Grenelle de l'environnement (Suite)

Discussion des articles (Suite)

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°770, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Après l'article 28, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un plan d'urgence en faveur de la préservation des abeilles sera mis en place en 2009 et s'appuiera notamment sur une évaluation toxicologique indépendante relative aux effets, sur les abeilles, de l'ensemble des substances chimiques.

En outre, une interprofession de la filière apicole sera mise en place en vue de mieux structurer la profession apicole. Elle favorisera la création d'un institut scientifique et technique de l'abeille.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Nous reprenons ici ces dispositions de l'article 23 ter en les rendant plus normatives.

M. le président.  - Sous-amendement n°552 rectifié à l'amendement n°770 de M. Sido, au nom de la commission, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le deuxième alinéa de l'amendement n° 770 par les mots :

en commençant par les neurotoxiques systémiques

Mme Marie-Christine Blandin.  - Pourquoi les agriculteurs demandent-ils qu'on commence par les neurotoxiques systémiques ? Parce qu'on en connait les dégâts -on se rappelle les soupçons contre le Gaucho puis sa suspension, toujours contestée par le fabricant. Mais le ministère de l'agriculture a autorisé le 17 décembre le Cruiser, pourtant interdit en Allemagne, en Italie et en Slovénie et ce, malgré l'accord franco-allemand et alors que son fabricant n'a pas fourni toutes les études requises. On ne peut pourtant pas mobiliser des fonds pour l'apiculture et autoriser ces pesticides. Des substances utilisées dans le traitement des semences peuvent contaminer les plantes environnantes, d'où la recommandation d'utiliser des déflecteurs... impossibles à installer sur les semoirs pneumatiques.

Selon une enquête européenne, la molécule du Gaucho est une des plus fréquemment trouvées dans notre alimentation : cela circule et cela passe. Ces insecticides durent de un à cinq ans, contaminent les sols et les eaux, tuent les abeilles et les auxiliaires -on contrevient aux principes d'une agriculture durable. Quand on sait que la dose létale est de 3,7 à 5 nanogrammes par abeille et que l'on en répand des kilos à l'hectare, on comprend que notre production de miel ait diminué d'un tiers. En Italie la population des ruches meurt au printemps ; en France, des milliers sont mortes dans le sud-ouest et, en 2008, 12 000 ruches ont été touchées.

Tout cela, vous pouvez le lire sur le site du ministère de l'agriculture, et de la DGCCRF.

M. le président.  - Sous-amendement n°816 à l'amendement n°770 de M. Sido, au nom de la commission, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Compléter le deuxième alinéa de l'amendement n°770 par les mots :

et leurs combinaisons

Mme Marie-Christine Blandin.  - Les autorités sanitaires, les fabricants affirment que l'on n'a pas établi de lien entre l'utilisation de telle ou telle molécule et la disparition des abeilles. Cependant, les apiculteurs exhibent des ruches vides. Le varroa ? Il ne mettait pas en péril cette population et certains individus contaminés se portent bien. On voit aussi des abeilles désorientées, errant sur le sol, d'où l'idée que la combinaison de molécules affaiblirait les capacités d'orientation et les réactions immunitaires des abeilles. Il faut le démontrer, cela suppose des recherches, d'où cet amendement.

M. le président.  - Amendement n°658 rectifié bis, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Compléter le septième alinéa (c) de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Cette évaluation s'attachera à mesurer les effets combinés des molécules chimiques sur l'affaiblissement de la résistance des abeilles aux pathologies qui lui sont coutumières.

Mme Marie-Christine Blandin.  - C'est la même explication.

M. le président. - Sous-amendement n°659 rectifié à l'amendement n°770 de M. Sido, au nom de la commission, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Compléter le deuxième alinéa de l'amendement n°770 par une phrase ainsi rédigée :

Le plan sera actualisé tous les ans selon les résultats des évaluations.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Un plan d'urgence est indispensable mais la complexité demande du temps. Il faudra donc l'actualiser.

M. le président.  - Sous-amendement n°812 à l'amendement n°770 de M. Sido, au nom de la commission, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter la seconde phrase du dernier alinéa de l'amendement n°770 par les mots :

, dont elle assurera le pilotage

Mme Marie-Christine Blandin.  - La profession arboricole veut jouer son rôle dans le nouvel Institut scientifique de l'abeille.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Il y a bien d'autres facteurs que les neurotoxiques systémiques, pourquoi en traiter séparément ?

Retrait ou avis défavorable au sous-amendement n°552 rectifié.

La précision proposée par le sous-amendement n°816 n'est pas indispensable, mais n'est pas non plus inutile. Je souhaite connaître l'avis du Gouvernement.

J'opposerai au sous-amendement n°658 rectifié bis les mêmes arguments qu'à l'amendement n°679 : cette précision est intéressante mais n'a pas sa place dans une loi de programme. Le législateur ne peut se substituer au scientifique pour préciser les champs d'étude à développer. Retrait ou avis défavorable.

Le plan abeille sera révisé si les résultats de l'évaluation le justifient. Il n'est pas nécessaire d'y procéder chaque année. Retrait ou avis défavorable au sous-amendement n°659 rectifié.

Il est prématuré de décider dès maintenant du mode de gouvernance de l'Institut de l'abeille. Retrait ou avis défavorable au sous-amendement n°812.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Avis favorable à l'amendement n°770.

Les causes de mortalité des abeilles sont complexes : il serait réducteur de centrer les recherches sur les seuls neurotoxiques systémiques. Retrait ou avis défavorable au sous-amendement n°552 rectifié.

La rédaction du sous-amendement n°658 rectifié bis est trop ciblée. L'évaluation toxicologique porte de toute façon sur l'analyse de cocktails de substances. Retrait ou avis défavorable, de même qu'au sous-amendement n°816, pour les mêmes raisons.

Il est excessif de prévoir une actualisation annuelle du plan abeille. Retrait ou avis défavorable au sous-amendement n°659 rectifié. De même, nous ne pouvons fixer dès aujourd'hui le mode de pilotage de l'Institut scientifique et technique de l'abeille. Retrait ou avis défavorable à l'amendement n°812.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Le sous-amendement n°816 est un amendement de repli. Je le retire, mais je maintiens les autres.

Le sous-amendement n°816 est retiré.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Nous n'entendons pas, avec le sous-amendement n°552 rectifié, cibler les seuls neurotoxiques systémiques. Toutefois, il n'y a plus, en France, un seul chercheur en toxicologie appliquée aux abeilles. Les laboratoires compétents, débordés, ne pourront prendre en compte toutes les pistes de recherche. Il faut donc leur indiquer laquelle suivre en premier.

Le sous-amendement n°552 rectifié n'est pas adopté.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Le sous-amendement n°658 rectifié bis porte sur une question de méthode : les abeilles sont victimes de combinaisons de molécules. Si vous n'êtes pas sensibles aux abeilles, ce que je peux comprendre, vous le serez peut-être aux chiffres : cette mortalité occasionne 750 millions d'euros de pertes annuelles pour l'agriculture, et 275 millions pour les professionnels du miel, sans parler des produits dérivés. En outre, ces recherches combinées s'appliquent déjà aux pathologies humaines, provoquées notamment par la pollution de l'air intérieur.

Le sous-amendement n°658 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme Marie-Christine Blandin.  - La rédaction du sous-amendement n°659 rectifié était peut-être maladroite. Bien évidemment, l'actualisation du plan abeille ne serait annuelle que si les résultats de l'évaluation toxicologique le justifiaient. Monsieur le rapporteur, vous êtes de mauvaise foi !

Le sous-amendement n°659 rectifié n'est pas adopté.

Mme Marie-Christine Blandin.  - La création d'un Institut technique et scientifique de l'abeille séduit la profession, mais les apiculteurs craignent d'en être exclus. Il ne faut pas négliger leur grande expertise.

Le sous-amendement n°812 n'est pas adopté.

Mme Odette Herviaux.  - Je voterai l'amendement n°770 même si les sous-amendements ont été rejetés. Je n'ai pas de connaissances scientifiques sur l'apiculture, en revanche j'ai dans ce domaine une pratique personnelle. Dans ma région, nous avons réussi à faire prendre en charge la structuration de la filière par un GIE. Les pratiques amateurs contrôlées doivent être valorisées, dans la mesure où elles ne créent pas une concurrence déloyale pour les professionnels. Elles constituent une garantie pour la biodiversité.

J'ai déjà défendu cette cause devant Dominique Bussereau, alors ministre de l'agriculture. Il faut réintroduire des espèces résistantes, telles les petites abeilles noires d'Ouessant. Nous avons procédé ainsi dans ma région là où les abeilles avait disparu du fait de maladies ou de certaines pratiques.

L'amendement n°770 est adopté.

La séance est suspendue à midi cinquante-cinq.

présidence de Mme Catherine Tasca,vice-présidente

La séance reprend à 15 heures.