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Table des matières



Rappels au Règlement

M. Patrick Kanner

Mme Éliane Assassi

M. Pascal Savoldelli

M. Bruno Retailleau

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics

Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

Seconde délibération

ARTICLE 39

ARTICLE 82

ARTICLE 38

Explications de vote

M. Stéphane Ravier

M. Vincent Delahaye

M. Emmanuel Capus

M. Philippe Dallier

M. Julien Bargeton

M. Pascal Savoldelli

M. Claude Raynal

M. Jean-Claude Requier

M. Vincent Éblé, président de la commission des finances

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics

Commission (Nomination)

Port du voile intégral dans l'espace public

Discussion générale

M. Bruno Retailleau, auteur de la proposition de résolution

M. Stéphane Ravier

Mme Nathalie Goulet

M. Alain Marc

M. Marc-Philippe Daubresse

M. Michel Amiel

M. Pierre Ouzoulias

M. Jean-Pierre Sueur

Mme Françoise Laborde

M. Pierre Charon

M. Édouard Courtial

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur

Adaptation des communes nouvelles à la diversité des territoires

Discussion générale

Mme Françoise Gatel, auteur de la proposition de loi

Mme Agnès Canayer, rapporteur de la commission des lois

M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales

M. Loïc Hervé

M. Alain Marc

M. Arnaud de Belenet

M. Pierre-Yves Collombat

M. Éric Kerrouche

M. Jacques Mézard

Mme Catherine Deroche

M. Mathieu Darnaud

M. Didier Marie

M. François Calvet

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

ARTICLE 2 (Supprimé)

ARTICLE ADDITIONNEL

ARTICLE 4

M. Joël Bigot

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 5

M. Jean-Pierre Grand

ARTICLE 6

ARTICLE 7

ARTICLES ADDITIONNELS

Annexes

Ordre du jour du mercredi 12 décembre 2018

Analyse des scrutins publics

Nomination d'un membre d'une commission




SÉANCE

du mardi 11 décembre 2018

40e séance de la session ordinaire 2018-2019

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : Mme Jacky Deromedi, M. Joël Guerriau.

La séance est ouverte à 14 h 35.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Rappels au Règlement

M. Patrick Kanner .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Mon rappel au Règlement porte sur l'organisation de nos travaux. Chers collègues, vous aurez compris que je m'adresse au Gouvernement. Voilà la troisième fois en trois semaines que le Gouvernement revient devant nous avec des propositions de modification en profondeur du projet de loi de finances 2019. Dont acte. Compte tenu de la situation sociale dans notre pays, nous voterons une grande partie des nouvelles mesures. Mais cette désorganisation aurait pu être évitée si le Gouvernement avait tenu compte plus tôt des positions exprimées par la Haute Assemblée ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR, UC et Les Républicains)

À nos propositions sur la prime d'activité ou la CSG des retraités, par exemple, le Gouvernement a toujours répondu : « halte aux dépenses ». Jeudi dernier, le Premier ministre disait même, à la tribune, que l'on dépense parfois beaucoup d'argent en peu de mots. Sans doute s'adressait-il, par anticipation, au président de la République ?

Il faudra qu'à l'avenir, lors des projets de loi de finances rectificative qui s'annoncent nombreux, le Gouvernement sache écouter et entendre les parlementaires. C'est en nous respectant que vous écrirez une bonne loi, un bon budget, monsieur le ministre. Écoutez les alternatives qui vous sont proposées, et vous éviterez cette série de contradictions ! Respecter le Parlement, c'est respecter le peuple. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR, Les Républicains et UC)

Mme Éliane Assassi .  - Hier soir, devant 21 millions de téléspectateurs, le président de la République s'est livré à un exercice périlleux : laisser penser qu'il a entendu la colère populaire, céder le moins possible, ne faire participer ni les riches ni les entreprises. Il a annoncé une hausse du SMIC de 100 euros sans préciser qu'il s'agissait d'un montant brut et surtout de mesures déjà annoncées, dont la mise en oeuvre est accélérée. Le coût est estimé entre 12 à 15 milliards d'euros. Qui paiera ? Les contribuables, y compris les plus modestes, pas les riches et les ultra-riches ! Pas d'augmentation de salaire non plus, seuls 2 à 3 millions de salariés sont concernés.

Passant du tour de passe-passe au numéro d'équilibriste, Emmanuel Macron a tenté d'expliquer l'inexplicable refus de rétablir l'ISF pour les financiers et actionnaires - marqueur d'une politique qui fait primer quelques intérêts privés sur ceux du plus grand nombre. Nous le disons avec force : rendez l'ISF, rendez ces 3,7 milliards d'euros ! (Huées sur les bancs du groupe Les Républicains ; applaudissements sur les bancs des groupes CRCE et SOCR.) Sans cela, le nouveau contrat social n'est qu'affichage, tandis que la déconstruction de notre modèle social se poursuit. (M. Claude Malhuret s'exclame.)

Le Gouvernement demande une seconde délibération sur les dispositions relatives à la prime d'activité. Pourquoi pas sur l'ISF ? Notre peuple a le droit de savoir qui paiera pour les mesures annoncées hier. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

M. Pascal Savoldelli .  - (Marques d'impatience à droite et au centre.) Pour satisfaire ce rappel au Règlement, il suffirait d'appliquer un amendement, celui sur le partage des dividendes, voté au Sénat à la suite de l'affaire des CumEx Files. Il faut rétablir l'ISF, taxer les transactions financières ! (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains)

La hausse de la prime d'activité représente 320 millions d'euros par mois, or le PIB mensuel est de 200 milliards d'euros. Il y a de quoi faire face. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. Bruno Retailleau .  - En ce moment particulier, nous devons faire preuve de responsabilité. Il nous faut sortir de cette crise génératrice de souffrance sociale, qui menace l'activité de nos entreprises et pose la question de la violence. Souhaitons que les mesures annoncées par le président de la République permettent l'apaisement.

Mme Éliane Assassi.  - Qui va payer ?

M. Bruno Retailleau.  - Esprit de responsabilité donc, mais aussi esprit de vérité. Ces mesures coûteuses devront être financées autrement qu'en augmentant toujours plus les dépenses. (Exclamations sur les bancs du groupe CRCE)

À l'origine du ras-le-bol fiscal, il y a une France championne d'Europe des prélèvements qui grèvent le pouvoir d'achat des Français. Il y aura moins d'impôts et de taxes quand il y aura moins de dépense publique, c'est une évidence. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; protestations sur les bancs du groupe CRCE.)

Nous ne pourrons redistribuer du pouvoir d'achat qu'en développant la compétitivité du site France. (Exclamations sur les bancs du groupe CRCE)

Certains thèmes ont été absents du discours du président de la République.

Mme Éliane Assassi.  - Les riches !

M. Bruno Retailleau.  - Cette crise est aussi existentielle. Les Français ont le sentiment qu'ils ne comptent plus, que la démocratie se fait sans le peuple, comme dit Jacques Julliard. Pas un mot, hier soir, sur la ruralité et la rurbanité, alors que la France périphérique souffre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Je ne doute pas que le Gouvernement et le président de la République sauront apporter des réponses. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. le président.  - Acte est donné de ces rappels au Règlement.

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics .  - L'intervention hier du président de la République était demandée par beaucoup de sénateurs mais aussi par les Français. Il a fait des annonces très importantes, qui ont une conséquence budgétaire. Il reste quelques jours pour concrétiser ces promesses dans le projet de loi de finances pour 2019.

Il n'y a plus de vecteurs pour modifier le PLFSS, adopté par les deux assemblées et actuellement devant le Conseil constitutionnel.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Il n'a pas été promulgué...

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Nous ne pouvons plus le modifier.

Nous terminons l'examen du PLF. Le Gouvernement prend l'engagement que les promesses du président de la République seront concrétisées en 2019, le plus rapidement possible. Notre ligne de conduite est claire : pas de dépense publique supplémentaire. Si le déficit va se creuser, ce ne sera pas l'effet de nouvelles dépenses. (Mouvements divers)

M. Martial Bourquin.  - Vous financez comment ?

M. David Assouline.  - CICE ou services publics ?

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Au début de la discussion budgétaire, le Gouvernement proposait au Parlement un déficit public de 1,9 %, toutes administrations confondues. C'est ce chiffre qui a été soumis à Bruxelles.

La bascule du CICE en baisse de charges représente 1,9 point du PIB.

À l'issue des débats parlementaires, le Parlement - principalement le Sénat - a dégradé le solde de 0,1 point, soit environ 2 milliards, qu'il s'agisse de recettes en moins ou de dépenses en plus. Votre assemblée n'a d'ailleurs pas souhaité voter l'article d'équilibre.

L'arrêt de la taxe carbone en 2019 représentera 3 milliards d'euros de recettes en moins auxquels s'ajoute un milliard de manques à gagner sur le GNR : total 4 milliards d'euros, soit 0,2 point de PIB.

Les mesures annoncées par le président de la République représentent un montant de 6 milliards d'euros. (On le conteste sur les bancs des groupes Les Républicains et SOCR) Je le confirme : baisse de la CSG pour les petites retraites, pour 2 milliards d'euros environ ; défiscalisation des heures supplémentaires pour 1,6 milliard et désocialisation pour environ 150 millions par mois en moyenne ; et 100 euros supplémentaires par mois pour ceux qui gagnent le SMIC - d'où la demande de deuxième délibération. Quant à la défiscalisation des primes versées par les entreprises à leurs salariés - suggérée par Xavier Bertrand - elle entraînera peut-être quelques effets d'aubaine mais n'est pas de nature à bouleverser l'équilibre des comptes publics.

Entre l'annonce par le Premier ministre de l'arrêt de la TICPE, pour 4 milliards d'euros, et les annonces du président de la République, pour 6 milliards, nous en sommes donc à environ 10 milliards, soit une dégradation des comptes publics de 0,5 point. Le déficit s'établit à 2,5 % contre 1,9 % à l'orée du débat budgétaire.

Nous aurons rapidement un débat devant le Parlement sur l'équilibre des comptes. J'ai lu les propos du président Marseille sur la sincérité des documents budgétaires. Le Premier ministre saisira dans les heures qui viennent le président du Sénat et celui de l'Assemblée nationale pour définir les conditions d'un débat respectueux du droit d'amendement des parlementaires.

Le Gouvernement demande une nouvelle délibération avant le vote solennel pour avancer du 1er avril au 1er janvier la date d'application de la prime d'activité - seul élément qui ne relève pas du pouvoir réglementaire. Le deuxième amendement tient compte de l'accélération de la trajectoire. Nous avons déjà budgétisé 600 millions d'euros, c'est l'objet du deuxième amendement.

Le Gouvernement sera à l'écoute de toutes les suggestions pour équilibrer les comptes publics. Nous proposerons des mesures qui seront soit d'économie, soit de rééquilibrage. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM, suscitant des rires à droite)

Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite du projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2019.

Seconde délibération

M. le président.  - En application de l'article 43 alinéa 4 du Règlement, le Gouvernement demande qu'il soit procédé à une seconde délibération des articles 39 et état B et 82 et, pour coordination, de l'article d'équilibre (article 38) et état A du projet de loi de finances pour 2019. Quel est l'avis de la commission des finances ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances.  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) En accord avec le président de la commission des finances, nous ne nous opposerons pas à la seconde délibération. Elle nécessitera une brève suspension pour réunir la commission.

Mais je ne peux laisser passer les propos du ministre sur les travaux du Sénat. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Le projet de loi de finances pour 2019 ne comportait pas une ligne sur la TICPE. Le Sénat - qui avait déjà gelé le tarif l'an dernier - a introduit en première partie un article additionnel pour maintenir le tarif au niveau de 2018. Cela nous a évité un collectif budgétaire, vous devriez nous en remercier ! (On renchérit à droite.)

On ne peut imputer au Sénat une mesure qui coûte 2 milliards d'euros alors même que le Gouvernement l'a reprise à son compte la semaine dernière - après quelques hésitations il est vrai.

Nous n'avons pas voté l'article d'équilibre car nous contestions les chiffrages du Gouvernement. Par exemple, le coût des exonérations de TFPB est chiffré à 1 milliard, contre 400 millions l'an dernier. Les élus seront heureux de l'apprendre ! (M. Philippe Dallier renchérit.)

Nous avons achevé hier l'examen des articles de la deuxième partie, au terme d'un travail de qualité - et j'en remercie M. Dussopt, qui était au banc du Gouvernement. Nous avons proposé des mesures d'économies, que le Gouvernement a chiffrées à 2,8 milliards, par exemple sur la productivité de la fonction publique.

Nous nous sommes montrés responsables, refusant d'augmenter la fiscalité et compensant par des mesures d'économies. Je fais abstraction du rejet de certaines missions pour marquer un désaccord. Il n'est donc pas honnête d'imputer au Sénat une dégradation des comptes publics. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC) Le Gouvernement se serait évité bien des débats s'il avait écouté le Sénat ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Nous acceptons le principe de la nouvelle délibération. Un amendement du Gouvernement anticipe au 1er janvier 2019 la bonification individuelle de la prime d'activité. Un autre abonde les crédits de la mission « Solidarité » de 600 millions d'euros. À quoi correspondent ces crédits ? S'agit-il des 100 euros supplémentaires accordés à ceux qui gagnent le SMIC ?

S'agit-il d'une augmentation des seuls bonus individuels de la prime d'activité ? Anticipe-t-on le différentiel de 70 euros, par rapport aux 30 euros déjà prévus à l'article 82 ? Enfin, tenez-vous compte des 20 euros prévus pour la base forfaitaire de l'été 2018 ?

M. Vincent Éblé, président de la commission des finances.  - Avis favorable à la seconde délibération, qui nécessitera une suspension de quinze à vingt minutes pour réunir la commission.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je l'ai dit, la fixation de la date est du ressort de la loi, le premier amendement avance donc la hausse de la prime d'activité au 1er janvier.

Le deuxième porte sur le montant de la prime d'activité afin de l'augmenter à 70 euros, ce qui nécessite 600 millions d'euros. La prime d'activité dépend des crédits du ministère de la Santé - même si un rattachement au ministère du Travail serait plus cohérent ; c'est une prestation soumise à critères, comme le statut conjugal, que le Conseil constitutionnel et le Conseil d'État ont validé.

Agir sur la prime d'activité est l'une des façons que le Gouvernement a trouvée pour concrétiser l'engagement du président de la République de 100 euros de plus par mois pour les personnes au SMIC. Il se pourrait qu'il en existe d'autres. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. le président.  - La seconde délibération est ordonnée.

Conformément à l'article 43, alinéa 5, du Règlement, lorsqu'il y a lieu à seconde délibération, les textes adoptés lors de la première délibération sont renvoyés à la commission, qui doit présenter un nouveau rapport.

La séance, suspendue à 15 h 10, reprend à 15 h 30.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - La commission des finances s'est réunie. Elle n'a pas pu expertiser la totalité du dispositif complexe. Les modalités d'accès à la prime d'activité sont principalement réglementaires. L'un des amendements avance la date du 1er avril au 1er janvier 2019. C'est clair et compréhensible. Le deuxième amendement prévoit 600 millions d'euros supplémentaires : c'est une sorte de blanc-seing donné au Gouvernement pour la prime d'activité. Mais ces 100 euros d'augmentation ne sont qu'une moyenne puisque la prime dépend de la composition et des ressources du foyer. Sagesse. (Exclamations sur divers bancs)

ARTICLE 39

M. le président.  - Amendement n°C-1, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

600 000 000

600 000 000

Handicap et dépendance

Égalité entre les femmes et les hommes

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

TOTAL

600 000 000

600 000 000

SOLDE

600 000 000

600 000 000

ARTICLE 82

M. le président.  - Amendement n°C-2, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 7

Remplacer la date :

1er avril 2019

par la date :

1er janvier 2019

ARTICLE 38

M. le président.  - Amendement n°C-3, présenté par le Gouvernement.

I. - Les montants du tableau de l'alinéa 2 de l'article sont fixés comme suit :

 

 

 

 

(En millions d'euros)

 

 

RESSOURCES

CHARGES

SOLDES

 

 

 

Budget général

 

 

 

 Recettes fiscales brutes / dépenses brutes

414 798

409 221

 

    A déduire : Remboursements et dégrèvements

135 688

135 688

 

 Recettes fiscales nettes / dépenses nettes

279 110

273 533

 

 Recettes non fiscales

12 487

 

 Recettes totales nettes / dépenses nettes

291 598

273 533

 

    A déduire : Prélèvements sur recettes au profit des

 

      collectivités territoriales et de l'Union européennes

62 095

 

 Montants nets pour le budget général

229 502

273 533

-  44 031

 

 

 

 Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants

5 337

5 337

 

 Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

234 839

278 870

 

 

 

 

 

Budgets annexes

 

 

 

 Contrôle et exploitation aériens

2 115

2 122

- 7

 

 Publications officielles et information administrative

178

166

+  12

 

 Totaux pour les budgets annexes

2 292

2 288

+  4

 

 

 

 Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants :

 

 Contrôle et exploitation aériens

59

59

 

 Publications officielles et information administrative

0

0

 

 Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours

2 352

2 348

+  4

 

 

 

 

 

Comptes spéciaux

 

 

 

 Comptes d'affectation spéciale

82 891

80 444

+ 2 448

 

 Comptes de concours financiers

126 251

127 253

- 1 002

 

 Comptes de commerce (solde)

xx

+  46

 

 Comptes d'opérations monétaires (solde)

xx

+  79

 

 Solde pour les comptes spéciaux

xx

+ 1 570

 

 

 

 

 

 Solde général

xx

- 42 457

 

 

 

 

II. - Les montants du tableau de l'alinéa 5 de l'article sont fixés comme suit :

 

(En milliards d'euros)

 

 

 

 

Besoin de financement

 

 

 

 

 

Amortissement de la dette à moyen et long termes

130,2

 

     Dont remboursement du nominal à valeur faciale

128,9

 

     Dont suppléments d'indexation versés à l'échéance (titres indexés)

1,3

 

Amortissement des autres dettes

-

 

Déficit à financer

42,5

 

Autres besoins de trésorerie

-1,3

 

 

 

 

     Total

171,4

 

 

 

 

 

 

 

Ressources de financement

 

 

 

 

 

Émission de dette à moyen et long termes, nette des rachats

138,4

 

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

2,0

 

Variation nette de l'encours des titres d'État à court terme

15,0

 

Variation des dépôts des correspondants

 11,0

 

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l'État

1,5

 

Autres ressources de trésorerie

3,5

 

 

 

 

     Total

171,4

 

 

 

III. - A l'alinéa 12 de l'article, le montant : « 8,9 milliards d'euros » est remplacé par le montant : « 9,5 milliards d'euros ».

M. Bruno Retailleau.  - Nous voterons ces amendements par esprit de responsabilité même si les choses sont assez gazeuses. Le jonglage de chiffres est difficile à appréhender pour des sénateurs n'appartenant pas à la commission des finances - et je doute que les Français y comprennent quoi que ce soit. Mais quand il y a le feu à la maison, on ne demande pas sa pointure au pompier. (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe Les Républicains)

J'avais compris que le président de la République demandait au Premier ministre d'exposer aujourd'hui les mesures de façon pédagogique pour l'instant, tel n'est pas le cas. Or c'est absolument nécessaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Il ne s'agit pas de 100 euros d'augmentation du SMIC, mais de celle de la prime d'activité, sous réserve de remplir certaines conditions.

Il faudra aussi nous donner le calendrier de travail sur un PLFSS rectificatif rapidement. Le Gouvernement le doit au peuple français. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Éric Bocquet.  - Nous ne nous opposerons pas à ces amendements mais ne les voterons pas non plus. L'écart est saisissant entre les effets de manche et la réalité des chiffres. Ainsi, sur la revalorisation de 20 euros, on arrivait, selon les études, à une augmentation de 8 ou de 12 euros...

On nous a expliqué pendant tout le PLF qu'il n'y avait pas d'argent, et là, en quelques heures, on trouve 600 millions d'euros pour répondre à une demande légitime. (Mme Esther Benbassa et M. Pierre-Yves Collombat applaudissent)

M. Claude Raynal.  - Au-delà de la méthode de travail inédite, le groupe socialiste votera les mesures en faveur de la prime d'activité qu'il ne peut que soutenir. Nous avions d'ailleurs proposé une telle revalorisation dans une proposition de loi que les députés et nous-mêmes avions déposée le 3 décembre.

Il faudra réfléchir à une augmentation des salaires au-delà du SMIC.

La mesure de 100 euros annoncée n'est pas nouvelle, elle est juste avancée. Sera-t-elle d'ailleurs totale pour tous ? Nous craignions qu'elle ne soit que partielle... En outre, la question du financement, occultée jusqu'ici, devra être posée.

Attention à ne pas jouer un jeu de bonneteau fiscal qui reprendrait d'une main ce qui est donné de l'autre.

Nous adopterons la plus grande vigilance quant aux modalités d'application de ces mesures. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Emmanuel Capus.  - Nous voterons ce geste en faveur des salariés modestes. Il faut que le travail paie. La colère de ceux qui travaillent et qui ne parviennent pas à boucler leur fin de mois est légitime.

Les 100 euros de hausse correspondent à une hausse de 70 euros de la prime d'activité et 20 ou 30 euros de baisse de charges. Cette formule semble la moins mauvaise, car la hausse du SMIC brut détruit les emplois. (On le conteste sur les bancs des groupes SOCR et CRCE.) Une hausse de 1 % détruit 20 000 emplois. (Mêmes mouvements)

Nous nous interrogeons sur les effets de seuil de la mesure et son impact complet pour les personnes qui gagnent le SMIC : toutes les personnes percevant le Smic seront-elles touchées ou ne s'agit-il que de moyenne ? Compte tenu de la conjugalité de la prime d'activité, il risque d'y avoir des déçus...

Enfin, comment ces mesures seront-elles financées ? Vous avez évoqué, tout à l'heure, l'objectif des 1,9 % de déficit, monsieur le ministre. Est-ce à dire que vous abandonnerez la transformation du CICE en baisse de charges cette année ? Notre commission des finances devrait être informée de l'impact de ces mesures dans les plus brefs délais. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)

M. Hervé Marseille.  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) il serait important que le président de la République informe le Gouvernement pour que le Gouvernement informe le Parlement pour qu'on sache enfin quelle sera la feuille de route... (Applaudissements sur tous les bancs à l'exception de ceux du groupe LaREM)

Par esprit de responsabilité, le groupe UC votera les amendements et le budget mais il faudra revenir sur ces mesures confuses.

L'article 10 de la Constitution permet de choisir les articles du PLFSS sur lesquels il serait possible de délibérer une nouvelle fois pour compléter le dispositif.

J'espère que les mesures annoncées pourront être mises en place rapidement.

Le Premier ministre vient d'annoncer, à l'instant, à l'Assemblée nationale que tous ceux qui gagnent le SMIC auront 100 euros de plus par mois, même ceux qui ne bénéficient pas de la prime d'activité.

M. Jean-François Husson.  - C'est le flou artistique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. Hervé Marseille.  - Nous avons vraiment besoin de précisions pour y voir clair. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et LR)

M. Philippe Adnot.  - Nous devons voter les amendements même s'ils ne régleront pas tous les problèmes : la société doit se rassembler et nous devons sortir de cette situation.

Le dispositif sera-t-il à la hauteur des attentes ? Nous n'en sommes pas sûrs et nous restons libres pour la suite.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Nous sommes devant une usine à gaz pour un enfumage total de nos concitoyens. Même nous, qui nous intéressons un peu aux questions budgétaires, ne comprenons pas ce qui est proposé ! Ce dont nous sommes certains, c'est qu'il ne s'agit pas d'une hausse salariale, alors que la dynamique de revalorisation salariale est nécessaire.

La prime d'activité est calculée selon la situation du ménage et de diverses aides : il ne s'agit pas d'une rémunération du travail mais d'une aide publique qui vide les caisses de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

Enfin, la prime d'activité, il faut la demander et remplir des papiers tous les trois mois pour l'obtenir ! Ainsi, la prime de Noël peut faire passer juste au-dessus du seuil de ressources pour y prétendre... Bref, c'est un mécanisme bureaucratique phénoménal qui divise les Français !

La confusion des formulations donne encore plus le sentiment à nos concitoyens qu'on se moque d'eux et qu'on les méprise. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs des groupes UC et Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Oui la prime d'activité est une invention bureaucratique, elle a d'ailleurs été créée en 2015... (Applaudissements et rires sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

J'ai déjà dit à plusieurs reprises qu'il fallait revoir des choses. La prime d'activité n'est pas financée par le budget de la sécurité sociale mais par celui de l'État. C'est une prestation et non une aide au travail : ces crédits relèvent de Mme la ministre des solidarités et de la santé, et non du ministère du travail. La prime d'activité n'est pas une aide au travail, même si, en réalité, c'en est une.

Le déficit prévu était de 1,9 % avec effet supplémentaire CICE de 0,9 %. Après le débat parlementaire, nous sommes passés de 1,9 à 2 %.

Avec les annonces du Premier ministre sur la fiscalité énergétique et celles du président de la République hier soir, nous sommes passés à 2,5 % de déficit, et il ne faut pas oublier les 0,9 % CICE en sus. Nous aurons un débat parlementaire sur tous ces chiffres.

Nous proposons la concrétisation d'une des propositions du président de la République, avec 100 euros supplémentaires pour ceux qui gagnent le SMIC, sans charges supplémentaires pour les entreprises. C'était déjà prévu mais nous voulons tenir la nouvelle promesse de le faire dès le 1er janvier, par l'amendement C-2. Cette date dépend du Parlement.

Les 600 millions d'euros seront-ils suffisants ? La prime d'activité n'est en effet pas automatiquement versée et tous les salariés au Smic ne perçoivent pas la prime d'activité. Nous nous occupons ici de ceux qui la perçoivent.

Le Gouvernement formulera une proposition pour que les autres, s'ils sont au SMIC, gagnent aussi ces 100 euros.

Mme Pascale Gruny.  - C'est une usine à gaz...

(M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général, mime la brasse coulée.)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Quant aux mesures sur la CSG, sur la défiscalisation des heures supplémentaires et le complément des 100 euros pour ceux qui ne touchent pas la prime d'activité, je ne suis pas en mesure de vous dire quand le débat interviendra... Le Gouvernement choisit-il d'aggraver le déficit ou de présenter de nouvelles mesures d'économies, nous ne trancherons pas cet après-midi...

Mme Éliane Assassi.  - Il aurait été plus simple de rétablir l'ISF !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - ... Au Parlement, il est possible de demander de nouvelles délibérations - ce qui fut fait à plusieurs reprises par le passé - de présenter un projet de loi de finances rectificative ou un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative. Il ne m'appartient pas de trancher. (MM. Jean-Marc Gabouty et François Patriat applaudissent.)

ARTICLE 39

L'amendement n°C-1 est adopté.

L'article 39, modifié, est adopté.

ARTICLE 82

À la demande du groupe LaREM, l'amendement n°C-2 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°36 :

Nombre de votants 347
Nombre de suffrages exprimés 328
Pour l'adoption 328
Contre     0

Le Sénat a adopté.

L'article 82, modifié, est adopté.

ARTICLE 38

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Avis favorable à l'amendement n°3, de conséquence.

M. Pascal Savoldelli.  - Nous venons de vivre une situation politique grave. Ne nous étonnons pas de la crise actuelle. Le manque de respect à l'encontre des Français et des parlementaires est inacceptable. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Le ministre nous dit : ce n'est pas une augmentation du SMIC mais celle d'une prestation sociale. Après tergiversations, le Premier ministre dit aux députés que tous les gens au SMIC gagneront 100 euros par mois... C'est grave, car les smicards, on doit les traiter avec le respect. (Applaudissements sur tous les bancs à l'exception des bancs des groupes LaREM et RDSE) Même chose pour les parlementaires !

On est en train de tuer la politique en agissant ainsi. C'est honteux ; au Gouvernement, c'est la cacophonie. Les Français pendant ce temps continuent de se mobiliser car ils retrouvent confiance dans leur capacité à choisir la société dans laquelle ils veulent vivre. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

L'amendement n°C-3 est adopté.

L'article 38, modifié, est adopté.

Explications de vote

M. Stéphane Ravier .  - Pour mettre un peu d'humour dans une actualité qui ne porte pas à sourire, souvenez-vous de cette déclaration fiscale sous forme musicale :

« On est là pour te pomper, t'imposer sans répit et sans repos.

« Pour te sucer ton flouze, ton oseille, ton pognon, ton pèze, ton fric, ton blé, tes économies, tes sous, ton salaire, tes bénéfs, tes bas de laine, tout c'qui traîne...

« C'que tu as sué de ton front, on te le sucera jusqu'au fond !

« Nous sommes Urssaf, Cancras et Carbalas, qui que tu sois, quoi que tu fasses, faut qu'tu craches, faut qu'tu payes, pas possible que t'en réchappes, nous sommes les frères qui rappent tout ! »

Vous souvenez-vous donc d'une des plus drôles créations de ce trio de comiques en 1991 ? Hélas, elle ne fait plus rire nos concitoyens. Avec neuf millions de pauvres, des centaines de milliers de nos compatriotes dans la rue depuis des semaines, vêtus de leur gilet de détresse, l'heure est grave. D'autant plus que le président de la République hier soir n'a pas remis en cause le système ultralibéral ni la mondialisation sauvage qui fait chaque jour plus de pauvres et d'exclus.

Le projet de loi de finances contient une mesure montrant que le Gouvernement peut compter sur la majorité sénatoriale pour poursuivre ses desseins : l'exonération de taxe destinée aux grands médias audiovisuels. C'est 50 millions d'euros volés aux Français. Vos grandes déclarations ne sont que postures. Quand la droite était au pouvoir, rien n'a été fait pour réduire les dépenses publiques, baisser la fiscalité ou aider les Français.

Mais chez Les Républicains, à l'image de M. Wauquiez et de son gilet jaune, l'amnésie est collective. Tous les partis ont voulu faire de 2019 l'année du racket fiscal et du pire qu'avant. Hier, une heure avant l'intervention du chef de l'État, le Sénat a voté l'allègement de l'exit tax qui sanctionnait les exilés fiscaux. La justice fiscale et sociale est loin d'être rétablie.

Par conséquent, je voterai contre ce projet.

M. Vincent Delahaye .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Je voudrais revenir sur le drôle de contexte de ce projet de loi de finances : un climat de révolte inconnu depuis mai 68. Votre politique n'est aujourd'hui pas comprise par une grande majorité de nos compatriotes, celle qui s'exprime bruyamment et parfois, hélas, violemment, mais aussi par ceux qui s'expriment moins mais qui doivent avoir toute notre attention : les chômeurs et les plus pauvres.

Les Français ont des problèmes de pouvoir d'achat, et nous avons depuis longtemps des problèmes budgétaires : ces deux problèmes sont liés.

L'examen du budget aura été marqué, malheureusement une fois encore, par le manque d'informations données au Parlement. Nous venons d'en avoir une preuve supplémentaire avec le débat sur vos amendements de dernière minute qui manquent cruellement de clarté. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

Ce contexte se traduit par un mutisme quasi total de Bercy en matière de chiffrage de nos propositions. En nous obligeant à amender au doigt mouillé, le Gouvernement s'offre des arguments faciles pour s'opposer à nos suggestions. Ce fut notamment le cas lorsque nous avons proposé de réformer en profondeur l'IR ou encore les droits de successions.

À défaut d'informations, nos marges de manoeuvre sont très limitées. Et pourtant si nous manquons d'informations et de moyens, notre sens de l'initiative, lui, ne manque pas de ressources. Le Gouvernement aurait été bien avisé de s'inspirer des travaux de nos collègues. Le travail réalisé ici est de qualité. Utilisez-le, monsieur le ministre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

Nous avons ainsi réussi à améliorer sensiblement ce budget malgré votre opposition quasi systématique à tous nos amendements de bon sens, qu'il s'agisse de la suppression des petites taxes, du relèvement du quotient familial, de la simplification de l'impôt sur les plus-values immobilières, de la facilitation de la transmission d'entreprises, des économies sur le temps de travail et les jours de carence dans la fonction publique, du gel de la fiscalité sur les carburants avis défavorable avant que vous ne finissiez, bien tard malheureusement, par revenir dessus...Enfin, une sagesse du Gouvernement pour lutter contre l'arbitrage des dividendes, mesure qui pourrait rapporter entre 1 et 3 milliards...

Nous avons décidé très tôt de supprimer la hausse des taxes sur les carburants, à un moment où le Gouvernement s'entêtait encore malgré la colère des Français. Si nous l'avons fait, c'est parce que notre expérience d'élus locaux et notre connaissance du terrain nous ont convaincus que les Français n'en peuvent plus du toujours plus d'impôts.

Ce que nous apprend notre expérience d'élus locaux, c'est qu'un incendie ça s'éteint dès le début et le plus rapidement possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

Alors, bien sûr avec les annonces du président de la République, on pourrait considérer votre budget comme devenu insincère et ne pas le voter.

Néanmoins, le groupe UC entend saluer le sens de l'anticipation et la sagesse du Sénat. Nous voterons donc pour ce budget largement amélioré par notre assemblée.

Que faut-il faire aujourd'hui ? Votre budget ne prévoit ni baisse des dépenses, ni refonte globale de notre fiscalité. Or, plus de dépenses c'est forcément plus d'impôts ! Et c'est bien ce qui est inquiétant dans les annonces du président de la République, qui viennent s'ajouter à celles du Premier ministre : 12 milliards de dépenses supplémentaires ! C'est forcément 12 milliards d'impôts supplémentaires à court terme.

La seule chose que nous n'ayons jamais essayée durant 40 ans de laxisme budgétaire, c'est la baisse de la dépense publique. Bien sûr celle-ci est rarement populaire. Mais elle est nécessaire. Elle nécessite une démarche juste, équilibrée, courageuse à laquelle nous sommes prêts.

Depuis 2006, la dépense publique a augmenté de 300 milliards, une paille ! Elle augmente beaucoup plus que la population et l'inflation cumulées. Pourtant, les Français ont le sentiment que le service public se dégrade. C'est un paradoxe très grave pour la démocratie.

Il est grand temps d'inventer le service public du XXIe siècle : plus modeste, plus moderne, plus efficace et moins coûteux.

Aujourd'hui les efforts de réduction ne sont toujours pas au rendez-vous. Pire, les dépenses continuent de croître : 6 milliards de plus dans ce budget.

S'agissant des recettes, il est temps de s'attaquer au scandale des GAFA et d'autres entreprises, qui paient très peu, si ce n'est pas d'impôt. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) En la matière, la France doit reprendre la main si l'Europe continue de traîner autant les pieds. Et que dire du nécessaire renforcement de la lutte contre la fraude fiscale et sociale ? C'est une question à laquelle nous sommes très attachés. En témoigne l'initiative de l'UC contre les fausses inscriptions au répertoire de l'Insee portée par notre collègue Nathalie Goulet, avec 1,9 million de faux numéros.

En tout cas, le Gouvernement n'a pas mis à profit l'embellie de la conjoncture pour assainir nos finances. L'heure est grave, mais il n'est pas trop tard si nous refusons de tomber dans la facilité en opposant les ruraux aux urbains, les retraités aux actifs, les héritiers aux non-héritiers, les collectivités à l'État.

Nous devons faire le choix de la responsabilité et du courage en déterminant collectivement les dépenses que nous sommes prêts à baisser et à en accepter les conséquences. Cette démarche ne pourra aboutir que si l'on y associe l'ensemble des Français, et en particulier les corps intermédiaires tant négligés depuis le début du quinquennat.

Vous avez devant vous des élus de bonne volonté, des élus de la République, des représentants du Peuple et non seulement des collectivités. Sur tous les bancs ici, dans notre diversité qui est celle du peuple français, notre travail est reconnu comme étant de qualité. Alors un seul message : écoutez-nous et travaillons ensemble pour les Français et pour la France.

(Applaudissements au centre et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. Emmanuel Capus .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants) Nous terminons l'examen du second PLF du quinquennat dans un contexte difficile, qui tranche avec la situation de l'an passé. Le président de la République a annoncé des mesures fortes qui rendent la poursuite des violences plus inacceptables. Ceux qui appellent à les poursuivre sont irresponsables, incohérents, et ils mentent aux Français. Comment soutenir que réduire les APL de 5 euros est une catastrophe et dire que la hausse de 100 euros de la prime d'activité ne suffit pas ? Soyons cohérents.

Et cessons d'augmenter les dépenses si l'on veut réduire les prélèvements. Le temps des vieilles recettes est révolu.

La première des responsabilités du Gouvernement est de répondre à la colère légitime du pays. Hier, le président de la République a fait preuve de lucidité en prenant des mesures contre le déclassement de nos citoyens. Le mal est profond ! L'essoufflement du modèle français rime avec un État obèse, un service public éloigné et une hausse des inégalités. Le Sénat a fait des propositions : gel de la hausse de la TICPE, aménagement de la réforme fiscale du GNR, lutte contre la fraude fiscale. Le Gouvernement a heureusement saisi la main tendue sur certaines de ces mesures.

Nous entendons une autre colère : celle des élus locaux. Ils ne demandent à présent qu'une chose : les moyens d'agir. Le Gouvernement doit maintenant travailler avec les élus locaux, qui forment l'ossature de la République.

Les mesures annoncées par le président de la République doivent à présent être financées. Mais il serait impensable que cela se fasse avec plus d'impôts et plus de dettes. Comme l'a dit le président Malhuret la semaine dernière, nous avons retardé les réformes que nos voisins faisaient, et nous avons eu le pire des deux mondes : plus de prélèvements, plus de dette et moins de services publics. (On le conteste sur quelques bancs du groupe Les Républicains.)

Allons-nous profiter de cet électrochoc pour résoudre le mal français ?

Ce budget est déjà caduc ; vous devez changer de cap. Mais la responsabilité du Sénat n'est pas moins grande. Le climat social est propice à la démagogie, aux postures et au jusqu'au-boutisme. Le choix d'Emmanuel Macron contre Marine Le Pen était un message des Français aux élus. Alors que la crise gronde, souvenons-nous de cet appel : en temps de crise, la modération est un courage, un effort. Soyons-en dignes : proposons des pistes pour réformer vraiment notre pays. Nous voterons ce projet de loi de finances à la condition qu'il soit une première étape à la refondation du modèle français. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)

M. Philippe Dallier .  - (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Monsieur le ministre, heureux de vous revoir ! Que retenir de nos débats sur le PLF 2019 ? Un calendrier bouleversé jusqu'à la dernière minute par un mouvement social que nul n'avait vu venir, alimenté par le mépris. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

L'année 2019, devait être celle du pouvoir d'achat. Quelle puissance de conviction ! Mais de quelles promesses parliez-vous ? Augmenter la CSG, désindexer les pensions, baisser les APL, prendre 1,5 milliard dans les poches des bailleurs sociaux, supprimer I'APL accession dont bénéficiaient les plus modestes, engranger l'augmentation des taxes sur les carburants, le gaz et l'électricité ? Rien de tout cela ne figurait dans les promesses du président de la République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Vous parliez pouvoir d'achat mais vous repreniez d'une main ce que vous donniez de l'autre... Les grandes perdantes sont toujours les mêmes, les classes moyennes actives ou retraitées. Pour elles, votre politique, c'est du bonneteau fiscal dont elles n'ont pas été dupes.

Cette fracture fiscale se double d'une fracture territoriale pour celles et ceux qui n'ont d'autres choix que d'utiliser leur voiture au quotidien. Quant à l'ISF, vous l'avez partiellement supprimé conservant cependant un impôt sur la fortune immobilière, mais votre flat tax, sans mesure de réorientation des capitaux, s'est traduite par une désertion des dispositifs qui finançaient nos PME au profit de l'assurance vie et des emprunts d'État. Vous avez ainsi perdu sur les deux tableaux : celui de l'opinion car l'ISF est un totem mais vous avez aussi perdu sur le terrain de !a capitalisation de nos entreprises. Comment vous étonner que votre politique fiscale soit considérée comme injuste et inefficace par une grande majorité des Français ? En imaginant pouvoir confisquer, au profit du budget de l'État, une grande partie des taxes dites écologiques vous avez de plus porté un sérieux coup à l'idée même de transition énergétique. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) La hausse des taxes sur les carburants a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase de la colère des Français et c'est leur consentement même à l'impôt, fondement de notre démocratie, que vous avez mis à mal. Tout cela en 18 mois, beau résultat.

Que n'avez-vous écouté le Sénat lorsque nous avons réindexé les retraites lors de l'examen du PLFSS, lorsque nous avons revalorisé le quotient familial et les prestations familiales, lorsque nous avons voté l'annulation de la hausse des taxes sur les carburants, lorsque nous avons tenté de vous alerter contre les effets calamiteux de votre politique du logement qui est en train de plonger le secteur dans la crise ? Au lieu de cela, vous avez fustigé l'irresponsabilité de la Haute Assemblée accusée de creuser le déficit avant même de voir quelles économies nous allions proposer en seconde partie. Depuis hier soir, vous avez bonne mine, monsieur le ministre.

Nous allons donc nous prononcer sur ce PLF, après avoir accepté de le modifier, in extremis, pour aider à la sortie de crise, et nous devrons examiner un PLFSS rectificatif, dans les prochains jours.

Malgré tout, notre vote nous donnera la satisfaction d'avoir montré la voie au Gouvernement sur bien des points.

Mais l'important, c'est la suite pour 2019, mais aussi pour la trajectoire des finances publiques jusqu'en 2022. Pour 2019, vous voilà devant un choix : tenir le déficit ou le laisser filer au-delà des 3 % d'autant que la croissance risque manifestement d'être inférieure à vos attentes. Si vous souhaitez tenir le déficit, il n'y a qu'une solution : baisser la dépense. II vous faudra un peu de courage politique. Faute d'avoir engagé les réformes structurelles nécessaires, il est malheureusement à craindre le retour du rabot budgétaire et le gel ou surgel des crédits votés.

Nous formons en tous les cas le voeu que ni le budget de nos forces armées ni celui de nos forces de sécurité ne figurent dans les variables d'ajustement budgétaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Vous avez déjà, en PLFR, donné un coup de canif dans la loi de programmation militaire ; nous devons maintenant sanctuariser ces deux budgets. C'est le minimum que nous devons aux hommes et aux femmes qui risquent leur vie pour défendre notre liberté, nos valeurs, notre République. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Quant à la trajectoire 2022, elle est morte hier soir. Elle n'intégrait pas la suppression complète de la taxe d'habitation qui coûtera 10 milliards de plus ; il faut maintenant financer les annonces du président de la République. Dans un contexte de grande incertitude où la remontée des taux d'intérêts devient chaque jour plus probable, nous ne pouvons pas abandonner l'objectif de l'inversion rapide de la courbe de notre dette.

Le groupe Les Républicains votera ce PLF modifié par le Sénat et rendra ainsi un grand service au Gouvernement ne serait-ce que pour permettre à l'Assemblée nationale de maintenir l'annulation des taxes sur les carburants. Vous y trouverez aussi un dispositif de lutte contre la fraude fiscale à la taxation des dividendes dont le rendement est estimé entre 1 et 3 milliards.

Nous sommes prêts à nous remettre au travail. L'acte I du quinquennat est terminé. Le mirage du nouveau monde s'est dissipé. Le temps vous est compté comme il est compté à la France. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Julien Bargeton .  - (Marques d'ironie sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe SOCR) Nous avons vécu une séquence budgétaire bien inédite. La République a vécu un épisode difficile - il y en a eu d'autres par le passé. Nos procédures habituelles ont été percutées par les mouvements sociaux : mouvements sociaux, réseaux sociaux, télévision en continu - il faudra s'y habituer.

Mme Sophie Primas.  - C'est eux qui vous ont élus !

M. Julien Bargeton.  - Cette crise des gilets jaunes est née en quatre décennies. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Le président de la République a répondu par des mesures puissantes et concrètes. (Protestations sur les bancs du groupe SOCR)

M. Rachid Temal.  - Rien sur l'ISF !

M. Julien Bargeton.  - Il faudra mettre en oeuvre ces mesures. Une partie a déjà été prise en compte dans ce projet de loi de finances et je dois reconnaître la clairvoyance de la majorité sénatoriale. (Marques de satisfaction sur les bancs du groupe Les Républicains)

Une convergence se dessine donc. Alors que le groupe LaREM souhaitait voter contre ce budget, il s'abstiendra. (Marques d'ironie sur les bancs du groupe Les Républicains)

Le bicamérisme a joué son rôle. Je sais que les collectivités territoriales feront de même. Nous devons faire de cette colère une chance. C'est une opportunité pour le Sénat qui est la chambre des territoires. Transition énergétique, transition démographique mondiale, pouvoir d'achat : les sujets sont sur la table. Le Sénat a apporté des propositions sur les outre-mer, les dépenses fiscales ou les dépenses budgétaires pilotables. Les suppressions de taux de TVA réduit, les mesures prises sur la permanence de soins ou le débat éludé sur les sociétés coopératives d'intérêt collectif sont, eux, plus regrettables.

Je regrette que la majorité sénatoriale ait refusé le chiffrage du Gouvernement à l'article d'équilibre ; la confiance est nécessaire des deux côtés, entre le Parlement et le Gouvernement. Pas moins de six missions ont été rejetées. C'est dommage - et la mission « Défense » n'a été votée qu'in extremis, alors que vous aviez reconnu les efforts du Gouvernement.

Les deux mesures traditionnelles de la majorité sénatoriale sont revenues : les économies sur le temps de travail des fonctionnaires et les économies sur l'aide médicale de l'État (AME). Qui peut croire qu'on va réaliser des économies sur le temps de travail des fonctionnaires, ex abrupto, sans même en parler à leurs représentants ? Oui, il faut réformer la fonction publique, mais qualitativement, plutôt que quantitativement.

Quant à l'AME, il n'est pas de salubrité publique que de faire des économies dessus.

Le temps de l'échange est venu. La motion de censure à l'Assemblée nationale intervient à contretemps des annonces du président de la République.

Le groupe LaREM s'abstiendra sur ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Sophie Primas.  - Vous n'avez pas honte ?

M. Pascal Savoldelli .  - SMIC : 1 498,47 euros bruts mensuels, 1 188 euros nets ; RSA : 550,93 euros pour une personne seule sans enfant, 1 157 euros pour un couple avec deux enfants ; minimum vieillesse : 634,66 euros ; pension de retraite moyenne des femmes de 1 091 euros, inférieure de 42 % à celle des hommes : voilà la réalité pour des millions de nos concitoyens qui attendaient des réponses claires du chef de l'État - à leur exigence de vivre mieux et d'être respectés dans leur dignité.

Le président de la République a enfin rencontré l'humilité et reconnu comme légitime la colère qui gronde sur notre territoire. Il en résulte une hausse de 100 euros pour la prime d'activité, - donc financée par les contribuables, pas une revalorisation du SMIC - et une suppression de l'augmentation de la CSG pour les retraités les plus modestes, ce que les ministres ont refusé dans la loi de financement de la sécurité sociale.

Pour le reste, rien qui n'effraiera les marchés financiers ou le patronat. Pas de hausse du SMIC, gel du point d'indice des fonctionnaires, gel de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) au 1er janvier 2020 et quid des 13 milliards d'euros de baisses de crédits aux collectivités territoriales d'ici 2022 ?

De l'autre côté, des fortunés cajolés par la suppression de l'ISF, des évadés fiscaux protégés, des actionnaires libres de prendre des dividendes sur les salaires : voilà la réalité de cette loi de finances !

La fiscalité indirecte et insidieuse fait se lever les protestations.

Grâce au jeu de la CMP, le Gouvernement pourra revenir sur certaines mesures pour donner à ce projet de loi de finances sa pleine mesure de texte ultralibéral. Les annonces du président de la République ne vont pas changer la donne, puisqu'il faudra payer la facture par plus de taxes et moins de service public !

C'est une politique du fort avec les faibles et du faible avec les forts qui anime ce Gouvernement cacophonique. Depuis le printemps 2017, une forme de contrat a été passée directement avec la finance et les affaires, leurs intérêts égoïstes, loin de l'intérêt commun : réforme du code du travail par ordonnances, revenus du patrimoine, suppression de l'ISF, flat tax, allègements des droits de succession et des droits de mutation, démantèlement des services publics, de la SNCF, du secteur hospitalier, étatisation de la formation continue, mise en cause du droit des études pour les bacheliers. Ce contrat prétendument moderne date du XVIIIe siècle : accumuler des richesses d'un côté, la pauvreté de l'autre.

Cette république du contrat avec la finance engendrera des dommages collatéraux : chômage de masse, précarité, tensions urbaines, désespoir rural, casse des services publics de proximité... Une accumulation de richesses à un pôle revient à une accumulation de pauvreté, de l'autre. L'Union européenne est incapable de taxer les GAFA, les banques ont bénéficié de milliards pour leur remise à flot, prélèvent des milliards de frais bancaires, les dividendes du CAC 40 atteignent 46,8 milliards en 2017, mais il n'y aurait pas de quoi augmenter les salaires ?

Puisque d'une colère juste surgit une balbutiante espérance, que l'Europe n'est pas à la hauteur, comment mettre un terme à la colère ? S'il s'agit de tracer les voies d'un nouveau contrat social en France, il faut donner un coup de barre à gauche et vite ! Nous l'avons fait, avec 163 amendements à ce texte, dont seuls 20 ont été adoptés.

Recommander aux pauvres d'être économes, c'est comme conseiller à un homme qui meurt de faim de manger moins.

Il est temps de mettre de la démocratie dans cette société où les droits sont mis en cause. Démocratie dans les institutions, dans la cité, dans les entreprises, au sein de la sécurité sociale, démocratie partout ! C'est un tournant démocratique qui surgit sous nos yeux, celui d'un peuple qui ne veut plus de ce capitalisme financiarisé à outrance.

Oui ! Tout le monde veut gouverner : citoyens, élus locaux, jeunesse. Et alors ?

Nous rejetterons ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. Claude Raynal .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Revenons sur le contexte de la période. Notre pays se trouve dans une situation troublée, marquée par un décrochage entre une grande partie de nos concitoyens et les acteurs de la vie publique. Accroissement des inégalités, aggravation de la fracture territoriale, iniquité fiscale : telles sont, entre autres, les facettes du mouvement des gilets jaunes. En tant que parlementaires, nous devons nourrir nos réflexions de cette révolte citoyenne. C'est dans cet esprit que nous avons déposé un contre-projet budgétaire redonnant du pouvoir d'achat à nos concitoyens les plus modestes et ceux des classes moyennes.

Nous regrettons qu'il ait fallu quatre semaines pour que le Gouvernement s'intéresse enfin à un mouvement de colère légitime et trop longtemps méprisé.

Depuis les années 1970, les gouvernements successifs ont essayé d'adapter notre pays à la mondialisation, au prix de l'aggravation des inégalités.

La violence de la politique de M. Macron, d'avantage pour les plus aisés et de plus de taxes pour les plus modestes, a déclenché cette colère éruptive : vous ne pourrez pas dire que le Sénat ne vous avait pas prévenu. La réalité, c'est que votre fabuleuse théorie du ruissellement ne fonctionne évidemment pas.

Le projet de loi de finances que vous nous soumettez ne répond pas aux attentes des Français. Il aura fallu attendre les émeutes pour que le Gouvernement reparle d'une TICPE flottante. Il aura fallu attendre les déclarations du président de la République hier soir pour que certaines de nos propositions soient reprises. Espérons que bientôt vous rétablirez l'ISF !

Par charité, je ne m'appesantirai pas sur la demande ici formulée l'an passé de supprimer aussi l'IFI... une demande qui a été mise sous le tapis cette année.

Le résultat du travail du Sénat ne répond pas aux questions posées.

Chers collègues de la majorité sénatoriale, je souhaite que vous sortiez de l'ambiguïté dont vous vous délectez. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; moqueries à droite)

Comment être à la fois favorable à la suppression de l'ISF, de l'IFI, à la défiscalisation des heures supplémentaires, à l'exit tax, tout en demandant moins d'impôts et toujours plus de services publics de proximité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Sortez donc des postures ! (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains ; applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

Nous avons systématiquement gagé nos propositions de dépenses nouvelles durant ce débat et demandé le rétablissement de l'ISF et la suppression de la flat tax. Vous avez refusé de nous écouter.

M. Philippe Dallier.  - Rendez-nous Hollande !

M. Claude Raynal.  - Nous serons vigilants à ce que les mesures annoncées n'ouvrent pas sur un bonneteau fiscal. Nous souhaitons que l'effort soit porté par les entreprises et les Français les plus fortunés.

Nous souhaitons entrer dans une phase plus constructive. Au Gouvernement d'écouter le Parlement. Monsieur le ministre, vous aurez beaucoup à y gagner. Sans surprise, les socialistes voteront contre ce projet de loi de finances. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur quelques bancs du groupe CRCE)

M. Jean-Claude Requier .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE) Personne dans cet hémicycle ne se félicitera des conditions dans lesquelles le Sénat a examiné ce projet de loi de finances. Je ne reviendrai pas sur un tweet malheureux. Nos débats ont besoin de dignité et nous devons répondre à la crise politique, sociale et sociétale que nous vivons, entendre la souffrance de nos compatriotes et leur apporter des réponses concrètes. Cette souffrance est la conséquence d'une politique publique déconnectée du terrain depuis longtemps.

Le RDSE se bat depuis des années contre les inégalités, celles des territoires, notamment ceux de l'hyper-ruralité chère à notre collègue Alain Bertrand.

Il y a la France de la start-up Nation, ce récit où tout est possible - mais nous, nous voulons protéger la France qui a peur de la mondialisation, ces Français qui s'inquiètent de devenir chômeurs et qui ne reçoivent que le mépris du Gouvernement.

Les Français nous avaient lancé des avertissements par l'abstention, par le vote contestataire - mais bien peu les ont entendus. Chacun peut porter un jugement détaillé sur les mesures annoncées par le président de la République, mais elles sont dans le champ de la discussion publique - le groupe RDSE se prononcera en fonction de cet ensemble.

Nous avons obtenu le vote de la redevance des concessions hydroélectriques, la TVA réduite sur produits hygiéniques pour nourrissons et personnes âgées, le refinancement du FISAC, la trésorerie des SCOP, et l'encouragement aux filières des biocarburants. Cependant, ce budget est déjà obsolète étant donné les annonces du président de la République.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Ce n'est pas moi qui le dis.

M. Jean-Claude Requier.  - La très grande majorité du groupe RDSE s'abstiendra ; quelques-uns voteront contre, un votera pour. C'est la liberté de notre mouvement et je sais que certains d'entre vous nous envient.

C'est par l'acceptation de la levée de l'impôt qu'est né le Parlement. Or le consentement à l'impôt est malmené. Alors que nous revendiquons l'héritage de Georges Clemenceau et de Joseph Caillaux, nous ne pouvons accepter une fiscalité devenue incompréhensible.

Revenons au sens profond de l'impôt défini à l'article XIII de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen : « Une contribution commune, également répartie entre les citoyens en raison de leurs facultés ».

L'impôt doit redevenir l'outil de citoyenneté qu'il n'aurait jamais dû cesser d'être. Il faut que notre démocratie réconcilie les Français avec l'impôt. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

M. le président.  - Le Sénat va procéder au vote sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2019.

Le scrutin public est de droit.

Conformément à l'article 60 bis du Règlement, il va être procédé à un scrutin public à la tribune.

J'invite Mme Jacky Deromedi et M. Joël Guerriau, secrétaires du Sénat, à superviser les opérations de vote.

Je vais tirer au sort la lettre par laquelle commencera l'appel nominal.

Le sort désigne la lettre B.

Il est procédé au scrutin par appel nominal.

Le scrutin est clos. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°37 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 298
Pour l'adoption 200
Contre    98

Le Sénat a adopté le projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2019.

M. Vincent Éblé, président de la commission des finances .  - Je veux rappeler combien notre assemblée a travaillé pour l'examen de ce projet de loi de finances : 120 heures de débats en séance et 216 heures en commission et en auditions préparatoires.

Nous avons examiné 2 029 amendements, contre 1 363 l'an dernier. Le calendrier a été tenu malgré de nombreuses vicissitudes, notamment votre malheureux tweet, monsieur le ministre, et les annonces faites tardivement.

Le texte était particulièrement volumineux en raison de l'absence de collectif en fin d'année. Gageons que nous aurons cependant prochainement à en examiner un...

Je remercie et félicite tous ceux qui ont travaillé à ce budget, particulièrement les 49 rapporteurs spéciaux de la commission des finances et les 76 rapporteurs pour avis des autres commissions. Je remercie aussi le président et les vice-présidents du Sénat. Merci enfin au Gouvernement et notamment à M. Dussopt qui a assuré l'essentiel de la représentation du Gouvernement avec expertise et courtoisie. (Applaudissements sur tous les bancs à l'exception de ceux du groupe CRCE)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances .  - C'est la première fois que nous avons cette impression de budget inachevé. Un projet de loi de finances rectificative était déjà annoncé pour le printemps, centré sur les collectivités territoriales. Il changera nécessairement de périmètre.

J'avais démarré l'examen du projet de loi de finances en le qualifiant d'introuvable budget du pouvoir d'achat. L'actualité l'a prouvé, plus qu'on n'aurait pu l'imaginer.

Nous sommes allés au bout du débat, je m'en félicite. Non sans friction - outre les problèmes de calendrier, nous nous sommes opposés au Gouvernement sur le chiffrage - mais nous avons travaillé en intelligence, avec courtoisie et écoute. Nous avons adopté des amendements parfois à l'unanimité ou à une très large majorité, par exemple le gel de la TICPE ou le partage des dividendes, qui devrait être repris par l'Assemblée nationale.

Je remercie les vice-présidents qui se sont succédé au plateau, le Gouvernement, en particulier M. Dussopt, les rapporteurs, spéciaux et pour avis, et tous ceux qui ont participé au débat, même si ce projet de loi de finances n'épuise pas tous les sujets. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC et sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. le président.  - Je remercie le rapporteur général et les vice-présidents qui se sont partagés 116 des 120 heures de ce débat budgétaire.

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Merci à la présidence et aux services du Sénat. Merci au président Éblé, au rapporteur général, aux membres de la commission des finances et tous les sénateurs. Je transmettrai vos remerciements à M. Dussopt. Merci enfin aux services du ministère.

La réforme constitutionnelle sera l'occasion d'améliorer encore les conditions d'examen des textes budgétaires. Merci encore - ce n'est qu'un au revoir ! (Sourires ; Mme Michèle Vullien applaudit.)

La séance est suspendue à 18 heures.

présidence de Mme Hélène Conway-Mouret, vice-présidente

La séance reprend à 18 h 15.

Commission (Nomination)

Mme la présidente.  - J'informe le Sénat qu'une candidature pour siéger au sein de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, a été publiée. Cette candidature sera ratifiée si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.

Port du voile intégral dans l'espace public

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de résolution en application de l'article 34-1 de la Constitution, visant à préserver l'ordonnancement juridique relatif au port du voile intégral dans l'espace public, à la demande du groupe Les Républicains.

Discussion générale

M. Bruno Retailleau, auteur de la proposition de résolution .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Si nous avons tenu à déposer cette proposition de résolution, c'est parce qu'il faut parfois réagir. On ne peut pas toujours se taire, faire comme si l'on n'avait rien vu, rien su, comme si l'on ne devait opposer que le silence à l'inacceptable.

Après la plainte de deux femmes verbalisées pour port de la burqa sur la voie publique, le Comité des droits de l'homme des Nations unies a pris, le 22 octobre, une décision stupéfiante : il a demandé à la France d'abroger la loi de 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public, et d'indemniser les deux plaignantes.

M. Roger Karoutchi.  - Bah tiens !

M. Bruno Retailleau.  - Nous demandons au Gouvernement d'y opposer son refus, un mur de refus. Et cela pour trois raisons. La première, c'est que cette décision légitime l'islam radical.

La burqa n'est pas une simple mode vestimentaire, un simple voile. Ce grillage en tissu efface l'identité, l'individualité des femmes qui la portent et les retranchent de l'espace public. Elle transforme la femme en image du refus de communiquer - alors que l'islam interdit l'image ! Enfin, elle diminue, en plaçant la femme à un rang inférieur et en envoyant un signal ostensible de cette infériorité aux passants. C'est inacceptable.

Qu'un Comité des droits de l'homme utilise ces derniers pour réduire les droits de la femme : les bras nous en tombent ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et Les Indépendants)

La burqa n'est pas n'importe quel signe d'appartenance religieuse, c'est un signe d'appartenance à une mouvance particulière : un islam radical qui considère la charia supérieure à la loi républicaine, qui voit la burqa comme l'étendard d'une contre-société, et dont l'objectif est de séparer nos compatriotes musulmans du reste des Français. Certes, nous avons un front de haute intensité, le terrorisme, mais il se nourrit de l'idéologie salafiste.

Deuxième raison : cette décision atteint le coeur de notre modèle républicain. Elle s'oppose à nos valeurs d'égalité, de dignité humaine et d'universalité de la loi. Notre fraternité est civique et non religieuse. Aucune communauté, religieuse ou non, ne saurait se retrancher dans un cercle de feu pour se couper de la communauté nationale.

Le temps est venu de dénoncer le cadre idéologique dans lequel s'enferment certaines institutions internationales qui utilisent la rhétorique des droits de l'homme pour développer une conception radicale de l'individualisme et du culturalisme. Au nom de l'exaltation libertaire, on retourne la liberté contre l'individu, et contre la collectivité !

La source de notre droit républicain est l'universalité. Or la conception anglo-saxonne s'oppose à notre tradition républicaine en plaçant les droits de l'individu au-dessus de tout. Elle porte atteinte à notre conception de la laïcité et de la citoyenneté qui n'exige pas que les particularismes soient refoulés, mais simplement qu'ils s'expriment dans l'espace privé.

Il faut ouvrir les yeux et dénoncer les avancées insidieuses de ces comités Théodule et pseudo-juridictions internationales.

Troisième raison, cette décision nourrit la crise démocratique en contrevenant à la volonté du peuple français. La loi de 2010, votée à une très large majorité, a fait l'objet d'un consensus national.

La portée de cette décision n'est pas contraignante, disent certains. Permettez-moi de citer le Premier président de la Cour de cassation, à propos d'une décision comparable sur la crèche Baby Loup : même si cette décision n'a pas de force contraignante, l'autorité qui s'y attache de fait déstabilise la jurisprudence et appelle la culture juridique française à entrer en synthèse avec la culture anglo-saxonne.

Décision emblématique, paroxystique, elle illustre la soft law du droit jurisprudentiel qui s'oppose à la démocratie nationale.

Gilets jaunes en France, résultats électoraux en Europe, au Brésil, aux États-Unis ou en Grande-Bretagne : ces insurrections s'expliquent aussi par le sentiment que la démocratie s'exerce sans le peuple, comme le dit Jacques Julliard. Ce type de décision nourrit la défiance du peuple envers des dirigeants, des instances insensibles à l'expression de la volonté populaire.

Je regrette à ce titre la signature par la France du pacte de Marrakech. Ces décisions sont filles d'une même idéologie, matrices d'une même crise démocratique. Le moment est venu de faire respecter la souveraineté populaire. On n'a pas le droit de bafouer le peuple lorsqu'il s'exprime. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et Les Indépendants)

M. Stéphane Ravier .  - Le voile intégral rend libre ! Parole de Redoine Faïd, qui a pu ainsi faire ses courses au marché du coin alors qu'il était en cavale.

Le problème du voile intégral est la conséquence directe de la politique d'immigration massive qui continue de faire entrer dans notre pays des millions d'individus dont beaucoup, en opposition avec nos traditions séculaires, combattent sur notre sol nos valeurs et notre attachement aux libertés individuelles, notamment celles des femmes.

S'ajoute quarante ans de couardise et de compromissions de la classe politique avec les islamistes, et voilà la France des clochers et de Marianne transformée en France de la charia et du voile intégral. Ce voile, acte politique d'extrémistes qui utilisent nos libertés pour mieux les combattre ! De la France fille aînée de l'Église à la France petite fille de l'islamisme, il n'y a qu'un voile. (M. Roger Karoutchi s'amuse.) Une étape dans la conquête de l'âme et du corps de la Nation par des fanatiques qui s'engouffrent dans les failles de notre droit pour imposer la loi islamique, aidés en cela par les idéologues d'officines internationales.

Malgré ce constat accablant, l'arrêt immédiat de toute immigration n'est pas à l'ordre du jour : le président de la République a fait ratifier en catimini le pacte mondial sur les migrations de Marrakech, une trahison qui achèvera la submersion de notre pays par des flux de migrants abritant des fanatiques qui ont la liberté des femmes en détestation.

Assez de masochisme, assez de déni ! Non, le fichu de nos grands-mères n'a rien à voir avec le voile intégral qui nie la femme jusqu'à l'enfermer dans un tissu carcéral. Ici nous ne sommes pas à Kaboul mais dans le Paris de la mode où l'on aime les femmes, qu'elles soient en robe, en pantalon ou en maillot de bain : nous aimons voir leurs cheveux, leur sourire. Nous les voulons mères au foyer, chefs d'entreprise, héroïnes de la patrie, parlementaires, ou même présidente de la République ! (Sourires)

M. Christian Manable.  - Ségolène !

M. Stéphane Ravier.  - Les femmes, nous les voulons libres ! Ce sont elles qui, par leur dévouement, ont porté le pays à bout de bras pendant cette Grande Guerre que nous commémorons : sans elles, la France ne serait plus française !

Pour la France fille ainée de la liberté, ne tergiversons plus, ne reculons pas face à l'obscurantisme islamiste, dévoilons la République !

M. Christian Manable.  - Vive les femmes !

Mme Nathalie Goulet .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Le groupe UC votera évidemment cette proposition de résolution, dans un contexte plein de symboles : quasiment au jour anniversaire de la Déclaration des droits de l'homme et de la loi de 1905, au lendemain de la signature du pacte de Marrakech.

Il se trouve que j'étais déjà orateur pour le groupe UC lors de la loi de 2010, que nous avions votée.

Cette condamnation de la France par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme n'a certes pas force contraignante, mais elle offre un terreau favorable aux dérives et à la victimisation. Rappeler les principes républicains du vivre ensemble n'est jamais inutile même si la force exécutoire des résolutions des organes de l'ONU est faible, c'est le moins que l'on puisse dire. Mais la soft diplomacy brouille les esprits, en effet.

Le pacte de Marrakech - dont plusieurs pays, parmi lesquels les États-Unis, se sont retirés - doit être ratifié le 19 décembre lors de l'Assemblée générale des Nations unies. Il agit d'une simple proclamation orale, suivie d'un coup de marteau.

On est loin du débat global et cohérent sur l'asile et l'immigration que Roger Karoutchi appelle de ses voeux !

Ces conventions internationales ne sont pas soumises au Parlement, qui n'arrive dans ces affaires qu'à la fumée des cierges.

Il serait opportun que le Gouvernement consulte le Parlement avant d'engager la France dans des accords aussi importants. Cela vaut aussi pour les conventions fiscales - nous en rediscuterons lors de la révision constitutionnelle. Nous avons bien des débats préalables au Conseil européen...

L'examen de la présente résolution était programmé bien avant l'adoption du pacte de Marrakech. Concours de circonstance, donc. Mektoub, il n'y a pas de hasard ! (Sourires)

J'ai conduit ici une commission d'enquête sur les réseaux djihadistes, six mois avant Charlie, et rapporté une mission d'information sur l'islam.

Le nombre d'États prohibant le port du voile intégral progresse. Aux Émirats arabes unis, on demande, pour des raisons de sécurité, aux femmes qui travaillent dans certaines administrations de ne pas se couvrir le visage. Au Koweït, il est interdit de conduire en portant le niqab. Le Maroc et la Tunisie ont interdit le port mais aussi la fabrication. La Bulgarie, la Belgique, le Danemark ont interdit le voile intégral. Au Royaume-Uni et en Suède, les écoles ont la possibilité de l'interdire.

Cette proposition de résolution répond-elle à une impérieuse nécessité ? Sur le plan de la sécurité, assurément. La tolérance doit être nulle et les sanctions lourdes pour ceux qui encouragent la désobéissance civile en payant les amendes des contrevenantes.

Nos concitoyens musulmans sont des Français à part entière, non des Français à part, avons-nous entendu lors du récent congrès du Conseil français du culte musulman. C'est à la religion de s'adapter à la République, sûrement pas l'inverse. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC, CRCE et RDSE)

Mme Françoise Gatel.  - Très bien !

M. Alain Marc .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants.) La loi du 11 octobre 2010 concerne non pas quelques milliers de personnes mais l'idée que l'on se fait de la France. Elle est d'autant plus fondée que le port du voile intégral n'est nullement une prescription de l'islam - preuve que c'est le fondamentalisme et non la religion qui est visé.

La dissimulation du visage dans l'espace public s'oppose aux exigences du vivre ensemble et est contraire aux principes de fraternité et de civilité. Elle marque le refus d'entrer en relation avec autrui, d'accepter la réciprocité et l'échange, car on voit sans être vu. Elle porte atteinte à la dignité de la personne, ce qui donne une base constitutionnelle incontestable à son interdiction. Le 27 juin 2008, le Conseil d'État a ainsi rejeté la requête d'une Marocaine qui s'était vu refuser l'accès à la nationalité française en raison de sa pratique religieuse radicale, incluant le port de la burqa.

En 2010, un choix de société a été fait. Il apparaît nécessaire de le réaffirmer avec force, le Comité des droits de l'homme des Nations unies ayant estimé que la loi de 2010 introduisait une discrimination religieuse. Cela aboutit de fait à favoriser la négation des droits des femmes et remet en cause notre conception de leur place dans notre société.

Or la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), dans son arrêt « SAS contre France » le 1er juillet 2014, avait déjà statué que les autorités nationales étaient mieux placées que le juge international pour statuer sur ces affaires.

Le port du voile intégral est une forme de réclusion publique. À l'heure où les Français s'interrogent sur le devenir de la Nation, il est nécessaire de réaffirmer les valeurs que nous avons en partage. Parlementaires, c'est à nous de garantir la pérennité de nos valeurs, qui fondent notre pacte social et qui forgent notre identité. Il nous revient d'être digne du privilège de vivre en France.

Le groupe Les Indépendants votera en faveur de cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Indépendants, UC, Les Républicains et RDSE)

M. Marc-Philippe Daubresse .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) La question du port du voile dans les lieux publics n'est pas nouvelle. En 2003, la commission Stasi écrivait déjà que l'État permettait la consolidation de valeurs communes qui fondent le lien social de la Nation. La République ne peut rester sourde aux cris de détresse des jeunes filles enfermées ainsi sous le voile.

En 2010, les parlementaires ont voté une loi, après que le Premier ministre eut demandé au Conseil d'État une expertise juridique sur la faisabilité de l'interdiction, sans blesser nos compatriotes de confession musulmane.

La menace terroriste n'a jamais été aussi présente sur le territoire, monsieur le ministre, et vous êtes bien placé pour le savoir. Nous avons évité bien des attentats grâce au courage des services que vous avez dirigés. Le voile intégral n'a rien à faire sur la voie publique pour des raisons d'ordre public et de dignité de la femme.

Le Comité Théodule des Nations-Unies, en se prononçant comme il l'a fait, méconnaît le pacte international de 1966, selon lequel la liberté des religions peut être limitée dans un but de protection de l'ordre public.

Le voile intégral revient à considérer que les femmes ne sont pas dignes d'être vues. L'idée qu'il puisse exister un vêtement du visage n'est pas tolérable sur notre sol. Plusieurs représentants de la religion musulmane ont reconnu que c'était le fondamentalisme qu'il s'agissait là de combattre. Revenir sur cette législation, après tous les drames que nous avons vécus, serait une injure aux victimes et à leurs familles. Dans ma commune, un jeune homme a été assassiné au Bataclan. Je connais ses parents : jamais ils ne comprendraient que l'on revienne sur cette législation. Ce serait un message de tolérance face à l'intolérable ; un signal de désespoir envoyé aux femmes qui espèrent leur émancipation partout dans le monde.

Toute la République dit non au voile intégral. J'appelle le Gouvernement à manifester son indignation face à cette décision incohérente. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC ; Mme Françoise Laborde applaudit également.)

M. Michel Amiel .  - Il y a bien longtemps que le port du voile intégral ne s'était invité dans la vie politique. La loi de 2010 l'interdit sur la voie publique. Le Conseil constitutionnel, la CEDH l'ont validé. Voilà maintenant que le Comité des droits de l'homme de l'ONU estime qu'elle porte atteinte au droit de librement manifester sa religion. Constatation ni contraignante, ni obligatoire, rappelons-le.

Dans le passé, ce Comité avait pris une position sur l'affaire de la crèche Baby Loup, position que le Premier président de la Cour de cassation avait dit qu'il prendrait en compte...

La CEDH a réaffirmé que l'acceptation ou non du port du voile intégral dans l'espace public constitue un choix de société.

Limiter cette question d'application de la loi au seul voile islamique, soulève un débat qui n'a pas lieu d'être car la République se vit à visage découvert. Mais puisqu'il est posé, parlons-en : l'islam ne contient aucune contrainte vestimentaire.

Le port du voile intégral couvrant le visage est absolument contraire à l'esprit du Coran : le pèlerinage rituel, le Hajj, doit d'ailleurs être réalisé à visage découvert. Si les femmes sont contraintes de porter le voile, c'est le fait des hommes, pas de la religion.

Le voile intégral est devenu une marque identitaire, voire une provocation face à notre tolérance occidentale issue de la philosophie des Lumières.

M. Bruno Retailleau.  - Eh oui !

M. Michel Amiel.  - Si c'est là le retour du spirituel annoncé par Malraux, permettez d'y voir plutôt un obscurantisme, rabaissement de la femme et intolérance.

Restons ouverts en lisant le Coran avec le regretté Mohammed Arkoun (Mme Nathalie Goulet s'émerveille à l'évocation de ce nom.), grande figure de l'islamologie contemporaine, ou avec Filali-Ansary, directeur de l'Institut d'études et civilisations islamiques de Londres qui réfutent jusqu'à l'idée même d'un État islamique. Soyons intraitables face aux dérives fanatiques, humiliantes pour les femmes.

Notre pays fait au contraire aux femmes une place éminente, en témoigne la figure de Marianne.

Je voterai cette proposition de résolution, même si son opportunité ne me parait pas évidente, mais une partie du groupe LaREM s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs des groupes CRCE, SOCR et Les Républicains)

M. Pierre Ouzoulias .  - La laïcité française demeure une spécificité de notre République et ses conceptions originales doivent être défendues, sur notre sol et dans les instances internationales. La CJUE et la CEDH n'ont jamais, dans leurs nombreuses décisions, contesté les législations ou les décisions judiciaires fondées sur ses préceptes. En revanche, le Comité du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme a parfois manifesté de l'incompréhension à l'égard de la laïcité française. Cette proposition de résolution aurait pu être l'occasion de lui rappeler notre attachement collectif à cet élément fondamental de notre socle républicain. Nous regrettons donc vivement que le mot laïcité ne soit jamais cité dans l'exposé des motifs de cette résolution.

À propos des constatations du Comité des droits de l'homme des Nations unies, il convient de préciser qu'elles n'ont aucune conséquence juridique sur le droit français. Elles ne modifient pas l'ordonnancement juridique national ni n'atténuent la portée de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et de la CEDH. Les mesures proposées aux alinéas 14 et 15 de la proposition de résolution sont donc sans objet.

Néanmoins, il aurait été utile de reprendre certaines des observations présentées par la majorité des membres de ce Comité. En effet, plusieurs d'entre eux partagent l'idée que le voile dissimulant totalement le visage est discriminatoire. In fine, ce qui est contesté par ce Comité c'est moins la mesure elle-même, l'interdiction du voile intégral, que la disproportion de la restriction de circulation, par rapport à un objectif qu'il estime mal défini par la loi.

Sur ce dernier point, la loi de 2010 aurait pu être plus explicite. Son premier article dispose : « Nul ne peut, dans l'espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage ». En revanche, l'exposé des motifs est beaucoup plus précis puisqu'il considère que « la dissimulation du visage dans l'espace public est porteuse d'une violence symbolique et déshumanisante, qui heurte le corps social » et que le voile revient « à nier l'appartenance à la société des personnes » qui le porte.

Fondamentalement, l'objet de la loi n'est pas la nature du bout de tissu porté, mais la position politique qui dénie à une femme ses droits de citoyenne, conformément à des traditions religieuses qui s'imposeraient à l'ordre républicain. Il ne s'agit pas de réglementer la dissimulation du visage qui pourrait concerner, de la même façon, la femme intégralement voilée et l'individu qui souhaiterait cacher son identité aux forces de sécurité. Mais de réaffirmer, dans l'exercice de la citoyenneté, la primauté des lois de la République sur les croyances ou les systèmes de pensée qui lui sont extérieurs. Là est bien l'essence de la laïcité.

À ce propos, j'aimerais rendre hommage au courage de M. Yadh Ben Achour, juriste tunisien et membre du Comité aux droits de l'homme qui a souhaité exprimer son opposition à la décision de cette instance. Ces arguments ont été repris en annexe et ils méritent d'être cités : « L'ordre, en France, par l'effet de la Constitution, est un ordre républicain, laïque et démocratique. L'égalité des hommes et des femmes fait partie des principes les plus fondamentaux de cet ordre [...]. Or, en soi, le niqab est un symbole de stigmatisation et d'infériorisation des femmes, par conséquent contraire à l'ordre républicain. [...] Les défenseurs du niqab enferment la femme dans son statut biologique primaire de femelle, objet sexuel, chair sans esprit ni raison, responsable potentiel du désordre cosmique et du désordre moral, et qui doit donc se rendre invisible au regard masculin et être pour cela quasiment interdite de l'espace public. Un État démocratique ne peut permettre une telle stigmatisation ».

Alors que nous allons peut-être débattre prochainement des lois de bioéthique, notre assemblée est-elle prête à reconnaître cette soumission ? Êtes-vous prêts à considérer que la laïcité est la condition première de l'émancipation des femmes et de l'affirmation de leur liberté à disposer librement de leurs corps, y compris lors de la procréation ? (Applaudissements sur les bancs des groupes CRCE, SOCR et RDSE)

M. Jean-Pierre Sueur .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Notre République est laïque. Il faut le dire car ce mot manque dans l'exposé des motifs de la résolution. Les religions doivent être exercées par chacun dans le respect de la loi républicaine qui s'impose à tous et permet à chacun de vivre sa religion et d'exprimer ses convictions. Une fois cela dit, je ne crois pas nécessaire d'en dire davantage.

Ce Comité n'a aucun pouvoir.

M. Roger Karoutchi.  - Il sermonne !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il est bavard, et il n'est d'ailleurs pas le seul... (Sourires) Il ne prend pas de décisions mais fait des constatations. Il n'a aucun titre pour imposer quoi que ce soit au Gouvernement et au Parlement de la République française. Je partage les vues de MM. Ouzoulias et Amiel.

Le groupe socialiste ne prendra pas part au vote, et je vais vous dire pourquoi. Nous sommes partisans de la loi de 2010 qui est absolument nécessaire. Cependant, est-il utile de revenir sur quantité de sujets - communautarisme, intégrisme, terrorisme, valeurs culturelles ?

Ce qui va être voté semble aller de soi. Je ne crois pas que le Gouvernement de la République française donnera suite aux constatations de ce Comité qui n'a aucun pouvoir. S'il advenait qu'un Gouvernement ait l'idée de changer la loi de 2010, le Parlement s'y opposerait, enfin, je l'espère.

La force de la loi de 2010, c'est de faire reposer l'interdiction de couvrir intégralement le visage sur deux principes : la sécurité et la fraternité.

Le Conseil constitutionnel a particulièrement insisté sur ce dernier principe. Une société où l'on ne peut pas se voir, pas se regarder n'est pas fraternelle. Il suffit de s'en tenir à cela.

M. Roger Karoutchi.  - Votez cette résolution !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il me paraît inutile de voter que la jurisprudence du Conseil constitutionnel et de la CEDH l'emporte sur ce Comité qui n'a aucun pouvoir.

M. Charles Revet.  - Il faut le rappeler.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Ceux qui ne veulent pas entendre n'entendront pas. La CEDH a dit que la loi de 2010 protégeait les femmes et l'espace public et qu'elle aidait la société française à devenir plus pacifiée et plus respectueuse de chacun. Elle a rappelé que chacun est libre de porter la tenue religieuse qu'il souhaite dans l'espace public mais que la loi peut interdire de dissimuler son visage si cela est contraire aux principes de sécurité et de fraternité.

Elle a aussi rappelé les principes de la fraternité qui font la société démocratique dans laquelle nous vivons. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; Mme Christine Prunaud applaudit également.)

Mme Françoise Laborde .  - Le 25 octobre dernier, j'ai interrogé la garde des Sceaux sur l'avis du Comité des droits de l'homme des Nations unies sur la loi de 2010. Je voulais réagir aux commentaires de la presse qui ne s'était pas documentée sur la portée de cet avis et aux propos du Premier président de la Cour de cassation que Bruno Retailleau a rappelé. Si nous ne nous étonnons guère des constatations hostiles de 18 experts internationaux, il est plus inquiétant que le représentant de la plus haute juridiction française instille des doutes sur ses compétences en prêtant à ce Comité de l'importance. N'oublions pas que les juges français ont l'obligation d'être la bouche de loi.

La fin du légicentrisme fait peser sur la loi une présomption de faillibilité qui n'est pas sécurisante pour les citoyens, surtout quand celle-ci a pour objet de garantir un modèle de vie en société largement partagé de prévenir les atteintes à l'ordre public ou les inégalités entre les sexes, comme c'est le cas s'agissant de la laïcité. Pour autant, le législateur a pris la mesure des risques de conflits de normes, entre les blocs de légalité, de constitutionnalité et de conventionalité. Mais la mission d'intégration des directives croissantes d'origines diverses à l'État de droit est la prérogative du Parlement, qui l'exerce sur ces bancs. À qui revient-il de dire lesquelles de ces influences incarne l'intérêt général, si ce n'est aux membres du Parlement ?

Il arrive que les conflits de normes découlent de conflits politiques ou de l'affrontement de différents modèles de pensée. Ce pourrait être le cas du principe de laïcité, si la CEDH ou une autre instance dotée d'un pouvoir contraignant avait décidé de remettre en cause notre régime de séparation des églises et de l'État.

Sans parler des théocraties, certains modèles concurrents au modèle français cherchent à étendre leur influence dans le monde. Ainsi, le modèle anglo-saxon consacre la liberté absolue d'affirmer son identité religieuse, sans en favoriser aucune, comme il reconnaît un pouvoir important aux « communautés ». Selon cette interprétation, l'espace public peut être le lieu de toutes les manifestations religieuses. C'est ce modèle que semble vouloir imposer le Comité des droits de l'homme à l'ensemble des États nations. En émettant un avis contraire aux jurisprudences de la Cour de cassation et de la CEDH, il nuit à l'unité républicaine et menace notre cohésion sociale. De surcroît ses avis ne trouvant pas à s'appliquer devant nos tribunaux, contribuent à nourrir un sentiment d'injustice sans fondement.

La résolution de M. Retailleau rappelle que le Parlement était souverain lorsqu'il a adopté la loi de 2010 sur l'interdiction de dissimulation du visage dans l'espace public. Aucune juridiction française ne peut éluder cette réalité, a fortiori sous l'effet d'une injonction externe non contraignante.

Partant de ce constat, j'incite le Gouvernement à répondre à l'avis du Comité des droits de l'homme en défendant avec fermeté la pertinence de notre principe de laïcité et l'égalité entre les femmes et les hommes, dans un contexte mondialisé, où les individus sont et seront exposés à une plus grande diversité religieuse. Ce principe de laïcité incarne, dans notre modèle républicain, le principe d'égalité, dont découle celui de neutralité de l'État. Ce dernier doit traiter tous les citoyens à égalité de droits, quelle que soit leur religion, dans le respect de la liberté d'expression, de la liberté religieuse, celle de croire ou de ne pas croire. De plus, la loi de 1905 reste un cadre satisfaisant pour l'évolution du paysage religieux français et elle n'a été un obstacle au développement d'aucun culte.

La loi de 2010 a été adoptée par le Parlement pour des raisons de sécurité publique et non pour des raisons de laïcité. Et si nous appliquions les lois, monsieur le ministre ?

M. Roger Karoutchi.  - Tiens donc !

Mme Françoise Laborde.  - Le groupe RDSE votera cette résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et RDSE)

M. Pierre Charon .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Il y a deux mois, je défendais la nécessité de combattre plus efficacement le port du voile intégral qui heurte nos valeurs les plus fondamentales.

Certains invoquent le Comité des droits de l'homme des Nations unies qui a critiqué l'interdiction de la burqa en France. Je salue l'initiative de M. Retailleau qui remet les choses à leur place.

Non, la communauté internationale n'a pas condamné la France. Le Comité des droits de l'homme est composé de soi-disant experts et ses observations n'ont rien de contraignant. La charte des Nations unies proclame elle-même la souveraineté des États membres. Chaque État peut donc définir les infractions pénales, le droit de sanctionner les comportements qui choquent la vie en société. Or, le voile intégral porte atteinte à la cohésion de notre société et le législateur a principalement le droit de l'interdire même si je souhaite que l'infraction soit transformée en délit, monsieur le ministre.

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 prévoit la liberté de manifester sa religion et son article 18 admet des « restrictions prévues par la loi et qui sont nécessaires à la protection de la sécurité, de l'ordre et de la santé publique, ou de la morale ou des libertés et droits fondamentaux d'autrui ». Justement, le législateur avait estimé qu'il y avait une atteinte à l'ordre public, mais également à la dignité de la femme. Le voile intégral est bien une atteinte aux droits fondamentaux. Comme on nous oppose la liberté de religion, autant rappeler l'exégèse des textes invoqués qui n'empêchent nullement l'interdiction de certains comportements choquants. Le droit international n'interdit donc pas la prohibition du voile intégral. Cette interdiction ne met pas en cause la liberté de conscience ou de culte car elle touche à l'ordre public. Ce ne sont pas des convictions que l'on refuse, mais des comportements choquants dans l'espace public. Le port du voile intégral n'est pas seulement une attitude religieuse. Au-delà même d'un acte politique, c'est une pure provocation ! Il s'agit de narguer les forces de l'ordre et les valeurs de notre société. Ceux qui défendent le port du voile intégral ne font pas autre chose que de tomber dans un piège. Nous n'avons pas besoin d'idiots utiles, comme disait Lénine.

Enfin, d'autres juridictions, comme la CEDH, ont constaté qu'il n'y avait aucune atteinte aux droits et libertés. Notre pays est parfois passé sous les fourches caudines des juges de Strasbourg. Or, comme le souligne l'exposé des motifs, la Cour a rappelé la possibilité pour l'État de faire « respecter les exigences minimales de la vie en société ». Cette position rendue en 2014 a d'ailleurs été confirmée l'année dernière. Les juges de Strasbourg et du Palais Royal ont confirmé que les libertés publiques n'étaient pas mises en cause par cette loi. Je peine à comprendre ceux qui refusent l'interdiction du port du voile intégral. En réalité, ils se font les défenseurs non de la liberté de conscience, mais bien du communautarisme qui fragilise notre société. Ils sont les complices de l'islam radical que nous devons combattre.

Cette proposition de résolution doit être adoptée. Il faut résister à toutes les déstabilisations, mêmes médiatiques, à l'encontre de la sagesse du législateur français. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Édouard Courtial .  - La France a-t-elle encore son avenir entre ses mains ? La loi est-elle encore l'expression d'un destin commun ? Si l'on cède à l'avis du Comité des droits de l'homme des Nations unies, je crains que non.

Mais que nous reproche-t-on ?

D'avoir défini un cadre juridique qui serait discriminatoire et contraire à la liberté religieuse ?

C'est une folie ! Car c'est ignorer que la France est la Patrie des droits de l'homme et qu'elle a donné au monde des valeurs universelles qui ont présidé, notamment, à la création de ce même Comité. Quelle plus belle preuve de liberté et de tolérance qu'un pays comme le nôtre qui reconnaît uniquement des citoyens, sans les distinguer selon leur religion, ni leur couleur de peau, leurs origines ou leur opinion politique. C'est ignorer, aussi, le principe cardinal de laïcité dans notre République qui prône non pas l'indifférence des religions mais la neutralité permettant le vivre ensemble. La loi de1905 donne une définition très claire : la laïcité accepte tous les cultes et n'en favorise aucun. Certains estiment que la République devrait accepter un droit absolu à la différence au nom de la liberté de croyance. C'est la voie du communautarisme et c'est le parti pris des décisions onusiennes qui nous occupent aujourd'hui.

D'autres encore estiment que la République ne reconnaît aucun culte. C'est une laïcité faite de passivité et d'ignorance du fait religieux. On va rapidement vers le mépris et le rejet des religions. De la même manière je m'y oppose.

C'est également ignorer les droits de la femme de ne pas subir quelque pression ou domination que ce soit pour se sentir libre de ce qu'elle est et de ce qu'elle veut accomplir.

C'est ignorer, ensuite, la légitimité du Parlement et des représentants du peuple souverain de prendre les décisions qui s'imposent pour garantir notre coexistence et l'adhésion au pacte national. Mais c'est aussi lancer un message de défiance vis-à-vis de nos institutions nationales garantes des libertés de chacun

Il est d'ailleurs à noter que depuis l'adoption de ce texte, plusieurs voisins européens ont fait le même choix. Seraient-ils, eux aussi, de dangereux obscurantistes ?

C'est ignorer, enfin, le danger de l'islamisme radical et politique qui prône le communautarisme là où nous sommes une Nation. Si l'islam a toute sa place en France, le combat contre toute forme d'intégrisme est une absolue priorité à l'aune des terribles attentats que notre pays a connus.

Mais là où ils veulent diviser la République et affaiblir ce que nous sommes nous leur opposons une unité qui passe par le respect de certaines règles dont celle qui interdit le port du voile intégral dans l'espace public. Ainsi, nous n'avons aucune leçon à recevoir d'un Comité ad hoc composé d'experts qui n'entendent rien ni à nos traditions républicaines ni à notre volonté de combattre toutes les formes de communautarisme. De la même manière, nous n'avons absolument pas à nous justifier pour conserver notre droit à oeuvrer comme nous l'entendons à l'intérêt général au service de tous les Français.

C'est pourquoi je soutiens avec force la proposition de résolution du président Retailleau ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur .  - La loi de 2010 a été adoptée dans un très large consensus après un vif débat. Ce consensus montre à quel point cette question est un enjeu de société qui nécessitait l'union des parlementaires avec l'appui du Gouvernement.

C'est dans cet esprit que je me présente aujourd'hui devant vous, au-delà des logiques partisanes, pour débattre de la proposition de résolution portée par le président Retailleau.

Ce texte fait suite aux constatations du Comité des droits de l'homme de l'ONU, qui a estimé que cette loi constituait, pour les femmes qui portent le voile intégral, une discrimination à caractère religieux et qu'elle portait atteinte au droit de manifester leur religion.

Face à ces constatations, vous souhaitez donc réaffirmer votre attachement à la loi de 2010 et appeler le Gouvernement à ne pas donner suite à ces constatations.

Sur ces deux points, la position du Gouvernement est claire. Nous partageons votre attachement à la loi de 2010, que nul ne souhaite remettre en cause, et qui est conforme aux conventions internationales qui nous lient.

Cependant, le Gouvernement est aussi attaché au respect de ses engagements internationaux : en l'espèce, le Pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques qui demande que la France réponde aux constatations du Comité des droits de l'homme lorsque celui-ci formule des critiques à notre encontre. Le Gouvernement entendra donc y répondre, fermement, comme il lui revient de le faire.

La loi du 11 octobre 2010 s'inscrivait dans une logique de préservation de l'ordre public, plus exactement, comme l'a jugé le Conseil constitutionnel, de respect des « exigences minimales de vie en société ».

En effet, qui peut se satisfaire que des personnes se soustraient, par la dissimulation de leur visage, aux interactions sociales qui constituent le liant d'une vie en société ? Peut-on considérer comme conforme à l'égalité entre les femmes et les hommes, une telle attitude, quand bien même elle serait revendiquée comme libre par les personnes concernées ?

Face à ces interrogations, la position du législateur a été sans ambiguïté : il fallait marquer la désapprobation de la Nation à l'égard de telles attitudes, et condamner de telles pratiques, tout en respectant une stricte proportionnalité. Il s'agit bien d'une loi sur la dissimulation du visage et non de stigmatisation d'une religion, car chacun reste libre de porter un vêtement exprimant une conviction religieuse dans l'espace public à la condition-même qu'il laisse apparaitre son visage.

Nos voisins européens ont également légiféré en la matière, notamment la Belgique, l'Italie, l'Autriche et le Danemark.

La loi de 2010 a prévu une sanction adaptée et proportionnée en prévoyant une amende ou l'accomplissement d'un stage de citoyenneté pour toute personne dissimulant son visage dans l'espace public. Ce souci de proportionnalité a été relevé par le Conseil constitutionnel, qui en a conclu que le législateur avait correctement concilié les préoccupations de l'ordre public et de la liberté religieuse.

L'application de cette loi s'est toujours faite avec pédagogie depuis son adoption. Huit ans après, il semble que cette loi a porté ses fruits. Dès l'adoption de cette loi, la pédagogie a présidé à son application. C'est pourquoi un délai de six mois avait été laissé avant l'entrée en vigueur de la mesure d'interdiction générale de la dissimulation du visage, afin que chacun puisse l'anticiper. La circulaire du Premier ministre du 2 mars 2011 appelait à mettre ce délai de six mois à profit pour faire connaître le texte.

J'en viens à la réception de cette loi par les juridictions et organismes internationaux et notamment la CEDH et plus récemment le Comité des droits de l'homme de l'ONU. Contrairement à l'exposé des motifs de la proposition de résolution, il n'est pas concevable de mettre ces deux instances sur le même plan, alors que l'une est une de nos juridictions suprêmes, et l'autre un simple comité d'experts internationaux.

M. Jean-Pierre Sueur et Mme Françoise Laborde.  - Tout à fait !

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État.  - Il y a un peu plus d'un an, le 1er novembre 2017, le Président de la République rappelait, à Strasbourg, l'attachement profond de la France aux droits garantis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de 1950, et à son instrument le plus efficace de mise en oeuvre, qu'est la CEDH. Cet attachement implique notre attachement également à la force obligatoire des arrêts de la Cour. Saisie par une requérante, dans son arrêt SAS contre France de 2014, la CEDH a écarté fermement toute violation de la Convention du fait de l'application de la loi de 2010, dont elle a jugé qu'elle ne revêtait pas de caractère discriminatoire et qu'elle ne portait atteinte ni au respect de la vie privée, ni à la liberté de conscience, ni à la liberté d'expression.

Au contraire, le comité des droits de l'homme de l'ONU, saisi d'une requête individuelle, a rendu le 23 octobre dernier des constatations sur la loi de 2010, dans lesquelles il estime que l'application de cette loi porte atteinte au droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion résultant de l'article 18 du Pacte international des droits civils et politiques, et à l'interdiction des discriminations prévue par l'article 26 du même Pacte.

Ce comité est un organe composé d'experts internationaux indépendants, qui est chargé de contrôler la mise en oeuvre des droits consacrés par le pacte international de 1966. Organe non-juridictionnel, le comité ne reconnaît pas de marge nationale d'appréciation sur les questions qui concernent la préservation du vivre-ensemble. Le comité s'était d'ailleurs prononcé contre l'obligation de poser tête nue sur les photos d'identité en 2013 et contre l'interdiction, résultant de la loi de 2004, du port de signes religieux ostensibles par les élèves de l'école publique. Mais ces constatations ne sont ni une condamnation de l'État, ni une injonction au Gouvernement. En somme, elles ne remettent pas en cause notre droit national.

J'entends vos inquiétudes et votre souhait d'adopter la résolution dont nous discutons aujourd'hui. Cependant, elles ne sont pas fondées tant la détermination du Gouvernement à préserver et appliquer cette loi et les jurisprudences de Conseil constitutionnel et de la CEDH est intacte. Elles sont d'autant moins fondées, que les constatations du comité des droits de l'homme sont dépourvues de portée contraignante, et n'ont donc pas vocation à bouleverser notre paradigme législatif et juridique actuel.

En revanche, cette résolution aurait un caractère contre-productif, en ce qu'elle invite le Gouvernement « à ne pas donner suite à ces constatations ». Or, conformément à la Constitution et à nos traditions en pareille situation, la France entend répondre aux constatations du Comité des droits de l'homme de I'ONU. Un dicton populaire veut que « qui ne dit mot, consent ». Et bien la France répondra, car elle ne consent pas : là est notre point d'accord.

Monsieur Retailleau, vous avez raison de souligner que les constatations du Comité des droits de l'homme sur Baby Loup ont été commentées par le Premier président de la Cour de cassation, mais il s'agissait davantage d'une réaction d'une portée plus médiatique que juridique, qui ne s'accompagne pas de revirement de jurisprudence.

Pour tous ces motifs, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat sur la proposition de résolution, mais il répondra fermement au Comité. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)

La discussion générale est close.

À la demande du groupe LaREM, la proposition de résolution est mise aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici le résultat du scrutin n°38 :

Nombre de votants 253
Nombre de suffrages exprimés 236
Pour l'adoption 236
Contre 0

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC et sur quelques bancs du groupe RDSE)

La séance est suspendue à 19 h 45.

présidence de M. Jean-Marc Gabouty, vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

Adaptation des communes nouvelles à la diversité des territoires

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à adapter l'organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires.

Discussion générale

Mme Françoise Gatel, auteur de la proposition de loi .  - Je suis particulièrement heureuse de ce débat dans la chambre des territoires, sur cet espace unique, la commune, création révolutionnaire, coeur battant de notre démocratie. « C'est dans la commune que réside la force des peuples libres », disait Tocqueville. La commune « petite patrie » selon Erik Orsenna, est plus vivante, moderne et nécessaire que jamais. Sans cet amortisseur social, la cohésion sociale se délite. La commune doit assumer une double fonction, la proximité et l'efficacité, tout en obligeant les élus à inventer l'avenir de leurs territoires.

La commune nouvelle, dont je salue les initiateurs de 2010 et 2015, augure d'une profonde révolution. Elle était une pépite de liberté portée par les élus eux-mêmes.

Dans notre pays jacobin, l'affirmation de la Nation n'a eu de cesse de s'appuyer sur l'uniformité, gommant la diversité. La loi sur la commune nouvelle n'oblige ni ne contraint, elle permet. Elle est portée par des hommes et des femmes engagés courageusement dans ce projet d'avenir, tout en s'appuyant sur l'histoire et l'identité des communes existantes. Créer une commune nouvelle, c'est recomposer une famille de destin, convaincre, expliquer, lever les freins et les peurs, instaurer la confiance et l'adhésion des habitants et de tous les élus qui savent que demain sera différent. Avec Christian Manable, nos nombreux déplacements nous ont convaincus qu'adapter, n'est ni forcer ni brusquer, ni renoncer ni renier. La mission de suivi de la réforme territoriale présidée par Mathieu Darnaud montre, comme Jacques Pélissard l'avait vu dès 2015, que les assouplissements nécessaires ne sont pas des reculs.

L'article premier de la proposition de loi instaure un régime transitoire pour l'effectif du conseil municipal à compter du premier renouvellement général qui suit la création de la commune nouvelle. La commune nouvelle de La Hague dans la Manche, créée en 2017, compte 19 communes historiques et n'aurait que 35 conseillers municipaux après les prochaines élections municipales en 2020, contre 234 actuellement. Un régime transitoire est donc nécessaire pour éviter une telle baisse vertigineuse, et la sous-représentativité des communes historiques.

L'article 2 donne au conseil municipal d'une commune nouvelle la possibilité de créer, pendant une période transitoire, une commission permanente, ayant délégation sur certaines affaires courantes. Après sa suppression par la commission des lois, le groupe UC propose une alternative pour favoriser une décision collégiale autour du maire et des adjoints.

L'article 3 prévoit une adaptation à la règle de complétude du conseil municipal. Actuellement, la démission d'un seul conseiller, entre l'arrêté de création de la commune nouvelle et la première réunion du conseil municipal qui doit élire le maire de la commune nouvelle, impose de nouvelles élections.

L'article 4 crée un concept disruptif pour certains, pragmatique pour d'autres : la commune-communauté. Il s'agit de simplifier les procédures, de renforcer la mutualisation et la proximité avec les habitants et tous les élus.

La loi impose à toute commune d'intégrer une intercommunalité dans une course sans fin, et sans beaucoup de sens, au toujours plus grand. Quel sens y a-t-il à leur imposer d'intégrer un EPCI ?

« Les lois sont faites pour les hommes et non les hommes pour la loi », disait Portalis.

M. Loïc Hervé.  - Il nous regarde !

Mme Françoise Gatel.  - Il nous surveille même ! Ici au Sénat, nous défendons tous les jours la diversité.

Je salue certains apports de Mme Canayer et de M. Maurey et remercie les élus de leurs contributions.

Je salue Jean-Marie Bockel, qui nous a confié, au nom de la délégation aux collectivités territoriales, le rapport que nous avons intitulé, avec M. Manable : Commune nouvelle, une révolution silencieuse. Révolution, en effet : plus de 1 900 communes ont créé librement 560 communes nouvelles, qui regroupent 1,9 million d'habitants.

Je salue aussi le président Marseille, qui a soutenu de toute sa conviction décentralisatrice cette proposition de loi, Philippe Bas, président de la commission des lois, qui a permis son inscription à l'ordre du jour du Sénat, Mathieu Darnaud, rapporteur de la mission de suivi et de contrôle sur les réformes territoriales, Mme Canayer, rapporteur, qui a enrichi le texte, ainsi que le président Larcher, ardent défenseur des territoires et de leurs élus, et M. Lecornu, pour son écoute et la qualité du dialogue que nous avons noué sur ce texte.

Le Sénat a beaucoup dit ses regrets vis-à-vis du Gouvernement pour l'absence de dialogue, qui s'apparente parfois à la négation de l'initiative parlementaire. Aujourd'hui, le président de la République semble vouloir renouer les liens.

Monsieur le ministre, vous avez souhaité remplacer le prêt-à-porter territorial par du cousu main. Le Sénat vous offre ce soir une première séance de travaux pratiques qu'il vous appartiendra de poursuivre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et Les Républicains)

Mme Agnès Canayer, rapporteur de la commission des lois .  - La baisse de confiance croissante des gouvernés à l'égard de leurs représentants s'est installée durablement dans les démocraties modernes. Cette crise de la représentation s'exprime à présent dans le mouvement des gilets jaunes. Nombre de maires ont ouvert des cahiers de doléances et souhaitent renouer le dialogue républicain.

Près de 73 % des Français déclarent un attachement fort à la commune, lieu de mémoire, de production d'identité mais aussi laboratoire démocratique de proximité.

Mais la commune perd ses moyens au profit des intercommunalités. Les concours de l'État diminuent et les maires sont de plus en plus nombreux à démissionner.

Les communes nouvelles ouvrent une voie de modernisation de l'institution communale, comme l'a écrit M. Darnaud dans son rapport d'information pour la mission de contrôle et de suivi des lois de réforme territoriale. Et comme l'écrivent Françoise Gatel et Christian Manable dans leur rapport de 2015, nous vivons avec les communes nouvelles une « révolution silencieuse ».

Au 1er janvier 2018, plus de 560 communes nouvelles rassemblant 1 910 communes ont vu le jour regroupant 1,9 million d'habitants et plus de 200 projets sont en cours. Certains territoires du Grand Ouest comme la Manche ou le Maine-et-Loire sont en pointe dans ce domaine.

Toutefois l'expérience des premières communes nouvelles révèle des verrous parfois décourageants. La proposition de loi Gatel répond à une attente forte.

Nous avons souhaité enrichir le texte et aller vers une transition plus progressive.

Tout d'abord, il s'agit de donner du temps au temps car cette « révolution » doit se faire en douceur. L'application trop rapide peut provoquer un effet repoussoir.

En première phase, le nombre de conseillers est très important : 234 à Livarot, pays d'Auge, 163 à Cherbourg et 266 à Petit-Caux. La diminution du nombre de conseillers est très forte entre les deux premières phases, jusqu'à 85 % de réduction à Petit-Caux. Pour y remédier, la proposition de loi propose que le nombre de conseillers municipaux ne peut être inférieur à trois fois le nombre de communes déléguées dans la seconde phase transitoire.

Nous proposons de neutraliser cette règle pour la désignation des délégués sénatoriaux. Nous proposons également un délai de trois ans pour la mise en conformité.

De même, une demande concerne l'ordre du tableau du conseil municipal pour permettre aux ex-maires des communes historiques devenus maires délégués, de figurer juste après le maire de la Commune nouvelle dans l'ordre du tableau.

Des aménagements de la règle de complétude pour l'élection du maire de la commune sont nécessaires pour éviter les effets d'aubaine. En cas de vacance de plus d'un tiers du conseil municipal ou de la moitié la dernière année du mandat, des élections intégrales devront être organisées.

Des amendements de simplification et de rationalisation ont été déposés. L'existence de conseils municipaux pléthoriques constitue une lourdeur. La possibilité de déléguer des pouvoirs faciliterait le travail.

Les communes-communautés sont une nouveauté et une simplification, qui ne dépouille nullement les EPCI.

La commune est l'école de la liberté, elle la met à la portée du peuple, écrivait Tocqueville.

La commune nouvelle est la voie de la modernisation de l'échelon communal. Elle est source de souplesse et d'agilité. Cette liberté est une révolution silencieuse en marche. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Loïc Hervé.  - En marche, vraiment ? (Sourires)

M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales .  - Révolution silencieuse, c'est le terme employé dans le rapport d'information de 2016 de Mme Gatel. Je reprends l'expression à mon compte.

Les diverses lois ont permis le rapprochement des communes de façon volontaire. Plus de 560 communes nouvelles rassemblant 1 910 communes et 1,9 million d'habitants, quel succès !

Le président de la République a lui-même promu le droit à la différence. La commune nouvelle n'est en aucun cas une obligation.

Une mesure prorogeant la bonification de DGF de 5 % entre 2019 et 2021 a été adoptée au Sénat la semaine dernière.

M. Loïc Hervé.  - C'est Noël ! (Sourires)

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - En matière de communes nouvelles, l'État n'a pas forcé la main des élus.

Mme Cécile Cukierman.  - Un peu quand même !

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - La commune nouvelle connaît un grand succès dans l'Ouest, notamment le Maine-et-Loire, la Manche, l'Orne, le Calvados et l'Eure.

Un mot de la méthode de travail retenue : la proposition de loi a fait l'objet d'une concertation et d'une coproduction ; Mmes Gatel et Canayer ont travaillé étroitement avec le Gouvernement. Jacqueline Gourault et moi-même avons adressé une lettre à l'ensemble des associations d'élus pour nourrir nos réflexions.

Mme Cécile Cukierman.  - Si l'AdCF est d'accord...

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - La proposition de loi a positivement évolué, notamment grâce aux travaux de la commission des lois.

Je souhaite que son examen à l'Assemblée nationale intervienne rapidement.

L'une des premières commandes passées aux préfets était de nous relayer les contraintes, parfois injustifiées, auxquelles sont confrontés les élus.

Nous voulons accompagner les mutations tout en levant les blocages. L'objectif de l'article premier est simple.

Il s'agit de traiter la situation de communes nouvelles qui regroupent beaucoup de communes mais une population relativement faible.

Entre le premier et le deuxième renouvellement, le nombre de conseillers municipaux correspond à la strate démographique supérieure. Cela entraîne parfois une chute très brutale. Ainsi Livarot-Pays d'Auge, dans le Calvados, passe de 234 conseillers municipaux avant à 33 après le premier renouvellement. Après l'adoption de la proposition de loi, on passerait à 79, grâce à un lissage, qui assure une transition plus douce.

Les dispositions concernant les grands électeurs obéissent à un impératif d'équité démocratique qui vous touche directement : rien ne justifie que les communes nouvelles aient un poids excessif dans la désignation du futur sénateur.

L'article 2 a été supprimé en commission ; c'est, je crois, une bonne chose. Tant que la commission n'a compétence que sur des sujets particuliers, et que le pouvoir de police du maire n'est pas remis en cause, j'y suis favorable.

L'article 3 revient sur le principe de complétude du conseil municipal. Le Gouvernement y est aussi favorable.

La commission des lois a beaucoup réécrit l'article 4 sur la commune-communauté, nouveau type de collectivité territoriale, il faut en être conscient. La commune-communauté ne doit pas servir de prétexte au détricotage de la carte intercommunale. L'amendement de la rapporteure nous satisfait. Les maires ont besoin de stabilité. Il faut que toutes les conséquences de la création de cette nouvelle intercommunalité soient mesurées en matière juridique et financière.

L'article 6 vise à neutraliser les effets de seuil, les communes nouvelles pouvant déroger à ceux, notamment, relatifs aux aires d'accueil des gens du voyage. Mais la liberté des communes ne peut servir à fragiliser d'autres pans de nos politiques publiques. De plus, je connais votre attachement à ce que les communes nouvelles soient traitées comme les autres communes.

Je comprends l'esprit des amendements visant à réduire le nombre de mairies annexes. C'est pertinent. Je comprends donc l'esprit des amendements déposés par le président Maurey, qui viennent d'une proposition de loi que vous aviez rédigée.

Faisons confiance sur ces aspects aux élus locaux !

Le Gouvernement reste largement favorable à cette proposition de loi, qui préserve les libertés locales.

Mme Cécile Cukierman.  - Liberté sous la contrainte !

Mme Françoise Gatel.  - Très bien !

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Je souhaite que la navette soit l'occasion d'un travail partagé recherchant le bon équilibre entre souplesse territoriale et respect des grands principes. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et Les Républicains)

M. Loïc Hervé .  - La commune nouvelle est bel et bien une « révolution silencieuse », selon le titre du rapport de Christian Manable et Françoise Gatel, et intéresse de plus en plus nos élus locaux. Au 1er janvier 2019, ce sont encore près de 200 communes nouvelles qui devraient voir le jour.

Mais des réticences subsistent. Non sur l'aboutissement, mais sur les modalités de la transition. Cette proposition de loi vise à y remédier. Non en contraignant les élus à créer des communes nouvelles, ni en les incitant financièrement. Si l'on décide de se marier, on ne peut pas le faire que pour l'argent ! (Sourires)

Pourvu, à propos, que la prorogation du coup de pouce financier de l'État vers les collectivités territoriales soit prolongée ! Le coup de pouce financier ne fait pas tout. Il faut un réel projet communal partagé entre les élus et la population. Les communes nouvelles ayant échoué l'expliquent aisément par l'absence de projet commun, par l'oubli du fait qu'une commune nouvelle est une seule commune, ce qui entraîne une nécessaire diminution des conseillers municipaux. L'effectif ne pourra, avec cette proposition de loi, baisser de plus des deux tiers.

Autre crainte que peut susciter une commune nouvelle : son fonctionnement. La commission permanente n'aurait concerné que les grandes communes nouvelles, et temporairement entre la création de la commune nouvelle et le premier renouvellement. La commission des lois a supprimé ce dispositif. C'était pourtant une bonne idée. Je vous proposerai de rétablir cet article 2 dans une rédaction revue.

Dernier obstacle, parfois : l'obligation de rattachement à un EPCI. C'est en effet une obligation.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - Eh oui...

M. Loïc Hervé.  - Nous connaissons tous, dans notre territoire, une commune confrontée à ce problème de rattachement à un EPCI avec lequel elle n'a, peut-être, aucun projet commun. Non, tous les territoires n'ont pas vocation à respecter la même architecture. Le jardin à la française n'est pas une fin en soi.

Je veux saluer le travail de la rapporteure Agnès Canayer, qui a su faire preuve d'ouverture d'esprit, en bonne intelligence avec Françoise Gatel.

Cette proposition de loi a suscité des réactions de méfiance, car elle remet en cause nos schémas de pensée.

Sans surprise, nous apporterons tout notre soutien à ce texte, pour que les projets aboutissent et souhaitons son inscription rapide à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC, ainsi que sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. Alain Marc .  - La commune est un échelon local indispensable à la qualité du service public et à la vitalité de la démocratie de proximité. C'est aussi un amortisseur social. Le développement des communes nouvelles est une voie de modernisation et de redynamisation des communes.

La commune nouvelle a connu un succès bien plus important que ce qui était envisagé. Avec la création des communes déléguées, un juste équilibre a été trouvé. Dans un contexte de baisse des dotations de l'État, c'est un moyen de retrouver des marges de manoeuvre et d'offrir de meilleurs services à la population.

Ce n'est certes pas un modèle généralisable, mais le régime en vigueur peut être amélioré, notamment sur la répartition des rôles entre communes et intercommunalités. Je salue la qualité des travaux de la rapporteure Agnès Canayer. Je me réjouis que la commission des lois ait approuvé le retour à un droit commun plus progressif en s'assurant que le nombre de conseillers municipaux ne baisse pas de plus des deux tiers après le premier renouvellement ; elle a aussi prévu de ne déroger au principe de complétude du conseil municipal que pour la première élection.

Elle a encore proposé un délai de trois ans pour se mettre en conformité, et permis aux communes nouvelles de supprimer et mutualiser une partie des annexes de la mairie.

Le groupe Les Indépendants votera cette proposition de loi telle que modifiée par la commission des lois. (M. Philippe Bas, président de la commission, ainsi que Mme Agnès Canayer, rapporteur, applaudissent.)

M. Arnaud de Belenet .  - Je veux d'abord saluer ce travail, qui a permis à certains d'entre nous de coécrire ce texte. C'était un plaisir d'y travailler. C'est dans la commune nouvelle que réside la force des peuples libres !

Mme Cécile Cukierman.  - Eh bien !

M. Arnaud de Belenet.  - Nous n'avons pas la même conception de la liberté !

Mme Cécile Cukierman.  - Ni de la commune, c'est ce qui nous rassure !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Tocqueville ne mérite pas ses descendants !

M. Arnaud de Belenet.  - Faisant écho à l'esprit de liberté vanté par Tocqueville il y a près de deux siècles, le succès des communes nouvelles a été assez disparate, quoique réel. Cette proposition de loi lève quelques freins en établissant une transition vers le droit commun plus progressive et en instaurant quelque souplesse.

L'article premier, complété en commission, prévoit un lissage plus progressif de la composition du conseil municipal.

L'article 2 prévoit une délégation du conseil de tout ou partie des compétences déléguées au maire à une commission permanente.

La commission a précisé l'ordre du tableau du conseil municipal, entre autres.

L'article 4 permet qu'une communauté de communes se transforme en commune nouvelle sans adhérer à un EPCI. Voilà une disposition de bon sens, qui rompt avec l'obligation de fusion chronophage ; c'est un outil pour les maires qui subissent les révisions de périmètres, tout en encourageant les coopérations.

Alors que nous vivons la première crise sociale de l'ère numérique, s'il est un endroit où l'humain est considéré, c'est encore le bureau du maire !

Cette proposition de loi répond aux besoins de souplesse et de liberté de nos territoires. Restent des freins à lever.

Je me réjouis du soutien du ministre, de bon augure pour l'examen du texte à l'Assemblée nationale. (Mme Françoise Gatel applaudit.)

M. Pierre-Yves Collombat .  - Créées par la loi de 2010, les communes nouvelles n'étaient que 18 avant 2014, année au cours de laquelle elles seront 13 à être créées, avant d'être stimulées par la loi de mars 2015 : ainsi, 317 ont été créées en 2015, 200 en 2016, avant de retomber : seulement 37 en 2017.

S'il fallait une confirmation que ces fusions de communes sont largement le sous-produit de la loi NOTRe et des baisses de crédits, ces chiffres suffiraient à le prouver. La plupart sont des communes très proches et habituées à travailler ensemble. Rien de naturel, donc.

Dans les fusions de plus de trois communes, les motivations sont financières et identitaires. Financières, car la baisse de dotation était gelée pendant trois ans. Le critère de taille était alors curieux. Le regroupement dans une commune nouvelle est apparu comme le moyen de continuer à assurer un service public.

Les fusions de communes sont ainsi devenues un moyen de se protéger des réformes imposées.

Les fusions se font généralement autour d'une commune centre. La confusion des sentiments et des intérêts montre les ambiguïtés des élus.

M. Loïc Hervé.  - C'est spécieux !

M. Pierre-Yves Collombat.  - C'est le sentiment que l'on a eu... Va-t-on voir se multiplier les propositions de loi dérogatoires avant 2020 ? Puis les propositions de loi de pérennisation des dispositifs transitoires ? Le tout, assorti de dispense du versement d'indemnités claires, etc. Cette proposition de loi en est l'achèvement.

On peut comprendre ces mesures défensives contre les idées perverses d'idéologues du bureau.

Mais on ne saurait oublier l'objectif visé : la suppression du plus grand nombre de communes possible. Je revois encore comme si j'y étais l'air réjoui de Jean-Michel Baylet, en séance, devant les schémas issus de la loi NOTRe, nous annonçant que nous étions passés sous la barre des 36 000 communes, à 35 498 !

Ainsi va la modernisation de notre pays... Souffrez que nous ne partagions pas cet enthousiasme. Peut-être un jour les archéologues découvriront-ils, recouverts sous le sable, les ruines des communes disparues, comme celles de Pompéi... (Exclamations sur les bancs du groupe UC)

M. Loïc Hervé.  - Si ce n'est pas de l'exagération, ça !

M. Éric Kerrouche .  - Évoquons collectivement ce qui se passe actuellement à Strasbourg. Il y a déjà deux morts et deux personnes blessées en urgence absolue. Nous pourrions leur rendre hommage.

M. le président.  - Je vous propose d'observer une minute de silence pour ce qui pourrait être un attentat. (Les sénateurs et le ministre se lèvent et observent une minute de silence.)

Je vous remercie.

M. Éric Kerrouche.  - Nous sommes très loin du #BalanceTonMaire quand les maires ouvrent leur mairies pour recevoir les doléances, démontrant la vitalité de notre démocratie. Les élus locaux comptent de nouveau dans la République ; j'espère que le pacte girondin, annoncé mais guère dévoilé, verra le jour. La commune demeure l'échelon démocratique de proximité, elle incarne la permanence du pacte républicain et le respect de la devise au frontispice des mairies.

Il faut soutenir la dynamique des communes nouvelles, mouvement de rationalisation sans précédent.

Les lois de 2010 et 2015 ont changé la donne. Environ 2 millions de personnes sont concernées et il existe environ 200 projets.

La commune nouvelle a pris corps car on a laissé s'exprimer les territoires, sans leur imposer de regroupement.

Cependant, il faut aller vers le droit commun, ne pas créer de communes hybrides. M. Darnaud le rappelait la semaine dernière : il n'y a qu'un modèle, la commune.

Une commune nouvelle est donc, avant tout, une commune, complémentaire de l'intercommunalité. L'article premier et l'article 4 proposent des solutions qui ne sont pas assez adaptées à la transition vers le droit commun. La rédaction a été complètement réécrite mais la chute sera tout aussi brutale au renouvellement à venir.

L'article 4 exonère l'obligation de se rattacher à un EPCI. Une issue serait d'élire le président d'EPCI au suffrage universel - était-ce le but recherché ? Ou bien il faudrait une dérogation permanente, mais seules 3,1 % des communes nouvelles comportent plus de dix communes et seules 6 % regroupent plus de 5 000 habitants.

La question est donc posée : faut-il de nouvelles dérogations permanentes ? Je crois préférable d'avoir des solutions ad hoc.

Le doyen Jean Carbonnier parlait de droit flexible. Flexible, oui, mais pas au risque de le déchirer. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Jacques Mézard .  - (M. Emmanuel Capus applaudit.) Le groupe RDSE a pour principe le respect de la liberté exprimé par les élus locaux. Ce ne fut pas le cas avec la loi NOTRe de funeste mémoire, ni lors de la fusion imposée des intercommunalités. On nous a dit alors : il faudrait 1 000 intercommunalités et pas plus, de 20 000 habitants chacune - selon une réflexion parfaitement bureaucratique. Heureusement, nous avons échappé à la fusion autoritaire des communes, échelon de proximité auxquels nos concitoyens sont attachés.

L'intercommunalité, certes, peut représenter un progrès, quand elle est volontaire : ce sont les élus municipaux qu'il faut écouter, parce qu'ils sont le mieux à même d'identifier leurs besoins, de définir leurs projets. Et dans la période que nous connaissons, nous avons particulièrement besoin de l'échelon de proximité.

Lorsqu'on est loin du territoire, on peut commettre des erreurs, même si j'ai bien compris que tout allait mieux pour la cohésion des territoires depuis le 16 octobre... (Sourires)

Le but doit être de simplifier les procédures de regroupement pour les démarches volontaires. Il n'y a rien de pire que des fusions imposées. Tout peut poser des problèmes ; par exemple, le nom de la nouvelle commune, s'il est mal choisi, ce sont des difficultés au quotidien pour les habitants.

Cette proposition de loi n'apporte pas de contraintes nouvelles mais simplifie. Monsieur le ministre, mieux vaudrait une vraie réforme de simplification plutôt que de nouveaux textes tous les ans. Je sais bien que la DGCL veut imposer plutôt qu'écouter, mais ce n'est pas une bonne chose.

Je signale aussi un cas qui va se multiplier : lorsque deux communes de moins de 3 500 habitants chacune, issues de deux cantons différents, fusionnent, elles doivent choisir leur canton.

M. Jean-Marc Boyer.  - Même chose pour les départements !

M. Jacques Mézard.  - Or, la circulaire du 16 mars 2018 ne va pas résoudre les problèmes, en disposant... que le ministre de l'intérieur tranchera au cas par cas ! La loi ne peut se contenter de cas par cas. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

Mme Catherine Deroche .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Merci à Françoise Gatel, qui a travaillé étroitement avec les associations d'élus pour cette proposition de loi. Saluons Philippe Chalopin, maire de la première commune nouvelle, créée dans le Maine-et-Loire. En 2012, ce département comptait 363 communes ; au 1er janvier 2018, 184 et au 1er janvier prochain, 4 communes nouvelles verront le jour, portant le nombre de communes à 178. Cette évolution est le fruit d'une coopération ancienne entre les communes.

La commune nouvelle n'est pas toujours un long fleuve tranquille et je ne stigmatise pas les communes historiques. Les EPCI du Maine-et-Loire dépassent largement les seuils prévus dans la loi. Stéphane Piednoir et moi-même avons organisé nombre de réunions. Des difficultés subsistent, quoique non législatives - par exemple l'adressage.

Les élus posent la question du nombre de conseillers en 2020. Nous en proposerons un calcul différent. Ils veulent de la souplesse et de la proximité. Le PLU devrait rester à la commune lorsqu'il a été établi sur la base d'une ancienne intercommunalité.

Le message récent du président de la République et sa volonté affichée d'écouter les élus nous font espérer. Le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Mathieu Darnaud .  - Je pourrais aisément plaider coupable de porter la voix de mon groupe, moi qui suis élu d'un département, l'Ardèche, qui ne comporte aucune commune nouvelle. (Rires et quelques applaudissements)

Mme Françoise Gatel.  - Faute avouée, à moitié pardonnée !

M. Mathieu Darnaud.  - Et pourtant. L'intérêt de ce texte est de reconnaître que l'initiative doit rester aux élus locaux.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Encore heureux !

M. Mathieu Darnaud.  - On entend dire, et il semble qu'on esquisse des propositions dans ce sens, qu'une commune devrait compter un certain nombre d'habitants minimum. Nous ne voulons pas de ce modèle-là. Laissons la liberté aux élus - ce que fait cette proposition de loi, en reprenant la philosophie de Jacques Pélissard.

Je remercie le président Bas et le président du Sénat d'avoir mis en place la mission de contrôle et de suivi des lois de réforme territoriale.

Le fait générateur d'une commune nouvelle doit être l'affectio societatis, ce qui fait sens, le projet de territoire, et non l'incitation financière.

Les dérogations que ce texte introduit doivent se limiter clairement dans le temps. La commune doit rester la commune, sans modèle hybride. Nous souhaitons que ce texte se borne à 2026 avant un retour au droit commun.

Le législateur a la volonté de préserver le rôle essentiel de la commune dans l'architecture institutionnelle française, échelon de proximité, lien essentiel entre les Français et les élus.

Cette proposition de loi met de l'huile dans les rouages et fait en sorte que les communes nouvelles deviennent de nouvelles communes. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; Mme Françoise Gatel applaudit également.)

M. Didier Marie .  - Depuis son instauration par la Constituante le 14 décembre1789, la commune est le socle, l'échelon de base, le lieu où l'on vit, où l'on puise son identité, où l'on développe ses relations sociales.

Le France regroupe 40 % des communes en Europe, elles comptent pour les trois quarts moins de 1 000 habitants. Certains disent que c'est un handicap ; j'y vois plutôt une chance, incarnée par ces 500 000 élus locaux, souvent bénévoles. Depuis quelques dizaines d'années, les communes ont connu des évolutions majeures - démographiques, sociologiques, mais aussi d'ordre administratif, avec la raréfaction des moyens et la complexité croissante des normes. La petite taille de certaines communes a pu devenir un frein à l'action et leurs élus ont souhaité se rapprocher, augmentant du même coup leur périmètre d'action.

La loi de 2015 a levé de nombreux freins, elle a assoupli les liens avec les EPCI et permis des pactes financiers.

Aujourd'hui les communes nouvelles donnent aux élus de nouvelles capacités d'action. Des communes plus importantes gérées par des élus enthousiastes peuvent redynamiser l'intercommunalité. Elles redonnent sens à des communes fortes dans des intercommunalités fortes ; nous nous en réjouissons.

Cependant, les communes nouvelles doivent rester des communes à part entière, et relever du droit commun.

À l'heure où nos concitoyens demandent une action publique efficace, la création de communes nouvelles ne doit pas être un frein à la coopération intercommunale.

La proposition de loi initiale multipliait les dérogations ; aussi saluons-nous les réécritures en commission. Nous nous opposerons à l'amendement de M. Hervé.

Nous sommes favorables aux trois articles additionnels, notamment l'article 6 qui limite les effets de seuil. Il ne faut pas que les élus aient devant eux une montagne, mais qu'ils puissent gravir la pente petit à petit. Une commune nouvelle est avant tout une commune.

Nous sommes plus que favorables aux communes nouvelles, c'est pourquoi nous choisirons une abstention bienveillante sur ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

Mme Françoise Gatel.  - C'est déjà cela...

M. Jean-Pierre Sueur.  - C'est mieux qu'une abstention malveillante.

M. François Calvet .  - (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains) Nous débattons aujourd'hui d'un texte adaptant les communes nouvelles à la diversité des territoires. Je suis le porte-parole d'un territoire de la région d'Occitanie, laquelle compte pour moins de 10 % des fusions de communes. Mon département des Pyrénées-Orientales est la preuve que les incitations financières ne suffisent pas. Il y a la géographie, bien sûr, faisant se rencontrer Méditerranée et Pyrénées ; mais il y a aussi la culture : les habitants souhaitent l'intégration pour des raisons économiques, tout en voulant voir leurs particularismes culturels être respectés. Notre situation est donc différente de l'Ille-et-Vilaine, où de nombreuses communes ont voulu fusionner pour bénéficier des aides - pour se heurter ensuite aux difficultés du vivre ensemble, du délibérer ensemble, du bâtir ensemble. Suppression non compensée de la taxe d'habitation, poids des normes, baisse de la DETR... Les contraintes sont, il est vrai, nombreuses.

Le texte est indispensable, car il fluidifie les relations entre élus. Il donnera une nouvelle impulsion et une nouvelle dynamique aux communes nouvelles. Il incitera à la création de communes nouvelles et rééquilibrera les relations avec la commune centre. Il donnera ainsi aux élus la possibilité de reprendre leur destin en main. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Je veux remercier le ministre de l'engagement qu'il a pris de faire inscrire ce texte à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Toutes nos propositions, hélas, n'ont pas eu cette chance - par exemple le texte relatif à l'eau et à l'assainissement... (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°12 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Deroche, MM. Morisset, Rapin, Brisson et Chaize, Mme Gruny, M. Meurant, Mmes Duranton et Berthet, MM. de Legge, Paccaud, Vogel, Lefèvre, Milon, D. Laurent, Dallier et Revet, Mmes Deromedi, Noël, Bories et Lamure, M. Pierre et Mme Chauvin.

Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

I.  -  Le premier alinéa de l'article L. 2113-8 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cet effectif est augmenté d'un nombre égal à celui des communes déléguées lorsque celles-ci existent, et d'une unité supplémentaire si l'effectif en résultant est pair. »

M. Stéphane Piednoir.  - Le Maine-et-Loire est avant-gardiste à bien des égards : le nombre de communes y est passé de 363 à 182 - puis à 178 bientôt, des communes nouvelles ont vu le jour, et leurs compétences ont épousé celles des EPCI avec parfois 20 000 habitants.

Cet amendement répond à la demande des élus du Maine-et-Loire qui souhaitent une meilleure représentativité dans les communes nouvelles - nous proposons un mode de calcul différent.

La commune de Segré-en-Anjou Bleu aurait, selon le calcul de la proposition de loi 45 conseillers municipaux, 48 selon mon amendement et 70 selon le calcul de la commission des lois - ce qui deviendrait excessif, ce n'est pas la demande des élus.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - La commission des lois préfère son mode de calcul, sachant que des difficultés pourraient surgir là où des accords locaux ont été conclus - et nous comptons sur la navette pour qu'une solution soit trouvée.

Cet amendement concerne la totalité des communes nouvelles. Certes, le Maine-et-Loire est précurseur, mais l'amendement ne répond pas aux objectifs de progressivité graduelle ni de simplification. Retrait ?

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Après avoir parlé de liberté, parlons souplesse et simplification : le mécanisme de la commission des lois est plus simple, et a fait l'objet d'une concertation avec les associations d'élus. Restons-en là. Avis défavorable à défaut d'un retrait.

M. Christian Manable.  - Co-auteur avec Françoise Gatel du rapport de 2016 - dont le titre « Communes nouvelles : les mérites d'une révolution silencieuse » était complété par « raisons et conditions d'une réussite » -, je veux dire mon attachement aux communes nouvelles, qui partent du terrain. On cite toujours l'échec de la loi Marcellin, mais entre 1795 et 1797, le Directoire avait aussi essuyé un échec avec les municipalités de canton.

Je suis élu de la Somme, médaille de bronze, avec ses 773 communes, dont 115 ont moins de 100 habitants. Elles tirent la langue, faute de moyens ! Les communes de 5 ou 20 habitants sont-elles pertinentes ? Je le dis aux maires de mon département : vous avez le choix entre mourir seul et vivre ensemble...

Mais quand on fédère de la misère, cela reste de la misère. L'essentiel est de mettre en place des services de proximité. (Mme Françoise Gatel applaudit.)

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je ne pensais pas que la discussion me donnerait raison si vite. Tout le monde n'a pas encore intégré que les représentants des communes nouvelles ne représentent pas les anciennes communes ! Nous l'avons constaté sur le terrain avec M. Darnaud, même s'il semble l'avoir oublié. Les élus pensent que, dans la commune nouvelle, ils continueront de représenter leur commune initiale : le réveil risque d'être brutal...

Quant à savoir si réunir deux communes de 100 habitants chacune les rend plus riches...

Une commune de 50 habitants ne peut rien faire, dit-on. Mais si elle n'existe plus, qui fera son travail ? L'État ?

M. Hervé Maurey.  - Françoise Gatel, avec son excellente proposition, montre l'importance des élus de terrain. Je salue aussi le travail de la commission des lois et l'engagement du ministre. J'ai pour ma part cinq ou six textes en mémoire qui attendent d'être inscrits à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale...

J'aurais pu être tenté de voter l'amendement, ayant aussi dans mon département une commune nouvelle où des problèmes de représentativité pourront se poser, mais je suivrai l'avis de la rapporteure, souhaitant que les choses soient améliorées dans la navette.

M. Jean-Michel Houllegatte.  - Je suis comme Philippe Bas, élu de la Manche, département pionnier dans la création de communes nouvelles.

Jacques Pélissard a été déterminant dans la mission des communes nouvelles en autorisant les communes déléguées.

Il est utile de conserver tout ce qu'il n'est pas nécessaire de détruire, disait aussi Portalis. Il subsiste dans les communes nouvelles des identités, des compétences, des élus de proximité... Pourquoi ne pas créer, comme il existe des conseils de quartier, des subdivisions du conseil municipal, par communes déléguées ? C'est une proposition que je fais.

Cherbourg-en-Cotentin a constitué une commune nouvelle qui n'aura que 55 élus ; or nous aurions dû en envoyer 59. Je ne suis pas jaloux que La Hague en ait 78, mais il faudra résoudre ce cas particulier.

M. Éric Kerrouche.  - Tout le monde dit que la commune nouvelle est une commune comme les autres, mais en même temps, qu'il faut des règles spécifiques de représentation différenciée : pourquoi, et jusqu'à quand ? Et pourquoi ne prévoir cette dérogation que pour les communes nouvelles - et pas, par exemple, pour les communes fusionnées ? À la fin, il y a toujours un lien entre la taille du conseil municipal et celle de la commune - sauf ici.

Je ne suis pas sûr que les solutions trouvées soient satisfaisantes.

M. Emmanuel Capus.  - Nous ne sommes pas là pour traiter les cas particuliers. Ce n'est pas un hasard si les quatre sénateurs du Maine-et-Loire sont ici ce soir. Leur expérience compte : ils ont eu conscience, en créant des communes nouvelles, que le nombre de conseillers diminuerait, et ils ont vu qu'une assemblée pléthorique n'est guère souhaitable. Il faut donc s'adapter, de façon transitoire. Je voterai sans réserve cet amendement.

Mme Françoise Gatel.  - Cette proposition de loi ne vise pas à essayer de se dérober à un projet de commune. La commune nouvelle est avant tout une aventure humaine pour un projet d'avenir, un peu comme la recomposition d'une famille, à partir de deux ou trois familles : il faut du temps pour forger une culture commune. De la part de la chambre des territoires, il est curieux de vouloir y aller à marche forcée ! La commune nouvelle est par nature protéiforme puisque issue de la volonté des élus locaux et de la diversité des territoires.

On prend ici en compte des adaptations qui ne seront pas éternelles. Il faut que ce qui est souhaitable soit faisable. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)

M. Stéphane Piednoir.  - Oscar Wilde disait que la meilleure façon de résister à une tentation est d'y céder. Monsieur Maurey, votez cet amendement !

Pierre-Yves Collombat voudrait que pas une oreille ne dépasse. Le jardin à la française n'est pas la solution !

L'amendement n°12 rectifié n'est pas adopté.

L'article premier est adopté.

ARTICLE 2 (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°15 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Deroche, MM. Morisset, Mouiller, Rapin, Brisson et Chaize, Mme Gruny, M. Meurant, Mmes Duranton et Berthet, MM. de Legge, Paccaud, Vogel, Lefèvre, Milon, D. Laurent, Dallier et Revet et Mmes Deromedi, Noël et Chauvin.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l'article L. 2113-8-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2113-8-... ainsi rédigé :

« Art. L. 2113-8-...- Dans les communes nouvelles regroupant toutes les communes membres d'un ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, le conseil municipal peut décider d'instituer, entre la création de la commune nouvelle et le premier renouvellement du conseil municipal, une commission permanente à laquelle il peut confier une partie de ses attributions à l'exception :

« 1° Du vote du budget, de l'institution et de la fixation des taux ou tarifs des taxes ou redevances ;

« 2° De l'approbation du compte administratif ;

« 3° Des dispositions à caractère budgétaire à la suite d'une mise en demeure intervenue en application de l'article L. 1612-15 ;

« 4° Des décisions relatives aux modifications des conditions initiales de fonctionnement de la commune nouvelle ;

« 5° De l'adhésion de la commune nouvelle à un établissement public ;

« 6° De la délégation de la gestion d'un service public.

« Le conseil municipal en fixe la composition dans la limite de 30 % de l'effectif du conseil municipal, arrondi à l'entier supérieur, et désigne les conseillers municipaux membres au scrutin proportionnel. Le maire de la commune nouvelle la préside de droit. Les membres de la commission permanente sont nommés pour la même durée que le maire. »

M. Stéphane Piednoir.  - Cet amendement rétablit le dispositif qui prévoyait la possibilité de créer une commission permanente dans les plus grandes communes nouvelles issues d'une intercommunalité, à l'instar du bureau dans les EPCI à fiscalité propre.

M. le président.  - Amendement n°17 rectifié, présenté par M. L Hervé et les membres du groupe Union Centriste.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l'article L. 2113-8-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2113-8-... ainsi rédigé :

« Art. L. 2113-8-...  -  Jusqu'au prochain renouvellement suivant la création de la commune nouvelle, le conseil municipal peut déléguer au collège formé par le maire et les adjoints tout ou partie des attributions mentionnées aux 1° à 28° de l'article L. 2122-22 qui n'ont pas été déléguées au maire en application du même article L. 2122-22.

« Les délégations consenties en application du premier alinéa du présent article sont révocables à tout moment.

« La délégation des attributions mentionnées au 3° de l'article L. 2122-22, consentie en application du premier alinéa du présent article, prend fin dès l'ouverture de la campagne électorale pour le renouvellement du conseil municipal. »

M. Loïc Hervé.  - Cet amendement donne une nouvelle rédaction à l'article 2 supprimé par la commission des lois. Il ne prévoit plus la création d'une commission permanente mais que le conseil municipal peut déléguer au collège formé par le maire et les adjoints tout ou partie des attributions qui n'ont pas été déléguées au maire. Il s'agit donc d'une proposition plus souple qui répond aux réalités du terrain.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Retrait ou avis défavorable à l'amendement n°15 rectifié. La commission permanente est rigide et crée de nombreuses difficultés. Elle éloigne aussi les élus municipaux des décisions prises.

La commission des lois préfère l'amendement n°17 rectifié qui permet de mettre en place une instance collégiale à laquelle le conseil municipal pourra déléguer les compétences habituellement déléguées au maire. Avis favorable.

Mme Françoise Gatel.  - Parfait.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Monsieur Piednoir, je suis plus que prudent sur les commissions permanentes. Cela exigerait la représentation de l'opposition et donc une élection à la proportionnelle, comme au conseil départemental ou régional, comme l'a rappelé un arrêt du Conseil d'État.

Demande de retrait de l'amendement n°15 rectifié à la faveur de l'amendement n°17 rectifié qui introduit une vigilance : on ne peut déléguer que ce qui est délégable. En outre, la commune nouvelle peut créer cette commission, mais n'y est nullement obligée. Cela introduit de la souplesse, de la lisibilité et de la simplification.

M. Stéphane Piednoir.  - Compte tenu des arguments, je me range à l'amendement n°17 rectifié.

L'amendement n°15 rectifié est retiré.

M. Didier Marie.  - Nous étions contre l'amendement n°15 rectifié et avions salué en commission la sagesse de la rapporteure sur l'article 2. La commission permanente nécessite une représentation proportionnelle impossible dans des communes rurales.

Nous sommes tout aussi défavorables à l'amendement n°17 rectifié. Dans une commune nouvelle, c'est le conseil municipal qui règle les affaires de la commune. Il est indispensable que tous les conseillers municipaux soient associés et informés des projets.

Dans bon nombre de communes, nouvelles ou non, il existe le bureau municipal qui aborde des sujets ensuite soumis au conseil municipal.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Un exemple fonctionne bien : les bureaux communautaires dans les EPCI.

M. Pierre-Yves Collombat.  - C'est un EPCI, précisément !

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Je le sais bien ; je dis juste que ça existe dans la pratique. Vous êtes beaucoup plus raides que le Gouvernement qui cherche à mettre de l'huile dans les rouages.

M. Éric Kerrouche.  - Se faire accuser de raideur par le Gouvernement sur les collectivités territoriales, c'est drôle.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Je n'ai voté ni la loi NOTRe, ni la baisse de la DGF !

M. Éric Kerrouche.  - Vous vous rachetez une conduite ce soir.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Je n'ai pas soutenu François Hollande !

M. Éric Kerrouche.  - Dans les EPCI, le bureau est la plupart du temps remplacé par la conférence des maires qui fonctionne mieux.

Si l'on va vers plus de proximité et qu'on veut porter le projet de territoire, il ne faut pas d'instance intermédiaire. La souplesse serait une meilleure solution.

Mme Sonia de la Provôté.  - Cette proposition est facilitatrice. Les décisions prises par délégation sont présentées ensuite auprès de tous les élus. On a tous vécu l'embolie de l'ordre du jour par des chapelets de délibérations. Il vaut mieux se consacrer aux délibérations majeures. La parole doit être la plus utile possible ; le temps des élus est précieux.

Mme Françoise Gatel.  - Je soutiens le propos très juste de M. le ministre. J'ai bien compris que le groupe socialiste en resterait à une abstention bienveillante, mais celle-ci ressemble à la tentation de corseter les choses. Je rappelle qu'il s'agit d'une instance facultative, plus conviviale, composée d'élus, maires et adjoints.

M. Emmanuel Capus.  - Il faut être pragmatique et non dogmatique. Certains conseils municipaux comptent jusqu'à 180 membres - ils ne peuvent plus se réunir que dans les salles des fêtes. Cela ne peut pas fonctionner. Il ne faut pas démotiver les élus. À 180, vous enchaînez les délibérations en effet, et une fois sur deux, vous avez un problème de quorum. Un collège facultatif, pour prendre certaines décisions, c'est du bon sens. Quand il y a trop de réunions, on exaspère les élus qui ne veulent plus siéger.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Le fond du débat, c'est qu'on a été obligés de faire des intercommunalités trop grandes. On a ensuite raréfié les ressources pour inciter à faire de grandes intercommunalités. Maintenant, ça ne fonctionne plus. Et vous proposez aujourd'hui de créer une instance intermédiaire. Ne serait-il pas plus simple de revenir sur la loi NOTRe ?

Mme Françoise Gatel.  - Pas ce soir !

M. Emmanuel Capus.  - La réponse est non !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Il y a peut-être d'autres solutions que l'adaptation. Pourquoi s'acharner à faire fonctionner quelque chose qui ne peut fonctionner ?

L'amendement n°17 rectifié est adopté et l'article 2 est ainsi rédigé.

ARTICLE ADDITIONNEL

M. le président.  - Amendement n°13 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Deroche, MM. Morisset, Rapin, Panunzi, Brisson et Chaize, Mme Gruny, M. Meurant, Mmes Duranton et Berthet, MM. de Legge, Paccaud, Vogel, Lefèvre, Milon et D. Laurent, Mme Chauvin, MM. Dufaut et Pierre, Mmes Bories, Noël et Deromedi et MM. Revet et Dallier.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le sixième alinéa du I de l'article L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au 1° du présent I, une commune nouvelle constituée sur le périmètre d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut s'opposer au transfert de la compétence en matière de plan local d'urbanisme, de documents d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, au nouvel établissement public de coopération intercommunale qu'elle a intégré. »

M. Stéphane Piednoir.  - Il s'agit de traiter le cas d'une commune nouvelle qui se crée sur le périmètre d'un EPCI à fiscalité propre. Dans les cas où cet EPCI avait élaboré un plan local d'urbanisme intercommunal, ce dernier devient alors le PLU de la commune nouvelle.

Comme cette commune nouvelle doit intégrer un nouvel EPCI, elle doit pouvoir avoir la faculté de conserver son PLU.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Je suis désolée, mais demande de retrait. Cet amendement ne fonctionne pas puisqu'il n'y a pas d'effet rétroactif. En outre, il ne concerne que les communautés de communes et pas les communautés d'agglomération. Enfin, dès lors qu'une commune nouvelle adhère à un EPCI, son PLU reste valable le temps que le nouvel EPCI rédige son nouveau PLUi.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Retrait ou avis défavorable pour les mêmes raisons.

M. Stéphane Piednoir.  - La constitution d'un PLU demande du temps et de l'argent. C'est dommage de saborder tout le travail réalisé.

L'amendement n°13 rectifié est retiré.

L'article 3 est adopté.

ARTICLE 4

M. Joël Bigot .  - Le Maine-et-Loire est un département pionnier de l'intercommunalité, par volontarisme et non par appétit financier.

La commune constitue l'élément de base de l'édifice républicain. Le sentiment d'abandon des gilets jaunes est à mettre en parallèle avec celui des communes rurales. Le démographe Hervé Le Bras l'a démontré : c'est la France rurale qui est sur les ronds-points.

La commune nouvelle est l'avenir car elle sauve des services publics comme des écoles.

L'article 4 introduit davantage de complexité alors que la loi de 2010 impose l'intercommunalité sur tout le territoire. Revenir sur cette couverture intégrale serait déconstruire une carte de l'intercommunalité encore jeune.

La commune-communauté n'a pas vocation à créer un échelon supplémentaire. Il faut l'accompagner dans le droit commun.

M. le président.  - Amendement n°20, présenté par Mme Canayer, au nom de la commission.

I. - Alinéa 3

Remplacer les mots :

et, le cas échéant, d'une ou plusieurs communes n'appartenant pas à un tel établissement, ainsi que son maire,

par les mots :

et son maire

II. - Alinéa 11

Supprimer les mots :

et, le cas échéant, d'une ou plusieurs communes n'appartenant pas à un tel établissement

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Amendement de clarification.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Avis favorable.

L'amendement n°20 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°21, présenté par Mme Canayer, au nom de la commission.

Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Au premier alinéa de l'article L. 2113-9-1, la référence : « L. 2113-9 » est remplacée par la référence : « L. 2113-9-1 A » ;

L'amendement de coordination n°21, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 4, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par M. Grand.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les cinquième et dernier alinéas de l'article L. 2113-2 du code général des collectivités territoriales sont supprimés.

M. Jean-Pierre Grand.  - La création d'une commune nouvelle doit être une démarche libre et volontaire des élus locaux. Dès lors, il est proposé qu'une commune nouvelle ne puisse plus être créée à l'initiative du représentant de l'État dans le département. En effet, dans ce cas, la création est subordonnée à l'accord des deux tiers au moins des conseils municipaux des communes concernées, représentant plus des deux tiers de la population totale de celles-ci. Ainsi, une commune pourrait être fusionnée de force.

La rapporteure a dit en commission que le pouvoir d'initiative du préfet pourrait être utile. J'en doute. Une commune nouvelle doit être uniquement le fruit d'une volonté partagée. Dans l'Hérault, il y a un cas où les deux conseils municipaux sont d'accord mais pas la population : le préfet pourra signer la fusion alors que les maires n'ont pas l'intention de se représenter.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Dans le cadre de la création d'une commune nouvelle, faute de délibération concordante des conseils municipaux, la population est consultée et il faut la majorité absolue des suffrages exprimés sachant que la participation doit être supérieure à 50 %. Il y a des garanties. Mais le préfet doit garder la capacité d'intervenir. Retrait ?

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Le cas de l'Hérault pose davantage la question de la démocratie représentative. La disparition du préfet, en l'espèce, ne changerait rien.

Il n'y a jamais eu de fusion forcée par les préfets, c'est une légende urbaine ou plutôt rurale.

Dans la Meuse, le préfet permet plutôt aux élus de se parler ! Retrait ?

M. Jean-Pierre Grand.  - L'un de mes amendements, rejeté, évoquait les services scolaires. Dans l'Hérault, un projet de fusion de communes qui était fêtée dans l'amitié a tourné court, suite à la menace du directeur académique de fermer des écoles ! Inutile de dire que la fête était finie et les conseillers municipaux sont revenus sur leur décision. Mais le préfet peut aussi se faire rouler dans la farine par les maires : voyez le cas que je viens de citer. Regardons les choses à deux fois.

L'amendement n°5 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par M. Grand.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 2113-2 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La délibération des conseils municipaux portant création d'une commune nouvelle est assortie en annexe d'un rapport financier présentant notamment les taux d'imposition, la structure et l'évolution des dépenses, de la dette et des effectifs de l'ensemble des communes concernées. Ce rapport est affiché à la mairie et mis en ligne sur le site internet de la commune, lorsqu'il existe. »

M. Jean-Pierre Grand.  - Afin d'éclairer au mieux l'ensemble des conseillers municipaux, il est proposé que les délibérations portant création soient accompagnées d'un rapport financier présentant notamment les taux d'imposition, la structure et l'évolution des dépenses, de la dette et des effectifs de l'ensemble des communes concernées.

Ce rapport serait également affiché en mairie et mis en ligne sur internet.

Avant d'acheter une entreprise, on regarde précisément ses comptes !

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Grand.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l'article L. 2113-3 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Au cours du mois précédant la consultation, un rapport financier présentant notamment les taux d'imposition, la structure et l'évolution des dépenses, de la dette et des effectifs de l'ensemble des communes concernées est affiché à la mairie et mis en ligne sur le site internet de la commune, lorsqu'il existe. »

M. Jean-Pierre Grand.  - C'est le même esprit.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Les documents sont déjà publics. Cela alourdirait considérablement les procédures. La commission a été défavorable. Néanmoins, une meilleure transparence n'est jamais mauvaise. Sagesse, à titre personnel.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - J'ai suffisamment déploré la même chose naguère en CDCI. Ensuite, les concours financiers de l'État ne diminuent pas : si les élus étaient mieux informés, nous n'en serions pas là. Je suis tenté de donner un avis favorable à vos amendements. Mais, sous l'influence intellectuelle du président de la commission des lois, je tique toutefois sur le mot « notamment ». Ne peut-on le supprimer, pour éviter toute fuite en avant en cas de contentieux ?

M. le président.  - Ils deviennent les amendements nos 4 rectifié et 3 rectifié.

L'amendement n°4 rectifié est adopté et devient un article additionnel.L'amendement n°3 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°10 rectifié sexies, présenté par MM. Paccaud et Babary, Mmes Berthet et Bories, MM. Charon, Courtial et Decool, Mme Deromedi, MM. Détraigne et Dufaut, Mme Duranton, M. B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam et Gruny, M. Guerriau, Mme Guidez, MM. Henno et Joyandet, Mme Lamure et MM. D. Laurent, Longeot, A. Marc, Marseille, Meurant, Morisset, Raison, Rapin, Schmitz, Sol, Vaspart et Vogel.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article L. 2113-3 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Avant la création d'une commune nouvelle, chaque conseil municipal consulte obligatoirement les personnes inscrites sur les listes électorales. Cette consultation peut se faire par le biais de réunions d'information ou d'un vote. »

II.  -  Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article.

M. Olivier Paccaud.  - On a beaucoup parlé du rapport Gatel-Manable, qui insiste sur l'information et l'adhésion de la population pour la réussite d'une commune nouvelle.

Il est des conseils municipaux qui délibèrent en dissimulant les choses à leur population ! Ainsi en fut-il, dans l'Oise, le 26 juillet, de Rochy-Condé et Warluis. C'est le préfet qui a rétabli la démocratie.

En une semaine, 900 signatures avaient été réunies, sur 1 600 habitants de la commune nouvelle.

Le préfet a refusé la fusion et l'a conditionné à la consultation de la population. Résultat : 90 % de non !

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par M. Grand.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après l'article L. 2113-3 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2113-3-... ainsi rédigé :

« Art. L. 2113-3-... - À la demande d'au moins trois cinquièmes des personnes inscrites sur sa liste électorale municipale, la commune organise une consultation sur l'opportunité de son rattachement à la commune nouvelle. Un décret en Conseil d'État fixe les modalités de saisine des électeurs en garantissant leur anonymat au niveau municipal et de cette consultation. Les dépenses sont à charge de la collectivité.

« Le rattachement de la commune à la commune nouvelle ne peut être décidée par arrêté du représentant de l'État dans le département où se situe la commune nouvelle que si la participation au scrutin est supérieure à la moitié des électeurs inscrits et que le projet recueille l'accord de la majorité absolue des suffrages exprimés correspondant à un nombre de voix au moins égal au quart des électeurs inscrits.

« Tout électeur participant à la consultation, la commune concernée ainsi que le représentant de l'État dans le département ont le droit de contester la régularité des opérations devant le tribunal administratif. Les recours ont un effet suspensif. »

II. - Il est institué un prélèvement sur les recettes de l'État destiné à soutenir les communes pour l'organisation de ces consultations.

Le montant de ce prélèvement est égal aux éventuelles charges directes qui résulteraient pour les communes de la mise en oeuvre du I.

III. - La perte de recettes résultant pour l'État du II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean-Pierre Grand.  - Dans le cadre de la procédure de création d'une commune nouvelle, les habitants ne sont pas consultés en cas de délibérations concordantes des conseils municipaux des communes concernées.

Sans remettre en cause la légitimité des conseils municipaux élus pour l'intégralité du mandat, la création d'une commune nouvelle est un acte majeur qui touche à l'identité même de la commune et qui n'a pas forcément été débattu lors des élections municipales.

Afin de garantir le processus démocratique, il est proposé que trois cinquièmes des électeurs puissent obtenir l'organisation d'une consultation citoyenne permettant de valider ou non le rattachement de leur commune à la commune nouvelle. Les modalités d'organisation de cette consultation et de saisine des électeurs sont renvoyées à un décret en Conseil d'État qui devra garantir l'anonymat des électeurs au niveau municipal.

Cette démarche est lourde de conséquence et sans retour en arrière possible.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Imposer des formules de réunions publiques ou de référendum alourdit les choses, alors qu'il y a déjà des garanties lors de la création d'une commune nouvelle. La consultation et l'information préalable vont dans le bon sens. Retrait ou avis défavorable aux deux amendements.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Même avis pour les mêmes raisons.

M. Didier Marie.  - Une obligation poserait des difficultés. La proposition de Jean-Pierre Grand est intéressante, non pour son caractère défensif, mais pour l'initiative citoyenne qu'elle rend possible. Nous voterons l'amendement n°1.

Mme Françoise Gatel.  - J'entends bien le souci des collègues, et il faut se protéger d'élus malfaisants qui conduisent les affaires de façon privée.

Mais à mon avis, le destin n'a été forcé par les élus que dans moins de dix cas de communes nouvelles sur les 560 créées.

Je ne sais pas comment le juge interprétera les choses, si des citoyens estiment, pour telle ou telle raison, que leur information n'a pas été suffisante... On prend un risque très fort : je suis l'avis de Mme le rapporteur et du ministre.

M. Olivier Paccaud.  - Je le maintiens, car j'aime trop la démocratie, et j'ai promis aux habitants de mon département de défendre cet amendement.

L'amendement n°10 rectifié sexies n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°1.

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par M. Grand.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Après le livre VI ter du code électoral, il est inséré un livre VI... ainsi rédigé :

« Livre VI quater

« Circonscriptions électorales

« Art. L. 558-...  -  Il ne peut être procédé à aucun redécoupage des circonscriptions électorales dans l'année précédant l'échéance normale de renouvellement des assemblées concernées.

« Le présent article est applicable à Mayotte. »

II.  -  L'article 7 de la loi n° 90-1103 du 11 décembre 1990 organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux est abrogé.

M. Jean-Pierre Grand.  - L'article 7 de la loi 11 décembre 1990 prévoit qu'il ne peut être procédé à aucun redécoupage des circonscriptions électorales dans l'année précédant l'échéance normale de renouvellement des assemblées concernées. Il n'est donc pas possible de créer une commune nouvelle dans l'année qui précède le renouvellement municipal, laissant ainsi au débat électoral le soin de trancher démocratiquement cette question.

Cette interdiction est aujourd'hui inscrite dans la loi de 1990 qui avait pour objectif d'organiser la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux. Afin d'améliorer la lisibilité du droit électoral, il est proposé de l'insérer dans le code électoral.

Le champ est certes plus large que celui de la proposition de loi. Les préfets peuvent encore créer des communes nouvelles au 1er janvier 2019. Il serait plus opportun que ce sujet soit tranché avant les prochaines municipales.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - L'intention est louable mais cela mériterait un débat plus large... Retrait ?

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Les dernières communes nouvelles seront créées au 1er janvier 2019 ; cela deviendra ensuite impossible d'ici les prochaines élections municipales de mars 2020.

En outre, par cet amendement, vous créeriez nuitamment un nouveau livre au sein du code électoral. Avis défavorable.

L'amendement n°2 est retiré.

ARTICLE 5

M. Jean-Pierre Grand .  - Les maires délégués peuvent être chargés des fonctions d'officier d'état civil et d'officier de police judiciaire, et peuvent être adjoints au maire de la commune nouvelle. J'ai proposé qu'ils soient autorisés à porter l'écharpe de maire à glands à franges d'or. Pour d'anciens maires, lorsqu'ils célèbrent un mariage, porter l'écharpe d'adjoint ne va pas. Faites un petit décret pour l'autoriser gentiment.

L'article 5 est adopté.

ARTICLE 6

M. le président.  - Amendement n°19, présenté par M. de Belenet et les membres du groupe La République En Marche.

Supprimer cet article.

M. Arnaud de Belenet.  - Certaines dispositions mériteraient d'être étudiées plus avant. Ainsi de l'établissement obligatoire d'un bilan des émissions de gaz à effet de serre dans les communes de plus de 50 000 habitants. Avec cet article, une commune nouvelle échapperait à cette obligation durant trois ans.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - C'est une demande récurrente des maires que d'anticiper les effets de seuil et de donner du temps au temps. Ce moratoire n'aurait toutefois aucun impact sur les obligations qui incombaient déjà aux communes, avant la fusion. Retrait ?

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - C'est un article nouveau : il n'a fait l'objet d'aucune étude d'impact ni d'aucune concertation. Certaines choses relèvent des irritants généraux. Sur les seuils, je préférerais un texte plus global. Jacques Mézard et Julien Denormandie l'ont proposé pour les dispositifs SRU dans la loi ELAN.

Pour que la commune nouvelle devienne une nouvelle commune répondant au droit commun, de telles adaptations sont peu opportunes.

La proposition de loi est de consensus et cet article n'est pas dans le même esprit. Avis favorable donc.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Cet article sur le seuil procède de la mission Darnaud et correspond à une revitalisation de l'échelon communal qui est une revendication forte des élus locaux. Il ne s'agit pas de déroger au droit commun mais de donner un peu de temps pour que la commune nouvelle devienne une véritable nouvelle commune.

Mme Françoise Gatel.  - J'entends ces propos, mais quand j'observe que Pierre-Yves Collombat vous approuve, j'y vois un signal faible d'alerte ...(Sourires)

Mme Françoise Gatel.  - Si je comprends l'irritation que peut susciter cet article, il faut rappeler que la mise en place d'une commune nouvelle prend du temps. Il faut au moins un an, pour commencer, pour mettre en place diverses procédures administratives. La commune nouvelle créée en année N n'inaugurera pas son aire d'accueil des gens du voyage ni ses logements sociaux dans un délai de trois ans ! Ce n'est pas une dérobade. C'est juste réaliste. On pourra trouver le temps pendant la navette d'affiner, de façon oecuménique, comme nous le faisons depuis le début.

M. Jacques Mézard.  - Être d'accord à la fois avec M. Collombat et avec M. le ministre, mérite bien une intervention...(Sourires)

M. Loïc Hervé.  - Les grands esprits se rencontrent !

M. Jacques Mézard.  - Même si très peu de cas sont concernés, ne créons pas d'effet d'aubaine. Il serait souhaitable de réfléchir d'ici à l'examen à l'Assemblée nationale à une formulation adéquate.

Nous avons tenu compte des évolutions et difficultés dans la loi ELAN.

Mme Sonia de la Provôté.  - Quand on se retrouve dans une commune nouvelle, il y a une discontinuité urbaine. Il faut avoir le temps de produire les logements sociaux à l'échelle de la nouvelle entité communale et de répondre à l'obligation qui existe en la matière.

L'amendement n°19 n'est pas adopté.

L'article 6 est adopté.

ARTICLE 7

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par MM. Maurey, Médevielle et Bonnecarrère, Mmes Billon, Morin-Desailly, Vullien et de la Provôté, MM. Delahaye, Moga et Delcros, Mme Duranton, M. Decool, Mme Garriaud-Maylam, MM. Grosdidier, Guerriau, Lefèvre, A. Marc et D. Laurent et Mme Noël.

Alinéa 4, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, après avis du maire délégué et, lorsqu'il existe, du conseil de la commune déléguée où seraient établis ces actes

M. Hervé Maurey.  - L'article 7 a été adopté, et j'en remercie la commission des lois, à partir d'un amendement que j'avais déposé, issu de la proposition de loi sur les communes nouvelles. Avec cet article, la présence des mairies dans toutes les communes déléguées, qui peut être coûteuse, ne serait pas obligatoire. Nous proposons que l'acte de suppression, lorsqu'il prévoit une mutualisation d'une annexe de la mairie entre plusieurs communes, soit soumis à l'avis du maire délégué et du conseil municipal délégué lorsqu'il existe.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Avis favorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Avis favorable. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UC)

L'amendement n°7 rectifié est adopté.

L'article 7, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°16 rectifié, présenté par MM. Mézard, Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty et Guérini, Mme Jouve, MM. Léonhardt, Requier, Menonville, Roux, Vall et Gold et Mmes Guillotin et Laborde.

Après l'article 7 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du cinquième alinéa du II de l'article L. 2113-5 du code général des collectivités territoriales, les mots : « des deux tiers » sont remplacés par le mot : « simple ».

M. Jacques Mézard.  - Cet amendement concerne le cas où une commune nouvelle est issue de la fusion de communes appartenant à plusieurs EPCI à fiscalité propre. Il s'agit d'autoriser le préfet à passer outre la volonté des communes fusionnées, sauf opposition de la commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI) à majorité simple et non des deux tiers.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Avis favorable. C'est une préconisation du rapport Darnaud. Il faudrait une réflexion globale sur les pouvoirs de la CDCI.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Avis très favorable. (Exclamations sur les bancs du groupe UC)

L'amendement n°16 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°11 rectifié bis, présenté par Mme Berthet, M. Allizard, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest et Grosdidier, Mme Gruny, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mme Morhet-Richaud et MM. Mouiller, Paccaud, Rapin, Vogel et Bouloux.

Après l'article 7 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d'un an suivant la publication de la présente loi, le conseil municipal d'une commune nouvelle créée entre le 17 décembre 2010 et le 8 novembre 2016, par la fusion de plusieurs communes dont l'une au moins était issue d'une fusion de communes en application de la section 3 du chapitre III du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, peut décider d'instituer des communes déléguées reprenant le nom et les limites territoriales de l'ancienne commune chef-lieu et des anciennes communes associées, en remplacement, le cas échéant, de la commune déléguée reprenant le nom et les limites territoriales de la commune qui avait été créée par leur fusion.

Par dérogation à l'article L. 2113-19 du code général des collectivités territoriales, l'institution de communes déléguées en application du premier alinéa est sans incidence sur le montant cumulé maximal des indemnités des adjoints de la commune nouvelle, des maires délégués et de leurs adjoints.

Mme Martine Berthet.  - Il est primordial que les petites communes isolées, comprenant peu d'habitants, puissent profiter du régime de commune déléguée, afin de garantir une certaine proximité avec les concitoyens. Certaines communes-mères se situent à plusieurs kilomètres des villages et les habitants ne connaissent pas toujours les élus locaux oeuvrant désormais pour leur commune.

Avec cet amendement, le conseil municipal d'une commune nouvelle pourra instituer des communes déléguées reprenant le nom et les limites territoriales d'anciennes communes issues du régime de fusion-association de la loi de 1971, dite Marcellin.

Ce rétablissement devrait être décidé dans un délai d'un an suivant la publication de la loi, et il n'aurait pas pour effet d'augmenter l'enveloppe indemnitaire de la commune nouvelle.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Avis favorable. Cet amendement corrige un oubli de la loi de 2016.

Il instaure un délai raccourci d'un an que nous approuvons.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Avis favorable.

L'amendement n°11 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°8 rectifié, présenté par MM. Maurey et Médevielle, Mmes Vullien et Morin-Desailly, M. Bonnecarrère, Mmes de la Provôté et Billon, MM. Delcros et Decool, Mme Garriaud-Maylam, MM. Lefèvre, A. Marc et Delahaye, Mmes Noël et Duranton et MM. Grosdidier et Guerriau.

Après l'article 7 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 2113-10 du code général des collectivités territoriales est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Le conseil municipal de la commune nouvelle peut décider la suppression d'une partie ou de l'ensemble des communes déléguées, dans un délai qu'il détermine. Le projet de suppression d'une commune déléguée est subordonné à l'accord du maire délégué et, lorsqu'il existe, du conseil de la commune déléguée.  »

M. Hervé Maurey.  - Cet amendement met fin à une disposition trop stricte de la loi actuelle. Il donne la possibilité à une commune nouvelle de supprimer une partie seulement des communes déléguées, si leur maire délégué et leur conseil municipal donnent leur accord. C'est un assouplissement, conforme à l'esprit général de la proposition de loi.

Tout à l'heure, nous avons adopté l'amendement n°4. L'information financière, lors de la création de communes nouvelles, est très importante. Certains maires ne prennent pas la mesure du coût de la fusion. Certains regroupements sont faits à l'aveugle car la DGFiP ne répond pas aux demandes d'information des élus. Procéder ainsi, à l'aveugle, c'est bien pour l'oenologie, moins pour ce type d'opération : les services de l'État devraient mieux informer les élus.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Avis favorable à cet assouplissement.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Avis favorable également. Les services de l'État, oui, mais pas que. Lorsque la plus grande communauté d'agglomération du département de l'Eure, qui dispose d'une grande capacité d'ingénierie financière, avec des cadres A de la fonction publique territoriale, propose un mariage à une communauté de communes rurale, il n'est pas illogique que chacun s'assure de la situation financière du futur époux. Il revient donc au maire d'Évreux, en l'occurrence, président de la communauté d'agglomération, d'informer les services préfectoraux.

Le maire demande bien aux futurs époux s'ils ont conclu un contrat de mariage ! (Sourires)

M. Loïc Hervé.  - Ah ! On n'est jamais trop prudent ! (Même mouvement)

L'amendement n°8 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°9 rectifié sexies, présenté par M. Paccaud, Mmes Berthet et Bories, MM. Charon, Courtial et Decool, Mme Deromedi, MM. Détraigne et Dufaut, Mme Duranton, M. B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam et Gruny, M. Guerriau, Mme Guidez, MM. Henno et Joyandet, Mme Lamure et MM. D. Laurent, Longeot, A. Marc, Marseille, Meurant, Moga, Morisset, Panunzi, Raison, Rapin, Schmitz, Sol, Vaspart et Vogel.

Après l'article 7 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 2121-7 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, dans une commune nouvelle régie par les dispositions du chapitre III du titre Ier du présent livre, le conseil municipal peut décider qu'une ou plusieurs de ses réunions auront lieu dans une ou plusieurs annexes de la mairie. »

M. Olivier Paccaud.  - Loïc Hervé a raison : une commune nouvelle, c'est un seul conseil, une seule mairie, et des inquiétudes, notamment dans les anciennes communes qui avaient une identité propre. Pour réussir leur intégration, je propose de délocaliser certaines réunions du conseil municipal, de temps à autre, dans les anciennes mairies.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Avis favorable, c'est en effet une bonne idée pour renforcer le sentiment d'adhésion.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Délocalisons-le seulement deux fois par an. En outre, assurons-en largement la publicité. On évoque les délocalisations du Conseil des ministres, mais celui-ci, à la différence des conseils municipaux, n'est pas public. Une telle délocalisation ne doit pas être interprétée comme une manoeuvre pour que le public n'y assiste pas, ce qui pourrait donner lieu à contentieux. Sagesse.

L'amendement n°9 rectifié sexies est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°18 rectifié, présenté par MM. D. Laurent et Lalande.

Après l'article 7 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le territoire de la commune de Saint-Palais-du-Né (département de la Charente) est rattaché au département de la Charente-Maritime.

M. Daniel Laurent.  - Les communes de Saint-Palais-du-Né (Charente) et d'Archiac (Charente-Maritime) se sont prononcées pour la création d'une commune nouvelle. Elles ont émis le souhait d'être rattachées au département de la Charente-Maritime.

Cet amendement a donc pour objet de rattacher le territoire de la commune de Saint-Palais-du-Né, en Charente, au département de la Charente-Maritime. Je précise que Saint-Palais-du-Né représente 0,08 % du territoire de la Charente et 0,22 % de celui de la Charente-Maritime.

Selon l'article L. 2113-4 du CGCT, lorsqu'un conseil départemental s'oppose à cette modification, les limites territoriales des départements ne peuvent être modifiées que par la loi.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - Il paraît étonnant que ce soit à la loi de régler un tel cas particulier. L'article 72 de la Constitution dispose que les collectivités territoriales s'administrent librement.

Mais en l'espèce, la commune nouvelle relève d'un vrai projet, d'intérêt général. Le conseil départemental de la Charente s'y est opposé pour des raisons de principe, qui ne tiennent pas au mérite du projet en lui-même. Dans la logique de revitalisation de l'échelon communal et de libre administration des communes, avis favorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre.  - Je ne connais pas cette situation particulière. Apposer un tel cas particulier à cette proposition de loi n'est pas bienvenu. Soit il y a un accord local et c'est très bien, soit il n'y en a pas et pourquoi serait-ce à la loi de trancher ?

Que se passera-t-il ensuite à l'Assemblée nationale si vous adoptez cet amendement ? Il me paraît sage de m'en remettre complètement au Parlement.

Mme Françoise Gatel.  - Je suivrai néanmoins la rapporteure. La loi prévoit que c'est au législateur de se prononcer faute d'accord local. À défaut, ce serait au Conseil d'État de statuer. Ne nous dérobons pas et ne risquons pas que s'installe une jurisprudence élaborée en-dehors du Parlement.

Le Conseil départemental qui a refusé la fusion n'a nullement motivé son avis, qui est de principe. Je n'imagine pas un sénateur proposer un amendement qui serait rejeté localement. Je soutiens cet amendement.

M. Didier Marie.  - Je suis embêté car nous n'avons pas connaissance des arguments des uns et des autres. C'est délicat. Le groupe socialiste s'abstiendra.

M. Daniel Laurent.  - Ces deux communes sont déjà imbriquées l'une dans l'autre, les populations, les conseils municipaux, sont d'accord. Quant aux sénateurs de Charente, Michel Boutant et Nicole Bonnefoy, ils se sont abstenus au conseil départemental, ils n'ont donc pas voté contre...

M. Didier Marie.  - Ni pour !

M. Éric Kerrouche.  - Eh oui !

L'amendement n°18 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

M. le président. - Je vais mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Les communes nouvelles que l'on fabrique sont si nouvelles que ce ne sont plus des communes. (Sourires)

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Que sont-elles ?

M. Pierre-Yves Collombat.  - Des objets intermédiaires...

Mme Françoise Gatel.  - Merci au président Bas, à la rapporteure, pour sa volonté d'améliorer le texte, et au ministre qui nous aide à retrouver une relation constructive entre l'exécutif et le législatif.

Je ne doute pas que la proposition de loi soit inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, puis adoptée définitivement avant le mois de mars, soit un an avant les élections municipales.

M. Didier Marie.  - Le débat a été riche et plein d'enseignements mais tout ne va pas dans le bon sens - ainsi, l'article 2. Nous attendons la suite des événements et, comme nous l'avons annoncé dans la discussion générale, nous nous abstiendrons, pour l'heure.

La proposition de loi est adoptée.

(Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 12 décembre 2018, à 14 h 30.

La séance est levée à 1 heure.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus

Annexes

Ordre du jour du mercredi 12 décembre 2018

Séance publique

De 14 h 30 à 18 h 30

(Ordre du jour réservé au groupe SOCR)

Présidence : Mme Catherine Troendlé, vice-présidente

Secrétaires : M. Victorin Lurel - M. Michel Raison

1. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, instituant des funérailles républicaines (n° 170, 2016-2017).

2. Proposition de résolution en application de l'article 34-1 de la Constitution, en faveur de la création de paiements pour services environnementaux rendus par les agriculteurs (n° 86, 2018-2019).

De 18 h 30 à 20 heures

et de 21 h 30 à minuit

(Ordre du jour réservé au groupe Les Indépendants)

Présidence : M. Philippe Dallier, vice-président

3. Proposition de loi relative à l'obligation de déclaration d'un préavis de grève des contrôleurs aériens (n° 162, 2018-2019).

4. Débat sur le thème : « Emplois non pourvus en France : quelles réponses ? quelles actions ? ».

Analyse des scrutins publics

Scrutin n°36 sur l'amendement n°C-2, présenté par le Gouvernement, à l'article 82 du projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2019.

Résultat du scrutin :

Nombre de votants :347

Suffrages exprimés :328

Pour :328

Contre :0

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques :

Groupe Les Républicains (145)

Pour : 143

Abstention : 1 - M. Michel Savin

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe SOCR (74)

Pour : 74

Groupe UC (51)

Pour : 51

Groupe RDSE (22)

Pour : 22

Groupe LaREM (23)

Pour : 23

Groupe CRCE (16)

Abstentions : 16

Groupe Les Indépendants (12)

Pour : 12

Sénateurs non inscrits (5)

Pour : 3

Abstentions : 2 - Mme Claudine Kauffmann, M. Stéphane Ravier

Scrutin n°37 sur l'ensemble du projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2019.

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 344

Suffrages exprimés : 298

Pour : 200

Contre : 98

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (145)

Pour : 140

Abstentions : 4 - Mme Céline Boulay-Espéronnier, MM. Philippe Dominati, Alain Joyandet, Mme Fabienne Keller

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, président du Sénat

Groupe SOCR (74)

Contre : 74

Groupe UC (51)

Pour : 47

Contre : 1 - M. Jean-Marie Mizzon

Abstentions : 2 - M. Philippe Bonnecarrère, Mme Sylvie Goy-Chavent

N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Denise Saint-Pé

Groupe du RDSE (22)

Pour : 1 - M. Franck Menonville

Contre : 3 - MM. Ronan Dantec, Joël Labbé, Olivier Léonhardt

Abstentions : 18

Groupe LaREM (23)

Abstentions : 22

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Robert Navarro

Groupe CRCE (16)

Contre : 16

Groupe Les Indépendants (12)

Pour : 11

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Pierre Decool

Sénateurs non inscrits (5)

Pour : 1 - M. Philippe Adnot

Contre : 4

Scrutin n°38 sur l'ensemble de la proposition de résolution visant à préserver l'ordonnancement juridique relatif au port du voile intégral dans l'espace public, présentée en application de l'article 34-1 de la Constitution.

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 253

Suffrages exprimés : 236

Pour : 236

Contre : 0

Le Sénat a adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (145)

Pour : 144

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, président du Sénat

Groupe SOCR (74)

N'ont pas pris part au vote : 74 - Mme Hélène Conway-Mouret, présidente de séance, M. Maurice Antiste, Mme Viviane Artigalas, MM. David Assouline, Claude Bérit-Débat, Jacques Bigot, Joël Bigot, Mmes Maryvonne Blondin, Nicole Bonnefoy, MM. Yannick Botrel, Martial Bourquin, Michel Boutant, Henri Cabanel, Thierry Carcenac, Mme Catherine Conconne, MM. Roland Courteau, Michel Dagbert, Yves Daudigny, Marc Daunis, Gilbert-Luc Devinaz, Jérôme Durain, Alain Duran, Vincent Éblé, Mme Frédérique Espagnac, M. Rémi Féraud, Mme Corinne Féret, M. Jean-Luc Fichet, Mmes Martine Filleul, Samia Ghali, Marie-Pierre de la Gontrie, Nadine Grelet-Certenais, Annie Guillemot, Laurence Harribey, MM. Jean-Michel Houllegatte, Xavier Iacovelli, Olivier Jacquin, Mme Victoire Jasmin, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Bernard Jomier, Mme Gisèle Jourda, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Bernard Lalande, Jean-Yves Leconte, Mme Claudine Lepage, M. Jean-Jacques Lozach, Mme Monique Lubin, MM. Victorin Lurel, Philippe Madrelle, Jacques-Bernard Magner, Christian Manable, Didier Marie, Rachel Mazuir, Mmes Michelle Meunier, Marie-Pierre Monier, M. Franck Montaugé, Mmes Marie-Françoise Perol-Dumont, Angèle Préville, M. Claude Raynal, Mme Sylvie Robert, M. Gilbert Roger, Mme Laurence Rossignol, MM. Jean-Pierre Sueur, Simon Sutour, Mme Sophie Taillé-Polian, MM. Rachid Temal, Jean-Claude Tissot, Mme Nelly Tocqueville, MM. Jean-Marc Todeschini, Jean-Louis Tourenne, André Vallini, Mme Sabine Van Heghe, M. Yannick Vaugrenard

Groupe UC (51)

Pour : 51

Groupe du RDSE (22)

Pour : 20

Abstentions : 2 - MM. Ronan Dantec, Joël Labbé

Groupe LaREM (23)

Pour : 6 - MM. Michel Amiel, Bernard Cazeau, André Gattolin, Claude Haut, François Patriat, Alain Richard

Abstentions : 15

N'ont pas pris part au vote : 2 - MM. Antoine Karam, Martin Lévrier

Groupe CRCE (16)

N'ont pas pris part au vote : 16 - Mmes Cathy Apourceau-Poly, Éliane Assassi, Esther Benbassa, M. Éric Bocquet, Mmes Céline Brulin, Laurence Cohen, M. Pierre-Yves Collombat, Mme Cécile Cukierman, MM. Fabien Gay, Guillaume Gontard, Mme Michelle Gréaume, M. Pierre Laurent, Mme Marie-Noëlle Lienemann, M. Pierre Ouzoulias, Mme Christine Prunaud, M. Pascal Savoldelli

Groupe Les Indépendants (12)

Pour : 12

Sénateurs non inscrits (5)

Pour : 3

N'ont pas pris part au vote : 2 - Mme Claudine Kauffmann, M. Stéphane Ravier

Nomination d'un membre d'une commission

M. Gilbert-Luc Devinaz est membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.