Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Conclusions de la CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative à l'exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations.

Discussion générale

M. Mathieu Darnaud, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire .  - Nous voici au terme d'un long marathon sur la compétence « gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations », la Gemapi. Ce texte aura animé les travaux de notre assemblée qui a tenté de faire oeuvre utile en relayant les attentes des élus sur le terrain, en dépit de l'examen tardif de ce texte à quelques jours de son application.

Nous regrettons le rejet de certaines de nos propositions, notamment sur le ruissellement des eaux. Pour autant, nous avons souhaité que la CMP aboutisse afin que les départements mais aussi les régions puissent continuer à intervenir dans le domaine de la Gemapi au-delà de 2020.

Nous avons souhaité assouplir les modalités de transfert et de délégation de cette compétence par les intercommunalités à des syndicats de communes et syndicats mixtes avec la possibilité de ne transférer qu'une partie de leur compétence, voire une partie de chacune des quatre missions constitutives de cette compétence, à un ou plusieurs syndicats sur tout ou partie de leur territoire.

Nous avons voulu donner la possibilité à un syndicat mixte ouvert d'adhérer à un autre syndicat mixte ouvert et, c'était essentiel pour les élus, proposé un régime transitoire de responsabilité limitée des communes et intercommunalités gestionnaires d'ouvrages, avant leur autorisation par l'État.

Le Sénat a enrichi ce texte notamment sur le régime transitoire de responsabilité limitée, en donnant la possibilité aux régions d'intervenir dans des projets du domaine de la Gemapi dont elles ne seraient pas maîtres d'ouvrage.

Grâce au Sénat, les communes isolées ne sont pas oubliées, qu'il s'agisse du régime de responsabilité limitée, ou de conventions passées avec les départements ou les régions...

Nous regrettons que la maîtrise des eaux de ruissellement ne soit pas traitée dans ce texte, en dépit de nombreuses demandes pour que la taxe Gemapi puisse être utilisée en partie à cette fin. C'est une problématique qui concerne en particulier certains territoires du Sud et du Sud-Est de la France.

Le Sénat a voté un texte à l'unanimité il y a un an sur ce sujet important.

M. André Reichardt.  - Très important !

M. Mathieu Darnaud, rapporteur.  - Nous espérons vivement, au-delà du groupe de travail qui a proposé une minorité de blocage jusqu'en 2026, sur ces compétences eau et assainissement, que ce texte sera enrichi par la suite notamment sur ce point.

Une remarque aussi sur la forme : il importe que les élus trouvent dans la loi des réponses à leurs inquiétudes et que nous anticipions. Nous avons trouvé un accord en CMP, mais j'espère que nous aurons, à l'avenir, davantage les moyens d'expertiser et d'anticiper pour apporter des réponses aux élus sur le terrain. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - C'est un plaisir de clore la session parlementaire par un vote positif. Élu de la ruralité, ancien maire et président de communauté de communes, je suis heureux de cette issue. Je m'étais abstenu lors de la loi NOTRe sur le transfert automatique de la compétence Gemapi. J'entends vos remarques et vos attentes. J'espère que nous pourrons travailler ensemble.

Veuillez excuser l'absence de Mme Gourault.

Je suis heureux du compromis rapidement trouvé hier soir entre l'Assemblée nationale et le Sénat en CMP. Vous en avez présenté les principaux points. Le vote concrétise un des chantiers lancés par le président de la République lors de la Conférence nationale des territoires. Nous étions attendus par les élus et les territoires. Le Gouvernement et le président de la République ont fait le choix de la stabilité. Les lois NOTRe et Maptam doivent s'appliquer, ce qui n'exclut pas toutefois les adaptations et améliorations nécessaires. C'est pourquoi le Gouvernement a soutenu cette proposition de loi.

Le transfert de la gestion des cours d'eau est un élément phare de la loi Maptam. Il restait des difficultés, comme la gestion des digues, ou la prise en compte des initiatives de mutualisation prises localement.

Le texte apporte des réponses pertinentes, dans le respect des libertés locales, en permettant aux départements et aux régions de continuer à agir, en autorisant la sécabilité de la compétence Gemapi, et en prévoyant un régime transitoire.

Le texte de la CMP est équilibré.

La question du ruissellement fera l'objet d'un rapport spécifique d'ici deux mois et pourra être intégrée dans le futur projet de loi « eau et assainissement ».

Avec ce compromis, les aménagements entreront en vigueur au 1er janvier 2018, au moment du transfert de la compétence Gemapi aux intercommunalités.

Le Gouvernement appelle en conséquence à voter ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Alain Richard .  - Ce texte apporte les améliorations nécessaires à un dispositif partiellement inachevé. Je fais partie de la majorité qui a voté la loi NOTRe, au terme d'un compromis laborieux, qui définissait la compétence Gemapi. Comme pour toute nouveauté, il restait des points d'ombre. Un compromis a eu lieu, ce que j'appellerai l'esprit de la Conférence nationale des territoires, réunie par le président de la République pour répondre aux attentes et aux appréhensions qui régnaient en juillet. Du chemin a été fait depuis et nous irons plus loin.

Le texte offre des souplesses en permettant aux départements et régions de participer, comme aux syndicats mixtes. Le code général des collectivités territoriales prévoit en son article 111-8 qu'une collectivité peut déléguer à une autre collectivité d'une autre catégorie toute compétence dont elle a la charge. Les préfectures semblent l'avoir oublié...

Le compromis a été rapide, car le travail en amont des rapports a été exceptionnel. La solution retenue pour le ruissellement est bonne : mieux vaut une démarche méthodique et un rapport.

Quant aux inondations fluviales, le Conseil d'État a estimé que l'assainissement des eaux fluviales était indissociable de l'assainissement des eaux usées. Cela se comprend du point de vue d'un ingénieur, mais le premier de ces aspects n'est pas financé.

L'assise de la taxe Gemapi sur un impôt existant n'est pas totalement satisfaisante. Puisqu'une réflexion sur la fiscalité locale est en cours, je ne doute pas qu'un meilleur compromis en sortira. (« Très bien ! » et applaudissements sur quelques bancs des groupes Les Républicains et LaREM)

M. André Reichardt.  - Très bien !

Mme Françoise Gatel .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) La proposition de loi assouplit heureusement, grâce à l'efficacité remarquable du président de la commission des lois, le dispositif des lois NOTRe et Maptam sur la compétence Gemapi.

Si les intentions étaient louables, on manquait d'une étude d'impact. Pas étonnant dès lors que seules 15 % des EPCI se sont déjà saisis de la compétence tant les difficultés étaient nombreuses et la tâche immense. Ce texte en précise les responsabilités et les modalités de délégation. Dommage toutefois que le ruissellement soit reporté à un rapport tout comme la question des digues domaniales transférées. J'espère que le rapport nous éclairera.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - Moi aussi !

Mme Françoise Gatel.  - Le texte ne lève pas non plus les difficultés financières. Les élus auront à choisir entre deux contrariétés : instaurer une nouvelle taxe ou grever leur budget.

Le manque de visibilité est en outre fâcheux : que se passera-t-il dans trois ans ?

Ne boudons pas notre plaisir : la proposition de loi va toutefois dans le bon sens, fait confiance à l'intelligence des territoires. Je salue l'efficacité et l'engagement de notre rapporteur et de notre commission des lois.

Nous devrons toutefois revenir sur ce sujet, ainsi que sur celui du ruissellement. Le groupe UC votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; M. Philippe Bas, président de la commission et Mme Gisèle Jourda applaudissent aussi.)

M. Éric Kerrouche .  - Quel plaisir de siéger ensemble pour le dernier texte de l'année !

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Une bonne raison d'être bref !

M. Éric Kerrouche.  - Soit, nous faisons avec ce texte une opération de chirurgie esthétique, alors qu'une intervention curative plus profonde était nécessaire.

Ce texte apporte des aménagements utiles, mais la mise en oeuvre de la compétence Gemapi reste techniquement complexe, sa structuration institutionnelle se révèle difficile et le partage des responsabilités apparaît flou. Je salue le compromis trouvé en CMP. Ce texte clarifie et assouplit une partie du dispositif et rassure en cela les élus locaux : pérennisation des engagements pris par les régions et les départements ; extension de l'assistance technique des départements ; assouplissement des modalités de transfert ou de délégation à des syndicats mixtes...

J'ai toutefois deux regrets. Le Sénat a eu très peu de temps pour examiner ce texte. Il est dommage de légiférer ainsi dans l'urgence sans entrer dans le détail, au risque de créer d'autres problèmes...

Ensuite, ce texte ne règle pas tout : ruissellement, spécificité des territoires littoraux et érosion du trait de côte, responsabilité des gestionnaires d'ouvrage, et, cerise sur le gâteau, financement car la taxe Gemapi est adossée à la taxe d'habitation.

Le financement du cycle de l'eau doit être repensé autour des bassins. Les enjeux financiers sont colossaux : les travaux des collectivités territoriales s'élèvent de 1 milliard à 1,7 milliard d'euros par kilomètre.

Ce texte reste donc au milieu du gué. J'espère que les rapports prévus nourriront les sujets et seront examinés avec attention et le temps nécessaire.

Mais mieux vaut, en cette période, une dinde que pas de dinde du tout, même si mon département me conduit à préférer le canard... (Sourires, M. le président de la commission apprécie.)

Le groupe socialiste et républicain votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et UC)

M. Joël Guerriau .  - Je salue à mon tour le compromis trouvé en CMP, qui a su conserver l'esprit de ce texte, assouplir sans faillir. Les départements peuvent continuer à apporter leur concours technique jusqu'en 2020. Les élus ont été entendus.

La CMP n'a pas retenu l'article premier bis A qui permettait d'affecter une partie de la taxe Gemapi à la lutte contre le ruissellement. Nous le regrettons. Elle n'a pas non plus retenu l'article 9, introduit au Sénat, qui prenait à bras-le-corps le problème du ruissellement, en accompagnant financièrement les collectivités territoriales.

L'article 5 bis a fait l'objet d'un compromis. L'articulation entre eaux pluviales et de ruissellement et la forêt constitue trois enjeux de taille, mais non réglés, renvoyés à des rapports remis ultérieurement. Gare toutefois à l'inflation de ces rapports. Nos collectivités attendent des réponses. J'espère que le délai de deux mois sera tenu.

Le groupe Les Indépendants votera ce texte qui pose la première pierre d'un édifice à construire et aide les collectivités à exercer leurs compétences. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)

Mme Maryse Carrère .  - Il me revient de clore cette discussion...

M. Jean-Claude Requier.  - Eh oui, c'est le dernier discours sur le dernier texte de l'année ! (Sourires)

Mme Maryse Carrère.  - Ce texte a été examiné au pas de charge. Je ne reviendrai pas sur nos réserves exprimées en première lecture. Il importait de ne pas détricoter ce texte, tout le régime antérieur était insuffisant.

Les dispositions sur les Epage et EPTR étaient attendues par les élus, tout comme les possibilités pour les départements et les régions de continuer à apporter une aide technique par voie de convention. Le texte précise aussi les responsabilités de manière bienvenue.

Le ruissellement fera l'objet d'un rapport. Nous nous félicitons que l'amendement de M. Artano soit conservé, qui étend le texte à l'outre-mer.

Élue des Pyrénées, je sais la violence des eaux torrentielles. Il faut aussi tenir compte des remontées des nappes dans les anciens bassins miniers. Le texte ne saurait exonérer les Charbonnages de France de leurs responsabilités. Les élus ne sont pas responsables de tout.

Le réchauffement climatique provoquera une remontée des eaux et une modification du trait de côte. M. Vaspart déposera une proposition de loi à ce sujet.

De même, les PAPI devront continuer à s'inscrire en continuité avec le travail des collectivités dans l'exercice de la Gemapi. L'État ne doit pas se désengager !

En dépit de ces réserves, ce texte tient compte de la diversité des territoires. La situation n'est en effet pas la même dans le Nord, en Charente ou dans l'Adour. Il donne aux collectivités les moyens de s'organiser.

Le groupe RDSE votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

La discussion générale est close.

Les conclusions de la CMP sont adoptées.

(Applaudissements)

M. le président.  - C'était le dernier texte de l'année. Permettez-moi de vous souhaiter à tous d'excellentes fêtes. À l'année prochaine !

Prochaine séance, mardi 16 janvier 2018, à 9 h 30.

La séance est levée à 17 h 10.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus