SÉANCE

du mardi 20 novembre 2018

22e séance de la session ordinaire 2018-2019

présidence de Mme Catherine Troendlé, vice-présidente

Secrétaires : Mme Jacky Deromedi, Mme Françoise Gatel.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle 35 questions orales.

Envasement de la Rance

Mme Sylvie Robert .  - Voici un dossier qui s'enlise depuis plusieurs décennies. La Rance, qui serpente dans les Côtes-d'Armor et l'Ille-et-Vilaine, doit faire face à une situation écologique de plus en plus critique. En quatre ans, pas moins de 200 000 m3 de sédiments ont été charriés, et ce, malgré plusieurs opérations visant à désenvaser la Rance. À certains endroits, les masses de boues grises ont rendu la navigation impossible, portant ainsi préjudice aux riverains et aux communes situées le long du cours d'eau.

L'impact sur la biodiversité est sensible : disparition des poissons plats, raréfaction des oiseaux nicheurs. Pourtant, en 2016, le rapport issu d'une mission interministérielle concluait déjà que « le phénomène d'envasement de l'estuaire de la Rance a atteint aujourd'hui un niveau tel qu'il convient de réduire au maximum les dépôts, voire de mettre un terme à la progression des volumes de sédiments. » Le rapport proposait d'adopter un programme expérimental sur cinq ans en vue d'extraire 250 000 m3 de sédiments, tout en recherchant une solution pérenne à plus long terme.

Néanmoins, ce plan quinquennal achoppe toujours sur la question budgétaire. Jusqu'à présent, EDF, en tant que concessionnaire de l'usine marémotrice avait payé la quasi-intégralité des opérations de désenvasement mais aujourd'hui, plus d'un tiers du plan, d'un montant initial de 9,5 millions d'euros, reste non financé, EDF refusant d'augmenter sa participation et certains acteurs refusant de compenser ce qui leur semble relever de la responsabilité de l'opérateur.

Où en est le dialogue avec les collectivités territoriales concernées ? Comment finaliser le financement du programme quinquennal ? Associations, élus locaux, riverains, plaisanciers attendent un soutien affirmé de l'État.

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - M. de Rugy, retenu, m'a chargé de vous répondre.

Le point d'étape du préfet en juillet a confirmé les avancées : le désenvasement du chenal par EDF a été réalisé au début de l'année 2018, les travaux d'aménagement du centre de transit ont débuté à la fin du mois d'août et le curage du piège à sédiments à la mi-septembre.

La maîtrise d'ouvrage du programme sera assurée par l'établissement public territorial du bassin Rance-Frémur qui reprend à sa charge la gestion sédimentaire de la Rance, à l'exception des actions de curage du « Lyvet 3 ».

La gouvernance, qui a été validée par l'ensemble des acteurs, comprend le comité de pilotage, le comité des financeurs, le conseil scientifique et la commission locale de l'eau Rance. Le comité de pilotage, coprésidé par le président du conseil régional et le préfet de région, intègre les acteurs locaux et, notamment, les élus de l'association Coeur émeraude qui pourront avoir un rôle d'impulsion, compte tenu de leur implication historique sur le dossier. Le conseil scientifique, dont la composition a été validée, a été installé en septembre ; il devra, notamment, traiter la question de l'utilisation des bassins de stockage après l'opération afin de déterminer les différentes mesures de gestion sédimentaires qui peuvent être conjuguées et la durée de dépose sur le site de stockage.

Au plan financier, EDF participe à hauteur de 50 % à l'opération « Lyvet 3 », soit 550 000 euros. L'objectif est la parité entre EDF et les autres acteurs publics pour le financement des travaux.

François de Rugy accorde toute confiance au préfet de région pour la conduite des opérations.

Mme Sylvie Robert.  - J'espère de tout coeur une décision conjointe de financement de la part des acteurs publics.

Déchets plastiques lourds en Dordogne

M. Claude Bérit-Débat .  - Le traitement des déchets est assuré en Dordogne, comme dans de nombreux départements, par un syndical départemental, le SMD3. Depuis la fermeture de l'usine Recymap de Saint-Pierre-de-Côle qui traitait les déchets plastiques lourds pour en faire des paillettes en décembre 2017, il est obligé d'enfouir ces déchets, ce qui est en parfaite contradiction avec l'objectif de 100 % de plastique recyclé en 2025. Certes, la feuille de route pour l'économie circulaire prévoit une fiscalité aménagée pour rendre la valorisation moins chère que l'élimination mais cela ne suffira pas quand les collectivités territoriales n'ont pas de marge de manoeuvre sur la réduction des volumes. Si elles respectent tous les objectifs de la loi sur la transition énergétique, le coût supplémentaire sera au moins d'un euro par habitant.

Ne pourrait-on pas créer une taxe sur les produits non recyclables, une sorte de TGAP en amont, ou même une responsabilité élargie du producteur (REP) qui prendrait en charge tous les projets recyclables ?

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Je vous réponds à la place de M. de Rugy qui est retenu.

Aujourd'hui, le recyclage peine à se développer. Le Gouvernement, à travers la feuille de route pour l'économie circulaire, fruit de plus de six mois de concertation, a décidé une réforme globale de la fiscalité afin de rendre le recyclage des déchets économiquement plus attractif que leur mise en décharge ou leur incinération. Cela repose sur une trajectoire de la TGAP revue à partir de 2021 telle que le coût moyen de l'élimination des déchets devienne supérieur au coût moyen de leur recyclage. En parallèle, il s'agit de donner de nouvelles capacités financières aux collectivités pour investir et pour s'adapter en allégeant la pression fiscale sur les activités de tri et de recyclage. Cela se traduira notamment par une baisse du taux de la TVA pour les opérations de prévention, de collecte, de tri et de recyclage des déchets mais également par une baisse des frais de gestion de la TEOMi pour les collectivités qui font le choix d'opter pour une tarification incitative.

La réforme des filières REP sera également menée l'an prochain. Elle permettra de développer le recyclage en fixant de nouveaux objectifs aux éco-organismes, les bonus-malus pour favoriser l'incorporation de matière plastique recyclée, et de créer de nouvelles filières REP. L'objectif est de s'appuyer sur l'écoconception des produits pour stimuler tant l'offre que la demande en matière recyclée pour qu'une véritable économie du recyclage se développe sur notre territoire. Soixante entreprises et fédérations professionnelles se sont déjà engagées à incorporer près de 300 000 tonnes en plus de matières plastiques recyclées. C'est un premier pas mais il faudra aller au-delà. D'autres idées pourront être débattues lors de l'examen du projet de loi sur l'économie circulaire.

Aménagement de la liaison routière entre Saint-Nazaire et Laval

M. Christophe Priou .  - Le 29 avril 2018, Mme Élisabeth Doineau et le maire de Blain en Loire-Atlantique, Jean-Michel Buf, sont intervenus auprès du Premier ministre pour rappeler l'importance majeure de la liaison routière entre Saint-Nazaire et Laval. Depuis plusieurs décennies, les élus et les acteurs de la vie économique des départements de la Loire-Atlantique, de la Mayenne et du Maine-et-Loire sont réunis pour faire aboutir ce dossier.

Des mesures ont été mises en place comme le contournement de Cossé-le-Vivien, dans le Maine-et-Loire le contournement de Pouancé et, en Loire-Atlantique, les contournements de Châteaubriant puis Treffieux ainsi que des créneaux de dépassement en deux fois deux voies. Sur la partie de la route nationale RN171 de Nozay à Saint-Nazaire, l'État a concentré ses investissements sur la section entre Savenay et le futur contournement de Bouvron, laissant le tronçon de Nozay à Blain sans nouvelles perspectives. Pourtant, la sortie de la deux fois deux voies Rennes-Nantes vers la Grigonnais est particulièrement dangereuse. La traversée de Blain n'est plus supportable pour les habitants et un contournement est devenu absolument nécessaire. La commune est traversée par 13 000 véhicules par jour. Avec l'axe Redon-Nord-Erdre, ce nombre s'élève à 23 000 par jour avec une projection à 31 000 véhicules quotidiens dans moins de dix ans !

Une alternative est étudiée entre la RN137 et la RN171 vers Bouvron. Une autre alternative semblait se dessiner pour créer une route nouvelle de la RN173 à la RN171 au sud de Blain. Pour autant cette dernière solution ne permettra pas un aménagement complet de contournement de Blain.

Quelles sont les dernières positions du comité consultatif piloté par la préfecture à la lumière de l'abandon du projet de nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes et, donc, de la desserte routière dédiée ?

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - L'État a engagé une étude de faisabilité sur la liaison entre la RN137 et la RN171 en co-maîtrise d'ouvrage avec le conseil départemental de Loire-Atlantique. Cette démarche a permis d'établir un état des lieux de la RN171 et des axes assurant la liaison Nort-sur-Erdre-Bouvron.

Vous le savez, l'abandon du projet de Notre-Dame-des-Landes a modifié le cadre général de la réflexion ; un temps supplémentaire a été nécessaire pour mener de nouvelles études qui ont été restituées le 5 juillet lors d'un comité de suivi auquel vous étiez convié. Deux des cinq scénarios possibles prévoient un contournement complet de Blain.

Une concertation publique sera engagée en 2019, votre avis sera bien sûr pris en compte. Quand elle sera achevée, je ne manquerai pas de vous informer des suites que nous donnerons sur l'aménagement de cet axe essentiel au bon développement de la Loire-Atlantique.

M. Christophe Priou.  - Le contournement de Blain, très attendu, doit s'inscrire dans le projet stratégique pour les mobilités du Grand Ouest. On sait les conséquences de l'abandon du projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes pour nos territoires, nous demandons des mesures compensatoires extrêmement fortes.

Axe Rhône-Saône-Moselle et place des transports en Lorraine

M. François Grosdidier .  - L'axe Rhône-Saône-Moselle était le premier axe Nord-Sud à l'époque romaine. Aujourd'hui, tout dysfonctionne et le pire est pour demain car les routes de la Soie arrivent à Rotterdam, se prolongent par chemin de fer à Bettembourg puis se diffusent au Sud par notre réseau routier et autoroutier. Le Gouvernement français en répercute le coût sur les usagers français, après avoir renoncé à faire payer le transit international. Le fiasco de l'écotaxe en 2013 s'est soldé par le versement d'un milliard d'euros d'indemnités à Ecomouv', la perte de centaines d'emplois et d'un milliard d'euros par an pour financer nos infrastructures. Résultat, ce sont les Lorrains, dont 100 000 travailleurs transfrontaliers, et tous les autres voyageurs qui vont payer un péage sur l'A31 bis, comme l'a décidé l'État le 24 septembre 2018 - jusqu'à 6,36 euros par automobiliste. Ceux-ci se révoltent en mettant leur gilet jaune...

Deuxième décision funeste, l'abandon de la liaison fluviale Moselle-Saône au prétexte qu'elle n'est pas financièrement soutenable. L'idée est de relier le Rhin à la Méditerranée. La défendrez-vous à l'échelon européen, le seul qui soit pertinent ?

Cerise sur le gâteau, la suppression par la SNCF de la liaison ferroviaire quotidienne Metz-Nice en décembre. Pour aller dans le Sud, les Lorrains devront passer par Strasbourg ou Paris. Madame la ministre, allez-vous rétablir cette liaison et réduire l'embouteillage ferroviaire à Lyon qui empêche le développement de l'autoroute ferroviaire entre Bettembourg et Perpignan ?

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Le Gouvernement n'a pas l'intention de restaurer l'écotaxe. L'état de nos réseaux de transport étant très dégradé, il a décidé d'inscrire dans la loi Mobilités une programmation des infrastructures sincère qui prévoit une augmentation de 40 % de l'investissement dans les systèmes de transport pour les cinq prochaines années. En 2019, cette augmentation des investissements a été assurée par redéploiement au sein du budget de l'État mais il faudra une ressource nouvelle et durable à hauteur de 500 millions d'euros à partir de 2020.

Concernant le secteur nord de l'A31 bis, la réalisation d'un contournement de Thionville en tracé neuf est nécessaire. Un débat public sur les différentes options de tracé vient d'être lancé. Je sais la contrainte financière que représente un péage pour les usagers de l'A31 mais ce dernier est indispensable pour répondre rapidement aux difficultés qu'ils connaissent.

Le projet Rhin-Saône-Moselle a un coût hors de portée, même avec le soutien de l'Union européenne.

Enfin, les travaux à la gare de Lyon-Part-Dieu jusqu'en 2023 compromettent pour le moment la liaison directe entre Metz et Nice. La SNCF a rencontré les élus pour leur présenter des solutions de remplacement. Un groupe de travail se réunira pour aborder en amont les évolutions de dessertes TGV et TER. Enfin, la loi pour un nouveau pacte ferroviaire impose la création de comités de desserte au sein desquels les élus seront représentés.

Développement des trains intercités de nuit

Mme Viviane Artigalas .  - De nombreuses villes demeurent à cinq heures de train de Paris et les temps de trajet sont souvent de plus de sept à huit heures sur les transversales vers Lyon, Strasbourg, Nantes, Lille ou Nice. Dans ces conditions, le train intercités de nuit présente de nombreux avantages : il permet d'arriver tôt le matin, de partir après une journée de travail ou d'arriver en centre-ville. Complémentaire des lignes à grande vitesse, il peut devenir une offre de mobilité touristique attractive si les voitures sont rénovées et le confort amélioré.

À l'étranger, un opérateur autrichien a démontré que les trains de nuit, avec un bon niveau de services, peuvent réaliser des bénéfices ; en France, cette qualité de services est très basse et ces trains de nuit font souvent l'objet d'annulations et de déprogrammations. L'unique train de nuit actuel pour le sud-ouest dessert Rodez, Toulouse, Latour de Carol, Portbou. Il n'y a pas assez de voitures pour chaque destination, seulement trois pour Rodez et Latour de Carol, et ce train affiche souvent complet. Les horaires ne peuvent être optimisés pour autant de destinations disparates et, surtout, la desserte des Hautes-Pyrénées, mon département, a été oubliée. Je regrette cet oubli ainsi que la suppression récente de la liaison de nuit Paris-Tarbes-Hendaye, la célèbre palombe bleue. L'aménagement du territoire s'en trouve déséquilibré avec un enjeu d'équité territoriale.

À l'aube de la présentation du projet de loi Mobilités et au moment où le maintien et la rénovation des lignes reliant Paris aux Pyrénées-Orientales d'un côté, et aux Hautes-Alpes de l'autre, viennent d'être annoncés, l'État serait-il prêt à améliorer la desserte du sud-ouest avec un deuxième train de nuit reliant les régions Nouvelle Aquitaine et Occitanie ?

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Pour avoir récemment emprunté le train de nuit, je suis convaincue, comme vous, que c'est un atout pour l'accessibilité et le développement économique et touristique des territoires. Les deux lignes existantes, Paris-Briançon et Paris-Cerbère, seront maintenues, ce qui constitue un effort de subvention de plus de 20 millions d'euros par an. La rénovation du matériel roulant sera financée à hauteur de 30 millions. Ainsi les couchettes seront changées, des prises et le WIFI installés.

En revanche, une nouvelle ligne vers la Nouvelle-Aquitaine et l'Occitanie n'est pas envisageable dans le cadre de la convention des trains d'équilibre du territoire, d'autant que l'offre ferroviaire s'est sensiblement améliorée dans le Sud-ouest avec la LGV Paris-Bordeaux-Bayonne. Je rappelle également qu'à compter de 2020 un opérateur pourra librement mettre en place de tels services.

Mme Viviane Artigalas.  - La rénovation des trains de nuit est indispensable. Je continuerai d'attirer votre attention sur l'isolement des Hautes-Pyrénées.

Aménagement de la nationale 19

M. Laurent Lafon .  - Le contournement de Boissy-Saint-Léger par la RN19, dont les travaux sont lancés, constitue une étape importante mais ne doit pas faire perdre de vue l'objectif majeur du projet : l'aménagement de la RN19 jusqu'à la Francilienne.

L'année prochaine, nous fêterons le 25e anniversaire de l'inscription de la déviation au schéma directeur de la région Ile-de-France. Voilà plus de trente ans que l'association pour l'aménagement de la RN19 a été créée par les maires pour alerter l'État sur les risques que faisait peser l'absence d'opérations routières structurantes, au vu de la forte croissance démographique du territoire. Le temps leur a donné raison.

En mars 2018, la commission permanente de la région Île-de-France a débloqué 1,5 million d'euros de crédits pour financer les études préalables en vue de la saisine de la Commission nationale du débat public, conformément au contrat de plan État-région 2015-2020.

Quelle est la position de l'État sur ce dossier ? Va-t-il s'engager dans la poursuite du réaménagement et selon quel calendrier ?

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Je suis consciente des attentes des usagers. Une première phase d'aménagement consistant en la déviation de Boissy-Saint-Léger est en cours de travaux. La réalisation de la tranchée couverte s'est achevée à l'été 2017. Les travaux du diffuseur Sud ont, quant à eux, démarré au printemps 2017 et l'achèvement de l'opération est prévu à la fin de l'année 2019. La mobilisation financière de l'Etat et de la Région 11e-de-France aura permis la bonne avancée du projet.

Le projet d'aménagement de la RN19 entre Villecresnes et la Francilienne constituera la seconde phase de l'aménagement de la RN19 en route express jusqu'à la RN104. Pour cette seconde phase de l'opération, 3 millions d'euros, à parité entre l'Etat et la région, ont été inscrits au CPER 2015-2020.

Une convention de financement pour 2015 à 2020 a été signée avec la région Île-de-France. Rassurez-vous, l'engagement de l'État est entier. Les services réalisent des études et le calendrier reste inchangé. La Commission nationale du débat public pourrait être saisie en 2020.

Voies réservées sur les axes autoroutiers

M. Jean-Raymond Hugonet .  - Les conditions d'utilisation de la voie en site propre sur l'autoroute A10, en Essonne entre Villebon-sur-Yvette et la gare de Massy, sont définies par un arrêté préfectoral du 16 novembre 2017.

Cette voie dédiée aux bus vise à réduire et à fiabiliser le temps de parcours des usagers, en leur permettant de franchir la congestion la plus dure dans ce secteur. L'expérience quotidienne montre que cet objectif a été atteint.

En revanche, la voie est réservée aux seuls véhicules assurant les services de transport public régulier de personnes organisés par Île-de-France mobilités ou par les services du réseau des personnes à mobilité réduite. Les navettes privées mises en place par certaines sociétés, notamment Thalès air défense, fleuron de la technologie française, à Limours, dont j'ai été maire pendant dix-sept ans, n'étant pas considérées comme du transport public, elles ne sont malheureusement pas autorisées à utiliser cette voie pourtant disponible.

Autoriser la circulation de ces navettes sur cette voie dédiée de l'autoroute A10 entre Villebon-sur-Yvette et la gare de Massy serait une mesure d'efficacité et de bon sens qui ne coûterait pas un centime de plus à qui que ce soit et qui permettrait un gain de temps et d'organisation pour leurs utilisateurs.

Envisagez-vous d'ouvrir la circulation aux navettes privées sur l'A10 ? Plus largement, quelles mesures comptez-vous prendre pour encadrer et favoriser le développement de services de mobilité propres sur l'ensemble du territoire francilien ?

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - La voie réservée sur l'A10 aménagée en 2017 fait partie du programme prioritaire de voies dédiées sur les routes nationales franciliennes pour 2014-2020. D'un montant de 65 millions d'euros, ce programme vise à encourager l'utilisation des transports en commun en les rendant plus fiables et performants, et donc plus attractifs. Après la mise en service de voies réservées sur l'A1, l'A6a, l'A10 et l'A12, il se poursuivra avec la mise en service prochaine d'une voie réservée sur l'A3 et des études des voies réservées sur la RN104 et la RN118. La loi Mobilités développera plus avant ces solutions.

Quant à votre demande concernant les navettes privées, elle est actuellement en cours d'instruction. Je vous tiendrai informé des résultats auxquels nous serons parvenus avec le ministre de l'intérieur.

M. Jean-Raymond Hugonet.  - Merci de votre intérêt pour ce sujet. Pour nous territoires périurbains, vous savez combien le développement économique et le transport sont étroitement liés.

Marnières du plateau de Caux

Mme Nelly Tocqueville .  - J'attire votre attention sur la problématique des cavités souterraines, plus communément appelées marnières, sujet particulièrement sensible en Seine-Maritime, dans le pays de Caux. Celles-ci sont le résultat de l'exploitation de la craie à des fins agricoles. Elles sont constituées d'un puits et d'une ou plusieurs galeries souterraines. Bien que ce genre d'exploitation n'existe plus, elles réapparaissent et provoquent des affaissements de terrain. Le plus souvent, ces marnières ne sont pas décelables a priori. De nombreux cas se déclarent chaque année. Des familles doivent abandonner leurs logements. Beaucoup de propriétaires se retrouvent dans une situation de grand désarroi. Le fonds Barnier peut parfois être mobilisé, ainsi que des aides départementales. L'un d'eux doit payer 100 000 euros, dont 20 000 euros de TVA. Cependant les subventions sont calculées sur le hors taxes et la TVA à 20 % reste à la charge du propriétaire.

Est-il possible, dans le cadre du débat sur le projet de loi de finances pour 2019, d'envisager un taux nul ou du moins réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur ces dossiers qui sont peu nombreux mais qui impactent fortement les particuliers concernés ?

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - M. de Rugy, qui ne peut être présent ce matin, partage votre préoccupation. Le ministère est engagé sur le sujet depuis des années dans des actions ayant pour objectif d'améliorer la connaissance et de réduire le risque inhérent à l'existence de ces carrières souterraines. À ce titre, des guides et documents méthodologiques sur l'étude, la prévention et la gestion du risque associé aux cavités souterraines ont été élaborés, en lien avec les collectivités locales. En complément, le Bureau de recherches géologiques et minières réalise actuellement un inventaire des cavités souterraines abandonnées en Normandie orientale.

Sur le plan financier, collectivités territoriales et particuliers sont accompagnés par le fonds Barnier - 40 % à 50 % d'aide pour les collectivités territoriales, 30 % pour les particuliers si les travaux sont moins chers que l'expropriation.

Beaucoup de collectivités territoriales se mobilisent sur cet enjeu important pour la région. Malgré cela, le problème reste difficile à traiter et M. de Rugy prévoit de missionner le Conseil général de l'environnement et du développement durable pour qu'il améliore le dispositif, notamment sur le volet d'accompagnement financier.

Contrôle technique des véhicules associatifs assurant le transport sanitaire

Mme Catherine Procaccia .  - L'arrêté du 4 septembre 2017, entré en vigueur le 20 mai 2018, a introduit des nouveaux points de contrôle pour les véhicules de secours associatifs équipés d'avertisseurs sonores et lumineux, tels que ceux utilisés par la Croix-Rouge française dans le cadre de sa mission de premiers secours à la personne. Les modifications introduites par ce nouvel arrêté et leur application stricte par les opérateurs agréés pour le contrôle technique des véhicules légers amènent ces organismes à recevoir des avis défavorables pour différents types de véhicules associatifs, avec pour motif : « défaillance majeure ».

Sans intervention du Gouvernement, les équipements sonores et lumineux actuellement installés sur les véhicules de secours de la Croix-Rouge devront être retirés. Cela aura pour conséquence de restreindre l'usage et l'efficacité des secours : sans avertisseur, il leur sera impossible d'obtenir la priorité sur la voie publique lors d'interventions urgentes et ils y arriveront plus tard. Que compte faire le Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Rassurez-vous, les règles du contrôle technique établies le 20 mai 2018 sont compatibles avec les caractéristiques spécifiques des véhicules associatifs assurant les services d'urgence aux personnes. Les feux et avertisseurs doivent être mentionnés sur le certificat d'immatriculation du véhicule sous la mention d'une affectation au transport sanitaire ; dans ce cas, la présence de ces équipements spécifiques n'est pas sanctionnée lors du contrôle technique. Cette mention peut être ajoutée si nécessaire en présentant le véhicule en réception à titre isolé à la Dreal et en recourant à la téléprocédure de l'Agence nationale des titres sécurisés.

Mme Catherine Procaccia.  - Je transmettrai ces précisions à la Croix-Rouge et à la Protection civile auxquelles on refuse actuellement le contrôle technique, sans doute à cause du certificat d'immatriculation.

Situation des personnes en situation de handicap en Seine-Saint-Denis

Mme Éliane Assassi .  - Ma question porte sur la pénurie de places en instituts médico-pédagogiques du département de Seine-Saint-Denis et, plus généralement, sur la prise en charge largement insuffisante des enfants, adolescents et adultes en situation de handicap.

Selon la MDPH, il n'existe que 1 800 places dans les instituts médico-éducatifs (IME), médico-professionnels (Impro) et thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (ITEP), pour les 3 400 enfants et adolescents orientés vers ces établissements. Les conséquences en sont la déscolarisation, une mauvaise orientation d'enfants et d'adolescents fragiles, le recours à des écoles privées hors contrat dont le coût ne peut être pris en charge que partiellement par l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH).

Concernant les adultes, 450 sont placés en Belgique quand 165 jeunes adultes de plus de 20 ans sont maintenus dans les établissements pour enfants et adolescents au titre de l'« amendement Creton ». Selon le plan départemental Défi handicap, il manque 900 places dans les structures pour adultes. Les institutions de Seine-Saint-Denis sont confrontées à des impasses.

L'agence régionale de santé n'a pas pris la mesure de la gravité de la situation alors que l'Éducation nationale n'offre aucun débouché concret aux familles à part la déscolarisation.

Au nom des familles, nous appelons le Gouvernement à prendre des mesures d'urgence pour permettre aux établissements et services de Seine-Saint-Denis de répondre aux besoins.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Je partage votre constat. Cette situation n'est pas acceptable. Ce constat n'est malheureusement pas nouveau, puisqu'il rejoint celui de la Cour des comptes en 2012 dans un rapport sur les missions de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), regrettant l'insuffisance du rééquilibrage de l'offre médico-sociale entre les territoires. La CNSA n'a pourtant revu qu'en 2017 sa méthode de répartition des crédits pour renforcer l'équité territoriale.

Aussi, Sophie Cluzel a pris, dès sa nomination, la décision de renoncer à l'emploi de la « réserve ministérielle » pratiquée par tous les gouvernements précédents, dont la Cour des comptes avait critiqué la pratique opaque et noté qu'elle était un frein au rééquilibrage. L'intégralité des crédits nouveaux de 2018 a ainsi été répartie selon des critères pour mieux prendre en compte les besoins en Île-de-France.

D'ores et déjà bénéficiaire prioritaire de l'enveloppe de 180 millions d'euros de transformation de l'offre, cette région a disposé pour cette seule année d'une enveloppe de plus de 18 millions d'euros pour développer et transformer son offre, améliorer l'accompagnement des personnes autistes et prévenir les départs non souhaités vers la Belgique.

Les tensions sur l'offre francilienne sont fortes, en particulier en Seine-Saint-Denis.

L'ARS priorise ainsi ce département dans sa politique d'équipement et a lancé un plan de développement des réponses inclusives, mobilisant, outre ces crédits, les moyens juridiques plus souples qui lui ont été accordés de manière dérogatoire par le décret du 29 décembre 2017. Le premier appel à manifestation d'intérêt, lancé en juillet, a rencontré un vif succès : 305 dossiers de candidature ont été déposés. Les premières autorisations seront délivrées avant la fin d'année.

Les projets qui n'auraient pas pu être retenus dans cette première phase pourront l'être dans le cadre d'une seconde vague d'appel à manifestation d'intérêt, mais aussi des contrats pluriannuels d'objectifs que l'ARS doit engager tout au long de l'année 2019.

Cette politique ne pourra porter pleinement ses fruits qu'en étroite coopération avec les départements qui partagent la responsabilité de cette politique avec l'État, et un travail de concertation est déjà engagé.

Mme Éliane Assassi.  - Que de nombreux enfants et adultes soient privés de leurs droits fondamentaux est choquant dans un pays comme le nôtre. Ils ne sauraient attendre. Ils l'ont déjà trop fait. Le Gouvernement doit prendre la mesure de l'urgence pour le pays et notamment pour la Seine-Saint-Denis. C'est une question d'humanité.

Financement du plan Pauvreté par les départements

Mme Catherine Procaccia, en remplacement de M. Édouard Courtial .  - Faire mieux avec moins, un principe devenu, année après année, au fil des baisses inédites des dotations de l'État depuis la précédente législature, plus qu'une ligne de conduite, un crédo et même une condition de survie pour de nombreuses collectivités. Et ce, malgré leurs efforts tous aussi inédits, pour certaines d'entre elles de réduction des dépenses de fonctionnement par respect de la parole donnée aux électeurs autant que des deniers publics, fruits du travail de nos compatriotes.

Mais depuis peu, il s'agit de faire mieux avec plus, non pas de moyens, mais de compétences et de dépenses supplémentaires non compensées par l'État. Le plan Pauvreté du Gouvernement en est un parfait exemple pour les conseils départementaux.

Car si le président de la République a annoncé une compensation de 8,5 milliards d'euros, elle est toujours en deçà de ce que l'État doit chaque année aux départements pour compenser des dépenses qu'ils effectuent pour lui et qui ne leur sont pas remboursées.

Je prendrai deux exemples concrets. Ainsi, le plan Pauvreté renforce l'accompagnement vers l'emploi, c'est-à-dire le RSA. Or, avant même cette annonce, l'État ne remboursait que 47 % du coût du RSA aux départements. Et vous leur demandez de dépenser toujours plus sur leurs budgets propres : ce n'est pas raisonnable.

Deuxième exemple : le plan Pauvreté étend l'aide sociale à l'enfance jusqu'à 21 ans. Certes, c'est le coeur de métier du département, mais la politique migratoire qui est menée depuis 2012, quant à elle, ne l'est pas et les choix gouvernementaux font littéralement exploser la demande d'accueil des mineurs étrangers isolés. Avant même cette annonce, les centres d'accueil étaient déjà saturés. Et vous demandez aux départements d'aller au-delà : là encore, cela n'est pas raisonnable.

Selon un principe général du droit, personne ne peut se prévaloir de sa propre turpitude. C'est pourtant bien ce que fait l'État en se défaussant sur les conseils départementaux mais plus généralement sur les collectivités territoriales en leur demandant toujours plus d'efforts budgétaires qu'il ne s'applique pas à lui-même.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Vous avez raison : la stratégie doit être mise en oeuvre au plus près des territoires. L'État a pour mission d'organiser un pilotage par tous les acteurs, les associations comme les collectivités à l'échelon régional. Des animateurs seront désignés parmi eux pour faire avancer le travail collectif sur les différentes thématiques de la stratégie.

En ce qui concerne les mesures relevant de la compétence des départements, chefs de file en matière d'aide sociale, la stratégie prévoit une contractualisation ambitieuse avec ces derniers. Les travaux de contractualisation ont déjà été engagés avec les territoires démonstrateurs de la stratégie et elle sera déployée ensuite avec l'ensemble des départements avant la fin du premier semestre 2019.

La contractualisation est dotée de 135 millions de crédits dont 50 millions pour le fonds d'appui aux politiques d'insertion en 2019, et elle disposera d'au moins 210 millions en 2022.

Elle porte sur un socle de thématiques et d'actions dans les domaines de l'aide sociale à l'enfance, de l'insertion, des droits fondamentaux des enfants et du travail social.

De plus, les départements pourront proposer des actions en lien avec les ambitions de la stratégie, par exemple en matière de prévention spécialisée ou de PMI, auxquelles l'État apportera son soutien financier.

Notre stratégie émane d'une large concertation de terrain et sa mise en oeuvre requiert une gouvernance nouvelle, pilotée et portée par l'ensemble des acteurs, à partir des territoires, car c'est bien sur le terrain que le combat doit être mené.

Mme Catherine Procaccia.  - En cette semaine du Congrès des maires, entendez le cri d'alarme des collectivités territoriales. Les personnes à prendre en charge sont de plus en plus nombreuses et la contractualisation ne permet pas de faire face à l'afflux des demandes.

Fin du numerus clausus et années intermédiaires

Mme Catherine Procaccia, en remplacement de M. Bernard Bonne .  - Lors de la présentation du plan stratégique de transformation du système de santé, le président de la République a annoncé la fin du numerus clausus à partir de 2020 et du concours de la première année commune aux études de santé (Paces).

Plus personne ne défend en l'état ce dispositif qui visait, lors de son instauration, à limiter le nombre de médecins formés et les dépenses d'assurance-maladie, d'autant que cette première année est unanimement pointée comme un gâchis, dans la mesure où plus des trois quarts des quelque 60 000 inscrits en Paces échouent à l'issue de cet examen reposant largement sur les seules capacités de mémorisation des candidats.

Or, en annonçant la fin de ce système à compter de 2020, ce sont les actuels étudiants en Paces qui s'interrogent sur les conséquences de la suppression du numerus clausus, alors qu'ils seront les derniers à y être soumis.

Ces étudiants, en première année pour la première fois ou qui redoublent leur première année, et qui passeront le concours en 2019 s'estiment terriblement pénalisés par rapport à ceux qui entreront en première année en 2020.

Quelles sont les intentions du Gouvernement sur ce point précis ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Votre question me permet de répondre aux inquiétudes sur la suppression du numerus clausus.

Le président de la République a présenté, le 18 septembre, notre stratégie pour transformer en profondeur le système de santé. Dans le plan, « Ma santé 2022 », l'adaptation des formations aux enjeux de la santé de demain a été identifiée comme un axe prioritaire de travail avec l'annonce de la suppression du numerus clausus et la refonte des premiers cycles des études en santé. En effet, le numerus clausus ne permet plus d'assurer la couverture suffisante du besoin en professionnels de santé sur l'ensemble du territoire. Il conduit, de plus, à un véritable gâchis humain. Il représente aujourd'hui un obstacle à un déroulé des études d'enseignement supérieur fluide en ne prévoyant que des débouchés insuffisants vers l'offre de formation globale des universités.

Partant de ces constats, les principaux objectifs de la réforme, que nous conduisons avec la ministre en charge de l'enseignement supérieur, et qui sera concertée avec tous les acteurs, apporteront des réponses plus adaptées aux défis de notre système de santé. Il s'agira notamment de diversifier les profils des étudiants et de décloisonner les études en favorisant les passerelles et les enseignements communs entre plusieurs filières, de garantir le niveau de qualité de nos formations en santé et d'améliorer la qualité de vie des étudiants.

La suppression du numerus clausus tiendra compte du bilan des expérimentations alternatives à la Paces lancées en application de la loi relative à l'enseignement supérieur et à la recherche du 22 juillet 2013. Ce bilan permettra de prendre les décisions les plus adaptées à la gestion de la période transitoire mais il est aujourd'hui prématuré d'affirmer une position définitive. Nous veillerons, en tout cas, à ce que les étudiants qui passeront le concours en 2019 ne soient pas désavantagés par rapport à ceux qui entreront en première année d'études universitaires en 2020. Le Gouvernement sera très attentif à la conservation de la qualité de nos études qui ne pourra se traduire que par le maintien d'un système sélectionnant les candidats les plus aptes à exercer le métier exigeant mais passionnant de médecin.

Mme Catherine Procaccia.  - Je prends note de votre réponse. Nous partageons l'objectif de votre réforme, mais pour l'instant, rien n'est encore décidé. La période transitoire suppose une attention particulière. Ne vaudrait-il pas mieux augmenter cette année de 15 % ou 20 % le numerus clausus ? Il ne faudrait pas que 2019 soit une année noire pour la formation des médecins.

Avenir de la profession infirmière et santé des Français

M. Philippe Madrelle .  - Cette journée du 20 novembre est une journée de grève pour les infirmiers qui n'en peuvent plus du manque de considération que marque le Gouvernement à leur égard. Deux ans après la réforme de notre système de santé, les trois syndicats représentants 120 000 infirmiers libéraux ont quitté la table des négociations.

Les infirmières constituent le seul maillon assurant la continuité et la permanence des soins du domicile des patients vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept.

Dans quel délai sera mise à jour la nomenclature générale des actes professionnels, afin que les infirmiers puissent répondre aux attentes des demandes des patients, comme la prise de tension, la pose de bas de contention ou l'administration de médicaments ? Les infirmiers doivent pouvoir travailler en toute sécurité. En outre, la prise en charge des suivis de pathologies lourdes est très largement sous-cotée. À titre d'exemple, pour un soin de stomie, qui dure de 20 à 30 minutes, le professionnel va percevoir pour l'acte 5,30 euros, la moitié de cette somme étant versée en charges sociales. Sur trois actes consécutifs, le premier est rémunéré à taux plein, le second à moitié prix, et les autres actes seront effectués gratuitement. L'infirmière devrait être rémunérée lorsque le patient l'appelle pour un incident. Le rôle de prévention et d'organisation des soins n'est jamais pris en compte alors que l'augmentation de la chirurgie ambulatoire accroît leur responsabilité de surveillance dans le suivi des patients.

À toutes ces inégalités, vient s'ajouter la non-revalorisation des indemnités forfaitaires de déplacement : 0,50 centimes en quinze ans !

Enfin, quelle est la compétence de vaccination accordée aux pharmaciens ? Surtaxés à outrance, ces professionnels de santé exercent leur mission avec compétence.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Comme vous, j'estime que la profession d'infirmier doit jouer un rôle central dans notre système de santé.

Le Gouvernement entend s'appuyer sur l'engagement et les compétences des infirmières pour relever les défis qui nous attendent en ce qui concerne notamment l'accès aux soins et la prise en charge des maladies chroniques. La reconnaissance de la pratique avancée pour la profession par le décret du 18 juillet 2018 marque une avancée importante. Les infirmières auront des compétences élargies et la responsabilité du suivi régulier des patients pour leurs pathologies et elles pourront prescrire des examens complémentaires, demander des actes de suivi et de prévention ou encore renouveler ou adapter certaines prescriptions médicales.

Cette nouvelle pratique et ces nouvelles compétences fondées sur une formation universitaire, bénéficieront d'une reconnaissance en termes de statut et de rémunération, aussi bien dans le cadre de la fonction publique hospitalière qu'au sein des équipes de soins primaires.

Nous souhaitons que cette nouvelle pratique se développe rapidement sur l'ensemble du territoire au bénéfice des patients. Nous sommes également sensibles à la juste reconnaissance de l'activité des infirmières libérales et à l'évolution de leur rémunération.

Ce sont les partenaires conventionnels c'est-à-dire les syndicats représentatifs de la profession et l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) qui déterminent l'inscription des actes à la nomenclature ainsi que leurs tarifs. À ce titre, l'avenant 5 à la convention des infirmières libérales signé le 21 novembre 2017 a d'ores et déjà pris en compte les contraintes liées à l'activité des infirmières libérales en revalorisant notamment la majoration du dimanche et des jours fériés à compter du 1er août 2018. Les négociations doivent reprendre en décembre avec l'assurance maladie.

Nous souhaitons que cette négociation permette de valoriser le rôle des infirmières dans le système de santé et accompagne les pratiques pour une réponse aux besoins de soins de nos concitoyens : prise en charge des maladies chroniques, maintien à domicile des personnes âgées, prévention et éducation à la santé par exemple. Je fais pleinement confiance aux partenaires conventionnels pour parvenir à un accord.

Concernant la prise en charge vaccinale des pharmaciens, une étude va être menée pour mieux connaître la réalité du terrain.

Situation des kinésithérapeutes

Mme Annie Guillemot .  - Le 5 juillet, plus de 2 000 masseurs-kinésithérapeutes se sont rassemblés au ministère de la santé pour exprimer leurs vives inquiétudes et réclamer une meilleure reconnaissance de leur métier.

Ces professionnels de santé revendiquent la reconnaissance de leur formation au grade international de master à hauteur de leurs 300 crédits européens compte tenu de leur niveau bac+5. Ils dénoncent l'inégalité des différentes professions de santé au regard des droits liés au congé maternité. En effet, depuis octobre 2017, les femmes médecins libérales conventionnées et éligibles au congé maternité peuvent percevoir de 2 066 à 3 100 euros mensuels, pendant trois mois auxquels s'ajoute une aide forfaitaire d'environ 3 300 euros. Les masseurs-kinésithérapeutes, comme les autres professionnels paramédicaux, ne bénéficient pas de ce traitement et une pétition réclamant l'« égalité de l'aide financière pour toutes les femmes libérales en congé maternité » a rassemblé plus de 55 000 signataires.

Lors de l'examen du PLFSS, j'ai déposé un amendement à l'article 47 prévoyant une extension du dispositif à tous les professionnels de santé mais il a été frappé par l'article 40.

Aussi, face à ces inquiétudes et à ce légitime besoin de reconnaissance, d'équité et de justice, quelles réponses comptez-vous donner à ces revendications et selon quel échéancier ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - La profession de chiropracteur, reconnue depuis mars 2002, n'est pas concurrente de celle de masseur-kinésithérapeute. Ses missions et conditions d'exercice diffèrent en de nombreux points. Il ne s'agit pas d'une profession de santé, reconnue au titre du code de la santé publique, et les actes délivrés ne sont pas pris en charge par l'assurance-maladie. L'arrêté du 13 février 2018 vise à encadrer un usage professionnel déjà existant et consolide sur le plan réglementaire l'exercice et la formation des chiropracteurs.

Au regard de la tarification, les actes des masseurs-kinésithérapeutes sont pris en charge par la sécurité sociale. Ceux des chiropracteurs peuvent être remboursés par les organismes complémentaires.

Quant au supplément du congé maternité, il a été mis en place pour renforcer l'attractivité de la profession pour les jeunes médecins. Les masseurs kinésithérapeutes conventionnés bénéficient déjà d'avantages importants dont une allocation forfaitaire de 3 311 euros et d'indemnités journalières forfaitaires de 54,43 euros. L'avenant 5 à la convention médicale prévoit des revalorisations substantielles entre 2018 et 2022. Les pouvoirs publics sont attentifs à cette profession importante.

Mme Annie Guillemot.  - Ma question portait sur les congés maternité : l'article 47 du PLFSS pour 2019 aligne les droits au congé maternité aux travailleuses indépendantes et aux exploitantes agricoles mais pas aux professionnels de santé conventionnés. S'absenter pendant trois mois représente un manque à gagner de 10 000 à 12 000 euros. Tout cela manque d'équité pour les praticiennes libérales.

Revalorisation du métier d'infirmier et « plan Santé 2022 »

Mme Nathalie Delattre .  - Aujourd'hui à 14 heures, tous les syndicats de la profession d'infirmier se mobiliseront pour faire entendre leur mécontentement suite aux annonces du président de la République.

Le plan Santé 2022 repose sur une vision médico-centrée de l'offre de soins. Les 660 000 infirmiers répartis sur l'ensemble de notre territoire n'ont obtenu ni la revalorisation espérée de leur métier, ni celle de leurs compétences et encore moins de leur tarification.

Comment expliquer que 4 000 nouveaux postes d'assistants médicaux seront créés aux frais des collectivités, alors que le plan Santé 2022 ne prévoit aucune réactualisation du décret d'actes et d'exercice de la profession d'infirmier datant de 2002 ?

Si l'ensemble de la profession se mobilise c'est parce qu'aucune spécialisation n'a obtenu gain de cause. Que dire des infirmiers libéraux ? Les indemnités forfaitaires de déplacement n'ont été revalorisées que de 50 centimes d'euros en quinze ans. Une hausse dérisoire face à l'augmentation du prix de l'essence.

Il y a bel et bien un décalage entre l'exercice, sur le terrain, au quotidien, du métier d'infirmier et la nomenclature générale des actes professionnels, qui ne recense toujours pas un grand nombre d'entre eux. contrario, quand ils sont pris en compte, le troisième acte médical dispensé est gratuit, aussi le travail de vaccination antigrippale, plan dont vous vous enorgueillissez, reste le plus souvent non rémunéré pour nos infirmiers.

Pourtant, face à l'augmentation du nombre de maladies chroniques et au vieillissement croissant de la population, les infirmiers répondent présents ; ils sont les premiers acteurs de terrain, de jour comme de nuit. En se déplaçant à domicile, les infirmiers libéraux participent notamment au désengorgement des services d'urgence. Ils sont d'ailleurs souvent les derniers dans les déserts médicaux.

Le Gouvernement va-t-il répondre aux attentes de nos infirmiers et, au-delà, à celle des Français qui sont très attachés à ces femmes et à ces hommes ? Allez-vous adapter votre plan Santé 2022 aux réalités du terrain ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Votre question me permet de répondre à la déception exprimée par les infirmières après la présentation par le président de la République le 18 septembre du plan « Ma Santé 2022 ».

Vous évoquez leurs revendications concernant la revalorisation de l'ensemble de la profession infirmière en termes de métier et de tarification conventionnelle ainsi que l'absence d'actualisation du décret d'actes et de compétences depuis 2002.

Nous regrettons ces prises de position alors que la profession d'infirmière a récemment bénéficié d'avancées notables grâce au développement de protocoles de coopération et notamment dans le secteur ambulatoire, avec le dispositif Action de santé libérale en équipe (Asalée). En outre, le Gouvernement a reconnu le cadre d'infirmier en pratique avancée, dont le cadre juridique a été fixé par les décrets du 18 juillet 2018.

Les premières infirmières en pratique avancée diplômées par les universités accréditées en octobre dernier mettront leurs compétences élargies au service des usagers du système de santé dès septembre 2019.

Au-delà des premiers domaines d'intervention ouverts à la pratique avancée, d'autres champs, tel celui de la psychiatrie, vont faire l'objet de prochains travaux. Encore plus récemment, le décret et l'arrêté du 25 septembre 2018 ont permis aux infirmières d'élargir leurs compétences en matière de vaccination antigrippale.

Enfin, le processus d'universitarisation se poursuit en lien étroit avec le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

Par ailleurs, vous estimez que la réforme du système de santé engagée pérennise une vision médico-centrée de l'offre de soins. Tel n'est pas le cas. Différentes mesures annoncées par la ministre des solidarités et de la santé concernent l'exercice pluri-professionnel et encouragent une organisation en structure regroupée ou au sein d'une communauté professionnelle territoriale de santé.

Notre objectif est clair : l'exercice isolé doit devenir une exception. Ces orientations donnent aux infirmières toute leur place, notamment quand elles exercent dans le secteur libéral. Cette profession est un des acteurs majeurs de la prise en charge préventive et éducative et nous avons bien conscience de leur rouage essentiel dans le système de santé.

Mme Nathalie Delattre.  - Si les avancées que vous mentionnez satisfaisaient les infirmiers, ils ne seraient pas dans la rue, dans 17 régions de France. Sortez de votre bulle et allez à leur rencontre : ils ont besoin d'être écoutés et entendus.

La séance est suspendue quelques instants.

Appellation camembert de Normandie

Mme Catherine Morin-Desailly .  - Certains symboles contribuent au rayonnement d'un territoire. Le camembert est sûrement, avec le Neufchâtel, le Livarot et le Pont-l'Evêque, l'élément le plus emblématique de la gastronomie normande, de nos traditions et des savoir-faire de nos artisans fromagers et de ceux de nos producteurs. Inimitable, et à ce titre soumis à une Appellation d'origine protégée (AOP) depuis 1983, le véritable camembert de Normandie est composé de lait cru et moulé à la louche.

En tant que sénatrice de la Seine-Maritime et élue normande, j'ai été très surprise d'apprendre qu'il était question de modifier les critères de cet AOP en introduisant un nouveau procédé de fabrication : la pasteurisation. L'introduction d'une telle méthode reviendrait à revoir à la baisse le cahier des charges de notre AOP, avec toutes les conséquences que cela implique en termes de qualité du produit fini.

Avoir recours à la pasteurisation entraînerait par ailleurs un bouleversement dans la répartition de la valeur entre les différents acteurs de la chaîne de production. En effet, en substituant la pasteurisation au moulage à la louche, le risque est grand de créer une distorsion de concurrence au sein de la filière. Et pour cause : favoriser un procédé de fabrication moins cher et standardisé revient à tirer à la baisse la rémunération des petits producteurs, les futurs camemberts AOP pasteurisés étant vendus à moindre prix dans la grande distribution. Déjà, le niveau moyen de valorisation du lait AOP ne s'élève qu'à 50 % en Normandie.

À terme, seuls les consommateurs les plus aisés pourront se permettre d'acheter un véritable camembert AOP produit par un réseau spécialisé haut de gamme.

Il faut prendre garde à ne pas reproduire les erreurs de filières voisines qui, en introduisant la pasteurisation dans leur processus de production, ont contribué à la disparition d'un grand nombre de producteurs. Il serait regrettable de corrompre une recette qui perdure de génération en génération depuis la Révolution française au profit d'intérêts financiers. Les multinationales qui appellent à l'industrialisation et à la standardisation le font pour exercer une domination plus grande encore sur nos producteurs et réduire les coûts par des suppressions d'emplois. Or la démarche de I'AOP est tout autre et doit favoriser une concurrence saine et garantir un certain niveau d'exigence. Les critères de l'appellation nous permettent de préserver notre produit dans sa noblesse sans pour autant nuire à la croissance de la filière.

Je vous demande donc, madame, de maintenir I'AOP camembert de Normandie dans sa formule actuelle.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Didier Guillaume est à Bruxelles pour le Conseil agriculture de l'Union européenne. Je vous prie de l'excuser.

Le 21 février, tous les acteurs de la filière du Camembert de Normandie AOP et du Camembert « fabriqué en Normandie » ont conclu un accord, après des années de discussions et de travaux. Cet accord vise à terme la disparition de la mention « fabriqué en Normandie », qui créait de la confusion chez les consommateurs. Il ne s'agit pas d'abaisser les exigences du cahier des charges actuel. Bien au contraire, cet accord vise à accompagner la montée en gamme et l'évolution des pratiques de tous les opérateurs actuels et futurs de l'AOP. II s'agira notamment d'augmenter la part des vaches normandes dans les troupeaux, de renforcer la place du pâturage et de l'herbe dans l'alimentation des animaux ou encore d'introduire des dispositions relatives au bien-être animal.

Ces pratiques pourront être différenciées grâce à deux gammes distinctes de Camembert de Normandie. Cette segmentation permettra aux opérateurs de faire le choix de produire l'une ou l'autre et aux consommateurs d'éviter la confusion entre elles.

Le Gouvernement va s'attacher à suivre très précisément et régulièrement les travaux relatifs à l'évolution du cahier des charges de l'AOP. Il sera particulièrement vigilant à ce que les termes de l'accord soient respectés et que les travaux aboutissent bien à une montée en gamme pour l'ensemble de la filière.

Mise en place du service national universel pour les jeunes Français établis hors de France

Mme Évelyne Renaud-Garabedian .  - Les jeunes Français établis hors de France sont une ressource formidable de talents et de connaissances. Ils sont cultivés, ouverts d'esprit, entrepreneurs. Ils façonnent au jour le jour l'image de la France. Plus de 620 000 jeunes Français de moins de 25 ans vivent à l'étranger : c'est plus que le nombre d'habitants de la Vendée ou du Gard. Dans certaines zones, plus de 70 % de Français possèdent la double nationalité. C'est une richesse : deux langues, deux cultures, deux pays. Mais le lien fort qui permet de dire « je suis Français » est parfois mis à mal, car c'est le rôle de l'école française de le maintenir. C'est aussi celui du service national universel (SNU) qui est en préparation et qui a pour objet de renforcer chez les jeunes le sentiment d'appartenance à la France. Or les jeunes Français de l'étranger n'ont pas été consultés lors de la concertation en ligne, le mois dernier. L'annonce, il y a quelques semaines, de la suppression des journées « défense et citoyenneté » est d'autant plus inquiétante.

Qu'avez-vous prévu pour renforcer le lien de ces jeunes avec la France dans le cadre du futur service national universel ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Votre question entre en résonance avec les travaux que nous menons actuellement à l'échelle interministérielle autour de la mise en oeuvre du SNU qui recouvre plusieurs enjeux essentiels : favoriser la participation et l'engagement de chaque jeune dans la vie de la Nation, valoriser la citoyenneté et le sentiment d'appartenance à la communauté nationale rassemblée autour de ses valeurs, de renforcer la cohésion sociale et de dynamiser le creuset républicain.

L'universalité de ce dispositif, que vous interrogez en soulevant la question de la participation des jeunes Français de l'étranger, sera en effet un important défi auquel nous consacrerons toute notre énergie. Nos réflexions s'appuient actuellement sur les pratiques qui avaient cours au temps du service national. Avant la suspension de ce dernier, l'appel au service national actif était différé pour les jeunes Français qui résidaient jusqu'à l'âge de 29 ans dans un pays étranger, sauf dans certains territoires européens. Si ces jeunes revenaient habiter sur le territoire national avant d'avoir atteint 29 ans, ils étaient appelés au service national actif dans les quatre mois qui suivaient la date de leur changement de résidence. Dans le cas contraire, ils étaient dispensés.

Depuis la mise en place de la JDC, chaque poste diplomatique ou consulaire adresse aux administrés âgés de 16 à 25 ans qui ont été recensés une convocation écrite leur indiquant la date de la session à laquelle ils doivent participer. L'attaché de défense participe aux JDC sous l'autorité du chef de poste diplomatique ou consulaire.

Les Français établis hors de France qui n'ont pu participer à une session de la JDC, sont tenus, dès lors qu'ils viennent résider habituellement sur le territoire national avant l'âge de 25 ans, de participer à une JDC.

Différentes options sont actuellement à l'étude pour la mise en oeuvre du SNU. L'identification préalable de ces jeunes et les conditions d'accueil (hébergement, sécurité des sites, accessibilité des sites) dans lesquelles ils pourraient effectuer ce service hors de France posent en effet de nombreuses questions pratiques que nous analysons phase par phase.

Cela n'est pas arrêté définitivement pour le moment mais, tout comme au temps du service militaire et comme cela se fait aujourd'hui pour la JDC, les jeunes expatriés pourraient ainsi être dispensés d'effectuer le SNU tant qu'ils résident à l'étranger.

Nous devons ainsi prendre en considération le contexte particulier de chacun des territoires concernés, l'absence d'infrastructures, le caractère très dispersé des communautés françaises, les problèmes de sécurité dans certains pays, l'absence de personnel d'encadrement, le caractère non francophone de certains jeunes et, bien sûr, le cas particulier des jeunes binationaux. Les travaux ne sont pas encore aboutis. Le président de la République fera les annonces voulues et nous mènerons une première expérimentation en 2019. Nous étudions cependant, en lien étroit avec le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, l'ensemble des options envisageables avant d'arrêter une option définitive.

Fusion des rectorats de Nice et d'Aix-Marseille

Mme Dominique Estrosi Sassone .  - J'attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la réorganisation des académies et la suppression éventuelle de celle de Nice.

En juillet 2018, vous avez annoncé vouloir une académie par région. Pourtant, lors de votre venue à Nice, au début de l'année, vous penchiez en faveur d'un rapprochement des services, non pas pour la fusion des académies de Nice et d'Aix-Marseille en un seul monobloc.

Si la décision de fusion devait être définitivement prise, les professeurs, les proviseurs et le personnel des établissements actuellement sous la responsabilité du rectorat de Nice perdraient inévitablement en proximité pour la mise en oeuvre des politiques éducatives. Un rectorat unique redéfinirait aussi les modalités du passage du bac et du brevet. Et, si certains postes doivent être transférés à plusieurs centaines kilomètres de distance, ce sont des familles qui seront affectées par cet éloignement.

En outre, si le rapport Weil préconise un rectorat unique par nouvelle région, les effectifs des deux rectorats Aix-Marseille et Nice additionnés donnent un ensemble proche d'une académie francilienne mais dans le cadre d'un territoire.

La justification avancée par les services administratifs est l'application du cadre régional fixé par la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral avec la création de 17 régions. Or la région Sud n'a pas été redécoupée géographiquement dans le cadre de cette loi compte tenu d'une superficie et d'une organisation territoriale adaptées.

Comptez-vous fusionner les rectorats de Nice et d'Aix-Marseille et si oui selon quel calendrier ? Qu'allez-vous changer dans la gouvernance éducative de la région Sud, particulièrement dans l'organisation de ces deux académies ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Tout le monde reconnaît que la réforme des régions de 2015 a entrainé certaines ambiguïtés dont il faut sortir. Les centres des académies et des régions ne correspondent pas, ce qui est problématique, même si je reconnais qu'il y avait déjà avant deux académies pour une seule région.

Nous nous appuyons sur les conclusions de la mission conduite par François Weil, conseiller d'État. Au 1er janvier 2020, il y aura 13 académies dans 13 régions métropolitaines, et au besoin, dans les plus vastes, un adjoint pour le recteur. Il s'agit de rééquilibrer certains aspects de la réforme de 2015, afin que les territoires sortent gagnants de cette réforme.

On peut distinguer, si besoin, rectorat d'académie et chancellerie d'université avec des sièges dans des villes différentes. Après une large concertation avec les élus et les services académiques, nous disposerons d'une feuille de route dès la fin de cette année. Les arbitrages seront annoncés par Frédérique Vidal et moi-même début 2019. L'enjeu est la gestion au plus près du terrain, avec une vision stratégique à l'échelle de la région et des compétences renforcées à l'échelle du département, pour prendre des décisions pragmatiques au quotidien, dans la lignée du discours du président de la République au Congrès de Versailles de juillet dernier.

Une expérimentation de gestion des ressources humaines de proximité est conduite. Cela va dans le sens que vous souhaitez, celui d'une vision départementale de proximité.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - La perte de proximité ne doit pas se traduire par une rupture du service public. Il importe en particulier de rassurer les personnes concernées sur les suppressions de postes et les mobilités contraintes.

Financement des accompagnants d'enfants handicapés sur les temps périscolaires

Mme Françoise Gatel .  - J'attire votre attention sur le financement des accompagnants d'enfants handicapés scolarisés.

L'accueil à l'école des enfants handicapés progresse de manière significative. Les communes se sont pleinement engagées pour favoriser cette intégration en milieu ordinaire.

Le Conseil d'État a estimé que les auxiliaires de vie scolaire et les accompagnants d'élèves en situation de handicap relèvent de l'éducation nationale lorsqu'ils interviennent en temps scolaires mais également périscolaires.

Toutefois, une note du ministère du 5 janvier 2018 a annoncé que leur financement devait être supporté par les communes, sans doute en lien avec la décision du tribunal administratif de Pau d'octobre 2017 estimant que la prise en charge financière de l'accompagnement incombait à la commune lorsque l'activité périscolaire ne pouvait être regardée « comme tendant à l'inclusion scolaire ».

Le plus souvent, les équipes qui répartissent les heures de travail des accompagnants les consacrent au temps scolaire. Les collectivités locales sont alors contraintes de financer les accompagnants en temps périscolaire.

L'accueil des enfants handicapés à l'école est un enjeu de société qui ne peut dépendre de la capacité financière éventuelle des communes.

Il appartient à l'État, responsable de l'équité territoriale et de l'égalité des chances, porteur d'un projet ambitieux d'intégration, d'assurer la prise en charge financière d'un service indispensable à l'intégration des enfants handicapés à qui on ne saurait dire qu'ils peuvent être accueillis à l'école mais pas à la cantine.

En tiendrez-vous compte dans la réflexion que le Gouvernement a lancée en octobre 2018 pour rénover la scolarisation des élèves handicapés ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - L'accueil des enfants en situation de handicap est un enjeu de société, au coeur de nos priorités. L'école inclusive doit être une réalité. Le ministère de l'Éducation nationale y consacre 2,9 milliards en 2019, après 2,3 milliards en 2018 et 340 000 élèves handicapés sont accueillis cette année à l'école, accompagnés de 43 041 AESH, ce qui dépasse, pour la première fois, le nombre d'emplois aidés, de 29 000.

L'aspect juridique de l'accompagnement des élèves handicapés est complexe. Quand l'accompagnant aide aussi l'enfant sur le temps périscolaire, il est mis à disposition par l'État à la commune, via une convention, qui doit le rémunérer ; d'où des contentieux qui ont reçu des réponses divergentes de la part des juridictions administratives du fond ; la décision du Conseil d'État à laquelle vous faites référence, prise dans le cadre d'un référé, ne fait pas jurisprudence.

Mes services ont formé deux pourvois en cassation afin que le Conseil d'État clarifie les responsabilités de chacun. Au-delà de ces questions juridiques, nous avons, avec Mme Cluzel, lancé une concertation, dans le cadre du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) pour rendre la profession plus attractive et assurer une meilleure continuité entre temps scolaire et périscolaire.

Mme Françoise Gatel.  - Le temps le plus important est celui de la cantine. Je connais la complexité juridique de la question, mais il est vraiment nécessaire que les enfants handicapés aient les mêmes accompagnants à la cantine qu'à l'école.

Remboursez aux communes le temps de la cantine : c'est peu au regard de l'enjeu.

Le sport au baccalauréat

M. Michel Savin .  - L'Éducation physique et sportive (EPS) ne sera plus une option choisie dans le programme du futur baccalauréat mis en place en 2021.

Dans un entretien paru le 30 septembre 2018 dans le Journal du dimanche, vous avez indiqué que « le latin et le grec seront les deux seules options qui rapporteront des points bonus dans le nouveau baccalauréat ». Ce n'est pas prévu pour les arts.

Or les langues vivantes et étrangères, les arts et le sport étaient des matières optionnelles permettant d'obtenir des points bonus pour le baccalauréat.

Sachant que la France accueillera en 2024 les Jeux olympiques et paralympiques, le Gouvernement a l'ambition de renforcer la pratique sportive et l'Éducation nationale a mis en place un programme d'appui aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 avec une labellisation « génération 2024 ». Dans le même temps, l'Olympiade culturelle permettra de renforcer l'accès à la culture pour l'ensemble des Français.

Alors qu'un plan est lancé pour renforcer l'attractivité de la pratique sportive, pourquoi supprimer le sport mais également les arts, des options rapportant des points bonus au baccalauréat à partir de 2021 ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Je n'oppose pas les langues anciennes à l'EPS, essentielle au bien-être des jeunes et au respect d'autrui. Au demeurant, les Jeux olympiques ne sont pas sans lien avec l'Antiquité...

Il y a deux heures d'EPS obligatoires de la seconde à la terminale, puis trois heures en option, soit beaucoup plus que latin et grec. L'enseignement optionnel d'EPS permet à tous les élèves du lycée général et technologique d'approfondir leur pratique sportive dans un objectif de formation ou de santé.

Les sections sportives scolaires, maintenues dans le cadre de la réforme du lycée, valorisent un haut niveau de pratique sportive.

Les programmes seront révisés : après les préconisations du Conseil supérieur des programmes, rendues en octobre, les textes réglementaires concernant les nouveaux programmes seront publiés au premier trimestre 2019. De plus, une action volontariste de promotion des pratiques sportives a été engagée. En outre, le nombre d'heures de sport dans la scolarité est bien supérieur à celui des langues et cultures anciennes. Il est indispensable que ces langues et cultures aient un poids particulier dans le nouveau bac ; c'est un signal que nous assumons, pour le renouveau du latin et du grec en France. Le sport et les arts font l'objet d'autres mesures d'encouragement. En outre, le bulletin pèsera pour 10 % de la note finale et le sport fait l'objet d'un contrôle continu.

M. Michel Savin.  - Je prends acte de l'effort d'inclusion de l'initiation au sport dans les programmes. Mais le sport reste maltraité au plan budgétaire et éducatif. Il est regrettable qu'il ne soit pas mieux reconnu au niveau du bac.

Diffusion des compétitions sportives féminines

Mme Dominique Vérien .  - La question est posée au ministre de la Culture mais je ne doute pas qu'elle éveillera l'intérêt de M. Blanquer.

La réforme de l'audiovisuel public prévoit l'arrêt de la chaîne France 4 sur la télévision numérique terrestre (TNT) pour la basculer exclusivement en format numérique, ce qui privera 50 % du territoire national qui n'a pas accès à un débit internet suffisant pour une telle diffusion. La chaîne qui diffuse le plus grand nombre de compétitions sportives féminines sur le service public va ainsi disparaître.

Or la représentation du sport féminin dans les médias est un enjeu majeur qui touche à la place des femmes dans notre société, à la pratique d'une activité sportive par la population ou encore à l'économie du monde sportif.

La part d'antenne des compétitions sportives féminines est passée de 7 % des diffusions sportives en 2012 à près de 20 % en 2017, grâce à l'audiovisuel public mais également grâce à l'implication des chaînes privées comme W9, D8 ou encore TMC qui ont perçu le potentiel financier et l'importante rentabilité de ces programmes. De plus, des événements sportifs comme la finale de la Coupe du monde féminine ont été de grands succès : quatre des dix plus grosses audiences de la TNT sont des retransmissions de compétitions sportives féminines.

Le nombre de femmes licenciées dans une fédération sportive est en nette augmentation, marquant à la fois la réussite et aussi la nécessité de poursuivre ce développement.

L'arrêt de la chaîne France 4, principal canal de diffusion du sport féminin de l'audiovisuel public, ne doit pas mettre en danger ou freiner cette dynamique. Bien au contraire ! Profitons-en pour diffuser le sport féminin sur des chaînes principales comme France 2 ou France 3.

Dans le cas contraire, l'arrêt de France 4 sur la TNT affecterait les parts de diffusion et laisserait intégralement aux chaînes privées ce filon économique et la promotion du sport féminin, alors qu'une bonne médiatisation des compétitions féminines permettrait de sortir d'une spirale infernale de faibles investissements par manque de diffusion.

L'approche de la prochaine Coupe du monde féminine de football en juin 2019, organisée en France, pourrait être l'occasion de diffuser sur une chaîne principale du service public une compétition entièrement féminine.

Quel est votre engagement à cet égard ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - En effet, la question m'intéresse tout particulièrement. Je réponds à la place de Franck Riester, en déplacement officiel à Bruxelles.

L'exposition du sport dans toute sa diversité est au coeur de la mission de service public de France Télévisions. Le Gouvernement se félicite que le CSA ait souligné, dans son avis sur l'exécution du contrat d'objectifs et de moyens (COM) 2017 de la pluralité des disciplines sportives dans les diffusions de service public.

Le sport féminin trouve sa place sur toutes les antennes de service public. Nous encourageons la diffusion de ce sport tout en respectant la liberté de programmation. Les acteurs privés se sont intéressés au sport féminin puisque les droits de la Coupe du monde de foot féminin 2019 ont été acquis par TF1 et Canal +.

Le sport n'est pas uniquement diffusé sur France 4. Ainsi 10 des 14 premières parties de soirée consacrées à la Coupe du monde ont été diffusées sur France 2 et France 3.

Toutefois, la transformation de l'audiovisuel public a pour but d'enrichir l'offre numérique. Par conséquent, en 2020, certains programmes basculeront du hertzien au numérique. Nous ferons en sorte que cela ne se traduise pas par une dégradation de l'exposition du sport féminin, bien au contraire.