SÉANCE

du mardi 22 septembre 2009

5e séance de la seconde session extraordinaire 2008-2009

présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président

Secrétaires : M. Marc Massion, M. Bernard Saugey.

La séance est ouverte à 9 h 35.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement à dix-sept questions orales.

Fiscalité des groupements d'employeurs

M. Jean-Claude Carle.  - Dans les zones de montagne, de très nombreux travailleurs saisonniers concluent un contrat avec une commune ou un établissement public pour la saison d'hiver ou d'été et ont, le reste de l'année, une autre activité. Leur statut de pluriactif et la précarité de leur emploi peuvent être source de difficultés. Quant aux employeurs, eux, ils ne sont pas sûrs de trouver un personnel adapté.

Une solution réside dans la création de groupements d'employeurs, outils de stabilisation des travailleurs saisonniers dans la droite ligne des politiques de l'État et des régions Paca et Rhône-Alpes. Les employeurs peuvent ainsi embaucher des salariés qu'ils n'auraient pas les moyens matériels de recruter seuls et fidéliser cette main-d'oeuvre. Ces groupements d'employeurs, associations régies par la loi de 1901, sont des structures souples, avantage indéniable en période de crise. Ils représentent également un facteur de progrès social et de compétitivité des territoires.

Toutefois, les services fiscaux considèrent que ces groupements exercent une activité à but lucratif et doivent être soumis à la TVA. Cela prive les acteurs publics de la possibilité d'adhérer à un groupement et de contribuer à la sécurisation des parcours. La décision ministérielle du 23 novembre 1981 étend pourtant l'exonération de TVA prévue à l'article 261-B du code général des impôts aux mises à disposition de personnel ou de biens facturées à prix coûtant et effectuées au profit des personnes morales de droit public ou d'organismes sans but lucratif.

D'autre part, ces groupements satisfont, à mon sens, aux critères fixés par l'instruction fiscale du 15 septembre 1988 sur l'assujettissement aux impôts commerciaux. Leur gestion est désintéressée et j'estime, contrairement aux services fiscaux, qu'ils ne concurrencent pas les agences de travail temporaire car ils sont destinés à faire face à des besoins de main-d'oeuvre planifiés, permanents et prévisibles. Ils privilégient les contrats à durée indéterminée alors que le travail temporaire ne peut pourvoir durablement à un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'employeur.

Enfin, l'association n'exerce pas son activité dans des conditions similaires à celles d'une entreprise : le prix correspond au coût de fonctionnement et le service rendu, qui comprend la stabilisation de la situation des salariés et la fidélisation de cette main-d'oeuvre, n'est pas pris en compte par le marché ; aucune action de publicité n'est engagée.

Certains de leurs adhérents étant soumis à la TVA, les groupements s'y voient assujettis dans leur ensemble. Ne pourrait-on trouver un aménagement, telle une sectorisation qui ne reposerait pas sur les activités des uns et des autres, mais sur leur statut ? Une collectivité n'aura aucun intérêt à recourir aux services d'un groupement si une TVA non récupérable s'applique alors qu'elle peut employer la même personne en contrat saisonnier précaire, sans cette taxe.

Monsieur le ministre, quelles mesures pouvez-vous mettre en oeuvre pour exonérer de TVA les mises à disposition de personnel en faveur des collectivités territoriales et des établissements publics adhérant à un groupement d'employeurs mixte ?

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.  - Veuillez excuser Éric Woerth, en déplacement à étranger pour signer un accord d'échange de renseignements en matière fiscale.

Les groupements d'employeurs jouent un rôle important pour le développement de l'emploi, surtout dans des régions comme les nôtres compte tenu des activités saisonnières liées au tourisme. Les collectivités locales et les établissements publics sont d'importants employeurs saisonniers. En participant à des groupements avec des opérateurs privés, ils créent un effet de levier. Or les mises à disposition de personnel sont soumises à la TVA lorsque les groupements d'employeurs agissent au profit d'entreprises, indépendamment du caractère désintéressé ou non de leur gestion et de leur situation au regard des entreprises du secteur concurrentiel.

L'article 261-B du code général des impôts permet d'exonérer les mises à disposition de personnel faites par les groupements d'employeurs réalisées à prix coûtant et si leurs membres exercent une activité non soumise à la TVA. Cette dernière condition est difficile à satisfaire quand des opérateurs privés y participent, mais l'administration fiscale fait preuve de souplesse : l'exonération reste admise quand, parmi les adhérents, figurent des opérateurs redevables de la TVA dès lors que leurs recettes soumises à la taxe n'excèdent pas 20 %. Le groupement peut réaliser des mises à disposition de personnel au profit d'opérateurs non membres et non assujettis à la TVA dans la limite de 50 % du montant total des mises à disposition. Pour les membres, les mises à disposition restent exonérées. Pour les non-membres assujettis à la TVA, cette taxe s'applique mais est déductible. Ces assouplissements s'appliquent à tous les opérateurs.

L'exonération a été étendue pour les mises à disposition de personnel faites au profit des personnes publiques ou des organismes sans but lucratif non soumis à la TVA. Depuis 1982, l'exonération s'applique aux seules conditions que ces opérations soient facturées à prix coûtant et répondent à des motifs d'intérêt public ou social. Les collectivités territoriales et les établissements publics qui participent à un groupement d'employeurs peuvent ainsi être exonérés de TVA pour ces mises à disposition, même si plus de 20 % des recettes des autres membres sont soumises à la TVA.

Ces aménagements constituent une solution efficace pour le fonctionnement des groupements mixtes publics-privés. Il ne serait pas possible d'aller plus loin sans enfreindre les règles communautaires.

M. Jean-Claude Carle.  - Je vous remercie pour ces précisions, notamment sur la souplesse dont l'administration fiscale fait preuve dans ce domaine. Il est cependant regrettable de ne pouvoir aller plus loin. La situation gagnerait à évoluer. Ainsi, dans le cadre du texte sur la formation professionnelle que nous examinons et dont je suis le rapporteur, j'ai proposé qu'on puisse recourir aux groupements d'employeurs pour pallier le remplacement des salariés en formation. Puisse cette piste être assortie de facilités fiscales.

Baisses des prix dans la viticulture

M. Roland Courteau.  - Si j'ai souhaité alerter Mme la ministre de l'économie plutôt que le ministre de l'agriculture sur la situation de la viticulture française, c'est parce que son ministère dispose des moyens de soutenir ce secteur. C'est aussi pour rappeler que ce dernier représente 14 % de notre production agricole, se place au deuxième rang mondial, est le premier poste de nos exportations agroalimentaires -soit l'équivalent de 500 TGV-, assure 3 milliards de recettes de TVA (il est difficile de chiffrer les contributions indirectes) et emploie entre 700 et 800 000 personnes.

C'est dire toute l'importance de ce secteur pour notre pays. Or, dans bien des régions, les viticulteurs souffrent. Dans certaines zones, ils vivent de véritables drames humains et économiques dans l'indifférence générale, avec le douloureux sentiment d'être oubliés. La crise frappe de plus en plus durement, depuis cinq longues années. Les pertes de revenus atteignent 88 % dans l'Aude, 78 % dans l'Hérault. Les pertes à l'hectare atteignent parfois les 1 000 euros. Une journaliste s'interrogeait très justement il y a peu : qui accepterait de travailler pour un revenu équivalent à celui de 1985 ?

D'où la multiplication des arrachages, véritables crève-coeurs. Ce sont des pans entiers de nos vignobles qui disparaissent. Désespérance, détresse prévalent aujourd'hui. Prenons garde qu'elles ne se transforment demain en une aveugle colère.

La situation exige que soient prises en urgence des mesures pour faire renaître l'espoir. D'autant que la récolte 2009 sera historiquement faible, sans que cela signifie, malgré la qualité, une remontée des cours.

J'aurai prochainement la possibilité de demander à M. le ministre de l'agriculture la mise en oeuvre de mesures à moyen terme pour assurer, tant qu'il est encore temps, la relance du secteur. Mais pour l'heure, l'urgence commande de prendre, sans attendre, des mesures de soutien aux exploitations, en particulier celles qui traversent de graves difficultés de trésorerie : mesures financières, fiscales, exonérations de charges sociales...

Que compte faire le Gouvernement face à ce problème gravissime ? Entend-il user, pour parer au plus urgent, de la faculté que lui ouvre l'article L. 410-2 du code de commerce qui l'autorise à arrêter, par décret en Conseil d'État, des mesures temporaires contre les baisses excessives de prix liées à une situation de crise, des circonstances exceptionnelles ou une situation anormale du marché. Telle est bien la situation dans laquelle se trouve la viticulture : elle exige que l'on agisse vite et fort.

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.  - Vous voudrez bien excuser Mme Lagarde, dont les services me chargent de préciser que si, aux termes de l'article L. 410-2 du code de commerce, l'appréciation du caractère excessif des hausses ou des baisses de prix est laissée au pouvoir discrétionnaire de l'administration, les mesures prises doivent être motivées par une conjoncture particulière.

Or, les cours des vins publiés par FranceAgriMer, notamment pour les vins rouges et rosés sans indication géographique, sont à des niveaux considérés comme insuffisants par les producteurs depuis plus de huit ans, exception faite de l'année 2003. Ces cours se situent, sur sept récoltes, autour du prix minimum de rentabilité tel que vous l'avez estimé et, depuis 2005, en dessous de ce prix. Ainsi, on ne peut estimer que ce secteur est en situation de crise conjoncturelle. Les difficultés qu'il rencontre sont plutôt de nature structurelle.

En outre, la viticulture ne subit pas actuellement les effets de circonstances exceptionnelles ou de facteurs économiques caractérisant une situation manifestement anormale du marché.

Enfin, l'article L. 410-2 du code de commerce eût-il trouvé à s'appliquer que sa mise en oeuvre se serait très certainement avérée incompatible avec le droit communautaire de la concurrence : les produits viticoles étant soumis à une organisation commune de marché (OCM), toute possibilité pour un État-membre de réglementer les prix au stade de la production est exclue. La Cour de justice a de fait considéré que des produits soumis à une organisation commune des marchés ne peuvent faire l'objet de dispositions nationales prises unilatéralement et intervenant dans le mécanisme de la formation des prix au stade de la production-transformation et du commerce de gros tel qu'il résulte de l'organisation commune.

En revanche, l'OCM prévoit la possibilité de mettre en oeuvre un certain nombre de mesures de soutien à la viticulture. Après concertation avec les professionnels, la France a élaboré, dans ce cadre, un programme d'aide pour la période 2008-2013, dans lequel est prévu le recours à la distillation de crise. La décision de FranceAgriMer destinée à résorber les stocks de vins rouges qui tirent les cours à la baisse a été prise en juin 2009 et, après accord de la Commission, ses modalités en ont été publiées dans l'arrêté du 31 juillet 2009, qui prévoit la distillation de 600 000 hectolitres de vins de table et vins de pays rouge.

M. Roland Courteau.  - Refuser d'appliquer l'article L. 410-2, c'est ignorer l'ampleur des difficultés, au point que je me demande si les pouvoirs publics ont bien mesuré la gravité de la crise qui frappe le secteur. Les viticulteurs ne demandent qu'une chose : vivre dignement des fruits de leur travail. Craignez qu'à l'instar des producteurs de lait, qui font concrètement savoir leur mécontentement, le monde viticole ne soit poussé à passer à l'action. Monsieur le ministre, vous aurez été prévenu !

Parcs naturels régionaux

M. Jean-Claude Peyronnet.  - Le parc naturel régional Périgord-Limousin, qui a souhaité se voir attribuer la qualité d'organisme d'intérêt général pour bénéficier de la part patronale d'exonération sur son personnel, s'est vu opposer, en avril 2009, un refus des services fiscaux de la Haute-Vienne, au motif qu'il ne se rattacherait pas à l'un des caractères définis par l'article 200 du code général des impôts. Or, parmi ces caractères, figure la défense de l'environnement naturel. N'est-ce pas là sa fonction première ? Il serait donc parfaitement légitime de lui accorder la qualification qu'il demande, comme l'ont fait les services fiscaux de l'Aveyron pour le parc naturel du Grand Causse. L'objectif n'est autre que de stabiliser les personnels, dont beaucoup sont aujourd'hui contractuels, dans une zone rurale qui peine à recruter des personnels qualifiés.

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.  - Je vous prie d'excuser M. Woerth dont les services m'ont chargé de vous indiquer que la défense de l'environnement naturel, au sens de l'article 200 du code général des impôts, recouvre la lutte contre les pollutions et nuisances, la prévention des risques naturels et technologiques, la préservation de la faune, de la flore et des sites, la préservation des milieux et des équilibres naturels, l'amélioration du cadre de vie en milieu urbain ou rural ; que la condition d'intérêt général implique que l'activité de l'oeuvre ou de l'organisme ne soit pas lucrative et que sa gestion soit désintéressée au sens de l'instruction fiscale du 18 décembre 2006 publiée au Bulletin officiel des impôts ; que l'organisme, enfin, ne fonctionne pas au seul profit d'un cercle restreint de personnes.

Si aux termes du code de l'environnement, le parc naturel régional a indéniablement une activité de protection du patrimoine naturel, il est cependant engagé dans d'autres activités, telles que la participation à l'aménagement du territoire, le développement économique et social, le développement touristique, qui ne sont pas mentionnées à l'article 200 du code général des impôts. Il en résulte que compte tenu de son objet et des actions qu'il mène effectivement, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres conditions tenant à l'intérêt général, l'activité des parcs naturels régionaux ne se rattache pas, dans sa globalité, à l'un des caractères limitativement énumérés à l'article 200.

Vous voyez que là réside, monsieur Peyronnet, toute la subtilité : la différence est entre parc national et parc régional. Nous ne pouvons hélas pas déroger au droit.

Pour autant, mon expérience de l'aménagement du territoire, ne serait-ce que dans mon département où existe un parc naturel régional, m'amène à penser qu'il faudrait lancer une réflexion en vue de faire évoluer le traitement fiscal de ces parcs. Le droit fiscal actuel doit s'appliquer mais votre question est fondée et je ne doute pas que le Gouvernement, avec le Parlement, réfléchira à cette évolution.

M. Jean-Claude Peyronnet.  - J'ai eu un fol espoir mais je constate que vous avez encore une conception très restrictive de « l'intérêt général ». Si les parcs naturels régionaux ont d'autres activités, leur objet principal demeure d'intérêt général. En outre, l'exonération leur est accordée dans certains départements tandis que, dans les autres, les services fiscaux sont beaucoup plus rigides. Une réflexion commune est en effet souhaitable et je suis prêt à me rapprocher de vos services pour cela.

Site de production RFS de Lannion

M. Yannick Botrel.  - La situation des salariés de RFS « Radio Frequency System », à Lannion, est préoccupante, le site de production de cette filiale d'Alcatel-Lucent étant menacé de délocalisation dès le mois prochain. Une délocalisation régionale, certes, mais grave de conséquences pour le personnel : 53 emplois supprimés et un site industriel une nouvelle fois définitivement rayé. Cette annonce s'inscrit dans le prolongement des premières initiatives d'Alcatel de démantèlement de ses activités sur le bassin de Lannion et donc de destruction de ses emplois.

Cette décision est en contradiction avec les objectifs annoncés du groupe, avec la situation économique de l'entreprise et avec l'octroi de fonds publics. Les engagements d'Alcatel-Lucent, valables pour sa filiale RFS qu'il détient à 100 %, étaient pourtant clairs : aucune fermeture de site n'était envisagée et il allait diminuer son recours à la sous-traitance. On est loin du compte : l'avenir de 53 familles est en question et le nouveau schéma de production prévoit d'externaliser la fabrication.

Le personnel ouvrier de RFS a une ancienneté importante dans l'entreprise et, donc, une moyenne d'âge élevée. Le bassin de Lannion, déjà soumis à de grosses perturbations, ne peut pas proposer des emplois similaires, ce qui rend illusoires les possibilités de retour à l'emploi sur place. La solution n'est donc pas d'élaborer un plan de sauvetage mais de renoncer à fermer un site dont le carnet de commandes est bien rempli.

C'est le rôle de l'État d'intervenir. Du fait que 933 millions d'argent public ont été versés à RFS au titre du crédit d'impôt-recherche, les pouvoirs publics peuvent formuler des exigences que l'entreprise se doit de respecter.

Les salariés de RFS Lannion, déterminés à défendre leur emploi, n'attendent ni reclassement, ni indemnité. Le site industriel de production a de réelles perspectives d'activité puisqu'il est prévu que son résultat soit de près 1,4 million en 2010.

Quelles mesures, monsieur le ministre, allez-vous prendre pour maintenir la production de RFS à Lannion ?

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.  - Il ne faut pas se voiler la face : le groupe Alcatel-Lucent connaît de réelles difficultés, liées à la conjoncture économique mais aussi à la concurrence accrue des équipementiers télécom installés dans les pays à bas coûts salariaux. Il est du devoir du Gouvernement, et des collectivités, de veiller à ce que cette grande entreprise française, fragilisée, sorte renforcée de cette période de crise et demeure un leader mondial des télécommunications : c'est une exigence nationale !

Le groupe a annoncé fin juillet un nouveau plan de restructuration touchant près de 850 personnes. Le site de Lannion, qui compte aujourd'hui près de 80 salariés, ne fermera pas ; je m'y engage pour avoir rencontré le président du groupe ; et si 53 emplois devraient en effet être supprimés dans la production et les fonctions support, en revanche, les activités de Recherche et Développement seront conservées. Je vous signale d'ailleurs que c'est probablement parce que l'entreprise a bénéficié d'un crédit impôt-recherche qu'elle a décidé de conserver à Lannion ses activités de R&D. Le fait de toucher un tel crédit n'interdit aucunement à une entreprise de fermer, et certaines sociétés étrangères ne s'en privent pas. Mais Alcatel Lucent a le mérite d'en tenir compte...

Si des emplois sont supprimés à Lannion, en revanche, d'autres devraient être créés sur un autre site français de RFS, à Trignac en Loire-Atlantique. Nous veillons donc à ce que cette restructuration se fasse non pas à l'étranger mais sur le territoire national.

Enfin, je serai attentif à ce qu'Alcatel-Lucent offre des mesures de reclassement et d'accompagnement sur le site de RFS-Lannion ou sur l'ensemble des sites concernés par le plan de restructuration.

J'ai reçu des membres du conseil général des Côtes-d'Armor et je m'apprête à recevoir une délégation de Chaffoteaux-et-Maury car je veux préserver l'emploi dans ce département ; lorsque ce n'est pas possible, je veille à ce que les entreprises contribuent à un plan de sauvegarde de l'emploi et à ce que le Fonds de revitalisation des Côtes-d'Armor propose aux salariés licenciés de nouvelles activités. Partout, nous avons procédé ainsi ces derniers mois et nous avons toujours apporté des solutions aux salariés. Je suis prêt à vous recevoir et resterai attentif à l'avenir de ce site où, je le confirme encore, les activités de R&D seront conservées.

M. Yannick Botrel.  - C'est paradoxal : vous semblez bien connaître la situation des Côtes-d'Armor et, en même temps, vous confirmez la suppression de 53 postes à Lannion, postes occupés par des ouvriers anciens dans l'entreprise. La situation locale est telle qu'il sera difficile de reclasser sur place des gens qui ont bâti leur vie sur ce site.

Je prends acte de votre engagement de suivre attentivement la situation ; nous interviendrons auprès de vous pour que cette affaire soit suivie au plus près. La disparition de 53 emplois est inacceptable.

Gendarmerie de Neuves-Maisons

M. Daniel Reiner.  - Je m'adresse au ministre de l'intérieur puisque c'est désormais lui qui est en charge de la gendarmerie...

En 2003, le ministre de l'intérieur de l'époque -vous voyez, je pense, de qui il s'agit...- a informé par courrier la commune de Neuves-Maisons, qui disposait d'un commissariat, de son transfert en zone de gendarmerie à compter du 1er février 2004. Il précisait : « afin de réaliser cette transformation, des gendarmes supplémentaires seront affectés tant à la brigade de Neuves-Maisons -portant ainsi l'effectif à 38- qu'au peloton de surveillance et d'intervention de la gendarmerie de Nancy et à la brigade de recherche de Nancy ». Il ajoutait : « je demanderai au préfet de procéder, en concertation avec les élus, à une évaluation un an après le transfert ». Les communes qui dépendaient de ce commissariat avaient, dans ces conditions, accepté ce transfert.

Cinq ans après, aucune évaluation n'a été menée et on informe le maire que dix postes seront supprimés dans cette brigade de gendarmerie dès 2010, au prétexte d'une réorganisation destinée à couvrir un territoire plus grand avec moins de moyens humains. Tous s'étonnent de l'absence de concertation et s'inquiètent que ce qui a été mis en place il y a cinq ans, et qui donne satisfaction, soit remis en cause si brutalement, sans aucune évaluation préalable.

Nous souhaitons obtenir des éclaircissements.

Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d'État chargée de l'outre-mer.  - Le ministre de l'intérieur vous prie de l'excuser. Il partage votre préoccupation d'assurer la sécurité de nos concitoyens partout et pour tous. Aucun territoire ne doit être oublié, aucune population négligée. Cela n'exclut pas des ajustements du maillage territorial des forces de sécurité, ne serait-ce que pour tenir compte des évolutions de la démographie et de la délinquance. Il ne s'agit pas de réorganiser pour réorganiser mais de répondre à un seul et unique objectif : faire baisser la délinquance.

Une étude est actuellement menée afin d'adapter les zones de compétence de la gendarmerie en Meurthe-et-Moselle, en fonction de la répartition de la population, des flux de circulation et des bassins de délinquance. L'un des scénarios envisagés -le regroupement des effectifs au sein d'une communauté de brigades, placée sous un commandement unique- pourrait permettre de rationaliser certaines tâches de soutien administratif, tout en continuant de bénéficier, dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui, du soutien du peloton de surveillance et d'intervention et de la brigade de recherches de la compagnie de Nancy.

A ce stade, il ne s'agit que d'une réflexion conduite par la gendarmerie nationale, qui soumettra ses propositions au ministre de l'intérieur. Aucune décision n'est encore arrêtée. M. Hortefeux partage pleinement votre préoccupation et je peux vous assurer que tout développement de ce dossier donnera lieu à une concertation avec les élus concernés, sous l'égide du préfet de département.

M. Daniel Reiner.  - Il sera difficile de faire passer l'idée qu'on va améliorer l'efficacité du service en diminuant de 20 % ses effectifs. Les gens ne sont pas si naïfs !

Je retiens de votre réponse qu'il ne s'agit encore que d'une étude. Peut-être à cause du dépôt de ma question, le préfet vient de me faire savoir qu'une réunion aurait lieu vendredi. Je souhaite que l'on parvienne à une solution raisonnable et pas à une réduction des effectifs difficilement justifiable quand ni la démographie ni la délinquance ne diminue.

"Base élèves"

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Je souhaite attirer l'attention du ministre de l'éducation nationale sur le fichier « Base élèves 1er degré » ainsi que sur l'avis du Comité des droits de l'enfant de l'ONU en date du 11 juin 2009.

Constatant que les objectifs et l'utilité de « Base élèves » ne sont pas clairement définis, le Comité « est préoccupé par le fait que cette base de données puisse être utilisée à d'autres fins, telles que la détection de la délinquance et des enfants migrants en situation irrégulière, et par l'insuffisance des dispositions légales propres à prévenir son interconnexion avec les bases de données d'autres administrations. » Il note aussi « avec préoccupation que les parents ne peuvent pas s'opposer à l'enregistrement de leurs enfants dans cette base de données, n'en sont souvent pas informés, et pourraient avoir des réticences à scolariser leurs enfants. » Rappelant les recommandations formulées par le Comité des droits de l'homme, le Comité engage instamment l'État partie à garantir que la collecte, le stockage et l'utilisation de données personnelles sensibles sont compatibles avec les obligations qui lui incombent en vertu de l'article 16 de la Convention. Plus généralement, il « recommande à l'État partie de ne saisir dans les bases de données que des renseignements personnels anonymes et de légiférer sur l'utilisation des données collectées en vue de prévenir une utilisation abusive des informations. »

Quelles suites entendez-vous donner à ces recommandations ? Au vu des éléments relevés par l'avis du Comité des droits de l'enfant, il serait cohérent que les sanctions prises par les rectorats à l'encontre de ceux qui se sont opposés à « Base élèves » soient levées.

Comment se fait-il que les écoles privées catholiques sous contrat aient été autorisées en septembre 2008 à créer leur propre fichier des écoles (Basec) et leur propre base des « identifiants élèves » (Inec) ?

Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d'État chargée de l'outre-mer.  - « Base-élèves » est une application informatique mise à la disposition des directeurs d'école et des maires pour assurer un suivi efficace et simple des élèves du premier degré, sur les plans administratif et pédagogique. Ces procédures étaient auparavant assurées par les municipalités, par les académies ou par les écoles elles-mêmes, sans présenter toutes les garanties de sécurité technique et juridique.

La modernisation de l'application constitue une véritable avancée en matière d'équité de traitement des territoires. Elle a permis d'alléger le travail de préparation de rentrée des directeurs d'écoles, et de les rendre plus disponibles pour les parents d'élèves. Si des résistances se sont portées sur la mise en place de ce nouvel outil de performance, elles n'ont pas eu de prise sur le plus grand nombre. A la rentrée 2009, plus de 90 % des écoles l'utiliseront. Ce succès incontestable est dû à l'engagement des directeurs d'écoles, lesquels ont reçu une formation approfondie.

L'application est en tout point conforme à la législation en vigueur, elle a fait l'objet de l'ensemble des procédures de déclaration prévues par la loi relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. La nature des données y figurant est connue de tous, ainsi que leurs destinataires. Le ministère s'est engagé à ce que l'application ne fasse l'objet d'aucune interconnexion avec tout autre application gérée par un autre ministère ou organisme public. Une notice d'information mentionnant leurs droits d'accès et de modification est remise aux parents d'élèves.

Les informations qui, comme la nationalité ou l'origine ethnique des élèves et de leurs parents, n'étaient pas strictement nécessaires à la gestion des effectifs des élèves ont été retirées de la liste de données.

Mme Nathalie Goulet.  - Encore heureux !

Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d'État.  - N'y figurent dorénavant que les informations concernant les coordonnées de l'élève, ainsi que celles des responsables légaux de l'enfant. Les données liées à la scolarité de l'élève ne portent que sur des champs restreints : classe, date d'inscription, d'admission et de radiation. La durée de conservation des données est limitée à la scolarité de l'élève dans le premier degré.

L'opposition à ce fichier est donc aujourd'hui totalement infondée.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Votre réponse ne peut me satisfaire, ne serait-ce que parce que vous ne m'avez rien dit sur les fichiers des écoles catholiques.

Je continue de m'interroger, malgré vos propos sur la gestion et le pilotage, sur la finalité de cette application. Le flou persiste. Le dossier mériterait un débat parlementaire, d'autant que le fichier semble en contradiction avec la Convention internationale des droits de l'enfant. Vous dites que les données relatives à la nationalité ont été retirées, j'ignorais leur existence. Je relève en outre que l'identifiant peut être utilisé pendant 35 ans, soit bien après que l'élève soit devenu adulte. Alors que la Défenseure des enfants disparaît -nous aurons l'occasion d'y revenir-, on peut s'interroger sur le cas qu'on fait de ses propositions. Je souhaite pour conclure que les sanctions prononcées contre ceux qui ont refusé « Base élèves » soient levées.

L'Ofpra et la Turquie

Mme Nathalie Goulet.  - Nous avons, il y a quelques semaines, reçu une délégation de la commission des droits de l'homme de la Grande assemblée turque, qui s'est inquiétée de la politique de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) à l'égard des ressortissants turcs. La Turquie ne figure pas sur la liste des « pays d'origine sûrs » établie par l'Office. Aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un pays est considéré comme sûr « s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales ».

Au regard des efforts faits par la Turquie et reconnus par les institutions européennes, dont le Conseil de l'Europe, j'aimerais connaître les raisons de son exclusion de la liste de l'Ofpra et souhaite que le conseil d'administration de l'Office reconsidère sa position et fournisse au gouvernement turc les explications nécessaires.

Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d'État chargée de l'outre-mer.  - Je vous prie d'excuser M. Besson. L'Ofpra est un établissement public autonome qui est seul compétent pour reconnaître aux demandeurs d'asile la qualité de réfugié ou de bénéficiaire de la protection subsidiaire. Il exerce sa mission en toute indépendance dans le respect des textes internationaux. Ses décisions sont prises sous le contrôle de la Cour nationale du droit d'asile et du Conseil d'État. L'instruction de demandes est individuelle et les décisions sont prises sur le fondement des dossiers et non en fonction de considérations générales sur la situation du pays d'origine.

Au premier semestre 2009, 900 dossiers de demandes d'asile émanant de ressortissants turcs ont été déposés. Le taux d'admission a été de 5 % -de 18 % si on tient compte des décisions de la Cour nationale du droit d'asile. Ces chiffres sont inférieurs à la moyenne générale de l'Ofpra, et comparables à ceux de nos principaux partenaires.

La notion de « pays d'origine sûr » est issue d'une directive communautaire de 2005 qui a été transposée en droit interne. La liste est établie par le conseil d'administration de l'Ofpra, où siègent des représentants des ministères de l'intégration et des affaires étrangères ; un représentant du Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés assiste à ses réunions. L'objectif de cette liste est de permettre un traitement diligent des demandes d'asile. N'y sont inscrits que les pays dont sont originaires un nombre significatif de demandeurs d'asile -ce qui ne signifie pas que leurs ressortissants sont a priori inéligibles à une protection internationale. L'existence de la liste permet l'examen prioritaire des demandes.

Le conseil d'administration de l'Ofpra veille à ce que la liste soit établie avec rigueur, sur le fondement de données fiables et actualisées. Une procédure de révision est en cours, qui sera finalisée en 2010. L'éventuelle inscription de la Turquie sera examinée dans ce cadre.

Mme Nathalie Goulet.  - Je vous remercie et transmettrai votre réponse à la commission des droits de l'homme de la Grande assemblée turque. Je sais que la Turquie fera le maximum pour figurer en 2010 dans la liste révisée. Je suivrai attentivement cette question, à laquelle nos amis parlementaires turcs accordent une grande importance.

Grimpe dans la réserve de Chastreix-Sancy

M. Jean-Marc Juilhard.  - Le décret du 13 juillet 2007 a créé la réserve naturelle de Chastreix-Sancy sur le site de la Fontaine Salée, au coeur du massif du Sancy dans le Puy-de-Dôme. La pratique traditionnelle de l'escalade et de l'alpinisme, pourtant totalement respectueuse de la nature et reconnue comme telle par tous les spécialistes, y compris des ministères concernés, n'y a malheureusement pas été autorisée, alors qu'elle l'est, par exemple, à certaines périodes dans la réserve voisine de la vallée de Chaudefour. Le massif du Sancy compte des professionnels diplômés de grande qualité.

Le préfet de région a réuni un tour de table le 29 décembre 2008, mais la demande de modification du décret a été refusée, à la grande surprise des élus et des professionnels. Ce refus place ces derniers dans une situation difficile. Un consensus s'est à nouveau manifesté en juillet dernier. Je souhaite donc que le décret soit modifié dans les meilleurs délais.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - M. Borloo a pris connaissance avec intérêt de votre question. En réponse à une lettre du préfet de région du 13 janvier dernier, il a indiqué qu'il n'était pas possible d'autoriser les activités que vous évoquez en dérogation au décret de classement du 13 juillet 2007. Il est toutefois envisageable de réfléchir à une modification de ce décret, qui ne peut avoir lieu que sur demande officielle. Une telle modification, à laquelle M. le ministre d'État et moi-même sommes très favorables, serait soumise aux mêmes modalités que celles qui ont précédé la création de la réserve.

M. Jean-Marc Juilhard.  - Je vous remercie. La procédure de modification prendra cependant du temps ; je souhaite, pendant ce délai, qu'une certaine tolérance prévale sur le terrain.

Schéma de mise en valeur de la mer

Mme Marie-Thérèse Bruguière.  - L'article 235 de la loi du 23 février 2005 a ouvert la possibilité d'intégrer au schéma de cohérence territoriale (Scot) un chapitre individualisé valant schéma de mise en valeur de la mer (SMVM). L'article L. 122-13 du code de l'urbanisme précise que le projet de périmètre du Scot est communiqué au préfet qui le publie par arrêté, après avis du ou des conseils généraux et vérification que le périmètre retenu permet la mise en cohérence des questions d'urbanisme, d'habitat, de développement économique, de déplacements et d'environnement.

Le préfet doit également être consulté lorsque le Scot englobe une ou plusieurs communes littorales et que l'établissement public compétent décide d'élaborer un chapitre individualisé valant SMVM ; il vérifie la compatibilité du périmètre de ce schéma avec les enjeux d'aménagement, de protection et de mise en valeur du littoral. L'article R. 122-3-1 du code de l'urbanisme qui résulte du décret du 8 novembre 2007 impose dans ce cas la consultation préalable du préfet maritime.

Convient-il donc de saisir le préfet d'abord sur le périmètre du SMVM, puis sur celui du Scot, ou bien peut-on lui demander de se prononcer en même temps sur ces deux sujets ?

Les procédures en cours tendant à créer des SMVM au sein de Scot et engagées avant le décret du 8 novembre 2007, sur lesquelles le préfet maritime ne s'est pas prononcé, peuvent-elles se poursuivre ou doivent-elles répondre aux nouvelles exigences de la réglementation ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Conformément à l'article L.122-3 IV du code de l'urbanisme, le projet de périmètre du schéma de cohérence territoriale établi par les communes ou leurs groupements compétents est communiqué au préfet qui consulte les conseils généraux concernés et examine sa pertinence avant de le publier. Lorsque le schéma de cohérence territoriale englobe une ou plusieurs communes littorales et que l'établissement public compétent décide d'élaborer un chapitre individualisé valant schéma de mise en valeur de la mer (SMVM), le préfet est consulté sur la compatibilité du périmètre avec les enjeux d'aménagement, de protection et de mise en valeur du littoral.

Cela n'implique pas qu'il faille consulter le préfet sur le périmètre du SMVM avant de lui communiquer le projet de périmètre du Scot. II est possible de le saisir simultanément de ces deux questions.

En outre, la consultation du préfet maritime prévue par l'article R.122-3-1 du code de l'urbanisme n'est pas exigée si l'avis du préfet a été rendu avant l'entrée en vigueur du décret du 8 novembre 2007, conformément au droit commun. Les procédures déjà engagées peuvent donc se poursuivre selon les dispositions alors en vigueur.

Mme Marie-Thérèse Bruguière.  - Merci de ces éclaircissements.

Sauvegarde de l'activité de triage sur la plateforme ferroviaire du Bourget

Mme Éliane Assassi.  - J'attire votre attention sur la situation alarmante du fret ferroviaire, qui pâtit depuis 2002 des restructurations décidées par la direction de la SNCF avec l'appui des gouvernements successifs. Pas moins de 10 000 postes ont ainsi été supprimés, 500 gares fermées et 1,5 million de camions jetés sur la route. La SNCF accuse le fret de lui coûter trop cher : elle annonce pour le premier semestre de 2009 un déficit de 496 millions d'euros dont 323 millions sont imputables au fret.

Pourtant le transport de marchandises est un enjeu considérable pour notre pays en matière d'emplois, d'économies d'énergie, de préservation de l'environnement, de santé publique, de qualité de vie et de sécurité routière. Il est indispensable de rompre avec la logique actuelle qui privilégie le transport routier qui va à l'encontre de ces objectifs et utilise une main-d'oeuvre dont les conditions de travail sont dégradées. D'autres solutions existent, qui impliquent de cultiver les atouts de la SNCF comme le réclament depuis longtemps les syndicats. Il faudrait développer les plateformes logistiques aux portes de Paris, en particulier au Bourget, favoriser l'acheminement entre les plateformes sur la grande ceinture, et mettre en place un système de collecte et de distribution par voie ferroviaire ou routière dans la zone intra muros reliée aux plateformes où sont assemblés les trains circulant entre les plateformes. Le mode routier ne serait alors utilisé que pour les très courtes distances.

Aujourd'hui, l'activité de fret de la plateforme du Bourget, située dans mon département, est particulièrement touchée par ces restructurations. Les cheminots sont inquiets et s'interrogent sur l'avenir du fret ferroviaire en France : le 16 septembre dernier, ils se sont assemblés au Bourget pour exiger le maintien et le développement du service public du transport de marchandises. Le même jour, le Gouvernement a présenté son plan « Fret d'avenir » financé à hauteur de 7 milliards d'euros. Mais nous ne sommes pas dupes : la direction de la SNCF a déjà pris la décision de réformer le fret. Elle doit présenter ses orientations aujourd'hui même lors du comité central d'entreprise, et demain lors du conseil d'administration. Elle prévoit d'ores et déjà d'abandonner entre 50 et 70 % du trafic du wagon isolé, transféré vers des opérateurs dits « de proximité », et de créer des filiales consacrées à certains secteurs d'activité où les employés n'auront pas le statut de cheminot. Cette réorganisation devrait entraîner la suppression d'ici deux ans de 4 000 à 6 000 emplois sur un total de 14 000, et aboutir à la privatisation du transport de marchandises.

Le Gouvernement a-t-il l'intention d'abandonner ses projets de filialisation de du fret de la SNCF et d'encourager le report modal de la route vers le rail en confirmant que le transport de marchandises est bien un service public ? Comment compte-t-il soutenir et développer l'activité de triage sur le site du Bourget dont la modernisation constitue un enjeu d'intérêt général ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Je vous prie de bien vouloir excuser M. Bussereau, qui est en ce moment à l'Assemblée nationale pour l'examen du projet de loi relatif à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires.

Le développement des modes de transports autres que la route figure parmi les objectifs du Grenelle de l'environnement et de la loi « Grenelle I ». Le Gouvernement a adopté lors du conseil des ministres du 16 septembre l'engagement national pour le fret ferroviaire qui traduit dans les faits l'ambition de porter la part des transports non routiers de 14 à 25 % à l'horizon 2022. Cet immense effort est indispensable si l'on veut créer dans notre pays une économie décarbonée. Plus de 7 milliards d'euros seront investis d'ici à 2020. De même que nous sommes passés il y a quelques années pour le transport de voyageurs du Corail au TGV, nous devons aujourd'hui donner un nouveau souffle au transport de marchandises.

Le Gouvernement a demandé à la SNCF de développer le fret et d'investir dans les solutions innovantes telles que les autoroutes ferroviaires, le transport combiné, le fret à grande vitesse, les opérations de logistique urbaine et les opérateurs ferroviaires de proximité. La SNCF doit également consolider et renforcer sa part de marché dans le domaine des flux massifs industriels où le mode ferroviaire a toute sa pertinence, et Réseau ferré de France mettre à la disposition des opérateurs une infrastructure performante.

Cet engagement national ayant été annoncé il y a quelques jours seulement, il est un peu tôt pour que la SNCF puisse préciser quel sera le rôle futur du site du Bourget. L'entreprise met la dernière main à son projet de schéma directeur industriel et managérial pour un nouveau transport ferroviaire écologique de marchandises, qui s'appuie sur une organisation comportant des trains massifs réguliers et des trains composés de wagons multi-lots acheminés entre les plateformes. Celles-ci seront principalement approvisionnées par le mode ferroviaire. La direction n'a pas encore décidé de la localisation des plateformes ; elle se prononcera en fonction de considérations d'ordre économique et social, notamment des besoins exprimés par les chargeurs.

Le Gouvernement organisera une vaste concertation au sujet de cet engagement national, et mettra en place un comité de suivi.

Mme Éliane Assassi.  - Votre réponse ne m'a pas convaincue et ne rassurera pas le personnel de la SNCF. Certes, le Gouvernement a promis 7 milliards d'euros pour le fret ferroviaire. Mais les contours du grand emprunt d'État, qui servira à financer ce plan, sont encore flous, et les investissements s'échelonneront jusqu'en 2020. Cela ne suffira pas à combler les lacunes de la SNCF. La direction de l'entreprise n'a d'ailleurs pas renoncé à réformer les conditions de travail dans le secteur du fret, bien qu'elle ait dû reculer il y a un an après une grève des cheminots.

Je suis moi-même conseillère municipale de Drancy. La réorganisation de l'activité de fret de la plateforme du Bourget serait-elle liée au projet de Grand Paris cher à Nicolas Sarkozy ou aux ambitions des maires du Bourget et de Drancy qui rêvent de livrer les terrains libérés à la spéculation immobilière ?

Je resterai vigilante, car le fret doit rester un grand service public.

Pass foncier

Mme Françoise Cartron.  - La loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion a créé le pass foncier, avec l'objectif affiché de faire de la France, selon l'expression du Président de la République, un pays de propriétaires.

Ce dispositif est mis en oeuvre via les collectivités territoriales, lesquelles accordent une aide d'un montant minimum de 3 000 euros pour une à trois personnes et de 4 000 euros pour quatre personnes et plus. Dans le cadre du plan de relance, le Gouvernement a annoncé la création d'une subvention spécifique aux communes pour ramener leur dépense nette à 2 000 euros par logement, initiative concrétisée par le décret du 20 mai 2009, auxquelles -c'est là que le bât blesse- ne seront éligibles que les demandes intervenues avant le 30 novembre 2009 selon la circulaire d'application du 11 juin 2009 et les instructions des directions départementales de l'équipement. Résultat : les communes ne disposent que de quelques mois pour instruire les dossiers, ce qui paraît court d'autant que l'achat d'un bien immobilier est une opération longue, et risquent, pour certaines, d'octroyer l'aide associée au pass-foncier sans bénéficier de la subvention spécifique.

Madame la ministre, comptez-vous proroger ce délai pour éviter aux communes qui se sont impliquées dans ce dispositif de grandes difficultés financières ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Le pass-foncier, dispositif utile d'accession sociale à la propriété, est désormais opérationnel. Les 50 millions du plan de relance pour aider les collectivités à atteindre l'objectif des 30 000 pass-foncier, que nous pourrons atteindre fin 2010 grâce à la mobilisation des élus, n'ont été votés que pour 2009. D'où l'échéance initialement fixée à la fin novembre. Néanmoins, les chiffres fournis par l'Union d'économie sociale pour le logement indiquant que les crédits ne seront pas consommés avant la fin de l'année, la bonification devra être reconduite en 2010. Ainsi, les collectivités auront-elles la lisibilité nécessaire pour s'engager dans une politique de l'habitat centrée sur l'accession sociale à la propriété !

Mme Françoise Cartron.  - Merci de cette bonne nouvelle qui rassurera les communes !

Révisions des POS

M. Francis Grignon.  - Je dois indiquer que le pass-foncier est un succès avec, dans le Bas-Rhin, 150 demandes l'an dernier et 600 cette année. Je me réjouis donc de cette bonne nouvelle !

J'en viens à ma question. Les communes, ne pouvant plus réviser leur plan d'occupation des sols après le 1er janvier 2010, devront adopter un plan local d'urbanisme. Or, lorsque j'étais maire en 1977, le POS était passé comme une lettre à la poste, mais les documents d'urbanisme donnent lieu aujourd'hui à de longs débats car la population a pris conscience de leur importance. D'où un problème de délai, auquel s'ajoute un problème financier car le passage au PLU est très coûteux ! Madame la ministre, ne pourrait-on pas rallonger le délai du 1er janvier 2010 pour donner un peu d'oxygène aux communes ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Seules sont concernées par l'échéance du 1er janvier 2010 les révisions simplifiées du POS, dont la possibilité avait été ouverte par la loi SRU pour une durée initiale de cinq ans, prorogée ensuite jusqu'au 31 décembre 2009, soit neuf ans. En outre, le POS, à force de remaniements successifs qui portent atteinte à son économie générale, nécessite, au final, l'élaboration d'un PLU qui présente l'avantage de comporter un projet d'aménagement et développement durable, le PADD, nécessaire à la mise en oeuvre des objectifs du Grenelle.

De plus, le passage au PLU est loin d'être long et coûteux. Les PLU intercommunaux, qui vont dans le sens de l'intercommunalité souhaitée par le Gouvernement, permettent de réaliser des économies d'échelle et offrent aux communes, même de petite taille, de nouvelles possibilités de maîtrise de l'aménagement et de l'urbanisme. L'intérêt étant que les communes passent au PLU, le Gouvernement est défavorable à une nouvelle prorogation du délai.

M. Francis Grignon.  - Juste une observation personnelle sur les PLU intercommunaux : que restera-t-il au maire s'il ne peut plus décider de l'évolution de sa commune ? Pour le reste, je transmets...

Scolarisation des enfants handicapés

M. Jean-Luc Fichet.  - Je veux vous parler aujourd'hui du désespoir des enfants handicapés et de leurs familles. La rentrée est difficile : dans le Finistère, 102 enfants se trouvent sur la liste d'attente des IME et 138 sur celle des services d'éducation spéciale et de soin à domicile sans même évoquer la situation nationale ! Tous les handicaps sont concernés, des enfants déficients intellectuels ou moteur aux jeunes aveugles et malvoyants. La situation est devenue intolérable, obligeant un des membres de la famille à quitter son emploi. Quand aider ses enfants devient si compliqué, le malaise est évident. Au manque de places s'ajoute la gestion ubuesque des emplois de vie scolaire, les EVS, et des auxiliaires de vie scolaire, les AVS : pas moins de 7 000 postes sont supprimés tandis que le Pôle emploi ne parvient pas à trouver des personnes compétentes pour les postes ouverts. Le Gouvernement ne peut pas, d'un côté, diminuer les moyens de la politique du handicap en s'indignant, de l'autre, de ce que 80 % de personnes handicapées aient un diplôme inférieur au BEP !

La loi de 2005 est une avancée mais, sans moyens, elle est inutile. Aujourd'hui, les parents sont confrontés à la « carence de l'État », pour reprendre les termes d'un arrêt du Conseil d'État. Vous avez annoncé la création d'un groupe de travail sur les AVS chargé de trouver une solution pour la rentrée 2010. Mais que vont faire les enfants pendant un an ? Monsieur le ministre, je vous le demande solennellement : quand accorderez-vous à la politique du handicap les moyens nécessaires et cesserez-vous de la considérer comme une variable d'ajustement du budget de l'éducation nationale ?

M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse.  - Mme Morano, empêchée, m'a prié de vous transmettre sa réponse. Le plan pluriannuel de créations de places pour handicapés en établissements médico-sociaux en prévoit 12 000 pour les enfants à l'horizon 2015, dont 7 200 d'ici 2012. Voilà la réponse au problème des listes d'attente que vous souleviez. L'effort a été amplifié en 2009, avec 128 millions, dont 59,9 millions pour 1 973 places pour les handicapés (1 184 en Cessad et 498 en IME) ; 66,9 millions pour 1 748 places par anticipation sur 2010-2011 ; 1,7 million au titre du plan de relance pour 60 places. Sur ce montant, 1,2 million d'euros sont destinés au Finistère, la Bretagne recevant au total 4,7 millions. Il s'agit bien de mesures nouvelles, donc de créations de places et cette dynamique sera maintenue.

La coopération avec les écoles et le secteur médico-social a fait l'objet d'une nouvelle réglementation afin d'organiser des unités d'enseignement pour enfants handicapés. Ils sont aujourd'hui 185 000 à être accueillis à l'école, soit 38 % de plus qu'en 2005. Voilà l'un des acquis de la loi de 2005. En deux ans, le nombre des AVS a augmenté de moitié. C'est en raison des difficultés que vous avez soulignées qu'un groupe de travail a été mis en place, afin d'éviter les solutions de continuité. Si cette mesure transitoire ne répond pas à toutes les situations, elle maintient les compétences nécessaires et permet le décloisonnement souhaitable. Car c'est bien vers la professionnalisation d'un accompagnement cohérent et continu que nous devons aller. Avec M. Chatel, nous allons lancer une réflexion sur ces thèmes.

Le chemin est difficile, il faudra un effort soutenu mais, avec les associations, dont je salue l'engagement, nous saurons répondre à l'urgence.

M. Jean-Luc Fichet.  - Je vous remercie de ces éléments de réponse. Je confirme toutefois que 7 000 postes sur 30 000 ont bien été supprimés. Les familles, devant lesquelles les portes des écoles se ferment, sont confrontées à des parcours impossibles -c'est la double peine.

La suppression du poste de Défenseure des enfants est aussi un mauvais signe. Elle est mal comprise. Ces décisions seulement destinées à réaliser des économies sont désastreuses.

Mise en oeuvre du RSA

M. René-Pierre Signé.  - Le revenu de solidarité active (RSA) est une mesure de politique sociale qu'avait formulée le parti socialiste. Il constitue un progrès en matière de droit social. Il remplace le RMI, l'Api et différents mécanismes encourageant à la reprise d'activité. Son côté positif est indéniable mais, comme toute médaille, il a son revers. Il représente une charge supplémentaire et non compensée pour les départements, obligés de créer des services et de recruter du personnel. Il s'applique aux personnes qui ont retrouvé un emploi, alors que notre économie en crée peu dans la conjoncture actuelle. Il risque d'encourager l'offre de petits boulots en toute bonne conscience puisque l'État complètera le salaire. Il alimentera ainsi la pauvreté salariale, notamment dans le secteur des services à la personne, limités en moyenne à onze heures par semaine. Son impact sur la pauvreté sera faible et la qualité de l'offre altérée. Si l'on ne combattait pas ces effets pervers, le RSA aboutirait à un effet contraire à son objectif : assurer un complément de revenu en encourageant la recherche d'un travail de qualité.

M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse.  - Vous avez eu la générosité de le souligner, le RSA marque un progrès social : on ne perdra plus d'argent parce que l'on retrouve un travail, ce qui était inique. Je remercie le Sénat de nous avoir aidés à corriger cela.

Y a-t-il charge nette pour les conseils généraux ? Des amendements ont été adoptés dans cet hémicycle, qui prévoient une compensation au centime d'euro près et une clause de revoyure dans deux ans. Les départements ne créent pas de services spécifiques et des conventions sont intervenues entre l'État, Pôle emploi et les départements, qui se répartissent l'accompagnement professionnel. L'État ayant en outre apporté 150 millions pour l'aide personnalisée de retour à l'emploi, les départements peuvent mettre davantage dans l'accompagnement. Nous ferons toute la lumière sur les chiffres.

Le RSA va-t-il provoquer une dégradation de la qualité de l'emploi ? On n'a rien observé de tel dans les 33 départements où il a été expérimenté. Le temps partiel, la précarité existaient auparavant ; en revanche, les 135 euros supplémentaires que touchent 336 000 familles ont fait sortir des ménages de la pauvreté. J'ai installé la semaine dernière une commission présidée par le professeur Bourguignon et qui comprend quatre présidents de conseils généraux. Elle vérifiera l'effet du RSA sur le taux de pauvreté, sur la qualité de l'emploi, sur les dépenses des collectivités territoriales, sur le taux de retour à l'emploi. Vous verrez année après années les résultats d'une mesure dont les éventuels effets pervers ne se sont pas encore manifestés.

Non, les bénéficiaires ne perdent pas d'autres aides : il n'est pas inclus dans le calcul de la CMU ; un système progressif est prévu pour la taxe d'habitation et la redevance et une sénatrice a proposé que l'ensemble des aides connexes soit délivré en fonction des ressources et non du statut. Le progrès est bien réel.

M. Claude Biwer.  - Très bien !

M. René-Pierre Signé.  - Je remercie le haut-commissaire de cette réponse. Je savais qu'il présenterait le dossier sous un jour nettement positif. N'empêche que la mise en place du RSA semble poussive.

M. Martin Hirsch, haut-commissaire.  - Quatre fois plus vite que pour le RMI !

M. René-Pierre Signé.  - Il y a eu 815 000 dossiers... Vous parlez de 326 000 familles, on n'en signalait que 286 000...

M. Martin Hirsch, haut-commissaire.  - Le mois dernier !

M. René-Pierre Signé.  - Quant à la compensation à l'euro près, ce n'est pas ce que disent les départements qui ont bien dû recruter.

M. François Fillon a critiqué les recrutements des collectivités locales, qu'il juge intempestifs. Mais ils ne sont dus qu'à des transferts de charges mal compensés et imposés !

Enfin, pour un simple emploi à trois quarts de temps, le bénéficiaire risque de subir une diminution de son allocation logement, son exonération de taxe d'habitation pourrait être supprimée et il ne bénéficiera plus de la prime pour le retour à l'emploi ni de la prime pour l'emploi. Beaucoup craignent de perdre leurs droits à la CMU, même si vous dites le contraire.

Monsieur le haut-commissaire, vous avez déclaré vouloir corriger les éventuels effets négatifs du RSA : il y en aura et je souhaite que vous les corrigiez.

Emploi saisonnier en agriculture

M. Claude Biwer.  - Cette année, l'abondance des fruits et l'importance des importations ont entraîné une chute des cours telle que le prix payé aux producteurs ne couvre pas les charges d'exploitation ni même le coût de la récolte.

Cette situation est due pour une part à l'important différentiel de charges de main-d'oeuvre entre les producteurs de fruits et légumes français et leurs concurrents européens. Le coût du travail saisonnier s'établirait à 11,04 euros en France, contre 6 en Allemagne, 7,80 en Espagne, 7,37 en Belgique, et entre 4,47 et 9,97 aux Pays-Bas. En outre, les agriculteurs lorrains et meusiens subissent la concurrence directe des productions originaires de Belgique, des Pays-Bas et d'Allemagne. Dans le sud de la France, la concurrence s'exerce vis-à-vis de l'Espagne ou de l'Italie. Comment les producteurs de fruits et légumes français peuvent-ils lutter avec un différentiel de coûts allant de 10 à 60 ? D'autant qu'ils sont victimes d'une double peine liée à la politique de prix bas imposée par les centrales d'achat françaises.

La pression exercée par les centrales d'achat est telle, en effet, que le prix réglé aux agriculteurs ne couvre pas leurs coûts de revient tandis que les consommateurs, de leur côté, se plaignent de la cherté des fruits et légumes. Ce problème de marges dans les circuits de distribution a fait l'objet, ici même, de nombreuses interventions. Il n'est manifestement pas résolu, tout comme le problème du lait sur lequel je suis intervenu lors des questions d'actualité du 17 septembre. Il faut pourtant obtenir coûte que coûte une diminution des marges de la distribution pour faire baisser les prix à la consommation et augmenter les volumes achetés par les consommateurs.

Monsieur le ministre, quelles initiatives le Gouvernement compte-t-il prendre afin d'aboutir à une harmonisation européenne des coûts du travail et mettre fin ainsi à ces distorsions de concurrence ?

M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse.  - Je vous prie d'excuser Bruno Le Maire, qui préside ce matin même une table ronde consacrée à la compétitivité de la filière des fruits et légumes.

Chaque État membre de l'Union européenne peut fixer librement son cadre social et fiscal. En France, des dispositifs d'allégements des charges sociales ont été instaurés, notamment pour aider à l'emploi de travailleurs occasionnels et la transformation de ces emplois en contrats à durée indéterminée, et pour encourager la constitution et le développement des groupements d'employeurs. Depuis le 1er octobre 2008, une réduction des cotisations sociales s'applique pour les heures supplémentaires et complémentaires effectuées par les salariés.

Il est manifeste, toutefois, que le coût du travail pèse lourdement sur la compétitivité des exploitations françaises, en particulier dans les filières fortement employeuses de main-d'oeuvre. Ce facteur sera largement abordé lors de la table ronde qui se tient ce matin. Cependant, en agriculture comme ailleurs, la compétitivité ne peut reposer uniquement sur les coûts de main-d'oeuvre et doit s'appuyer aussi sur des avancées techniques et stratégiques. Dans cette optique, la concertation interprofessionnelle ainsi que l'organisation de la première mise en marché doivent être renforcées. Michel Barnier a engagé une réforme profonde de la gouvernance de la filière. Bruno Le Maire poursuit ce projet, désormais inscrit dans la Charte nationale de gouvernance des filières fruits et légumes approuvée par les professionnels le 13 mai 2008. Les professionnels des départements lorrains se joindront certainement activement à cette dynamique en cours.

M. Claude Biwer.  - Certes, vous ne pouvez inventer des remèdes miracles et je reconnais les efforts accomplis par le Gouvernement. Toutefois, nous ne pouvons nous contenter de beaux discours : il nous faut au moins des solutions face aux problèmes cruciaux auxquels les agriculteurs, et notamment les producteurs de fruits et légumes ou de laits, sont confrontés. J'espère que la mise en oeuvre des projets en cours s'accélérera car la crise peut se révéler très grave.

Pôle sanitaire de l'ouest à la Réunion

Mme Anne-Marie Payet.  - Sur le territoire de santé de l'ouest de la Réunion, l'obsolescence des structures privées et publiques combinée à la perspective d'une très forte croissance démographique rendent indispensable la restructuration de l'offre sanitaire. Pour une population du bassin d'environ 200 000 habitants, en un an les urgences ont admis près de 40 000 patients, la maternité de Saint-Paul a enregistré 1 950 accouchements et 3 700 interventions chirurgicales ont été réalisées. Le taux d'occupation des lits en médecine est de 100 % et la durée moyenne de séjour inférieure de près de 20 % aux données nationales.

La création du pôle sanitaire de l'ouest constitue l'une des orientations principales du Schéma régional d'organisation sanitaire (Sros). Le centre hospitalier Gabriel Martin, le groupe Clinifutur ainsi que les autres partenaires hospitaliers doivent élaborer un projet médical reposant sur une organisation commune et un rapprochement de leurs activités. L'Agence régionale de l'hospitalisation (ARH) Réunion-Mayotte a chargé un professionnel de santé d'évaluer l'avancement du pôle sanitaire. Certaines conclusions de son rapport inquiètent le collectif « Un hôpital en 2012 », composé de représentants du corps médical et paramédical, du personnel, de la municipalité, des usagers et d'administrateurs.

Si le choix d'une reconstruction de l'hôpital actuel sur le site du Grand Pourpier a été arrêté, le projet présenté par I'ARH en avril suscite de vives inquiétudes. Il prévoit la création d'une maternité de 3 500 places sur le site de Cambaie, le transfert de toute l'activité de chirurgie vers le groupe Clinifutur et l'installation sur l'actuel site du centre hospitalier Gabriel Martin d'une unité de médecine gériatrique. Cette organisation multipliera les sites d'intervention, les équipes, les plateaux techniques, et rendra nécessaires de nombreuses navettes d'un site à l'autre.

Heureusement, le conseil d'administration du centre Gabriel Martin a récemment adopté le plan de financement du pôle sanitaire. Les grandes lignes du projet qui s'y dessinent répondent davantage à nos attentes. La construction du pôle se ferait sur un site unique comprenant l'ensemble des activités hospitalières. La nécessité de mettre en place un groupe de coopération sanitaire public-privé est également reconnue. Mais la bataille n'est pas gagnée pour autant : restent à venir l'approbation par l'ARH de la délibération du conseil d'administration et l'examen final du dossier par la Commission nationale de validation.

Madame la ministre, pouvez-vous me confirmer le soutien et l'engagement du Gouvernement sur cette nouvelle mouture du dossier ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.  - Je suis très heureuse de commencer avec vous, madame Payet, cette première séance de question.

Mme Anne-Marie Payet.  - C'est réciproque !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - La construction du pôle de santé sur le site du Grand Pourpier a été initiée en 2004 par la signature d'un accord-cadre entre les établissements de santé publics et privés et l'ARH, qui se sont engagés à construire une entité hospitalière publique et privée sur un site unique. L'apparition du chikungunya n'a fait que souligner la pertinence du projet.

Depuis 2007, plusieurs groupes de travail techniques ont été mis en place par l'ARH. Un comité de pilotage et un comité de suivi assurent la direction et le bon déroulement du projet. La clinique Jeanne d'Arc a réaffirmé sa volonté de coopérer avec le centre hospitalier Gabriel Martin, mais elle n'est malheureusement pas en mesure aujourd'hui d'engager la délocalisation de sa maternité. J'ai donc souhaité qu'un projet de coopération actualisé soit élaboré entre ces deux établissements dans le cadre des possibilités ouvertes par la loi « Hôpital patients, santé et territoires ».

L'ARH a mis en place une mission, conduite par un professionnel expérimenté, qui travaille depuis mars. J'en attends un projet médical partagé.

Le site du Grand Pourpier est déjà le point d'ancrage de la santé mentale. Dès lors que le centre Gabriel Martin y sera délocalisé, les activités médicales existantes seront maintenues et une mutualisation deviendra possible. Les financements sont déjà réservés pour ce projet dont le coût est estimé à 128 millions. Près de 71 millions ont déjà été attribués, qui représentent plus de 50 % de l'investissement total, soit un taux de subvention plus élevé que de coutume. Il a de surcroît été convenu que l'ARH demanderait un complément de financement sur la deuxième tranche du plan Hôpital, au premier semestre 2012. Vous connaissez mon attachement à la Réunion : soyez assurée que je suivrai avec soin ce dossier. Un membre de mon cabinet a reçu le collectif de défense de l'Hôpital Ouest. A chaque question posée, il sera répondu avec soin. Tout sera mis en oeuvre pour que cette structure hospitalière se réalise dans les meilleures conditions et vienne améliorer durablement la qualité de l'offre sur le territoire de la Réunion.

Mme Anne-Marie Payet.  - Je vous remercie, madame la ministre, de cette réponse très positive. J'espère que l'on trouvera une solution en ce qui concerne la délocalisation de la maternité. Vous avez, avec le Plan santé outre-mer, dit votre volonté de tenir compte des spécificités de l'île pour lui apporter une qualité de soins optimale. Car la région reste sous-médicalisée -1 119 personnels soignants pour 100 000 habitants contre 1 555 en métropole. Ce retard peut être comblé par l'augmentation du numerus clausus, que je vous remercie d'avoir décidée. Quant au retard sur la partie ouest, il y sera, si je vous en crois, porté remède.

Incidence des ultraviolets sur la santé

Mme Catherine Procaccia.  - A l'heure où les Français rentrent de vacances et aimeraient prolonger leur bronzage, et alors que de nombreux articles sont récemment parus dans la presse, se pose la question des centres de bronzage aux ultraviolets. Nous savons tous que le bronzage favorise autant que la cigarette le développement de cancers. Mais jusqu'à présent, on ne considérait le bronzage artificiel que comme « probablement cancérogène ». Or, un groupe de vingt experts issus de neuf pays, vient de classer les ultraviolets artificiels dans la catégorie « cancer avéré ». Une méta-analyse a conclu que l'exposition avant l'âge de 30 ans accroît de 75 % le risque de mélanome. Il est également souligné que l'utilisation d'appareils de bronzage émettant des UV est largement répandue, particulièrement chez les jeunes femmes, ainsi qu'en témoigne une étude parue dans The Lancet Oncology.

Les dermatologues souscrivent à ces conclusions. Le vice-président du Syndicat national des dermatologues vénéréologues rappelle que cela fait douze ans qu'ils sonnent l'alerte. Plus on s'expose jeune et de façon répétée, plus on entame son capital-soleil, et plus le risque augmente. D'après les conclusions du rapport, il ne faudrait pas dépasser trois séances par an.

Les professionnels du bronzage ne sont pas surpris par cette étude. La présidente de la Confédération nationale de l'esthétique-parfumerie, qui regroupe les six syndicats de la branche, explique que, depuis 1992, les rayonnements solaires sont jugés cancérogènes. Il est donc normal que les UV artificiels s'alignent.

Elle précise que, même si l'exposition peut être salutaire pour le moral et l'assimilation de la vitamine D, donc pour les os, le bronzage artificiel est à consommer avec modération.

Depuis le début des années 2000, bon nombre de centres de bronzage artificiel, surfant sur la vague du bien-être, se sont développés. Tous ne respectent pas la réglementation. Les utilisateurs devraient exiger un document prouvant que le personnel a été formé et être informés que les UV artificiels restent fortement déconseillés aux personnes sujettes aux allergies, aux consommateurs d'anxiolytiques et aux peaux trop blanches. Certes, les cabines sont interdites aux mineurs, mais il n'est pas certain que les contrôles soient effectifs. Et en tout état de cause, il suffit de deux clics sur internet pour acheter un solarium dont rien ne garantit au reste qu'il soit aux normes.

Quelles mesures entendez-vous prendre, madame la ministre, pour appeler à la plus grande prudence ? Envisagez-vous de mieux encadrer cette pratique pour que les consommateurs agissent en toute connaissance de cause et de prévoir l'obligation d'une information sur la dangerosité de ces rayons dans les annonces publicitaires ? Entendez-vous, en somme, renforcer la réglementation française pour la rendre plus protectrice ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.  - La question que vous posez, madame la sénatrice, est loin d'être futile. C'est une question de santé publique. L'OMS a reconnu le caractère cancérigène des UV artificiels. L'analyse de l'ensemble de la littérature scientifique fait en effet ressortir qu'une exposition avant 30 ans augmente de 75 % le risque de mélanome. Je suis très attentive à ce problème et c'est pourquoi j'ai demandé que les mesures de prévention existantes déjà soient réexaminées et, si nécessaire, renforcées.

En matière de réglementation, la France est en avance par rapport à certains de ses voisins. La vente et la mise à disposition du public d'appareils de bronzage utilisant des rayonnements ultraviolets sont réglementées depuis plus de dix ans. Cette réglementation impose notamment la présence d'un personnel qualifié dans les établissements mettant des appareils de bronzage à disposition du public et l'information des utilisateurs sur les risques liés à une exposition aux rayonnements ultraviolets. Elle prévoit en outre la déclaration des installations auprès de la préfecture du département, ainsi qu'un contrôle technique régulier des appareils par un organisme agréé. Enfin, elle interdit l'utilisation des installations de bronzage par les mineurs.

J'ai demandé à mes services de réaliser une évaluation approfondie de son application -car vous savez comme moi que les prescriptions ne sont efficaces que si elles sont appliquées- afin de proposer à bon escient, le cas échéant, un renforcement de la réglementation actuelle.

La récente loi Hôpital facilitera grandement les choses, puisque son article 61 a prévu à la fois le renforcement des contrôles pour les activités à visée esthétique et des sanctions en cas de non-application.

Dès juillet dernier, j'ai demandé â l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé de renforcer la communication sur les risques des ultraviolets artificiels, comme il le fait déjà pour les risques solaires. Pour une communication efficace, cet institut va engager une étude sur les connaissances, la perception et le comportement des utilisateurs.

Par ailleurs, l'Institut national du cancer sera chargé, sur la base d'une expertise de 2005 de l'Institut national de veille sanitaire, de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail et de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, de proposer les recommandations nécessaires pour l'élaboration de nouveaux messages sanitaires.

Vous voyez, madame la sénatrice, que je prends l'affaire très au sérieux.

Mme Catherine Procaccia.  - Je n'en doute pas et souhaite simplement que la campagne annoncée soit aussi efficace que celle sur l'exposition aux rayons solaires. Car si nous autres, gens au nord de la Loire, ne sommes pas trop exposés aux rayons du soleil, nous ne manquons pas, en revanche, de cabines de bronzage. Je ne les dédaignais pas moi-même, jusqu'il y a quelques années, pour préparer ou entretenir mon bronzage. Je n'y ai jamais vu la moindre affichette, ni n'ai reçu aucune mise en garde de la part des personnels, qui me semblent plutôt préposés à la seule distribution de jetons ou à la vente de cartes de fidélité -offre qui, soit dit en passant, prouve que l'on n'incite guère à la modération.

J'aimerais donc qu'on examine de plus près les pratiques commerciales qui incitent les usagers à faire toujours davantage de séances.

La séance est suspendue à midi.

présidence de M. Jean-Claude Gaudin,vice-président

La séance reprend à 15 heures 5.