Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle des questions orales.

Difficultés d'accès au crédit des collectivités locales

M. Michel Teston.  - Les collectivités territoriales peinent à accéder au crédit, ce qu'atteste un rapport de l'Association des maires de France du 7 octobre 2011. Résultat, pour certaines, l'investissement est devenu impossible. En outre, l'application des règles prudentielles de Bâle III risque d'accroître ces difficultés, incitant les banques à se détourner de ce marché.

Certes le Premier ministre a annoncé une enveloppe de 3 milliards, voire 5 milliards si nécessaire. Cependant, malgré cette annonce, la Caisse des dépôts et consignations a rejeté des demandes de collectivités. Et la nouvelle activité de prêts aux collectivités locales par la Banque postale ne devrait pas voir le jour avant la fin du premier trimestre 2012, comme MM. Wahl et Bailly l'ont indiqué lors de leur audition par la commission de l'économie.

Quant au projet de création d'une agence pour les collectivités territoriales, il est au point mort, faute de soutien des pouvoirs publics. Que compte faire le Gouvernement ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. le ministre de l'économie. Les effets de Bâle III sont encore difficiles à mesurer, d'autant que certaines modalités d'application ne sont pas encore déterminées, notamment pour la liquidité.

De surcroît, les difficultés actuelles s'expliquent par des tensions conjoncturelles dues à la situation de Dexia. D'où l'enveloppe de 3 milliards, qui pourra être portée à 5 milliards, et, à plus long terme, la création d'un nouvel acteur autour de la Banque postale et de la Caisse des dépôts et consignations pour, à terme, équilibrer l'offre et la demande sur ce marché.

M. Michel Teston.  - L'enveloppe de 3 milliards est une bonne nouvelle. Pour autant, les conditions d'octroi du crédit sont si strictes que l'enveloppe pourrait ne pas être entièrement consommée : quant aux prêts de la Banque postale, selon ses dirigeants, auditionnés par la commission de l'économie, leur taux serait modulé en fonction de la solvabilité des collectivités territoriales. Attention à ne pas pénaliser les collectivités locales pauvres !

Enfin, pourquoi cette timidité envers l'excellente idée d'une agence publique de financement aux côtés des banques et du pôle public ? La garantie de l'État ne serait pas sollicitée. J'appelle le Gouvernement à préciser sa position sur ce point.

Filière aluminium en France

M. Thierry Repentin.  - Les deux dernières usines d'aluminium, une filière dont on sait l'importance pour notre balance commerciale, sont menacées par la fin de leur contrat en approvisionnement d'énergie. Celui de l'usine de Saint-Jean-de-Maurienne de Rio Tinto Alcan arrive à terme en 2013. Les négociations avec EDF sont difficiles.

Rio Tinto Alcan, qui s'était d'abord engagée dans une procédure contentieuse, privilégie désormais la négociation avec EDF. Cependant, aucune entreprise au monde, dans ce secteur, particulièrement électro-intensif, n'achète d'énergie au prix du marché. Le dossier doit avancer, sans quoi cet outil stratégique pour la France disparaîtra. Un avenir bien sombre pour la vallée de la Maurienne ! Voilà une occasion pour l'État actionnaire de mettre en oeuvre le discours de Tricastin et de passer de la parole aux actes !

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - L'Union européenne interdit désormais les contrats préférentiels dont bénéficiait l'usine emblématique de Saint-Jean-de-Maurienne. Le Gouvernement, mobilisé, s'emploie au renouvellement du contrat de fourniture en énergie en 2014 et les discussions sur la phase II du contrat Exeltium sont très avancées. Grâce au nucléaire, la France peut offrir des prix plus bas : les industries électro-intensives paient leur électricité 60 % moins cher -c'est un élément clef pour elles. Abandonner le nucléaire, ce serait mettre en péril 2 millions d'emplois. On ne peut pas, en même temps, vouloir sortir du nucléaire et offrir une énergie peu coûteuse aux industriels.

M. Thierry Repentin.  - Je n'avais pas l'intention de lancer ce matin un débat sur le nucléaire. Si des décisions ne sont pas prises avant la fin de l'année, si EDF ne fait pas un geste, Rio Tinto Alcan, multinationale pour laquelle cette activité ne représente pas 2 % du chiffre d'affaires, tirera un trait sur une industrie historique dans notre pays. Ce serait incompréhensible. Quel que soit notre choix sur l'énergie, dont nous débattrons le moment venu, le curseur doit être mis sur l'emploi industriel. Plus de mille emplois sont ici en jeu. Un gouvernement proactif doit faire bouger les choses !

Emprunts toxiques de Dexia

Mme Nathalie Goulet.  - J'avais déjà interrogé le Gouvernement, le 26 mai dernier, sur ce sujet. On est passé de l'insouciance à une prudence excessive, dommageable pour les collectivités territoriales. Vingt-deux millions d'emprunts toxiques en cours, 1 800 communes de moins de 10 000 habitants, voilà les conclusions du passionnant rapport de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale. Dans mon département de l'Orne, les contrats précisaient en grosses lettres que les collectivités ne couraient aucun risque, malgré des taux ô combien exotiques. Le Gouvernement va-t-il suivre les recommandations de l'Assemblée nationale et proposer une solution globale pour sortir ces 1 800 communes de cet imbroglio juridique et financier ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - Il est faux de dire qu'aucune suite n'a été donnée à votre question du 26 mai 2011 sur les emprunts structurés. Le Gouvernement a su réagir. Dès 2009, une charte de bonne conduite a été élaborée et la mission du médiateur du crédit, qui bénéficie désormais de l'appui de la Banque de France, a été prolongée.

S'agissant de Dexia, le plan de restructuration n'affecte pas la situation des collectivités territoriales. Ces dernières restent débitrices. La création d'une structure de défaisance ne fait pas l'objet d'un consensus : ce serait, le débat sur le projet de loi de finances pour 2012 l'a montré, donner une prime aux collectivités territoriales les moins vertueuses. Enfin, toutes les collectivités territoriales ne sont pas dans la même situation face aux prêts structurés.

Mme Nathalie Goulet.  - J'ai seulement précisé que j'avais déjà posé une question à ce sujet. Merci de cette réponse que je transmettrais aux collectivités territoriales. Quoi qu'il en soit, cette affaire est une excellente leçon pour l'État et les collectivités territoriales.

Situation de l'hôpital de Manosque

M. Claude Domeizel.  - Les élus s'inquiètent de la situation financière des hôpitaux, en particulier de l'hôpital de Manosque et celui de Digne-les-Bains, qui connaissent, avec la T2A, de graves difficultés. Que compte faire le Gouvernement ? En outre, le Premier ministre s'était engagé à prendre en compte la demande de création d'un service de réanimation à l'hôpital de Manosque, dont l'activité a crû de 25 %. Sera-t-elle examinée indépendamment de la situation financière ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - Comme dans le reste du pays, les hôpitaux de Digne-les-Bains et de Manosque voient leur situation s'améliorer. D'après un rapport de l'Igas de début 2011, l'activité dans le département ne justifie pas la création d'un deuxième service de réanimation dans les Alpes-Maritimes. Elle suffit à peine à occuper le service de Digne... Si la conférence territoriale de santé souhaite un transfert de la réanimation de Digne à Manosque, l'ARS étudiera ce projet. Toutefois, celui-ci pourrait compromettre le retour à l'équilibre financier de l'hôpital de Manosque.

M. Claude Domeizel.  - Manifestement, nous ne disposons pas des mêmes informations. Je me réjouis de ces perspectives rassurantes. S'agissant de la réanimation, la réponse du Gouvernement, si elle ne me satisfait pas, a le mérite d'être claire : un service de réanimation, pas deux. J'en ferai part aux intéressés...

Offre publique de soins dans les Hauts-de-Seine

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Les projets de restructuration de l'ARS mettent en péril l'accès aux soins dans les Hauts-de-Seine. Un regroupement de l'hôpital Antoine-Béclère à Clamart, qui dispose d'un service de fécondation in vitro et de pneumologie, avec les hôpitaux Bicêtre et Paul Brousse, tous deux situés dans le Val-de-Marne, laissera 500 000 personnes face à des inégalités accrues. Tout cela signe votre projet de privatisation galopante de la santé, à l'oeuvre depuis la loi HPST. De Louis Mourier à Colombes et Max-Fouretier à Nanterre, en passant par Beaujon, à Clichy, intégré dans le groupe 3BLM, je pourrais multiplier les exemples. Stoppez donc ces projets pour garantir à tous un accès de qualité à la santé.

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - Je vous prie d'excuser l'absence du ministre de la santé. L'ARS des Hauts-de-Seine mène un projet de restructuration pour améliorer le pilotage de l'APHP et assurer l'accès aux soins tout en les articulant avec la recherche et l'enseignement. Concernant Clamart, un regroupement est à l'étude, conformément aux souhaits du service de pneumologie. Tout en maintenant une consultation à Béclère, cela permettrait une remise aux normes et l'ouverture de lits sans remettre en cause le volume d'activité aux urgences.

Le dialogue entre l'hôpital Louis-Mourier à Colombes et l'hôpital Max-Fourestier à Nanterre, encouragé par l'ARS, améliorera le service rendu aux usagers, en permettant à ces deux hôpitaux, déjà liés par un dialogue quotidien, d'exister dans une offre de soins de plus en plus concurrentielle.

Enfin, l'hôpital Beaujon est de trop petite taille et la multiplicité de structures de petite taille n'est pas propice à la sécurité. La création de pôles de compétence et de mutualisation des fonctions support -la restauration et la blanchisserie par exemple-, qui ne signifie en rien le regroupement sur un même site, autorisent des projets médicaux durables et pérennes.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Je rappelle l'objectif affiché par la loi HPST : réduire les inégalités de soins et augmenter l'efficience -ce qui signifie supprimer des postes ! Rendez-vous compte : une ville-préfecture comme Nanterre, de 90 000 habitants, qui accueille chaque jour 95 000 travailleurs et 30 000 étudiants, pourrait se voir priver de son hôpital de proximité ! Heureusement, un peu partout, se forment des comités de défense et la mobilisation s'organise contre des restructurations inacceptables. Écoutez donc leurs propositions alternatives !

Statuts d'auto-entrepreneur et d'artisan

M. Jacques Mézard.  - Le statut d'auto-entrepreneur, créé par la LME du 4 août 2008, visait à encourager l'entreprenariat individuel par une série de facilités sur lesquelles est revenue, en partie, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Pour autant, cela n'a pas suffi : les artisans, touchés par la rigueur se plaignent d'une distorsion de concurrence, particulièrement dans le secteur du bâtiment, déjà touché par le relèvement de la TVA à 7 %. Dans mon département du Cantal, ces auto-entrepreneurs sont au nombre de mille, et cela va croissant : rien qu'en septembre quatorze auto-entrepreneurs se sont inscrits au répertoire des métiers, contre dix nouveaux artisans. Il s'agit le plus souvent de salariés qui quittent leur entreprise pour bénéficier de ces conditions plus favorables ! Quelles réponses le Gouvernement compte-t-il apporter sur ce dossier ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - Veuillez excuser l'absence de M. Lefèvre. Pour répondre aux demandes des artisans, le régime de l'auto-entrepreneur a été aménagé : contribution de 0,1 à 0,3 % selon leur chiffre d'affaires pour la formation, déclaration systématique du chiffre d'affaires, inscription obligatoire au registre entre autres. D'autres textes règlementaires destinés à assurer la transparence vont être mis en consultation sur ce sujet qui a fait l'objet d'un rapport de Pierre Morel-A-l'Huissier.

Ce régime connaît un vrai succès -celui de la liberté d'entreprendre : un milliard de chiffre d'affaires déclaré en 2009, 3,2 milliards en 2010 et 2 milliards au premier semestre 2011. Pour le Gouvernement, il a atteint sa maturité.

M. Jacques Mézard.  - Peut-être mais pas dans des conditions saines ! Ce régime doit constituer un tremplin vers le régime de droit commun dans l'artisanat, non permettre une concurrence déloyale ! Des aménagements sont encore à prévoir.

Échangeur sur l'A26

M. Antoine Lefèvre.  - L'A26 relie Calais à Troyes en traversant l'Aisne. Les élus des communes sises entre les sorties 13 et 14 souhaitent la construction d'un échangeur à proximité de Saint-Erme-Outre-et-Ramecourt, avec la D18. Cela faciliterait le trafic dans l'Aisne et le covoiturage, pourvu que l'on aménage des parkings. Je n'ignore pas le coût de cet investissement estimé à 10 millions. Néanmoins, quelles sont les perspectives pour ce projet essentiel à deux groupements de communes rurales aux moyens limités ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Vous avez raison de souligner l'importance du réseau routier national pour l'aménagement du territoire. Une première étude en 1997 avait conclu à un coût trop important. Le projet a donc été abandonné, par sagesse. Même observation concernant les nouvelles études de trafic de juin 2007 : le bilan est négatif à moins que les groupements de communes ne participent à l'investissement. M. Mariani a demandé à la Sanef de transmettre les études aux collectivités concernées : leur apport conditionne la suite du projet.

M. Antoine Lefèvre.  - Merci de cette réponse qui me déçoit un peu... Les collectivités territoriales étudieront précisément les études de la Sanef.

Remise en service de matériel ferroviaire

M. Thierry Foucaud.  - La situation à Sotteville-lès-Rouen est particulièrement choquante : depuis plus de trois ans, 361 locomotives, dont 51 modèles récents, sont à l'arrêt. C'est de la gabegie.

En outre, 320 wagons restent inutilisés. Tous ces matériels se dégradent ; ils sont l'objet d'actes de vandalisme. C'est pourtant la propriété de la Nation, l'argent des usagers et le travail des salariés que l'on gaspille ainsi. Affectons-les plutôt là où on en a besoin. Faut-il y voir un hasard ? Une bâche dissimule désormais locomotives et wagons aux yeux des automobilistes...

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Je ne répondrai pas à votre dernière remarque. Cette situation est la conséquence immédiate de la réduction du fret ferroviaire. C'est un fait -on peut le regretter, pas le contester. En juillet dernier, la SNCF a engagé une société pour surveiller le site 7 jours sur 7, 24 heures sur 24. Le réemploi est privilégié pour 52 locomotives, tandis que 48 seront affectées à d'autres activités et quitteront le site avant la fin 2011. Quant aux autres, elles doivent faire l'objet d'un désamiantage. Ce chantier a déjà été confié à une entreprise. Enfin, le Gouvernement a demandé la SNCF un bilan précis sur l'ensemble de ces opérations.

M. Thierry Foucaud.  - Pour lutter contre la diminution du fret, appliquons plutôt les objectifs du Grenelle : nous avons largement de quoi donner du travail aux salariés de la SNCF et faire rouler nos matériels de fret. Merci de ce début de réponse.

Métro transmanche

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Lancées le 15 septembre 2011, les assises du ferroviaire ont abordé le ferroviaire européen. Une infrastructure peu coûteuse reliant Calais-Fréthun à Ashford mettrait la côte d'Opale à 30 minutes du Kent -un bassin d'emplois qui recrute. L'investissement, qui ne serait pas trop lourd, redynamiserait le nord de la France. Le tunnel sous la Manche n'est utilisé que pour la moitié de ses capacités. La mise en place pourrait intervenir avant les Jeux olympiques de Londres.

Quel calendrier prévisionnel pour ce projet transfrontalier ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Veuillez excuser M. Mariani. Ce projet présente un potentiel important pour développer l'emploi. Des Eurostar seraient disponibles. Le travail est encore en cours et je veux vous apporter le soutien du Gouvernement en la matière. A la région Nord-Pas-de-Calais de négocier -mais elle n'a pas d'homologue britannique. M. Mariani prépare, pour contourner cette difficulté, un projet de loi permettant des groupements européens de coopération territoriale. Il faut aussi tenir compte des problèmes de sécurité et de contrôles d'identité car la Grande-Bretagne n'est pas membre de l'espace Schengen : le ministère de l'intérieur a créé un groupe de travail afin d'y réfléchir. Enfin, Eurotunnel est prêt à diminuer ses tarifs de péage pour apporter une aide au démarrage.

Les Jeux olympiques de Londres ? L'objectif est très ambitieux, mais le Gouvernement veut encourager à mobiliser les acteurs et vous apporte tout son soutien.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Merci de ces précisions et de ces avancées. En période de crise, le Gouvernement doit être réactif et promouvoir ce projet de bon sens. Je vous suggère une réunion des bonnes volontés pour avancer.

Mesures agro-environnementales territorialisées

M. Michel Doublet.  - Au terme de cinq ans, de 2007 à 2012, les contrats « mesures agro-environnementales territorialisées » (MAE-T) concernent nos exploitations en Charente-Maritime, pour 26 290 hectares, dont 17 000 en contrats 2 et 3. L'ensemble des marais charentais fait l'objet de démarches Natura 2000 et l'activité agricole contribue à leur entretien.

Le dispositif connaît toutefois des limites : retards de paiement, lourdeurs administratives, difficultés d'instruction des dossiers liées au logiciel Osiris.

Le financement est préoccupant, dans un contexte de sécheresse et à la suite de Xynthia ; la poursuite de ces contrats MAE-T conditionne la poursuite de l'élevage pour nombre d'exploitants. La durée des contrats sera-t-elle réduite ? Les acteurs de la Charente-Maritime sont mobilisés pour obtenir la pérennité de ce dispositif ; il en va d'enjeux environnementaux et socio-économiques. Que compte faire le Gouvernement ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Veuillez excuser M. Le Maire. Le Gouvernement partage votre intérêt pour les MAE-T. Les mesures sont ciblées sur la biodiversité et la qualité de l'eau. En 2011, 120 millions ont été engagés ; cet effort se poursuivra en 2012. Plus de 18 000 exploitants sont concernés, pour 341 millions. Les financements prennent en compte la totalité des demandes. Le paiement des dossiers sera accéléré ; au plus tard le 31 mars 2012, quand il y a eu changement, au 31 décembre dans les autres cas.

Il ne faut pas rompre la dynamique des MAE-T : les contrats pourront être prolongés.

M. Michel Doublet.  - Je prends acte de ces engagements, qui ne m'étonnent pas : chaque fois que j'interroge le Gouvernement, il me répond que l'affaire est en cours de règlement. Je fais confiance à M. Le Maire.

Hébergement d'urgence en Île-de-France

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - L'hébergement d'urgence est notoirement insuffisant : 62 % des demandes du « 115 » ne donnent pas lieu à l'octroi d'un logement, faute de places. Le projet de loi de finances pour 2012 prévoit une baisse des crédits de 14,4 %.

En Île-de-France et à Paris, la situation est dramatique -on est loin de répondre aux exigences du Dalo et de l'accueil inconditionnel des migrants. A Paris, 28,9 % des personnes hébergées ont moins de 30 ans ; 16 % des jeunes vivent sous le seuil de pauvreté. Or on prévoit de supprimer des places d'hôtel. Il manque 13 000 places en Île-de-France. La ville de Paris tente de pallier les carences de l'État. Ce dernier va-t-il enfin assumer ses responsabilités, au-delà d'une gestion saisonnière du problème ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Nous avons évoqué le sujet lors de l'examen du budget. Je vous ferai les mêmes réponses. Des restrictions budgétaires ? Des réductions de places ? Il n'y en a aucune ni en Île-de-France, ni ailleurs ! C'est l'inverse : 116 000 places d'hébergement, soit 30 % d'augmentation depuis 2007 ; en Île-de-France, c'est 65 % de places en plus !

Une remise en cause de l'accueil inconditionnel ? C'est faux. Le Gouvernement a toujours rappelé à l'ordre les préfectures dans les deux départements concernés. Il manquerait 13 000 places en Île-de-France ? Ce chiffre est-il fondé ? C'est l'addition de toutes les demandes des associations...

Le budget du Samu social de Paris a augmenté de 100 % par rapport à 2007 et augmente encore cette année. Enfin, l'hébergement n'est pas une fin en soi ; l'hôtel n'est pas une solution adaptée. Nous louons 12 000 chambres en Île-de-France ; la durée de séjour moyenne est de dix-huit mois, sans accompagnement social. Nous voulons remplacer ces chambres par des logements. Le Gouvernement reste totalement mobilisé pour sortir de la rue ceux qui y vivent encore.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - On ne va pas pouvoir s'entendre, monsieur le ministre ! Heureusement qu'il y a des associations -sans elles, ces personnes mourraient. Faut-il citer cette femme qui a accouché d'un enfant mort-né sur le trottoir à Paris ? Or, les subventions aux associations baissent !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - C'est faux !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Les chiffres ont augmenté depuis 2007, certes, mais le nombre de personnes à la rue encore plus ! L'hôtel n'est pas une solution, j'en suis d'accord, mais en attendant des logements, il faut faire face aux besoins et vous diminuez les moyens !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - C'est faux !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - L'État n'assume pas ses responsabilités, je le regrette.

Emplois de la vente à distance

M. Éric Bocquet.  - Le secteur de la vente à distance pèse lourd dans le Nord et surtout à Lille : la moitié des emplois du secteur ont été détruits depuis dix ans. Le chiffre d'affaires des entreprises, qui sont connues, est encore de 11 millions, mais le chômage croît : 500 suppressions annoncées début 2011. Les salariés paient les erreurs stratégiques de leurs dirigeants, qui n'ont pas su anticiper le tournant du numérique. Je rappelle que le salaire d'une travailleuse est de 1 022 euros après 30 ans d'ancienneté ! Comment l'État va-t-il aider les salariés, légitimement inquiets, à préserver leur emploi ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Veuillez excuser M. Bertrand, retenu par la signature d'une charte avec le secteur de la restauration rapide qui doit créer 9 000 emplois d'ici 2014.

Les entreprises de vente à distance, qui relèvent de grands groupes, n'ont pas sollicité le ministère pour du chômage partiel. Le Gouvernement reste vigilant. Un accord-cadre national a été signé en juin 2009 pour accompagner 8 325 salariés vers la formation ; 200 entreprises y ont adhéré. Il vise à sécuriser les parcours professionnels. L'État y consacre 5 millions d'euros. L'accord est géré par la direction régionale du Nord-Pas-de-Calais.

M. Éric Bocquet.  - Au-delà de l'urgence, dans le Nord, un département malheureusement plus frappé par le chômage, les salariés veulent voir ce secteur préservé. A l'heure où l'on vante beaucoup la réindustrialisation, il faut investir dans l'emploi, la formation et l'amélioration de l'outil.

Centre hospitalier d'Évry

M. Michel Berson.  - Le nouveau centre hospitalier sud-francilien doit ouvrir le 23 janvier prochain. Or son avenir est très incertain. Construit par le groupe Eiffage sur la base du PPP -contrat inapproprié pour un hôpital-, il va devoir faire face, pendant 30 ans, à un loyer exorbitant : 42 millions en 2012, financé à 50 % seulement par l'ARS, alors que les comptes de l'hôpital sont dans le rouge !

Eiffage réclame 115 millions de préjudice et 60 millions de loyer supplémentaire.

A peine né, l'hôpital n'est pas viable. Au nom de quoi devrait-il assumer les conséquences financières d'un bail qui ne profite qu'à Eiffage ? La chambre régionale des comptes estime que la maîtrise d'ouvrage publique aurait été préférable. Il faut sortir du PPP, passer par la Caisse des dépôts et consignations. Cela coûtera moins cher que 30 ans de contentieux ! Nous devons défendre l'intérêt général, pas celui d'un groupe privé. La négociation doit se faire à l'échelon du ministère. Avez-vous la volonté politique de l'engager ?

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.  - Veuillez excuser M. Xavier Bertrand. Ce nouveau centre hospitalier joue un rôle majeur : 1 000 lits, dont 700 en MCO. Son ouverture, le 23 janvier, se fera en toute sécurité. Des difficultés avaient été identifiées, comme pour toute fin de chantier. Les réserves ont été levées. L'agrément devrait être donné ; la mise en service sera échelonnée sur trois mois.

Xavier Bertrand se soucie du bon usage des ressources publiques, monsieur le sénateur. L'IGF a rendu son rapport, qui ne confirme pas la position de la chambre régionale des comptes.

Le coût des travaux a été identique à celui d'une maîtrise d'ouvrage traditionnelle, si l'ont veut tenir compte de tous les coûts liés à l'emprunt. Idem pour les loyers : ils intègrent les frais de maintenance et de gros entretien. La construction a été rapide : cinq ans seulement. En outre, le bâtiment est certifié HQE, ce qui autorise de nombreux gains en consommation d'énergie. Les loyers sont de facto intégrés dans le coût du bail emphytéotique mais ne l'ont pas été dans l'estimation de maîtrise d'ouvrage. Enfin, les prestations de très bonne qualité nous garantissent que le bâtiment sera en très bon état lorsqu'il reviendra dans le patrimoine public.

M. Michel Berson.  - Votre réponse est décevante et surprenante. Le Gouvernement recule. Le ministre avait reconnu que le problème nécessitait des mesures urgentes et vous me dites que tout va bien !

Je maintiens que cet établissement n'est pas viable : il faut renégocier au moins les conditions de maintenance et de loyers. L'établissement ne peut pas supporter les charges que lui impose le PPP. Votre réponse ne peut qu'inquiéter les personnels, les élus, les usagers. Nous n'en resterons pas là !

Syndicats mixtes et aménagement touristique

M. Rachel Mazuir.  - Aux termes de l'article L. 342-1-1 du code du tourisme, un syndicat mixte ne pourrait pas être compétent en matière d'aménagement touristique si l'un de ses membres est un groupement de communes. Or cette situation est très fréquente en zone de montagne ! Si un tel syndicat peut organiser des remontées mécaniques, pourquoi pas des opérations plus vastes ?

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.  - L'article L.342-1-1 du code du tourisme est clair : un syndicat mixte comprenant un groupement de collectivités perd sa compétence. Cette situation ne doit pas entraîner la multiplication de structures de gestion diverses. Dès lors que l'EPCI exerce la compétence en matière d'aménagement, le Gouvernement n'est pas opposé à une réflexion sur une évolution de la législation en matière touristique dans le cadre de la récente loi sur les collectivités territoriales.

M. Rachel Mazuir.  - J'entends qu'une ouverture se profile. Je m'en réjouis car il faut mettre fin à cette ambigüité.

Achat en ligne par les collectivités territoriales

M. Hervé Maurey.  - Les réponses du Gouvernement viennent bien lentement : j'ai déjà posé cette question par écrit à deux reprises ! L'absence de réponse est une forme de mépris pour le Parlement et une entrave à son pouvoir de contrôle.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Hervé Maurey.  - Quand la réponse ne se contente pas de paraphraser la question...

Le e-commerce se développe mais les collectivités sont privées de cette facilité car très peu de sites acceptent les mandats administratifs. Les collectivités, notamment rurales, ont pourtant une forte appétence pour l'achat en ligne. Quelles mesures compte proposer le Gouvernement pour régler ce problème simple mais important ?

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.  - Veuillez excuser Mme Pécresse. L'instruction du 24 janvier 2005 a élargi les domaines dans lesquels sont autorisées les dépenses publiques sur internet, et encadré cette pratique. Le paiement des dépenses des organismes publics locaux peut se faire sans virement, en deçà de 750 euros. Le code des marchés publics s'impose. Aux termes de l'article L.1617-11 du code général des collectivités territoriales, le seuil est de 1 500 euros pour les achats de fonctionnement, fixé par l'acte constitutif de la régie. La réglementation en vigueur vous donne satisfaction, monsieur le sénateur.

M. Hervé Maurey.  - Merci de ces précisions. Si j'ai posé la question, c'est que la situation n'est pas satisfaisante. Le Gouvernement pourrait au moins engager une réflexion avec l'AMF et les représentants de l'e-commerce.

Fouilles corporelles intégrales abusives

Mme Maryvonne Blondin.  - Au centre de détention de Salons-de-Provence, un détenu sexagénaire était systématiquement soumis à fouille au corps à l'issue de chaque visite au parloir. Il a obtenu gain de cause de la part du tribunal administratif de Marseille. Ces fouilles sont dégradantes et leur emploi systématique est interdit par l'article 57 de la loi pénitentiaire de 2009 et divers textes internationaux.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

Mme Maryvonne Blondin.  - Or le représentant du ministère de la justice devant le tribunal administratif de Marseille les estime justifiées. Un tel déni de la loi est dramatique de la part de la Chancellerie ! Faut-il rappeler la décision du Conseil d'État du 9 septembre 2011 ? Certains surveillants dénoncent le caractère dégradant et souvent inutile des fouilles corporelles intégrales. L'Observatoire international des prisons est intervenu à plusieurs reprises. Quelles sont les intentions du Gouvernement sur ces pratiques ?

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.  - Veuillez excuser M. Mercier. La recherche d'un équilibre entre le respect de la dignité des détenus et la sécurité est un objectif majeur de l'administration pénitentiaire. L'évolution normative récente tient compte de la jurisprudence de la CEDH et du Conseil d'État. L'article 57 de la loi pénitentiaire et le décret du 23 décembre 2010 énoncent la nécessité d'adapter la fréquence de la fouille à la personne et aux nécessités de la sécurité.

Une circulaire, diffusée le 14 avril, rappelle les principes de nécessité et de proportionnalité. Les chefs d'établissement veillent à sa mise en oeuvre et à l'actualisation des pratiques. La mise à jour des règlements intérieurs est en cours. L'administration vérifie que les dispositions prises au plan local respectent le nouveau cadre juridique.

Mme Maryvonne Blondin.  - Le droit évolue, certes, mais des règlements intérieurs prévoient encore une fouille systématique au retour du parloir ! Le 27 avril 2010, M. Mattei a affirmé devant le comité contre la torture de l'ONU que la systématicité des fouilles est désormais proscrite, ce qui ne se traduit pas toujours dans la réalité. Les conditions de détention, déjà difficiles, s'aggravent, comme le souligne le récent rapport de l'Observatoire international des prisons.

Les fouilles systématiques sont une cause de la recrudescence des suicides : 97 suicides pour les dix premiers mois de 2011 !

Bilan de la législation sur les violences faites aux femmes

M. Roland Courteau.  - Deux textes ont été adoptés sur les violences faites aux femmes : le premier est la loi du 4 avril 2006, que vous avez présentée au Sénat ; le deuxième est la loi du 9 juillet 2010, issue de ma proposition de loi. Quel bilan en tirez-vous ? Qu'en est-il des rapports prévus à l'article 13 de la loi de 2006 et aux articles 13, 21 et 29 de la loi de 2010 ? Quid de l'accès des victimes au logement social ? Des dispositions prévues sur les séances d'information à l'école ?

Une meilleure application de ces dispositions, encore trop insuffisamment connues, hélas, améliorera la protection des femmes. Peu d'ordonnances de protection sont prises, et dans un délai trop long ; c'est très fâcheux car, dans ces situations, il y a urgence et il faut être réactif.

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.  - Les chiffres sont terrifiants : une femme décède tous les deux jours et demi sous les coups de son conjoint. Une femme sur dix -soit 3 millions de femmes- est victime de violences au cours de sa vie. Face à cet enjeu majeur, l'application des deux lois que vous avez citées a été engagée : 600 ordonnances de protection ont été prises depuis 2010. Le Gouvernement a lancé un troisième plan interministériel doté de 31,6 millions, soit 30 % de moyens supplémentaires. Nous agissons sur la formation des professionnels, l'information et la sensibilisation dans les écoles. La lutte contre ce fléau passe aussi par la sensibilisation ; d'où la campagne du 25 novembre dernier...

M. Roland Courteau.  - ...prévue par la loi !

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État.  - ... incitant les femmes à oser en parler en appelant le 3919. Je remercie les élus qui ont bien voulu porter le ruban blanc, symbole de cette cause depuis 1991.

La violence faite aux femmes, c'est aussi la prostitution, que Mme Bachelot propose d'abolir. C'est une atteinte à la liberté et à la dignité de la femme.

M. Roland Courteau.  - Juste !

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État.  - Nous oeuvrons pour une société respectant hommes et femmes dans leur égale dignité. A cet égard, bien du chemin reste à accomplir.

M. Roland Courteau.  - S'agissant de la prostitution, il faut aussi revoir la loi de 2003 sur le racolage passif et actif. Dans la plupart des cas, les prostituées sont victimes.

Qu'en est-il des rapports demandés par les deux lois de 2006 et 2010 ? Je ne lâcherai jamais sur ce dossier. Trop de souffrances sont à déplorer. Quid du délai des ordonnances de protection ? Il faut le réduire. Ne pouvez-vous pas en parler au ministre de la justice ? Peut-être le Sénat adoptera-t-il bientôt une proposition de résolution à ce sujet.

La séance est suspendue à 11 h 40.

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présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente

La séance reprend à 14h 30.