Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. La séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site Internet du Sénat et sur Facebook.

J'invite chacun à être attentif au temps de parole, et à la courtoisie.

Crise migratoire

M. Pascal Allizard .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; M. Olivier Cadic applaudit également.) La crise migratoire, sujet de préoccupation majeur, cristallise les passions et les peurs ; la question de l'identité et du contrôle des frontières fait l'objet de toutes les instrumentalisations en Europe. L'euroscepticisme gagne en conséquence du terrain partout.

L'accord avec la Turquie a sclérosé les flux venus d'Orient mais les migrants sont encore des centaines de milliers à arriver de Libye, dans des conditions inhumaines, livrés aux trafiquants.

Le président Macron qui avait donné des gages à son camp pendant la campagne semble s'être converti au réalisme, distinguant les migrants économiques des demandeurs d'asile.

Mais, à Bruxelles, j'ai entendu des officiels de la Commission européenne expliquer que ce phénomène est historique et bénéfique pour un continent à la natalité en berne, plaidant pour que l'on accueille le plus grand nombre...

Que pèse la France face à cette politique irresponsable ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur .  - En un an, les flux migratoires ont diminué de moitié en Europe ; en France, les demandes d'asile ont cependant augmenté de 17 % pour atteindre 100 000 en 2017. Nous avons empêché 85 000 personnes d'entrer sur le territoire.

Je présenterai demain au conseil des ministres le projet de loi asile et immigration. Notre ligne est claire : accueillir tous ceux qui relèvent de l'asile ; leur donner un avenir dans notre pays - c'est l'objet du rapport Taché - ; et en même temps, faire preuve d'une certaine fermeté.

En janvier 2018, les éloignements avaient augmenté de 22 % par rapport à janvier 2017. Nous voulons nous aligner sur le modèle allemand, italien ou néerlandais et nous doter du système européen d'asile le plus commun possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Pascal Allizard.  - Lors de mon déplacement à Molenbeek, j'ai plutôt vu le communautarisme et la pauvreté, ingrédients de la désintégration sociale. Entre inefficacité et angélisme, l'Union européenne crée les conditions de la défiance à son égard. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Assurance chômage des professions agricoles

M. Jean-Marie Janssens .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Le candidat Macron s'était engagé à mettre en place une indemnisation universelle pour les démissionnaires et indépendants. Nous attendons les conclusions des négociations avec les partenaires sociaux avant d'être saisi du projet de loi.

La situation particulière des agriculteurs sera-t-elle prise en compte ? Chaque semaine, 200 exploitations disparaissent en France, laissant les agriculteurs démunis et sans perspectives. La France agricole doute. Conséquences des traités CETA et Mercosur, reclassement des zones défavorisées simples, crises sanitaires à répétition, préparation de l'après PAC 2020...

L'État se doit de protéger ceux qui exercent ce difficile métier. Quand ils se résignent à abandonner des exploitations souvent familiales, il faut les accompagner, les aider à se reconvertir, leur redonner espoir. Comment allez-vous répondre à cette urgence sociale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail .  - Les agriculteurs sous statut d'indépendant n'ont pas de protection universelle contre le risque de chômage, pas de filet de sécurité. Or les liquidations et redressements judiciaires d'entreprises agricoles augmentent - 1 280 défaillances au cours des dix derniers mois, en hausse de 6,7 % par rapport à 2016.

Plus grave, beaucoup de jeunes hésitent à créer ou à reprendre une exploitation. Or les agriculteurs sont essentiels au développement du territoire, à la sauvegarde de nos paysages. Nous leur devons des garanties.

L'ouverture de l'assurance chômage aux travailleurs indépendants inclura les agriculteurs, pour les protéger davantage, sans hausse de cotisations puisqu'ils participent via la CSG. J'attends les propositions des partenaires sociaux sur ce sujet. L'État a l'intention d'agir. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Situation politique et sociale en Guyane

M. Georges Patient .  - Les Guyanais, en rébellion permanente contre un système inopérant en matière de santé, d'éducation, de sécurité, de développement économique, sont remontés contre l'application trop lente des accords de Guyane signés l'an dernier par le précédent gouvernement, après deux mois de mobilisation. Ils attendaient des avancées rapides, s'agissant d'un plan d'urgence, notamment en matière de sécurité et de santé.

Deux comités se sont tenus un mois avant la visite du président de la République en Guyane mais depuis, les accords marquent le pas, suspendus, semble-t-il, aux Assises des outre-mer. Dans le même temps se tiennent les États Généraux de Guyane.

Cela crée une réelle confusion qui s'ajoute au ras-le-bol, le fameux Nou Bon Sa guyanais. Manifestations, débrayages, violences urbaines et scolaires ont repris de plus belle et font craindre le pire. Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous apporter des garanties sur le respect des accords de Guyane dans leur totalité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - Le président de la République, fin octobre, a fixé les orientations du Gouvernement pour la Guyane et les outre-mer : cette « page nouvelle » est celle des responsabilités partagées.

Les Guyanais attendent beaucoup de l'État en matière de santé, de sécurité, d'éducation. Je sais qu'ils aspirent à un modèle de développement plus équilibré.

L'État a honoré sa parole avec le plan d'urgence. Le budget 2017 revu par le Gouvernement et le budget 2018 conçu par lui traduisent le respect de la parole de l'État. Un exemple : la mobilisation exceptionnelle de 250 millions d'euros sur cinq ans pour les collèges et les lycées, de 150 millions sur dix ans pour les écoles.

La capacité d'investissement sera renforcée avec la recentralisation de la dépense de RSA ; dès 2017, nous avons apporté 50 millions d'euros supplémentaires, dans le cadre du fonds d'urgence, pour faire face à la hausse rapide des dépenses en Guyane.

Mais la politique du Gouvernement ne se résume pas au plan d'urgence : il faut une construction sur le long terme.

Dès cette année, une grande partie des habitants de Guyane bénéficieront de baisses massives de leur taxe d'habitation - très élevée outre-mer - compensées pour les communes.

En matière de sécurité, la Guyane sera l'un des vingt départements prioritaires pour le déploiement de la police de sécurité du quotidien. En matière d'immigration, nous expérimenterons dès juin dans ce seul département la baisse des délais d'instruction des demandes d'asile.

Les outre-mer sont au coeur de nos politiques publiques. Ils le seront encore plus avec le livre bleu qui traduira les conclusions des Assises des outre-mer.

Nous voulons construire des politiques publiques dans la durée pour que les outre-mer soient à la fois une fierté et une richesse pour la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur certains bancs des groupes RDSE et UC)

Filière forêt-bois

M. Franck Menonville .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE) Notre pays est couvert par 16 millions d'hectares de forêt, soit 29 % du territoire, la troisième plus grande surface forestière d'Europe. La filière bois représente 440 000 emplois et un chiffre d'affaires de 60 milliards d'euros. Elle contribue au dynamisme des territoires ruraux. Or elle a perdu en quinze ans 20 % de sa valeur ajoutée et 100 000 emplois ; le déficit commercial atteint 6 milliards d'euros par an.

La hausse des exportations vers la Chine de bois brut contraint de nombreuses scieries à fonctionner en deçà de leur capacité. Nous subissons la concurrence d'autres pays. L'Est de la France est devenu l'Eldorado des traders internationaux, et les volumes de chênes bruts disponibles pour nos scieries ont été divisés par deux en dix ans.

Les mesures prises pour limiter les exportations, comme le label « transformation européenne », restent insuffisantes. Il faut du volontarisme et davantage de cohérence dans les politiques publiques pour la valorisation locale du bois.

Quelles mesures entendez-vous mettre en oeuvre pour sortir la filière de la crise qui la ronge ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et sur certains bancs du groupe UC)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Veuillez excuser Stéphane Travert, qui préside actuellement le comité national de pilotage des zones défavorisées simples.

La filière bois est un enjeu pour l'aménagement du territoire et représente 440 000 emplois. Or la fédération nationale du bois s'inquiète de l'exportation massive de grumes. Stéphane Le Foll avait pris des engagements, comme le durcissement des conditions administratives et sanitaires pour l'exportation de grumes ou l'interdiction de produits phytosanitaires dangereux, pour ne pas fausser la concurrence.

Le label européen de l'ONF garantit l'origine des grumes. Il faut l'élargir à l'ensemble de la forêt privée et favoriser l'adhésion des producteurs à des coopératives forestières.

Nous entendons améliorer le dialogue dans la filière. Stéphane Travert coordonnera le travail de l'ONF, dans le cadre du grand plan d'investissement. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur certains bancs du groupe RDSE)

Rapport Spinetta (I)

Mme Cécile Cukierman .  - Le rapport Spinetta a fait l'effet d'une bombe : abandon des lignes non rentables, filialisation du fret, privatisation des trois établissements, ouverture du TGV à la concurrence, suppression du statut des cheminots. ... et j'en passe.

Si le statu quo n'est pas une option, le rail a besoin d'investissements massifs, d'une vision claire de ses missions au service de l'aménagement du territoire et du droit à la mobilité.

Ce rapport est une insulte à nos départements ruraux et périurbains. Supprimer des lignes régionales, c'est détruire la cohésion et l'égalité territoriale !

M. Philippe Bas.  - Exactement !

Mme Cécile Cukierman.  - Le modèle de la Start-up Nation rencontre ses limites, ou plutôt, affiche ses priorités : un libéralisme décomplexé. En créant des déserts ferroviaires, vous encouragez le transport routier, en contradiction avec les objectifs de transition écologique. Allez-vous reprendre les préconisations de ce rapport qui crée un service public à deux vitesses et met au ban les territoires ruraux, dont les habitants sont considérés comme des Français de seconde zone ? (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur certains bancs des groupes UC et Les Républicains ; M. Joël Labbé applaudit également.)

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - L'objectif du Gouvernement reste d'améliorer la mobilité de tous les Français, de lutter contre les fractures territoriales et contre l'assignation à résidence. (Exclamations à droite)

Mais notre service public ferroviaire qui fait rouler 11 000 trains et transporte 4 millions de voyageurs chaque jour, n'est pas au niveau attendu ; la qualité du service se dégrade, les coûts augmentent et sa dette croît de 3 milliards d'euros par an. Pourtant, nous dépensons plus que jamais pour ce service : 20 % de plus qu'il y a dix ans !

Je connais l'engagement des cheminots, l'attachement de nos concitoyens au service public ferroviaire. Mais ce rapport a été demandé pour sortir de l'impasse. Il pose un constat sévère mais juste.

M. Martial Bourquin.  - Juste ? Ça se discute.

Mme Élisabeth Borne, ministre.  - J'ai engagé une concertation avec tous les acteurs ; nous annoncerons ensuite la méthode et le calendrier. Les « petites lignes » sont essentielles : les 1,5 milliard d'euros d'investissement promis dans le cadre des contrats de plan ne seront pas remis en cause. Ce n'est pas à Paris que se décidera l'avenir de ces lignes mais dans les territoires, avec les régions. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; exclamations sur certains bancs du groupe Les Républicains)

Mme Cécile Cukierman.  - Votre Gouvernement est en marche mais nos concitoyens veulent rouler dans des trains qui s'arrêtent dans leur commune. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs des groupes SOCR et Les Républicains)

Rapport Spinetta (II)

M. Olivier Jacquin .  - Nous attendions tous avec impatience les conclusions du rapport Spinetta. Je songeais à une révolution positive des transports, à un maillage transcendé pour répondre aux défis du XXIsiècle, à une cure de jouvence pour la SNCF, pilier de notre République. Nous en sommes loin. Voilà de vieilles recettes, celles du conformisme libéral.

Au motif d'un endettement trop important, imputable non aux cheminots mais aux choix de l'État, on veut transformer l'EPIC SNCF Réseau et Mobilités en société anonyme.

Après ce rapport qui prend peu en compte l'usager, confirmez-vous que l'approche française de structuration du territoire par les mobilités sera maintenue, qu'aucune halte TGV, souvent cofinancée par les collectivités, ne sera fermée ? Quels investissements, quels financements pour les lignes à faible trafic prévus par les contrats de plan État-Région ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; M. Joël Labbé applaudit également.)

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Le Gouvernement s'engage à améliorer la mobilité pour tous, dans tous les territoires. (On fait mine d'en douter sur les bancs du groupe Les Républicains.) Les Assises de la mobilité ont fait remonter de nombreuses propositions, y compris sur les zones blanches de la mobilité : 80 % du territoire n'est pas couvert par une autorité organisatrice de la mobilité.

M. Martial Bourquin.  - Il y a les bus !

Mme Élisabeth Borne, ministre.  - Le service public ferroviaire a donc un rôle important à jouer.

Aujourd'hui, nous sommes dans l'impasse, les coûts ne cessent d'augmenter, la dette également, alors que la qualité de service ne répond pas aux attentes. Nos concitoyens, qui se demandent chaque matin si leur train sera à l'heure, constatent que l'on a inauguré quatre lignes TGV ces dix-huit derniers mois alors que 20 % de notre réseau subit des ralentissements. Il faut 1 heure 25 pour parcourir les 70 kilomètres qui séparent Niort de Saintes ; 35 minutes de plus pour faire Limoges-Paris. Le statu quo n'est pas possible.

Nous consacrons 10 millions d'euros par jour pendant dix ans au ferroviaire, soit un total de 36 milliards d'euros. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe UC)

M. Olivier Jacquin.  - J'espère que ce train de réforme ne sera pas qu'une promesse de modernité rentable et concurrentielle. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

Conséquences de la hausse du gazole en zone rurale

M. Daniel Chasseing .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants) Le projet de loi de finances augmente la fiscalité sur le gazole au nom d'un impératif environnemental que l'on peut partager - mais avec pour effet d'augmenter les coûts de transports dans la ruralité, où l'on ne peut pas se passer de sa voiture dans la vie quotidienne. Dans la ruralité, les habitants ont souvent des diesels, parce qu'on les a incités à en acheter par le passé, et parce que la rareté des bornes de recharge rend les véhicules électriques souvent inadaptés.

Pour défendre la ruralité fragile et soutenir nos territoires, il faudrait tenir compte de ces Français. Nos concitoyens subissent la concurrence des voisins européens où la main-d'oeuvre et le gazole sont moins chers.

La Cour des comptes suggère de simplifier le remboursement de la TICPE, le Gouvernement aurait engagé une réflexion pour un approvisionnement à taux réduit. Quelles mesures retenez-vous ? Quelle harmonisation européenne pour les prix du gazole ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Vous avez raison, les transports sont trop souvent vécus comme une injustice. Nous luttons contre cette assignation à résidence, liée à la fracture territoriale. C'est pour cette raison que le projet de loi d'orientation sur les mobilités prévoira une couverture complète du territoire par des Autorités organisatrices des mobilités et développera les plateformes de mobilité inclusive, ainsi que des plateformes de conseil à la mobilité. Le Conseil d'orientation des infrastructures propose un plan de désenclavement du territoire, pour en finir avec les promesses non tenues des contrats de plan État régions.

La transition énergétique, elle aussi, doit profiter à tous nos concitoyens. Il y a aujourd'hui 22 000 bornes de recharge disponibles et nous accompagnons le remplacement des véhicules diesel par d'autres, plus économes, via la prime de 8 500 euros, l'aide de 1 000 à 2 000 euros pour les véhicules répondant aux Crit'air 1 et 2, et les mesures d'aide et de soutien aux véhicules au gaz (GNV).

Enfin, nous avons préconisé le gel de la TICPE pour nos transporteurs routiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Daniel Chasseing.  - Les territoires ruraux sont très fragiles. La baisse des charges va dans le bon sens, mais il faut tenir compte des coûts de déplacement, parce que le maintien de la vie dans nos territoires suppose celui des salariés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants et sur quelques bancs du groupe UC)

Fiscalité agricole

M. Daniel Laurent .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) La viticulture est un pilier de notre patrimoine. Face à la hausse du foncier et à l'arrivée d'investisseurs extérieurs, la profession propose que les repreneurs soient exonérés des droits de mutation, pour préserver un tissu d'entreprises familiales dans nos vignobles. Elle demande également une réserve d'autofinancement pour les entreprises assortie d'incitation fiscale et la création d'un régime de gestion des risques, le mécanisme actuel de déduction pour aléas apparaissant trop complexe. Enfin, pour encourager la démarche de certification environnementale, il conviendrait de proposer un crédit d'impôt moins lourd que le dispositif actuel.

Allez-vous reprendre ces propositions dans la prochaine loi de finances ?

Enfin, les viticulteurs doivent être associés aux stratégies nationales de santé qui les concernent. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - Une concertation est initiée, elle a été lancée il y a quelques jours, avec un groupe de travail transpartisan et représentatif, de 10 députés et 10 sénateurs pour faire des propositions intégrées au prochain projet de loi de finances.

Pour améliorer la résilience des entreprises, la gestion de l'aléa sera améliorée par l'encouragement de l'épargne de précaution. La transmission et la diversification seront elles aussi favorisées, de même que la résilience des entreprises. Ce sera l'objet de la loi Pacte, en lien avec les conclusions des États généraux de l'alimentation. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Daniel Laurent.  - Les agriculteurs ont besoin de stabilité et de visibilité. Le Salon de l'agriculture arrive : montrez-leur que vous êtes à leur écoute ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Site industriel de Vallourec à Tarbes

Mme Maryse Carrère .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE) Le site de Vallourec Tarbes est en situation critique, ne figurant pas - comme celui de Cosne-sur-Loire - dans la reprise par l'entreprise américaine National Oilwell Varco. Pas moins de cinquante salariés à Tarbes seront licenciés si la date butoir du 26 février, fixée par Vallourec, est dépassée.

Les Hautes-Pyrénées ont payé le prix fort de la désindustrialisation : 7 000 emplois industriels ont été sacrifiés en 30 ans au profit de la métropole toulousaine qui attire à elle toutes les activités. L'État doit endiguer la désindustrialisation des territoires ruraux.

Le délégué interministériel aux restructurations, qui est venu à Tarbes le 26 janvier, nous a dit que des projets de reprise étaient à l'étude ; pourtant à huit jours du verdict, rien n'a filtré.

Il existe un client, Nexton, qui représente 36 % de la production du site. Il ne faut pas que le couperet du 26 février tombe sur la tête des salariés. L'État saura-t-il faire pression sur Vallourec, dont il est actionnaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE, ainsi que sur quelques bancs des groupes SOCR et UC)

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - La mise en vente de Vallourec Drilling a facilité la reprise de certains sites. Le délégué interministériel est venu à Tarbes le 26 janvier et a fait le point le 16 février sur la recherche des repreneurs. Beaucoup est fait pour donner de la visibilité aux salariés. Deux repreneurs potentiels ont visité le site récemment. Le Gouvernement maintient sa pleine vigilance sur le devenir des salariés du site. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

PAC

Mme Christine Bonfanti-Dossat .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) La PAC est l'un des fondements des politiques européennes. Depuis 1957, les pays dotés d'un potentiel agricole important bénéficient de transferts nets des pays qui ne subviennent pas à leurs besoins alimentaires. C'est une mesure de justice et de solidarité.

Au cours de ces dernières décennies, malgré les coups de boutoir répétés de pays non agricoles et des autorités bruxelloises pour en finir avec la PAC, la France a toujours résisté. La défense des agriculteurs en Europe a toujours été une ligne rouge. Or le président de la République et le Gouvernement se préparent à céder et à accepter une baisse du budget de la PAC.

Si cet abandon était vrai, le moment serait mal choisi alors que nos agriculteurs sont au bord de l'asphyxie. Baisser le budget de la PAC de 10, 20 ou 30 % serait une trahison. Le président de la République sera-t-il le premier à l'adopter ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Personne, au Gouvernement, ni dans cette assemblée, ne souhaite abandonner la PAC. Le ministre de l'agriculture l'a redit hier : la PAC est et restera une de nos priorités. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains) La France en porte une vision ambitieuse et responsable pour transformer notre système de production remplaçant une exigence quantitative par une exigence qualitative. (Mêmes mouvements) Il faudra renforcer son budget pour nos territoires et nos agriculteurs.

Mais il ne s'agit pas que de sommes d'argent, la PAC doit aussi porter une ambition environnementale renforcée. (On se récrie à droite.) Vous n'aimez donc pas l'environnement ? (Mêmes mouvements, couvrant la voix de l'orateur) Je suis surpris ! Il faudra pourtant bien porter cette ambition qualitative pour les agriculteurs et pour les Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Christine Bonfanti-Dossat.  - Votre réponse me réjouit, mais je ne suis pas rassurée et peine à croire que la PAC ne va pas vraiment baisser. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Carte scolaire

M. Christian Manable .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur quelques bancs du groupe Les Républicains) Imaginez, Monsieur le Ministre de l'Éducation nationale, devoir marcher quatre mois avec des béquilles. On propose des béquilles plus adaptées mais que vous ne pourrez utiliser qu'un mois ; les trois mois restant, vous ne pourrez faire autre chose que vous tenir assis : est-ce bien satisfaisant ? C'est pourtant ce que vous faites avec le dédoublement de classes en éducation prioritaire, qui sacrifie le dispositif « plus de maîtres que de classes » et oppose les territoires, alors qu'il faut tenir compte de la spécificité de chacun d'eux.

Dans la Somme, vous supprimez des postes à Fressenneville et à Eaucourt-sur-Somme dont les effectifs d'élèves y sont stables !

La Somme est le deuxième département de France métropolitaine après l'Aisne, où les enfants ont le plus de difficultés de lecture : 14,9 %, contre 9,6 % dans le pays.

Monsieur le Ministre, faites en sorte que la prochaine rentrée scolaire ne soit pas le naufrage du Titanic ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur quelques bancs du groupe CRCE)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Parlons de la réalité, plutôt qu'agiter des fantasmes sur cette question aussi importante qu'est l'éducation. À la rentrée 2018, il y a 32 650 élèves de moins dans le premier degré mais 3 881 maîtres en plus. Le taux d'encadrement augmente.

Prenons votre département, Monsieur Manable : 782 élèves de moins mais 15 nouveaux postes de professeur ! 38 fermetures de classes, mais 77 ouvertures ! Certes, des écoles ont été bloquées ; mais les fermetures de classes ont eu lieu aussi sous le précédent gouvernement que vous souteniez - et que je soutenais aussi... (Exclamations sur de nombreux bancs)

Il faut être aveugle pour prétendre que l'on doit maintenir les classes là où les effectifs baissent. (On proteste à droite.) N'opposez pas les zones rurales aux quartiers : dans la Somme, le dédoublement des classes concerne le quart des élèves de CP. (Exclamations à droite, applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Fermetures de classes uniques dans le primaire

M. Jean Louis Masson .  - Dans mon département, une classe unique de dix-neuf élèves fermera à cause d'une légère baisse d'effectifs : dans la ruralité, on ferme une classe à dix-huit élèves, alors que le seuil est de douze élèves dans les quartiers sensibles.

On déshabille les zones rurales pour habiller les quartiers à problème ! Monsieur le Ministre de l'Éducation nationale, pourquoi refusez-vous à la ruralité, ce que vous acceptez pour les quartiers à problèmes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Depuis des années, nous savons que, par les effectifs d'enseignants, les classes des écoles rurales sont favorisées par rapport aux classes des écoles urbaines - tout le monde le sait mais on ne le remet pas en cause. Or, ici, vous faites l'inverse ! Pour avoir été élu des Alpes-de-Haute-Provence, je sais les difficultés de l'accès à la scolarité dans la ruralité. Ici, vous nous dites que la ruralité devrait par définition bénéficier des seuils les plus favorables : est-ce parce que vous considérez qu'étant à la campagne, on a forcément des difficultés scolaires ? (Vives protestations à droite) Le déterminisme social, Monsieur le sénateur, est une évidence, c'est là notre échec collectif. En fonction de la catégorie socio-professionnelle des parents, du lieu d'habitation, il y a des conséquences. En dédoublant les classes et en ciblant les publics les plus fragiles, nous faisons oeuvre de justice !

Alors que nous avons 1 003 élèves de moins en Moselle, il y a vingt nouveaux postes d'enseignants de plus.

Au cours de deux quinquennats successifs, vous avez soutenu des majorités (Rires sur de nombreux bancs) qui réduisaient les effectifs chaque année ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Jean Louis Masson.  - Vous dites n'importe quoi ! Étant non inscrit, je ne soutiens aucun Gouvernement. Si on supprime une classe de dix-huit élèves, on supprime une école dans une petite commune, alors qu'en ville, le seuil ne vise qu'un niveau. Pourquoi dans la ruralité, doit-on être dix-neuf à tous les cours, alors que dans les quartiers à problème et dans les classes où il n'y a qu'un cours, vous fixez ce seuil à douze ? Et en plus, Monsieur le Ministre, vous êtes content de vous. C'est une honte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe UC)

La séance est suspendue à 17 h 45.

présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président

La séance reprend à 17 h 50.