Intercommunalités et représentation des communes (Deuxième lecture)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, autorisant l'accord local de répartition des sièges de conseiller communautaire.

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale .  - Oui, c'est avec plaisir que je reviens devant vous pour l'examen en deuxième lecture de cette proposition de loi. Cette séance marquera la fin de la remise en cause des conseils communautaires constitués de bonne foi, mais remis en cause pour des raisons de conformité au droit constitutionnel sur lesquelles je ne reviens pas.

Votre proposition de loi a été adoptée par l'Assemblée nationale le 18 décembre avec quelques modifications pour tenir compte de l'avis du Conseil d'État et quelques précisions élaborées en bonne intelligence entre le rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Dussopt et M. Richard. Texte co-élaboré par les deux assemblées, texte transpartisan qui reçoit l'aval total du gouvernement : c'est assez rare pour être remarqué. Votre rapporteur en propose l'adoption sans modification.

Il faudra sans doute envisager une saisine du Conseil constitutionnel en application de l'article 61 de la Constitution, pour sécuriser la solution ainsi trouvée, en cas de future QPC. Merci à tous les groupes : ce texte était attendu par les élus locaux. (Applaudissements)

Mme Catherine Troendlé, rapporteur de la commission des lois .  - Adoptée le 18 décembre 2014 par l'Assemblée nationale, cette proposition de loi vise à remédier à la censure par le Conseil constitutionnel, le 20 juin 2014, des dispositions introduites par la loi du 16 décembre 2010, permettant aux communes membres d'une communauté de communes ou d'agglomération de répartir entre elles, par un accord conclu à la majorité qualifiée, les sièges de conseillers communautaires en « tenant compte » de leurs populations respectives. La proposition de loi réintroduit la faculté d'un accord, plus strictement contraint, pour respecter la décision du Conseil.

En première lecture, le Sénat s'est attaché à renforcer l'encadrement de l'accord local proposé pour resserrer les écarts à la proportionnelle démographique qui en résultent, au regard des limites admises par le Conseil constitutionnel dans sa jurisprudence sur le respect du principe d'égalité devant le suffrage.

L'Assemblée nationale, suivant son rapporteur, M. Dussopt, a poursuivi la démarche sénatoriale. Entre-temps, le Conseil d'État a été saisi par le Premier ministre. Son avis, rendu le 20 novembre 2014 et transmis à votre rapporteur par le gouvernement, a conduit le rapporteur de l'Assemblée « à récrire l'article premier afin d'intégrer l'essentiel des réserves admises par le Conseil d'État ».

La proposition de loi a été complétée par les députés pour « sécuriser juridiquement la possibilité de recourir à un accord local en cas d'annulation » juridictionnelle de la répartition antérieure des sièges.

Notre commission a modifié sur trois points l'article premier pour exclure de l'attribution autorisée d'un siège supplémentaire par rapport à l'effectif qui résulterait de l'application de la proportionnelle démographique les communes qui ont bénéficié de la garantie du siège de droit pour toute commune ; attribuer à ces communes un siège supplémentaire au cas où leur représentation serait inférieure de plus d'un cinquième à la proportionnelle démographique ; apprécier la sous-représentation d'une commune par sa part dans la population totale de l'intercommunalité. En séance, nous avions adopté un amendement de M. Joyandet pour définir l'écart autorisé par le tunnel de 20 % permis par la jurisprudence constitutionnelle.

Ce travail a été poursuivi et complété par l'Assemblée nationale. Au terme de ses travaux, un écart à la limite des 20 % serait autorisé lorsque la répartition des sièges par application des principes légaux, notamment l'attribution d'un siège au moins à chaque commune et l'interdiction pour l'une d'entre elles de détenir plus de la moitié des sièges, conduirait à un écart de représentation d'une commune supérieur à 20 % de la moyenne. Cette dérogation ne serait possible que si l'accord maintenait ou réduisait cet écart.

Lorsque, d'autre part, par application de la représentation proportionnelle à la population, une commune obtiendrait un siège de conseiller communautaire, elle pourrait en obtenir un second en vertu de l'accord pour « favoriser une représentation plurielle et paritaire de chacune des communes au sein de l'organe délibérant ». Le rapporteur de l'Assemblée nationale précise que ce tempérament lui a été suggéré par l'auteur de la proposition de loi, Alain Richard.

L'Assemblée nationale a renforcé la condition de majorité qualifiée exigée pour l'adoption de l'accord local en y intégrant le conseil municipal de la commune la plus peuplée, si elle représente plus du quart de la population totale. Elle a étendu les principes retenus pour encadrer l'accord local à la faculté, aujourd'hui offerte aux communes, de créer et répartir un volant de sièges au plus égal à 10 % du nombre total de sièges résultant de l'application des règles légales. Pour les communautés de communes et d'agglomération, ce dispositif est ouvert aux communes qui n'auraient pas conclu d'accord local. Cette décision est prise à la majorité qualifiée. La répartition des sièges supplémentaires serait soumise aux mêmes règles que celles retenues pour encadrer l'accord local en ce qui concerne les écarts de représentation à la moyenne.

L'article premier bis fixe les modalités de désignation des conseillers communautaires entre deux renouvellements des conseils municipaux, en cas d'annulation de la composition d'un organe délibérant d'un EPCI à fiscalité propre. Ce dispositif complète l'article L. 5211-6-2 du code général des collectivités territoriales, pour y intégrer expressément l'hypothèse de l'annulation par le juge administratif de la répartition des sièges au sein du conseil communautaire.

Les députés ont adopté un amendement du gouvernement, destiné à assouplir la constitution des listes de conseillers municipaux non titulaires d'un mandat communautaire pour pourvoir les sièges supplémentaires attribués à une commune par rapport au nombre qu'elle détenait lors du dernier renouvellement.

Désormais, les communes auraient la possibilité de constituer des listes incomplètes. Dans ce cas, les sièges non pourvus seraient attribués à la liste qui aurait obtenu la plus forte moyenne suivante. Cette novation permettra à tous de constituer une liste, quand bien même le nombre de candidats serait inférieur au nombre de sièges à pourvoir.

L'article 2 vise à permettre aux intercommunalités concernées de recourir à l'accord local dans sa version rénovée par le présent texte pendant une période de six mois à compter de sa promulgation.

Le Sénat en avait adopté le principe sous réserve de clarification rédactionnelle. Le dispositif a été complété par la commission des lois de l'Assemblée nationale puis modifié, en séance, par l'adoption d'un amendement du gouvernement.

Ainsi, en cas de renouvellement intégral ou partiel du conseil municipal d'une commune membre d'un EPCI ayant fait l'objet d'un accord local avant le 20 juin 2014, il serait procédé à une nouvelle détermination du nombre et de la répartition des sièges communautaires, dans un délai de deux mois. On fixe ainsi la nouvelle répartition et le nombre de conseillers communautaires à élire avant le début des opérations électorales, lesquelles doivent être organisées dans les trois mois après l'annulation définitive en application de l'article L. 251 du code électoral.

Monsieur le ministre, pourriez-vous préciser les conséquences des modifications de l'exécutif des communes membres sur l'exécutif de l'intercommunalité ?

Nous nous sommes efforcés de préserver dans les meilleures conditions de sécurité juridique la faculté d'un accord local pour faciliter le consensus intercommunal. Je vous propose d'adopter cette proposition de loi sans modification, pour apporter une réponse rapide aux attentes des EPCI. (Applaudissements)

Mme Jacqueline Gourault .  - Pour répartir dans une intercommunalité le nombre de sièges, nous avions depuis la loi de 2010 deux solutions : soit appliquer un tableau établissant le nombre de sièges à la proportionnelle de la population, soit passer un accord « en tenant compte de la population ».

C'est ce qui s'est passé dans une intercommunalité de mon département, la communauté des Rivières. Il y avait une majorité qualifiée contre la commune de Salbris. Le Conseil constitutionnel, après la question prioritaire de constitutionnalité déposée par Salbris, a jugé que la répartition des sièges était « manifestement disproportionnée » par rapport à la réalité de la population des communes membres. Le Conseil constitutionnel a donc considéré que cette décision méconnaissait le principe d'égalité devant le suffrage et devait être déclarée contraire à la Constitution.

La décision du Conseil constitutionnel n'a pas d'effets que pour Salbris puisque 90 % des communes de France ont passé un accord. Quand le conseil municipal d'au moins une des communes membres était renouvelé, il fallait re-répartir les sièges. Il fallait donc trouver une solution. Je remercie Alain Richard et Jean-Pierre Sueur d'avoir proposé cette modification qui soulagera certaines situations.

Sur la modification des conditions de majorité, il y a une sorte de droit de veto de la commune centre lorsqu'elle représente plus du quart de la population totale de l'intercommunalité.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Égalité !

Mme Jacqueline Gourault.  - Je suis pour un tel droit de veto. On ne peut faire d'intercommunalité sans l'accord de la commune centre, ni sans les communes plus petites.

M. Pierre-Yves Collombat.  - C'est cela, oui !

Mme Jacqueline Gourault.  - L'accord se fait non plus « en tenant compte de », mais « en fonction de la population ». C'est un progrès.

L'accord local sera encadré : chaque commune dispose au moins d'un siège, comme avant ; aucune commune ne pourra plus détenir plus de la moitié des sièges ; le nombre de sièges détenus par une commune pourra être majoré d'un tiers. Cela demeure. Toutefois, l'ensemble des sièges détenus par chaque commune ne pourra s'écarter du tunnel de plus ou moins 20 %, sauf lorsque la répartition appliquée en cas de désaccord, selon le tableau, s'écarterait de plus de 20 % de celle découlant de l'accord, ou lorsque la plus forte moyenne contribuerait à l'attribution d'un siège.

Bref, soit l'on applique le tableau et il y a des endroits où cela marche...

Mme Jacqueline Gourault.  - ... soit on passe un accord « en fonction de la population » et il doit respecter le tunnel des 20 %.

Le groupe UDI-UC est ravi de voter cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs écologistes et UDI-UC)

présidence de Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente

M. Alain Richard .  - Je rappelle que l'intention à l'origine de cette proposition de loi était palliative, réparatrice. Il s'agit de corriger des écarts de population de 1 à 1,5, ce que traduit le tunnel de plus ou moins 20 %. Il m'a semblé que l'on pouvait rétablir les conditions d'un accord local souhaité par la majorité des intercommunalités.

Cette proposition de loi a donc tenté, en interprétant la jurisprudence du Conseil constitutionnel, d'ouvrir un peu la possibilité d'écart de représentation. Le Conseil a énoncé en 1995 de façon précise ce que doit être la représentation des communes dans une communauté d'agglomération. La loi de 2010 a pris en compte cette décision, tout en rétablissant la possibilité d'un accord local. Nous avons donc désormais la certitude que le Conseil constitutionnel admet la possibilité d'un tel accord.

La question porte maintenant sur l'étendue des écarts. Nous pouvons avoir une différence d'appréciation sur la présence de la ville la plus importante dans l'accord local. Il m'a paru cohérent de l'accepter.

La jurisprudence du Conseil constitutionnel a érigé en principe que l'on doive toujours expliciter le motif d'intérêt général qui justifie que l'on s'écarte de l'égalité des citoyens devant le suffrage. Quand il était question du conseiller territorial, le Conseil a accepté l'idée que tout département devait être représenté par un nombre incompressible de quinze conseillers territoriaux, même si cela créait une surreprésentation de certains départements. On peut appliquer le même raisonnement à une intercommunalité.

Nous avons tenu compte des observations de l'Assemblée nationale. Nous avions dans l'urgence négligé une circonstance : la transformation du conseil communautaire peut se produire ex post. Il y a aussi la « désélection » : des conseillers communautaires ont été élus en 2014 et, à la suite d'accords locaux ou de fusions, il peut y avoir, selon la loi de 2013, une re-désignation des conseillers communautaires par les conseils municipaux.

Il reste à espérer que ce texte stabilisera durablement le droit dans la Constitution des intercommunalités. D'où le projet de saisine du Conseil constitutionnel que j'ai établi. Certains collègues ont fait une saisine « blanche », sans énoncer la moindre considération de droit. Il me semble qu'il vaut mieux argumenter un peu. Cela ne nous garantit pas absolument contre de nouvelles QPC, mais au moins, sur le point central qu'est l'écart de représentation, nous obtiendrons une réponse en droit, que j'espère positive, grâce à laquelle nous éviterons des incertitudes juridiques et des contentieux préjudiciables à la sérénité de la vie locale intercommunale. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Catherine Troendlé, rapporteur.  - Très bien !

M. Jean Desessard .  - Cette proposition de loi sécurise juridiquement les accords, conclus entre les communes composant une intercommunalité, pour les élus qui siègent au conseil communautaire. Elle réintroduit la faculté d'un accord plus restreint et ajoute un peu de souplesse, pour prendre en compte les spécificités locales. Le nombre d'habitants ne peut être le seul critère. Le sentiment de relégation répandu dans une partie de la société française peut trouver sa source dans certaines communes périurbaines. Dans les campagnes, aussi, où les territoires, la faune, la flore, les paysages, doivent être suffisamment représentés au-delà de la seule population humaine.

Les écologistes ont toujours soutenu la montée en puissance des intercommunalités, car elles correspondent à des bassins de vie cohérents. Les dernières élections municipales ont donné lieu à une innovation : le fléchage sur les bulletins de vote des élus appelés à siéger dans les intercommunalités. Pour autant, les écologistes sont favorables à l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires... (Exclamations sur les bancs socialistes et du RDSE) Cela ne signifie pas la fin des communes, (murmures sur les mêmes bancs) auxquelles les citoyens restent attachés. Ils connaissent bien leur maire ; nous souhaitons qu'ils connaissent aussi bien leurs élus communautaires, dès lors que ceux-ci prennent désormais des décisions importantes.

Le groupe écologiste votera cette proposition de loi utile.

Mme Éliane Assassi .  - Cette deuxième lecture nous renvoie à la première lecture. Nous ne sommes pas favorables à l'intercommunalité forcée inscrite dans la loi de 2010, à laquelle nous nous étions opposés. Nous nous étions abstenus sur la proposition de loi d'Alain Richard de 2012. La loi de 2010, nous en avons la confirmation hélas, n'est que la première marche de la suppression du lien des élus communaux avec la population. Pour autant, il fallait tirer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel de juin dernier, qui découle elle-même de l'intercommunalité forcée.

Nous sommes attachés non pas à la représentation des territoires en soi, mais aux pouvoirs des élus locaux représentant les femmes et les hommes qui vivent dans leurs communes. La surreprésentation de la commune centre et l'absence de représentation de certaines communes participe à la technocratisation, à ce sentiment d'éloignement des citoyens, à la rupture du lien entre commune et intercommunalité.

Nous avons refusé l'augmentation du seuil des intercommunalités à 20 000 habitants lors de la discussion de la loi NOTRe. Nous n'avons pas non plus soutenu l'amendement socialiste portant ce seuil à 15 000 habitants. Selon Mme Lebranchu, 623 intercommunalités seront obligées de fusionner dans le premier cas, 475 dans le deuxième. Ce n'est donc pas neutre !

Le groupe CRC votera ce texte pour éviter de corseter la démocratie locale. Un accord local est une bonne chose. Il ne faudrait pas que l'Assemblée nationale revienne sur la décision du Sénat de supprimer le relèvement du seuil des intercommunalités dans la loi NOTRe. Pourquoi voter des lois si c'est pour devoir y revenir un an ou deux après, pour en atténuer les conséquences dénoncées par le Conseil constitutionnel ? (Applaudissements sur les bancs CRC et quelques bancs socialistes)

Mme Catherine Troendlé, rapporteur.  - Très bien ! On est d'accord !

M. Pierre-Yves Collombat .  - S'il restait quelques élus ruraux ignorant que toutes les communes n'étaient pas égales dans l'intercommunalité, le Conseil constitutionnel est là pour le leur rappeler. Son raisonnement vaut qu'on s'y arrête, ce que l'on fait rarement. Lisez donc son quatrième considérant : même si une intercommunalité n'est pas une collectivité territoriale en tant que telle, prise compétence par compétence, elle l'est quand même, puisqu'elle les exerce en lieu et place des communes. C'est ce qu'on appelle, en bon français, un sophisme. Après la validation des comptes de campagne de Jacques Chirac et d'Édouard Balladur, ce monument de l'État de droit mérite que l'on célèbre sa légitimité, tellement supérieure à celle des parlementaires, soumis, on le sait, à tant de pressions. Les « Sages » ne sont pas élus mais ils sont en communication directe avec le Ciel. L'intercommunalité, c'est une commune sans la compétence générale : peu importe, c'est le Conseil constitutionnel qui fait la Constitution et non l'inverse.

Ce texte franchit une nouvelle étape : une commune représentant 25 % de la population d'une intercommunalité pourra faire prévaloir son point de vue, via un véritable droit de veto. Le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale ôte tout intérêt à la proposition de loi. Il aurait été inspiré par le Conseil d'État - c'est ce qu'on appelait, dans la Chine impériale, « gouverner derrière le paravent ». Sans doute vise-t-il aussi à répondre aux intérêts de quelques communes centres, qui redoutaient de se retrouver ligotées, comme Gulliver par les Lilliputiens. Le Sénat doit pourtant sa légitimité à la représentation de chaque portion, fût-elle petite, du territoire. Je ne voterai pas ce texte méprisant pour les petites communes. Il y a des moments où les symboles importent.

M. David Rachline .  - L'enjeu de ce texte est de trouver un équilibre nécessaire entre la proportionnalité démographique et les situations locales particulières, traduit par des accords locaux, qui fondent 90 % des communautés de communes.

Mais le Conseil constitutionnel a considéré que cela méconnaissait le principe d'égalité devant le suffrage, etc. Un territoire n'est pas que l'addition d'un nombre d'habitants, c'est le fruit d'une histoire et d'une géographie. Les auteurs de ce texte en tiennent compte. Le texte qui revient de l'Assemblée nationale renforce la place de la ville-centre. C'est important, car elle joue un rôle clé. Un accord local doit être un outil de souplesse, et je rejoins le rapporteur sur ce point.

Les intercommunalités se sont trop souvent développées de manière locale et anarchique, s'apparentant davantage à de petits arrangements entre amis, plutôt qu'à des regroupements de projets. Je sais de quoi je parle, j'en suis la victime. Je voterai ce texte.

Mme Nicole Duranton .  - Au-delà des mots, il y a des réalités. Le territoire en est une, qui est le coeur de l'identité, le lieu de vie, d'action de nos concitoyens. La décision du Conseil constitutionnel du 20 juin 2014 est apparue comme très dure pour nos territoires ruraux. Si un maire d'une commune rurale ne peut être présent pour siéger au conseil communautaire, personne n'y représentera la ruralité. Tout ira à la ville-centre. Évitons qu'une décision du Conseil constitutionnel ne cristallise la réalité territoriale au profit des seules villes, contre la ruralité. C'est ce que ressentent les maires de l'Eure.

Cette proposition de loi est bienvenue. Le Sénat s'est attaché en première lecture à la proportionnelle démographique. Je me réjouis que l'Assemblée nationale ait poursuivi notre démarche. Je la salue, comme je l'avais fait en tant que maire d'une petite commune de l'Eure. Ce sont des élus locaux qui construisent patiemment, quotidiennement, l'intercommunalité, dans la concertation, pour leurs territoires. Ils sont pris dans un paradoxe, entre une décision constitutionnelle et une réforme territoriale gouvernementale. Un peu de clarté s'impose. Cette proposition de loi va dans le bon sens. Laissons les intentions locales éclore.

J'ai écouté avec attention la position du gouvernement sur la proposition de loi constitutionnelle de Philippe Bas et Gérard Larcher. Où est la cohérence du PS qui n'a de cesse de réduire le débat à une opposition entre réformateurs et conservateurs ? Et qui sont les conservateurs ?

Pourquoi émettre un avis défavorable à ce texte qui prolonge l'esprit de la présente proposition de loi dans la Constitution ? N'est-ce pas réformateur que de sortir, via la Constitution, de la règle réductrice arithmétique ? Au-delà des conservateurs et des réformateurs, il faut en ce temps de crise, du courage politique et je soutiens pour ma part cette proposition de loi. (Applaudissements sur quelques bancs UMP)

M. Cyril Pellevat .  - Cette proposition de loi est attendue par de nombreux EPCI, fragilisés par la décision du Conseil constitutionnel du 20 juin 2014, annulant le principe des accords locaux : plus d'aménagements, adaptés à la situation de chaque territoire, seule demeure l'application de la règle démographique.

Dans mon département, la communauté de communes du Genevois, de 38 000 habitants, avec une ville-centre de 12 000 habitants, ne dispose plus que de 42 conseillers communautaires contre 52 conseillers auparavant. Certes, les 17 communes sont représentées mais deux voient leur nombre de délégués passer de trois à deux et huit d'entre elles n'ont plus qu'un seul délégué.

L'accord local permettrait d'équilibrer la représentation du territoire, de déterminer une gouvernance adaptée. La solidarité ne se mesure pas qu'en termes d'habitants. Il y avait urgence à stabiliser la situation. Le groupe UMP a déposé une proposition de loi allant dans le même sens que celle-ci, je le rappelle : redonner un fondement aux accords locaux tout en les encadrant.

Écoutons les dynamiques locales, ayons confiance dans l'intelligence locale. Je voterai ce texte, car il préserve un peu de démocratie locale. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Pierre-Yves Collombat .  - On ne peut pas faire une intercommunalité contre la ville-centre, nous a-t-on dit, mais on peut désormais la faire contre toutes les autres communes, représentant 75 % de la population. Cherchez l'erreur... Mais ce n'est pas une erreur, c'est le produit d'une volonté. Il me navre qu'elle soit très largement partagée.

L'article premier est adopté, de même que les articles premier bis, premier ter et 2.

L'ensemble de la proposition de loi est définitivement adopté.

Mme la présidente.  - Voici un exemple de navette bicamérale positive !

M. André Vallini, secrétaire d'État.  - Je réponds à la question de Mme le rapporteur : les membres du bureau ayant le mandat de conseiller communautaire perdent leur fonction exécutive en même temps que le président. Pour les vice-présidents, délégués du président, si ce dernier est remplacé, tout le bureau est à renouveler. Un texte du Secrétariat général du ministère de l'intérieur et de la DGCL du 15 juillet dernier est venu préciser la situation après la décision du Conseil constitutionnel : je vous le ferai parvenir.

La séance, suspendue à 17 h 5, reprend à 17 h 10.