Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site Internet du Sénat et sur Facebook.

J'appelle chacun de vous au respect des uns et des autres et du temps de parole.

Suppression des exonérations sur les services à la personne pour les seniors

M. Bernard Bonne .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Le Gouvernement semble poursuivre sans relâche l'objectif de baisse du pouvoir d'achat des retraités. Après la hausse de la CSG et la sous-indexation des retraites, la déduction fiscale accordée aux personnes de plus de 70 ans qui emploient des aides à domicile est dans le collimateur. Mais sans doute, allez-vous confirmer l'annulation de cette mesure ?

Le vieillissement de la population appelle des réponses multiples. Le maintien à domicile est une priorité absolue. Faire des personnes âgées des boucs émissaires est indigne. Celles-ci ne doivent pas être une variable d'ajustement budgétaire. D'ailleurs, M. Darmanin s'était prononcé le 6 février sur RMC contre la suppression des exonérations pour les emplois à domicile.

Ce va-et-vient est peu glorieux pour le Gouvernement. Ne touchez pas au pouvoir d'achat des retraités. Où en est le Gouvernement sur ces sujets ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail .  - Il y a eu beaucoup de questions ces dernières heures.

M. Jean Bizet.  - Cafouillage !

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Tous les employeurs à domicile - 600 000 personnes - bénéficient d'un crédit d'impôt. Il existe aussi l'exonération partielle des charges patronales. Celle-ci peut être complète pour les plus de 70 ans ou les personnes dépendantes. Il a été envisagé de supprimer cette dernière possibilité pour les plus de 70 ans. Compte tenu des incompréhensions, le Gouvernement a décidé de renoncer à cette mesure.

Nous travaillons à l'accompagnement du vieillissement. Ce sera l'objectif du projet de loi Grand Âge de Mme Buzyn. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Grève aux urgences

Mme Sophie Joissains .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) La grève des urgences dure depuis six mois. Madame Buzyn, en tant que médecin, vous savez combien l'engagement profond des soignants ressemble à de l'abnégation, que nous saluons bien bas.

Mais aujourd'hui, ils sont à bout : impossibilité de prendre leurs jours de repos, heures supplémentaires pas toujours payées, sous-effectifs, dépressions, burn-out, risques d'erreurs médicales accrus. L'accident aux urgences psychiatriques de Niort le 15 septembre en est une terrible illustration.

Le nombre de passages aux urgences a doublé en vingt ans. La situation est arrivée à un point critique. Il manque des lits, les effectifs sont insuffisants, la revalorisation salariale est inexistante. Le pacte de refondation des urgences que vous avez proposé il y a quinze jours comporte des mesures intéressantes mais cela ne suffit manifestement pas. La grève se poursuit.

Prévoyez-vous de nouvelles mesures ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Veuillez excuser Mme Buzyn, retenue à l'Assemblée nationale par le projet de loi Bioéthique.

Sur la base du travail du député Mesnier et du professeur Carli, nous avons proposé douze mesures dont un service universel d'accès immédiat aux soins. Il faut éviter aussi l'hospitalisation des personnes âgées dès que c'est possible. Une prime de 80 euros est prévue pour tous.

Un nouveau métier, celui d'infirmier en pratiques avancées, est créé avec une rémunération accrue à la clé. Une nouvelle gestion des lits plus efficace sera mise en place. Enfin, nous luttons contre l'intérim, qui pèse sur les budgets des hôpitaux. 750 millions sont prévus, qui s'ajoutent aux 70 millions engagés en juin. Or 80 % de l'enveloppe prévue est consacrée aux ressources humaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Sophie Joissains.  - Ces mesures paraissent ambitieuses, mais il faudra sans doute poursuivre.

Plan anti-drogues présenté à Marseille

M. Antoine Karam .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM) La semaine dernière, le Gouvernement a dévoilé à Marseille un nouveau plan d'actions contre les drogues.

Outre la création d'un office spécial, l'Ofast, vous avez annoncé la reconduction du plan d'action interministériel, lancé en mars dernier, pour renforcer la lutte contre le trafic de stupéfiants en provenance de Guyane. Pour rappel, celui-ci représenterait, selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies, près de 30 % du marché français, évalué entre 25 tonnes et 30 tonnes.

Dans le même temps en Guyane, les réseaux sociaux, puis la presse, ont révélé que le 5 août dernier, un colis contenant 8 kilos de cocaïne avait été retrouvé par hasard sur la coque du cargo MN Toucan, navire essentiellement consacré au transport d'éléments de la fusée Ariane entre Kourou et l'Hexagone. Le colis aimanté à la coque du cargo se serait détaché seul, attirant ainsi l'attention du personnel du Port de Pariacabo qui a donné l'alerte aux autorités.

Je ne suis pas de ceux qui s'émerveillent de l'ingéniosité des trafiquants. Je suis de ceux qui s'inquiètent qu'une telle information soit découverte plus d'un mois après les faits. Je suis de ceux qui s'ahurissent qu'un cargo puisse partir d'un port aussi surveillé que celui de Kourou, principalement utilisé pour les besoins du Centre spatial guyanais, avec à son bord du matériel spatial et de la cocaïne.

L'outre-mer ne doit pas être le terrain de jeu des dealers. Comment sécuriser les voies maritimes entre la Guyane et la Métropole ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe UC)

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur .  - La lutte contre le trafic de drogue en Guyane est une priorité. C'est pourquoi depuis 2017 nous avons créé une antenne de l'Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants à Cayenne, renforcé les effectifs, créé des officiers de liaison au Suriname et en Guyana.

En mars, nous avons lancé un plan pour lutter contre les trafics de mules, en renforçant les contrôles dans les aéroports et sur la frontière terrestre à Saint-Laurent du Maroni. Récemment, nous avons présenté un nouveau plan pour renforcer ces mesures et les contrôles.

Depuis 2016, le volume des saisies de drogue venant de Guyane a triplé, passant de 300 kg à 900 kg en 2018.

Le mode opératoire que vous avez décrit est inédit. Nous avons sensibilisé la gendarmerie maritime pour prévenir de nouvelles tentatives de ce genre. Mais comptez-sur nous pour lutter contre ces trafics ! (Applaudissement sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe RDSE)

Alerte sur les urgences

M. Jean-Yves Roux .  - L'été est terminé et le bulletin de santé des urgences est alarmant. Dans les Alpes de Haute-Provence, l'organe vital des urgences de Sisteron est touché de plein fouet. Il manque trois postes et demi. Idem à Digne-les-Bains, qui va perdre quatre postes. Mêmes maux, mêmes constats à Manosque. Vous connaissez la chanson !

Et c'est pareil aux quatre coins de la France. Les médicaments administrés, tels le recours massif aux pompiers ou aux SAMU, ne sont pas des solutions durables humainement, écologiquement et financièrement.

Des recrutements sont prévus mais ne suffisent pas car on manque de candidats. Comment rivaliser avec des structures privées qui s'arrêtent la nuit et sélectionnent les pathologies, où se pratiquent des salaires faramineux de 1 200 euros par jour en intérim qui flattent les comportements mercenaires ?

Les mesures structurelles annoncées prennent nécessairement du temps.

Pour autant, nous ne pouvons nous résigner à penser que tout a été tenté et que le malade est moribond. Nous sommes engagés pour notre territoire mais ne pouvons accepter que tout notre travail soit rayé d'un trait faute de médecins. À quand un Grenelle des urgences dans tous les départements ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et Les Indépendants)

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - J'entends votre question et j'en ferai part à Mme Buzyn qui n'est malheureusement pas là cet après-midi. La ministre s'est attaquée au problème des urgences dès son arrivée avec son plan « Ma santé 2022 ». Il s'agit de construire ensemble l'avenir de notre système, pour des solutions durables et innovantes, avec tous les professionnels de santé, les élus, les collectivités. Nous devons proposer une alternative au tout-urgences, qui ne peut plus être l'unique porte d'entrée de notre système de santé. Allons plus loin et plus vite ! Protégeons les soignants, reconnaissons leurs compétences !

Il n'y a aucune consigne nationale de fermeture des lits, au contraire. Quelque 750 millions d'euros, plus 70 millions d'euros annoncés avant l'été, seront consacrés aux urgences. C'est ainsi que nous accélérons et complétons le plan « Ma Santé 2022 ». (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Cotisations des plus de 70 ans

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Madame la ministre du Travail, vous avez annoncé que vous renonciez à supprimer dès l'an prochain un avantage accordé aux personnes de plus de 70 ans employant une aide à domicile. Ce n'est pas de l'amateurisme gouvernemental mais le signe d'une déconnexion des réalités du quotidien de nos concitoyens. Vous espériez piquer 300 millions d'euros dans les poches des retraités, après la hausse de la CSG et la désindexation des pensions. La colère vous a contraint à renoncer, tant mieux ! Le coup de trop pour votre majorité !

Quand renoncerez-vous à votre réforme scélérate des retraites par points qui en diminuera le montant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

M. le président.  - Nous sommes heureux de retrouver ici M. Delevoye. (Applaudissements des bancs du groupe LaREM jusqu'à ceux du groupe UC, ainsi que sur certains bancs à droite)

M. Jean-Paul Delevoye, Haut-commissaire aux Retraites, délégué auprès de la ministre des Solidarités et de la Santé .  - Je suis ravi de vous retrouver.

Le projet de société que nous proposons, sous votre autorité, monsieur le président, ainsi que celle de nombreux sénateurs, dont Jean-Marie Vanlerenberghe, a été anticipé par le Sénat. Nos concitoyens trouvent le système actuel injuste, complexe, illisible, difficilement pilotable et inadapté aux mobilités professionnelles nouvelles. La question fondamentale est celle-ci : quelle protection sociale pour le XXIe siècle ? Nous renforçons la cohésion intergénérationnelle en garantissant à chacun, quels que soient son parcours ou son statut, des principes universels clairs : à métier identique, retraite identique ; à cotisation égale, retraite égale. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; Mme Michèle Vullien applaudit aussi.)

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Monsieur le ministre, nous sommes du même département, mais nous ne portons pas le même projet de société. Vous refusez d'entendre la voix de tous ceux qui ont participé aux grandes manifestations de samedi et des milliers de manifestants auprès desquels nous étions tout à l'heure, avec nos collègues CRCE, qui remettent en cause votre régime de retraite par points.

Une société moderne doit accorder aux salariés le repos et une bonne santé. C'est ce que réussit notre système de retraites universel par répartition. Pour permettre un départ à 60 ans après 37 annuités et demie, mettons à contribution les 51 milliards d'euros de dividendes versés aux actionnaires au second semestre 2018 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

Immigration

M. Patrick Kanner .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Monsieur le Premier ministre, j'y vais franchement : à quoi joue le président de la République, en stigmatisant, il y a une semaine, le droit d'asile ? Selon quel préjugé les classes populaires seraient-elles obligatoirement hostiles à l'immigration ?

L'évocation d'une restriction de l'AME est d'une démagogie digne des bancs de la droite... (Murmures de protestation sur plusieurs bancs à droite, où l'on désigne les bancs de l'orateur.) L'encre de la loi Asile et immigration de septembre 2018 est à peine sèche pourtant... Pensez-vous, comme nous le dénoncions à l'époque, qu'elle était mal faite ?

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Patrick Kanner.  - Quel est ce jeu obscur dans lequel vous voulez nous entraîner, ce double langage qui dénonce les populismes au niveau international pour embrayer sur son discours sur le plan national ? Utiliser les mots de son adversaire, c'est prendre le risque de le faire gagner un jour. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - La semaine dernière, nous avons eu le plaisir, avec quelques membres du Gouvernement et les parlementaires de la majorité, d'écouter le président de la République énoncer les grands axes de politiques publiques auxquelles il croit et faire état de certaines de ses convictions. Vous n'étiez pas présent, c'est normal ! (Sourires à droite) J'y étais ! Loin des raccourcis que vous faites, j'ai entendu un discours d'une grande précision, d'une grande fermeté, d'une grande ouverture.

Le Parlement aura l'occasion de débattre, dès le début de la session ordinaire, de l'immigration, dans toutes ses dimensions : des flux jusqu'aux conditions d'intégration.

Le président de la République souhaite que la Représentation nationale puisse débattre librement de ce sujet, qui est loin d'être mineur ou tabou, qui se trouve même - le nier est un contresens - au coeur des préoccupations (Mme Éliane Assassi et M. David Assouline le contestent.), et ce, sans être liée, comme ce fut souvent le cas, par la discussion d'un texte ou de mesures.

Le président de la République a toujours réaffirmé son attachement au droit d'asile, droit sacré - oserais-je dire, si je n'étais au Sénat - qui est consubstantiel à ce que nous sommes, non pas seulement à la République mais à la France. Il sera préservé !

Mais regardons la vérité en face : les demandes d'asile augmentent en France alors qu'elles diminuent en Europe. Nombre de demandes émanent de ressortissants de pays sûrs - ce qui ne veut pas dire qu'il faudrait toutes les refuser, mais elles ne devraient pas être aussi massives.

On ne peut ignorer ces faits ! Plutôt que de nous abriter derrière des postures, et même si cela vous inquiète, discutons-en ! C'est exactement le point de vue du Gouvernement dans tous les domaines, afin d'obtenir des résultats à la hauteur des enjeux. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, RDSE et Les Indépendants)

M. Patrick Kanner.  - Ni angélisme, ni amalgame mais la solidarité internationale est un devoir pour la France, monsieur le Premier ministre ! Et la fraternité ne doit pas passer par pertes et profits ! Vous nous avez répondu essentiellement sur la méthode. Soyez assurés que nous dirons ce que nous pensons le 2 octobre. (Applaudissements sur les bancs des groupes CRCE et SOCR)

Inquiétude des agriculteurs

M. Daniel Chasseing .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants) Le secteur de l'élevage rencontre de grandes difficultés, avec des prix de vente des bovins et ovins au niveau d'il y a vingt ou trente ans. Après la sécheresse, l'agriculture devra diversifier ses productions, et mettre en place des retenues collinaires pour stocker l'eau de pluie. Or notre procédure de stockage de l'eau est beaucoup trop complexe par rapport à d'autres États européens. Quelles aides pour les éleveurs victimes de la sécheresse qui devront vendre leurs animaux à un cours effondré ?

Le CETA, en dépit d'effets bénéfiques dans certains secteurs, n'aura pas du tout d'effets positifs pour l'élevage bovin en particulier.

Comment appliquer l'article 44 de la loi EGalim dans ce cadre qui interdit la distribution de produits agricoles obtenus avec l'utilisation de produits animaux et vétérinaires interdits en France ? Les éleveurs ont besoin d'être rassurés.

Quelles compensations pour eux après le CETA ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants, ainsi que sur quelques bancs des groupes RDSE et UC)

M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Veuillez excuser le ministre de l'Agriculture retenu à Helsinki précisément pour un conseil européen des ministres de l'Agriculture consacré à la PAC.

La sécheresse a touché la quasi-totalité des pays. La priorité est au stockage de l'herbe pour nourrir les animaux et éviter la décapitalisation. Le ministre de l'Agriculture a immédiatement décidé l'activation des mesures dérogatoires prévues par la PAC pour les cas de force majeure dans 69 départements cet été.

Pour redonner de la trésorerie aux éleveurs, le ministre a demandé à la Commission européenne, une augmentation du taux d'avance des aides PAC et l'ensemble des mesures activées en cas de crise ont été mobilisées, complétant des mesures telles que l'exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties.

Nous devons rendre nos exploitations plus résilientes à la sécheresse. Il faut donc que les agriculteurs aient un accès facilité et sécurisé à l'eau. La France a un grand retard en la matière. Nous avons récemment débloqué la constitution de retenues collectives dans le cadre de projets de territoire.

Le CETA ne modifie aucunement les règles sanitaires applicables à l'entrée sur le marché européen ; l'interdiction, en particulier, de viande bovine issue d'animaux nourris avec de la farine animale de ruminants. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Zones de non-traitement

M. Daniel Laurent .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Comme le dit notre président Gérard Larcher, les maires sont à portée d'engueulade ; pour peu qu'ils soient agriculteurs, c'est la double peine. (Mme Laurence Cohen apprécie la formule.)

Un agriculteur se suicide tous les deux jours, ce n'est plus acceptable. Les agriculteurs n'ont pas attendu les zones de non-traitement (ZNT) pour élaborer et respecter des chartes professionnelles sur l'usage des produits phytosanitaires conformément à leur responsabilité environnementale, ni pour appliquer des règles de bon sens : ils ne traitent pas lorsque les enfants sont présents dans les écoles ou les familles déjeunent dans le jardin.

Mais la mise en place des ZNT pose problème : un produit nuisible à trois mètres le sera toujours autant à dix ou vingt ! Est-ce la distance ou la dangerosité du produit lui-même qui est en cause ? Que l'on propose enfin des produits de substitution, avec une innocuité avérée et une harmonisation européenne !

Des ZNT à plus de 100 mètres, ce serait une amputation de 20 % des surfaces agricoles et l'obligation de se fournir sur le marché mondial avec des garanties moindres. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire .  - Au nom du ministère de la Transition écologique, je veux redire tout mon soutien aux agriculteurs qui vivent des moments difficiles, victimes d'agri-bashing. Nous devons soutenir la profession agricole : c'est le message du ministère de la transition écologique, du ministère de l'agriculture et de l'ensemble du Gouvernement.

La question est celle de la transformation du modèle agricole : plan agro-phytosanitaire, baisse du volume de pesticides de 50 % d'ici 2022, sortie progressive du glyphosate, (Mme Sophie Primas s'exclame.) objectif de 15 % de la surface en bio. Nous sommes en bonne voie. (Mme Sophie Primas le conteste.) Nous menons ce travail avec tous les agriculteurs.

Notre texte sur les ZNT repose sur les travaux de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) qui préconisent une distance de 3 à 10 mètres, loin des 150 mètres, coups de communication de certains maires...

Mme Cécile Cukierman.  - La phrase est maladroite !

M. Martial Bourquin.  - Très maladroite !

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - Néanmoins, nous avons besoin de ces ZNT pour prendre une mesure générale. La consultation en cours nous permettra d'avancer sur ce sujet.

Compétences de la métropole d'Aix-Marseille-Provence

Mme Mireille Jouve .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE) La loi dite « Maptam » portant création de la métropole Aix-Marseille-Provence avait prévu que lui soient transférées des compétences de proximité, dont la voirie. Ce dernier transfert a été reporté par la loi sur Paris du 28 février 2017 au 1er janvier prochain.

La concertation lancée par le préfet à la demande du Premier ministre sur les mutations de l'actuel EPCI a montré le risque de voir la métropole « Aix-Marseille-Provence » se concentrer sur les projets structurants et non les compétences de proximité qui seraient mieux gérées par les communes, notamment la voirie. Un transfert au 1er janvier 2020 des compétences « création, aménagement et entretien de voirie » et « création, aménagement et entretien des espaces publics dédiés à tout mode de déplacement urbain ainsi qu'à leurs ouvrages accessoires » n'apparaît plus opportun.

Le Gouvernement est-il favorable à une annulation de ce transfert ou à un nouveau report ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales .  - Soyons pragmatiques : selon les acteurs locaux eux-mêmes, le transfert de cette compétence peut-il avoir lieu au 1er janvier prochain ? La réponse de l'ensemble des acteurs du territoire est non.

D'autres parlementaires, de toutes sensibilités, à l'instar du sénateur Amiel ce matin, ont saisi le Gouvernement. Oui, le projet de loi Engagement et proximité, que je vous présenterai dès début octobre, doit permettre, grâce à un amendement, de reporter à nouveau le transfert, afin qu'il puisse s'exercer dans de bonnes conditions. Cela facilitera aussi d'autres avancées sur les questions institutionnelles de cette métropole. (Quelques applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE ; Mme Maryse Joissains applaudit aussi.)

Faillite de Thomas Cook

Mme Évelyne Renaud-Garabedian .  - Thomas Cook, le plus vieux voyagiste au monde vient de déposer le bilan. Quelque 600 000 voyageurs dont 10 000 Français sont en souffrance. Mais surtout un très grand nombre de prestataires sont aujourd'hui en péril : hôteliers, restaurateurs, autocaristes, organisateurs de spectacles et de croisières, en métropole, aux Antilles et en Corse. Sont concernés quelque 2 000 locations touristiques, plusieurs centaines d'hôtels, près de 200 croisiéristes et 500 clubs de vacances et camping.

Or les PME du tourisme se trouvent déjà dans une situation tendue après la crise des gilets jaunes.

Quel sera l'avenir des 400 agences Thomas Cook en France, filiales ou franchises ? Plus largement, ne faut-il pas craindre l'effondrement du modèle des agences physiques au profit des géants du numérique comme Expedia ou Booking ? (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. le président.  - C'est la première intervention de M. Djebbari dans cet hémicycle. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, Les Indépendants, RDSE et UC)

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports .  - Thomas Cook a été placé en liquidation judiciaire hier. Les Français qui ne sont pas encore partis seront intégralement remboursés par Thomas Cook. Ceux qui sont déjà partis avec un avion pris indépendamment pourront poursuivre leur voyage.

Enfin Thomas Cook, qui a mis en place un numéro d'appel à leur intention, prend en charge le rapatriement de ceux qui se trouvent dans une situation plus complexe, étant à l'étranger et ayant été transportés par ses soins. Les Français sont bien protégés grâce au mécanisme de garantie français et au droit européen. Les services de Bercy sont en lien avec les prestataires. Ce sont 780 emplois français qui sont touchés. Le Gouvernement, en lien avec la direction de Thomas Cook, prendra les mesures de soutien adaptées.

Mme Évelyne Renaud-Garabedian.  - Nous serons très attentifs à l'évolution de la situation pour les PME.

Politique sociale

Mme Corinne Féret .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Après la hausse de la CSG, la non-indexation des pensions sur le coût de la vie, avant une réforme des retraites qui réduira les pensions, le Gouvernement souhaitait supprimer une exonération spécifique aux personnes âgées. Quelque 800 000 bénéficiaires étaient concernés. Le Gouvernement comptait s'attaquer de nouveau aux plus âgés en portant un nouveau coup à leur pouvoir d'achat. Le Gouvernement a dû y renoncer.

C'est l'improvisation la plus totale. Pourtant, d'autres scandales subsistent : non-indexation des APL, revalorisation des allocations familiales inférieure à l'inflation, réforme de l'assurance chômage désastreuse pour les plus précaires, réduction du nombre des trésoreries... Vous engagez-vous à revoir votre copie en privilégiant la justice sociale ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail .  - Sur le sujet de l'exonération en jeu, nous revenons à la situation actuelle qui permet de cumuler le crédit d'impôt et l'exonération des charges patronales. Pour quelqu'un qui engage une personne 20 heures par mois à 10 euros nets de l'heure, le coût complet du travail est de 367 euros, mais seulement 167 euros après exonérations ! Notre politique est donc celle d'un soutien très actif à l'emploi à domicile.

Aucun demandeur d'emploi ne verra son capital diminuer. C'est juste que l'indemnité ne sera jamais supérieure à ce qu'il gagne en travaillant mais elle sera plus longue. Je suis sûre qu'en regardant les faits, nous pourrons nous rapprocher.

Mme Corinne Féret.  - L'Unedic le dit : 40 % des personnes indemnisées verront leurs allocations-chômage diminuer. Nous, nous entendons la colère des Français qui monte. La concertation, ce n'est pas écouter en ayant déjà des solutions toutes faites. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

Lutte contre l'artificialisation des sols

Mme Sonia de la Provôté .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) La circulaire du Premier ministre dite « zéro artificialisation nette », parue cet été, incitant les préfets à la sévérité sur les documents d'urbanisme, jette l'opprobre sur les élus locaux, suspects d'une inconscience coupable.

En effet, il est demandé aux préfets d'user de tous les instruments à leur disposition, de l'avis défavorable jusqu'à la suspension du caractère exécutoire du document, pour mettre en échec des documents d'urbanisme, décidés par les élus, après concertation et dialogue avec l'État. C'est assez loin des fonctions réglementaires de celui-ci, et c'est vexatoire pour ceux-là !

Les élus sont, en conséquence, légitimement inquiets. Comment leur garantir que les petites communes rurales auront un avenir dans la République ? (Applaudissements nourris sur les bancs des groupes UC, Les Républicains, Les Indépendants et sur quelques bancs du groupe RDSE)

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - L'artificialisation des sols est une préoccupation que nous partageons tous. Oui, nous avons fait un vrai choix : celui de réorienter l'investissement locatif, dans les villes moyennes - terme consacré que j'ai en horreur ! - vers la réhabilitation des centres-villes.

Ni vous, ni nous ne pouvons accepter de voir les centres-villes péricliter, qui font la beauté de nos territoires... (Marques d'impatience et d'ironie à droite)

M. Jean-François Husson.  - Des actes ! (On approuve sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Julien Denormandie, ministre.  - Nous avons eu des débats sur les dents creuses, les missions de services publics sur tout le territoire. Le Gouvernement s'engage donc dans une approche réellement territorialisée. (Murmures désapprobateurs sur plusieurs bancs au centre et à droite)

Vous écriviez il y a peu que « le paysage fabrique la ville ». Pour ma part, je crois que l'aménagement fabrique la société. L'aménagement, en effet, relève d'une décision politique des élus locaux. Avec cette circulaire, nous ne demandons rien d'autre au préfet que de les accompagner. (Marques d'ironie sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Sonia de la Provôté.  - Soit, mais la circulaire ne recommande aucune souplesse. Celle-ci aurait pourtant été nécessaire car les territoires ont des besoins divers. (Applaudissements nourris sur les bancs des groupes UC et Les Républicains)

La séance est suspendue à 17 h 40.

présidence de M. Jean-Marc Gabouty, vice-président

La séance reprend à 17 h 50.