Consommation (Deuxième lecture)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale, relatif à la consommation.

Discussion générale

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation .  - J'introduis, pour la quatrième fois, la discussion générale sur ce projet de loi relatif à la consommation. C'est la huitième fois que ce texte, si l'on tient compte des réunions de commission, sera discuté, critiqué parfois, enrichi souvent... Au cours de cette longue procédure parlementaire, je m'en tiendrai à l'essentiel : les améliorations concrètes, tangibles, palpables qu'il apportera au quotidien des Français, la suppression de tous ces petits péages qui leur empoisonnaient la vie.

En ce début d'année, qui coïncide souvent, pour nos compatriotes, avec la réception de lettres les appelant à renouveler un contrat d'assurance ou un contrat bancaire, le changement sera immédiat : ce texte instaure la possibilité d'une résiliation infra-annuelle du contrat au terme de la première année d'assurance ; un grand acquis qui est plébiscité par huit Français sur dix. En favorisant la concurrence, cette mesure devrait faire baisser les prix des assurances habitation et automobile, mettant fin à une inflation constante depuis quinze ans.

Nous sommes souvent assurés plusieurs fois pour la même chose : c'en sera fini.

Les Français se plaignent de l'opacité de leurs relations avec leurs assureurs. Ce n'est pas toujours à raison, parce qu'ils ignorent la loi. Mais ils veulent y voir plus clair dans leurs frais bancaires : les opérations de transfert seront désormais gratuites. La portabilité du numéro de compte va être étudiée, à l'initiative du député Laurent Grandguillaume.

Les Français, en souscrivant un prêt immobilier, ne négocient guère l'assurance emprunteur, qui coûte jusqu'à un tiers du coût total du crédit. Nous ferons en sorte que le taux baisse de 0,1 à 0,2 % dans une hypothèse raisonnable, pour le gain de 12 000 euros pour un prêt de 300 000 sur vingt ans : ce n'est pas rien pour le pouvoir d'achat. En effet, une fenêtre de substitution sera ouverte pendant un an pour changer d'assurance, afin de faire jouer la concurrence.

Nous agissons donc sur les dépenses contraintes. Cela vaut pour l'optique. 40 millions de Français portent des lunettes, dont 18 millions de presbytes. Ces derniers renouvellent leurs lunettes en moyenne une fois tous les trois ans, les autres tous les cinq ans ; le coût moyen est de 470 euros, deux fois plus qu'en Allemagne ! M. Fauconnier fut l'un des premiers à souligner la nécessité de faire baisser les prix. Nous avons organisé et réglementé l'optique sur Internet. Le gain serait de 20 à 30 %, soit 1,3 milliard de pouvoir d'achat en plus pour les Français !

Cela ne nous a pas empêchés d'améliorer le parcours de soins. Demain, certains actes pourront sans difficulté être délégués aux opticiens. Cela déchargera les ophtalmologistes : il faut parfois jusqu'à 120 jours pour obtenir un rendez-vous dans certaines zones !

Le marché de certains dispositifs de santé a été libéralisé tout en étant très encadré, comme celui des tests de grossesse : cela aura aussi le mérite de garantir l'anonymat des acheteuses, qui hésitent à rentrer dans une officine.

UFC-Que Choisir ? estime que le prix diminuera de 30 à 40 %, mais ce n'était pas notre objectif premier.

Les frais de transfert des dossiers de permis de conduire seront supprimés, ce qui fera économiser 50 à 250 euros. Le permis coûte en moyenne 1 400 euros, autant que le revenu fiscal de référence moyen dans mon département ! Or, avoir le permis est souvent indispensable pour aller au travail. Nous devons réfléchir à l'adaptation de certains règlements qui feraient baisser les tarifs. D'ores et déjà, les frais pour restitution ou transfert de dossier seront proscrits.

Nous avons pensé aux publics vulnérables. Nous supprimons les frais pour refus de prélèvement dans les services dits essentiels : l'énergie, l'eau, la téléphonie grâce au groupe socialiste du Sénat. Certes, les ménages français sont moins endettés que les ménages anglo-saxons.

Les crédits normaux ne concourent qu'à 5 % de la consommation en France. Il n'était pas question de remettre en cause le crédit à la consommation, soutien de la demande, mais d'éviter que des ménages ne souscrivent le crédit de trop. D'où la création du registre national des crédits aux particuliers (RNCP), qui permettra au banquier de vérifier la solvabilité de l'emprunteur : le prêteur sera ainsi responsabilisé.

De même, les « points conseils budget » sont des signaux d'alerte qui empêcheront le surendettement.

Le Sénat a trouvé un bon équilibre sur ce dossier, que l'Assemblée nationale a respecté. Je salue, outre la contribution du groupe socialiste, celles de Mmes Dini, Létard et de M. César dont les apports ont été décisifs.

Il faut aussi combattre le « prêt-à-jeter », et promouvoir des modes de consommation plus durables. C'est chose faite, grâce au groupe écologiste et ici M. Labbé, même si les préoccupations écologistes sont désormais largement diffusés dans le monde politique français, ce dont il faut se féliciter. La durée de la garantie légale de conformité sera portée de 6 mois à 24 mois, et les fournisseurs devront informer les consommateurs sur la « réparabilité » des objets, un terme qui n'est pas très joli mais signifie que le consommateur devra être informé de la disponibilité des pièces détachées. En clair, plutôt que de racheter une bouilloire ou un fer à repasser fabriqués loin de chez nous, on sera incité à les faire réparer ici. Je vois dans cette filière, à côté de la distribution d'électro-ménager en France, une source de localisation de l'emploi.

Les Français ont le droit d'être informés de la qualité de ce qu'ils consomment. À l'initiative de Mme Pinel, le régime des appellations d'origine a été étendu aux produits manufacturés. Je pense aux couteaux Laguiole de l'Aveyron, n'est-ce pas Monsieur Fauconnier, à la porcelaine de Limoges mais aussi, car il ne faut pas oublier les Bretons (Sourires), la faïence de Quimper. Nous avons déjà reçu plus de 80 demandes d'instruction.

Il m'a semblé également légitime que l'on sache au restaurant comment a été fabriqué ce que l'on a dans son assiette. Je parle, bien sûr, de l'appellation « fait maison » qui figurera désormais sur les cartes et menus, à titre obligatoire ou facultatif... N'oublions pas que des millions de touristes viennent, aussi, pour nos restaurants !

Faire ses courses est le quotidien des Français. Or un prix est le résultat de négociations entre distributeurs et producteurs. Je me suis efforcé de me tenir à distance du lobby des industriels, comme de celui des distributeurs et aucun des deux n'est tout à fait content : c'est certainement le signe que nous sommes sur la bonne voie... L'intérêt des consommateurs n'est pas toujours de bénéficier des prix les plus bas, au détriment de la qualité. Souvenez-vous du scandale de la viande de cheval !

La DGCCRF pourra mieux contrôler le déroulement des négociations, et une clause de révision des prix permettra de tenir compte de la volatilité des matières premières, car les producteurs doivent pouvoir vivre de leur activité.

L'État doit aussi être plus efficace dans sa manière de sanctionner des acteurs économiques indélicats : d'où l'intérêt des amendes administratives. Leur plafond décuplera, afin que la sanction soit davantage proportionnée. L'amende maximale qu'il était possible d'infliger aux fraudeurs à la viande de cheval était de 180 000 euros, quand le bénéfice était de 500 000 euros ! Le plafond de 10 % du chiffre d'affaires est indicatif.

Nous renforçons aussi la protection des consommateurs sur Internet, qui concentrait en 2012 45 milliards d'achats. Les agents de la DGCCRF pourront avoir recours à la pratique du « client mystère ».

Grâce à la clause erga omnes, les clauses abusives pourront être annulées dans tous les contrats identiques.

Enfin, grâce à la majorité socialiste, l'action de groupe, l'arlésienne des débats parlementaires depuis plusieurs années, sera enfin introduite en droit français. Dans le champ de la concurrence, une exécution provisoire sera possible en première instance, afin d'éviter la déperdition des preuves. Enfin, dans les contentieux de masse, le consommateur pourra être indemnisé du préjudice subi. Des dizaines de millions d'euros reviendront ainsi aux consommateurs. C'est donc une loi de vie quotidienne et de pouvoir d'achat que je vous invite à adopter à une belle majorité comme précédemment. (Applaudissements)

M. Alain Fauconnier, co-rapporteur de la commission des affaires économiques .  - Des consommateurs mieux informés, mieux protégés et mieux à même de défendre leurs droits : voilà la première ambition de ce texte. Certaines de ces mesures, attendues parfois depuis plusieurs années, feront date. Une procédure d'action de groupe, d'abord, qui permet une réparation des préjudices économiques tout en évitant la judiciarisation de la vie des affaires ; une protection contre la spirale du surendettement pour les ménages les plus vulnérables grâce à un registre national des crédits aux particuliers ; la transposition des règles européennes en matière de vente à distance, dont l'extension de la durée de la période de rétractation ; une réforme des règles de garantie légale, avec un allongement important de la durée de la présomption d'antériorité du défaut de conformité, qui développera des modes de consommation et de production durables ; un dispositif équilibré de lutte contre le démarchage téléphonique abusif ; le renforcement de la qualité et de la transparence de l'information relative aux plats servis dans la restauration, avec la mention du « fait maison » ; l'extension du régime des appellations géographiques protégées aux biens non alimentaires.

L'ambition de ce texte, c'est aussi celle d'une police économique modernisée, grâce à un renforcement des compétences de la DGCCRF, à la création ou au durcissement des sanctions administratives, et au renforcement des pouvoirs du juge en matière économique, avec l'extension à tous les contrats du pouvoir de supprimer les clauses abusives. Une information transparente et loyale, garantie par un système de contrôles et de sanctions crédibles, renforcera la confiance entre consommateurs, producteurs et distributeurs.

L'ambition de ce texte est enfin celle d'améliorer le pouvoir d'achat de nos concitoyens par des mesures concrètes et immédiates. Je pense, en particulier, à la possibilité de résilier à tout moment les contrats d'assurance au-delà de la première année. Je pense également aux dispositions dans le domaine de l'optique-lunetterie, à la tarification dans les parkings publics, au remboursement des taxes d'aéroport pour les passagers n'ayant pas embarqué.

Cette loi en faveur des consommateurs n'est pas une loi contre les entreprises. La philosophie que j'ai défendue est celle d'un équilibre entre le renforcement des droits des consommateurs et le développement de la compétitivité des entreprises. Cette approche inspire notamment la conception de l'action de groupe qui comporte des filtres évitant les dérives.

Dans le même sens, je me suis systématiquement opposé aux amendements qui créaient une charge administrative disproportionnée pour les entreprises. J'ai, en revanche, soutenu les initiatives qui se justifient par la défense des intérêts substantiels des consommateurs ou qui me semblaient de nature à créer une dynamique positive de montée en gamme pour nos entreprises, comme l'augmentation de la durée de présomption d'antériorité de conformité ou l'affichage obligatoire du fait maison.

Nous pourrons être fiers de cette loi utile à tous au terme de neuf mois de gestation parlementaire.

64 articles restent en discussion. Je m'en tiendrai aux chapitres II, III et IV, les autres étant confiés à M. Bourquin.

Au chapitre II, relatif à l'information et aux droits contractuels des consommateurs, les députés ont décidé le passage à une tarification par tranche de 15 minutes dans les parkings publics, notre commission des affaires économiques est revenue à une tarification à la minute.

Les députés ont également souhaité l'assouplissement de la mesure de remboursement sans frais des taxes d'aéroport pour les passagers n'ayant pas embarqué, autorisant, si la demande n'est pas faite en ligne, des frais représentant jusqu'à 20 % du montant remboursable.

L'Assemblée nationale a voté le rétablissement du caractère obligatoire de la mention du « fait maison » dans la restauration, quand la commission a préféré revenir à une mention facultative. À titre personnel, je suis pour l'obligation.

Les députés ont rétabli un dispositif d'encadrement de la prospection téléphonique commerciale fondé sur l'opt-out, conforme à notre choix en première lecture.

Cette protection renforcée, sans commune mesure avec le dispositif Pacitel existant, évitera de ruiner tout un pan d'activité.

S'agissant des normes de stations-service, les députés ont ramené la date butoir de mise aux normes à 2016, au lieu de 2020, et ont restreint le champ d'application aux stations de moins de 500 m3. Là encore, notre commission est revenue à son texte.

Les députés, je tiens à le souligner, ont voté conforme deux dispositions introduites par le Sénat, celle portant sur la libéralisation de la vente des produits d'entretien des lentilles de contact, introduite à l'initiative de notre collègue Muguette Dini, et celle sur la libéralisation de la vente des tests de grossesse, issue d'un amendement de Patricia Schillinger. Ces avancées ont eu un large écho, les députés et les médias auraient dû mettre davantage en avant l'apport du Sénat qui, une fois de plus, a fait la preuve de la qualité de ses travaux et de sa modernité.

Ce constat vaut également pour les dispositions sur l'optique-lunetterie, que j'avais introduites en première lecture, contre l'avis du Gouvernement, en m'appuyant sur le travail à « quatre mains » réalisé en 2011, lors de l'examen du « projet de loi Lefebvre » avec Gérard Cornu. Grâce à l'article 17 quater, désormais soutenu par le Gouvernement, la vente en ligne des lunettes et des lentilles pourra se développer dans un cadre sécurisé. Cela aura un impact très sensible sur le pouvoir d'achat de nos concitoyens.

Les députés ont cependant supprimé le relèvement de trois à cinq ans de la durée pendant laquelle les opticiens-lunetiers peuvent adapter une prescription de verres correcteurs. Soucieuse de rétablir l'équilibre de l'article 17 quater et fidèle à la vocation constitutionnelle du Sénat de représentation des territoires, notre commission a rétabli cette disposition qu'aucun élément sanitaire ne justifie et qui constitue une vraie réponse aux problématique des déserts médicaux.

J'en viens au chapitre III consacré aux secteurs de l'assurance et de la banque.

En matière de crédit, les députés ont maintenu l'équilibre général du texte adopté par le Sénat. Je m'en félicite, et salue la contribution des rapporteures pour avis de la commission des finances et des lois, Mmes Michèle André et Nicole Bonnefoy.

Notre commission s'est principalement attachée à préciser les modalités d'entrée en vigueur des dispositions du texte, l'enjeu étant de trouver le bon équilibre entre les attentes des consommateurs et les contraintes logistiques des professionnels.

En matière d'assurance, notre tâche s'est résumée à parachever la rédaction et la coordination de l'avancée majeure que constitue la liberté de changer d'assureur, à tout moment, au bout d'une année.

L'élément nouveau, introduit par les députés à l'initiative du Gouvernement, concerne l'assurance emprunteur, qui représente 6 milliards d'euros, ainsi qu'une proportion importante du coût des crédits. En pratique, l'emprunteur ne peut plus changer d'assureur une fois le contrat signé. Quand la liberté de choix est un des principaux apports du texte pour l'assurance automobile et l'assurance habitation, il pouvait paraître surprenant de ne pas étendre cette possibilité à l'assurance emprunteur.

Afin d'éclairer la décision, le Gouvernement a confié une mission de réflexion à l'Inspection générale des finances. Précaution opportune. Le rapport de l'Inspection met en évidence les deux caractéristiques fondamentales du système français d'assurance emprunteur : le niveau relativement élevé de versement des commissions, la logique de mutualisation qu'il incorpore. Concrètement, au lieu de payer huit à dix fois plus à 56 ans qu'à 26 ans, comme devrait y conduire la pure application des lois de la probabilité et du marché, l'écart est plutôt de un à deux ou trois.

La commission s'est attachée à trouver un équilibre satisfaisant permettant à l'emprunteur de faire jouer la concurrence pour faire diminuer les primes tout en préservant cette mutualisation à laquelle nos concitoyens sont très attachés.

Pour l'essentiel, la commission a approuvé le choix d'un délai de substitution ouvert pendant douze mois à compter de la signature du prêt, en écartant les solutions extrêmes que constituent le quasi statu quo et un droit de substitution automatique tout au long de la vie du prêt. En ce qui concerne les modalités du dispositif, la commission a adopté plusieurs amendements en se préoccupant, tout particulièrement, d'éliminer toute possibilité de faire supporter à l'emprunteur des frais dissuasifs en cas de changement d'assurance emprunteur, car, comme vous le savez, « le diable se cache dans les détails » et dans les frais annexes.

Enfin, concernant le chapitre IV, disons quelques mots de l'article 23 qui protège les indications géographiques pour les produits non alimentaires et renforce les moyens qu'ont les collectivités territoriales de protéger leur nom dans les procédures de dépôt de marques auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (Inpi). Approuvant l'essentiel du dispositif adopté par le Sénat, les députés ont introduit trois modifications qu'il nous a semblé opportun de conserver. La procédure de consultation de l'Inao ne sera pas déclenchée systématiquement, mais seulement s'il existe un risque de chevauchement entre les indications géographiques industrielles et les IGP et AOP agricoles existantes ou en cours d'instruction par l'Inao. Inutile de multiplier les consultations qui ne seraient pas nécessaires. Le deuxième correctif précise le rôle de l'Inpi au moment de l'instruction de la demande d'homologation : l'institut vérifie que la production ou la transformation du produit ainsi que le périmètre de la zone géographique ou du lieu déterminé permettent de garantir que le produit possède une qualité ou une réputation liée à cette zone ou ce lieu. Enfin, les députés ont complété la définition d'une indication géographique, en ajoutant le critère d'existence d'un « savoir-faire traditionnel ».

À mon initiative, l'article 23 a été perfectionné par la commission. Tout d'abord, nous avons prévu que la consultation de l'Inao par l'Inpi doit être lancée lorsque la dénomination de l'indication géographique artisanale ou industrielle peut créer un risque de confusion avec la dénomination d'une AOP ou IGP agricole. Cette formulation, plus protectrice et plus précise que celle du texte qui a été adopté par les députés, a pour but de couvrir les cas où la dénomination de l'indication géographique correspond partiellement à la dénomination de l'AOP ou de l'IGP.

Ensuite, la commission ramené de trois à deux mois la durée des consultations effectuées par l'Inpi pendant la phase d'instruction. Ce délai nous apparaît suffisant pour émettre un avis sur un cahier des charges et il tient compte du besoin d'accélérer la procédure dans l'intérêt de nos professionnels.

Enfin, la commission a pris en compte l'évolution de la réglementation européenne, en prévoyant de mettre à jour la liste des indications géographiques au sein du code de la propriété intellectuelle.

J'ai, bien entendu, poursuivi ma réflexion sur ce sujet essentiel pour nos territoires et je soumets au Sénat quelques ultimes perfectionnements du texte, en particulier pour préciser la portée de la protection et, prévoir que les indications géographiques protégées ne peuvent pas devenir génériques. Par ailleurs, la commission a donné un avis favorable à un amendement présenté par M. Mazars qui a pour but de consolider le lien entre le territoire et le produit non agricole, en distinguant la dimension globale du produit et ses composants.

Compte tenu des nombreuses avancées structurelles ou sectorielles que comporte ce texte, tant pour les consommateurs que pour notre économie, compte tenu également des progrès que cette deuxième lecture apportera, c'est avec fierté et enthousiasme que je vous invite à l'adopter. (Applaudissements à gauche et au centre)

M. Martial Bourquin, co-rapporteur de la commission des affaires économiques .  - En examinant ce texte, nous nous sommes efforcés non seulement de perfectionner chaque dispositif mais aussi de les relier pour anticiper leur effet global. Si la fragilité et la liberté de choix du consommateur sont des préoccupations majeures, il nous fallait également prendre en compte les difficultés auxquelles sont confrontées nos entreprises, et tout particulièrement celles qui respectent à la fois les consommateurs et leurs salariés.

En ce qui concerne l'action de groupe, le Sénat avait sensiblement ajusté le dispositif en première lecture, à mon initiative et également à celle de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteure pour avis de la commission des lois. La commission avait notamment précisé les conditions d'engagement d'une action de groupe simplifiée.

En séance publique, notre Haute assemblée avait modifié la procédure d'action de groupe en matière de concurrence en permettant l'engagement d'une action de groupe avant que la décision de l'Autorité de la concurrence ne soit devenue définitive.

En deuxième lecture, les députés ont maintenu plusieurs ajouts du Sénat, notamment pour ce qui concerne la médiation ; ils ont poursuivi l'amélioration de la procédure d'action de groupe en matière de concurrence, dans le même esprit que notre Haute assemblée, en permettant au juge de prononcer la responsabilité du professionnel sur le fondement d'une décision d'une autorité de la concurrence non définitive si les recours ne portent pas sur l'établissement des manquements ; ils sont enfin revenus sur certains ajouts du Sénat.

Les députés ont ainsi rétabli leur rédaction du dispositif de l'action de groupe simplifiée, sans tenir compte des remarques que nous avions formulées en première lecture. À mon initiative, la commission des affaires économiques a rétabli le dispositif adopté par le Sénat en première lecture, sous réserve d'un ajustement permettant de prendre en compte une critique du rapporteur de l'Assemblée nationale. Cette rédaction nous paraît plus précise et plus sûre juridiquement.

En ce qui concerne le chapitre V du projet, je souhaite insister sur le volet du texte consacré au rééquilibrage des forces entre les entreprises. L'objectif ici recherché concorde parfaitement avec l'impératif de renforcement de la compétitivité de notre économie. Le rapport Gallois démontre que le rééquilibrage des forces et la pacification des relations entre les entreprises est l'une des clefs de notre redressement. Plus une loi est juste et équilibrée, plus elle est applicable.

S'agissant du renforcement des sanctions en matière de délais de paiement, le Sénat avait supprimé le régime dérogatoire introduit par les députés en faveur des factures récapitulatives, en particulier pour l'achat de matériaux de construction. Nous avons estimé qu'une telle mesure pénaliserait les fournisseurs de matériaux de construction, au profit des promoteurs immobiliers. Or les fournisseurs sont souvent des petites et moyennes entreprises (PME), qui devraient trouver des financements complémentaires pour faire face à des besoins accrus de trésorerie, ce qui est presque mission impossible dans un contexte de restriction du crédit.

Au final, je constate que l'Assemblée nationale, après avoir voté une dérogation, ce qui vous en conviendrez, est souvent plus gratifiant que de tenir une ligne de rigueur, s'est finalement ralliée à notre position. N'oublions pas que plus on multiplie les exceptions, plus on fragilise les petites entreprises !

Dans le même esprit, la commission a supprimé le nouveau régime dérogatoire introduit en deuxième lecture par les députés, qui affranchissait les entreprises de négoce spécialisées dans la grande exportation hors de l'Union européenne, du délai maximum de règlement pour les biens achetés en franchise de TVA, sans toutefois que le délai librement fixé avec le créancier soit abusif à son égard.

Certes, l'exportation est un défi prioritaire, mais il faut avant tout penser à la régulation globale de notre économie et au péril imminent auquel doivent faire face les PME industrielles qui sont dans une logique de survie. D'ailleurs, 70 % de nos exportations ont pour destination un pays européen. Or la directive du 16 février 2011 y limite les délais de paiement à 60 jours civils. Avant d'ouvrir une nouvelle fois la boite de Pandore des dérogations, mieux vaut mobiliser des outils de financement et de soutien comme l'affacturage ou les aides publiques. Cela soulagerait les secteurs et les entreprises pénalisés par les décalages de paiement clients-fournisseurs à la grande exportation. Pour ces raisons, et parce que l'accès au crédit est extrêmement difficile pour nos PME, notre commission a supprimé cette disposition. Des délais avaient été accordés par la loi de modernisation de l'économie, le temps est venu d'y mettre fin.

Afin de réguler les relations de sous-traitance, la commission a réintroduit la disposition adoptée par le Sénat en première lecture en la réaménageant pour répondre aux objections de la rapporteure de l'Assemblée Nationale. Personne ne conteste qu'améliorer l'encadrement des relations de sous-traitance est une nécessité pour la compétitivité de notre économie. Nous devons contribuer sans plus attendre à la pacification des relations de sous-traitance de production ; cela passe par des contrats-types. Comme en Allemagne, ou dans les pays du Nord, créons les conditions pour une véritable collaboration entre PME sous-traitants et grands donneurs d'ordre.

S'agissant des relations entre fournisseurs et distributeurs, l'article 62 préserve les équilibres de la loi de modernisation de l'économie, qui garantissent les intérêts de toutes les parties. Encore fallait-il renforcer le formalisme contractuel et sanctionner plus fermement les dérives tout en tenant compte de la volatilité du prix des matières premières.

Les députés ont précisé la notion de convention unique ainsi que son contenu. Ils ont supprimé les dispositions introduites par le Sénat relatives aux nouveaux instruments promotionnels, avant de les réintroduire dans la convention unique lors du débat en séance. La commission vous propose une solution de compromis : exclure les nouveaux instruments promotionnels du champ de la convention unique, tout en donnant une définition et un cadre juridiques à cette pratique.

Les députés ont aussi prévu que les renégociations de prix, en fonction de la volatilité des matières premières, doivent respecter le secret des affaires et les secrets de fabrication existants.

Enfin, obligation a été faite au distributeur de répondre dans un délai de deux mois au fournisseur qui estime qu'un accord a été remis en cause ; à défaut de réponse, le fournisseur a la possibilité de signaler la situation à la DGCCRF. La commission a supprimé ce dispositif dont l'intention est parfaitement légitime mais la portée juridique très insuffisante, et semble peu pratiquable.

La commission a adopté plusieurs autres correctifs au texte adopté par les députés à l'article 62. Il s'agit d'abord de préserver la possibilité d'une remise globale concernant les « autres obligations » auxquelles s'engage le distributeur à l'égard de son fournisseur, afin de contrecarrer le retour au « ligne à ligne », tout en prévoyant que cette rémunération globale ne soit pas disproportionnée par rapport à la valeur de ces services. Nous avons aussi introduit la notion d'abus dans la disposition qui interdit la pratique des « garanties de marge ».

Ce projet de loi, sage et équilibré, comporte donc des avancées majeures. L'action de groupe, très attendue, verra enfin le jour. Je vous invite à voter ce texte, qui renforcera la protection des consommateurs, tout en promouvant la France des producteurs que nous appelons de nos voeux. (Applaudissements à gauche et au centre)

M. Stéphane Mazars .  - Ce texte représente bien plus qu'un catalogue de mesures disparates sur la consommation. Consommer toujours plus et toujours moins cher ne correspond plus aux attentes de la société. Certes, il faut améliorer le pouvoir d'achat des Français ; c'est le cas avec les mesures sur les assurances, qui représentent 5 % du budget des ménages et appartiennent aux dépenses contraintes qui portent bien leur nom.

Je proposerai des amendements, dans la ligne de la proposition de loi Plancade, sur le très symbolique article premier qui instaure l'action de groupe en matière de consommation et de concurrence, afin pour des raisons de sécurité juridique, d'en limiter la rétroactivité.

Nous vous proposerons d'inverser la logique de l'article 5 sur l'encadrement du démarchage téléphonique, en soumettant celui-ci au consentement exprès du client. Monsieur le ministre, vous nous proposez seulement un Pacitel amélioré. Nos adversaires nous opposent que nous détruirions des emplois. De quels emplois parlons-nous ? D'emplois sous-payés et souvent délocalisés. J'espère que le Sénat confirmera le vote qu'il a déjà émis par trois fois.

Pour finir, les indications géographiques industrielles enfin introduites à l'article 29. Il le fallait, après l'affaire des couteaux Laguiole dans l'Aveyron. L'amendement de M. Fauconnier, qui prévoit une consultation de l'Inao par l'Inpi en cas de confusion entre indications géographiques industrielles et indications géographiques agricoles, va dans le bon sens ; il est proche d'un amendement que j'avais présenté. J'en présenterai un autre, afin de supprimer le caractère de savoir-faire traditionnel, qui n'a aucun sens juridique, pour insister sur le lien entre produit et territoire. Le made in France importe au consommateur, mais plus encore le territoire de production.

Je vous invite à adopter ces amendements du groupe RDSE. (Applaudissements à gauche et au centre)

M. Joël Labbé .  - Entre les fêtes de fin d'année et les soldes, le temps est à l'hyperconsommation. Les enfants, gavés de jouets sophistiqués, sont ciblés pour devenir des superconsommateurs en puissance. Durant ces semaines, le « temps de cerveau disponible » est utilisé pour faire vibrer notre fibre consumériste. Enfin, cela vaut pour ceux qui en ont les moyens. N'oublions pas ceux qui errent dans les rayons de hard-discount et se nourrissent aux Restos du Coeur.

Réduire, réutiliser, recycler, venons-en aux trois R. Je salue les mesures prises en faveur d'une consommation plus durable, dont l'encadrement du crédit renouvelable et l'allongement de la durée de la garantie légale de conformité. Nous proposerons de définir l'obsolescence programmée.

Les ménages modestes n'ayant qu'un accès limité aux moyens de paiement, nous avons proposé la gratuité du mandat-compte, et la commission nous a suivis : c'est une première fois.

Améliorer la qualité de notre alimentation est l'objectif que je partage et que je porte. Au nom de la compétitivité, on encourage la production de masse au détriment de l'emploi et de la qualité. Nous importons 45 % de la viande de poulet que nous consommons, quand nous exportons du poulet de basse qualité. Aussi soutenons-nous la mention « fait maison », qui encouragera l'approvisionnement saisonnier et local. Sans quoi, on verra encore gagner des parts de marché ce que Xavier Denamur, militant du « fait maison », qualifie de cuisine agro-alimentaire mijotée à l'usine. De même, il est bon de donner une assise juridique aux magasins de producteurs et de préciser qu'ils s'approvisionnent auprès des producteurs. Les touristes cherchent de la cuisine authentique dans nos restaurants.

Bravo pour les étiquetages des viandes. J'ai apprécié que la commission ait retenu mon amendement visant à mentionner l'origine des poissons dans la restauration, qu'ils soient sauvages ou d'élevage. Et puis, j'aimerais tellement que mon amendement sur l'étiquetage des huîtres trouve enfin un écho favorable dans cet hémicycle : ces huitres triploïdes, qui poussent en deux ans au lieu de trois et ne sont pas laiteuses en été, auront bientôt envahi tout le marché.

Le consommateur est trop souvent un exécutant passif des injonctions publicitaires ou médiatiques. « On vous inflige des désirs qui nous affligent », chante Alain Souchon. Pour en finir avec cette consommation revenons à l'éthique ; et cela commence par l'éthique en politique (Applaudissements à gauche)

Mme Élisabeth Lamure .  - Qu'un texte sur la consommation manque de colonne vertébrale, c'est dans l'ordre des choses. Le vrai problème que pose ce texte, c'est qu'il ne se limite pas au droit des consommateurs mais s'en prend aux entreprises. Comment peuvent-elles se développer si l'on change leur modèle normatif tous les six mois ? Le président de la République lui-même a pris conscience de cette inflation normative que rien ne semble pouvoir freiner.

Néanmoins, ce texte comporte des mesures d'urgence. Je salue l'amendement de M. Dallier sur la tarification à la minute des parkings publics, un gain réel de pouvoir d'achat ; l'amendement de M. Cornu qui est à l'origine de l'article 17 quater sur la lunetterie. Il est la preuve que la libéralisation n'est pas l'alpha et l'oméga du groupe UMP. Quelques centimes en moins sur la facture sont parfois des centaines de millions en moins dans les caisses de l'État. Ne nous tirons pas une balle dans le pied.

Alors quelles sont nos inquiétudes ? L'action de groupe simplifiée ne peut nous satisfaire car elle ne garantit pas les droits de la défense. Désolée, mais nous ne pourrons pas le voter, bien que nous soyons d'accord sur le principe de l'action de groupe. Idem sur l'allongement de la durée de la garantie légale de la conformité : la charge de la preuve pèsera sur les entreprises et, donc, sur les acheteurs in fine. La même logique vaut pour la résiliation infra-annuelle des contrats d'assurance.

Autre grief, le registre positif des crédits, qui pourrait être détourné de ses fins par des professionnels mal intentionnés, est trop large.

Nous sommes partagés sur le renforcement des pouvoirs de la DGCCRF, avec la rétroactivité à l'article 25. Même grief à l'article 28 qui autorise les associations à demander à une juridiction de vous déclarer une clause réputée non écrite.

Nous ne ferons pas de reproches sur la lisibilité du texte, un projet de loi sur la consommation est souvent un fourre-tout. En revanche, pourquoi faire peser tant de poids sur les entreprises pour gagner quelques euros ? Surtout, l'action de procédure simplifiée et le registre positif des crédits ne peuvent nous convenir. Aussi, sans méconnaître les avancées de ce texte, le groupe UMP ne pourra l'approuver. (Applaudissements UMP)

M. Henri Tandonnet .  - Ce texte a fait l'objet, et je le salue, d'une véritable navette.

M. Philippe Dallier.  - Pour une fois que l'urgence n'est pas déclarée !

M. Henri Tandonnet.  - Malheureusement, les députés sont revenus sur nombre d'avancées de ce texte, dont huit des treize amendements du groupe UDI-UC votés par le Sénat. Monsieur le ministre, je compte sur votre écoute. M. Lamy a obtenu sur la ville un large accord du Sénat ; c'est qu'il a su nous entendre.

L'action de groupe est une mesure-phare de ce texte. En revanche, la procédure simplifiée ne se justifie pas ; laissons au juge le soin d'apprécier, il le peut. L'Assemblée nationale a réintroduit les huit tribunaux d'instance spécialisés sur les litiges du droit de la consommation .C'est une nouvelle manière d'éloigner les Français de la justice. Défendons nos territoires et nos magistrats de proximité.

Nous nous félicitons de la création du registre national de crédits aux particuliers. Le groupe UDI-UC défend depuis dix ans l'instauration de ce fichier positif qui a un aspect préventif. Il doit être le plus exhaustif possible pour être le plus protecteur possible ; nous comptons sur sa mise en place rapide. D'où mes amendements de précision et la suppression des neuf décrets en Conseil d'État, contraires à l'article 22 septies.

Mieux protéger les consommateurs, c'est aussi, comme l'a proposé Mme Dini, encadrer l'entrée dans le crédit. Nous vous soumettrons à nouveau des amendements.

Enfin, nous soutenons le passage de 45 à 60 jours des délais de paiement dans le BTP. Il le faut, pour ne pas mettre en difficulté les entreprises.

Nous, sénateurs UDI-UC, souhaitons vivement être entendus car nous sommes dans un état d'esprit constructif. (Applaudissements)

Mme Évelyne Didier .  - Nous partageons votre volonté de mieux protéger les consommateurs, monsieur le ministre. Malheureusement, ce texte se heurte à la précarité et au chômage. Quand les patrons imposent à leurs salariés des baisses de salaire, quand le traitement des fonctionnaires est gelé depuis plusieurs années, quand la loi sur les retraites va diminuer les pensions, quand les jeunes peinent à financer leurs études ou à trouver un emploi, le Gouvernement lance un pacte de responsabilité, beau cadeau aux entreprises qui, par la voix du Medef, refusent toute contrepartie.

On se heurte aussi à la hausse des dépenses contraintes : le logement, bien sûr, et l'énergie dont le coût va progresser de 30 % d'ici 2017, selon la Commission de régulation de l'énergie.

Nous soutenons néanmoins ce texte globalement positif : l'action de groupe, les mesures de soutien à une économie circulaire, l'encadrement du démarchage téléphonique, le renforcement des pouvoirs de la DGCCRF. Elle en a besoin, je l'ai constaté comme rapporteur pour avis. Les douanes verraient leur personnel diminuer de milliers d'emplois. Comment remplira-t-elle ses missions dans ces circonstances ?

Si je salue la déliaison des cartes de fidélité et de crédit, je regrette que vous ayez refusé l'interdiction du crédit renouvelable et la réforme du taux d'usure.

Autres reproches, ce texte restera comme un rendez-vous manqué pour obtenir l'étiquetage de l'origine des produits agricoles. Quant au registre positif des crédits, il est inefficace et dangereux, car il rejette la responsabilité sur l'emprunteur.

M. Benoît Hamon, ministre délégué.  - C'est le contraire !

Mme Évelyne Didier.  - Nous refusons l'amendement n°11 bis qui supprime l'accès aux tarifs réglementés pour les gros consommateurs de gaz naturel.

Voilà notre analyse de ce texte, sans préjuger son évolution en séance. (Applaudissements à gauche)

Mme Delphine Bataille .  - Selon une étude du Crédoc, les Français ne sont plus dans une logique de possession mais d'accès. Ce texte améliorera leur quotidien. Très attendu, il suscite encore bien des débats. Nous défendrons la position du Sénat sur l'action de groupe et l'action de groupe simplifiée, notre rédaction est plus précise.

Autre sujet de discussion, le label « fait maison ». Afin de garantir une meilleure information du consommateur, rendons-le obligatoire pour toutes les entreprises qui fabriquent ou transforment des produits alimentaires. De même, rétablissons l'article 9 bis, introduit à l'initiative de M. Joël Labbé, en répondant aux observations des députés.

Nos longues discussions ont abouti sur la lutte contre l'obsolescence programmée. L'information générale des consommateurs est renforcée, il faut en rester à cet équilibre. Idem sur l'allongement de la durée de la garantie légale de conformité.

Réjouissons-nous que les députés aient confirmé certaines de nos avancées : la vente de tests de grossesse en supermarché ; la suppression des frais de rejet de paiement pour les populations vulnérables, l'encadrement des spams, des SMS et des numéros surtaxés, la régulation des ventes aux enchères en ligne, l'étiquetage des viandes - la France, en ce domaine, fera figure de pionnière.

Restent quelques articles en discussion. Je n'en doute pas, le Sénat continuera de les améliorer. Je salue le travail de nos rapporteurs, et l'engagement de M. le ministre. Ce texte parle aux Français, et contribuera à changer leur vie. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Yannick Vaugrenard .  - Je m'associe aux remerciements à nos deux rapporteurs. Ce texte est important pour le quotidien des Français. Grâce à un excellent compromis sur l'action de groupe, la France rejoindra les nombreux pays européens qui l'ont déjà adoptée ; en l'ouvrant à un nombre restreint d'associations, on fera obstacle à certaines dérives observées aux États-Unis.

Le registre national des crédits aux particuliers est une précieuse avancée pour lutter contre le surendettement. L'Allemagne en a créé un en... 1928 ! La consultation du fichier ne doit pas dispenser les banquiers de leurs obligations de conseil.

De nombreux scandales ont réduit la confiance du consommateur envers les produits qui lui sont destinés, confiance qui est l'un des piliers de l'économie. Il faut y remédier, et c'est ce que fait ce projet de loi. À l'initiative de nos rapporteurs, les dérogations en matière de délais de paiement ont été supprimées : elles auraient été dévastatrices pour les PME, à qui les grands donneurs d'ordre doivent par leurs retards pas moins de onze milliards d'euros. En Allemagne, puissance exportatrice, les délais de paiement sont en moyenne de 24 jours.

Il est nécessaire en outre d'imposer des conventions dans les relations de sous-traitance, l'encadrement et la pacification de celles-ci sont essentiels à notre compétitivité - je vous renvoie au rapport Gallois.

S'agissant des relations entre fournisseurs et distributeurs, les équilibres de la loi de modernisation de l'économie doivent être préservés et ses insuffisances comblées - les ajustements apportés de l'Assemblée nationale sont opportuns.

Les députés ont ramené de 2020 à 2016 la date butoir de mise aux normes des stations-services et fixé le seuil de l'obligation à 500 m3. C'est une erreur ; le Sénat, chambre des territoires, sait qu'il faut prendre en considération les spécificités du monde rural.

Le texte relancera la consommation, clef de voûte de notre économie, et peut restaurer la confiance dans une société en proie au doute. Cette loi arrive au bon moment, et elle n'est nullement dépourvue de colonne vertébrale ! (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et du RDSE)

Mme Michèle André .  - Sur ce texte, la procédure parlementaire a été longue, riche et utile. Je salue le rôle de nos deux rapporteurs et de M. le ministre, très attentif à nos débats et à nos interrogations.

Le projet de loi aborde d'une manière transversale la question de la consommation en France. S'agissant des articles dont la commission des finances était saisie, les députés ont préservé les équilibres trouvés par le Sénat. Ainsi de la durée maximale de sept ans pour les mesures de redressement dans les procédures de surendettement, qui ménage un droit à l'oubli plus rapide tout en évitant des mensualités plus élevées. Les députés ont souhaité que ces dispositions entrent en vigueur en 2015 ; je me félicite que la commission se soit montrée plus prudente, en cohérence avec la date de mise en place du registre.

Sur la déliaison des cartes de crédit et de fidélité, un équilibre a aussi été trouvé entre protection des consommateurs et développement de la consommation.

Les députés ont créé une faculté de substitution pour l'assurance emprunteur au cours de la première année du contrat de prêt immobilier, sans déstabiliser les contrats existants ni ouvrir la voie à une démutualisation ; ce dispositif fera baisser le prix de l'assurance.

Les députés ont globalement préservé l'équilibre que nous avons trouvé sur les jeux en ligne. Ils ont néanmoins harmonisé, à l'article 72 quater, la définition des jeux d'argent et de hasard prohibés. Les loteries publicitaires sans obligation d'achat avec remboursement des frais de participation seraient désormais autorisées, ce qui est conforme au droit communautaire. La presse pourrait en outre organiser des jeux et concours encadrés par la loi, ce que nous n'avions pas prévu sinon pour les médias audiovisuels. Nous pourrions confirmer ces dispositions.

Plus généralement, et au-delà des dispositions dont la commission des finances était saisie, je salue le travail accompli sur les appellations d'origine protégée ; la protection des collectivités locales est essentielle à la valorisation des territoires et de leurs savoir-faire. L'Assemblée nationale a accepté l'expression « savoir-faire traditionnel », qui ne se limite pas à une commune ou à une vallée mais a été nourri aux feux de plusieurs foyers voisins ayant un destin commun. Je pense aux querelles autour des couteaux de Thiers et de Laguiole. À l'heure de la mondialisation, foin des querelles de clocher ! Nos concurrents sont en Chine, au Pakistan, pas de l'autre côté de la rivière ! Merci à M. Fauconnier de n'avoir pas répondu aux provocations de certains députés, et à Mme Pinel de son implication sur le sujet.

Sur certains points, le débat se poursuivra, ici et en CMP. Quoi qu'il en soit, le groupe socialiste soutient ce texte qui rendra du pouvoir d'achat aux Français et rendra confiance aux acteurs économiques, mieux protégés contre les fraudes et contrefaçons. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Benoît Hamon, ministre délégué .  - Je me contenterai d'aborder deux des points les plus emblématiques de ce texte. En ce qui concerne le registre national des crédits aux particuliers, je comprends les préoccupations exprimées pour la protection des libertés individuelles ; la composition du comité de suivi peut être affinée. Mais, madame Didier, en l'état actuel du droit, l'emprunteur est seul responsable de l'endettement. Le registre national des crédits aux particuliers place le prêteur, lui aussi, devant ses responsabilités. Qui défend le registre ? Jean-Louis Kiehl, président de Crésus, qui interpellait à ce sujet Nicolas Sarkozy en 2012 - ce dernier avait répondu qu'il le ferait. Le Secours populaire, le Secours catholique le soutiennent aussi. La seule banque de crédit aux particuliers à le faire n'est autre que la Banque postale... Je ne citerai pas les noms des grandes banques privées qui s'y sont vigoureusement opposées... Nous avons tenu compte des observations des groupes UDI-UC, RDSE et communiste. (M. Jean-Jacques Mirassou acquiesce) Nous avons fait en sorte de passer la barre du Conseil d'État et d'écarter les griefs constitutionnels. Nous pouvons renforcer encore le contrôle du comité de suivi, intégrer plus clairement la Cnil. En tout cas, le fichier sera proportionné à l'objectif.

Il serait sot de prétendre que le fichier va mettre fin au surendettement ; mais à l'étranger pareil fichier a fait baisser le niveau moyen de la part à rembourser dans les dossiers de surendettement. C'est déjà très important. Pensons à ceux qui se battent depuis des années dans le monde associatif pour la mise en place de ce registre. Si nous recevons des gens surendettés dans nos permanences, les travailleurs sociaux, eux, les côtoient tous les jours.

Mon prédécesseur M. Lefebvre a voté le texte, qui, sur certains points, est le résultat de vos délibérations passées ; et il l'assume. Le groupe UMP de l'Assemblée nationale s'est demandé s'il fallait soutenir un texte qui réduirait de 150 euros le prix des lunettes... Moi, ce qui m'occupe, c'est que 3 millions de Français ne peuvent pas s'acheter de lunettes. Je pense d'ailleurs que certains actes pourraient être délégués aux opticiens...

M. Lefebvre a aussi voté l'action de groupe. Je regrette qu'on utilise l'expression « action de groupe simplifiée ». Dans certains cas, on connaît toutes les personnes concernées, par exemple les abonnés à un service : d'où la procédure dite simplifiée, que je préfère appeler « accélérée »... Dans d'autres cas, il faut demander aux consommateurs de se déclarer. Le plus tôt nos compatriotes seront indemnisés, le mieux ce sera !

Le texte issu du débat parlementaire est meilleur que le texte initial, je le reconnais volontiers. N'oublions pas les objectifs que nous poursuivons, qu'il s'agisse de l'action de groupe ou de la lutte contre le surendettement. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et du RDSE)

La discussion générale est close.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques.  - Je demande, en application de l'article 44-6 de notre Règlement, la réserve - ou la priorité, c'est selon - des articles 4 bis A et 23, qui pourraient être examinés à l'ouverture de la séance demain après-midi.

La réserve, acceptée par le Gouvernement, est de droit.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques.  - Je demande aussi qu'à l'article premier l'amendement n°33 soit examiné séparément.

Il en est ainsi décidé.

Mme la présidente.  - Je suspends la séance pour laisser à la commission le loisir d'examiner les amendements.