SÉANCE

du mardi 17 juin 2014

111e séance de la session ordinaire 2013-2014

présidence de M. Jean-Patrick Courtois, vice-président

Secrétaires : M. Marc Daunis, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle dix-huit questions orales.

Autorité de la concurrence en Nouvelle-Calédonie

Mme Catherine Tasca .  - Le 31 octobre 2013, le Parlement adoptait la dixième réforme du statut de la Nouvelle-Calédonie depuis les accords de Nouméa. Mesure emblématique de cette réforme, la Nouvelle-Calédonie pouvait créer des autorités indépendantes.

Le 3 mai 2014, le Congrès de la Nouvelle-Calédonie adoptait, à l'unanimité, la loi de pays créant cette autorité, tandis que le Gouvernement promulguait, le 7 mai 2014, l'ordonnance attendue.

J'avais proposé au Sénat de renforcer l'indépendance de cette autorité, nécessaire pour lutter contre la vie chère, qui s'explique par de nombreux facteurs : le coût du transport, les habitudes de consommation, l'étroitesse du marché, les obstacles à une saine concurrence et l'inégale répartition des retombées du boom du nickel.

Face à cette situation, la nouvelle autorité doit jouer son rôle de bras armé de la législation et de la réglementation : maîtrise des prix, lutte contre les ententes et les abus de position dominante, supervision de l'implantation de grandes surfaces...

Avec la constitution du nouveau Gouvernement le 5 juin 2014, la Nouvelle-Calédonie entre dans sa dernière phase institutionnelle. Cela ne doit pas masquer la nécessité de régler les problèmes quotidiens des Calédoniens. Quelles mesures réglementaires restent-elles à prendre par le Gouvernement calédonien ? Quand seront nommés le président et les trois membres de l'Autorité de la concurrence ? Quand cette nouvelle autorité sera-t-elle opérationnelle ? Prévoit-elle de conclure des conventions avec les autorités administratives indépendantes nationales, comme la loi l'y autorise désormais ?

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer .  - La création de cette Autorité de la concurrence découle d'une demande expresse des acteurs locaux et d'un travail commun entre le Congrès et le Parlement. Avant la loi organique de 2013, la Nouvelle-Calédonie pouvait seulement mettre en place des instances consultatives.

Vous avez, madame Tasca, introduit à l'article 93-1 de la loi statutaire des règles précises sur la nomination de son président : audition publique du candidat, approbation par les trois cinquièmes du Congrès. Toujours à votre initiative, cette autorité a été dotée de pouvoirs d'enquête, de poursuites et de sanction dans le code du commerce.

Les nominations des quatre membres de son collège interviendront après audition devant le Congrès. Pour l'heure, il n'est pas prévu de conventions avec d'autres autorités administratives indépendantes que l'Autorité de la concurrence nationale, notamment la Commission de régulation de l'énergie. Il y a donc des marges de progrès.

Je salue, madame Tasca, votre implication dans ce dossier.

Mme Catherine Tasca.  - Le processus de création de cette nouvelle autorité est exemplaire. Elle montre que l'autonomie ne signifie pas retrait de l'État. Au contraire, sa réussite dépend de la collaboration entre métropole et Nouvelle-Calédonie. Le Sénat, attentif à l'application des lois, suit avec intérêt l'évolution de la situation dans l'archipel.

Il reste du chemin à parcourir, vous l'avez dit ; nous comptons sur le Gouvernement pour conforter la démarche.

Base d'hélicoptère de la sécurité civile du Touquet

M. Antoine Lefèvre .  - Le service départemental d'incendie et de secours (Sdis) du département de l'Aisne s'inquiète d'une désactivation de la base d'hélicoptère de la sécurité civile du Touquet. Depuis la mi-février 2014, l'hélicoptère Dragon II a été déplacé vers la base de Nîmes, échelon central des moyens en hélicoptères de la sécurité civile.

Or, la base du Touquet fonctionne avec le soutien des Sdis du Pas-de-Calais, de la Somme et de l'Aisne, en particulier pour la médicalisation et l'armement en sauveteurs spécialisés de l'appareil. Les compétences des personnels sont particulièrement élevées.

Alors que le nombre de personnes secourues est passé de 167 en 2011 à 330 en 2013, son départ fragilise la couverture sanitaire de ces territoires et accentue une iniquité dans le traitement de la protection des populations.

Sa suppression pose aussi le problème du maintien en condition opérationnelle des équipes spécialisées, qui ne pourront plus faire habiliter leur personnel à l'hélitreuillage.

Comment expliquer cette mise en sommeil de la base du Touquet ? Comment apaiser les craintes du Sdis et des élus locaux ?

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer .  - La flotte des hélicoptères de la sécurité civile assure des missions de secours et de sauvetage dans des conditions souvent difficiles. La priorité est donnée aux territoires de montagne et d'outre-mer dans le redéploiement actuel ; de là, l'indisponibilité temporaire de l'hélicoptère de la base du Touquet. Dans le même temps, le ministère de l'intérieur s'est assuré que la protection de la zone de défense du Nord soit maintenue au même niveau, que ce soit par voie terrestre ou aérienne -Sdis, Samu, gendarmerie, marine nationale... Enfin, il a été demandé à la zone de défense de réfléchir à une utilisation optimale de ses moyens tout au long de l'année, en tenant compte de la saisonnalité. Des propositions seront soumises à la direction générale de la sécurité civile.

M. Antoine Lefèvre.  - Je préférerais une solution durable... Une réflexion est engagée, tant mieux.

Situation du village de Kessab en Syrie

M. Luc Carvounas .  - Le village de Kessab, situé à la frontière entre la Turquie et la Syrie, est tombé aux mains des djihadistes. Les informations sont peu précises mais inquiétantes : menaces, exactions, départ des Arméniens. Rappelons que ce village est peuplé de descendants des rescapés du génocide de 1915 ; sa position n'étant pas stratégique, on peut se demander si les assaillants ne sont pas principalement animés de motivations malveillantes à l'égard des Arméniens.

Quelles éventuelles actions diplomatiques envisage le Gouvernement pour garantir la protection des populations civiles de la région ?

Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger .  - D'après nos informations, il n'y aurait pas d'attaques ciblées contre les populations arméniennes. La communauté internationale est mobilisée : elle cherche à protéger les lieux de culte arméniens. Il faut opérer une distinction claire entre l'opposition modérée et les groupes terroristes -le Front Al-Nosra a été classé comme tel en mai 2013.

La résolution n°2139 de l'ONU, pour l'adoption de laquelle la France a été très active, demande l'arrêt des exactions contre les populations civiles. La France, soucieuse du respect des minorités, en particulier des Arméniens, demeure vigilante.

M. Luc Carvounas.  - Les Français d'origine arménienne seront rassurés par cette réponse. La situation à Kessab les inquiète à l'approche de la commémoration du génocide.

Représentation de la France au Forum Pacifique

M. Robert Laufoaulu .  - Le prochain Forum des îles du Pacifique se tiendra à partir du 29 juillet 2014. La France a compris, depuis la fin de la Guerre froide, l'importance stratégique de ce Forum.

En 2011, Alain Juppé avait conduit la délégation française. En revanche, pas de représentation au niveau ministériel en 2012 et 2013. Cette absence lors du dialogue post Forum est mal ressentie par les pays du Pacifique. Je suis d'autant plus à l'aise pour le dire que je n'hésite pas à voter les projets de loi du Gouvernement quand ils sont satisfaisants. Si nous voulons réussir la Conférence sur le climat, à Paris en 2015, il faut travailler avec ces États. Un ministre se rendra-t-il au prochain Forum ?

Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger .  - Le 45e Forum Pacifique constitue une échéance importante, le Gouvernement le sait, pour la lutte contre le réchauffement climatique. Avec Laurent Fabius, nous sommes conscients de la vulnérabilité climatique des îles de la zone Pacifique, menacées dans leur existence même par la hausse des températures et du niveau de la mer, l'acidification des océans, l'augmentation des précipitations et la multiplication des tempêtes et des cyclones.

Pour répondre précisément à votre question, la France sera représentée par le secrétaire général du Pacifique lors du dialogue post forum; cela devrait vous rassurer.

M. Robert Laufoaulu.  - Je suis déçu ; l'absence d'une représentation ministérielle est vécue comme un geste de dédain de la part de la France.

Difficultés d'encaissement de la taxe d'aménagement

M. Pierre Camani .  - La taxe d'aménagement, entrée en vigueur au 1er mars 2012, a remplacé plusieurs taxes d'urbanisme antérieures, dont la taxe départementale des espaces naturels sensibles (TDENS) et la taxe départementale destinée au financement des conseils d'architecture, de l'urbanisme et de l'environnement (TDCAUE).

À partir des estimations communiquées par les services compétents de l'État, les départements ont voté un taux pour cette nouvelle taxe, celle-ci étant assortie d'une clé de répartition de son produit entre actions en faveur des espaces naturels et activité des CAUE.

Dans les faits, les produits escomptés ne se sont pas concrétisés. Ainsi, dans mon département du Lot-et-Garonne, la perception de la taxe d'aménagement destinée au CAUE est inférieure de 40 % au rapport de l'ancienne taxe. Le Gouvernement peut-il nous éclairer sur l'encaissement de cette taxe, dont les difficultés apparaissent liées à des dysfonctionnements administratifs ?

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires .  - La mise en place de cette taxe s'est accompagnée du raccordement du logiciel ADS 2007, qu'il fallait synchroniser avec Chorus. Des difficultés sont effectivement survenues qui expliquent le retard de deux mois ; elles sont résolues depuis juillet dernier. Pour le département du Lot-et-Garonne, le montant prévisionnel de la taxe d'aménagement s'élève à 1,642 million d'euros pour cette année.

La liquidation de la taxe participera à hauteur de 96 000 euros au financement du CAUE.

Jusqu'alors était émis un titre d'échéance unique dans un délai de douze mois ; à présent, deux titres sont émis pour les sommes supérieures à 1 500 euros. C'est ce qui explique la baisse des recettes de certains départements, qui ne se reproduira plus dans les années à venir : ainsi, le Lot-et-Garonne bénéficiera cette année de la deuxième échéance de 2012 et de la première échéance de 2013.

La date de reversement ne doit pas être confondue avec la date d'émission du titre de recettes : huit semaines au moins s'écoulent entre les deux. Le Gouvernement est naturellement prêt à examiner la situation particulière du Lot-et-Garonne.

M. Pierre Camani.  - Les difficultés, loin de là, n'affectent pas le seul département du Lot-et-Garonne. La situation devrait se rétablir au deuxième semestre 2014 ; pour l'avenir, nous devons disposer d'estimations fiables. Pour le reste, il faut penser aux usagers qui vont se voir taxés pour l'année 2012 : il y va du consentement à l'impôt...

Diffusion de RFI à Strasbourg

M. Roland Ries .  - RFI est la seule radio publique française à traiter l'information à travers un prisme international. Elle est diffusée partout dans le monde. Elle accorde également une place privilégiée à l'actualité européenne, à travers des reportages et analyses dans ses journaux et tranches d'information. L'Europe est aussi au coeur de trois magazines d'approfondissement : « Accents d'Europe », « Carrefour de l'Europe », « Ici l'Europe ».

À ce titre, elle devrait être diffusée à Strasbourg, siège du Conseil de l'Europe, de la Cour européenne des droits de l'homme, du Parlement européen, de l'état-major du corps européen, du médiateur de l'Union européenne, mais aussi de divers organismes de coopération internationale et, bientôt, transformée en eurométropole. Que RFI émette à Strasbourg serait une reconnaissance supplémentaire du caractère international de la ville.

Le 11 juillet 2013, je vous avais adressé une question écrite à ce sujet, et une relance en décembre de la même année. Depuis, France Médias Monde a signé une convention avec l'État le 9 avril 2014, qui prévoit une plus large diffusion en France, en particulier à Strasbourg, Lyon, Marseille. Où en est-on pour Strasbourg ?

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires .  - Je vous prie d'excuser l'absence de la ministre de la culture ce matin. Le Gouvernement est très attaché à la promotion de la culture européenne dans nos médias. C'est pourquoi le décret du 21 janvier 2014 autorise France Médias Monde à diffuser RFI à Strasbourg. Reste qu'il n'existe pas de fréquence disponible à Strasbourg, sans parler des problèmes d'interférences du fait de sa proximité avec l'Allemagne. De plus, alors que le budget est contraint, cet élargissement de la diffusion de RFI à Strasbourg n'apparaît pas prioritaire et devrait se faire par redéploiement, en attendant une diffusion sur la radio numérique terrestre....

M. Roland Ries.  - Merci de cette réponse, même si elle n'est pas totalement satisfaisante puisque vous me renvoyez à des lendemains technologiques meilleurs. Je n'aurais pas eu à poser cette question orale si l'on avait répondu à ma question écrite. Je compte sur vous pour transmettre à qui de droit.

La Poste et le livre

M. Joël Guerriau .  - Dans sa démarche de valorisation et de préservation de la lecture et de la culture, l'État a mené diverses actions de soutien à la filière du livre dont certaines bien connues, comme la loi du 10 août 1981 relative au prix du livre.

Parmi ces mesures, La Poste S.A. a proposé un service spécifique pour les éditeurs et libraires appelé « Sac de livres », afin d'expédier des colis de livres à tarifs préférentiels. Malheureusement les bureaux de poste, bien souvent, ne connaissent pas l'existence de cette offre. À croire que La Poste S.A. met tout en oeuvre pour que ses clients n'utilisent pas ce service. Les témoignages sont nombreux : malgré le strict respect des consignes et des précautions supplémentaires, certains sacs de livres n'arrivent jamais à destination.

La valeur des colis s'élève parfois à plusieurs centaines d'euros. Même avec un suivi de type Colissimo, l'indemnisation n'est pas garantie à hauteur du préjudice. En somme, La Poste se fait payer pour un service qu'elle rendra peut-être et ne peut en aucun cas garantir.

Le ministère peut-il obtenir de La Poste une amélioration de ce service ?

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires .  - Je vous prie à nouveau d'excuser l'absence de la ministre de la culture. Les dysfonctionnements constatés au service « Sac de livres » semblent procéder d'un manque de volonté de La Poste. Le Gouvernement se rapprochera d'elle pour lui demander un service garantissant tout le territoire. Plus largement, il faut engager une réflexion sur le marché de la vente à distance des livres, aujourd'hui fortement concurrencé, alors que nos éditeurs et libraires sont restés attachés à l'opérateur historique.

Nous sommes très attachés à la préservation de la diversité éditoriale et des librairies indépendantes.

M. Joël Guerriau.  - Il faut absolument mieux informer sur ce service « Sac de livres » et garantir la traçabilité des colis, comme cela existe pour Colissimo, à l'heure où le secteur du livre est si vulnérable.

La séance est suspendue quelques instants.

Apiculture en Languedoc-Roussillon

M. Christian Bourquin .  - Ma question porte sur le sujet, en apparence anodin, des abeilles et, en particulier, sur leur mortalité. Elle est dramatiquement en hausse en raison de l'usage des produits phytosanitaires et de l'invasion du frelon asiatique. Dans mon département des Pyrénées-Orientales, regroupant 226 communes et 400 000 habitants, pas moins de 1 300 ruches ont disparu l'hiver dernier ! Après une année 2013 très difficile, les 3 400 apiculteurs du Languedoc-Roussillon s'apprêtent à vivre une année 2014 encore plus compliquée. Les abeilles, « sentinelles de l'environnement », jouent un rôle capital dans la préservation de la biodiversité ; la production de miel est stratégique pour le Languedoc-Roussillon : 1 500 tonnes et un chiffre d'affaires d'environ 10 millions d'euros. Je compte sur votre ministère pour traiter le problème économique.

Vous avez lancé, monsieur le ministre, un plan de 40 millions - est-ce suffisant ? sont-ils bien répartis ?- et mis en place un comité stratégique de la filière apicole. La fin des abeilles précipitera celle des hommes. Que comptez-vous faire ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Le rôle des abeilles dans la préservation des écosystèmes est incontestable. En février 2013, j'ai lancé un plan doté de 40 millions pour une apiculture durable, afin de structurer la filière, de mener des recherches sur de nouvelles variétés d'abeilles, de préserver leur santé, de lutter contre le frelon asiatique.

La France consomme 40 000 tonnes de miel mais n'en produit que 17 000 : c'est inacceptable quand nous avons tout pour réussir. Dans le midi, le taux de mortalité des abeilles atteint des sommets. Au vu d'un rapport de l'Anses, j'ai donné des directives afin que l'épandage des produits phytosanitaires ait lieu le soir plutôt que le matin, pour préserver les abeilles qui suivent le soleil. Je vais présenter tout à l'heure un plan agrobiologique pour réduire la fréquence des traitements, afin de préserver la biodiversité. Des aides directes peuvent être versées pour reconstituer les essaims perdus. Un grand pays agricole doit être aussi apicole !

Les 40 millions, on ne les voit pas directement mais ils sont là, pour moderniser la filière.

M. Christian Bourquin.  - Vos ambitions sont louables. Sans vouloir accuser personne, force est de constater, dans notre département frontalier, que des produits phytosanitaires nuisibles sont commercialisés en Espagne et qu'il suffit de traverser la frontière pour se les procurer.

PAC et protéagineux

M. Yves Daudigny .  - J'attire votre attention sur l'impact des critères d'attribution retenus par la France pour les aides de la politique agricole commune (PAC) à la filière des protéagineux. Il a été décidé d'orienter l'enveloppe « protéagineux-luzerne déshydratée » vers le soutien à l'élevage, en excluant les débouchés qui ne relèvent pas de la nutrition animale : nutrition humaine, cosmétologie, pharmacie ou encore chimie du végétal. Ainsi, lorsqu'un producteur vend à un acheteur autre qu'un éleveur, le prix se trouve bien souvent majoré de l'aide qu'il ne peut percevoir. L'acquéreur subit donc une charge nouvelle qui pourrait menacer les emplois du secteur. Il peut rechercher des approvisionnements hors de la zone d'application de la PAC, et notamment au Canada, producteur majeur de pois, ce qui fragilise notre production importante dans mon département, à proximité de Vic sur Aisne.

L'ensemble de la production de pois ne pourrait-elle bénéficier de financements dans le cadre de la PAC, quel que soit son usage final ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Beau département que l'Aisne. Le couplage des aides sur les protéagineux à hauteur de 2 % du total des aides versées sur le premier pilier, que j'ai obtenu dans la réforme de la PAC, vise à limiter les importations de protéines végétales, qui nous rendent très dépendants vis-à-vis de l'Amérique latine. Comme moi, je suis certain que vous ne voulez pas du soja OGM. D'où ma volonté de construire une filière protéagineuse destinée à l'élevage français pour conquérir notre autonomie fourragère. L'enveloppe de 151 millions d'euros est répartie de la manière suivante : 98 millions d'euros pour les éleveurs, 6 millions pour la production de soja, 4 millions pour les semences légumières et 35 millions pour les protéagineux, luzerne, pois, féveroles. Voyez que nous avons le souci de préserver la filière industrielle. Nous ne pouvons pas continuer à importer autant de protéines fourragères !

M. Yves Daudigny.  - On ne peut que partager vos objectifs stratégiques, mais je me soucie de l'emploi. Je vous invite à visiter le site de Roquette à Montigny dans l'Aisne : vous y constateriez le savoir-faire des employés, mais aussi leurs inquiétudes.

M. Stéphane Le Foll, ministre.  - D'accord !

Abattage de platanes

M. Robert Tropeano .  - Après la mortalité des abeilles, j'évoquerai celle des platanes.

Depuis l'apparition du chancre coloré, en 2006, des milliers de platanes sont abattus dans le sud, y compris au bord du canal du Midi, inscrit au patrimoine de l'Unesco et sur lequel on apprécie tant de naviguer à l'ombre des frondaisons.

Le chancre, champignon microscopique, a déjà tué des milliers de platanes et en menace encore. Les abattages systématiques sont un véritable crève-coeur. Vaccin, traitement chimique, micro-injections de produits phytosanitaires n'ont pas enrayé l'épidémie. Plusieurs plans de « platanors », une variété censée résister au chancre, sont déjà morts. Récemment, des protocoles d'essais thérapeutiques ont été soumis à l'approbation du ministère. Que faire pour sauver ces platanes centenaires ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Vous avez parlé de l'abattage des platanes. Je me souviens de celui des ormes, dans le canton de Loué, où l'espèce a pratiquement disparu... C'est toujours un crève-coeur, en effet. Que faire d'autre ? Des expérimentations sont prévues avec la micro-injection de fongicides ; le protocole est en cours d'examen par l'Anses. Dès qu'il sera autorisé, je le ferai mettre en oeuvre au plus vite. Comptez sur moi.

M. Robert Tropeano.  - Les platanes, qui ont remplacé les ormes morts il y a plus de cent ans dans ma commune, sont aujourd'hui malades... L'abattage défigure les paysages et affecte le tourisme. Il faut trouver une solution rapide.

Avenir des étalons nationaux

M. Ambroise Dupont .  - Au début de l'année 2010, les Haras nationaux et l'École nationale d'équitation ont fusionné en un établissement public administratif, l'Institut français du cheval et de l'équitation (IFCE), recentré sur des missions de service public. Un groupement d'intérêt public, France-Haras, a été chargé des missions techniques relevant du domaine concurrentiel et nécessitant une implication de l'ensemble des professionnels de la filière.

La création de France-Haras, dans lequel l'État reste majoritaire, avait pour but d'accompagner le transfert de l'étalonnage public vers le secteur privé. Après quelques années de fonctionnement difficile, il a été décidé de mettre un terme aux activités de ce GIP et de céder ses actifs. Il a ainsi été proposé de vendre aux enchères publiques le parc des étalons nationaux dont la qualité de reproducteurs est pourtant démontrée. Le patrimoine génétique français serait ainsi disséminé au-delà de nos frontières.

Pourtant, des alternatives aux enchères existent, portées par la plupart des représentants de la filière : réaffectation des étalons propriété de l'État à l'IFCE puis plan de reprise par les associations nationales de race des étalons qui présentent un intérêt génétique pour l'élevage français ; seuls les étalons sans intérêt majeur seraient proposés à la vente. Ce projet viable aurait, en outre, l'avantage de ne créer aucune charge pour l'État, tous les frais étant assumés par les repreneurs moyennant le reversement à l'IFCE d'un pourcentage sur le chiffre d'affaires de la génétique encaissé. Pour les étalons de trait, le transfert aux associations nationales de races est déjà engagé.

Pourquoi ne pas mettre en place avec les services du ministère de l'économie et des finances un groupe de travail chargé de l'avenir des étalons nationaux ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Je sais votre attachement à la filière et votre souci de préserver le modèle français.

Il a en effet été décidé de procéder à la vente des étalons selon la procédure d'enchères publiques. Une simple mise à disposition, sans mise en concurrence, serait considérée au regard du droit européen comme une aide d'État illégale.

Je rappelle que la décision du retrait des haras nationaux de l'activité d'étalonnage public a été prise en 2009, France-Haras devant accompagner le retrait progressif de l'État. Mais la reprise collective par les professionnels n'a pu aboutir, ceux-ci ne l'ayant pas jugé pertinente lors du conseil d'administration du GIP le 20 juin 2013. Le rôle qu'auraient eu les éleveurs dans la valorisation de ces étalons n'est pas un argument recevable, d'abord parce que l'offre d'étalonnage public ne s'est jamais limitée à de jeunes animaux ou des animaux dont la qualité aurait été totalement inconnue ; ensuite parce que le prix d'une saillie prend toujours en compte la notoriété de l'individu ou la qualité de sa production ; enfin parce que l'utilisation d'un bien ou d'un service ne donne aucun droit sur son capital. J'ajoute que le parallèle avec les chevaux de trait n'est pas pertinent : il s'agit en l'espèce d'une vente et non d'une location. Cela dit, j'accepte volontiers de discuter avec vous de la question. Organisons une réunion.

M. Ambroise Dupont.  - Merci de cette proposition. Les professionnels ont refusé de participer au vote sur le sort des étalons. Le groupe d'études « Cheval » du Sénat les a reçus. Le transfert des étalons de trait est déjà engagé : il n'y a donc pas de difficulté à transférer les étalons de sport et de course aux associations nationales de race.

À l'heure où nous défendons nos productions françaises, ne dispersons pas notre patrimoine génétique en vendant nos meilleurs reproducteurs à l'étranger.

Distillation des sous-produits de la vinification

M. Jacques Berthou .  - Tous les viticulteurs qui produisent plus de 25 hectolitres doivent distiller les sous-produits de la vinification. Dans l'Ain, vingt communes peuvent détruire les marcs mais reste les bourbes et les lies. Or dans ce département, il n'existe plus qu'un seul distillateur ambulant et plus de distillerie. Les viticulteurs, pour se conformer à la loi, doivent se rendre dans le Rhône, la Saône-et-Loire et la Côte-d'Or, avec les difficultés et coûts correspondants.

Les viticulteurs de l'Ain ne pourraient-ils être exemptés de cette obligation comme le sont ceux de Haute-Savoie ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Question complexe et technique qui touche à l'Europe. L'expérimentation menée en 2012, ainsi que l'analyse juridique et technique menée par mes services, ont montré la nécessité de faire évoluer la réglementation. Tout ce méthane, c'est un potentiel énergétique que nous ne pouvons plus gaspiller. Les viticulteurs de l'Ain peuvent choisir d'autres voies que la distillation : la méthanisation, le compostage, l'épandage. À eux de décider laquelle est la plus adaptée. Le nouveau cadre national doit s'appliquer dès les vendanges de 2014 : j'y veillerai. Merci de cette question que je dois traiter avec celle des aides au moult concentré.

M. Jacques Berthou.  - Je me réjouis de cette réponse. Il faut des solutions adaptées à chaque territoire. Le problème ne se pose pas dans l'Ain comme en Saône-et-Loire, département que le président Courtois connait bien...

La séance, suspendue à 11 h 5, reprend à 11 h 20.

LGV Arras-Paris

Mme Catherine Génisson .  - Merci, monsieur le ministre, d'être présent en cette période difficile de grève. Ma question porte sur la décision de la SNCF de réduire le cadencement de la LGV Paris-Arras et de supprimer les trains de 17 h 22 et de 18 h 22, soit au moment de la migration pendulaire des travailleurs.

Je veux arguer de la très grande mobilisation des collectifs d'usagers et des élus locaux, au-delà de leurs engagements partisans. Elle se justifie quand la qualité de la mobilité est en jeu. Les rencontres avec la direction de la SNCF n'ont pas abouti.

Le Nord-Pas-de-Calais est une véritable région ferroviaire, avec les industries ferroviaires, le centre d'essais ferroviaire, le lancement du pôle d'excellence ferroviaire régional. Ce projet est incohérent, compte tenu des choix stratégiques entrepris pour réaliser la transition socio-économique de la région : le master-plan régional de la troisième révolution industrielle, région dite « des musées ».

La réorganisation envisagée serait néfaste pour l'attractivité de l'Arrageois et pour toute la région. Que compte faire le Gouvernement ?

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - La SNCF, en supprimant deux TGV à destination d'Arras, veut dégager des capacités pour desservir la Picardie, où le trafic a augmenté de 35 % en dix ans ; la gare du Nord est saturée. Des rames jumelées sont prévues sur Arras, de sorte que la capacité de transport sera maintenue. J'entends cependant vos inquiétudes. La SNCF doit faire évoluer son projet en concertation avec les élus du Nord-Pas-de-Calais et de Picardie, je l'ai dit à plusieurs reprises à son président. Il importe que la qualité de service soit préservée. La réflexion doit être réaliste et fondée sur les taux de fréquentation. Les élus se réunissent cet après-midi même.

Mme Catherine Génisson.  - Merci de votre détermination à trouver une solution satisfaisante. Doubler d'autres trains nuirait à la qualité du service. Il faut trouver des solutions qui satisfassent toutes les régions et permettent aussi de désengorger la gare du Nord.

Taxe « granulats »

Mme Sophie Primas .  - La loi de finances pour 2012 a supprimé la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) dite « granulats », prévue à l'article 139 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.

Ce dispositif visait au prélèvement sur les recettes de l'État d'un tiers de la taxe, principalement au profit des communes directement impactées par les activités liées à l'extraction des matériaux issus de carrières. Il a été considéré que ce mécanisme ne pouvait être mis en oeuvre en l'état, compte tenu de la difficulté de quantifier les risques et inconvénients -transformation du paysage, poussières, passage de camions, dévalorisation des biens- induits par la proximité d'un site d'extraction. Dans la vallée de la Seine, plus particulièrement dans les Yvelines, où le sol est propice à l'extraction, les communes sont dans une grande situation de détresse. Comment instaurer un partage plus juste de la fiscalité ?

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Madame la ministre de l'écologie, retenue, m'a demandé de vous répondre. La taxe « granulats » visait à compenser les nuisances produites par les carrières et à faciliter leur acceptation par la population. Elle concentrait le dispositif sur les communes d'accueil des sites ; les autres devaient justifier des inconvénients et risques liés auxquels elles étaient soumises. Une évaluation et une quantification particulièrement difficiles... D'où sa suppression par la loi de finances pour 2012.

Si aucune évolution n'est envisagée à court terme, votre interpellation trouvera un prolongement dans le cadre de la mise en oeuvre de la stratégie nationale pour la gestion durable des granulats terrestres et marins.

Mme Sophie Primas.  - Merci de cette réponse : les nuisances, difficiles à évaluer, n'en sont pas moins réelles : voyez la destruction des paysages ! Je suis prête à participer à la réflexion que lance le Gouvernement, si importante pour les Yvelines.

La séance, suspendue à 11 h 35, reprend à 11 h 50.

Centre libre d'enseignement supérieur international

Mme Laurence Cohen .  - En novembre 2012, l'université portugaise privée « Fernando Pessoa » ouvrait une antenne consacrée à la santé -pharmacie, odontologie et orthophonie- près de Toulon et une nouvelle antenne en septembre dernier à Béziers ; une autre est prévue en Ile-de-France.

Rebaptisées, entre temps, centres libres d'enseignement supérieur international (Clesi), ces structures posent problème. Premièrement, alors que l'accès aux universités publiques de santé se fait sur concours, l'entrée au Clesi se fait uniquement moyennant paiement de frais d'inscription exorbitants autour de 9 500 euros : sélection par l'argent qui met à mal le principe d'égal accès de toutes et tous à l'enseignement supérieur. Les étudiants aisés qui ont échoué au concours sont la cible principale. On peut s'inquiéter de la qualité des formations...

Deuxièmement, le Clesi contourne le principe même du numerus clausus qui régit les professions de santé en France, puisqu'il ne délivre pas de diplôme en France.

La loi du 22 juillet 2013 encadre désormais de manière stricte les centres privés d'enseignement supérieur. Or, le Clesi, en invoquant le principe de non-rétroactivité de la loi, continue de délivrer ses formations hors de l'accord des tutelles ministérielles.

Avant le dernier remaniement ministériel, un décret était en cours de publication pour mettre en place une procédure d'agrément des formations de médecine, de pharmacie, d'odontologie, de maïeutique et des formations paramédicales dispensées au sein d'un établissement d'enseignement supérieur privé. Quand sera-t-il publié ? Comptez-vous fermer le Clesi et empêcher le développement de ce genre de structures ? Enfin, quelles solutions pour les étudiants qui sont les victimes de cette situation ?

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Merci pour cette question. J'avais demandé aux rectrices, dès l'ouverture de ces antennes, de déposer une plainte auprès du procureur de la République pour usage abusif du mot université, absence de dépôt de la déclaration préalable et lacunes dans l'information offerte aux étudiants -à qui il était dissimulé qu'ils devraient suivre une partie de leurs études au Portugal.

Depuis le centre a changé de nom pour faire disparaître toute référence à « l'université ». Mais ce cas a révélé les faiblesses de notre procédure d'accréditation : d'où le nouvel article L. 731-6-1 du code de l'éducation, qui impose la signature d'une convention avec un établissement de santé et une université. Les modalités pédagogiques devront satisfaire aux obligations fixées par un arrêté conjoint des ministères de l'enseignement supérieur et de la santé, qui sera publié cette semaine. Il ménagera un délai de six mois pour que les établissements se mettent en conformité. Si ce n'est pas le cas, le recteur pourra demander, au nom du ministère, leur fermeture. Tout est fait pour protéger les étudiants victimes, ils pourront se réinscrire dans les universités françaises, à qui il appartiendra de valider ou non leurs acquis.

Cette question pose plus largement celle du numerus clausus en santé. Une expérimentation est en cours pour diversifier l'accès à ces professions. Mme Touraine et moi-même proposerons la création d'une licence pluriprofessionnelle en santé et des Assises nationales, d'ici fin 2014, pour répondre au défi de la démographie médicale.

Mme Laurence Cohen.  - Merci de votre détermination. J'avais reçu les organisations syndicales au nom de la commission des affaires sociales, elles sont très inquiètes. Votre arrêté est de nature à rassurer. La situation des étudiants piégés devra être suivie avec attention. Tout ne peut être dit dans un délai si court, vos propos sur la licence pluriprofessionnelle me mettent en appétit pour la suite.

RASED

M. Michel Billout .  - De 2008 à 2012, la politique de démantèlement du service public d'éducation conduite par le Gouvernement Fillon a mis à mal les RASED, avec plus de 5 000 postes d'enseignants spécialisés supprimés -134 dans mon département de Seine-et-Marne.

L'affaiblissement de ce dispositif est d'autant plus grave que les RASED ont pour mission de fournir des aides spécialisées à des élèves en difficulté dans les classes ordinaires des écoles primaires. En quatre ans, la Seine-et-Marne a perdu 75 % des postes de maîtres « G » -en charge des difficultés d'adaptation à l'école-, et 40 % des maîtres « E » -en charge des difficultés d'apprentissage. Les secteurs ruraux, nombreux en Seine-et-Marne, ne sont plus couverts.

Certes, à la rentrée de 2013, une dotation de 405 postes pour 6 064 élèves supplémentaires a amorcé un premier rattrapage indispensable. Mais avec une dotation de 380 postes pour 6 646 élèves supplémentaires prévus, la rentrée de 2014 s'effectuera sur les bases d'une dotation moins importante qu'en 2013. Est-ce pour cette raison qu'il n'est prévu ni départ en formation « E » et « G », ni création de postes en Seine-et-Marne, département où le taux d'encadrement est pourtant l'un des plus faibles de France ? Et 22 postes de maître option « E » ne sont pas pourvus. À titre de comparaison, on dénombre treize départs en formation option « E » et dix en option « G » en Seine-Saint-Denis...

Cette nouvelle dégradation est en complète opposition avec les orientations données par le ministre, dans un courrier adressé le 29 janvier 2014. Le Gouvernement entend-il redonner aux RASED les moyens nécessaires ?

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Le ministre de l'éducation nationale vous prie d'excuser son absence. Depuis la rentrée 2012, le Gouvernement a créé 22 000 postes d'enseignants, et renforcé les RASED dans les secteurs où les besoins étaient les plus importants. L'effort sera poursuivi. Une circulaire est en cours de préparation sur les modalités de fonctionnement des réseaux et la définition des missions de leurs membres.

Plus largement, la formation des enseignants reprend avec la création des écoles supérieures de l'éducation et du professorat ; ils seront mieux formés à prendre en charge certaines des difficultés des élèves.

En Seine-et-Marne, depuis la rentrée 2012, chacune des 24 circonscriptions est dotée de 4 à 5 psychologues scolaires, de 3 à 4 enseignants spécialisés option « E » et de 2 enseignants spécialisés option « G ». Malgré la présence de 165 titulaires, 26 postes restent vacants. À la rentrée 2014, une nouvelle circonscription sera créée, dotée d'un poste « E » et d'un autre de psychologue.

M. Michel Billout.  - Cette réponse me laisse un peu sur ma faim : je prends acte que le Gouvernement a inversé la tendance, mais il ne s'agit que de rattraper le retard. Les postes créés ne sont pas pourvus car l'on doute, au sein de la profession, du soutien du Gouvernement aux RASED. Il faut redonner confiance sans quoi on constatera des carences, année après année. Les enfants en difficulté en seront les premières victimes.

Lutte contre le Sida à Mayotte

M. Thani Mohamed Soilihi .  - À Mayotte, il n'existe pas d'actions médiatiques d'envergure sur la prévention du VIH-Sida et, plus globalement, des infections sexuellement transmissibles (IST). L'ignorance, le tabou et le poids de la stigmatisation n'incitent ni la population à se protéger ni les personnes infectées à se faire dépister ou soigner. Si les données épidémiologiques sont très partielles, la prévalence du VIH, favorisée par les pressions démographiques et migratoires, serait sous-évaluée.

De plus, les personnes vivant avec le VIH ne bénéficient pas de la même qualité de soins qu'en France métropolitaine ou à La Réunion. Il n'existe pas de médecins spécialistes, pas d'hôpitaux de jour, pas d'éducation thérapeutique, pas de prise en charge pluridisciplinaire. La seule association mahoraise recensée ne peut pas répondre à toutes les demandes d'accompagnement formulées par le service infectieux.

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Je vous prie d'excuser l'absence de Mme Touraine. 160 patients souffrant du Sida sont recensés à Mayotte, leur prise en charge est hospitalière ; la prévalence est de 11 à 12 pour 100 000 habitants. Des actions d'information sont menées par la Croix-Rouge avec la distribution de kits. La prise en charge hospitalière est identique à Mayotte, en France métropolitaine et à La Réunion. Certes, cela ne suffit pas. D'où l'accent mis sur la lutte contre le Sida par l'ARS Océan indien. Elle va installer prochainement une équipe « études et statistiques » à Mayotte et oeuvré à la création d'un Comité de coordination régionale de la lutte contre le VIH Océan Indien, qui favorisera les échanges de pratiques inter-iles.

L'ARS et le vice-rectorat ont d'autre part signé une convention le 25 avril 2014 qui assurera dès la rentrée 2014 une coordination des actions de prévention en milieu scolaire. Un projet de convention avec les autorités coutumières sur leur participation active à des messages de prévention chaque semaine, y compris à la mosquée, est en cours d'élaboration. Enfin, deux associations ont demandé une habilitation pour mettre en oeuvre un dépistage ciblé auprès des populations à risque.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Je me réjouis de ces annonces. Elles démontrent que l'on ne consacre pas les mêmes moyens à la lutte contre le Sida en outre-mer qu'en France et en Navarre.

Élections départementales dans la petite couronne parisienne

Mme Catherine Procaccia .  - Depuis que j'ai déposé cette question, il y a deux mois, les annonces se succèdent : les départements de la petite couronne ne seraient pas seuls appelés à fusionner, contrairement à ce que le président de la République avait d'abord annoncés ; tous les départements disparaîtraient à l'horizon 2020. On attend la prochaine loi de décentralisation. Reste que les élus de ces trois départements aimeraient sortir de l'expectative.

Le Gouvernement a-t-il prévu le maintien des élections départementales en 2015 ou leur report ? Et les conseillers départementaux seront-ils élus pour six ans ou leur mandat prendra-t-il fin dès l'application d'un texte de loi supprimant ces trois départements ? Enfin, est-il prévu de proroger leur mandat au 1er janvier 2016, date de naissance officielle de la métropole de Paris ?

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Votre question est d'actualité -et un peu prématurée. Le ministre de l'intérieur, retenu ce matin, présentera demain en Conseil des ministres, avec la ministre en charge de la décentralisation, deux projets de loi pour une organisation territoriale rationnalisée et modernisée autour de 14 régions agrandies et plus efficaces. Par parenthèse, les regroupements universitaires avaient préfiguré ces regroupements territoriaux et en anticipent peut-être d'autres dans l'ouest... Pour tenir compte de la nouvelle délimitation des régions, effective en janvier 2016, la date des élections départementales et régionales sera fixée à la fin de 2015.

Nous ne voulons pas de bricolage institutionnel mais modifier en profondeur, progressivement, notre organisation territoriale, dans la concertation et l'accompagnement. Cette réforme est à la fois radicale, ambitieuse et réfléchie. Elle est marquée du sceau de l'efficacité, de la solidarité et de l'équilibre. Je suis persuadée qu'elle saura trouver, au-delà des bancs de la majorité, des défenseurs honnêtes qui sauront prendre le train de la modernité et de la réussite au service de nos concitoyens. Je ne doute pas, madame la sénatrice, que vous en serez.

Mme Catherine Procaccia.  - Nous verrons bien si nous aurons des réponses demain, 18 juin, jour si important pour nous, gaullistes. Nous en avons bien besoin, ne serait-ce que pour engager nos dépenses en conformité avec les règles des campagnes électorales. En Ile-de-France, où l'on s'apprête à créer la métropole du Grand Paris et des intercommunalités de 300 000 habitants, il est temps que nous y voyons clair : quand les départements de la petite couronne seront-ils supprimés ? En 2016 ? En 2020 ? Pour combien de temps les conseillers départementaux élus en 2015 le seront-ils ? Trois mois ? Nous attendons des réponses.

La séance est suspendue à midi vingt-cinq.

présidence de M. Charles Guené, vice-président

La séance reprend à 14 35.