SÉANCE

du mardi 8 avril 2008

70e séance de la session ordinaire 2007-2008

présidence de M. Jean-Claude Gaudin,vice-président

La séance est ouverte à 10 h 5.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Chèque emploi associatif

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à l'extension du chèque emploi associatif.

Discussion générale

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille.  - (Applaudissements à droite) C'est un honneur pour moi de défendre ce premier texte au Sénat en tant que nouvelle secrétaire d'État chargée de la famille. Je représente M. Xavier Bertrand, qui, retenu, ne peut être présent ce matin.

Cette proposition de loi, portée par MM. les députés Decool et Lamour, qui étend le chèque emploi associatif, répond aux attentes des associations en simplifiant des procédures administratives. J'aimerais défendre plus souvent de tels textes : simples, rendant compte des réalités du terrain et favorisant les embauches et l'emploi, objectif essentiel dans le contexte économique actuel.

Le secteur associatif est un secteur dynamique qui se caractérise par le bénévolat. Pour appuyer l'activité de leurs membres bénévoles, les associations embauchent souvent des salariés. Sur les 1 100 000 associations recensées en France, 160 000 emploient 1 600 000 salariés. La réduction des formalités administratives liées à l'embauche est donc susceptible de leur apporter la souplesse dont leurs administrateurs ont besoin pour se concentrer sur leurs missions premières. Plus de simplicité pour embaucher, c'est plus d'embauches !

Tel a été l'objectif du chèque emploi associatif créé par la loi du 19 mai 2003. Ce dispositif accessible aux associations à but non lucratif facilite le paiement des salaires et des charges sociales et simplifie les procédures liées à l'embauche. En paiement du salaire, l'association remet au salarié un chèque dont le montant brut est majoré de 10 % au titre de l'indemnité représentative des congés payés. Parallèlement, elle adresse au Centre national du chèque emploi associatif (CNCEA), rattaché à l'Urssaf d'Arras, un volet social qui permet l'envoi d'une attestation d'emploi valant bulletin de paye et le calcul du montant des charges sociales qui seront prélevées automatiquement sur le compte bancaire de l'association. L'association utilisant le chèque emploi associatif se voit aussi dispensée de certaines formalités administratives comme la déclaration unique d'embauche ou les déclarations annuelles des salaires. Près de la moitié des associations utilisatrices déclarent leurs salariés par Internet.

Initialement réservé aux associations employant au plus un équivalent temps plein, le chèque emploi associatif a vu son plafond porté à trois équivalents temps plein, correspondant à 4 821 heures de travail par an, par l'ordonnance du 18 décembre 2003. La présente proposition de loi porte le plafond à neuf équivalents temps plein. Cette extension est raisonnable parce qu'elle réserve le chèque emploi associatif aux associations de moins de dix salariés, seuil déclencheur d'une série d'obligations sociales -dont le versement transport- peu compatibles avec ce titre de paiement.

Avec cette extension, nous apportons aux associations plus de facilité dans la gestion de leur personnel, avec des effets sur l'emploi qui se feront sentir dès l'embauche d'un quatrième salarié. Cette mesure de simplification n'a pas pour autant vocation à se substituer systématiquement à l'établissement d'un contrat de travail. En effet, le chèque emploi associatif suppose l'accord du salarié et, d'autre part, il est dans certains cas difficilement compatible avec l'application de conventions collectives auxquelles sont soumises les associations. Les associations de moins de dix salariés peuvent d'ailleurs bénéficier d'une assistance à la gestion de leur personnel grâce au dispositif « Impact Emploi Association » mis en place par l'Urssaf, qui leur permet de faire appel à un tiers de confiance pour gérer les salaires et les cotisations sociales. Avec le relèvement du plafond, les associations de moins de dix salariés disposeront d'une gamme plus étendue d'outils leur permettant d'embaucher plus facilement.

Le Gouvernement est favorable à cette proposition de loi. C'est avec de telles propositions d'origine parlementaire, relevant ce qui se fait de mieux sur le terrain, que nous rendons un maximum de service à nos concitoyens. En tant que membre du Gouvernement et ancienne représentante du peuple, je plaide pour la multiplication d'initiatives telles que celle de M. Decool, présent à la tribune, et de M. Lamour. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - Ce texte a un objectif simple : faciliter la vie des associations, et notamment des plus petites d'entre elles. Elle répond à leur attente. Je rends hommage à nos collègues députés qui en ont pris l'initiative, M. Decool, présent ce matin dans nos tribunes, et M. Lamour.

L'importance du secteur associatif dans notre pays n'est plus à démontrer.

La France compte plus d'un million d'associations ; il s'en crée près de soixante mille par an. Elles relèvent de secteurs d'activité très divers, le sport, la culture et les loisirs, la défense des droits et des causes, l'action sociale et la santé. Plus de vingt millions de personnes en sont membres et quatorze millions de bénévoles y travaillent, soit l'équivalent de plus de neuf cent mille emplois à temps plein. Leur budget cumulé, de l'ordre de 59 milliards d'euros, croît plus rapidement que la richesse nationale.

Avec un million neuf cent mille salariés, soit un peu plus d'un million d'équivalents temps plein, l'emploi associatif représente plus de 5 % de l'emploi salarié total. Parmi les cent soixante-douze mille associations employeurs, la moitié emploient un ou deux salariés et les trois quarts moins de dix salariés. Les communes entretiennent des relations financières avec les deux tiers des associations, l'État ne participant au financement que de 10 % d'entre elles. Ces chiffres témoignent de la vitalité du secteur associatif et de son potentiel en termes d'emplois.

Pour faciliter les formalités d'embauche, particulièrement dissuasives pour les petites structures, la loi du 19 mai 2003, votée à l'initiative de M. Decool et que j'avais rapportée devant le Sénat, a créé le chèque emploi associatif. Émis par les banques, il permet le paiement des salaires et le calcul des charges sociales par le Centre national du chèque emploi associatif (CNCEA), géré par l'Urssaf d'Arras. Ces charges sont ensuite prélevées automatiquement. Le chèque emploi associatif dispense de nombreuses obligations administratives, de la déclaration unique d'embauche aux déclarations annuelles des salaires en passant par la tenue d'un registre du personnel, l'établissement de bulletins de paie -qui sont envoyés aux salariés par le CNCEA- ou d'un contrat de travail écrit.

Le succès de ce dispositif a conduit le Gouvernement à élargir le champ du chèque emploi associatif : l'ordonnance du 18 décembre 2003 a porté à trois équivalents temps plein le nombre de salariés permettant d'y recourir, la durée annuelle du travail ne devant pas dépasser 4 821 heures. Fin 2007, un peu plus de quarante-quatre mille associations utilisaient le chèque emploi associatif pour rémunérer environ cent treize mille salariés, soit soixante-deux mille équivalents temps plein, ce qui est loin d'être négligeable.

Cette proposition de loi propose de porter de trois à neuf équivalents temps plein l'effectif maximal permettant d'utiliser le chèque emploi associatif. Selon les chiffres approximatifs dont nous disposons, plus des trois quarts des associations employeur, soit plus de trois cent mille salariés, en bénéficieront au lieu de quatre-vingt à quatre-vingt-dix mille aujourd'hui.

Le choix du nouveau seuil, plutôt que la généralisation du dispositif, se justifie par le fait que l'objet de celui-ci est avant tout de simplifier le fonctionnement des petites structures. En outre, à partir de dix salariés, la structure des cotisations assises sur les salaires devient plus complexe et la centralisation par le CNCEA serait plus difficile à gérer.

Cette proposition de loi prend en compte la réalité du terrain et favorisera les embauches. Elle étend de façon pragmatique un dispositif qui marche, elle simplifie et facilite l'application des règles sociales. Par sa souplesse, le chèque emploi associatif convient à l'association employeur comme au salarié ne désirant travailler que quelques heures. Il permet aussi de justifier plus facilement l'usage des subventions reçues. La commission vous propose d'adopter ce texte conforme. Nous ferons ainsi oeuvre utile pour le développement d'un secteur vivant et dynamique, auquel les élus comme les citoyens sont à juste titre attachés. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Janine Rozier.  - Avec plus d'un million d'associations, la France est l'un des pays où le mouvement associatif est le plus développé. La participation de bénévoles au service de la communauté est en forte croissance. Les notions d'altruisme, d'engagement, de solidarité sont sans doute plus présentes lorsque le monde se durcit.

Les bénévoles ne peuvent à eux seuls faire fonctionner les associations, ils doivent s'adjoindre l'aide de salariés, quelques heures par semaine ou par mois. Le secteur associatif remplit ainsi, outre son rôle social, un rôle économique majeur puisqu'il est l'un des premiers employeurs de France avec un million cinq cent mille à deux millions de salariés. Une association sur six emploie au moins un salarié.

Il était autrefois très dissuasif pour une petite association de s'exposer aux lourdeurs et à la complexité de notre réglementation sociale en embauchant des salariés. Les bénévoles peinent généralement à établir un contrat de travail, les fiches de paie et les déclarations trimestrielles, à correspondre avec les organismes sociaux. Le recours à un prestataire externe est coûteux, la confection d'une fiche de paie revenant à environ 25 euros, même pour rémunérer trois ou quatre heures de travail.

La création du chèque emploi associatif en 2003, suivant l'exemple du chèque emploi service, a répondu à une forte demande des associations. Un premier bilan montre que le dispositif a favorisé les embauches et a contribué à lutter contre le travail au noir. Le taux d'utilisation du chèque associatif est proche de 50 % pour les associations concernées. Ce succès se heurte toutefois au seuil retenu en mai, puis en décembre 2003.

Selon une estimation du ministère de la santé, de la jeunesse et des sports, 30 % des employeurs associatifs ont de trois à neuf salariés. Selon le CNCEA, le chèque emploi concerne actuellement cent treize mille postes ; ce chiffre pourrait être porté à plus de cent trente-sept mille si le seuil passait à neuf équivalents temps plein.

L'impact de cette proposition de loi est donc loin d'être négligeable et va dans le sens de l'écoute due aux familles, principales utilisatrices des associations ; je me réjouis de la présence ce matin de la nouvelle secrétaire d'État à la famille.

Aller au-delà du seuil de neuf équivalents temps plein créerait des complications administratives, juridiques et sociales. La solidarité nationale doit avant tout s'exercer au profit des petites associations, qui ne rencontrent pas les mêmes problèmes de financement et d'emploi que les plus grandes. Pour le groupe UMP, le seuil retenu est le bon. Nous voterons ce texte qui nous donne l'occasion de rendre hommage au monde associatif, au sein duquel s'expriment les passions et le dévouement de nos concitoyens. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean-François Voguet.  - Permettez tout d'abord au membre de la commission des affaires culturelles que je suis de regretter que ce texte n'ait pas été soumis pour avis à cette commission, dont relève la vie associative. Il n'a pas non plus été soumis au Conseil national de la vie associative, ni aux représentants traditionnels de la vie associative, ni aux syndicats de salariés.

On s'apprête à modifier une nouvelle fois le code du travail, sans la concertation nécessaire.

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur.  - C'est une proposition de loi !

M. Jean-François Voguet.  - Il fallait consulter, négocier, d'abord parce que le chèque emploi associatif fut - déjà !- créé dans la précipitation en 2003. Il devait permettre aux associations d'embaucher dans des conditions allégées. Pourtant, un mois avant son entrée en vigueur prévue au 1er janvier 2004, une ordonnance l'étendait aux associations employant trois équivalents temps plein au lieu d'un, transformant ce qui était un moyen de simplification en outil de gestion. Mme Desmarescaux, rapporteur de la première proposition de loi, jugeait alors que « les associations plus importantes disposent des ressources humaines et matérielles nécessaires pour faire face à leurs démarches administratives ». Le rapport de l'Assemblée nationale affirmait clairement : « il faut permettre aux associations qui n'ont pas encore franchi le cap du passage au statut d'employeurs de surmonter les réticences psychologiques qui l'accompagnent ». Le nouveau dispositif était donc destiné à de petites structures n'ayant besoin que de quelques heures de travail hebdomadaire rémunéré, mais pour qui ce travail était indispensable.

Avant de modifier le chèque emploi association, il eût été pertinent de l'évaluer en concertation avec les intéressés. A fortiori, avant de le dénaturer encore en l'élargissant aux trois-quarts des associations employeurs ! Il nous est en réalité proposé de précariser davantage encore l'emploi associatif, alors que les pouvoirs publics soutiennent depuis plusieurs années sa professionnalisation.

Cette proposition de loi vient après le blocage des budgets destiné à la formation des bénévoles, après la chute des subventions, après la réduction des partenariats locaux en faveur de l'éducation populaire. À cela s'ajoutent les interrogations sur l'avenir des contrats pluriannuels. Ainsi la politique gouvernementale prend-elle forme par touches successives, qui vont toutes dans le même sens : leurs ressources diminuant et devenant précaires, les associations doivent disposer d'outils de gestion pour précariser leur personnel. Tel est le sens de la proposition de loi. Dorénavant, des emplois permanents ou semi-permanents pourront être rémunérés sans contrat de travail ; il sera plus facile de s'en libérer en cas de restriction des crédits.

Quelque cent treize mille personnes travaillent déjà sous ce régime précaire, ne percevant ni prime de précarité ni indemnité de licenciement quand il est mis fin à leur travail. Avec le texte, ce nombre dépasserait deux cent mille. Selon l'un de ses auteurs, M. Lamour, qui était en 2003 ministre de la vie associative, 31 % des salariés rémunérés par chèque emploi associatif sont des jeunes de 20 à 29 ans, comme s'il était naturel de faire rimer jeunesse et précarité. A contrario, près de 70 % des intéressées sont des adultes, dont les familles aussi subissent cette précarité. Et vous voudriez aller plus loin ! Nous ne pouvons l'accepter. En développant ces relations du travail au sein du monde associatif, vous ouvrez la porte à leur extension dans l'ensemble des petites entreprises.

Si nous refusons son extension, nous ne rejetons pas le dispositif en son principe. Puisque seules 21 % des associations pouvant y prétendre l'utilisent, il faudrait mieux le faire connaître. Nous pourrions même l'étendre, à condition que son usage soit limité à un certain nombre d'heures ou à certains types d'emplois. Il pourrait alors faciliter la rémunération de certaines activités, sans compromettre les emplois permanents, indispensables à la pérennité d'associations dont notre société a tant besoin.

D'autre part, il faudrait examiner la convention collective de référence et le cadre des droits à la retraite. Ni le droit aux congés, ni celui à la formation professionnelle ne sont actuellement établis. Après une vraie réflexion, nous sommes prêts à revaloriser ce dispositif ; aujourd'hui, nous ne pouvons que voter contre la proposition de loi.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales.  - Dommage !

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur.  - Dommage pour les associations !

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - L'activité du secteur associatif en France, l'attachement de nos concitoyens, l'importance de son activité culturelle et sociale en font un sujet de premier ordre.

L'extension du chèque emploi associatif s'inscrit dans un contexte qui va de la gestion des associations à la vie des quartiers ou à la culture de proximité, couvrant ainsi le quotidien de nombreux Français. Sur le sujet, nous disposons d'une littérature abondante, qui ne date pas d'hier. Depuis 1901, les structures associatives ont connu bien des aménagements, mais autour de principes unificateurs : la liberté d'agir dans un espace spécifique, entre l'État et le marché, régi par la société civile, le caractère non lucratif, la réalisation d'objectifs sociaux.

Il est peu d'acquis sociaux à l'origine desquels on ne trouve des regroupements d'hommes et de femmes associés pour faire reconnaître des droits ou des besoins, pour créer de nouveaux services : depuis qu'elles existent, les associations ont toujours été porteuses d'innovations. L'extension du chèque emploi associatif n'est pas exactement une nouveauté : il s'agirait plutôt d'une réparation, une amélioration nécessaire mais insuffisante, que les associations appellent de leurs voeux.

Rappelez-vous : lorsque M. Raffarin est arrivé aux affaires en 2002, il a gravement mis à mal le monde associatif. Il ne se doutait pas que sa formule fleurie « la pente est rude, mais la route est droite » serait particulièrement appropriée au débat d'aujourd'hui. (Sourires)

M. Jean-Pierre Michel.  - Pour accéder au perchoir !

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - Il lui avait sans doute échappé que la pente dirige vers le bas et que l'emprunter en ligne droite fait descendre plus vite ! En supprimant d'un revers de manche les emplois jeunes, les contrats emploi solidarité (CES) et les contrats emploi consolidés (CEC), le Premier ministre illustrait avec panache le génie de sa formule, puisqu'il mettait le milieu associatif sur la pente douce des difficultés.

Pour corriger les méfaits de cette décision incongrue, la loi du 19 mai 2003 a créé le chèque emploi associatif. Dès le 18 décembre suivant, une ordonnance portait de un à trois équivalents temps plein le nombre maximal de salariés pouvant être rémunérés par ce moyen. C'était une sorte de reconnaissance des grands besoins des associations...

Il faudra attendre 2008 pour que le seuil soit porté à neuf équivalents temps pleins, sous réserve que l'association emploie moins de dix salariés. Sans cette réserve, le progrès nous entraînerait trop loin. La route est longue...

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et de solidarité, devait répondre aux attentes des partenaires sociaux. Les associations, notamment celles réunies dans le collectif Ni pauvres, ni soumis, sont restées cruellement sur leur faim. Pour marcher sur une pente rude et étroite, il y a deux écoles : celle qui évalue et s'engage ; celle qui parade au lieu d'avancer.

Vous nous avez d'abord servi le très insuffisant revenu d'existence, d'ailleurs expérimental -je vous épargne la revalorisation de l'AAH, une arlésienne du Président Sarkozy...

M. Nicolas About, président de la commission.  - Elle est engagée au rythme promis !

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - Après les coupes franches du dernier projet de loi de finances, il est clair que vous êtes de la seconde école, celle qui promet sans faire.

Je vous rappelle qu'en 1981, la gauche arrivée au pouvoir avait reconnu le mouvement associatif comme une composante spécifique de la société civile, un partenaire des pouvoirs publics. On découvrit alors que ce secteur employait 700 000 salariés -deux millions aujourd'hui. Cette évolution reflète le dynamisme et la professionnalisation d'un secteur incontournable, qui représentent aujourd'hui 5 % de notre économie.

Hélas ! Les crédits d'intervention du programme « Jeunesse et vie associative » régresseront cette année de 4,2 % en euros constants. Résultat : 67 % des associations estiment que l'insuffisance des moyens budgétaires compromet l'exercice de leur mission. Pourtant, le travail de leurs 14 millions de bénévoles fait faire des économies à l'État.

Vous pourriez reprocher au Gouvernement de M. Jospin de n'en avoir pas fait assez.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Je ne vous le fais pas dire !

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - Avec cette proposition de loi, vous vous contentez du minimum minimorum qui ne pourra répondre aux besoins d'un acteur pourtant essentiel de notre vie sociale. Vous ne corrigez pas les méfaits de la politique peu éclairée menée depuis 2002, qui va à l'encontre de l'intérêt de nos concitoyens. Quand on prive les Français des moyens de se réunir, d'échanger, de vivre décemment et de se cultiver, il faut bien soutenir ceux qui oeuvrent à les encadrer. C'est le moins que l'on puisse faire. C'est ce que vous faites : le moins. (Sourires)

Ce texte cache mal le désengagement de l'État envers la vie associative ! Elle concerne pourtant un Français sur deux et est devenue indispensable en raison même du désengagement de l'État. Insertion sociale, vie des quartiers, lutte contre les violences scolaires, soutien extrascolaire, activités culturelles et sportives de proximité : la vie associative est un pilier de l'économie sociale !

Vous qui répétez à l'envi les termes d'économie, de valeur travail, de rentabilité, pourquoi êtes-vous si frileux quand il s'agit de soutenir une pépinière aussi prometteuse que les associations ?

M. Nicolas About, président de la commission.  - Ce texte est audacieux !

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - C'est aussi dans les associations qu'il faut investir pour l'emploi, elles ont de l'endurance ! Mais pour vous, l'État ne doit investir dans l'économie que pour autant qu'elle n'est pas sociale... Vous allez me répondre que neuf emplois équivalent temps plein, c'est toujours mieux que trois, mais personne n'est dupe de votre esbroufe, ce chèque associatif ne remplacera pas une politique active en faveur des associations et de l'emploi associatif, fondée sur des relations partenariales équilibrées avec les pouvoirs publics ! Pour nous, il doit toujours être question de démocratie et de solidarité.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Ce chèque est bon à prendre !

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - Le groupe socialiste ne votera pas contre, mais nous nous abstiendrons, refusant de cautionner le « moins-disant » de la politique conduite par le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Nadine Morano, secrétaire d'État.  - Je m'associe à l'hommage rendu par Mme le rapporteur et par Mme Rozier aux associations, dans lesquelles un Français sur trois est engagé et qui sont devenues essentielles à la vie sociale de notre pays. Monsieur Voguet, vous vous trompez sur la précarité : le chèque emploi associatif facilitera les démarches sociales, encouragera la déclaration des salariés associatifs, donc l'acquisition de droits et l'accès à l'emploi durable. Je répondrai également à Mme Jarraud-Vergnolle que le chèque emploi associatif est un outil supplémentaire pour l'emploi, nous le confions aux associations pour conforter leur action, elles nous le demandent. Quant aux emplois jeunes, chacun a pu constater, sur le terrain, leurs effets dévastateurs : ils étaient une voie sans issue pour les jeunes eux-mêmes ; avec M. Bertrand nous choisissons une voie plus lisible et plus sûre, pour les associations comme pour les publics. J'ai craint à vous entendre, qu'en annonçant un vote contre vous ne vous égariez encore dans le dédale des fausses solutions pour l'emploi ; votre abstention augure, je l'espère, que vous retrouverez bientôt le chemin qui facilite le retour à l'emploi, car c'est bien sur ce chemin là que nous devons nous retrouver, tous ensemble ! (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur.  - Nos collègues de l'opposition n'ont visiblement pas compris l'intérêt de ce texte pour les associations ! (Exclamations à gauche) Monsieur Voguet, vous nous reprochez d'être aveugles sur la précarité, alors que nous permettons l'acquisition de droits. Votre critique sur le manque de concertation n'est guère plus recevable : chacun de nous travaille au quotidien avec des associations, nous les avons rencontrées, M. Decool et moi, nous connaissons bien leurs attentes ! Vous votez contre, alors que vous vous étiez abstenus en 2003. Et vous souhaitez vous-même que le chèque emploi associatif soit mieux connu. De mon côté, je ne politise pas ce sujet, je m'occupe seulement des associations et de leurs besoins : elles demandent l'extension du chèque emploi service, le fait que le chemin ait été long n'enlève rien à l'actualité de leur demande !

Madame Jarraud-Vergnolle fait l'exégèse d'une pente raide (sourires), sans voir que tout dépend du sens dans lequel on la prend...

M. Nicolas About, président de la commission.  - Avec les socialistes, c'est toujours en descente ! (Sourires)

Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur.  - Aujourd'hui, nous répondons à une demande des associations : c'est le sens même de cette proposition de loi ! (Applaudissements à droite et au centre)

La discussion générale est close.

Article unique

L'article unique de la proposition de loi est adopté.

La séance est suspendue à 10 h 55.

La séance reprend à 16 h 5.

présidence de M. Christian Poncelet