Territoires de montagne (Conclusions de la CMP)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.

Discussion générale

M. Cyril Pellevat, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire .  - Après une procédure particulièrement accélérée, nous voici réunis pour adopter les conclusions de la CMP sur le projet de loi Montagne. Je veux d'abord remercier mes collègues rapporteurs pour avis Gérard Bailly, Patricia Morhet-Richaud et Jean-Pierre Vial, ainsi que Patrick Chaize qui a contribué à enrichir le volet numérique, Jean-Yves Roux, président du groupe d'études sur la montagne, et tous les sénateurs ayant participé à nos débats. Merci aussi aux rapporteures de l'Assemblée nationale, Bernadette Laclais et Annie Genevard, qui ont rendu le compromis possible. Nous avons eu des échanges parfois vifs mais constructifs.

Merci à vous enfin, monsieur le ministre.

Initialement composé de 25 articles, le projet en comportait 111 à l'issue de l'examen au Sénat, dont seulement 26 adoptés conformes par rapport au texte de l'Assemblée nationale. Il nous incombait de faire en CMP une synthèse équilibrée, pour proposer une loi utile, pérenne et répondant à la diversité des territoires de montagne. Au total, 43 articles ont été adoptés dans la version du Sénat sans aucune modification, et sur 36 articles additionnels insérés par le Sénat, 24 ont été confirmés en CMP.

La gestion des risques naturels en montagne a été renforcée. Le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) et la dotation globale de fonctionnement devront tenir compte des surcoûts et des aménités de la montagne, mais aussi des spécificités des zones frontalières compte tenu des variations de revenus que peut entraîner la présence de travailleurs étrangers. Pouvez-vous à ce sujet, monsieur le ministre, me confirmer que ce dispositif exclut toute autre interprétation ?

Le Sénat a maintenu le classement en zone de montagne lors de la création d'une commune nouvelle. Les temps de transports scolaires seront mieux pris en compte, de même que l'organisation du travail des enseignants en montagne.

Le projet de loi améliore aussi le déploiement des réseaux mobiles, via un traitement plus rapide des dossiers des communes candidates au programme de résorption des zones blanches, l'exonération d'IFER pour les nouvelles stations et des informations spécifiques sur la couverture en montagne. Les réseaux fixes à très haut débit ne sont pas oubliés, via la base nationale des adresses et la consignation des intentions d'investissement des opérateurs.

Je regrette toutefois vivement le rejet de l'amendement sénatorial permettant la mutualisation des réseaux.

M. Loïc Hervé.  - Moi aussi !

M. Cyril Pellevat, rapporteur.  - Je me félicite des dispositions équilibrées trouvées en matière environnementale. La CMP a conforté le travail du Sénat sur le statut et le droit au logement des saisonniers.

La lutte contre la désertification médicale est également améliorée, via le recours aux médecins retraités, notamment.

Les sanctions pour coupes illicites de bois ont été renforcées ; les offices de tourisme et les unités touristiques nouvelles sont globalement préservés. Un délai de deux ans a été retenu avant application de la règle de l'indemnisation limitée : c'est un progrès.

Voilà pour les avancées. Il y a cependant des insuffisances sur les coefficients d'occupation des sols par exemple, je regrette les dispositions retenues, préjudiciables aux zones de montagne.

M. Loïc Hervé.  - Absolument !

M. Cyril Pellevat, rapporteur.  - Un acte II de la loi de 1985 était nécessaire. Ce texte est une bonne première étape, mais il faudra y revenir. Je me suis abstenu en CMP, je ne voterai pas contre ce soir, parce qu'il contient des avancées concrètes, certaines urgentes, comme la mesure qui concerne les offices de tourisme. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales .  - Après plus de 45 heures de débat à l'Assemblée nationale et au Sénat, et l'examen de 1 954 amendements, nous arrivons au terme de la discussion de ce texte, les conclusions de la commission mixte paritaire ayant été adoptées il y a deux heures par les députés.

Je vous ai dit ma volonté de co-construire ce texte dès les premiers instants de nos échanges. Leur richesse et la passion qui les a animés ont permis d'enrichir le texte, passé de 27 à 94 articles. Pour co-construire, il faut dépasser les clivages, passer des compromis, dictés par le souci de l'intérêt général.

Tous, nous avons eu le souci du consensus. C'est ainsi que nous sommes parvenus au Sénat à un vote unanime. Certes, pas toujours facilement. Les travaux de la CMP ont été longs et studieux, m'a-t-on rapporté.

M. Loïc Hervé.  - Euphémisme !

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Mais les grands équilibres trouvés au Parlement ont été maintenus. Je veux saluer l'esprit de responsabilité qui a guidé vos travaux, pour parvenir à un texte commun. Le Gouvernement s'en réjouit !

Dans le respect du travail de la CMP, j'ai déposé deux amendements de levée des gages financiers pour les articles relatifs aux ZRR et à l'activité des médecins retraités en zone sous-dotée prévus aux articles 3 quater et 8 decies A.

Je veux en conséquence saluer tous les rapporteurs et rapporteurs pour avis, les présidents des commissions saisies au fond, les sénatrices et sénateurs qui sont intervenus avec passion, souvent, expertise toujours, lors de nos débats ; je n'en citerai que quelques-uns : Jean-Yves Roux, Michel Bouvard, Annie David, Ronan Dantec, Alain Bertrand, Loïc Hervé.

Nous pouvons être fiers du travail accompli ensemble ! Nos échanges ont permis d'enrichir le projet de loi de nombreuses mesures nouvelles visant à répondre concrètement aux enjeux des zones de montagne et aux problèmes de nos concitoyens, qu'il s'agisse d'urbanisme, d'éducation ou de santé.

La Corse est reconnue dans son statut d'île-montagne, et je salue le sénateur de Haute-Corse, Joseph Castelli, cette reconnaissance est tellement souhaitée et attendue par les élus insulaires !

Les transports scolaires, les programmes régionaux de santé, les schémas interrégionaux d'organisation des services tiendront mieux compte des contraintes montagneuses.

Plusieurs mesures importantes sont prises pour résorber les fractures numérique et mobile, même si, à titre personnel, j'aurais aimé aller plus loin. (MM. Alain Bertrand, Joseph Castelli, Loïc Hervé et Jean-Pierre Vial applaudissent)

À cela s'ajoute, l'amélioration du statut des saisonniers, l'aide au pastoralisme, la gestion différenciée selon les massifs de la protection des troupeaux contre la prédation.

Dans le domaine touristique, la réhabilitation du parc immobilier de loisir existant est définie comme une priorité, et une nouvelle procédure est créée pour les unités touristiques nouvelles (UTN).

Le décret relatif à la distinction des UTN locales et des UTN structurantes sera soumis au CNM avant sa publication comme vous le souhaitiez, pour trouver un accord sur la question des services.

Conformément aux engagements pris par le Premier ministre à Chamonix, les collectivités territoriales pourront déroger au principe de transfert des offices de tourisme au niveau intercommunal, sous réserve d'une délibération avant la fin de l'année. J'ai donné instruction aux préfets de leur faciliter les choses.

Nous avons fait oeuvre utile, et pouvons regarder sans rougir ceux qui ont voté la première loi Montagne, il y a trente et un ans.

Les communes transfrontalières, monsieur le rapporteur, sont dans une situation très particulière. Je regarderai en détail ce qu'il en est et vous ferai parvenir une réponse par écrit.

Le rapport commandé lors de nos débats me sera remis en fin de semaine : je vous le ferai alors parvenir.

Je garderai de ces débats le souvenir d'une formidable aventure humaine où nous avons su nous rassembler pour faire prévaloir l'intérêt supérieur de la montagne. C'est assez rare pour être souligné ! Réaffirmer notre soutien à ce texte serait un beau message envoyé à nos concitoyens habitant en zone de montagne, preuve que nous pouvons transcender les clivages partisans.

Comme disait l'alpiniste et écrivain Gaston Rébuffat, tombé sous le charme des cimes : « les montagnes ne vivent que de l'amour des hommes ». Faisons de ce texte un acte d'amour pour la montagne et les montagnards ! (Vifs applaudissements sur la plupart des bancs)

M. Alain Bertrand .  - Ce texte va pouvoir entrer en application rapidement. Il soutient des mesures utiles, mais ce n'est pas une loi de programmation. Elle ne clôt en rien les débats sur la ruralité ou l'aménagement du territoire...

Une grande loi sur ces sujets reste à écrire, car sur de nombreux points, nous aurions pu aller plus loin.

Le groupe RDSE votera ce texte pour les avancées qu'il contient - urbanisme, saisonniers, etc. - mais sur la couverture téléphonie mobile, les UTN, ou les moyens héliportés en territoire de montagne, nous restons sur notre faim. Le ministre connaît pourtant - c'est rare ! - la ruralité et la montagne. Avec lui, nous aurions pu aller loin, passer outre aux lobbies, éviter les « peut-être », les « plus tard », les « laissons faire les opérateurs »... La téléphonie mobile en zone rurale ou en montagne, c'est un bûcheron qui peut appeler les secours lorsqu'il s'est saigné, un médecin ou un infirmier qui peut appeler un patient, ce sont des personnes âgées moins isolées, des enfants qui cessent de dire : « Quand est-ce qu'on s'en va ? ». C'est devenu indispensable ! (M. Loïc Hervé applaudit) Et je suis navré que sur ce sujet, la CMP ait fait un aussi mauvais travail.

Quant à la suppression de la disposition qui imposait des secours primaires et secondaires accessibles en moins de trente minutes, je n'en dirai rien, car je risquerai d'être excessif. C'est de mort, c'est de séquelles irréversibles qu'il s'agit, sachons-le.

Nous demandons toujours une grande loi d'avenir et de programmation pour garantir la solidarité et l'égalité des territoires !

M. Loïc Hervé .  - Je m'exprime avec l'esprit chagrin et le sentiment d'une occasion manquée, car il n'existe plus de consensus sur ce texte. Il ne suscite plus qu'une vive déception. Très attendu, trente et un ans après la première loi Montagne, il ne répond que bien faiblement à l'ampleur des défis auxquels font face les zones de montagne.

Les articles premier, 2 et 3 sont fort peu normatifs. L'article 4 est de bon sens mais sa portée amoindrie, voire ambiguë. L'article 4 A est une bonne chose, mais fera une belle jambe aux habitants des zones de montagne. Les articles consacrés à l'école ont été allégés ou supprimés en cours de navette. Les dispositions relatives à la santé ne sont guère plus convaincantes. Nous avons besoin d'un pilotage plus coercitif de l'offre ambulatoire ; les hospitaliers, eux, ont besoin de moyens pour améliorer les plateaux techniques.

J'en viens à l'un des enjeux les plus importants : la couverture numérique du territoire, qui conditionne le vote de mon groupe. Les enjeux, ignorés en 1985 - et pour cause -, sont rien moins que vitaux. En matière de téléphonie mobile, le cadre défini par l'Arcep est suffisant. Il fallait compléter la reconnaissance des zones blanches par celle des zones grises. Le cadre a été conçu pour maximiser le produit de l'attribution des fréquences, tout le monde le sait. (M. Alain Bertrand applaudit) Une définition législative des zones blanches était nécessaire ! Hélas, il ne nous reste qu'à croiser les doigts pour que les opérateurs tiennent leurs engagements. Lorsque nos concitoyens vous demanderont, mes chers collègues, ce que change la loi dans leur quotidien, que leur répondrez-vous ?

Nous voulions un texte pour une montagne vivante, dynamique, qui travaille. Il ne reste hélas rien des ambitions initiales. Le groupe UDI-UC, pour l'essentiel, votera contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-UC ; M. Alain Bertrand applaudit aussi)

M. Jean Desessard .  - Pour ce dernier texte de l'année, les montagnards sont bien présents, avec quelques Parisiens !

Ronan Dantec l'a dit en première lecture : malgré quelques points dérangeant, le texte était globalement satisfaisant. Il comprend bien des mesures que nous désapprouvons, mais nous restons satisfaits de son économie générale.

Nous nous réjouissons de la suppression de l'article 9 septies qui mettait à mal la loi Abeille sur les ondes électromagnétiques en réduisant l'information des maires et les possibilités de médiation.

Hélas, les lobbies ont eu gain de cause sur d'autres sujets.

Nous regrettons que la CMP soit revenue sur une définition plus claire des zones blanches, ce qui aurait renforcé les contraintes pesant sur les opérateurs. (MM. Alain Bertrand et Loïc Hervé approuvent) De même sur la mutualisation des antennes ou les zones de tranquillité dans les parcs nationaux.

Nous regrettons aussi que la société chargée des travaux de la LGV Lyon-Turin soit dotée de pouvoirs d'expropriation : la méthode est bien cavalière, et c'est juridiquement douteux - même si elle repose en partie sur des capitaux publics. Ce projet témoigne d'une focalisation excessive sur la grande vitesse ferroviaire. L'antienne de « l'écologie, ça suffit » résonne encore trop fortement !

Nous aurions aimé voter pour ce texte, mais nos désaccords nous poussent à l'abstention.

présidence de Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente

M. Jean-Yves Roux .  - La CMP est parvenue à un texte commun, mettant fin à un important travail. Le groupe socialiste votera en faveur de ce bon compromis. Une autre lecture aurait été superflue, et l'entrée en vigueur du texte est urgente par certains aspects. Le bicamérisme a joué son rôle, en permettant d'améliorer la loi. La loi de 1985, dans un contexte de décentralisation, se distinguait par un souci de prise en compte des spécificités montagnardes. Il en va de même ici.

L'article 3 bis A reconnait ainsi les surcoûts climatiques dans le calcul de la dotation globale de fonctionnement ; c'est aussi ce qui motive les dispositions relatives à l'école ou à l'accès aux soins - l'enjeu du temps de transport a soustendu l'essentiel de nos débats.

La lutte contre le réchauffement, dont les montagnards sont les premiers à éprouver les effets, est exigée en priorité. Un point d'équilibre a été atteint entre développement et protection de la montagne. Attention à ne pas opposer entre eux les massifs. Les dérogations à la règle de l'urbanisation limitée est source d'incertitude ; le délai de deux ans est une bonne chose.

Le travail devra se poursuivre sur les travailleurs saisonniers, le loup ou la couverture numérique et mobile. Nous devrons, sur ce dernier point, maintenir la pression sur les opérateurs. Le groupe de réflexion sur la montagne que je préside au Sénat poursuivra ses travaux dans cette optique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-Pierre Bosino .  - Je supplée Mme Didier. Un mot de méthode d'abord : ce texte a été examiné à marche forcée, ce qui devient une habitude. Il est regrettable d'avoir dû travailler dans de si mauvaises conditions.

87 amendements ont toutefois pu être adoptés au Sénat, dont 5 à notre initiative.

La montagne ne se résume pas à la neige, et d'ailleurs il y en aura de moins en moins, ce qui devrait nous conduire à réfléchir à la mutation du tourisme en zone de montagne, davantage tourné vers l'agrotourisme.

Nous avons plaidé pour une meilleure couverture numérique de la montagne, en définissant dans la loi les zones blanches. Las, ces dispositions ont disparu en CMP, sous la pression des lobbies.

M. Loïc Hervé.  - Il fallait le dire, très bien !

M. Jean-Pierre Bosino.  - C'est à cause de la privatisation de France Telecom que nous en sommes là... La rente du cuivre aurait permis de poser la fibre partout.

En revanche, nous sommes très satisfaits de la réintroduction des dispositions sur l'accès aux soins.

Les lois NOTRe et Maptam ont fait la preuve de leur inadaptation en zone de montagne.

M. Loïc Hervé.  - Eh oui !

M. Jean-Pierre Bosino.  - Nous, nous ne les avons pas votées ! La CMP a, hélas, supprimé les ajustements indispensables que nous avions proposés.

Nous regrettons aussi la disparition des propositions de notre collègue député Chassaigne sur la présence postale. Encore un dossier sur lequel il y a beaucoup à dire et à faire, comme celui de France Telecom. Le bureau de poste, l'école et la mairie sont au coeur de la vie des villages.

Quant au tourisme, nous avons progressé sur les travailleurs saisonniers. L'accord sur les UTN, comme tout compromis, est insatisfaisant mais l'essentiel était d'aboutir.

Si nous mesurons le chemin parcouru, beaucoup d'interrogations demeurent en suspens. Le groupe CRC s'abstiendra. Réécoutons Jean Ferrat... (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen et sur plusieurs autres bancs)

M. Loïc Hervé.  - Que la montagne est belle !

M. Gérard Bailly .  - Le projet de loi avait été adopté à l'unanimité au Sénat et à la quasi-unanimité à l'Assemblée nationale. Il fallait résorber nos différends en commission mixte paritaire. Avions-nous le droit d'échouer au risque de réduire à néant le travail accompli ?

Nous avons veillé à la préservation des activités agricoles et forestières, essentielles en montagne. La forêt a fait l'objet de toute notre attention : exploitation du bois, dessertes forestières, développement de l'industrie de transformation à proximité des massifs, reboisement des parcelles, identification d'espaces de stockage du bois sans en faire une obligation. Nous avons encadré les sanctions en matière de coupes illégales, pour éviter les incohérences du droit forestier. Les coupes rases ou les coupes à blanc sont déjà interdites là où il n'existe pas de plan de gestion ; ailleurs, il conviendra d'exercer une vigilance particulière.

Sur le pastoralisme, les mesures votées au Sénat ont été conservées en commission mixte paritaire. Les zones de tranquillité auraient menacé les pâturages traditionnels, les parcs nationaux peuvent être protégés autrement. Quant aux grands prédateurs, la solution est moins dans la loi que dans une révision de la convention de Berne et de la directive Habitat.

La CMP a conservé la proposition de notre collègue Daniel Gremillet d'encourager la collecte de lait en montagne, plus coûteuse pour les industriels.

Je regrette que l'on n'ait pas assoupli l'exonération de la taxe de défrichement. Le but était d'aider les jeunes agriculteurs et de rouvrir des paysages.

La CMP a abouti à un consensus sur la dérogation au transfert des offices de tourisme aux intercommunalités. Si nous ne votons pas cette loi, beaucoup de stations de montagne rencontreront des difficultés.

M. Loïc Hervé.  - Chantage !

M. Gérard Bailly.  - Le logement et l'urbanisme ont suscité bien des débats. La CMP a heureusement retenu la rédaction du Sénat sur le logement des saisonniers.

L'article 19 sur les UTN a failli faire échouer la commission mixte paritaire. Un compromis a finalement été trouvé.

Le Sénat avait prévu une dérogation de plein droit à la règle d'urbanisation limitée pour encourager les communes à se doter de SCOT. Nous sommes tombés d'accord pour limiter la mesure dans le temps. De nombreuses améliorations rédactionnelles ont été apportées.

La montagne mérite toute notre attention. Ce n'est pas un espace à mettre sous cloche, mais à entretenir et à aménager. La montagne est diverse, ce qui a rendu nos discussions parfois difficiles. Le texte, s'il n'est pas révolutionnaire, apporte des améliorations attendues des professionnels et des élus.

La grande majorité du groupe Les Républicains le votera avec confiance et fierté. Que la montagne est belle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; M. Alain Bertrand applaudit également)

M. Jean-Pierre Vial .  - On pouvait espérer un arbitrage plus équilibré en CMP. L'addition de deux unanimités ne fait pas un consensus...

L'article 18 corrige la loi NOTRe en tenant compte des spécificités de l'économie touristique en montagne. Reste que le délai laissé aux communes pour demander à conserver leur office est extrêmement court.

Sur l'accueil des mineurs dans les refuges de montagne non gardés, la rédaction retenue répond aux inquiétudes des professionnels. Ce sera l'occasion d'uniformiser la doctrine et, surtout, d'éviter de faire dormir des jeunes sous tente à proximité du refuge pour respecter la réglementation.

L'organisation de la sécurité et des secours dans les stations est réaffirmée et précisée à droit constant.

Un équilibre a été trouvé sur l'extension des servitudes aux loisirs d'été, le monde agricole a la garantie de voir ses activités prises en compte à travers la procédure de consultation.

Le service RTM voit réaffirmé son rôle auprès des collectivités territoriales, il apportera son expertise sur l'évaluation et la gestion des risques naturels prévisibles.

Sur le numérique, les opérateurs ont donné de la voix le week-end dernier. En CMP, la position de l'Assemblée nationale, relayée ici par notre collègue Patrick Chaize, l'a emporté. Qu'il faille prendre en compte leur situation économique, soit, mais à eux de considérer aussi la situation des collectivités ! Ce sont eux qui, hier, se sont opposés à l'itinérance. Hostiles à toute mutualisation, ils forcent les collectivités à se substituer à eux - sans que les collectivités riches et plus peuplées apportent leur contribution. Un fonds de péréquation est nécessaire.

Sur l'aménagement et l'urbanisme, j'attendais d'autres arbitrages en CMP. La procédure des UTN constitue un modèle original, un écosystème propre aux stations de montagne. La France est fière de sa première place parmi les destinations touristiques pour les stations de sports d'hiver. L'abandon de 50 % des surfaces de construction a doublé les prix du foncier, comme à Chamonix. La loi ALUR libéralise les règles de constructibilité. Mais la densification casse le modèle. La population locale ne pourra plus se loger, ne pourra plus acheter. Les programmes de logements sociaux et de logements pour les saisonniers sont menacés. La maîtrise de l'urbanisme dans les stations échappera de nouveau aux maires.

M. Loïc Hervé.  - Eh oui !

M. Jean-Pierre Vial.  - D'où l'importance des décrets d'application.

Le législateur devra peut-être, demain, remettre l'ouvrage sur le métier. Élus des Alpes du Nord, nous nous devons de relayer la colère des maires de station, qui espéraient une refondation des principes de l'urbanisation.

M. Loïc Hervé.  - Bravo.

M. Jean-Pierre Vial.  - Merci, en revanche, à M. le ministre d'avoir défendu sur le Lyon-Turin un amendement qui a toute sa place ici. (MM. Cyril Pellevat, rapporteur, et Loïc Hervé applaudissent)

La discussion générale est close.

Discussion du texte élaboré par la CMP

Mme la présidente.  - Le Sénat examinant après l'Assemblée nationale les conclusions de la CMP, il se prononcera par un seul vote sur l'ensemble du texte, assorti des amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

ARTICLE 3 QUATER

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 2 à 4

Supprimer ces alinéas.

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Le Gouvernement lève les gages sur cet article.

M. Cyril Pellevat, rapporteur.  - Avis favorable.

ARTICLE 8 DECIES A

Mme la présidente.  - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Idem.

M. Cyril Pellevat, rapporteur.  - Avis favorable.

Interventions sur l'ensemble

M. Jean-François Longeot .  - M. Hervé l'a dit, le groupe UDI-UC votera contre. On aurait pu espérer mieux, trente et un an après la loi de 1985. Bien sûr, certaines mesures vont dans le bon sens, mais il y a tromperie sur la marchandise : loin d'être une réforme d'envergure, un acte II, ce projet de loi ne fait que corriger les erreurs de la loi NOTRe... Fallait-il un projet de loi pour cela ? Une proposition de loi, voire un amendement, aurait suffi.

Mme Patricia Morhet-Richaud .  - Après un travail constructif et unanime ou presque à l'Assemblée nationale comme ici, la CMP est parvenue à un texte commun. Celui-ci est loin d'être parfait, mais nos territoires l'attendent. Je le voterai. (Applaudissements à droite)

M. Philippe Bonnecarrère .  - Ce texte a été pris en otage sur la brûlante question de l'article 18 bis. L'article 20 B interdit de fait les projets économiques dans les fonds de vallée, c'est très déraisonnable. Il faudra y revenir rapidement. (MM. Loïc Hervé et Alain Bertrand applaudissent)

M. Loïc Hervé .  - Le débat au Sénat m'a donné beaucoup de plaisir, malgré des conditions d'élaboration qui ne sont pas idéales. Le parlementarisme rationalisé à la française et la deadline du 31 décembre sur les offices de tourisme nous ont coûté très cher...

La question des offices de tourisme aurait pu être réglée par une proposition de loi, voire un amendement !

Il faudra revenir très vite sur un certain nombre de sujets.

M. Jean-Michel Baylet, ministre .  - Merci à tous de la qualité du travail accompli. Nous y avons passé trois jours et trois nuits, manière de dire que nous avons beaucoup travaillé.

Sur les zones blanches, je rappelle que l'Arcep a réalisé une remarquable cartographie - zones blanches, zones couvertes et zones intermédiaires - qui sera publiée début janvier. Nous pourrons, dans les schémas départementaux, faire du cousu main.

Pour le reste, je m'étonne de certains propos, après le vote unanime de la semaine dernière. Le texte n'a pas tant changé !

M. Loïc Hervé.  - Il n'y a plus rien !

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Passé de 25 à 94 articles, il aborde tous les sujets et changera concrètement la vie en montagne : réserves en eau, organisation des écoles, présence médicale...

Je comprends votre déception sur certains points - et je la partage un peu. Mais la France a un régime parlementaire bicaméral. Les deux chambres, en CMP, doivent chacune mettre de l'eau dans leur vin si elles veulent un compromis - faute de quoi, vous connaissez la suite...

C'est tout de même la tradition du Sénat que de rechercher un consensus sage et raisonnable. Un accord en CMP était indispensable si l'on voulait résoudre le problème des offices de tourisme. Les préfets pourraient se montrer compréhensifs quelques jours ou quelques semaines mais si le texte n'était pas voté, les offices seraient transférés aux intercommunalités. Comment expliqueriez-vous que les dispositions sur la téléphonie mobile vous décevant, vous avez jeté à terre une loi qui réglait le cas des offices de tourisme ?

La majorité qui sortira des prochaines élections pourra revenir sur le sujet, c'est bien normal. Mais ce soir, votez sereinement, avec détermination, et franchissons un pas important.

Vote sur le texte élaboré par la CMP

À la demande des groupes socialiste et républicain et UDI-UC, les conclusions de la CMP, modifiées, sont mises aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°84 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 309
Pour l'adoption 264
Contre 45

Le Sénat a adopté.

M. Jean-Michel Baylet, ministre.  - Merci de votre confiance, nous avons fait oeuvre utile. (Applaudissements)

Prochaine séance, mardi 10 janvier 2017, à 14 h 30.

La séance est levée à 20 h 15.

Jacques Fradkine

Direction des comptes rendus