par le Sénat, au manque total de visibilité sur les modalités de financement des opérations de recomposition spatiale.

Le décret fixant la liste des communes devant adapter leur politique d'aménagement au recul du trait de côte a été publié dès avril 2022 puis complété en juillet 2023. Au 31 mars 2024, 242 communes volontaires figuraient sur la liste. Un décret modificatif a été soumis à publication ces dernières semaines, qui conduira à porter cette liste à 316 communes littorales.

L'allongement de la liste des communes souhaitant mettre en oeuvre le dispositif prévu par la loi Climat et résilience constitue une avancée pour le déploiement de la stratégie nationale de gestion du recul du trait de côte. L'absence de modèle de financement constitue toutefois un obstacle majeur à la concrétisation de cette démarche. D'une part, elle conduit de nombreuses communes exposées au recul du trait de côte à rester à l'écart du dispositif, dans l'attente de garanties de l'État. Un récent rapport d'inspection souligne que les communes les plus touchées par le recul du trait de côte sont d'ailleurs loin d'avoir toutes rejoint le décret-liste, et qu'il existe un décalage entre les communes ayant le plus de biens menacés et celles ayant rejoint la liste. D'autre part, parmi les communes ayant rejoint cette liste, très peu d'opérations de recomposition ont d'ores et déjà été engagées.

À la demande du ministère de la transition écologique, le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) a récemment évalué les enjeux financiers liés au recul du trait de côte à court, moyen et long termes en France : si ces enjeux sont limités d'ici à 2028, la valeur vénale des biens menacés s'élève à 1,2 milliard d'euros à l'horizon de 2050 et devrait atteindre 86 milliards d'euros à l'horizon de 2100.

Le comité national du trait de côte (CNTC) - auquel appartient notre excellent collègue Didier Mandelli - a été mis en place en mars 2023 pour objectiver les besoins et identifier des pistes de financement pérennes dans la perspective du prochain projet de loi de finances. Si je regrette que le Gouvernement ait attendu près de deux ans, après la promulgation de la loi, pour engager ce travail de réflexion, notre commission suivra avec la plus grande attention les résultats des travaux du CNTC et leur traduction législative.

M. Guillaume Chevrollier, rapporteur pour la loi REEN. - Monsieur le président, mes chers collègues, la loi du 15 novembre 2021 visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France, dite loi REEN, est issue des travaux de notre commission. Il est donc opportun que nous en assurions un suivi particulièrement vigilant. Ce texte comporte de nombreux dispositifs d'application directe. Le nombre de mesures d'application attendues - 6 décrets d'application sur 36 articles - est donc faible. Deux décrets étaient déjà parus au 31 mars 2023, et un troisième a été publié depuis, portant le taux d'application du texte à 50 %. Ce décret fixe les modalités d'application et le calendrier de l'obligation de réemploi ou de réutilisation des équipements informatiques fonctionnels des services de l'État et des collectivités territoriales.

Trois décrets sont encore attendus. En particulier, deux d'entre eux doivent préciser les modalités de mise en oeuvre de l'écoconditionalité de l'avantage fiscal attribué aux centres de données en matière d'électricité. Or, selon les données collectées par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep), la consommation d'électricité et d'eau des centres de données français est en forte augmentation. Cette hausse est de 15 % pour l'électricité et de 20 % pour l'eau. Les émissions de gaz à effet de serre sont en croissance de 14 %. Ces données montrent qu'il est essentiel et urgent d'inciter les centres de données à réduire leur consommation d'électricité et l'eau. Nous appelons donc une nouvelle fois à la publication rapide de ces décrets, qui inciteront les centres de données à maîtriser leur consommation d'énergie et d'eau.

En outre, au cours de l'examen de la loi REEN, notre commission avait souhaité ne pas assujettir les appareils reconditionnés à la redevance pour copie privée. Nous avions regretté que les députés et le Gouvernement aient fait le choix inverse, contradictoire avec l'objectif de la loi.

La commission copie privée a écrit en décembre dernier un courrier à l'attention du Gouvernement dans lequel elle constate que les études sur ce sujet prévues par la loi REEN n'ont pas été remises au Parlement. La commission appelle donc le Gouvernement à les mener le plus rapidement possible, et plus largement, à prendre ses responsabilités et à revenir sur sa décision d'assujettir les appareils reconditionnés à la redevance copie privée.

M. Didier Mandelli, rapporteur de la loi ENR. - Plus d'un an après sa promulgation, la loi relative à la production d'énergies renouvelables (ENR) affiche un taux d'application de seulement 26 %. Ce chiffre interpelle au regard de l'urgence à déployer les énergies renouvelables, indispensables au futur climatique et énergétique de la France, y compris dans une trajectoire de relance ambitieuse du nucléaire. Cette urgence avait d'ailleurs justifié des délais d'examen particulièrement resserrés et une mobilisation importante du Parlement, en particulier de notre commission, qui avait largement amélioré et complété le texte du Gouvernement. Il me semble que l'exécutif doit donc réagir rapidement pour donner à cette loi l'envergure que nous avions souhaité lui donner.

Je souhaite maintenant appeler votre attention sur l'application du volet planification du texte, dont notre commission est à l'origine.

Pour rappel, la loi a renforcé le pouvoir des maires dans la planification du déploiement des énergies renouvelables terrestres. Sur notre initiative, l'article 15 du texte a créé un dispositif permettant aux maires d'identifier des zones d'accélération des énergies renouvelables, zones dans lesquelles les porteurs de projet disposeront d'incitations spécifiques. Ces zones pourront notamment être incluses dans les documents d'urbanisme, via des modifications simplifiées. Des mécanismes financiers incitatifs pourront également être introduits pour encourager les développeurs à se diriger vers ces zones préférentielles. Ces zones d'accélération ne peuvent être fixées sans l'avis conforme des communes. Mais ces zones d'accélération ne sont pas des zones exclusives : en d'autres termes, le texte ne prévoit pas de droit de veto « projet par projet » des élus en dehors de ces zones. Pour les projets se développant hors de ces zones, un comité de projet est néanmoins rendu obligatoire par l'article 16 de la loi : un décret du 22 décembre 2023 a défini les modalités de concertation dans le cadre de ces comités. Les dispositions de ce décret entreront en vigueur en juin 2024.

La définition des zones d'accélération a pris du retard par rapport au calendrier défini par la loi. Alors que les zones devaient être établies avant la fin de l'année 2023, très peu de communes ont pu respecter cette échéance.

Ce retard pourrait s'expliquer par le manque d'ingénierie et d'accompagnement des élus lors des premiers mois d'application du texte. Comme le prévoyait la loi, un outil cartographique a certes été mis à disposition des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) en mai 2023 : le portail, développé par l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et le Cerema, dresse un état des lieux des potentiels des territoires par filière et permet d'améliorer l'accès à l'information. Mais une version complète de ce logiciel, intégrant de nouvelles fonctionnalités, n'a été mise en ligne qu'en décembre dernier.

Par ailleurs, l'absence de planification énergétique nationale a privé les élus de boussole pour orienter leurs choix : la troisième programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) - devant établir les orientations de la politique nationale de 2024 à 2033 - n'a toujours pas été publiée, alors qu'elle devait fixer le cap énergétique du pays dès cette année 2024. Faute de cibles nationales, les objectifs régionaux de développement des énergies renouvelables n'ont pu être élaborés et les comités régionaux de l'énergie, qui rassemblent une grande partie des acteurs locaux concernés, n'ont pu formuler des propositions d'objectifs, comme le prévoyait pourtant la loi Climat et résilience. Le Gouvernement devra donc rapidement corriger le tir pour permettre aux territoires de préparer leur avenir énergétique en connaissance de cause.

Ces constats ne doivent toutefois pas occulter la dynamique observée lors du premier trimestre 2024 : selon les chiffres transmis par l'IGN, fin avril, 355 000 zones d'accélération ont été saisies sur le portail cartographique, par plus de 7 000 communes. En janvier, ce nombre n'était que de 18 000. À tout le moins, le dispositif semble donc aujourd'hui atteindre sa première cible : celle de susciter une appropriation des problématiques énergétiques par l'ensemble des territoires.

Pour que l'identification des zones d'accélération serve de socle à la planification énergétique de la France, comme l'a voulu le législateur en mars 2023, cette dynamique peut et doit donc être prolongée.

M. Jean Bacci, président de la commission spéciale sur la proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie. - Près d'un an après sa promulgation, la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie, issue des travaux conjoints de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et de la commission des affaires économiques du Sénat, est majoritairement applicable.

Il faut en outre rappeler que la grande majorité de ses articles - 49 sur 62 - ne prévoyait aucune mesure d'application. Sur les 15 mesures d'application prévues par la loi, 9 sont d'ores et déjà publiées, portant le taux d'application du texte à près de 80 %.

L'essentiel des textes d'application relatifs aux obligations légales de débroussaillement (OLD) a récemment été publié, permettant la mise en oeuvre de ce volet central de la loi de juillet 2023.

Un décret du 29 mars 2024 précise ainsi les conditions dans lesquelles est recueilli l'accord écrit ou tacite des propriétaires pour effectuer ou faire effectuer les OLD. Il précise également les modalités de contrôle pour les terrains dont la mutation est conditionnée au respect des OLD. Un décret du même jour permet, en outre, d'appliquer l'article 11 de la loi - qui prévoit que les périmètres des terrains concernés par des OLD sont indiqués sur un ou plusieurs documents graphiques et annexés dans les documents d'urbanisme - et son article 15 - qui crée une procédure d'autorisation simplifiée pour l'abattage d'arbres de haute tige.

Par ailleurs, un arrêté du 29 mars 2024 pris en application de l'article 19 précise les conditions d'exécution des OLD, notamment leur articulation avec la protection de la faune et de la flore sauvage.

Enfin, un projet de décret, mis en consultation jusqu'à mi-mars, mettra en oeuvre l'article 23 de la loi, rendant obligatoire à compter du 1er janvier 2025 l'information de l'acheteur ou du locataire d'un bien immobilier situé dans une zone assujettie à une OLD.

Nous en venons au volet territorial de la loi, dont la mise en oeuvre a été amorcée par un arrêté du 9 février 2024.

M. Pascal Martin, rapporteur de la commission spéciale sur la proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie. - Cet arrêté identifie tout d'abord les départements dont les bois et forêts sont particulièrement exposés aux risques d'incendie. Cette liste était auparavant régionale et de rang législatif. En identifiant 25 départements du sud-est et du sud-ouest et de la Corse dans lesquels les bois et forêts sont réputés particulièrement exposés au risque d'incendie, tout en prévoyant des cas d'exclusion pour certains bois et forêts, l'arrêté s'inscrit ainsi dans la logique d'adaptabilité accrue face à l'évolution du risque introduite par la réforme de juillet 2023.

La loi prévoit également que les bois et forêts soient classés à « risque d'incendie » par un arrêté interministériel, en lieu et place des arrêtés préfectoraux. Cette liste figure en annexe de l'arrêté du 9 février.

Conséquence directe de ce classement, un plan de protection des forêts contre les incendies (PPFCI), décliné dans chaque massif forestier, devra être élaboré dans ces départements dans les deux ans suivant leur classement, en application de l'article 4 de la loi.

L'application du volet territorial de la loi devrait être prolongée par la publication d'un projet de décret, mis en consultation jusqu'à mi-mars, définissant les modalités d'élaboration et de révision de la liste des communes exposées à un danger élevé et très élevé de feux de forêt et de végétation et des « zones de danger », qui permettront la mise en oeuvre de servitudes d'urbanisme spécifiques dans les communes non dotées d'un plan de prévention des risques d'incendies de forêts (PPRIF), en application de l'article 26 de la loi.

Ce bilan d'application ne serait pas complet sans une note finale concernant les dispositions financières du texte, dont l'application a été remise en cause par le Gouvernement moins de trois mois après leur entrée en vigueur.

Le Gouvernement a en effet proposé, dans son projet de loi de finances pour 2024, la suppression de deux mesures de la loi : l'exonération de l'accise sur les produits énergétiques pour les véhicules des services d'incendie et de secours, prévue à l'article 50 ; et l'exonération de malus écologique pour les véhicules d'intervention des acteurs de la défense des forêts contre les incendies, prévue à l'article 51.

Dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, le Gouvernement a toutefois été contraint, notamment face aux contestations que nous avons exprimées, de supprimer ces dispositions revenant sur les apports de la loi du 10 juillet 2023.

Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à protéger la population des risques liés aux substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées - Désignation d'un rapporteur

M. Jean-François Longeot, président. - Mes chers collègues, j'en viens désormais au dernier point de notre ordre du jour avant les questions diverses. Nous devons procéder à la désignation d'un rapporteur sur la proposition de loi n° 514 (2023-2024), adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture, visant à protéger la population des risques liés aux substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées, plus communément appelés PFAS ou polluants éternels.

En ce qui concerne le calendrier d'examen, le groupe GEST a demandé l'inscription de cette proposition de loi dans le cadre de son espace réservé du 30 mai prochain.

En conséquence, l'examen du rapport et du texte de commission interviendra le mercredi 22 mai prochain. Le délai limite de dépôt des amendements de séance est quant à lui fixé au lundi 20 mai prochain à midi. J'appelle l'attention de tous sur le fait qu'il s'agira du lundi de Pentecôte.

En vue de cet examen, j'ai reçu la candidature de M. Bernard Pillefer. Je vous propose donc de le désigner en qualité de rapporteur.

M. Ronan Dantec. - L'usage non écrit veut que l'on désigne un rapporteur issu du groupe ayant demandé l'inscription du texte dans le cadre de sa niche parlementaire. Mon collègue Jacques Fernique était d'ailleurs candidat. Je m'étonne donc de cette proposition de nomination, qui n'est pas conforme à l'habitude...

M. Jean-François Longeot, président. - Je suis bien conscient de la situation. C'est d'ailleurs moi qui ai alerté la semaine dernière votre président de groupe et Jacques Fernique. Mais il s'agit d'un texte qui nous vient de l'Assemblée nationale et non d'une initiative sénatoriale, ce qui laisse une plus grande marge de manoeuvre et n'entre pas à proprement parler dans l'usage prescrit par le gentlemen's agreement. C'est pourquoi la majorité sénatoriale qui devra se prononcer sur cette proposition de lois transmise par l'Assemblée nationale, a souhaité proposer un rapporteur.

M. Jacques Fernique. - Monsieur le président, les cosignataires de cette proposition de loi appartiennent au groupe Écologiste - NUPES de l'Assemblée nationale. Je précise que David Taupiac, du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires, avait déposé une proposition de loi sur le même sujet, mais elle n'a pas été votée. M. Jimmy Pahun a également présenté un texte sur les polluants éternels, que le groupe Union Centriste du Sénat avait proposé d'inscrire à son ordre du jour, mais il a finalement été retiré.

M. Jean-François Longeot, président. - La proposition de loi dont il est demandé l'inscription est en effet issue de l'Assemblée nationale. Il ne s'agit donc pas d'un texte d'initiative sénatoriale, voilà l'explication.

M. Ronan Dantec. -Nous en parlerons au président Larcher, car cette proposition de désignation déstabilise quelque peu le fonctionnement de notre commission...

M. Jean-François Longeot, président. - J'assume totalement cette décision, qui est issue des membres de la majorité sénatoriale.

La commission désigne M. Bernard Pillefer rapporteur sur la proposition de loi n° 514 (2023-2024), adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture, visant à protéger la population des risques liés aux substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées.

La réunion est close à 15 h 35.