SÉANCE

du vendredi 29 novembre 2019

30e séance de la session ordinaire 2019-2020

présidence de M. Jean-Marc Gabouty, vice-président

Secrétaires : Mme Catherine Deroche, Mme Patricia Schillinger.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Projet de loi de finances pour 2020 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de l'examen du projet de loi de finances pour 2020, adopté par l'Assemblée nationale.

Seconde partie (Suite)

ACTION EXTÉRIEURE DE L'ÉTAT

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Les crédits de la mission « Action extérieure de l'État » sont stables en valeur pour 2020, à hauteur de 2,9 milliards d'euros. Cette stabilité apparente masque en réalité une augmentation des crédits de paiement de 1,1 % à périmètre constant, puisque le programme consacré à la présidence française du G7 prend fin le 31 décembre 2019. L'évolution des crédits de la mission se situe en deçà de celle des dépenses totales de l'État, qui augmentent de 2 % en valeur entre 2019 et 2020. C'est dans la suite des efforts engagés sur cette mission depuis quelques années.

Les évolutions à la hausse correspondent essentiellement à l'augmentation de 24,6 millions d'euros de la subvention de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), à la dynamique des dépenses de personnel pour 9,3 millions d'euros ainsi qu'à la progression des dépenses immobilières à l'étranger pour 7,4 millions d'euros. À l'inverse, les évolutions à la baisse correspondent à une économie de constatation de 7,6 millions d'euros sur les contributions internationales, liées aux opérations de maintien à une diminution de 8 millions d'euros des dépenses de protocole ainsi qu'à la baisse d'un certain nombre de subventions allouées aux opérateurs - Atout France, alliances françaises, Institut français.

La masse salariale de la mission augmente légèrement à 9,3 millions d'euros, soit 0,96 % en 2020, en raison de l'effet change-prix sur les indemnités de résidence à l'étranger et de l'effet prix sur les rémunérations des agents de droit local. Par ailleurs, l'effet du glissement vieillesse-technicité (GVT) sur la masse salariale de la mission, près de 9 millions d'euros, est beaucoup plus important que les années précédentes ; selon le Gouvernement, c'est dû à la requalification des agents de droit local sur des postes plus qualifiés, mais ces explications ne nous satisfont pas : qu'en est-il, monsieur le ministre ? Les effectifs de la mission diminuent en 2020 de 81 équivalents temps plein (ETP), c'est 47 sur l'ensemble des missions, une réduction répartie entre les différentes catégories de personnel - titulaires, contractuels, agents de droit local. Le projet de loi de finances (PLF) pour 2020 prévoit pour la première fois un mécanisme de provision des effets de change-prix sur la masse salariale, qui devrait permettre de limiter la sur-exécution chronique des dépenses de personnel et de rendre plus sincères les prévisions budgétaires.

L'immobilier à l'étranger est un sujet qui nous préoccupera ces prochaines années : la chute importante des produits de cessions, qui traduit notamment l'épuisement du volume de ventes potentielles, fait peser un risque important sur le budget de la mission pour les années à venir et pourrait conduire à une dégradation du patrimoine immobilier du ministère.

Rémi Féraud et moi-même avons reçu la réponse du ministre, à laquelle nous avons répondu à notre tour. Il y a désaccord ou incompréhension entre Bercy et le ministère des Affaires étrangères : sur le décalage entre l'indemnité théorique et l'indemnité versée.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères.  - Le concept n'existe pas.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Il a été inventé par Bercy... Nous souhaitons creuser ce point. Quand des critères favorisent une hausse des rémunérations, elles augmentent. Quand elles baissent, il semblerait qu'on limite cette baisse, comme cela se passe ailleurs qu'au ministère des Affaires étrangères : monsieur le ministre, est-ce le cas ?

Ne doit-on pas aller vers une imposition des rémunérations à l'étranger ? Ce ne serait pas aberrant.

Je propose une adoption des crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial de la commission des finances .  - En août dernier, le ministre a dit que la diplomatie culturelle était un des trois piliers de la diplomatie française.

La hausse des crédits du programme « Diplomatie culturellement influence » semble l'attester.

Je salue l'augmentation de 24,6 millions de la subvention à l'AEFE. Cela va dans le sens de l'engagement du président de la République de doubler le nombre d'élèves scolarisés dans le réseau à l'étranger d'ici 2030; mais cela reste insuffisant.

En revanche, Atout France, Campus France et l'Institut français ne voient pas leur budget augmenter. Pour le premier, c'est 3,8 millions d'euros comme l'an dernier. Or il doit oeuvrer à l'accueil de 500 000 étudiants de pays diversifiés et le programme « Bienvenue en France ». Comment assurer ces nouvelles missions sans financement supplémentaire ?

Nous souhaitons un bilan détaillé de l'usage des bourses. Le nombre de demande de bourses a baissé cette année de 18 %. Les budgets de Campus France et l'Institut français restent contraints. Celui de l'Institut français, dont je veux saluer le travail, a augmenté de 2 millions d'euros l'an dernier. Il retrouve en 2020 son niveau de 2018.

Atout France est fortement mis à contribution. Sa subvention baisse de 1,8 million d'euros. Or 2,6 millions d'euros ont été budgétés pour un plan social probable. C'est donc 4,4 millions d'euros d'économies attendues.

Revoir le rôle de chacun, pourquoi pas, mais Atout France a besoin d'une visibilité annuelle, qui doit lui être donnée dans son contrat d'objectifs et de moyens.

Près de 2 millions d'euros sont consacrés à la réforme de l'administration consulaire, traitée dans le programme 151 - et qui comprend le vote par internet, l'élargissement des horaires, l'état-civil électronique, la plateforme téléphonique d'accueil consulaire, autant de mesures utiles, bienvenues, mais parfois difficiles alors que la demande d'État français à l'étranger est toujours plus forte. Le numérique ne peut remplacer le lien humain, qui reste fondamental.

Les agents ont besoin d'un accompagnement important face à des changements d'ampleur dont les résultats ne sont pas toujours avérés et dont ils doutent parfois : M. Delahaye et moi-même avons pu constater un certain scepticisme dans les postes. La stabilité apparente marque des diversités de situations.

La mission « Action extérieure de l'État » a déjà fait de très gros efforts budgétaires. Tenons-en compte pour l'avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR et sur le banc de la commission ; Mme Christine Lavarde applaudit également.)

M. Bernard Cazeau, en remplacement de M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères .  - En 2020, la réorganisation des modes de gestion de l'État à l'étranger se poursuivra mais tous les ministères ne jouent pas le jeu : il est parfois difficile pour eux qu'un ambassadeur pilote cette action à l'étranger. Le modèle de gestion immobilière n'est pas soutenable. L'État s'appauvrit et les possibilités de vente s'amoindrissent : elles sont inférieures à 30 millions d'euros désormais ; les ventes ont plafonné à 4 millions d'euros alors que les besoins réels sont compris entre 40 et 80 millions d'euros. Il faut mettre un terme à l'érosion du patrimoine. Le projet de rénovation du Quai d'Orsay est mal adapté aux besoins. Il accumule retards et dépassements du budget, qui atteint déjà 95 millions d'euros. Pourquoi ne pas s'arrêter à l'avant-projet ? Il ne doit pas être un totem. (M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, applaudit.)

J'en viens à mon rapport. Je félicite le ministre de l'effort de sincérisation du programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde ».

L'effet change-prix explique le paradoxe apparent entre diminution des effectifs et augmentation des dépenses de personnel. Cela pose un problème de soutenabilité. Une provision de 15 millions d'euros a été prise, mais nous devons être vigilants pour que la compensation de cet effet soit annuelle. Les crédits dédiés à la sécurisation des bâtiments à l'étranger ont diminué de 75 à 44 millions d'euros. C'est compensé par une avance de 100 millions d'euros sur les deux prochaines années financées par le compte d'affectation sociale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

La gestion est passée du ministère des Affaires étrangères à Bercy. Le ministère des Affaires étrangères a oeuvré à hauteur de 207 millions d'euros au désendettement de l'État de 2014 à 2017. Ne peut-on considérer que l'avance au compte d'affectation sociale a été remboursée ?

M. André Vallini, en remplacement de M. Robert del Picchia, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères .  - Je prends la parole au nom de mon co-rapporteur Del Picchia, empêché par un deuil cruel.

Nous donnons un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence », en hausse grâce à la subvention à l'AEFE.

On note une érosion de la part des enfants français dans le réseau d'enseignement à l'étranger, de 38 à 35 %. Les droits d'inscription sont en constante augmentation. Passera-t-on à une logique de labellisation des établissements, qui traduisait un glissement vers le privé ? Y aura-t-il un pilotage conjoint des détachements entre le ministère des Affaires étrangères et le ministère de l'Éducation nationale ? Ne risque-t-on pas de dénaturer le réseau en effectuant un recrutement essentiellement local ?

J'en viens à mon rapport, sur la stratégie nationale d'accueil d'étudiants internationaux. La France est le cinquième pays d'accueil. En Turquie, l'accueil d'étudiants étrangers a bondi de 180 % en cinq ans. En Malaisie, c'est +79 %. La Russie et l'Arabie saoudite ont aussi une politique agressive d'accueil : +63 % pour ce dernier pays, avec un enseignement universitaire à teneur islamique.

Les crédits des bourses sont stables à 65 millions d'euros. Ils ont diminué de 43 % entre 2008 et 2017. Tous ces crédits ne sont pas consommés ; 76 % sont confiés en gestion à Campus France.

Cette politique manque d'une stratégie d'ensemble. On pourrait envisager un rapprochement entre Campus France et Erasmus Plus.

Les filières d'excellence doivent être privilégiées sur les stages courts.

La marque doit être valorisée, les critères de recrutements unifiés.

Le soft power, en bon français, ne doit-il pas être renforcé dans un contexte international de concurrence accrue ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR et sur le banc de la commission ; M. Claude Kern applaudit également.)

M. Jean-Pierre Grand, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères .  - Pour 2020, les crédits du programme 151 sont globalement stables, la plupart des lignes budgétaires étant reconduites : c'est le cas de la dotation destinée aux bourses scolaires pour 105 millions d'euros, de l'aide sociale pour 18 millions d'euros, ou de l'enveloppe destinée à l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE) pour 2,3 millions d'euros.

Les crédits de personnel connaissent une légère baisse de 0,6 %, alors que ceux qui sont destinés à la modernisation de l'administration consulaire sont en augmentation de 1,9 million d'euros. Ces chiffres illustrent la tendance de fond qui est à l'oeuvre dans le réseau consulaire depuis de nombreuses années, consistant à dégager des marges de manoeuvre grâce à la dématérialisation et la rationalisation pour maintenir le service rendu aux usagers dans un contexte d'économies et de suppressions de postes.

Concernant la modernisation, l'année 2019 a vu deux projets importants aboutir : la mise en place du registre électoral unique, qui a démontré tout son intérêt lors des dernières élections européennes, et le lancement de l'infocentre Oscar, outil de suivi statistique de l'activité de l'ensemble du réseau consulaire. L'année 2019 a aussi vu l'expérimentation de nouveaux projets, comme la dématérialisation de l'état civil, avec la mise en place d'un registre des actes de l'état civil électronique (RECE) et le lancement d'un centre mondial d'accueil consulaire, plateforme qui permettra de joindre l'administration à tout moment. Ces expérimentations se poursuivront en 2020, tandis que de nouvelles mesures seront prises pour améliorer le service aux usagers.

Des marges de manoeuvre sont aussi recherchées au travers de certaines mesures de rationalisation et de réorganisation. Il en est ainsi du regroupement d'activités, qui permet des gains de productivité et le redéploiement d'effectifs. Dans les pays comptant plusieurs postes, des spécialisations sont mises en oeuvre. Par exemple, depuis le 1er septembre 2019, aux Émirats arabes unis, la compétence en matière de visas est exercée à Abu Dhabi, alors que la compétence en matière d'administration des Français est exercée à Dubaï.

Expérimenté depuis 2018, le projet de regrouper les transcriptions d'état civil au sein du service central d'état civil (SCEC) du ministère à Nantes relève de la même logique et suscite quelques inquiétudes.

On peut également citer l'exemple du projet de centralisation au sein d'un centre d'expertise de ressources et des titres (CERT) propres au ministère de l'Europe et des affaires étrangères de l'instruction et de la validation des demandes de passeports et de cartes nationales d'identité adressées au réseau consulaire.

Il faut aussi évoquer les réorganisations de la carte consulaire. Après la fermeture récente des consulats de Séville et de Moncton, la transformation du consulat général de Boston en consulat d'influence, il est prévu en 2020 de supprimer un certain nombre de sections consulaires et de fusionner les fonctions de consul et de directeur de l'Institut français à Agadir, Bilbao, Fès et Tanger.

Ainsi, en 2020, comme depuis une décennie, l'administration consulaire continuera de se transformer pour maintenir le niveau de service rendu à une population de ressortissants français en augmentation continue, puisqu'elle est en hausse de 81 % depuis 1998, et ce avec toujours moins de moyens.

Afin de se conformer à l'objectif fixé par le plan stratégique « Action publique 2022 », qui prévoit une réduction de 10 % de la masse salariale à l'étranger d'ici à 2022, le programme 151 supprimera encore 22 emplois en 2020, après 37 en 2019. Or, compte tenu des efforts de rationalisation déjà réalisés depuis des années, comment la suppression de ces postes pourrait ne pas se traduire, à terme, par une dégradation des prestations fournies ? Comment préserver le contact humain ? On touche aux limites de l'exercice. Pour autant, avis favorable à l'adoption des coûts des crédits du programme 151.

M. Rachid Temal, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères .  - Le programme 151 relève du service public dû à nos compatriotes établis hors de France, qui sont les premiers ambassadeurs de notre pays.

À 13 jours des législatives au Royaume-Uni, M. Grand et moi-même nous sommes intéressés aux 300 000 Français vivant outre-Manche. Leur situation est incertaine. À Londres, nous avons échangé avec l'ambassadrice et le consulat général. Post-brexit, le statut de résident doit permettre à nos compatriotes de vivre et travailler au Royaume-Uni comme avant. Ils sont dans l'expectative. Sur les 10 000 personnes les plus vulnérables, personnes âgées notamment, les services consulaires font un travail remarquable. J'attire votre attention, monsieur le ministre, sur la vétusté du poste de Londres et l'indispensable sécurisation de ses conditions d'accès.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères.  - Très bien !

M. Rachid Temal, rapporteur pour avis.  - Plus généralement, les 37 emplois octroyés cette année et 22 l'an dernier ne sont pas suffisants. Nous voterons contre les crédits de ce programme, au nom du rayonnement de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR ; M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, applaudit également.)

M. Claude Kern, rapporteur pour avis de la commission de la culture .  - Les crédits de la diplomatie d'influence augmentent en 2020 après une baisse drastique sous le précédent quinquennat. Cela recouvre cependant des disparités.

Le relèvement de la subvention de l'AEFE était très attendu après la coupe franche de 2017. L'homologation de nouveaux établissements, cependant, ne laisse pas d'inquiéter : ne sacrifions pas la qualité ni le soutien aux structures existantes.

La stratégie « Bienvenue en France » n'a pas donné lieu à une augmentation de la dotation de Campus France. Il faut se donner les moyens de nos ambitions, si nous voulons atteindre l'objectif d'accueillir 500 000 étudiants internationaux d'ici 2027.

Le ministère n'est pas en mesure de nous expliquer la non-revalorisation des crédits alloués aux bourses.

Je passe sur l'état déplorable de certains bâtiments de l'Institut français, comme à Mexico. Le rapprochement de l'Institut français avec l'Alliance française semble bloqué sur le terrain : le ministère ne peut-il jouer tout son rôle dans cette affaire ?

Ainsi l'augmentation des crédits de l'AEFE a un effet d'éviction sur les autres opérations de notre politique d'influence.

Après une discussion nourrie, la commission de la culture a donné, de justesse, un avis défavorable aux crédits du programme 151. (M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, applaudit.)

M. Jean-Louis Lagourgue .  - La voix de la France doit continuer à être écoutée dans le monde. La diplomatie mène souvent une action de l'ombre ; ce sont ses échecs que l'on remarque.

La France doit donc maintenir des capacités diplomatiques de haut niveau pour faire rayonner ses valeurs. Or notre réseau diplomatique a reculé en 2018 à la troisième place mondiale derrière les États-Unis et la Chine.

Nous nous félicitons de la baisse de budget du ministère des Affaires étrangères et de la stabilisation des crédits de l'action extérieure de la France. Nous nous interrogeons cependant sur les moyens d'atteindre les objectifs fixés : en dix ans, les dépenses de personnel ont augmenté de 34 % alors que les effectifs ont baissé.

La forte baisse des ventes immobilières ne laisse pas d'inquiéter : attention, il n'y a plus de bijoux de famille, et il est grand temps de trouver d'autres ressources pour le patrimoine du ministère !

Monsieur le ministre, nous nous félicitons de l'augmentation des crédits du programme 151, qui intervient après une longue baisse. Les pays des droits de l'Homme doit avoir une voix qui porte : l'objectif de doublement du nombre d'élèves accueillis en France d'ici 2030 est une bonne chose, mais il faut augmenter les moyens. D'autres pays ont augmenté fortement le nombre d'étudiants étrangers en cinq ans, comme la Turquie qui a vu ses effectifs croitre de 180 % ces cinq dernières années. Or certains étudiants étrangers ont des difficultés à obtenir des visas.

Les années à venir sont porteuses de tensions. Nous qui n'oublions pas le prix du sang, savons qu'il faut toujours aider notre diplomatie à donner une chance à la paix. (M. Christian Cambon, président de la commission, applaudit.)

M. Yvon Collin .  - Dans un monde en pleine recomposition, la Chine, l'Inde, puissances désormais politiques, veulent peser. Le changement climatique et ses conséquences migratoires sont également un défi immense. Des conflits éclatent, notamment au Venezuela, en Équateur, Bolivie, Colombie où les contestations s'étendent.

Comme l'a rappelé le président de la République, l'esprit français est un esprit de résistance et une vocation à l'universel. L'action extérieure de l'État est un levier de cette action. Je tiens à saluer nos treize soldats morts au Mali au service de cette action.

La fin du programme consacré au G7 conduit, en réalité, à une hausse de 1,5 % des crédits de paiement. Le sommet de Biarritz a été l'occasion d'avancées comme la reconstitution du Fonds vert pour le climat ou la priorité donnée à l'Afrique dans l'aide au développement.

La chute importante du produit des cessions immobilières m'inquiète, autant que la modernisation à marche forcée de l'administration consulaire, ainsi que la pression sur les opérateurs.

Je me félicite en revanche de l'abondement des crédits de l'AEFE, dont la subvention pour charge de service public avait baissé de 33 millions d'euros en 2017.

La francophonie étant en perte de vitesse, il faut préserver les moyens de nos 522 établissements à l'étranger qui accueillent 365 000 élèves, avec un objectif de 500 000.

Le traité d'Aix-la-Chapelle avec l'Allemagne relance la coopération culturelle. J'espère que les instituts franco-allemands contribueront à cette relance.

Notre réseau diplomatique doit conserver son universalité, ce qui n'exclut pas des redéploiements, notamment au bénéfice de l'Asie.

Le groupe RDSE votera les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE ; MM. Olivier Cadic et Richard Yung applaudissent également.)

Mme Christine Prunaud .  - L'an dernier, le président de la République annonçait vouloir doubler le nombre d'apprenants du français, alors que notre langue devrait avoir 1,3 milliard de locuteurs d'ici à 2065.

Mais les moyens sont insuffisants. L'AEFE n'est pas le seul outil de notre réseau diplomatique, dont les crédits baissent de 13 % : en réalité, le Gouvernement demande de faire plus, avec moins.

Quelques mots sur le plan « Bienvenue en France ». Le nombre de demandes d'accueil a baissé même si certaines zones prioritaires comme le Maghreb voient les demandes augmenter qu'en est-il précisément ? Après la décision du Conseil constitutionnel du 11 octobre dernier, qui rappelle l'exigence de gratuité de l'enseignement public, qu'allez-vous faire, monsieur le ministre ?

L'objectif d'une réduction de 10 % des effectifs du ministère a été réduit à 5,7 %, c'est sage. Mais l'an prochain, 81 postes seront encore supprimés sur cette mission. La précarisation de notre réseau consulaire est préoccupante. Le cumul des congés non pris et non récupérables équivaut à 70 ETP.

Certaines villes deviennent si chères que l'indemnité de résidence à l'étranger (IRE) devient insuffisante. Je ne serais pas étonnée que la priorité donnée aux contrats courts coûte plus cher que le recrutement de fonctionnaires.

Il y a un décalage entre les attentes, les objectifs et les moyens. Notre pays s'inscrit depuis plusieurs années dans une politique selon laquelle la défense de la démocratie met la paix entre parenthèses. L'économie tend à primer. Notre personnel doit jouer le rôle de VRP du commerce français, notamment des armes. Comment défendre la paix dans ces conditions ?

Malgré toute sa bonne volonté, le groupe communiste ne votera pas les crédits, qui méritent d'être mieux répartis. (M. Jean-Yves Leconte applaudit.)

M. Olivier Cadic .  - Le programme 105 prévoit une hausse des crédits, à 1,7 milliard d'euros. Les contributions obligatoires de la France sont cependant abaissées à 676 millions d'euros.

La France est le cinquième contributeur à l'ONU. Mais notre contribution volontaire, à 45 millions d'euros, est à la quinzième place mondiale : on risque une perte d'influence. Le réseau diplomatique est doté de 621 millions d'euros. Nous soutenons la modernisation des postes, sans altérer l'action de nos diplomates.

Mais c'est l'érosion de notre patrimoine qui m'inquiète. On vend les bijoux de famille pour financer notre train de vie.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères.  - J'ai arrêté !

M. Olivier Cadic.  - Les moyens existent, à condition de changer les règles de la comptabilité publique, pour donner de l'autonomie à nos chefs de poste : notre consul à Addis-Abeba a réussi à dégager des recettes pour financer l'entretien de sa résidence, il y a bien des marges dans ce sens.

Nous avons de plus en plus d'expatriés et de moins en moins de moyens. C'est le fameux effet ciseaux. Les 206 postes consulaires ne sont pas suffisants. Il y a un repli permanent. Quelle sera la carte consulaire dans dix ans ? Si l'intégralité des recettes de visas était affectée au réseau consulaire, le programme ne coûterait pas un sou au contribuable.

Je soutiens sans réserve l'objectif du président de la République de doubler le nombre d'enfants scolarisés dans les établissements français à l?étranger d'ici 2030. Dans ce but, vous avez augmenté la subvention de l'AEFE de 24,6 millions d'euros. Mais Bercy veille : en portant la réserve de précaution de 3 à 4 %, il a réduit la dotation réelle de l'État à 16,15 millions d'euros.

Pour conclure, un mot sur votre action, monsieur le ministre : je n'entends que des éloges à votre égard et voulais vous en féliciter (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur quelques travées du groupe RDSE)

M. Christian Cambon .  - Je remercie mon groupe qui a donné quelques minutes de parole au président de la commission des affaires étrangères pour évoquer ce budget.

Les crédits de la mission visent la paix face au chaos géopolitique. Monsieur le ministre, vous nous appelez à la lucidité pour entrevoir le monde qui se prépare. Vous nous dites que les grandes puissances sont résolues à faire de l'Europe leur terrain de jeu, que le système multilatéral est la cible d'attaques sans précédent, que la compétition mondiale se joue sur des terrains nouveaux : la commission partage votre analyse.

A regarder le monde avec lucidité, on est saisi de vertiges : menaces en mer de Chine, en mer Méditerranée jusque dans les eaux d'un État membre de l'Union européenne, menace de la force, de la faiblesse - celle des États faillis -, on le sait au Sahel et je salue la mémoire de nos treize soldats tués au Mali. Le Burkina Faso est aussi peu à peu gangréné par le terrorisme djihadiste.

Après le cyberespace, l'espace atmosphérique est un nouveau terrain. Aussi je salue l'engagement du Gouvernement pour faire de l'Europe un acteur de premier plan. Le Conseil de sécurité des Nations unies est bloqué sur de nouveaux sujets. Le droit international est bafoué. Le traité New start est en danger. Tout le système de maîtrise de la prolifération nucléaire est menacé.

Le Moyen-Orient est à feu et à sang. Nos alliances les plus solides comme l'Alliance transatlantique vacillent certains jours.

La menace djihadiste sur l'Europe s'accroît. L'opération turque dans le nord est syrien a assuré la victoire finale de Damas. Le retrait américain a livré le Moyen-Orient aux Russes, et la menace djihadiste s'est renforcée. Les Américains ont abandonné leurs relais loyaux et efficaces, notamment les Kurdes. Nul besoin d'avoir lu Clausewitz pour comprendre les conséquences désastreuses de l'offensive turque.

Il faut travailler sereinement au réveil de l'Europe. Pour reprendre une expression d'un de vos prédécesseurs, monsieur le ministre, on a le sentiment que l'Europe est un Bisounours en plein Jurassic Park, qui risque de sortir de l'histoire si elle ne se réveille pas.

La commission des affaires étrangères tisse inlassablement des relations étroites avec l'ensemble des parlements européens, britannique inclus. Nous parlons avec nos partenaires même ceux qui sont réputés difficiles. La semaine prochaine à Londres, les 70 ans de l'Alliance transatlantique seront fêtés.

Nous vous soutenons. Les crédits du Quai d'Orsay sont très importants. La France, comme l'a dit le président de la République, est une puissance d'équilibre ; elle n'a pas d'agenda caché, elle ne vise qu'à produire sécurité et paix dans un monde devenu fou. Mais il y a un grand écart entre l'ambition et les moyens parfois petits. Nous savons le combat que vous menez pour tenter d'accroître les crédits.

Un dernier mot sur les dépenses immobilières du Quai d'Orsay, bête noire du Sénat. Monsieur le ministre, la méthode consistant à vendre les bijoux de famille n'est plus acceptable nous avez-vous dit lors de votre audition. Je vous suis, mais comment ?

La commission des affaires étrangères a donné un avis favorable à l'adoption des crédits. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, RDSE, LaREM et UC)

Mme Hélène Conway-Mouret .  - Nos amendements viseront à améliorer le budget de ce grand et beau ministère. Monsieur le ministre, vous vous y opposerez pour respecter l'équilibre budgétaire, mais franchement, ce ministère mérite mieux.

Mais nos trois millions de compatriotes à l'étranger ont une voix faible. Des consulats, comme celui de Séville, ferment. Le Quai d'Orsay doit faire preuve d'agilité, d'imagination et d'audace avez-vous dit. Mais à quelle fin ? Ce budget 2020 est en trompe-l'oeil, même s'il paraît plus sincère que le précédent. La dotation de l'action extérieure est en progression : 2,87 milliards d'euros. Mais cela cache d'importantes disparités. Beaucoup de programmes sont en baisse, comme celui de notre réseau diplomatique, à 24 millions d'euros, et la sécurité à l'étranger : 25 millions d'euros.

Le plaisir de constater la hausse de 3 % du programme 185 est éphémère quand on assiste à des fermetures de postes.

Il n'y a plus d'ambassade qui soit affectée par le manque de moyens. La rallonge de 8 millions d'euros est insuffisante pour l'entretien de notre parc immobilier. Certains diplomates rassemblent plusieurs fonctions qui sont très différentes, comme consul et directeur de l'Institut français. Notre désarroi est grand. Si nous étions à l'os il y a dix ans, où en sommes-nous aujourd'hui ?

Quelque 81 ETP ont été supprimés cette année. Il est difficile d'envisager comment les services à nos compatriotes peuvent être améliorés dans ces conditions. Depuis deux ans, 241 postes ont été supprimés. Derrière les chiffres froids, il y a des personnes qui ont consacré leur vie au ministère, en contrat local, et qui se trouvent licenciées. De Kyoto à Moncton, au Canada, la communauté française se mobilise. Une pétition a recueilli 2 600 signatures pour revenir sur la fermeture du consulat de Moncton. Si on demandait aux Brestois de renouveler leur passeport à Nice, comment réagiraient-ils ? La dématérialisation ne compense pas les suppressions de poste.

Une économie de 1,2 million d'euros est réalisée sur le réseau d'Alliances françaises après une baisse des crédits de sécurisation.

L'Institut français retrouve son niveau de 2018 à 28,8 millions d'euros, mais quatre centres culturels ferment.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - On ne les ferme pas !

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Vous nous l'expliquerez, monsieur le ministre. France Média Monde voit ses crédits réduits.

Nous saluons la sanctuarisation des crédits des établissements français et sommes heureux d'un budget de 24,6 millions d'euros qui ne compense cependant pas la baisse de 33 millions décidée en 2017.

La hausse des frais de scolarité et la participation forfaitaire accrue des établissements, qui passe de 6 à 9 % du budget de l'AEFE, sont inquiétantes. L'enveloppe des bourses est à 105 millions d'euros. On ne peut que partager l'objectif de doublement du nombre d'élèves scolarisés, mais sera-t-il tenu?

Mille postes d'enseignants titulaires seront créés mais dans le même temps une baisse de 106 ETP dans le réseau AEFE. L'ambition est belle, mais où sont les moyens ?

Le nombre de bureaux de vote sera stabilisé pour les élections consulaires, mais pas les points de vote. Pour l'action extérieure de l'État, le compte n'y est pas. Nous ne pouvons pas approuver ces crédits et donner raison à Bercy - et cela dit tout en vous apportant notre soutien, pour votre engagement, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE ; M. Antoine Lefèvre applaudit également.)

M. Richard Yung .  - Jusqu'à présent la tonalité du débat était positive mais Hélène Conway-Mouret vient de nous doucher sérieusement. Ce serait par solidarité avec le ministre, pas avec le Gouvernement...

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - C'est un début

M. Antoine Lefèvre.  - Elle a dit beaucoup de vérités !

M. Richard Yung.  - Pour ma part, j'estime que ce budget de l'action extérieure de l'État est un bon budget après tant d'années de baisse. C'est un budget au service de la diplomatie de l'audace prônée par notre président de la République. Il prévoit la poursuite de la réforme de l'organisation des services extérieurs à l'étranger, tous placés sous l'autorité de l'ambassadeur. Il faut espérer que les crédits suivent. (M. Jean-Yves Le Drian, ministre, le confirme.)

Je salue la mémoire des treize soldats morts au Mali.

Réjouissons-nous de la mise en place du dispositif de prise en compte de l'effet change. Le patrimoine immobilier fait l'objet d'un début de rebudgétisation. On envisage de vendre l'ambassade de Londres. On en est à céder nos derniers investissements immobiliers. Or l'an prochain nous devrons rembourser l'avance.

Certains agents pourront accéder aux concours internes de catégorie C ; je forme le voeu que cela soit étendu aux catégories A et B.

La subvention de l'AEFE augmente. Cependant, l'Association nationale des écoles françaises à l'étranger (Anefe) est rayée de la carte et les avances du Trésor à l'AEFE sont supprimées. Alors comment va-t-on faire ?

M. Rachid Temal, rapporteur pour avis.  - Dites-le nous !

M. Richard Yung.  - Le ministre va nous le dire... (Sourires)

Je souhaite vous interroger sur les bourses. La sélection des candidats semble se faire à la tête du client. La Cour des comptes préconise le rapprochement entre Campus France et Erasmus Plus.

La dématérialisation des démarches, le vote par internet, l'extension des horaires d'ouverture et la mise en place d'une plateforme téléphonique sont de belles avancées. Le groupe LaREM votera ces crédits. (Applaudissements sur quelques travées du groupe LaREM)

M. Jean-Marie Mizzon .  - La coopération culturelle et linguistique est un vecteur important d'influence - « l'un des trois piliers fondamentaux de notre politique étrangère globale », avez-vous dit, monsieur le ministre.

La promotion de la langue française dans le monde et la valorisation du réseau d'enseignement français à l'étranger constituent une composante majeure de notre diplomatie, et notre commission de la culture y est très attachée.

En 2020, la subvention pour charge de service public de l'AEFE sera de 408,6 millions d'euros. Nous nous en réjouissons, alors que la ponction de 33 millions d'euros à l'été 2017 a été très mal vécue par le réseau. Il faudra trouver un équilibre entre développement du réseau et soutien des structures existantes.

Un autre grand plan est censé permettre à notre pays de rayonner à l'étranger, le plan « Langue française et plurilinguisme ». Alors qu'il est en grande partie piloté par l'Institut français de Paris, nous nous inquiétons du mauvais signal envoyé par la non-reconduction, certes annoncée, des moyens supplémentaires accordés en 2019 à l'Institut...

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Ils étaient exceptionnels, donc non reconductibles !

M. Jean-Marie Mizzon.  - Comme l'a indiqué son président lors de son audition, des arbitrages seront nécessaires entre les missions de l'organisme, du fait du manque de moyens. Ce plan, monsieur le ministre, est-il remis en question ?

Nous nous réjouissons cependant de la clarification des rôles entre l'Institut français et les alliances françaises. Cependant, le rapprochement physique des deux opérateurs, boulevard Raspail, reste une vive source d'inquiétude.

Un mot, enfin, sur l'audiovisuel extérieur ; la présidente de la commission de la culture, Mme Morin-Desailly, ne cesse d'alerter sur la baisse constante de ses crédits.

Néanmoins, le groupe UC votera l'adoption des crédits de cette mission dans sa majorité. (Applaudissements sur quelques travées du groupe UC et sur les travées du groupe LaREM)

M. Richard Yung.  - Très bien !

Mme Jacky Deromedi .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Pour 2020, l'enveloppe de la mission atteint 2,74 milliards d'euros, notamment en raison de la disparition du poste budgétaire lié à la présidence française du G7.

Quel rayonnement et quelle influence voulons-nous pour la France ? Notre rayonnement et notre attractivité sont liés : si de mauvais choix économiques, une recrudescence des violences ou une crise sociale sans fin abîment notre image, à quoi bon un réseau pour la défendre ?

La France ne peut rester spectatrice, face à la fracturation accélérée de l'Union européenne, écartelée par un Brexit interminable, déconnectée par les ultra-normes bruxelloises, déstabilisée par les vagues d'immigrations et fragilisée par les différences de perceptions sécuritaires.

Les repères diplomatiques sautent. L'heure n'est plus au soft power. États-Unis et Chine développent une stratégie offensive ; en est témoin la nouvelle route de la soie, de Pékin à Djibouti en passant par Gwadar qui est très loin de n'être qu'un concept. Je salue le rapport de Pascal Allizard sur le sujet.

Nos rapporteurs du programme 185, André Vallini et Robert del Picchia, indiquent que les crédits des bourses ont baissé de 43 % entre 2008 et 2017. Le nombre de bénéficiaires a baissé de 30 % et le montant unitaire des bourses de 18 %. Cela a conduit à une baisse des demandes et à la sous-consommation des crédits, véritable ineptie, révélatrice d'une surenchère de réformes au Quai d'Orsay.

Après dix ans de réformes et de mutualisations, le lien de proximité entre les Français expatriés et leurs institutions est rompu. Dans un contexte d'immobilier élevé, la vente du foncier a été une erreur. Je souhaite dénoncer l'insincérité de Bercy sur l'utilisation du produit des cessions immobilières, qui a été affecté au compte d'affectation spéciale « Désendettement de l'État », et non aux agents, ce qui a privé le ministère de 207 millions d'euros en quatre ans, comme l'ont dénoncé nos rapporteurs Poniatowski et Cazeau.

Je me félicite de l'ambition de doubler le nombre d'élèves scolarisés à l'étranger en 2030, mais quels moyens réels sont mis à son service ?

Le financement de l'AEFE, dont les crédits ont augmenté de 24,6 millions d'euros, n'est pas pérenne : l'agence souffre d'un défaut de trésorerie, alors qu'il y a des besoins à Alger et Moscou.

L'Anefe a vu sa subvention supprimée par décret ; comment justifier ces errements ? Une quinzaine de projets se retrouvent de ce fait sans financement.

Depuis deux ans et demi, le Gouvernement et les députés de la majorité sont revenus sur toutes les avancées que nous avons fait voter en faveur de la représentation des Français de l'étranger. (M. Richard Yung le conteste, tandis que M. Rachid Temal, rapporteur pour avis, insiste du geste sur la sévérité de la critique.)

Je me félicite que nos collègues députés reprennent nos idées sur le projet de loi Engagement et proximité. Néanmoins, le rapporteur du projet à l'Assemblée nationale a affirmé que les conseillers consulaires n'étaient pas des élus, puis reconnaissant son erreur, qu'ils n'étaient pas des élus comme les autres...Les conseillers consulaires du monde entier apprécieront ! Quand allez-vous leur donner les moyens d'exercer leur mandat et de vrais pouvoirs ? Sur tout cela, vous ne proposez rien.

J'ai donc déposé une proposition de loi relative aux Français établis hors de France, pour répondre à leurs demandes légitimes, en matière de fiscalité et de droits sociaux, ce que votre Gouvernement refuse.

Monsieur le ministre, le groupe Les Républicains votera ces crédits, mais prenez en compte les recommandations de nos rapporteurs. Le Sénat n'a pas envie une fois de plus d'avoir raison trop tôt.

Monsieur le ministre, Churchill disait et je le reprends à mon compte : « Agissez comme s'il était impossible d'échouer. » (« Très Bien ! » et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Dans un monde instable, marqué par la multiplication des crises, la remise en cause du multilatéralisme, un état d'urgence environnementale, la France conduit une diplomatie à la fois audacieuse et pragmatique.

En 2020, au-delà du traitement des crises qui se multiplient - comme le tragique accident de nos soldats au Sahel vient de nous le rappeler cruellement - dans le « chaos géopolitique » évoqué par le président Cambon, expression que je reprends volontiers à mon compte, trois chantiers prioritaires nous occuperont.

D'abord, la construction d'une véritable souveraineté européenne est indispensable pour avancer vers l'Europe de la défense, apporter une réponse commune aux crises migratoires, accomplir un saut technologique et industriel massif, sortir de la naïveté face aux géants économiques et politiques que sont les États-Unis et la Chine aujourd'hui, ou demain l'Inde et le Brésil.

Ensuite, il nous faut consolider un multilatéralisme renouvelé sous la bannière de la coopération internationale, dont nous avons jeté les bases ces derniers mois, en réunissant avec l'Allemagne les puissances de bonne volonté.

Enfin, nous devons mener les batailles nouvelles de l'influence, alors que la compétition internationale s'étend à tous les aspects de la vie culturelle et sociale : la culture, la formation, l'information, le développement sont devenus de nouveaux attributs de la puissance. La distinction entre soft power et hard power ne tient plus. Il nous faut donc un budget pour agir en ce sens et je sais gré aux rapporteurs de leurs avis, majoritairement positifs, et suggestions.

Nous avons réorganisé les modes de gestion des réseaux de l'État à l'étranger. Désormais, ils sont sous la seule responsabilité du ministère des Affaires étrangères. C'est la fin des silos dans la gestion des ressources humaines.

Monsieur Yung, rassurez-vous, nous avons obtenu les crédits nécessaires à la mutualisation. Le ministère des Affaires étrangères est affectataire de tout le parc immobilier à l'étranger. Tous les comptes ont été soldés. Nous demeurons vigilants, mais cette réorganisation est concrètement en place.

Plusieurs intervenants rappellent que les secrétaires généraux des postes ont été très mobilisés par cette réforme. Conscient de cela, je vais doubler des postes à Kaboul, Khartoum et Doha. Je confirme les engagements pris l'an dernier et j'ai redit au comité technique d'hier que cette fonction de secrétaire général est non seulement préservée, mais j'ai fait en sorte qu'on lui donne des capacités de promotion. La réforme se déroule bien. Le sérieux a payé. Mme Conway-Mouret ne le savait pas, mais la réduction de la masse salariale est de 5 % et non de 10 %. M. Yung l'a rappelé.

Merci d'avoir souligné la maîtrise des effets de l'inflation sur le pouvoir d'achat des agents, grâce à une provision spécifique. Les risques de perte de change en gestion seront mécaniquement couverts en fin d'année par la réserve de précaution.

Concernant notre patrimoine, deux remarques. D'abord le budget immobilier passe de 73 à 80 millions d'euros, soit une hausse de 10 %. (Mme Hélène Conway-Mouret proteste.)

Eh oui, il faut citer les vrais chiffres ! Ensuite, nouvelle imprécision de Mme Conway-Mouret, les investissements de sécurité ne diminuent pas de 24 millions d'euros par rapport à l'an dernier. Vous faites référence au chiffre d'il y a deux ans. Tant qu'à critiquer le Gouvernement, autant le faire sur des bases justes !

J'ai obtenu 100 millions d'euros pour sécuriser l'ensemble des sites. Et pas seulement les résidences des ambassadeurs, mais tous les sites, y compris les lycées, les instituts, etc. Si vous voulez être constructive, il faut construire avec les bons chiffres.

Il est vrai, cependant, que nous serons dans l'impasse en 2021 sur le plan du patrimoine. En 2020, cela va encore, mais en 2021, cela ne va plus du tout : il faut mettre en place un nouveau dispositif. Je me suis opposé à la vente de certains biens emblématiques, qui servent notre influence.

Monsieur Cadic, je connais le site d'Addis-Abeba mais les opportunités qu'il offre sont uniques.

Merci, madame Deromedi et monsieur Cazeau, de m'avoir fait découvrir un trésor caché : 200 millions d'euros de cessions immobilières versés sur le compte d'affectation spéciale 223. J'essaierai de les récupérer ! (Sourires)

Ne confondons pas l'Institut français - auparavant Cultures France - et les instituts français. Il est vrai qu'il est aisé de les confondre, mais ils n'ont pas le même statut, ces derniers relevant de l'ambassadeur. L'Institut français de Paris a reçu une subvention exceptionnelle, et présentée comme telle, de 2 millions d'euros en 2019 pour une mission particulière. Je ne comprends pas les protestations contre sa non-reconduction, dès lors que cette mission est terminée.

L'Alliance française et l'Institut français sont en cours de rapprochement fonctionnel ; celui-ci est acté. Quant au rapprochement physique, messieurs Kern et Mizzon, il sera bientôt acté, je l'espère.

Le projet Quai d'Orsay de regroupement des agents parisiens sur deux sites est en cours mais la redéfinition de certains espaces, la question du restaurant administratif, ont entraîné des retards. Je tiens une réunion dans quelques jours pour les résorber.

Je suis très attentif à ce que le Quai d'Orsay soit totalement intégré à la gouvernance de l'audiovisuel extérieur, dont le financement devra être garanti. Nous veillerons à ce que la contribution à l'audiovisuel public garantisse le financement de l'audiovisuel extérieur, au moment où se livre dans le monde une âpre bataille de l'information. Je sais que c'est une préoccupation particulière du président Cambon.

M. Collin, le traité d'Aix-la-Chapelle prévoit des programmes d'échange franco-allemand et un fonds citoyen. La France l'abondera à hauteur d'1,2 million d'euros à parts égales entre le ministère des Affaires étrangères et le ministère de l'Éducation nationale.

M. Yvon Collin.  - Très bien !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Sur les moyens de l'AEFE, l'augmentation de 24,6 millions d'euros est acquise, non pour une année mais de manière permanente. (Mmes Claudine Lepage et Hélène Conway-Mouret s'exclament.) Le président de la République s'était engagé devant l'Académie française à doubler le nombre d'élèves dans les établissements français à l'étranger, de 350 000 à 700 000, en 2030. Il ne s'agit pas que d'accueillir nos compatriotes. Il faudra plus d'établissements, donc une homologation exigeante mais simplifiée, et un effort de formation.

J'ai été interrogé sur l'Anefe. Madame Deromedi, elle sera mise en conformité avec la réglementation pour débloquer les investissements. J'espère aboutir à un résultat positif rapidement.

Je suis favorable à revisiter le dispositif des bourses pour les étudiants étrangers. Ce point sensible a été évoqué à plusieurs reprises, notamment par MM. André Vallini et Rémi Féraud, c'est un outil d'influence.

Je souhaite rappeler l'importance de la modernisation de notre action consulaire autour de projets emblématiques : vote par internet ; mise en oeuvre de France Visa - cela se fait à distance, on pourrait très bien le faire à Nice quand on habite à Brest, ou vice-versa, madame Conway-Mouret ; registre d'état-civil électronique qui sera opérationnel d'ici la fin 2022 ; enfin un centre de réponse téléphonique et courriel unique, expérimenté en 2020.

J'espère vous avoir convaincu de notre inventivité et de notre détermination pour lancer, à budget constant, des mesures nouvelles et fortes pour que la France assure efficacement son rôle de puissance d'équilibre. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur quelques travées du groupe Les  Républicains)

Examen des crédits de la mission et de l'article rattaché

Article 38

M. le président.  - Amendement n°II-375, présenté par Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

18 203 102

18 203 102

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

18 203 102

18 203 102

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

TOTAL

18 203 102

18 203 102

18 203 102

18 203 102

SOLDE

0

0

Mme Christine Prunaud.  - L'enjeu n'est plus de représenter la France mais ses entreprises. Cela nous interroge sur le rôle de l'ambassade. Il serait pertinent de déplacer les crédits de l'action de la France vers la diplomatie culturelle, qui n'a pas de moyens suffisants. Dans le même temps, l'université franco-tunisienne, par exemple, avec ses droits d'inscriptions de 2 900 euros, renvoie une image de structure réservée à l'élite- alors que le gouvernement tunisien a réduit de moitié le budget des universités depuis 2008.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Cet amendement réaffecte nos crédits de l'OTAN à la diplomatie culturelle. Même si le président de la République lui-même s'interroge sur cette organisation, nous ne pouvons pas mettre fin à nos engagements internationaux au détour d'un amendement. Avis défavorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Vais-je dire la semaine prochaine à Londres : « Ça y est, on quitte l'OTAN » ? Alors qu'elle marque son 70ème anniversaire, la principale question est celle de son rôle, face à quels risques. Je ne peux pas vous suivre. Il serait surréaliste de quitter l'OTAN au détour d'un tel amendement.

En arrivant à la tête de ce ministère, j'ai constaté que le programme 185 avait été érodé année après année. J'ai bloqué cette érosion et j'entreprends de reconstruire la diplomatie d'influence. Le budget du programme 185 augmente de 3 %. On peut considérer que ce n'est pas assez, mais c'est un début. Avis défavorable.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je regrette que la mission « Action extérieure de l'État » ne comprenne pas le budget de Business France, supérieur à 80 millions d'euros. Ce serait logique. Le débat sur l'action extérieure de la France est tronqué sans Business France.

Mme Christine Prunaud.  - Je suis le ministre sur la diplomatie d'influence. En revanche, une grande interrogation se pose sur l'OTAN après les accords entre la Turquie et les États-Unis. Nous en étions convaincus, nous en sommes maintenant certains.

L'amendement n°II-375 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-438, présenté par Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et républicain.

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

15 000 000

15 000 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

15 000 000

15 000 000

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

TOTAL

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

SOLDE

0

0

Mme Claudine Lepage.  - L'AEFE est un des grands opérateurs de l'enseignement français à l'étranger.

Le président de la République a souhaité le doublement du nombre d'élèves dans les établissements français à l'étranger ; or la première décision a été une coupe de 33 millions d'euros dans le budget de l'AEFE. Pour compenser, de nombreux établissements ont dû augmenter les droits d'inscription. Pourtant les familles ne sont pas toutes aisées.

Cet amendement flèche 15 millions d'euros de crédits de paiement supplémentaires vers l'action 05 « Agence pour l'enseignement du français à l'étranger », au sein du programme « Diplomatie culturelle et d'influence », et réduit de 15 millions d'euros les crédits de paiement de l'action 06 « Soutien » au sein du programme « Action de la France en Europe et dans le monde ».

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - La commission des finances ne peut pas être favorable à cet amendement. Le Gouvernement flèche 24,6 millions d'euros supplémentaires vers ce budget. C'est un vrai effort. L'ensemble relève d'un subtil équilibre budgétaire. Donc 15 millions d'euros ne peuvent pas être retirés du programme 105. Avis défavorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Même avis.

M. Jean-Yves Leconte.  - La belle ambition du président de la République se traduit par 300 000 élèves de plus dans le réseau français à l'étranger ; c'est démesuré par rapport aux moyens alloués : il faudrait notamment 15 000 enseignants pour absorber cet effort.

Depuis de nombreuses années, les frais de scolarité augmentent et l'AEFE impose un plafond d'emploi en baisse aux établissements même s'ils ont les moyens de recruter.

La direction générale du Trésor n'a pas avancé sur l'Anefe depuis un an. L'AEFE a besoin de moyens complémentaires.

M. Richard Yung.  - Je comprends l'objet de cet amendement. Il y a eu un hold-up de 33 millions d'euros en 2017, on nous en a rendu 30, il en manque encore. Mais l'ensemble des amendements socialistes retirent 50 millions d'euros, c'est pourquoi je m'abstiendrai.

M. Olivier Cadic.  - Je ne peux pas souscrire à cet amendement qui n'a pas la bonne approche. J'approuve complètement la volonté de doubler le nombre d'élèves d'ici 2030. Mais l'effort ne doit-il pas reposer sur l'AEFE ?

Les dix premières rémunérations de l'agence à l'étranger représentent 1,18 million d'euros - c'est sans doute le salaire de dix proviseurs. Il faut voir où va l'argent.

Si l'Anefe ne fonctionne pas, il sera très dur de tenir l'objectif.

L'amendement n°438 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-440 rectifié, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

 

10 000 000

 

10 000 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

 

 

 

 

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

10 000 000

 

 

10 000 000

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Yves Leconte.  - Le nombre de boursiers a baissé ; la part du fondateur n'est pas prise en charge par les bourses.

Le ministère ne nous donne pas les moyens de contrôler le budget que nous votons. Les indices de parité de pouvoir d'achat ne sont pas publiés. Ce n'est pas normal : il faudrait une transparence absolue sur les critères de détermination des bourses.

Depuis quelques années, nous sommes mobilisés en faveur de l'école inclusive, à l'étranger aussi. Cet amendement prévoit la prise en compte des 120 accompagnants personnalisés de l'AEFE dans le montant des bourses scolaires.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - La question revient chaque année. Si les bourses sont insuffisantes, la réponse réside dans plusieurs facteurs mais pas dans l'insuffisance d'un budget qui est sous-consommé : sur 105 millions d'euros, il reste 16 millions d'euros dans la soulte de l'AEFE.

C'est la première année qu'il y a 310 000 euros de crédits pour l'accompagnement des élèves.

Avis défavorable. On ne peut pas retirer 10 millions d'euros au programme 105 dans le respect de l'équilibre budgétaire.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Chaque année, invariablement, ce débat revient. Avis défavorable. Les crédits fixés n'ont pas été entièrement mobilisés. Comment pourrais-je proposer de les augmenter ?

Il y a une commission nationale des bourses. Sollicitez-la pour modifier les critères, qui varient selon les lieux.

Mme Jacky Deromedi.  - Toutes les bourses ne sont pas consommées car les critères sont les mêmes pour tout le monde, or on ne peut pas vivre partout avec les mêmes montants.

M. Olivier Cadic.  - Il est extraordinaire d'entendre le groupe socialiste critiquer un montant que le gouvernement socialiste a mis lui-même en place en 2014, et qui revient à partager la pénurie.

L'amendement n°440 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-374, présenté par Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

 

 8 000 000

 

8 000 000 

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

 

 

 

 

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

8 000 000

 

4 000 000

 

8 000 000

 

4 000 000

 

TOTAL

8 000 000

8 000 000

8 000 000

8 000 000

SOLDE

0

0

Mme Christine Prunaud.  - Dans le contexte actuel de l'OTAN, il faut flécher différemment les crédits. Le Gouvernement recourt de plus en plus fréquemment aux recrutements locaux ; nous arrivons à bout de cette logique.

Cet amendement redonne un peu de souffle et d'espoir au personnel.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - Avis défavorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°II-374 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-439, présenté par Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et républicain.

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Monsieur le ministre, connaissez-vous le film Groundhog Day, où le héros se lève tous les matins à la même heure pour revivre systématiquement la même journée, malgré tous ses efforts d'amélioration pour aller petit à petit vers la journée idéale ? J'ai l'impression de vivre cette situation, en vous présentant à nouveau cet amendement pour abonder de 5 millions d'euros les actions de l'AEFE.

L'enveloppe est constante, avec un nombre d'élèves en hausse, des bourses en baisse et des frais de scolarité qui augmentent : il y a de graves problèmes. Le nombre de boursiers à 100 % baisse. Il faut un équilibre entre Français et non Français. Il faut que la soulte non consommée des bourses soit conservée.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - Avis défavorable. Mais la répétition des amendements doit nous conduire à réfléchir à l'allocation des bourses, au poids des frais de scolarité sur les familles.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Je n'ai pas le talent de Bill Murray... Je rappellerai, sans perversité, mais non sans un plaisir malin (Sourires) que vous étiez au Quai d'Orsay, madame Conway-Mouret, quand ce jour s'est levé, c'est-à-dire quand les règles de répartition des bourses ont été modifiées ! (M. Olivier Cadic applaudit, tandis que M. Rachid Temal, rapporteur pour avis, désigne les travées du groupe LaREM, tout en indiquant qu'il n'était pas encore sénateur à l'époque.) Nous avons modifié les barèmes cette année et prévu un dispositif spécifique pour les élèves en situation de handicap.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Les règles ont été changées pour sortir de la logique d'une évaluation des besoins intervenant seulement après le vote du budget. Le nouveau système fonctionne bien : évaluation des besoins d'abord, fixation de l'enveloppe ensuite. Dans la réforme de 2013, il n'était pas question de figer le budget ! Les règles étaient bonnes ; c'est la stagnation de l'enveloppe que nous dénonçons.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Elle n'a pas été dépensée !

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Il faut abonder l'enveloppe, notamment pour mieux aider les boursiers à 100 %.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Une décision prise en 2013 n'a pas vocation à être éternelle... De plus, la non-consommation intégrale des crédits est un argument séduisant mais faux : il faut se demander pourquoi l'objectif poursuivi n'a pas été atteint et, en l'espèce, réfléchir aux critères d'attribution pour éviter les sous-consommations.

L'amendement n°II-439 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-442, présenté par Mme Conway-Mouret et les membres du groupe socialiste et républicain.

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

 10 000 000

 10 000 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

10 000 000

10 000 000

TOTAL

 10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

 0

 0

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Je salue, monsieur le ministre, votre attention à la sécurité de nos compatriotes. J'ai reconnu les points positifs de votre action ; notre désaccord porte sur les moyens financiers et humains qui vous sont alloués. Il n'est pas normal que vous ayez à vous battre pour les obtenir. Je note avec plaisir que la baisse des effectifs a été réduite de 10 à 5 %. Mais on ne peut concevoir que cela continue, les équipes sont sous pression.

Cet amendement compense le manque à gagner initial entraîné par la coupe brutale de l'été 2017. Vous avez abondé de 100 millions d'euros les fonds dédiés à la sécurité : dont acte.

Considérez cet amendement comme un amendement d'appel. Nos consulats sont mobilisés contre la menace terroriste, ainsi qu'à chaque crise sanitaire, économique ou climatique.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Un plan pluriannuel est en cours d'exécution sur la sécurité. Il se déroule sans accroc. Je ne comprends pas cet amendement, qui prélève sur les fonds du réseau diplomatique ! Le souci, c'est plutôt la pérennité financière des investissements. Avis défavorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - J'ai répondu par anticipation dans la discussion générale. J'ai obtenu 100 millions d'euros pour la sécurité des établissements dans les zones à risque. M. Temal m'a alerté sur la situation à Londres ; je m'y attellerai. Avis défavorable.

M. Richard Yung.  - L'amendement n°II-442 retire 10 millions d'euros à l'activité Visas... que l'amendement n°II-443 abonde ! Mon coeur balance.

M. Rachid Temal.  - Ce n'est pas ça. Je l'expliquerai.

M. Olivier Cadic.  - C'est surréaliste, d'autant que l'amendement n°II-437 abonde le budget pour soutenir le tourisme. Il y a un problème de cohérence dans ces amendements.

L'amendement n°II-442 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-437, présenté par Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

 

7 000 000

 

7 000 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

7 000 000

 

7 000 000

 

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

7 000 000

7 000 000

7 000 000

7 000 000

SOLDE

0

0

Mme Claudine Lepage.  - Cet amendement compense la baisse de dotations pour charge de service public des grands opérateurs de l'État, alors que le président de la République s'est engagé pour la promotion du français.

Certes, la dotation de 2 millions d'euros pour l'Institut français était exceptionnelle, mais une fois les projets lancés, il faut les mettre en oeuvre. C'est pourquoi cet amendement flèche 7 millions d'euros de crédits de paiement supplémentaires vers l'action « Coopération culturelle et promotion du français » et réduit de 7 millions d'euros les crédits de paiement de l'action « Soutien », au sein du programme « Action de la France en Europe et dans le monde ».

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Ne multiplions pas ces manipulations. Retrait ou avis défavorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - J'avais conclu sur ce point... Je n'ai manifestement pas été entendu. Une subvention exceptionnelle n'a pas vocation à être renouvelée. L'Institut français de Paris est un EPIC qui doit diversifier ses ressources. Quant à Atout France, ses dépenses d'intervention ne sont pas rognées puisque le 1,8 million d'euros en moins correspond à une économie immobilière. Le prix des visas Schengen, qui va augmenter en 2020, et le nombre croissant des demandes de visa assureront des recettes supplémentaires.

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Cet amendement reflète les débats de la commission de la culture sur les crédits de cette mission.

Cependant, la baisse des crédits de l'action culturelle est le fait du dernier quinquennat, à l'issue duquel l'Institut français était à l'os ! Au point que malgré la stabilisation, les problèmes demeurent.

Monsieur le ministre, nos établissements et instituts sont sans cesse incités à trouver des ressources propres ; celles-ci se raréfieront si l'on réduit de 60 à 40 % les déductions fiscales accordées aux entreprises mécènes, comme envisagé. Le serpent se mord la queue.

M. Roger Karoutchi.  - C'est vrai !

L'amendement n°II-437 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-441, présenté par Mme Conway-Mouret et les membres du groupe socialiste et républicain.

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

1 120 000

1 120 000

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

1 120 000

1 120 000

TOTAL

1 120 000

1 120 000

1 120 000

1 120 000

SOLDE

0

0

Mme Hélène Conway-Mouret.  - La culture a longtemps été une variable d'ajustement budgétaire. Je me félicite donc du renversement de cette tendance affirmé par le ministre.

Je voudrais pourtant reparler de la fermeture de quatre centres culturels, au Brésil, Canada, Costa Rica et en Norvège. Je me suis rendue à celui d'Oslo, que l'on ferme pour cause d'insuffisance de ressources propres. Or c'est faux : il dégage des recettes et reçoit 233 000 euros par an du gouvernement norvégien, ce qui dit l'importance accordée à notre présence. Un accord bilatéral de coopération a été signé en 2018. Or on ferme l'établissement et l'on propose aux professeurs d'ouvrir leurs propres écoles pour se recycler.

L'amendement dégage des crédits pour pérenniser ces quatre centres.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - Avis défavorable. L'amendement retire plus d'1 million d'euros au programme 151 dont les crédits baissent déjà de 0,3 %.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Nous voulons faire renoncer ces quatre établissements non pas à leur action, mais à leur statut d'établissement à autonomie financière (EAF). Ils n'ont pas les recettes propres qui justifieraient ce statut. Par conséquent leurs missions se poursuivront, mais sous la houlette des services de coopération culturelle de l'ambassade.

S'agissant d'Oslo, la décision pourrait être revue, en considération des recettes que l'établissement dégage.

Quant au Consulat général de Moncton, j'ai pris la décision de ne pas le fermer. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR ; M. Olivier Cadic applaudit également.)

M. Jean-Yves Leconte.  - Merci !

Le statut d'EAF, créé par la loi finances de 1974, permet de dégager des ressources propres et d'éviter que celles-ci remontent au budget global. Vous avez la charge de les défendre face à Bercy. Dans le centre de Brasilia, il y a des recettes de mécénat.

Le Centre de sciences humaines de Delhi est menacé de fusion avec le Service de coopération et d'action culturelle (SCAC). Il faut protéger cet établissement.

L'autonomie des établissements français de recherche est indispensable à leur crédibilité, elle conditionne l'obtention de crédits de recherche.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Merci, monsieur le ministre, de nous avoir écoutés et entendus. Nous avons eu deux bonnes nouvelles ce matin.

M. Olivier Cadic.  - La décision sur le consulat général de Moncton était espérée. Quant au centre d'Oslo, les cours de français y font le plein. La coopération culturelle et scientifique aurait été menacée par la fermeture annoncée, nouvelle qui avait causé un choc.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont.  - De retour d'une mission à Madagascar avec M. Vial, je vous alerte sur les difficultés de l'Institut Pasteur là-bas, en raison d'un retrait du ministère. Qu'en est-il, monsieur le ministre ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Je n'en avais pas connaissance. Je veillerai à ce que la question soit réglée avant mon déplacement dans ce pays en février.

L'amendement n°II-441 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-132 rectifié bis, présenté par Mme N. Goulet, MM. Cadic et Maurey, Mme Sollogoub et MM. Delcros et Mizzon.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

 

2 000 000

 

 

2 000 000

 

2 000 000

 

 

2 000 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

 

 

 

 

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

2 000 000

 

 

2 000 000

 

2 000 000

 

 

2 000 000

 

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

Mme Nathalie Goulet.  - Les ambassadeurs thématiques ont été instaurés sous la présidence de Jacques Chirac. Certains sont désignés en toute opacité ; le Parlement n'est pas informé de ce qu'ils coûtent et ne reçoit pas leurs rapports de mission. Mme O est la dernière en date.

Monsieur le ministre, un rapport de M. Yung a apporté un éclairage sur ces ambassadeurs « pro bono », dont les frais sont élevés, même si MM. Kouchner, Juppé et Ayrault m'ont dit le contraire. Je ne reviendrai pas sur le cas d'un ancien ministre qui a récemment défrayé la chronique...

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Nous avons obtenu des informations de l'administration. Il y a vingt et un ambassadeurs thématiques contre dix-neuf en 2018.

Leur nombre varie en fonction des sujets d'actualité. Il y a ainsi eu un ambassadeur thématique pour Ebola, un autre pour la présidence du G7,... Sur les vingt et un postes, deux ne sont pas rémunérés, trois ne font pas l'objet d'une rémunération complémentaire, par rapport aux fonctions exercées par ailleurs. Les seize restants sont rémunérés par le ministère, il s'agit pour moitié de diplomates de carrière, pour moitié de personnalités extérieures. Le coût global est de 1,96 million d'euros.

Madame Goulet, si vous voulez un avis de sagesse, il faut réduire la coupe d'1 million d'euros. Sinon, l'avis sera défavorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Ces ambassadeurs ne sont pas d'opportunité. Ce sont de vrais ambassadeurs. M. Pascal Teixeira, chargé des migrations, rencontre des chefs d'État et de Gouvernement, ce qui lui est rendu possible par ce statut. Tous sont nommés en Conseil des ministres. Et leurs fonctions prennent fin lorsque la mission est achevée. Tous sont fonctionnaires du Quai d'Orsay ou assimilés. Tous sont sous ma responsabilité. Nous ne sommes pas le seul pays à avoir ce système.

Tout est très clair. Avis défavorable.

Mme Nathalie Goulet.  - J'accepte de rectifier mon amendement pour ramener le montant déplacé à 1 million d'euros.

Il y a une ambassadrice pour le sport, Mme Fischer, qui n'est pas diplomate. Idem pour Mme O, Mme Seydoux ou M. Nilam.

Nous souhaitons des précisions sur leur mission.

M. le président.  - L'amendement rectifié sera le II-132 rectifié ter.

Amendement n°II-132 rectifié ter, présenté par Mme N. Goulet, MM. Cadic et Maurey, Mme Sollogoub et MM. Delcros et Mizzon.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

 

1 000 000

 

 

1 000 000

 

1 000 000

 

 

1 000 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

 

 

 

 

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

1 000 000

 

 

1 000 000

 

1 000 000

 

 

1 000 000

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

M. Richard Yung.  - La plus grande partie de ces ambassadeurs sont des diplomates, ils donc déjà rémunérés par le Quai d'Orsay. Toutefois, certains ne sont pas nommés en Conseil des ministres.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Alors ils ne sont pas des ambassadeurs mais des envoyés spéciaux. La coopération stratégique dans l'océan Indien est une priorité. Ceux qui ne sont pas diplomates ont des compétences autres. Mme Seydoux sur le sida, par exemple.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Sagesse.

L'amendement n°II-132 rectifié ter n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-112 rectifié, présenté par M. Cadic, Mmes Joissains, Sollogoub, Saint-Pé et Perrot et MM. Canevet, Détraigne et Le Nay.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

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Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

 

 

 

 

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

1 000 000

 

1 000 000

 

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

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0

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M. Olivier Cadic.  - Le programme FLAM (Franc?ais LAngue Maternelle) soutient des associations qui proposent a? des enfants français a? l'étranger, dans un cadre extrascolaire, des activités visant à conserver la pratique du français en tant que langue maternelle et le contact avec les cultures française et francophone.

Les associations peuvent ainsi bénéficier de subventions d'appui au fonctionnement, dès le démarrage de leur projet, ainsi que de subventions pour l'organisation de regroupements régionaux d'associations FLAM.

L'opérateur désigné par le ministère pour la gestion administrative du dispositif FLAM est l'AEFE.

Cet amendement prévoit un budget dédié, et en transfère la gestion a? l'Institut français, qui bénéficie d'un réseau bien plus développé et décentralisé que celui de l'AEFE. Celle-ci pourra se concentrer sur sa mission d'enseignement !

Il ne m'est pas possible de le faire par amendement, c'est pourquoi je déplace des crédits...

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - Avis défavorable. Il ne faut pas diminuer les crédits du programme 151.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Je ne vois pas l'intérêt de cet amendement. La gestion de FLAM par l'AEFE me paraît une bonne méthode.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture.  - M. Cadic veut que toute la jeunesse bénéficie d'un enseignement du français sous toutes ses formes. Je partage cette volonté, mais on ne peut pas déshabiller Pierre pour habiller Jacques, d'autant que nous nous sommes battus pour les crédits de l'AEFE.

Mme Claudine Lepage.  - Ce n'est pas une bonne idée. Il y a toutes les ressources pédagogiques au sein de l'AEFE. Les cours FLAM ont rarement lieu dans les instituts français.

M. Olivier Cadic.  - Le rôle de l'AEFE est de développer l'enseignement français à l'étranger, celui de l'Institut français est de développer l'enseignement du français.

Beaucoup d'enfants français à l'étranger ne parlent pas français alors que cela devrait être une priorité.

Madame Morin-Desailly, on n'enlève rien à l'AEFE qui a une enveloppe dédiée à FLAM. Celle-ci serait transférée à l'Institut français.

L'amendement n°II-112 rectifié n'est pas adopté.

Articles additionnels avant l'article 73 A

M. le président.  - Amendement n°II-443, présenté par M. Temal et les membres du groupe socialiste et républicain.

Avant l'article 73 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Sont attribués au ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, pour le recrutement des vacataires supplémentaires dans les services de visas et la promotion du tourisme, les produits résultant de l'instruction des demandes de visas, dans la limite de 5% des recettes de droit de visa de l'année précédente.

M. Rachid Temal, rapporteur pour avis.  - Cet amendement, en augmentant de 3 % à 5 % la part de la recette des droits de visa, renforce la capacité à agir du ministère de l'Europe et des affaires étrangères au service du tourisme.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - Le montant des droits de visa est ventilé à 75 % pour Atout France et 25 % pour l'instruction des visas. Le renforcement des moyens du ministère par une augmentation de la part des droits de visa qu'il perçoit a sa cohérence... Sagesse.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Je reconnais dans cet amendement une démarche de soutien au personnel consulaire et à Atout France. Mais l'augmentation du prix des visas Schengen et le nombre de visas en augmentation devraient dégager des recettes supplémentaires suffisantes. Avis défavorable.

M. Olivier Cadic.  - Si le ministère de l'Europe et des affaires étrangères était une entreprise, nous aurions des dépenses et des revenus issus des visas. Si 100 % des recettes revenaient au ministère, il pourrait se développer. Je pousserais de 5 % à 100 %. (Sourires)

M. Jean-Yves Leconte.  - Je m'inscris en totale contradiction avec la philosophie de M. Cadic. L'intérêt général se définit au Parlement. Ce n'est pas une question de tuyauterie. Aujourd'hui, les services de visas connaissent des difficultés. En Afrique de l'ouest, il y a un besoin de personnel pour surveiller certains prestataires extérieurs à qui l'on a délégué des tâches et qui prennent leurs aises.

Nous avons besoin de moyens complémentaires dynamiques.

Mme Nathalie Goulet.  - Je voudrais rebondir sur les problèmes de fraude documentaire massive, notamment en Afrique de l'ouest. Il faut peut-être envisager l'introduction de la biométrie ?

M. Jean-Yves Leconte.  - C'est déjà fait !

Mme Nathalie Goulet.  - Pas partout. Pour ce faire, il faut des moyens. L'appel à des prestataires extérieurs induit des possibilités supplémentaires de fraude. Des contrôles renforcés s'imposent.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Certains visas verront leur tarif augmenter au premier janvier 2020. Nous prenons des crédits sur cette marge.

L'amendement n°II-443 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°II-131 rectifié bis, présenté par Mme N. Goulet, MM. Houpert et Reichardt, Mme Bonfanti-Dossat, M. Yung, Mmes Troendlé, N. Delattre, Costes et Garriaud-Maylam, MM. Guerriau, Cadic et Maurey, Mme Sollogoub et MM. Delcros et Mizzon.

Avant l'article 73 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement adresse au Parlement un rapport faisant état de la liste des ambassadeurs thématiques.

Ce rapport précise en outre le coût de ces ambassadeurs en salaires, indemnités et frais de déplacement, ainsi que le nombre et le coût des personnels qui y sont attachés.

Ce rapport précise enfin le montant des charges matérielles, locaux, réception.

Mme Nathalie Goulet.  - La presse s'est emparée du cas d'un ancien ministre aujourd'hui ambassadeur thématique, créant une polémique. Je sais que le Sénat n'aime pas les rapports mais le ministre pourrait nous éclairer. On n'a pas accès à la moindre information sur ces postes, sur les missions, sur le coût.

M. Vincent Delahaye.  - Retrait ou avis défavorable à cette demande de rapport. Nous sommes plutôt favorables à l'enrichissement des documents budgétaires existants. Nous avons reçu du ministère des informations complémentaires sur ces ambassadeurs. Je vous les transmettrai.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Je suis tout à fait disposé à fournir les informations à la commission des finances, il n'y a rien de caché.

Si on remet un rapport sur les ambassadeurs thématiques, pourquoi pas un rapport sur les missions de tous les ambassadeurs ? Puis de tous les directeurs d'administration centrale ? On ne s'en sortirait pas. Avis défavorable.

Mme Nathalie Goulet.  - Enrichissons le rapport budgétaire l'année prochaine.

L'amendement n°II-131rectifié bis est retiré.

Article 73 A

M. le président.  - Amendement n°II-2, présenté par M. Delahaye, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Nous préférons un enrichissement des informations fournies.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Sagesse.

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Nous aurions besoin de davantage de documents sur la situation immobilière des instituts français. L'état de certains bâtiments est préoccupant, comme notre commission l'a constaté en visitant celui du Mexique.

Le contrôle peut également s'effectuer via les auditions lors de l'accréditation délivrée aux opérateurs. De plus, les instituts français arrivent en fin de contrat, nous aurons l'occasion d'évaluer leurs moyens et leurs objectifs.

L'article 2 est adopté.

L'article 73 A est supprimé.

La séance est suspendue à 13 heures.

présidence de M. Philippe Dallier, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.

AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT

M. Yvon Collin, rapporteur de la commission des finances .  - Le budget de l'aide publique au développement est-il vraiment à la hauteur de l'objectif fixé par le président de la République à 0,55 % du revenu national brut (RNB) d'ici 2022 ? Cette année est marquée par le volontarisme avec la réaffirmation, au G7 de Biarritz et au G20 au Japon, de notre attachement aux objectifs du développement durable et à la priorité donnée à l'Afrique.

La montée en charge des moyens budgétaires se fera surtout après 2020. Les crédits de paiement augmentent de 7 %, les autorisations d'engagement de 63 % en raison des reconstitutions triennales de la participation de la France à des fonds internationaux, déjà observées en 2014 et en 2017. Les produits des taxes affectées à l'aide publique au développement sont stables à 738 millions d'euros, notamment la taxe sur les billets d'avion, dont le surplus est versé à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), ce qui a suscité de vifs débats. L'indicateur de soutenabilité de la dette des pays auxquels la France a prêté à long terme se dégrade ; cela interroge sur notre stratégie.

Ce budget est encourageant. Notre aide publique au développement atteindra 0,43 % de RNB en 2020, soit 0,1 % de moins de la trajectoire fixée pour cette année. Le président Requier et moi voulons donc faire preuve d'une confiance prudente à l'égard du Gouvernement.

La commission des finances a néanmoins donné un avis défavorable, la transparence et l'efficacité étant au coeur de nos débats. Nous souhaitons une évaluation plus fine des actions de l'aide publique au développement ; à cet égard, nous espérons que la future loi de programmation saura y remédier. Pourriez-vous nous fournir des informations sur le comité d'évaluation que vous avez installé ? (M. Richard Yung applaudit.)

M. Jean-Claude Requier, rapporteur de la commission des finances .  - Nous regrettons de ne pas examiner le prochain budget après le projet de loi de programmation de l'aide publique au développement, maintes fois repoussé.

Malgré notre soutien prudent, nous avons quelques réserves. Il est dommage que la France continue, en matière d'aide publique au développement, de préférer le prêt au don, à la différence des États-Unis et du Royaume-Uni. Le Gouvernement s'est engagé à augmenter la part des dons, en y consacrant en 2019 un milliard d'euros de plus en autorisations d'engagement via l'Agence Française de développement (AFD). En 2020, cette ressource diminue de 594 millions d'euros en autorisations d'engagement et 35 millions en crédits de paiement.

Il faut revaloriser le rôle des ambassades dans ce domaine. La hausse de 36 millions d'euros des crédits du fonds de solidarité pour les projets innovants (FSPI) va dans le bon sens, mais la contraction de la masse salariale du réseau lui permettra-t-elle d'absorber cette charge supplémentaire ? À cet égard, comment envisagez-vous les relations entre AFD et ministère des Affaires étrangères ?

Les échanges en commission ont fait état d'un malaise concernant les bénéficiaires de notre aide publique au développement, notamment la Turquie. La commission des finances souhaite davantage de transparence et de cohérence. La coexistence de deux ministères de tutelle, d'acteurs étatiques et non étatiques entretient la confusion. (MM. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, et Éric Jeansannetas applaudissent.)

M. Jean-Pierre Vial, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères .  - (Applaudissement sur les travées du groupe Les Républicains) La commission des affaires étrangères partage nombre d'observations qui viennent d'être exprimées. Nous sommes heureux que le ministère des Affaires étrangères renforce le pilotage et la stratégie de l'aide publique au développement. Si nous pouvons nous féliciter de disposer d'un opérateur puissant pour notre action extérieure, encore faut-il que sa stratégie soit alignée sur celle définie par le Gouvernement et le Parlement.

Les Français sont généreux, mais ils souhaitent savoir à quoi servent leurs efforts ; il faut donc un dispositif qui permette au Parlement de co-définir le programme de la nouvelle instance d'évaluation et de demander au Gouvernement de s'exprimer devant nous sur les résultats obtenus.

La priorité donnée à l'Afrique et aux dons est satisfaisante, mais les crédits alloués en 2020 sont insuffisants au regard des besoins, notamment dans le domaine de l'énergie, comme à Madagascar où nous nous sommes rendus ou au Sahel, où l'électrification ne dépasse pas 30 %.

Le retour de l'éducation au premier plan est une bonne nouvelle ; en revanche, nous pourrions faire plus pour l'agriculture au regard de notre expertise.

L'objectif de 0,55 % du RNB ne sera-t-il atteint que par des annulations de dettes ? Ce ne serait pas à la hauteur de nos ambitions.

Il est dommage que la coopération décentralisée se trouve contrainte dans la limite des 1,2 % d'augmentation des budgets de fonctionnement. Notre commission a décidé d'un avis favorable à l'adoption de ces crédits, compte tenu des engagements pris et dans l'attente de la loi d'orientation annoncée.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères .  - Je souhaite revenir sur la situation d'Expertise France, outil d'influence important à l'heure où la France risque de passer au second plan en Afrique derrière l'Allemagne et le Royaume-Uni. Une subvention d'équilibre était prévue dans le projet de loi de finances pour 2020. Mais il faudrait un socle de ressources solides. Son intégration au groupe AFD n'est pas une solution miracle. Quelles pistes d'avenir proposez-vous pour ces opérateurs ? Nous serons attentifs au contrat d'objectifs et de moyens d'Expertise France.

Le rattachement de la future commission indépendante d'évaluation à la Cour des Comptes nous inquiète. Le modèle britannique d'une commission séparée du National audit office est plus pertinent. Nous avons pu l'observer in situ. Seule une commission spécialisée irait au-delà du simple value for money.

Le budget donne une large part des crédits aux fonds multilatéraux. Cela est normal, mais il ne faudrait pas que cela entre en contradiction avec nos actions bilatérales, notamment au Sahel.

Le Fonds mondial n'agit pas assez pour renforcer les systèmes de santé africains. Comme tous les autres groupes, nous attendons avec impatience la loi de programmation. Cela nous amène à émettre de fortes réserves sur ce budget.

M. le président.  - Veuillez conclure.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - Mais comme il est en hausse, nous le voterons, mais, pour certains d'entre nous, du bout des lèvres.

M. Jacques Le Nay .  - La mission « Aide publique au développement » connaît une hausse substantielle de ses crédits que nous saluons, bien que la trajectoire s'éloigne des objectifs fixés par le président de la République, sans parler de l'objectif des Nations-Unies de 0,7 % du RNB.

Le déséquilibre demeure entre les prêts et les dons, ce qui entraîne un écart sensible entre les pays auprès desquels nous intervenons : les pays les plus « profitables » sont favorisés.

L'augmentation des crédits de dons aurait-elle été difficile à absorber pour l'AFD ?

Les autorisations d'engagement augmentent considérablement compte tenu de la participation française à plusieurs dispositifs internationaux. Cela est une bonne chose, mais à condition que cela ne conduise pas à limiter nos actions bilatérales.

L'aide publique au développement de la France doit en effet être pleinement intégrée dans sa politique étrangère -  M. Philippe Bonnecarrère l'a dit lors du débat sur les migrations. Plusieurs régions sont en proie à une situation qui risque de nuire à la France : il faut agir sans attendre.

J'ai participé récemment à Madagascar à un déplacement interparlementaire inédit. Nous y avons observé les différentes actions menées par l'AFD. Les acteurs nous ont dit qu'ils avaient besoin de visibilité à long terme. Comme Jean-Pierre Vial et Marie-Françoise Perol-Dumont, nous aimerions connaître l'agenda de l'examen du projet de loi d'orientation promis. Ce sera l'occasion de redéfinir la stratégie de notre AFD.

Le groupe UC votera majoritairement les crédits.

M. Richard Yung .  - (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM) Le budget marque une nouvelle étape de la montée en puissance de notre aide publique au développement, dans le respect de la trajectoire fixée en février 2018. L'AFD représentera 0,46 % de notre RNB en 2020 - par rapport à la cible de 0,47, c'est l'épaisseur du trait.

La taxe sur les transactions financières - 1,6 milliard d'euros - et celle sur les billets d'avion - 238 millions d'euros - pèsent de moins en moins sur les recettes de l'aide publique au développement, davantage budgétisés.

Ce budget est en phase avec les conclusions du dernier Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (Cicid) en renforçant la part des dons par rapport aux prêts. La hausse des crédits du fonds pour les projets innovants permet de favoriser les petits projets des ambassades plutôt que la grosse machinerie...

Le fonds de solidarité pour le développement est recentré sur le financement de quelques fonds multilatéraux dont le fonds vert pour le climat. Je me félicite du rééquilibrage au profit de l'aide bilatérale.

Un effort budgétaire est fourni en faveur de l'aide humanitaire et de la coopération décentralisée. La contribution française au fonds vert pour le climat, majoritairement sous forme de dons, est multipliée par deux. D'aucuns se sont inquiétés de la baisse des crédits de l'AFD pour les dons. Je ne partage pas leurs craintes.

Nous attendons effectivement le projet de loi d'orientation et souhaitons qu'il s'inspire, pour l'évaluation, sur le modèle britannique. Le comité d'évaluation devrait notamment se pencher sur le lien entre aide publique au développement et flux migratoires. Bien sûr, la solution réside dans le développement des peuples d'origine, mais cela prend du temps.

Pourriez-vous nous en dire plus sur les négociations du cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027 ? Une nouvelle architecture financière sera-t-elle mise en place ? La France est au rendez-vous des défis du développement.

Le groupe LaREM votera les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur le banc de la commission)

Mme Christine Prunaud .  - L'an dernier, nous attendions beaucoup d'une loi de programmation de l'aide publique au développement. Cette loi n'existe toujours pas ; elle aurait pourtant permis de définir une trajectoire. Le seul objectif martelé par le président de la République est de lui consacrer 0,55 % du RNB d'ici 2022.

Les crédits sont en hausse de 210 millions d'euros. Cependant, comment croire que la trajectoire nous permettra d'atteindre l'objectif défini ? J'ose espérer que des jeux d'écritures ne seront pas utilisés pour gonfler artificiellement le chiffre.

Il est urgent d'augmenter massivement les crédits inscrits et de réformer la taxation affectée à l'aide publique au développement : si tout le produit de la taxe sur les transactions financières lui était intégralement consacré, cela ajouterait 800 millions d'euros à son budget.

L'aide, sous forme de prêts, va pour l'instant plutôt vers les pays qui présentent de sérieuses garanties et pas forcément ceux qui en ont le plus besoin. Le financement de la retenue des migrants par la Turquie dans des conditions déplorables n'est pas selon moi de l'aide au développement.

Le ruissellement cher à notre Gouvernement creuse des inégalités en France. Comment n'en irait-il pas de même dans les pays en développement ?

Nous ne voterons pas ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. Jean-Louis Lagourgue .  - L'APD est-elle une affaire philanthropique ? Bien plus que cela, elle participe à une forme de solidarité entre les pays mais sert aussi à diffuser nos valeurs et à servir nos intérêts. Si l'on ne comprend pas cela, on ne voit dans cette aide que de l'argent jeté par les fenêtres. Elle a pourtant des retombées pas seulement économiques, mais aussi en matière de construction de la paix.

Nous saluons l'augmentation de 6 % des crédits de la mission qui fait passer notre aide publique au développement de 0,43 à 0,46 % du RNB, ce qui nous rapproche de l'objectif des 0,55 % fixé par le président de la République.

Nous regrettons cependant que l'objectif antérieur de 0,7 % ait été abandonné. Le bénéfice de l'APD n'est pas unilatéral. Le pays qui donne en tire aussi avantage, comme l'a bien compris le Royaume-Uni, qui y consacre 0,7 % de son RNB, prouvant ainsi que l'objectif est atteignable.

La Chine en fait autant avec les nouvelles routes de la soie et l'Inde développe le projet concurrent des routes de la liberté. L'aide au développement façonne l'avenir. Si le multilatéralisme n'est pas à fuir, le bilatéralisme est à privilégier.

La prise de décision ne doit pas être éclatée entre deux ministères et un opérateur, sans parler des collectivités et autres fondations privées.

Nous nous réjouissons de la priorité donnée à l'Afrique à l'heure des grands défis sécuritaires. L'Afrique va surprendre le monde et nous souhaitons que la France y soit présente.

Le groupe Les Indépendants votera ces crédits. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et LaREM)

M. Christian Cambon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La politique d'APD est un des piliers de l'approche globale de résolution des crises, forte de trois piliers : diplomatie, défense, développement.

C'est un instrument de stabilité de notre politique étrangère. Monsieur le ministre, nous avons besoin que vous recadriez le sens de cette action face au triple déficit de pilotage politique, de lisibilité et d'évaluation.

Nous avons délégué notre stratégie d'aide au développement à l'Agence française d'aide au développement, comme si celle-ci pouvait n'être que technique. Nous souhaitons qu'elle soit même intégrée à l'action des ambassades dans le cadre du Conseil local du développement qui permettra aux ambassadeurs d'être les chefs d'orchestre en la matière.

Nous nous réjouissons que les deux tiers de la croissance des crédits aillent au bilatéral. Mais est-il cohérent de prévoir une augmentation de 20 % de notre participation au fonds mondial de solidarité et de baisser de 600 millions d'euros notre aide aux pays africains ?

La liste des bénéficiaires est troublante, avec la Turquie et le Brésil dans le quatuor de tête devant le Mali à la dix-neuvième place, par exemple. Je sais que vous souhaitez établir un pilotage restreint. L'évaluation est trop lacunaire et dispersée. C'est notre talon d'Achille.

Quels résultats pour les millions d'euros perdus dans les sables du bassin du fleuve Niger ? La commission indépendante britannique, faisant appel à une expertise privée, est très efficace. Nous ne sommes pas convaincus par le projet d'une commission d'évaluation rattachée à la Cour des comptes.

Monsieur le ministre, nous voulons de l'audace. La commission des affaires étrangères a donné un avis favorable à l'adoption des crédits ; celle des finances un avis défavorable. Les avis sont très contrastés au sein du groupe. Monsieur le ministre, nous attendons vos explications.

Mme Hélène Conway-Mouret .  - Je parlerai au nom de M. Vallini.

Le projet de loi de finances prévoit une hausse de 220 millions d'euros sur cette mission, insuffisante si l'on veut atteindre l'objectif de 0,55 % du RNB en 2022.

La hausse des autorisations d'engagement ouverte en 2019 doit être poursuivie en 2020 et doublée d'une augmentation des crédits de paiement.

La part pilotable augmente, mais ne permet pas une accélération de la mise en oeuvre des projets. Il est à craindre que ces crédits supplémentaires aillent plutôt aux projets non pilotables, comme l'accueil des étudiants étrangers.

En dépit de la priorité affichée à l'égalité entre les femmes et les hommes, seule la moitié de son aide publique au développement la prend en compte. Seulement 20 % des crédits iront aux projets bilatéraux. Les liens avec la politique migratoire font peser un risque de dévoiement de l'objectif principal, à savoir la lutte contre la pauvreté.

Comment ne pas s'interroger sur la confirmation de financements à certains pays comme le Brésil ou la Turquie alors que le président de la République vient d'annoncer qu'il souhaitait concentrer notre aide sur l'Afrique.

Quant à l'évaluation, aucun crédit n'est affecté à la nouvelle commission qui devrait voir le jour en 2020. Il est urgent de préciser quels seront vos choix en la matière en attendant la loi de programmation.

En 2015, le Royaume-Uni a adopté une loi fixant son aide publique au développement à 0,7 % de son RNB et a créé une commission d'évaluation indépendante. Faisons de même.

Nous voterons les crédits de la mission. (M. Richard Yung applaudit ; applaudissements également sur le banc de la commission)

M. Éric Jeansannetas .  - Si l'extrême pauvreté a reculé ces trente dernières années, les bouleversements récents nous invitent à la vigilance. De nouvelles fractures s'ouvrent sous l'effet du réchauffement climatique extrême, de nouvelles migrations. Ce qui se passe là-bas n'est pas sans conséquence ici.

La France est le cinquième contributeur en aide publique au développement. Les annonces du G7 de Biarritz devraient remobiliser les États. Je salue l'ambition du président de la République de porter l'aide publique au développement à 0,55 % du RNB d'ici 2022. Je me réjouis que cette mission s'inscrive dans une trajectoire volontaire. Depuis 2016, un cercle vertueux s'est enclenché pour que la France remplisse ses engagements vis-à-vis de la communauté internationale.

Les crédits de prêts de l'AFD augmenteront en 2020 de 1,1 milliard d'euros en AE mais les crédits de dons baisseront de 600 millions. Ce déséquilibre entre prêts et dons exclut les pays les plus fragiles puisque ce sont surtout les grands pays émergents qui sont soutenus par les prêts. Il est urgent de redéfinir nos priorités et nous attendons avec impatience la prochaine loi de programmation sur la solidarité nationale.

Quelques pistes tirées des enseignements du dernier rapport de la conférence des Nations-Unies sur le commerce et le développement (Cnuced) : l'aide extérieure des contributions pèche par manque de ciblage. Est-il normal, en effet, que 10 pays sur 47 captent 70 % de l'aide mondiale, parmi lesquels l'Angola qui va passer au statut de pays en développement en 2021 ? L'Afrique doit évidemment être prioritaire. Mais l'aide serait aussi trop axée sur les centres urbains dans des pays à majorité rurale, et pas suffisamment sur les infrastructures économiques qui créent les emplois. Il serait souhaitable d'évaluer la manière dont notre aide est canalisée sur place, afin de ne pas se retrouver à financer de grands groupes multinationaux, comme des cimentiers par exemple. La remontée en puissance de l'APD est indispensable, à condition de revoir ses orientations.

Quelque 79 % des Français adhèrent à cette politique. « La solidarité pour le développement est la clé de notre avenir commun et une nécessité pour chacun », disait François Mitterrand devant les Nations-Unies le 1er septembre 1981.

Le groupe RDSE votera les crédits de la mission. (Applaudissements sur le banc de la commission ; M. Julien Bargeton applaudit également.)

M. Philippe Mouiller .  - L'examen du projet de loi de finances est un moment de vérité comptable et politique : les crédits sont-ils à la hauteur de notre ambition ?

L'aide publique au développement améliore la qualité de vie des habitants, c'est un outil de solidarité, mais aussi un outil diplomatique. Les choix stratégiques sont parfois étonnants. La Chine est ainsi aidée par une banque publique française alors même qu'elle détient une partie de la dette américaine. Et que dire de la Turquie d'Erdo?an, dont la politique en Syrie fait ressurgir l'État islamique, notre ennemi ? Le fléchage de l'aide est en question.

Un retour à un pilotage politique par le Gouvernement et le Parlement est souhaitable. L'AFD dépend de Bercy, mais sa stratégie doit être impérativement articulée à celle du ministère des Affaires étrangères.

L'Afrique a du mal à gérer la croissance démographique exponentielle. C'est un défi auquel nous devons faire face.

Quant à l'évaluation, elle est indispensable. Nous devons savoir si chaque euro dépensé l'a été à bon escient. Il faut aussi mettre fin à une très mauvaise habitude de Bercy, à savoir le détournement de taxes comme la taxe de solidarité conçue initialement pour alimenter les missions de l'AFD.

Notre groupe votera contre les crédits pour donner un signal sur cette situation. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - L'aide publique au développement est un instrument majeur de notre politique étrangère. Elle nous permet d'agir de façon concrète sur le terrain pour inscrire dans la durée nos efforts de gestion des crises, pour lutter contre les inégalités mondiales, pour protéger les biens communs que sont la planète, la culture et la santé. Cette mission budgétaire réunit le programme 110, intitulé « Aide économique et financière au développement », géré par le ministère de l'économie et des finances, qui bénéficie de 1,14 milliard d'euros de crédits de paiement, et le programme 209, « Solidarité à l'égard des pays en développement », qui revient au ministère des Affaires étrangères.

J'ai fixé trois grandes priorités pour le programme 209. La première porte l'aide publique au développement à 0,55 % du RNB à l'horizon 2022. Un projet de loi de programmation vous sera présenté prochainement.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères.  - C'est sûr ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Oui, il existe, je l'ai vu ! (Sourires) Il sera présenté au conseil des ministres au début de l'année prochaine, puis soumis au Parlement. Vous étiez à Dakar, monsieur le président Cambon, où vous avez entendu le Premier ministre confirmer que cet engagement sera tenu.

Après que l'aide publique au développement fut descendue à son plus bas niveau il y a quelques années, soit 8 milliards d'euros, nous entamons une remontada, puisque chaque année nous progressons, selon les normes de l'OCDE. La trajectoire est positive. La hausse de près de 7 % en 2020 nous portera à 0,46 % du RNB. Les engagements sont tenus, monsieur Mouiller.

Monsieur Lagourgue, nous n'abandonnons pas pour autant l'objectif de 0,7 % de RNB. L'apurement des recettes à la française, c'est la transformation de dettes en dons...

M. Roger Karoutchi.  - Eh oui !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - ... donc cela reste dans le périmètre de l'aide publique au développement.

Ma deuxième priorité est de mettre en oeuvre les priorités définies par le Cicid. Nous avons des priorités géographiques claires et respectées, avec une liste de 18 pays d'Afrique, plus Haïti. Près de 70 % de l'aide publique au développement ira à cette liste.

Ma troisième priorité est le rééquilibrage des acteurs, des bénéficiaires et des instruments de l'aide publique au développement.

Les FSPI, madame Pérol-Dumont, atteindront 60 millions d'euros.

L'aide humanitaire bénéficiera de 100 millions d'euros supplémentaires. C'est un niveau sans précédent. Les moyens de l'AFD augmenteront d'un milliard d'euros en autorisations d'engagement.

Je rappelle que les normes de calcul de l'aide publique au développement se fondent sur les crédits de paiement et non sur les autorisations d'engagement. Nous allons augmenter le soutien à la société civile, qui dépassera le seuil de 100 millions d'euros, pour les ONG, mis en oeuvre par l'AFD et nous allons renforcer les crédits de la coopération décentralisée en visant un doublement des crédits affectés.

Je précise, monsieur Vial, que la décision de ne pas tenir compte des financements dits extérieurs, de l'État ou de l'Union européenne, va être prise. Une offensive forte avait été menée par le Sénat et les représentants des collectivités territoriales.

M. Cambon a évoqué la nécessité de renforcer le pilotage politique, la lisibilité et l'évaluation de l'aide publique au développement.

La rénovation de notre politique d'aide publique au développement passe obligatoirement, en effet, par un pilotage politique renforcé et un plus grand contrôle de l'État sur ces opérateurs, AFD au premier chef.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères.  - Très bien !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - En amont, donc l'an n-1, les services du ministère des Affaires étrangères réalisent à ma demande un cadrage des secteurs prioritaires, en pleine cohérence avec le Cicid, ainsi qu'une programmation géographique, associant les postes, avec objectifs et critères d'emploi, pour les dons et les prêts. Pas de chèque en blanc, donc, pour l'AFD !

C'est donc l'État qui pilote, sous mon autorité, en pleine cohérence avec notre politique extérieure. Un comité de pilotage restreint se tiendra à mon niveau, avec le directeur général de l'AFD, l'un de ses collaborateurs et l'un des miens, tous les deux mois.

Ce pilotage doit aussi se faire sur le terrain. L'ambassadeur doit être le seul pilote de l'équipe France pour l'aide publique au développement : je renforce son rôle. Il présidera un conseil local du développement pour orienter tous les efforts de l'État, de l'AFD et des ONG françaises sur un même territoire...

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Très bien !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Tous ces éléments figureront dans la loi de programmation. Nous devons aussi accorder plus de moyens à l'évaluation. Une commission d'évaluation indépendante sera mise en place sur le modèle de ce qui existe dans d'autres pays européens. (Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, rapporteure pour avis, approuve.)

Ce ne sera pas une filiale de la Cour des comptes. La loi le prévoira. J'espère, monsieur Cambon, que nous serons ainsi plus clairs et cohérents dans notre politique. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et UC et sur le banc de la commission)

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères.  - Je vous ai écouté avec attention.

Examen des crédits de la mission, de l'article rattaché et du compte spécial

Article 38

M. le président.  - Amendement n°II-376, présenté par Mme Prunaud et M. P. Laurent.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

150 000 000

150 000 000

Solidarité à l'égard des pays en développement

dont titre 2

150 000 000

150 000 000

TOTAL

150 000 000

150 000 000

150 000 000

150 000 000

SOLDE

0

0

Mme Christine Prunaud.  - Le groupe communiste est très critique sur l'usage des prêts comme principal outil de l'aide publique au développement. Les principaux bénéficiaires sont l'Indonésie, le Maroc, l'Indonésie ou encore le Cameroun. Or ils sont solvables. Dans les pays les plus pauvres, la dette a explosé. En Éthiopie, c'est une augmentation de plus de 800 % ! La dépendance de ces pays vis-à-vis des créanciers et des grands groupes industriels augmente. Ainsi, alors que la part de la dette vis-à-vis d'entreprises privées s'établissait à 17 % en 2009, elle atteint désormais 41 %.

M. le président.  - Amendement n°II-445, présenté par Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et républicain.

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

100 000 000

100 000 000

Solidarité à l'égard des pays en développement

dont titre 2

100 000 000

100 000 000

 

TOTAL

100 000 000

100 000 000

100 000 000

100 000 000

SOLDE

 0

 0

Mme Claudine Lepage.  - Nous nous réjouissons de l'augmentation moyenne de près de 3 milliards d'euros des crédits d'engagement de la mission « Aide publique au développement » par rapport au projet de loi de finances pour 2019, mais elle va essentiellement à des prêts.

L'action de l'aide publique au développement doit être fondée sur la solidarité et non la rentabilité des investissements.

M. Yvon Collin, rapporteur.  - L'objectif de rééquilibrage de l'aide au profit des pays les moins favorisés, porté par l'amendement n°II-376, est louable, mais retrait ou avis défavorable car la commission des finances a proposé le rejet des crédits de la mission.

Même avis pour l'amendement n°II-445 qui augmente de 100 millions d'euros les crédits pour les projets menés par l'AFD, pour les mêmes raisons.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Avis défavorable aux deux amendements. Il y a une inversion dans la politique en faveur du développement entre dons et prêts. Les chiffres en attestent. C'est tout à fait cohérent avec les objectifs du Cicid.

Des prêts aident à financer des projets d'infrastructures qui ne peuvent pas relever des seuls dons. Certains prêts dépendent du programme 110 ; ce sont des prêts concessionnels, que je souhaite réorienter, sur lesquels il y a une contribution du contribuable. Monsieur Mouiller, vous parlez des prêts à la Chine et à la Turquie. Ceux-là, qui dépendent de l'AFD, ne coûtent rien au contribuable. L'AFD ayant une qualification AAA au niveau international, peut faire des prêts à certains pays, ils ne relèvent ni du programme 110 ni du programme 209. Ces prêts extrabudgétaires sont centrés sur la lutte contre le réchauffement climatique et les inégalités.

M. Roger Karoutchi.  - Je ne voterai pas ces deux amendements. Je ne suis pas admiratif de l'AFD, mais extrêmement critique. Elle dérape, elle dérive. Faute de pilotage politique que vous nous promettez, elle se prend pour un État dans l'État.

L'APD avait un côté mythique - Éric Jeansennetas, citant François Mitterrand, le rappelait. Désormais elle octroie des prêts à la Chine. Est-ce à nous, via l'APD, de le faire ? Idem pour la gestion des migrants par la Turquie d'Erdogan, qui nous fait du chantage et nous renvoie des djihadistes.

Nous attendons beaucoup de l'aide à l'Afrique et à la francophonie. L'AFD refuse de financer France Media Monde. Pourquoi ? C'est absurde.

Le groupe Les Républicains verra s'il change sa position en fonction des engagements du ministère sur le pilotage politique de l'AFD.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, rapporteure pour avis.  - Je salue le travail de l'AFD mais le groupe socialiste attend très impatiemment la loi de programmation qui assurera un pilotage politique. Il y a urgence.

Nous voterons bien sûr notre amendement, ainsi que celui du groupe communiste qui nous conforte dans notre obligation.

M. Jérôme Bascher.  - Je rejoins M. Karoutchi, qui a été extrêmement dur en commission des finances sur le dysfonctionnement de la gouvernance de l'AFD. Elle est un formidable outil de financement de projets, mais il ne peut pas y avoir de sous-ministre, non nommé par le Premier ministre, qui dit partout qu'il distribue de l'argent. J'ai pourtant un grand respect pour les hauts fonctionnaires, je serai mal placé pour dire le contraire, mais nous voyageons à l'étranger, et ce que nous voyons, ainsi que les retours que nous avons, ce n'est plus acceptable.

M. Alain Joyandet.  - Les rapports entre l'AFD et le Gouvernement ont toujours été compliqués. L'AFD a toujours voulu voler de ses propres ailes. Mais elle se soumet au Gouvernement lorsqu'il a une vraie volonté politique. Organiquement, cela ne pose pas de problème. On ne peut pas reprocher à l'AFD d'être autonome, si elle ne reçoit pas de directive d'un ministre indisponible. Quand le politique démissionne, l'administration est prompte à prendre le pouvoir.

À titre personnel, je crois que le prêt pour le développement qu'il soit souverain ou non, représente un levier souvent beaucoup plus intéressant que la subvention car il y a des retours sur investissement.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Je me réjouis qu'une de nos propositions, figurant dans un rapport commis il y a quatre ans, avec Henri de Raincourt, qu'un ministre soit chargé du développement, soit entendue. Même si cela prend du temps, c'est l'un des intérêts de notre travail sénatorial.

Le pilotage local de l'équipe France sous l'autorité de l'ambassadeur est une excellente initiative.

Au-delà des grandes infrastructures, nombre de petits projets rapidement visibles témoignent de l'engagement de la France.

M. Richard Yung.  - Je visite toujours le bureau de l'AFD en Afrique lors de mes déplacements, principalement en Afrique. J'ai toujours eu des remontées positives sur son action de la part des entreprises et des autorités locales. Le problème, c'est celui de la double tutelle, des finances et des affaires étrangères. Nous ne le réglerons pas aujourd'hui.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Je me félicite de ce débat. Au moment où l'on renforce très sensiblement les moyens de l'AFD et où il y a une telle attente de France, pour l'aide au développement, il fallait se dire les choses. Mes engagements ne sont pas d'opportunité. Le projet de loi arrivera début 2020. Vous y trouverez mes engagements sur le pilotage et l'évaluation de l'AFD.

Il y a des liens permanents entre AFD et diplomatie. Je crois donc au rôle de tutelle du ministère des Affaires étrangères sur l'AFD, monsieur Joyandet. Je rencontre toujours les acteurs de l'AFD sur le terrain et demande à voir les réalisations concrètes.

M. Alain Joyandet.  - Nous le faisons tous.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Soit, eh bien continuons, pour faire en sorte que les délais de réalisation soient plus courts, et la réactivité plus forte, Au Sahel, c'est encore plus important qu'ailleurs : l'Alliance Sahel sera le laboratoire de cette nouvelle donne, qui pourra être jugée sur pièces. Je vous demande de juger sur les actes ; ma détermination est inébranlable.

L'amendement n°II-376 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°II-445.

M. le président.  - Amendement n°II-377, présenté par Mme Prunaud et M. P. Laurent.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

15 000 000

15 000 000

Solidarité à l'égard des pays en développement

dont titre 2

15 000 000

15 000 000

TOTAL

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

SOLDE

0

0

Mme Christine Prunaud.  - Les ONG représentent 15 % de l'aide publique au sein de l'OCDE. C'est cinq fois moins pour la France qui a fait un choix inverse à celui de l'Allemagne. Les financements de l'AFD vers le secteur privé ont augmenté de 14 % à 19 % en trois ans. Cela ne nous semble pas aller dans le bon sens.

M. le président.  - Amendement n°II-444, présenté par Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et républicain.

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

10 000 000

10 000 000

Solidarité à l'égard des pays en développement

dont titre 2

10 000 000

10 000 000

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000  000

10  000 000

SOLDE

0

0

Mme Claudine Lepage.  - Le président de la République a développé des engagements ambitieux pour l'aide publique au développement. Les ONG en sont un acteur à part entière, mais la part d'aide publique au développement qui transite par elles ne représente que 6,7 % ; contre 16 % en moyenne dans les autres pays de l'OCDE. Cet amendement abonde cette part de 10 millions d'euros.

M. Jean-Claude Requier, rapporteur.  - Je demande le retrait de l'amendement n°II-377, par cohérence avec la position de la commission des finances. Même avis sur l'amendement n°II-444.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Les auteurs de ces amendements savent que je souhaite doubler d'ici la fin du quinquennat la part des crédits passant par les ONG. Le budget pour 2020 prouve ma détermination : la trajectoire est positive. Avis défavorable.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, rapporteure pour avis.  - Encore une fois, nos amendements vont dans le même sens. Nos collègues sénateurs des Français de l'étranger rendent souvent compte des réalisations de l'AFD sur le terrain. Nous nous sommes rendus à Madagascar où l'AFD a oeuvré avec les ONG et la société civile. Nous maintiendrons notre amendement et voterons l'amendement n°II-377 : il faut renforcer le rôle des ONG et de la société civile, auprès de l'AFD et des ambassades, dans les projets d'APD.

Mme Christine Prunaud.  - J'ai entendu les engagements du ministre. Allez-vous revoir les critères d'aide au regard de la position de la Turquie sur les migrants ?

L'amendement n°II-377 est retiré.

L'amendement n°II-444 n'est pas adopté.

À la demande du groupe Les Républicains, les crédits de la mission « Aide publique au développement » sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°47 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 201
Pour l'adoption 183
Contre   18

Les crédits de la mission « Aide publique au développement » sont adoptés.

Article 73 D

M. le président.  - Amendement n°II-4, présenté par M. Requier, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

M. Jean-Claude Requier, rapporteur.  - L'article 73 D prévoit la remise au Parlement d'un rapport annuel sur l'activité du FMI et de la Banque mondiale, notamment sur les actions entreprises pour améliorer la situation économique des États qui font appel à leurs concours, sur la position de la France au sein de ces organisations, et sur les opérations financières réalisées entre ces dernières et la France.

Plutôt qu'une nouvelle demande de rapport annuel, la commission des finances considère qu'il revient au Gouvernement de remettre au Parlement, le rapport de synthèse de la politique de développement et de solidarité, tel que le prévoit déjà la loi d'orientation et de programmation de 2014.

Cet amendement supprime l'article.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Le Gouvernement fait confiance à la sagesse du Sénat.

L'amendement n°II-4 est adopté.

L'article 73 D est ainsi supprimé.

Les crédits du compte spécial sont adoptés.

La séance est suspendue quelques instants.

SANTÉ

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Le projet de loi de finances pour 2020 interroge : existe-t-il encore un budget Santé ? La mission « Santé » se résume au programme 183, consacré à 80 % au financement de l'aide médicale d'État (AME).

Les crédits du programme 204 ont reculé de 69 % depuis 2013, tandis que ceux du programme 183 ont augmenté de 27 %.

Je m'interroge également sur les mesures de périmètre, conduisant à des transferts des opérateurs de l'État vers la sécurité sociale. Cela ne pourrait se justifier que si l'on clarifie les compétences de l'État par rapport à la sécurité sociale.

Les missions assignées à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et à l'Agence nationale de santé publique (ANSP) ne relèvent pas, de prime abord, d'une logique contributive.

Le programme dédié à la prévention - lutte contre le tabagisme, vaccination contre la grippe, le dépistage du cancer colorectal - n'apporte pas les résultats escomptés, comme le montrent les indicateurs. Je m'interroge sur l'écart entre les ambitions du Gouvernement et la trajectoire budgétaire. Les dossiers de la Dépakine et de Wallis-et-Futuna, dans le programme 204, font cependant état d'un effort de transparence et de sincérité budgétaire.

Le programme 183 ne semble pas répondre aux enjeux de l'AME, dont leurs bénéficiaires ont cru de 25 % depuis 2012. Cette sous-budgétisation pèsera sur la branche maladie.

Des mesures structurelles sur l'accès à l'AME et sur le panier de soins sont nécessaires. Je vous proposerai des amendements à cet effet. Le Gouvernement et l'Assemblée nationale semblent avoir pris conscience du problème. Nous nous sentons davantage écoutés sur les dérives de cette AME que nous estimons sans limite.

Nous devons trouver un équilibre entre l'humanisme et la rigueur budgétaire...

M. Alain Milon.  - Très bien !

La commission des finances a donné un avis favorable aux crédits de la mission. (Bravos et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales .  - La mission « Santé » se trouve confrontée à une véritable crise existentielle : le basculement de la plupart des agences vers la sécurité sociale, Institut national contre le cancer (INCa) mis à part, interroge sur l'avenir du programme 204.

En 2020, 919 millions d'euros seront consacrés à l'AME sur le programme 183. Ces crédits sont en baisse en raison de mesures prises pour encadrer le dispositif.

Sur le plan de la sincérité budgétaire, la dépense d'AME semble désormais mieux maîtrisée. Compte tenu du renforcement de la lutte contre l'immigration illégale, l'hypothèse d'un reflux du nombre de bénéficiaires à moyen terme n'est d'ailleurs plus à exclure.

La commission des affaires sociales est fermement opposée à la réinstauration d'un droit de timbre. La mesure conduit à un transfert de la charge vers les hôpitaux.

De même, notre commission s'inquiète des tentations de réduction du panier de soins de l'AME. À l'initiative du Gouvernement, les députés ont institué un délai d'ancienneté dans le dispositif de l'AME pour bénéficier de certains soins. Il serait utile, madame la ministre, que vous nous précisiez le fonctionnement des mécanismes d'entente préalable entre l'assurance maladie et l'équipe médicale qui garantiront, je l'espère, l'accès aux soins lorsque l'examen clinique le justifie.

La commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Bernard Jomier .  - Nous aurions pu adopter un budget sincère et stable, n'était la polémique délibérément lancée et alimentée, de façon détestable, par le Gouvernement et le parti présidentiel sur l'AME, à rebours des engagements présidentiels et de la ministre de la Santé.

Mme Buzyn, l'an passé, était en effet défavorable à la restriction du dispositif. Sa remise en cause a commencé par une polémique sur la soi-disant pose de prothèses mammaires à des femmes étrangères prétendument venues en France pour se faire sous couvert de l'AME. Il a fallu attendre le rapport des inspections pour démentir point par point ces allégations et montrer que la fraude à l'AME était loin d'être massive. Au contraire, le non-recours à l'AME s'établit entre 50 % et 80 %. Cette polémique fut lamentable !

Malgré les démentis, le mal est fait. Amazon dissimule 50 % du chiffre d'affaires réalisé en France : la fraude n'est pas toujours punie de la même manière !

La trajectoire du programme 204 confirme nos interrogations.

Avec ce nouveau transfert du financement de deux agences à l'assurance maladie, quel avenir pour ce programme en pleine crise existentielle ? Le pilotage et les outils de santé publique du ministère sont affaiblis. Concernant le médicament, l'expertise et la prévention, le transfert des opérateurs doit s'inscrire dans une stratégie claire.

Le président de la République n'avait pas compté la santé parmi les questions à traiter dans le grand débat, mais les Français l'ont placée en tête de leurs préoccupations. Les attentes sont fortes. Et voilà que vous nous proposez que l'État se désengage d'agences publiques peu dotées...

L'augmentation de 40 % des crédits pour la santé environnementale est à saluer, mais elle avait connu une baisse de 20 % l'an passé. La politique de prévention des addictions et de l'alcoolisme n'est pas à la hauteur. Comment expliquer qu'un président de la République en 2019 annule, sous l'influence des lobbies, une campagne de prévention programmée avec l'accord du ministère ?

La prévention du VIH est renforcée mais les résultats encourageants doivent nous inciter à redoubler d'efforts. (« Très bien ! » et applaudissements sur les travées du groupe SOCR)

Mme Véronique Guillotin .  - Cette mission a fait couler beaucoup d'encre. Le programme consacré à l'AME représente 90 % des crédits santé. Le programme 204 a été remanié dans son périmètre, les dotations de l'ANSM et de l'ANSP étant transférées à l'assurance maladie. Ne subsistent que quelques crédits épars comme ceux pour le financement de l'INCa ou de l'Anses.

La prévention est une priorité du Gouvernement. Pourtant les crédits alloués aux actions en faveur de la santé de la population et la prévention des maladies chroniques stagnent, celles relatives à la médecine de ville reculent ; et le budget de la Mildeca a été réduit de 4 millions d'euros par rapport à 2014, comme on l'a vu hier.

Je salue les mesures favorables à la lutte contre le tabac, à la santé environnementale ainsi que le plan de vaccination.

Cependant la vaccination des plus de 65 ans contre la grippe stagne. Des mesures de simplification devraient la relancer. Je crois utile de rendre obligatoire la vaccination des professionnels de santé.

La disparition annoncée du programme 204 nous laisse craindre un manque de visibilité et une réduction du temps de discussion consacré à ces questions. Concernant l'accès aux médicaments innovants, nous saluons l'augmentation des crédits qui permettra la constitution de 14 nouveaux comités de protection des personnes (CPP), mais ce ne sera pas suffisant pour le bon fonctionnement des 39 CPP. Nous en reparlerons car je présenterai une proposition de loi avec Mme Deroche et M. Daudigny.

Le programme 183 est consacré à l'AME, à hauteur de 934 millions d'euros. C'est le milliard le plus scruté du budget de l'État ! Je suis attachée aux valeurs d'humanisme, au respect des personnes, comme à la bonne gestion des deniers publics.

La commission des finances a déposé des amendements pour transformer l'AME en AMU et réduire le panier de soins. Le groupe RDSE dans sa grande majorité ne les soutiendra pas.

Nous prenons note des mesures pour lutter contre la surconsommation et la fraude, introduits à l'Assemblée nationale. Mais les moyens de contrôle sont-ils suffisants ?

Les dépenses de l'AME ne représentent que 0,5 % des dépenses de l'assurance maladie. Je salue la maîtrise des dépenses, mais l'allongement des délais d'accès n'est-il pas contreproductif ?

Une évaluation stricte du dispositif est nécessaire pour éviter de donner prise aux fantasmes. Or nous avons peu de statistiques... Quoi qu'il en soit, les médecins continueront à soigner tous les malades, et c'est à eux d'apprécier les besoins.

Il y a deux ans, je concluais sur la nécessité d'aborder l'examen de cette mission sans postures et avec pragmatisme. C'est encore le cas. Nous voterons en majorité pour les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE)

M. Dominique Théophile .  - Le montant global des crédits dépasse le milliard d'euros en crédits de paiement, en baisse de 19 % par rapport à 2019. Les différentiels s'expliquent par le transfert à l'État du financement de l'ANSM et de l'ANSP. Le budget est cohérent et concret. Il porte haut les engagements de la programmation des finances publiques et les ambitions du plan « Ma Santé 2022 ».

La mission « Santé » comprend un programme relatif à la prévention et à l'amélioration de l'offre de soins. Je me réjouis de l'effort particulier apporté à la recherche contre le cancer avec 41 millions d'euros de crédits de paiement en 2020 pour le financement de l'INCa.

Les crédits pour la santé environnementale et alimentaire augmentent, à 25 millions d'euros, contre 18 millions en 2019. Les crédits pour les victimes de la Dépakine feront l'objet d'ajustements pour accélérer le traitement des dossiers.

Les affections iatrogènes et nosocomiales se sont multipliées. D'où les crédits supplémentaires alloués à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam). Une montée en charge progressive les portera à 53 millions d'euros en 2020.

Le programme 183 sera géré par l'assurance maladie. Il n'est pas question de supprimer l'AME, ni de le refuser aux demandeurs d'asile, ni de revenir sur le panier de soins, ni d'exiger une contrepartie financière. Le nombre de bénéficiaires de l'AME, 300 000 personnes aujourd'hui, a augmenté de 6 %.

Des questions ont été posées sur l'efficience du système et sur d'éventuels abus. L'inspection générale des affaires sociales a proposé des améliorations : la mise en place d'un délai d'ancienneté pour les prestations non urgentes, l'exigence de se présenter en personne à la caisse d'assurance maladie, un délai de carence sont des pistes.

Mais la commission des finances a adopté des amendements qui substituent une AMU à l'AME. Ils sont contraires à l'esprit d'humanitaire qui doit prévaloir dans notre pays. La commission des affaires sociales, elle, propose d'adopter les crédits sans modification.

Notre groupe votera les crédits tels que proposés par le Gouvernement ; dans le cas contraire, il votera contre. (Mme Élisabeth Doineau applaudit.)

Mme Laurence Cohen .  - (Mme Michelle Gréaume applaudit.) Le périmètre de cette mission est très restreint. Je le déplore. Je remercie en revanche Mme Imbert pour la qualité de son rapport.

Le transfert de l'ANSM et de l'ANSP vers l'assurance maladie réduit à portion congrue le programme 204. Nous avons déposé un amendement au PLFSS, en nouvelle lecture, pour arrêter ce transfert.

L'État verse une dotation à l'Oniam pour indemniser les victimes de la Dépakine. Il est scandaleux que Sanofi refuse d'assumer ses responsabilités ! Madame la ministre, vous nous dites qu'une réflexion est en cours à ce sujet. Où en est-on ?

Les actions en faveur de la prise en charge des violences et de la santé mentale ne bénéficient d'aucun euro supplémentaire, alors même que les violences notamment faites aux femmes sont une priorité du Gouvernement, qui organise un Grenelle contre les violences et a annoncé des mesures ambitieuses lors de la journée de lutte contre les violences faites aux femmes.

Nous nous étonnons que malgré le lancement du plan gouvernemental sur la lutte contre les addictions en 2018, aucune hausse des crédits n'ait été prévue pour renforcer cette action. Idem pour la santé mentale. Les établissements psychiatriques connaissent pourtant des situations dramatiques.

Depuis plusieurs mois, le président de la République franchit des lignes très dangereuses sur la politique migratoire. Madame la ministre, à l'Assemblée nationale, vous avez déposé un amendement pour réduire les crédits de l'AME de 15 millions d'euros. Pourquoi alimenter ainsi les phantasmes alors que seuls 38 cas de fraude ont été détectés, pour un préjudice de 0,06 %du montant total de l'AME ?

En accroissant le délai de carence, en réduisant la durée d'accès à l'AME pour les déboutés du droit d'asile et les personnes en situation irrégulière, vous favorisez la propagation des épidémies et stigmatisez les étrangers. Ne chassez pas sur les terres de la droite extrême !

Je demande à la commission des finances de renoncer à ses amendements sur l'AME. Dans le cas contraire, nous ne voterons pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

Mme Colette Mélot .  - Le programme 183 consacre 82 % de ses crédits à l'AME, pour 934,4 millions d'euros. Le programme 204 finance les actions de prévention. Son enveloppe s'élève à 1,144 milliard d'euros en crédits de paiement contre 1,422 milliard d'euros en 2019. L'effort de maîtrise budgétaire repose sur la révision du périmètre du programme 204, réduit à peau de chagrin. Les actions de ce programme ont diminué de 62 % depuis 2002 alors que les dépenses de l'AME ont augmenté de 27 %. Seul l'INCa reste financé intégralement par cette mission, après la loi de mars 2019 élargissant ses missions - une hausse est prévue pour la prise en charge des cancers pédiatriques.

Bref cette mission « Santé » se résume à l'AME - elle ne représente que 0,6 % des dépenses de santé, mais notre pays est l'un des plus généreux en la matière. Le rapporteur spécial dénonce une sous-budgétisation de l'AME sur les soins urgents. Nous sommes d'accord.

Le Gouvernement prévoit d'instaurer un délai de présence minimale de trois mois pour y avoir droit, ainsi qu'un contrôle ciblé sur les soins les plus onéreux, pour lutter contre les abus. La commission des finances va plus loin en instaurant un droit de timbre de 30 euros et en remplaçant l'AME par une AMU avec une offre de soins restreinte. C'est par trop radical.

Seul un migrant éligible sur deux a recours à l'AME, faute d'information. Réduire l'offre de santé de ces populations déjà précaires risque d'aggraver leur état, et de multiplier les épidémies.

Selon l'issue de la discussion, soit nous voterons contre, soit nous nous abstiendrons sur les crédits de la mission. (M. Jean-Louis Lagourgue applaudit.)

Mme Élisabeth Doineau .  - Année après année, cette mission se résume toujours davantage à un débat sur l'AME qui absorbe quasiment la totalité de l'enveloppe dédiée à la santé : 82 % cette année contre 45 % en 2012. Cela s'explique sans doute par le manque de sincérité de tous les gouvernements, la mission n'ayant jamais été abondée à hauteur des besoins.

Le rapport de l'IGAS d'octobre dernier relève pourtant que l'AME n'est pas un outil de la politique migratoire.

Je salue la plus grande sincérité budgétaire de l'AME ainsi qu'un meilleur pilotage.

La position de notre rapporteure est mesurée : l'AME participe à la politique publique de prévention sanitaire. Un droit de timbre serait contreproductif, il retarderait les prises en charge et reporterait le coût induit sur les urgences.

L'AME est et restera une aide indispensable, au rapport bénéfice-risque avantageux.

Je déplore le mauvais signal que le Gouvernement a envoyé au Parlement en introduisant sa réforme par amendement la nuit précédant l'examen de la mission « Santé » par l'Assemblée nationale. Certes, vous attendiez le rapport de l'IGAS et l'IGF. Ce rapport rejette une réduction du panier de soins, à laquelle elle préfère un délai d'ancienneté pour bénéficier de certains soins financés par l'AME.

Il faut surtout simplifier les procédures et améliorer les échanges d'informations entre les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) et les hôpitaux.

Le conditionnement de l'accès aux soins devra laisser une marge aux soignants, sinon il y aura une explosion des dépenses de santé et des épidémies.

Je défendrai un amendement avec mon collègue Longeot : la maladie de Lyme est l'une des dix maladies infectieuses les plus courantes en France. Mais elle divise la communauté scientifique. La recherche contre les maladies vectorielles à tique doit être financée. Je plaide pour 5 millions d'euros ; c'est peu mais c'est une première étape.

Le groupe de l'Union Centriste votera les crédits de la mission tels qu'adoptés par la commission des affaires sociales. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe UC)

M. Philippe Mouiller .  - L'ensemble des crédits de la mission « Santé » n'est qu'une partie infime de notre politique de santé. C'est à peine un milliard d'euros. Au regard des milliards de la branche maladie, c'est peu. Les crédits de cette mission sont consacrés à 82 % à l'AME, portée par le programme 183.

En 2020, le financement de ces agences sanitaires - ANSM et Santé publique France - sur le programme 204 sera transféré à l'assurance maladie.

La constante diminution des crédits de la mission nous interroge sur son devenir.

Des mesures sur l'AME ont été présentées le 6 novembre. Elles clarifient l'obligation de résidence et de présence physique pour accéder à l'aide. Le budget de l'AME a, en conséquence, été ramené à 919 millions d'euros, soit une baisse de 15 millions d'euros.

Pour des raisons humanitaires et sanitaires, l'AME est indispensable.

Mais quand son coût augmente de 46 % entre 2011 et 2020, nous sommes légitimes à poser quelques questions.

Le groupe Les Républicains dans sa grande majorité soutiendra la position du rapporteur Joyandet. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Le budget de cette mission est marqué par une évolution de périmètre importante, entraînant une baisse de 20 % des crédits.

Le programme 204 sera doté de plus de 200 millions d'euros dont un tiers pour l'INCa et l'Anses, dont la subvention augmentera de 8 millions d'euros pour compenser la suppression de la taxe vapotage.

Le financement de l'ANSM et de Santé publique France est transféré à la sécurité sociale, compte tenu des missions qu'elles assurent.

Cela n'altère en rien la tutelle stratégique et financière de l'État. Les crédits du programme 204 sont de 200 millions d'euros. Les mesures de prévention qu'il finance ne représentent que 1 % des 3 milliards d'euros qui y sont consacrés par l'État.

Nous augmentons les crédits de prévention et les résultats sont là. Il y a eu 1,6 million de fumeurs en moins entre 2016 et 2018. Les missions du fonds de lutte contre le tabagisme ont été étendues à d'autres addictions.

Le programme 204 porte aussi sur l'indemnisation des victimes de la Dépakine, assurée par l'Oniam. Des ajustements structurants seront apportés pour accélérer l'examen des dossiers.

Les deux collèges qui le composent seront fusionnés. La loi fixera la date à partir duquel le lien entre préjudice et défaut d'information sera présumé : 1982 pour les malformations congénitales, 1984 pour les troubles du développement.

Signalons la progression des moyens de l'Agence de santé de Wallis-et-Futuna, à 42,5 millions d'euros, pour renforcer l'offre de soins par le déploiement de la télémédecine.

Le programme 183 est majoritairement consacré à l'AME. Il n'est pas envisageable de remettre en cause l'accès des migrants à la santé. C'est un principe constitutionnel et un engagement international, que le Gouvernement entend garantir.

Le dispositif est indispensable pour des raisons humanitaires et sanitaires mais aussi budgétaires, afin d'éviter des coûts futurs supérieurs. La dépense d'AME alimente parfois les phantasmes. Le Gouvernement a déposé des amendements à l'Assemblée nationale pour lutter contre les abus.

Nous devons poursuivre les démarches pour un meilleur accès aux soins de ces populations. Le délai de trois mois modifiera la situation pour les détenteurs d'un visa de tourisme, puisqu'il courra à partir de l'expiration du visa.

La durée minimum de présence physique sur le territoire réduira le risque de fraude par des personnes installées à l'étranger.

Pour les demandeurs d'asile, pendant ce délai de trois mois, les soins urgents, vitaux, seront assurés, notamment pour les femmes enceintes et les nouveau-nés.

Examen des crédits de la mission et des articles rattachés

Article 38

M. le président.  - Amendement n°II-36, présenté par M. Joyandet, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

 

 

 

 

Protection maladie

 

285 000 000

 

285 000 000

TOTAL

 

285 000 000

 

285 000 000

SOLDE

- 285 000 000

- 285 000 000

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - La commission des finances ne propose pas seulement de réduire des crédits mais surtout une nouvelle politique pour l'AME. C'est pourquoi mes trois amendements doivent être considérés ensemble. L'ambiance est différente par rapport à l'an dernier : le Gouvernement ne nous renvoie pas complètement dans nos cordes mais accepte de discuter de l'AME.

Il prévoit une légère refonte de l'accès et une diminution des crédits. Je sens des positions différentes dans les rangs de la majorité sénatoriale vis-à-vis de la commission des finances. Aussi je souhaite entendre le Gouvernement sur les amendements de la commission des finances. Ira-t-il plus loin que ce que l'Assemblée nationale a adopté ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Restreindre l'AME aux seuls soins d'urgence et instaurer un droit de timbre n'assure aucune maîtrise des dépenses puisqu'une prise en charge plus tardive est plus coûteuse. Nous avons choisi une voie différente, nécessaire pour soigner les personnes sans coût excessif. Votre proposition n'apporte aucune réponse satisfaisante ni efficace. Avis défavorable.

M. Alain Joyandet.  - Je souhaite cinq minutes de suspension de séance.

M. Philippe Mouiller.  - Même demande.

La séance, suspendue à 17 h 20, reprend à 17 h 30.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Il y a un certain embarras sur les amendements de la commission des finances.

M. Bernard Jomier.  - On a compris!

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - En tant que rapporteur spécial de la commission des finances, je me dois de les maintenir.

Les lignes bougent, il est vrai, sur ces sujets mais pas la commission des finances pour le moment.

M. Bernard Jomier.  - Nous avons toujours voulu un débat serein sur cette question. L'AME est avant tout une mesure de santé. Non, la dépense n'a pas explosé : il a été remédié à une sous-dotation chronique. Ce budget est sincère, je le reconnais. Le nombre de bénéficiaires est stable depuis 2016. La dépense par bénéficiaire a augmenté, mais demeure inférieure à la dépense moyenne d'un assuré social. La progression tient à l'accélération de la liquidation des factures hospitalières plus qu'à des détournements.

Je salue le rapport des inspections. Bien sûr, il faut lutter contre la fraude, mais pas en pénalisant ceux qui ont besoin d'être soignés. La modicité du recours montre bien qu'il n'y a pas de détournement massif.

M. Dominique Théophile.  - L'AME poursuit un objectif de santé publique. Le Gouvernement s'est engagé à maintenir la dépense publique et à lutter contre la fraude, y compris a posteriori. Le regroupement des demandes sur trois CPAM améliorera le contrôle.

Nous ne souhaitons ni revenir sur le panier de soins ni réintroduire une participation financière des bénéficiaires, qui risquerait d'entraîner un report des soins et un déport sur l'hôpital, avec des conséquences sanitaires regrettables. Le droit de timbre institué en 2011 a conduit à une augmentation mécanique du coût moyen. La proposition de la commission des finances est une fausse bonne idée. Le groupe LaREM votera contre.

Mme Élisabeth Doineau.  - Je me félicitais en discussion générale de la sincérité accrue de ce budget. Supprimer 285 millions d'euros, c'est revenir à la sous-budgétisation d'hier. Je m'y opposerai donc. L'IGAS et l'IGF, comme le Défenseur des droits, n'y sont pas favorables.

Il faut investir dans la santé de ceux qui arrivent sur notre territoire et répondre pragmatiquement aux problèmes de santé de ces personnes, qui peuvent avoir des conséquences sur nos concitoyens. Il y a, par exemple, une recrudescence de la tuberculose.

M. Alain Milon.  - Je salue l'attitude courageuse de M. Joyandet. La commission des affaires sociales, que j'ai l'honneur de présider, a toujours été favorable à l'AME car les soignants s'obligent à soigner et soigneront toujours. Le problème n'est pas le soin mais la lutte contre l'immigration. Nos concitoyens comprennent mal que la France dépense 1 milliard d'euros par an pour soigner des étrangers en situation irrégulière. Les mesures prises par le Gouvernement afin de limiter les abus traduisent une prise de conscience. Nous ne pouvons faire autrement que de soigner, mais il faut s'attaquer aux fraudes et contrôler l'immigration. Je m'abstiendrai sur cet amendement.

Mme Laurence Cohen.  - Il s'agit de soin. Tout médecin doit soigner. Il n'y a eu que 30 000 cas de fraude avérée, pour un coût d'environ 500 000 euros, soit 0,06% de la dépense... Mais pour la commission des finances, il faut aller toujours plus loin, quitte à attaquer le droit aux soins. Ces amendements sont dangereux, nous voterons contre.

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Nous parlons d'une population fragile et précaire, que nous devrions accompagner et aider, ne serait-ce que pour des raisons de santé publique. Le taux de fraude est infime, à 0,06%, tandis que celui du non-recours atteint 50 %. Il s'agit donc plutôt d'améliorer l'accès à l'AME pour que les personnes qui en ont besoin se fassent soigner.

Je déplore le changement de discours d'Emmanuel Macron sur l'accès à ce droit essentiel dans notre démocratie, lui qui a été élu sur des valeurs humanistes.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Si l'amendement de M. Joyandet était adopté, le mien deviendrait sans objet. Ni mal nécessaire, ni salut national, l'amendement n°II-364 rectifié propose un équilibre pour l'AME. Ce dispositif, pour lequel nous dégageons des crédits non négligeables, ressort de notre obligation constitutionnelle d'assurer les soins urgents, et de la nécessité de protéger les Français de risques sanitaires et épidémiologiques - d'aucuns évoquaient la tuberculose. Je proposais que les modalités d'application soient déterminées par un décret en Conseil d'État.

M. le président.  - Votre amendement ne tombera pas ; je considère donc qu'il aura été défendu.

M. Jérôme Bascher.  - Il n'y a pas la méchante commission des finances et la gentille commission des affaires sociales.

M. Julien Bargeton.  - Un peu quand même ! (Sourires)

M. Jérôme Bascher.  - Toute personne sur le territoire national doit être soignée, personne ne le conteste.

La commission des finances alerte sur le sujet depuis des années pour connaître la vérité des prix et faire la lumière sur la fraude, longtemps niée... (Protestations à gauche)

M. Bernard Jomier.  - Qui a dit ça ?

M. Jérôme Bascher.  - Pour certains, les seuls à frauder seraient les grands patrons ! (Vives protestations sur les travées du groupe CRCE ; Mme Sophie Taillé-Polian s'insurge.)

M. Pascal Savoldelli.  - Comparaison n'est pas raison.

M. Jérôme Bascher.  - Nous voulons lutter contre toutes les fraudes, et contre l'immigration clandestine.

Après de nombreux appels du pied, le Gouvernement a pris conscience du problème et commandé un rapport aux inspections. Nous nous en satisfaisons. Je voterai cet amendement.

Mme Colette Mélot.  - Je salue les mesures prises par le Gouvernement sur l'AME. Il y a eu une prise de conscience. Il ne peut être question de laisser quiconque sans soin, cela alourdirait d'ailleurs la charge des hôpitaux, mais il faut maîtriser l'immigration pour limiter les dépenses de l'AME. (Mme Laurence Cohen s'exclame.)

Le groupe Les Indépendants votera majoritairement contre cet amendement ; d'autres s'abstiendront.

M. Julien Bargeton.  - Il ne s'agit pas d'une division entre commission des finances et commission des affaires sociales, mais au sein de la majorité sénatoriale, dont une partie souhaite aller toujours plus loin et toujours plus fort en limitant le principe même de l'AME.

L'AME ressort d'un principe intangible de la République et fait l'honneur de la France. Nous ne voterons pas cet amendement. S'il y a des abus, il faut les traiter. La majorité doit assumer ses contradictions !

M. Stéphane Piednoir.  - Il n'y a pas de contradiction ; c'est vous qui faites un contresens.

M. Jean-Yves Leconte.  - Le récent rapport montre que la fraude à l'AME est minime. Le taux de recours au dispositif est encore faible, à peine un sur deux. Or le VIH concerne à 50 % des étrangers, et la moitié des pathologies sont diagnostiquées en France. Il s'agit d'une population extrêmement précaire, qu'il faut soigner, par humanisme et par souci de la santé publique ! Compte tenu des besoins, comment imaginer restreindre le dispositif, déjà très contrôlé ? Les restrictions proposées par le Gouvernement ne vont pas dans le bon sens.

M. Yves Daudigny.  - Ce n'est pas un débat entre méchants et gentils, ou entre ceux qui seraient soucieux des deniers publics et les autres.

M. Julien Bargeton.  - Tout à fait.

M. Yves Daudigny.  - En soignant les plus précaires, c'est l'ensemble des Français que nous protégeons ! S'il y a de la fraude, il faut la détecter et la condamner. Je regrette que le Gouvernement ait contribué à alimenter cette polémique détestable, comme le disait M. Jomier. Notre groupe votera contre l'amendement.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Nous souhaitions lancer un appel au Gouvernement à aborder l'AME sous un angle différent. Les hôpitaux les plus concernés sont dans une situation intenable.

Mme Laurence Cohen.  - Le problème, c'est le manque de moyens, pas l'AME !

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Il ne s'agit pas de refuser de soigner, mais de donner un signal à l'étranger : il ne sera plus aussi facile pour les filières de faire venir des gens en situation irrégulière pour se faire soigner. (Mmes Sophie Taillé-Polian et Laurence Cohen s'insurgent.)

Le rapport des inspections indique qu'au moins 25 % des immigrés clandestins seraient motivés par le fait de venir se faire soigner en France. L'immigration irrégulière baisse de 22 % en Europe et augmente de 10 % en France.

Je cherchais, comme rapporteur, une solution de compromis qui maintienne la tradition humaniste de la France (Exclamations à gauche) et réponde aux besoins de santé tout en rappelant qu'elle ne peut accueillir toute la misère du monde. (Mme Laurence Cohen s'exclame.) La France ne peut être la seule en Europe à soigner les immigrés clandestins ; cela ne se fait nulle part ailleurs !

M. Jean-Yves Leconte.  - C'est faux !

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Le débat est trop passionné, j'en prends acte.

Impossible de réduire la dépense, disent certains. Pourtant, ce que je vous propose a déjà été fait, et la consommation des crédits est tombée à moins de 600 millions d'euros : nous avions inversé la courbe, fait baisser la dépense, en soignant mais en responsabilisant. (Exclamations à gauche)

Il faut casser les filières qui font entrer des clandestins dans le seul but de se faire soigner. Comme le Gouvernement a bougé cette année, j'ai essayé, en vain, de proposer un consensus... (Mme Laurence Cohen s'exclame vivement.) Je n'insiste pas, et maintiens les amendements.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Les dépenses par bénéficiaires augmentent de 0,5 % par an en moyenne depuis dix ans, moins que la dépense globale de santé. Cette hausse est liée à l'augmentation du nombre de bénéficiaires.

Le Gouvernement a engagé un mouvement de sincérisation d'un dispositif longtemps sous-budgété. Nous ne remettons pas en cause le principe de l'AME, mais luttons résolument contre les fraudes et les abus qui fragilisent le système. Nous visons ceux qui bénéficient de l'AME alors qu'ils n'y ont pas droit. À l'inverse, nous allons vers les quelque 24 % des personnes éligibles qui n'y recourent pas la première année.

Réduire l'AME aux soins urgents augmente la pression sur les hôpitaux, ce que nous ne voulons pas.

À la demande des groupes SOCR et Les Républicains, l'amendement n°II-36 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°48 :

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 295
Pour l'adoption 147
Contre 148

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme Laurence Cohen.  - Ouf !

M. le président.  - Amendement n°II-474, présenté par M. Savary et Mme Imbert.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

5 000 000

 

5 000 000

 

Protection maladie

 

 

 

 

TOTAL

5 000 000

 

5 000 000

 

SOLDE

+ 5 000 000

+ 5 000 000

M. René-Paul Savary.  - L'Assemblée nationale a acté une moindre dépense de 15 millions d'euros sur le programme 183. Avec Mme Imbert, nous proposons d'utiliser ces économies significatives à des fins de prévention et de recherche et de consacrer 5 millions d'euros à la recherche sur le sida et 5 autres millions à celle sur la mucoviscidose. Les 47 centres de ressources et de compétences de la mucoviscidose manquent de moyens pour atteindre les standards européens. Des efforts supplémentaires sont nécessaires.

M. le président.  - Amendement n°II-475, présenté par M. Savary et Mme Imbert.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

5 000 000

 

5 000 000

 

Protection maladie

 

 

 

 

TOTAL

5 000 000

 

5 000 000

 

SOLDE

+ 5 000 000

+ 5 000 000

M. René-Paul Savary.  - Défendu. Des molécules nouvelles peuvent améliorer les conditions de vie des patients. Il faut financer l'innovation.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Avis favorable aux deux amendements.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Le déploiement des programmes d'éducation thérapeutique est assuré par les ARS, son financement dépend de l'Ondam. Le financement des études relève pour l'essentiel du ministère chargé de la Recherche. Le ministère de la Santé y contribue, à hauteur de 500 000 euros. Avis défavorable aux deux amendements.

M. Bernard Jomier.  - Les programmes de santé publique que défend M. Savary sont importants, c'est incontestable, et manquent de financements. Mais on ne saurait opposer des crédits que nous souhaitons voir maintenus sur l'AME avec des programmes de santé publique qui s'adressent à l'ensemble de la population. Nous ne voterons pas ces amendements.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales.  - J'entends bien que M. Jomier souhaite que l'ensemble des crédits soient sur l'AME. Cependant l'Assemblée nationale aura le dernier mot et c'est elle qui a retiré les 15 millions d'euros, avec l'avis favorable du Gouvernement. D'un point de vue stratégique, ces amendements sont intéressants.

Madame la ministre, vous nous dites que cela dépend du ministre de la Recherche. M. Darmanin nous disait, lui, qu'il ne faut pas différencier car tout sort de la même poche. L'essentiel est d'aider la recherche en biotechnologie et en génétique pour traiter la mucoviscidose.

Mme Catherine Deroche.  - Très bien.

Mme Corinne Imbert, rapporteur pour avis.  - Le Gouvernement s'est fixé pour objectif d'éradiquer l'épidémie de sida à horizon 2030. Nous partageons cet objectif : à la suite de mon rapport d'information, « S'engager pour un avenir sans Sida », nous avons déposé une proposition de loi.

Nous devons nous en donner les moyens. Je soutiens l'idée de répartir des crédits supprimés entre la recherche pour le sida et celle pour la mucoviscidose.

L'amendement noII-474 est adopté, de même que l'amendement no II-475.

M. le président.  - Amendement n°II-135 rectifié, présenté par Mme Doineau, MM. Longeot et Détraigne, Mmes Billon, Férat, Guidez, Loisier et de la Provôté, MM. Gabouty, Joyandet et D. Laurent, Mmes Kauffmann, N. Delattre et Goy-Chavent, M. Guerriau, Mme Bruguière, MM. Le Nay, Laugier, Bazin et Grand, Mme Troendlé, MM. Chaize, Janssens, Menonville, Corbisez, Kern, Perrin, Lefèvre, Lafon et Bonnecarrère, Mmes Lopez, Gruny et L. Darcos, MM. Chasseing, P. Joly, Calvet, Regnard, de Nicolaÿ, Fouché et Houpert, Mme Puissat, MM. Danesi, Meurant, Genest, Delcros, Wattebled, Mandelli, Longuet, Luche, Bouchet et Pierre, Mme Saint-Pé, MM. Gremillet, Vaspart et Canevet, Mmes Thomas et Chain-Larché, MM. Capo-Canellas et Vanlerenberghe, Mme Perrot, M. Adnot, Mme Garriaud-Maylam, MM. B. Fournier, Sol, Bonhomme et Huré, Mmes A.M. Bertrand et Micouleau, MM. Mayet et H. Leroy, Mmes Sollogoub, Renaud-Garabedian et Dumas, MM. Médevielle, Moga, Mizzon et Cadic, Mme Vermeillet, MM. Gold, Morisset, Chevrollier et Mouiller, Mme Benbassa, M. Vogel, Mme Canayer, MM. Leleux, Vallini et Priou, Mmes Richer, Mélot, Chauvin et Procaccia, MM. Dantec, Vall, Lagourgue, Bignon, Mazuir, Guérini, Henno et Louault, Mmes Vérien et Vullien, MM. Poadja et Cuypers, Mme Rauscent et M. Laménie.

I.  -  Créer le programme :

Recherche contre les maladies vectorielles à tiques

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Protection maladie

Recherche contre les maladies vectorielles à tiques 

5 000 000

5 000 000

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

Mme Élisabeth Doineau.  - L'incidence de la maladie de Lyme est passée de 26 000 nouveaux cas par an entre 2009 et 2014 à 67 000 nouveaux cas en 2018. Elle fait désormais partie des dix maladies infectieuses les plus fréquentes en France. Et ces chiffres sont sans doute sous-évalués.

Le diagnostic, la prise en charge et le traitement de cette maladie divisent la communauté scientifique. Or, en l'absence de diagnostic rapide, les complications peuvent être lourdes et irréversibles.

En apportant des crédits conséquents à la recherche fondamentale et appliquée sur cette maladie, ce que le Gouvernement se refuse à faire, cet amendement vise à améliorer la vie des patients.

Il crée un programme spécifique « Recherche contre les maladies vectorielles à tiques » abondé à hauteur de 5 000 000 euros, prélevés sur l'action n°11 « Pilotage de la politique de santé publique » du programme n°204. Il a été cosigné par 106 sénateurs de tout bord. Ce sujet de santé publique majeure nécessite des moyens humains et financiers immédiats. C'est l'amendement de la recherche de la confiance retrouvée.

M. Philippe Adnot.  - Très bien.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Retrait, non sur le fond mais pour des raisons techniques. Nous aurions préféré un redéploiement interne de l'action 11 vers l'action 14 du programme.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - La maladie de Lyme est un enjeu majeur de santé publique. Le ministère de la Santé a labellisé des centres spécifiques pour éviter l'errance, structuré le parcours de soins et renforcé la prévention.

Il apporte un soutien financier aux actions de recherche sur les maladies vectorielles à tiques. Il travaille en lien étroit avec le ministère de la Recherche et les agences de santé pour une prise en charge globale. Avis défavorable.

Mme Élisabeth Doineau.  - J'aimerais rectifier mon amendement en suivant la proposition du rapporteur.

Madame la ministre, tout montre que cette maladie suscite un véritable malaise dans la population. Les préconisations de la Haute Autorité de la santé, initialement acceptées par les associations de malades, ont ensuite été contestées par une société savante. Les malades n'en peuvent plus. Donnons-leur un signe positif fort.

M. le président.  - Il n'est pas possible de modifier votre amendement dans le sens suggéré, puisqu'il ne s'agit pas de mouvement d'un programme à un autre.

M. Antoine Lefèvre.  - De nombreux malades atteints de la maladie de Lyme se retrouvent en errance thérapeutique et leur nombre ne cesse d'augmenter. C'est le cas d'un de mes amis, que connaît aussi M. Daudigny, qui s'entend dire par des médecins insuffisamment formés que ses souffrances sont psychosomatiques.

Cette maladie est très difficile à diagnostiquer. Il est indispensable d'encourager la recherche. Adopter cet amendement aurait un impact moral significatif pour les malades.

M. Yves Daudigny.  - Nous connaissons tous des personnes victimes de la maladie de Lyme. Nous savons leur souffrance et leurs difficultés à se faire soigner. Il faut encourager la recherche fondamentale et appliquée. Je voterai cet amendement.

M. René-Paul Savary.  - Je n'ai pas co-signé cet amendement car il prend sur un programme de recherche au détriment d'autres actions. Pour la drépanocytose non plus, les innovations ne sont pas assez reconnues, faute de comparaison. Les traitements innovants coûtent particulièrement cher. Il ne s'agit pas de déshabiller les uns pour habiller les autres.

Voilà pourquoi nous avons proposé tout à l'heure de prendre les financements pour la recherche contre le sida et la mucoviscidose dans le budget général.

Je ne voterai pas cet amendement, non plus que le suivant.

M. Pierre Ouzoulias.  - Cette semaine, vous avez voté la loi de finances rectificative qui a supprimé 20 millions d'euros de crédits pour la recherche. L'an dernier, nous avions considéré qu'il était essentiel de maintenir les crédits pour la recherche dans un débat qui portait déjà sur le fléau qu'est la maladie de Lyme... Un peu de cohérence !

M. Jean-François Rapin.  - Je rejoins M. Savary, car le sujet est transversal. Prendre les crédits sur la mission « Santé » pour abonder un programme spécial n'est pas la bonne solution. Ce soir, des amendements demanderont la même chose sur les crédits de la mission « Recherche ».

En tant que professionnel de santé, j'ai eu à soigner des cas de maladie de Lyme, je sais combien cette maladie est pénible.

J'ai discuté ce matin avec un chercheur de l'Inserm. Il me disait n'avoir pas tant besoin de crédits supplémentaires que d'un grand inventaire des recherches qui ont déjà été faites sur la maladie de Lyme, quitte à lancer ensuite des appels à projet. Nul besoin d'un programme spécial. Je ne voterai pas cet amendement.

M. Jean-Louis Tourenne.  - On tourne autour du pot depuis que les règles budgétaires existent. Nous raisonnons par enveloppe, au sein d'un budget restreint, de sorte qu'on ne peut susciter de crédits supplémentaires sans générer des frustrations par ailleurs.

Cependant, si nous ne faisons pas de propositions, nous ne servons à rien ! La seule prérogative du Sénat est de demander des efforts supplémentaires dans tel ou tel domaine.

Voter cet amendement obligera le Gouvernement à revoir ses priorités et à trouver des solutions.

L'amendement n°II-135 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-451 rectifié, présenté par M. Antiste, Mmes Conconne, Jasmin et G. Jourda, MM. Cabanel, Duran et Raynal, Mme Conway-Mouret et M. Tourenne.

I.  -  Créer le programme :

Recherche contre la drépanocytose

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits

de paiement

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

 

5 000 000

 

5 000 000

Protection maladie

 

 

 

 

Recherche contre la drépanocytose

5 000 000

 

5 000 000

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

M. Maurice Antiste.  - La drépanocytose est une maladie héréditaire touchant l'hémoglobine des globules rouges, protéine essentielle à la fonction respiratoire. Cette maladie génétique touche plus de 20 000 malades en France et plus de 150 000 porteurs sains avérés. En France, 441 enfants sont nés drépanocytaires en 2013, soit un pour 1 900 naissances. C'est la maladie génétique la plus fréquente en France. Sa prévalence est beaucoup plus importante dans les départements d'outre-mer et en région parisienne où se concentrent les populations à risque.

Personne ne connaît exactement le coût de la drépanocytose. Le professeur Frédéric Galacteros chiffre à 1 million de dollars le coût d'un patient drépanocytaire. Il faut une politique de prévention et d'investissement dans la recherche de traitements moins onéreux.

Mais rien ne pourra se faire sans recherche à tous les niveaux. Cet amendement crée un programme spécifique « Recherche contre la drépanocytose » abondé à hauteur de 5 000 000 euros, prélevés sur l'action n°11 du programme 204.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Pour les mêmes raisons que tout à l'heure, retrait ou avis défavorable.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Il existe des centres de référence experts labellisés pour les maladies rares, dont la drépanocytose.

Pour les maladies rares, le lien entre soins et recherche doit rester étroit. Des efforts financiers importants sont réalisés dans le plan Maladies rares, lancé il y a un an, doté de 780 millions d'euros. La coordination internationale est aussi un enjeu majeur. Dans le cadre du plan précité, des appels à projet ont été lancés pour plus de 40 millions d'euros jusqu'en 2022. Demande de retrait.

M. Maurice Antiste.  - Je maintiens mon amendement. Il faut parfois savoir déshabiller un peu Paul pour habiller Pierre qui est juste nu. Des enfants meurent en France faute d'avoir été dépistés assez tôt. Si l'amendement n'était pas adopté, je considérerais que je suis sorti par la porte, je reviendrai par la fenêtre...

M. Guillaume Arnell.  - Je soutiens cet amendement. La drépanocytose est un véritable fléau aux Antilles, particulièrement à la Guadeloupe. Un centre de référence, à la Guadeloupe, souffre d'un manque de moyens. Cette maladie touche principalement la race noire. Il faut un équilibre avec les traitements qui touchent d'autres populations.

M. Dominique Théophile.  - Je soutiens également cet amendement. En Guadeloupe, le centre spécialisé souffre. Il faut l'aider. Le centre hospitalier universitaire de Guadeloupe l'a intégré comme un service déconcentré pour pouvoir maintenir les soins. Il est de bon ton de voter cet amendement.

M. Yves Daudigny.  - Cet amendement, comme les autres, a le défaut de retirer des crédits à un programme déjà peu pourvu. Mais il n'y a pas de raison de voter contre cet amendement après avoir adopté le précédent sur la maladie de Lyme. Nous le voterons.

L'amendement n°II-451 rectifié est adopté.

L'amendement n°II-452 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-469 rectifié, présenté par M. Duplomb, Mme Férat, MM. J.M. Boyer, Gremillet, Cuypers, Pierre, Babary, D. Laurent et Piednoir, Mme A.M. Bertrand, MM. Pellevat et Paccaud, Mme Gruny, MM. Laménie et Morisset, Mmes Chauvin, Morhet-Richaud, Deroche et L. Darcos, MM. B. Fournier, Saury, Charon et Pointereau, Mme Thomas, MM. Savary, Bonne et Mayet, Mmes Bruguière et Lassarade, MM. Danesi, Reichardt, Kennel, Houpert, Panunzi et Priou, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Détraigne, Longeot et Maurey, Mme Guidez, M. P. Martin, Mme Perrot et MM. Janssens, Bazin et Milon.

I.  -  Créer le programme :

Fonds d'indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

 

5 000 000

 

5 000 000

Protection maladie

 

 

 

 

Fonds d'indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques

5 000 000

 

5 000 000

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

M. René-Paul Savary.  - Cet amendement porte sur le fonds d'indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques. L'État a un rôle à jouer. Or il n'y avait pas de participation de l'État.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Avis du Gouvernement.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Ce fonds d'indemnisation est traité dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Le financement des indemnisations reposera sur les employeurs via les cotisations et les fabricants de produits phytopharmaceutiques via une taxe ad hoc.

Un financement par l'État n'est pas justifié. Un dispositif de pharmacovigilance piloté par l'Anses a été créé en 2014. Le Gouvernement a prévu de réduire l'utilisation des pesticides de 50 % à l'horizon 2025. Avis défavorable.

M. Bernard Jomier.  - On aura tout entendu dans cet hémicycle depuis que nous avons adopté la création de ce fonds...C'est tout de même l'État qui autorise la mise sur le marché de ces pesticides. Les rapports des inspections générales préconisent une participation tripartite incluant l'État. Or il s'exonère de toute participation ! Ce serait exorbitant du droit commun et contraire à la morale publique ! Vu les limitations du fonds que vous avez posées dans le texte que vous avez fait adopter, les recettes risquent en effet d'être suffisantes, encore que l'État ne maîtrisera pas les réparations. Il doit donc participer à son financement, pour une raison pratique et non seulement de principe. Nous voterons cet amendement.

Mme Corinne Imbert, rapporteur pour avis.  - En commission, nous avons voté un amendement à l'article 46 au projet de loi de financement de la sécurité sociale qui va dans ce sens. Il sera discuté demain en séance publique.

M. René-Paul Savary.  - Les grands esprits se retrouvent ! Des cosignataires viennent des différentes travées et commissions de l'hémicycle ; c'est bien qu'il y a un sujet. L'État a ses responsabilités. Les services d'entretien des routes n'ont-ils pas utilisé de produits phytosanitaires ? Il y a besoin d'une solidarité nationale pour ces maux qui ne touchent pas que les agriculteurs.

Je crois préférable de ne pas utiliser le terme de pesticide dont la connotation négative contribue à l'agri-basching.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Ce fonds est différent des autres, notamment de celui qui a été institué pour indemniser les victimes de l'amiante, qui sont des victimes environnementales. En effet, les agriculteurs sont des professionnels...

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Les victimes de l'amiante aussi !

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - C'est pour cela que nous passons par la branche AT-MP, qui est aussi une expression de la solidarité nationale.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Le Gouvernement dit qu'il ne cofinancera pas ce fonds. La commission des finances ne m'en voudra pas si je soutiens personnellement cet amendement et m'associe ainsi à une victoire programmée... (On rit sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Bernard Jomier.  - Bien dit !

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Je salue le travail réalisé par MM. Tissot et Duplomb. L'État doit prendre ses responsabilités. Les victimes de l'amiante ont aussi été touchées dans le cadre professionnel. Je ne comprends pas votre position, madame la ministre.

L'amendement n°II-469 rectifié est adopté.

Les crédits de la mission « Santé » sont adoptés.

Article 78 duodecies

M. le président.  - Amendement n°II-419, présenté par M. Jomier et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Supprimer cet article.

M. Bernard Jomier.  - Nous avons eu le débat sur l'AME. Parmi les restrictions souhaitées par le Gouvernement, mêlées aux restrictions à la protection universelle maladie (PUMA), il y a le délai de carence. La logique, que nous comprenons, ne correspond pas à la situation réelle. Le droit formel prévoit un délai de carence de trois mois pour les demandeurs de l'AME. Mais la longueur et la complexité administrative des dossiers conduisent plutôt à un délai de six à neuf mois et empêchent en pratique l'accès réel au droit, d'autant que ce droit formel doit être renouvelé tous les ans. Cela conduit à de fréquentes ruptures de soins.

Ce ne seront pas les filières, qui savent très bien s'organiser pour respecter les délais, qui pâtiront de cette mesure, mais le demandeur d'asile isolé, qui s'adressera à une association.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Avis défavorable. C'est un pas en avant du Gouvernement dans le sens de la position de la commission des finances qui est remis en cause ici.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - C'est la date d'arrivée sur le territoire et non de dépôt du dossier qui lance le délai de trois mois.

Les demandeurs d'asile, comme les expatriés qui reviennent, ont ce délai de trois mois.

Mme Laurence Cohen.  - C'est un non-sens sanitaire - les personnes étrangères continueront d'être malades -, économique car les maladies s'aggraveront et les soins coûteront plus cher, et humanitaire : vous cédez aux fantasmes de la droite la plus extrême !

Je citerai le professeur Frédéric Adnet, chef des urgences de l'hôpital Avicenne de Bobigny, qui qualifiait, dans le Quotidien du médecin du 28 octobre, le tourisme médical de « fantasme complet ». Et d'ajouter : « je n'ai jamais observé, on ne m'a jamais rapporté de patients qui présenteraient leur carte d'AME pour faire soigner leur cancer. Je mets au défi quiconque de prouver l'existence d'un tel tourisme médical ; il n'existe aucun chiffre, seulement des bruits de couloir. Les patients bénéficiaires de l'AME non pas calculé de venir en France pour soigner des pathologies chroniques. Pourtant, je travaille dans l'hôpital le plus proche de l'aéroport de Roissy, donc si le tourisme médical existait, on le verrait chez nous. ». Puis de conclure : « l'AME a un effet de médecine préventive et permet d'éviter la dissémination des pathologies contagieuses. On a tout intérêt, au contraire, à maintenir ce dispositif et même à l'étendre aux personnes qui réside depuis moins de trois mois sur le sol français. »

Tout est dit ! Nous soutenons totalement cet amendement.

M. Jean-Yves Leconte.  - La liberté de circulation dans l'Union européenne a conduit à l'adoption de ce délai de trois mois. Les demandeurs d'asile bénéficient de la PUMA dès leur enregistrement. Quand ils entrent dans le droit commun, comment cela s'articule-t-il ? Quel budget sera sollicité si ce n'est plus celui de la PUMA ?

Le Gouvernement a supprimé l'an passé la possibilité pour un pensionné français rentrant pour une courte période de bénéficier de l'assurance maladie s'il n'a pas cotisé quinze ans. Idem pour les conjoints au 1er janvier 2020. C'est profondément sexiste car les conjoints sont principalement des femmes. Nous aurons des difficultés avec cette disposition.

L'amendement n°II-419 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-37, présenté par M. Joyandet, au nom de la commission des finances.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  Après le V de la section II du chapitre II du titre IV de la première partie du code général des impôts, est insérée une division ainsi rédigée :

« V bis : Aide médicale d'urgence

« Art. 962 ter.  -  Le droit aux prestations mentionnées à l'article L. 251-2 du code de l'action sociale et des familles est conditionné par le paiement d'un droit annuel par bénéficiaire majeur, d'un montant de 30 euros ».

II.  -  Le titre V du livre II du code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° Le chapitre Ier est ainsi rédigé :

« Chapitre Ier

« Aide médicale d'urgence

« Art. L. 251-1.  -  Tout étranger résidant en France sans remplir la condition de régularité mentionnée à l'article L. 160-1 du code de la sécurité sociale depuis plus de trois mois, et dont les ressources ne dépassent pas le plafond mentionné à l'article L. 861-1 du même code a droit, pour lui-même et les personnes à sa charge, à l'aide médicale d'urgence, sous réserve, s'il est majeur, de s'être acquitté, à son propre titre et au titre des personnes majeures à sa charge, telles que définies ci-dessus, du droit annuel mentionné à l'article 962 ter du code général des impôts.

« En outre, toute personne qui, ne résidant pas en France, est présente sur le territoire français, et dont l'état de santé le justifie, peut, par décision individuelle prise par le ministre chargé de l'action sociale, bénéficier de l'aide médicale d'urgence dans les conditions prévues par l'article L. 251-2.

« De même, toute personne gardée à vue sur le territoire français, qu'elle réside ou non en France, peut, si son état de santé le justifie, bénéficier de l'aide médicale d'urgence, dans des conditions définies par décret.

« Art. L. 251-2.  -  La prise en charge, assortie de la dispense d'avance des frais, concerne :

« 1° La prophylaxie et le traitement des maladies graves et des douleurs aiguës ;

« 2° Les soins liés à la grossesse et ses suites ;

« 3° Les vaccinations réglementaires ;

« 4° Les examens de médecine préventive.

« La prise en charge est subordonnée, lors de la délivrance de médicaments appartenant à un groupe générique tel que défini à l'article L. 5121-1 du code de la santé publique, à l'acceptation par les personnes mentionnées à l'article L. 251-1 du présent code d'un médicament générique, sauf :

« 1° Dans les groupes génériques soumis au tarif forfaitaire de responsabilité défini à l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale ;

« 2° Lorsqu'il existe des médicaments génériques commercialisés dans le groupe dont le prix est supérieur ou égal à celui du princeps ;

« 3° Dans le cas prévu au troisième alinéa de l'article L. 5125-23 du code de la santé publique.

« À l'exclusion des cas où ces frais concernent des bénéficiaires mineurs, la prise en charge mentionnée au premier alinéa du présent article peut être subordonnée pour certains frais relatifs à des prestations programmées et ne revêtant pas un caractère d'urgence à un délai d'ancienneté de bénéfice de l'aide médicale de l'État. Ce délai ne peut excéder neuf mois. Par dérogation, lorsque l'absence de réalisation de ces prestations avant l'expiration de ce délai est susceptible d'avoir des conséquences vitales ou graves et durables sur l'état de santé de la personne, leur prise en charge est accordée après accord préalable du service du contrôle médical mentionné à l'article L. 3151 du code de la sécurité sociale. »

« Art. L. 251-3.  -  Les modalités d'application du présent chapitre sont déterminées par décret en Conseil d'État. » ;

2° L'article L. 252-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 252-1.  -  La demande d'aide médicale de l'État est déposée auprès d'un organisme d'assurance maladie qui en assure l'instruction pour le compte de l'État.

« Toutefois, elle peut être déposée auprès d'un établissement de santé dans lequel le demandeur est pris en charge. Dans ce cas, l'établissement transmet le dossier de demande, dans un délai de huit jours, à l'organisme d'assurance maladie. »

III.  -  Le I entre en vigueur à compter du 1er janvier 2021.

IV.  -  Le II entre en vigueur à compter du 1er janvier 2020.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Défendu. Le débat a eu lieu.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Avis défavorable.

À la demande du groupe CRCE, l'amendement n°II-37 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°49 :

Nombre de votants 317
Nombre de suffrages exprimés 288
Pour l'adoption 146
Contre 142

Le Sénat a adoptéet l'article 78 quindecies est ainsi rédigé.

L'amendement n°II-364 rectifié n'a plus d'objet.

Article 78 terdecies

M. le président.  - Amendement n°II-38, présenté par M. Joyandet, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Cet amendement supprime l'article 78 terdecies opérant un transfert financier.

M. le président.  - Amendement identique n°II-420, présenté par M. Jomier et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

M. Bernard Jomier.  - La confusion entre les étrangers en situation irrégulière et régulière n'est pas souhaitable.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - L'article est favorable à l'éligibilité des demandeurs d'asile aux soins urgents. Ils n'y auraient même plus droit.

M. Bernard Jomier.  - Je ne vous ferai pas l'injure de croire que vous ne compreniez pas qu'il s'agit d'un amendement de cohérence avec notre position. Nous ne souhaitons pas pénaliser quiconque, évidemment.

Mme Laurence Cohen.  - Seuls 51 % des migrants éligibles à l'AME la demandent. Après cinq ans de résidence en France, 356 des personnes concernées n'ont toujours pas l'AME. De fait, 33 % n'ont jamais entendu parler du dispositif et 41 % ont abandonné des démarches jugées trop complexes. Nous soutenons les amendements.

Les amendements identiques nosII-38 et II-420 sont adoptés.

L'article 78 terdecies est supprimé.

L'article 78 quaterdecies est adopté.

Article 78 quindecies

M. le président.  - Amendement n°II-39, présenté par M. Joyandet, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - La commission des finances n'est pas favorable aux demandes de rapport. Cet amendement supprime donc l'article.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Les documents de politiques transversales retracent l'effort financier consacré aux politiques interministérielles. L'Assemblée nationale a estimé qu'un « jaune budgétaire » serait utile sur la politique de prévention. Avis défavorable.

L'amendement n°II-39 n'est pas adopté.

L'article 78 quindecies est adopté.

Article 78 sexdecies

M. le président.  - Amendement n°II-40, présenté par M. Joyandet, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Il s'agit également d'un rapport... Dans son élan, la commission des finances avait souhaité le supprimer. Mais celui-ci porte sur les maladies rares. Médecins et familles le jugent utiles.

L'amendement n°II-40 est retiré.

M. Martin Lévrier.  - Bravo !

L'article 78 sexdecies est adopté.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales.  - À la suspension, la commission des affaires sociales se réunira pour examiner les amendements sur le PLFSS.

M. le président.  - Nous suspendrons vers 20 heures.

SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial de la commission des finances .  - La mission porte les politiques publiques de solidarités. Elle est dotée de 25,5 milliards d'euros, en hausse de plus de 6 % soit 1,6 milliard d'euros, en raison du dynamisme structurel et de la valorisation de la prime d'activité et de l'allocation adulte handicapé (AAH).

Nous saluons cet effort, hélas insuffisant. En outre, ce budget cache mal les discrets mais dommageables coups de rabots, touchant les plus fragiles, notamment sur la prime d'activité et sur l'allocation adulte handicapé. Des incertitudes pèsent sur la montée en charge des dépenses pour la prime d'activité : les caisses d'allocations familiales (CAF) sont submergées de demandes, comme nous avons pu le constater en nous rendant dans celles du Nord et du Val d'Oise.

Désormais, le dispositif compte 4,5 millions de foyers bénéficiaires. Leur profil évolue puisque les tranches de revenu les plus élevées progressent. Le dispositif fait baisser le taux de pauvreté de 0,5 point mais augmente son intensité dans les mêmes proportions, ce qui interroge.

Des incertitudes entourent le financement et le périmètre du revenu universel d'activité. L'AAH sera-t-elle intégrée ? Le Gouvernement a posé les lignes rouges, l'absence de toute conditionnalité par rapport à l'activité et le maintien des moyens.

Les départements s'inquiètent du financement de la prise en charge des mineurs non accompagnés, dont le coût est estimé à 2 milliards d'euros, alors que le budget dédié atteint péniblement 162 millions d'euros.

Malgré ces insuffisances, la commission des finances a donné un avis favorable.

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - Bravo !

M. Éric Bocquet, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Le budget souffre d'autres insuffisances et incohérences. D'abord, nous nous interrogeons sur la stratégie de prévention et de protection de l'enfance, lancée en octobre dernier. L'intention est louable, nous nous interrogeons sur le financement : le montant de 50 millions d'euros prévu sera-t-il suffisant ?

Par ailleurs, le système d'aide alimentaire, qui bénéficie à 5,5 millions de personnes, est fragilisé par les difficultés de gestion liées au fonds européen d'aide aux plus démunis. Les plus précaires de nos concitoyens ne doivent pas être victimes de la mauvaise gestion de l'État.

Votre réforme du mécénat est également incohérente : les associations d'aide alimentaire - dites « loi Coluche » - ont été exclues du champ d'application du dispositif. Néanmoins, cette dérogation s'applique seulement aux structures « qui procèdent à la fourniture gratuite de repas », en excluant les épiceries solidaires, ce qui serait fort dommage.

Enfin, plus que jamais, sur la priorité politique - déclarée comme telle par le Gouvernement- de la lutte contre les violences faites aux femmes, il faut passer des paroles aux actes. Habitué à s'attribuer la création de mesures déjà existantes ou à faire fi des politiques passées, le Gouvernement semble, sur ce sujet, se heurter à l'épineuse question budgétaire.

Nous sommes loin, en effet, du milliard d'euro annoncé. Pire, les crédits du programme 137 diminuent. Comment seront financées les mesures annoncées par Mme Schiappa ? Son cabinet n'a pas daigné nous répondre...

Dans ces conditions, nous présenterons un amendement, avec Arnaud Bazin, tendant à augmenter les crédits dédiés à la lutte contre les violences faites aux femmes d'un million d'euros.

Certaines associations, qui ont vu leur charge de travail croître après #metoo, n'ont pas vu leur subvention augmenter en conséquence.

La commission des finances a donné cependant un avis favorable.

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales .  - Je salue l'augmentation de l'AAH. Toutefois, l'augmentation de 0,3 % proposée pour 2020 afin de freiner la hausse des dépenses aura pour effet de dégrader dès l'an prochain le pouvoir d'achat des allocataires. Nous devrons veiller à ce que cette sous-revalorisation n'amorce pas un nouveau décrochage. Elle ne devrait pas être considérée comme un minimum social de droit commun.

Sa réduction pour les couples a sans doute été trop brutale. Je suis réservé sur son absorption dans un revenu universel d'activité. En revanche, son rapprochement avec l'allocation pour invalidité est intéressant. Il simplifierait le parcours des allocataires.

Après quatre ans d'existence, il demeure difficile d'évaluer les effets de la prime d'activité sur l'économie. Elle aura au moins eu le mérite de réduire le taux de pauvreté. Quant à la « stratégie pauvreté », les collectivités territoriales s'inquiètent du processus de contractualisation, qu'ils apparentent à une nouvelle forme de tutelle de l'État.

Au sein du budget de l'égalité femmes-hommes, qui reste stable à l'euro près en dépit des ambitions affichées, nous souhaitons maintenir le niveau des crédits consacrés à la lutte contre la prostitution.

Sous ces réserves, la commission des affaires sociales a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission.

M. Jean-Louis Tourenne .  - Cette mission porte un magnifique titre qui laisse augurer harmonie et cohésion sociale. Cependant, la pauvreté touche 9 millions de personnes dont 3 millions d'enfants. On recense 700 enfants à la rue à Paris. La moitié des familles ne peuvent financer un logement étudiant. Quant aux fortunes les plus riches, elles s'envolent à un niveau sans précédent.

Cette année, 138 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint ; 22 000 subissent des violences. « Vaste programme ! », aurait dit le Général de Gaulle, s'il s'était agi d'un autre sujet. Il justifie une forte détermination. On pourrait penser que les 25,5 milliards d'euros de la mission constituent une enveloppe généreuse. Hors prime d'activité et AAH, il n'en est rien. Seulement 1,2 milliard d'euros est effectivement consacré aux actions de raccommodage d'un tissu social qui part en lambeaux.

Le Gouvernement excelle dans les présentations en trompe-l'oeil, arguant des centaines d'euros supplémentaires pour la prime d'activité et recourt à l'envi aux primes.

Pourquoi cet acharnement à faire payer les plus pauvres ? Ils souffrent de la baisse des APL, sans profiter des mesures fiscales appliquées à l'impôt sur les sociétés ou à la taxe d'habitation. Les plus modestes ne profitent pas de la prime d'activité.

Votre réforme de l'AAH est mesquine. Vous pénalisez 67 500 couples !

Pourtant, un débat budgétaire devrait être un moment de créativité, d'enthousiasme, d'innovation, pour améliorer les conditions du vivre ensemble. Il n'en est rien avec ce projet de loi de finances ! Vous augmentez les crédits de la lutte contre la pauvreté, mais pour neuf millions de pauvres ! Vous ne consacrez nullement un  milliard d'euros mais 280 millions d'euros à la lutte contre les violences faites aux femmes. Les actions de prévention ne sont que des reprises. Les femmes qui manifestaient récemment attendaient autre chose que ces mesurettes !

M. le président.  - Il faut conclure !

M. Jean-Louis Tourenne.  - Les dividendes augmentent plus vite que les salaires. Décidément, le « nouveau monde » marche sur la tête ! (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)

M. Julien Bargeton.  - Ce n'est pas caricatural !

M. Guillaume Arnell .  - (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE) Le 9 juillet 1848, Victor Hugo déclarait : « Réduire la misère ! Oui, cela est possible. Les législateurs et les gouvernants doivent y songer sans cesse ; car, en pareille matière, tant que le possible n'est pas le fait, le devoir n'est pas rempli. »

Je me félicite de l'augmentation de 6,7 % des crédits de la mission, qui atteignent 25,5 milliards d'euros.

L'augmentation exponentielle de la prime d'activité et de l'allocation adulte handicapé (AAH) explique cette hausse. Ces deux dispositifs sont des acquis sociaux à pérenniser et je salue leur augmentation tout en regrettant les coups de rabot à l'encontre des plus fragiles.

Les crédits de la protection juridique des majeurs financent 497 000 mesures de protection, ainsi que le soutien aux nombreux tuteurs. Il est indispensable d'en flécher une partie sur l'information aux familles pour que celles-ci prennent l'habitude de saisir le juge des tutelles, ce qui est encore loin d'être le cas dans tous les territoires, à Saint-Martin par exemple. Le nombre de majeurs protégés est de 730 000 et il a vocation à augmenter.

Quelques mots de la stratégie interministérielle de lutte contre la pauvreté. L'Insee fixe le taux de pauvreté en 2018 à 14,7 % de la population, en hausse de 0,6 point depuis 2017 : 9,3 millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté. Je salue l'approche contractuelle avec les départements, qui sont les chefs de file de l'action sociale dans les territoires. Ils consacrent 44 millions d'euros à des actions comme les petits-déjeuners gratuits ou la tarification sociale de la cantine.

L'aide alimentaire concerne 5,5 millions de personnes en 2017. La 37e campagne des Restos du coeur commence ces jours-ci, et je salue toutes les associations qui interviennent auprès des plus démunis. Elles sont le point de contact pour l'accompagnement social.

Plus de 40 millions d'euros sont consacrés à la contribution au fonds européen d'aide aux plus démunis. Les difficultés de gestion font néanmoins peser des risques de perte budgétaire pour le système d'aide alimentaire français.

La montée en charge de la prime d'activité se poursuit, malgré des difficultés de gestion par les caisses d'allocations familiales. La mise en oeuvre du revenu universel d'activité est entourée d'incertitudes sur le financement et le périmètre. Les crédits affectés à la prévention des violences faites aux femmes diminuent, alors que la situation est terrifiante. Je forme le voeu que les 30 mesures nouvelles annoncées par le Premier ministre fassent l'effet d'un électrochoc.

Le groupe RDSE salue l'augmentation des crédits de la mission, qu'il votera.

M. Dominique Théophile .  - Les crédits de cette mission sont en hausse de 6 % par rapport à la loi de finances initiale, soit 1 milliard d'euros supplémentaires, même si 839 millions d'euros ont été ouverts en projet de loi de finances rectificative. Cette augmentation intervient après plusieurs hausses successives : 30 % depuis le début du quinquennat.

Le programme 304 pour l'inclusion sociale s'établit à 11 milliards d'euros ; le programme 157, handicap et dépendance, à 12,2 milliards ; le 137, égalité entre les femmes et les hommes, à 30 milliards ; et le 124, conduite et soutien des politiques, à 1,3 milliard.

Le budget traduit des engagements forts du Gouvernement : soutien au pouvoir d'achat et lutte contre la pauvreté. La prime d'activité a été revalorisée en décembre pour répondre à la crise des gilets jaunes. En 2020, les dépenses dédiées à cette prime s'élèveront à 9,5 milliards d'euros. Le nombre d'allocataires a augmenté de 47 % et les moyens ont crû en conséquence. Le gain peut aller jusqu'à 100 euros par mois pour un salarié au Smic, dont le montant a été réévalué.

L'AAH s'établit depuis le 1er novembre à 900 euros par mois, soit 40 euros supplémentaires.

L'égalité entre les femmes et les hommes, érigée en grande cause du quinquennat, est prise en compte à travers des actions d'accompagnement aux victimes, de lutte contre la prostitution et l'exploitation des êtres humains, d'éducation à la vie affective et sexuelle.

J'en viens à la précarité menstruelle. Ma collègue Patricia Schillinger a rendu un rapport au Gouvernement le mois dernier. Un amendement avait été déposé l'an passé, retiré au vu de la réponse de la ministre. Nous reprenons les conclusions du rapport dans l'amendement n°II-433.

Cette mission « Égalité des chances » participe aux efforts de réduction du déficit budgétaire grâce à la baisse des dépenses de fonctionnement : 11,75 % en 2019.

Nous voterons les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

M. Emmanuel Capus .  - La solidarité, grande chose de la démocratie, selon le mot de Victor Hugo, occupe chaque année une place singulière dans les discussions budgétaires, car elle est au fondement du modèle social français. Elle se laisse mal encadrer par des prévisions trop rigides. Les crédits sont en hausse de 6,7 %, soit 1,6 milliard d'euros supplémentaires. Nous sommes largement au-delà du plafond des dépenses triennales, 22 milliards d'euros.

Les dépenses fiscales, qui ont augmenté de façon dynamique, 20 % ces dix dernières années, soutiennent des politiques - abattement sur les pensions, crédit d'impôt pour dépenses de garde - appréciées de nos concitoyens et utiles. Certaines autres dépenses augmentent par construction, telle l'AAH, fixée à 900 euros par mois, qui représente 40 % des crédits. Le vieillissement de la population et le faible taux de sortie des dispositifs expliquent cette hausse. Je salue la revalorisation à 900 euros à taux plein, car de telles dépenses de solidarité font honneur à notre société.

D'autres dépenses plus conjoncturelles sont importantes, comme la prime d'activité qui concernera en 2020 un actif sur quatre, pour 10 milliards d'euros.

Le Sénat a accepté les mesures de décembre dernier en faveur des gilets jaunes, en raison de l'urgence de la situation. Elles méritent cependant qu'on y réfléchisse. Quelle est leur cohérence à long terme ?

Des incertitudes pèsent sur le budget de l'État, et les dépenses destinées à endiguer des colères populaires n'ont pas toujours les résultats espérés. Je pense à la prime d'activité ou au revenu universel d'activité (RUA) dont nous ignorons la mécanique. L'AAH sera-t-elle absorbée par ce dispositif ? Quel rôle joueront les départements ?

L'incertitude pèse aussi sur les collectivités territoriales. Le sujet sensible des mineurs non accompagnés préoccupe les départements car la hausse de 20 % des crédits est insuffisante, en décalage avec la réalité du terrain. Les départements craignent que l'État se défausse sur eux. La ministre doit nous rassurer !

Nous nous réjouissons que ce ministère participe à l'effort de réduction de la dépense publique, par la rationalisation des effectifs et de la gestion immobilière.

Les Indépendants partagent l'esprit de cette politique de solidarité davantage axée sur le travail. Nous voterons ces crédits, tout en restant vigilants sur le sérieux des choix budgétaires à venir.

Mme Élisabeth Doineau .  - Le 13 septembre 2018, le président de la République annonçait son intention de rénover le système des minima sociaux afin de promouvoir une réelle égalité des chances.

Les crédits de la mission augmentent de 6,7 %, portés par la réévaluation de l'AAH et de la prime d'activité, avant la mise en place du revenu universel d'activité. L'examen budgétaire revêt un rôle plus que jamais central.

Le programme 157 regroupe les crédits consacrés à l'AAH, en hausse de 2,5 % par rapport à 2019, à 12,2 milliards d'euros. Toutefois, le projet de loi de finances ne prévoit qu'une augmentation maîtrisée de 0,3 % de l'allocation, ce qui invite à la prudence. Une sous-réévaluation induit un risque de décrochage.

Nous sommes réservés sur l'absorption de l'AAH dans le RUA.

Le programme 304 concerne la prime d'activité, qui est devenue une dépense majeure du soutien au pouvoir d'achat des plus modestes. Le passage au RUA est censé se faire à enveloppe constante. Cette méthode est-elle vraiment crédible, si le taux de recours à la prime, actuellement de 50 %, augmentait ? Vous lancez une campagne d'expérimentation. C'est bien. Mais les départements souhaitent que les nouvelles dépenses sortent des accords de Cahors qui limitent les dépenses de fonctionnement des départements. De nouvelles expérimentations, ce sont de nouvelles dépenses.

En ce qui concerne les mineurs non accompagnés, je réitère ma demande : la compétence doit être assurée par l'État car les départements n'arrivent pas à proposer des solutions satisfaisantes d'hébergement et de prise en charge par des psychocliniciens, pour soulager les traumatismes psychologiques de ces jeunes.

Je regrette que le programme 137 soit reconduit en 2020 dans un montant similaire à 2019.

Je soutiendrai l'amendement de M. Mouiller qui vise à rétablir les crédits amputés. Le groupe UC votera les crédits de cette mission, en espérant que le Gouvernement entendra nos appels à la vigilance.

Mme Michelle Gréaume .  - Près de 15 % de la population française vit en dessous du seuil de pauvreté, un enfant sur cinq. La France, sixième puissance économique mondiale, est un pays où les pires injustices côtoient les fortunes les plus insolentes. Les chiffres recouvrent des parcours de vie faits d'angoisses, de projets refoulés et de peur de l'avenir. Le chantier de l'égalité est immense ! Car l'aumône n'est pas la justice sociale, ni la charité le respect de la dignité.

Au-delà des apparences, votre budget n'est pas à la hauteur des exigences. La revalorisation de la prime d'activité n'est qu'un cache-misère social. Les gilets jaunes et tous les travailleurs ne demandent pas la charité, ils veulent vivre dignement de leur travail.

La vraie question est celle de l'augmentation des salaires. À l'inverse, vous maintenez le taux du Smic à un niveau bas et favorisez la régression salariale par des exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires.

La revalorisation de l'AAH à 900 euros par mois, en dessous du seuil de pauvreté, n'a rien d'une mesure exponentielle... Elle aurait dû être faite il y a déjà quelques années, pour compenser le coût de la vie. Pas moins de 75 000 de ses allocataires vivent en couple. La règle actuelle est pénalisante financièrement et très discutable humainement, puisqu'elle prend en compte, pour le calcul d'un droit individuel, les revenus du conjoint. Cela conduit à une dépendance économique au sein du couple. L'égalité femme-homme, grande cause du quinquennat, n'a toujours pas de traduction budgétaire. Les crédits sont en baisse, contrairement à ce que vous laissez entendre dans vos déclarations publiques.

Pire, les crédits du programme 137 baissent. Votre Gouvernement est loin d'être à la hauteur de la mobilisation des Français sur les violences faites aux femmes. Le Grenelle risque d'être à l'image de ce Gouvernement : beaucoup de bonnes intentions, mais quels moyens humains et financiers ?

Nos concitoyens attendent plus que des demi-mesures. Ils vous le rappelleront à partir du 5 décembre.

Notre groupe ne votera pas les crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; M. le rapporteur spécial Éric Bocquet applaudit également.)

Mme Chantal Deseyne .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) S'il y a un domaine où les forces de la Nation ne doivent pas faiblir, c'est la solidarité. Les crédits sont en hausse et la prime d'activité comme l'AAH sont revalorisées.

Le Gouvernement s'adresse un satisfecit mais les rapports de la commission des finances et de la commission des affaires sociales ont noté des coups de rabot importants. C'est là l'ambiguïté de ce budget, où des mesures populaires voisinent avec des restrictions plus discrètes.

L'AAH bénéficie d'un effort du Gouvernement. Notre majorité l'avait déjà revalorisée de 25 % entre 2008 et 2010. Un quart des allocataires de l'AAH vivent en couple et 40 % y perdront. Je déplore la brutalité de cet alignement par le bas. Les calculs montrent une perte pouvant s'élever à plus de 180 euros pour 7 000 à 10 000 personnes. En 2020, l'AAH ne sera revalorisée que de 0,3 %. Comme en 2019, c'est inférieur à l'inflation. Souhaitons que cette mesure, qui permet au Gouvernement de réaliser des économies, ne devienne pas systématique.

L'AAH se situe toujours sous le seuil de pauvreté. Créée par la loi de 2005, l'AAH compense spécifiquement l'incapacité, parfois définitive, à travailler. Ce n'est pas un minimum social comme un autre. Les associations s'inquiètent du manque de lisibilité de votre réforme. Madame la ministre, rassurez les personnes handicapées et leurs familles.

Il y a aussi des déséquilibres dans la prime d'activité, qui représente une grande part des crédits de la mission. Les salaires les plus faibles n'en bénéficient pas, tandis que le champ a été élargi aux revenus plus élevés. La prime n'est plus indexée sur l'inflation et croît de seulement 0,3 %. Les efforts en faveur de l'AAH et de la prime d'activité sont insuffisants.

Comment enfin seront financées les mesures en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes ? Les crédits de sortie de la prostitution baissent de 40 %. C'est contradictoire avec la loi du 13 avril 2016, dont la mise en oeuvre a pris du retard.

Je soutiendrai donc l'amendement présenté par le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.

Le groupe Les Républicains constate tout de même une évolution positive des crédits de la mission et votera en faveur de leur adoption. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

La séance est suspendue à 20 h 05.

présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président

La séance reprend à 21 h 35.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » comprend quatre programmes relevant de plusieurs ministères, et traduit les engagements présidentiels en matière d'inclusion et de lutte contre les inégalités, portés par l'acte II du quinquennat.

Les crédits augmentent de 8 % par rapport à 2019, soit 1,8 milliard d'euros supplémentaires pour les travailleurs pauvres, les familles vulnérables, les personnes dépendantes et en situation de handicap et la lutte contre les inégalités et violences faites aux femmes.

La stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, présentée par le président de la République le 13 septembre 2018, avec un budget de 8,5 milliards d'euros sur le quinquennat, s'appuie sur la contractualisation entre l'État et les conseils départementaux et la participation des personnes concernées.

Le programme 304 porte les crédits destinés à des mesures telles que les 150 points conseil budget, la cantine à un euro, le petit-déjeuner à l'école pour, à terme, 200 000 élèves des quartiers prioritaires de la politique de la ville.

En 2019, 99 départements et deux métropoles, Toulouse et Nantes, se sont engagés dans la contractualisation.

Soutien à la parentalité, PMI, levée des freins à l'emploi, inclusion numérique, accès à l'alimentation, réussite éducative ; autant d'actions qui trouvent des réalisations concrètes. En 2020, 219 millions d'euros de crédits sont inscrits au programme 304, dont 175 millions d'euros seront consacrés à la contractualisation avec les départements.

Depuis le 1er janvier 2019, la prime d'activité est revalorisée de 90 euros au niveau du Smic et le nombre de bénéficiaires a crû de 52 %, soit 1,25 million de personnes. Avec la hausse du Smic, c'est un gain de pouvoir d'achat de 100 euros pour un salarié. Les crédits dédiés s'élèvent à 9,5 milliards, en hausse de 700 millions.

La recentralisation du RSA en Guyane et à Mayotte depuis 2019 sera étendue à La Réunion en 2020 : c'est 700 millions de crédits supplémentaires sur le programme 304, pour 127 000 personnes.

Le programme 157 est un des leviers pour le soutien des personnes en situation de handicap. La revalorisation de l'AAH était un engagement présidentiel majeur : elle a été portée à 860 euros par mois en novembre 2018 puis à 900 euros en novembre 2019, et bénéficie à 1,2 million de foyers. En 2020, les crédits s'élèvent à 10,6 milliards d'euros, en hausse de 300 millions.

La politique en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes, grande cause du quinquennat, inscrit ses actions dans la continuité du comité interministériel de 2018. L'année 2020 verra la concrétisation des annonces du Grenelle contre les violences conjugales du 25 novembre.

Alors qu'une femme meurt tous les trois jours de ces violences, le Grenelle sonne la mobilisation générale : Nicole Belloubet, Julien Denormandie, Christophe Castaner, Jean-Michel Blanquer sont mobilisés pour offrir des outils opérationnels adaptés à la protection des victimes et de leurs enfants. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

Examen des crédits de la mission et des articles rattachés

Article 38

M. le président.  - Amendement n°II-465 rectifié ter, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

 

 

 

Handicap et dépendance

360 000 000

 

360 000 000

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 

 

 

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

360 000 000

 

360 000 000

TOTAL

360 000 000

360 000 000

360 000 000

360 000 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Louis Tourenne.  - Chaque handicapé doit percevoir l'allocation à laquelle il a droit sans que celle-ci soit réduite en raison de sa situation familiale. L'AAH est un revenu qui se substitue à un salaire. Accepteriez-vous que votre salaire soit réduit au motif que votre conjoint en perçoit un également ? Rendre l'AAH dégressive à partir de 19 505 euros rendrait les femmes handicapées encore plus dépendantes de leur conjoint, sachant que l'agence des droits fondamentaux de l'Union européenne estime à 34 % le nombre de femmes handicapées victimes de violences physiques ou sexuelles de la part de leur partenaire.

Permettons aux 250 000 bénéficiaires concernés de recouvrer leur autonomie financière et de profiter pleinement de la hausse de l'AAH.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Cet amendement, qui abonde le programme « Handicap et dépendance » de 360 millions d'euros, tire les conséquences d'une mesure qui n'a pas été votée. Ce prélèvement, qui conduirait à aggraver le déficit, n'est pas réaliste. Avis défavorable.

M. Éric Bocquet, rapporteur spécial.  - Pour ma part, je suis favorable à cet amendement d'appel.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - J'entends vos inquiétudes. L'AAH est une prestation sociale destinée à assurer des conditions de vie dignes aux personnes handicapées. Nous concentrons la solidarité nationale sur ceux qui en ont le plus besoin. C'est pourquoi le calcul de l'AAH prend en compte l'ensemble des ressources du foyer. Les modalités de prise en compte des revenus du conjoint sont cependant plus favorables que pour les autres minima sociaux.

Le président de la République s'est engagé pour le pouvoir d'achat des adultes handicapés, avec une forte revalorisation de l'AAH : 2 milliards d'euros sur le quinquennat. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Oui, l'AAH est passée de 860 à 900 euros. Mais certaines personnes handicapées verront leurs ressources baisser quand elles sont en couple.

Selon vous, c'est un minima social ; pour moi, c'est un revenu de remplacement pour des personnes qui ne peuvent pas travailler.

Dans une enveloppe budgétaire fermée, nous n'avons d'autre choix que de prendre des crédits sur une autre politique. Mais il faut respecter certaines priorités, certains idéaux. Je sais que le gage ne résistera pas : au Gouvernement de trouver les crédits nécessaires.

L'amendement n°II-465 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-82, présenté par M. Mouiller, au nom de la commission des affaires sociales.

I.  -  Créer le programme :

Évaluation et hébergement d'urgence des mineurs non accompagnés

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

162 000 000

 

162 000 000

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 

 

 

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse

et de la vie associative

dont titre 2

 

 

 

 

Évaluation et hébergement d'urgence des mineurs non accompagnés 

162 000 000

 

162 000 000

 

TOTAL

162 000 000

162 000 000

162 000 000

162 000 000

SOLDE

0

0

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - Cet amendement crée au sein de la mission un nouveau programme budgétaire dédié à l'évaluation et à l'hébergement d'urgence des mineurs non accompagnés. Cette politique coûte très cher aux départements. Nous faisons la transparence sur les moyens qu'y consacre l'État.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - La prise en charge des mineurs non accompagnés, qui a connu une forte hausse ces cinq dernières années, coûte plus de 2 milliards d'euros aux départements. L'aide de l'État est de 162 millions d'euros...

Nous sommes très favorables à cet amendement qui donnera plus de lisibilité à ces crédits.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - La contribution de l'État pour les mineurs non accompagnés inscrite au programme 304 est identifiée et justifiée dans les programmes et rapports annuels de performance. Le Parlement est pleinement informé de l'inscription des crédits et de leur exécution. Il n'est pas de bonne gestion de fragmenter le budget en autant de programmes. Demande de retrait, au bénéfice de la création d'une action dédiée, comme je l'ai proposé à l'Assemblée nationale.

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - Je le maintiens.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Avis défavorable.

L'amendement n°II-82 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-462, présenté par M. Leconte.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

1 700 000

 

1 700 000

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 

 

 

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

1 700 000

 

1 700 000

 

TOTAL

1 700 000

1 700 000

1 700 000

1 700 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Yves Leconte.  - Les carrières sont souvent internationales. Cela suppose une meilleure coopération entre les sécurités sociales des différents pays.

Les certificats de vie pour percevoir sa retraite sont très difficiles à obtenir. Les conventions de sécurité sociale avec la France ne sont pas respectées, faute de personnel dédié dans les ambassades. D'où cet amendement qui renforce le réseau des attachés de sécurité sociale dans les principaux postes diplomatiques et consulaires. Au Brésil, de très nombreuses personnes n'ont toujours aucune réponse après deux ou trois ans de demandes auprès de l'Institut brésilien. Il faudrait créer à l'ambassade un poste de conseiller social comme dans d'autres pays. Cette coopération est essentielle.

M. Éric Bocquet, rapporteur spécial.  - Cet amendement déplace 1,7 million d'euros pour créer dix postes de conseillers sociaux.

La commission des finances a émis un avis défavorable : l'augmentation de masse salariale se fait sans le plafond d'emplois correspondant et le suivi des conventions de sécurité sociale n'entre pas dans le champ de compétence des conseillers sociaux.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je retire l'amendement mais le sujet doit être traité. Trop de personnes ne perçoivent pas leur retraite. (Mme Claudine Lepage applaudit.)

L'amendement n°II-462 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-406 rectifié, présenté par M. Gay, Mmes Primas, Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume, Assassi et Benbassa, M. Bocquet, Mme Brulin, M. Collombat, Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Lienemann, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud, M. Savoldelli, Mme Loisier, MM. Daunis, Raison, Perrin et Duplomb, Mme Procaccia, M. Tissot, Mme Férat, MM. Labbé, Cabanel, M. Bourquin et Montaugé, Mme A.M. Bertrand, MM. Moga et Gremillet, Mmes Morhet-Richaud et Guillemot, M. Duran et Mmes Renaud-Garabedian et Artigalas.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

1 000 000

 

1 000 000

 

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 

 

 

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

M. Fabien Gay.  - Cet amendement transpartisan, qui émane de la commission des affaires économiques, fait suite à l'affaire des faux steaks révélée le 7 juin dernier. Restos du coeur, Banque alimentaire, Croix-Rouge et Secours populaire ont reçu plus de mille tonnes de steaks frauduleux. Elles ont d'elles-mêmes retiré les steaks, réalisé à leurs frais des analyses, stocké les lots concernés, et parfois racheté des aliments. Le rapport de la commission des affaires économiques estime entre 1 et 2 millions d'euros le coût supporté.

Je sais que vous vous êtes engagée sur ce sujet, madame la ministre, et vous remercie de votre écoute. L'État prendrait en charge les coûts de stockage. Nous vous proposons de débloquer 1 million d'euros pour rembourser les associations. Elles en ont besoin. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Nous avons commis, avec Éric Bocquet, un rapport sur l'aide alimentaire qui met en évidence la fragilité des associations et la gestion défaillante par l'administration des aides du programme européen, avec la perte d'au moins 70 millions d'euros en fin de gestion.

Nous sommes favorables à cet amendement. (Mme Sophie Primas s'en réjouit.) L'État s'était engagé à prendre en charge les coûts de stockage, mais les réponses du Gouvernement sur ce point manquent de précision. De fait, les 2 millions d'euros de crédits du programme 304 ne sont pas fléchés.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Le rapport sénatorial a mis en lumière les difficultés des associations, avec lesquelles nous avons longuement échangé.

Après les procès-verbaux de la DGCCRF, une enquête pénale est en cours afin de déterminer les responsabilités de chacun. L'État, France Agrimer et les associations se sont portés parties civiles. L'État, qui a fait une déclaration auprès de l'Office européen de lutte contre la fraude, s'est engagé à prendre en charge le stockage des steaks. La mise en oeuvre a été complexe mais le dispositif est désormais opérationnel. Il faut désormais détruire les 890 tonnes de stocks. L'État assumera cette charge. Retrait ?

M. Fabien Gay.  - Nous avons une différence d'appréciation. Vous assumez certes les frais de stockage futurs, car la procédure va être longue, mais notre amendement prévoit le remboursement des frais engagés depuis le mois d'avril : tests, stockage, rachat de steaks par deux associations, estimés à environ 1,8 million d'euros. Nous proposons une aide d'urgence d'1 million d'euros. Je maintiens donc cet amendement transpartisan.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Les 700 000 euros de frais de stockage antérieur à la procédure seront pris en charge, ainsi que les frais de destruction, soit un total de 1,5 million d'euros, sont pris en charge par l'État qui a passé une convention avec France Agrimer.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Je n'ai pas l'assurance que les 2 millions d'euros en autorisations d'engagement serviront à dédommager les associations. Nous maintenons donc l'avis favorable.

L'amendement n°II-406 rectifié est adopté.

(Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. le président.  - Amendement n°II-466 rectifié ter, présenté par Mme Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

I.  -  Créer le programme :

Protection des enfants dans des situations de violence conjugale

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 

 

 

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

 

 

 

Protection des enfants dans des situations de violence conjugale

1 000 000

 

1 000 000

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Les chiffres sont terribles, la réalité glaçante : 143 000 enfants vivent dans un foyer où la mère a déclaré être victime de violences commises par son conjoint ou ex-conjoint ; 42 % ont moins de 6 ans ; dans 68% des cas, ils sont présents lors des violences. En 2018, 21 enfants sont morts dans le cadre de ces violences et 82 ont perdu leur mère. La prise en charge de ces enfants doit être une priorité.

Le Grenelle a certes évoqué les enfants, mais les annonces ne sont pas accompagnées de financements, comme souvent.

Près de 60 % des enfants concernés souffrent de stress post-traumatique. Il faut mettre en place des dispositifs d'accompagnement systématique comme cela existe en Seine-Saint-Denis, avec un dispositif d'écoute spécifique à l'hôpital, ou en cas de violences routières.

M. Éric Bocquet, rapporteur spécial.  - L'amendement transfère 1 million d'euros vers un nouveau programme « Protection des enfants subissant des violences conjugales ». La commission des finances a émis un avis de sagesse - bienveillante à titre personnel - car les crédits ne correspondent pas à la protection de l'enfance.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - C'est un sujet sensible. Nous prévoyons de renforcer à hauteur de 200 000 euros les moyens du 119, nous généralisons les unités d'accueil et d'écoute spécialisées ; chaque enfant verra ses besoins évalués et aura accès à un parcours de soins notamment psychologiques.

La prise en charge globale implique une mobilisation de l'ensemble des ministères et de plusieurs missions budgétaires. Une enveloppe d'1 million ne nous permettrait pas d'atteindre ces objectifs ambitieux. Demande de retrait.

Mme Laurence Cohen.  - Exercice terrible que d'être obligés de transférer des crédits, dans une enveloppe contrainte, d'une politique essentielle à une autre ! La situation décrite par Sophie Taillé-Polian est terrible. La Seine-Saint-Denis est seule, à ma connaissance, à prendre ainsi en charge les jeunes victimes de ces traumas pendant trois à huit jours.

Vous avez beau nous assurer de l'engagement du Gouvernement, nous voyons bien que le budget est insuffisant. Les centres de prise en charge post-traumatique pour les femmes et les enfants sont en nombre insuffisant, et le financement ne suit pas. Assez de paroles, il faut des actes. Arrêtons ce jeu de bonneteau.

Mme Laurence Rossignol.  - L'extension des horaires du 119 ne répond pas au besoin de prise en charge des enfants qui ont perdu leur mère et dont le père, condamné pour féminicide, a perdu l'autorité parentale. Qu'avez-vous prévu pour eux ? Ils seront pupilles. Ils ont besoin d'un suivi particulier. Or vous n'avez pas prévu un euro supplémentaire pour tenir la moitié de vos engagements !

On ne paie pas de mots la lutte contre les violences faites aux femmes ! Ne nous faites pas le coup du milliard ! (M. Jean-Michel Houllegatte et Mme Claudine Lepage applaudissent.)

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Mobilisation générale, dites-vous ? Il n'y en a pas trace dans ce budget. Vous annoncez des unités d'accueil médico-judiciaires d'ici 2022 : combien d'enfants brisés d'ici-là ? Nous avons besoin d'un engagement réel, profond et sincère. Les femmes mobilisées la semaine dernière devraient vous faire entendre raison.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Nous déchargeons d'obligation alimentaire les enfants dont le parent est condamné pour l'homicide de l'autre parent. En cas de violences conjugales, nous demandons toujours une évaluation de la famille sous l'angle de la protection de l'enfance, mais les crédits sont dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, sur la ligne Protection de l'enfance.

Mme Laurence Rossignol.  - Là où il manque 20 millions d'euros !

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Quand je parle d'horizon 2022, cela signifie bien entendu que la mise en place sera progressive. Nous déployons les mesures sur le territoire.

Mme Laure Darcos.  - Je voterai cet amendement des deux mains. C'est un symbole fort. Ces enfants, souvent orphelins, ont besoin d'un suivi psychologique pour repenser le schéma familial.

Mme Élisabeth Doineau.  - Le groupe UC le votera aussi. La somme d'un million d'euros est à la fois nécessaire et dérisoire. Ces enfants traumatisés ont longtemps été oubliés.

L'amendement n°II-466 rectifié ter est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-657, présenté par M. Bazin, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

 

 

 

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 1 000 000

 

1 000 000

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires,

sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

TOTAL

 1 000 000

1 000 000 

1 000 000

1 000 000

SOLDE

 0

0

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Les crédits dédiés à la lutte contre les violences faites aux femmes, portés par le programme 137, baissent de 500 000 euros, alors que les associations connaissent un afflux sans précédent à la suite du mouvement #MeToo.

Cet amendement dégage 1 million d'euros pour financer les subventions aux associations, les dispositifs de prise en charge des victimes de violence, les référents départementaux ou la plateforme téléphonique 39-19. Le Gouvernement doit financer ces actions et, plus largement, les mesures annoncées dans le cadre du Grenelle. On est loin du milliard d'euros annoncé !

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement s'est engagé à pérenniser les crédits du programme 137 sur le quinquennat. Ils restent stables en 2020, mais les crédits consacrés à l'égalité entre les femmes et les hommes augmentent : un milliard d'euros sera mobilisé par différents ministères, dont 360 millions pour les actions de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes et la protection de l'enfance. Avis défavorable.

Mme Laurence Rossignol.  - Je vous avais suggéré, dans votre intérêt, d'éviter de nous faire le coup du milliard... En effet, 75 % des crédits vont à l'aide au développement. Sans doute considère-t-on que creuser un puits dans un village fait progresser l'égalité, puisque les femmes auront moins à marcher pour aller chercher l'eau !

Pour arriver à 1 milliard, vos collègues ont en outre additionné des crédits pluriannuels. C'est une formidable arnaque de communication !

L'activité des associations, des tribunaux, des commissariats s'est considérablement accrue depuis #MeToo ; pérenniser les crédits, c'est en réalité réduire le soutien aux femmes, puisqu'on ne sera pas capable de répondre à la demande. Un million d'euros, c'est modeste, mais c'est un appel au Gouvernement. (Mme Laure Darcos applaudit.)

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Le sujet est important et a mobilisé les Françaises et les Français. Le Gouvernement a multiplié les annonces non financées. C'est un enfumage caractérisé !

En Espagne ou dans les pays scandinaves, qui y ont mis les moyens, cela fonctionne ! Cessons de nous payer de mots. Il faut agir. Pour cela, il faut des moyens.

M. Emmanuel Capus.  - Très bien.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Il y a 1,16 milliard d'euros inscrits dans le projet de loi de finances 2020 en autorisations d'engagement mais seulement 557 millions d'euros en crédits de paiement. La moitié sont des crédits internationaux ; la moitié de ce qui reste concerne les salaires des enseignants d'histoire-géographie qui font une sensibilisation à l'égalité fille-garçon !

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - Exactement ! (Mme Laurence Rossignol approuve.)

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Face à ce milliard virtuel, nous proposons un million concret. (Applaudissements sur toutes les travées, à l'exception de celles du groupe LaREM)

L'amendement n°II-657 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-463, présenté par Mme Schillinger et les membres du groupe La République En Marche.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

700 000

 

700 000

 

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

300 000

 

300 000

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires,

sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

M. Julien Bargeton.  - Trop de femmes n'ont pas les moyens de se procurer des protections périodiques. Le rapport de Mme Schillinger, « Précarité? menstruelle : changeons les règles », remis au Gouvernement en octobre 2019, préconise d'expérimenter la libre distribution de protections périodiques dans différents lieux accueillant du public, notamment les plus vulnérables, comme les centres d'hébergement d'urgence, ainsi que les établissements d'enseignement car certaines jeunes filles ne se rendent pas en cours pendant leurs règles faute d'accès suffisant à des protections périodiques.

Ce rapport a été bien accueilli par les acteurs de la solidarité et par l'ADF, puisque certaines collectivités s'engagent dans ce chantier.

M. Éric Bocquet, rapporteur spécial.  - La commission des finances a émis un avis défavorable, à moins que le Gouvernement ne s'engage en séance à préserver les crédits du programme support. Cet amendement devrait être porté par le Gouvernement, s'agissant d'une initiative gouvernementale.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Il est temps de faire tomber les tabous. Les règles ne sont ni une maladie, ni une honte. Mais la précarité menstruelle a des conséquences sur la santé et le bien-être des femmes. L'expérimentation que propose Mme Schillinger est à l'étude. La délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale prépare également un rapport.

Les moyens de la mission sont déjà mobilisés sur le sujet. Nous étudions la possibilité de financer une expérimentation pour les femmes vivant dans les rues et en centre d'hébergement. Retrait ?

M. Julien Bargeton.  - Il est maintenu.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. (Mme Laurence Rossignol s'en étonne.)

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - Je soutiens cet amendement. L'an dernier, le Gouvernement nous avait assurés de son engagement, mais il n'y a eu aucune avancée. (Mme Laurence Cohen applaudit.)

M. Pascal Savoldelli.  - Absolument. J'ai en mémoire nos débats sur la TVA, notamment. Le Gouvernement avait promis une expérimentation. Derrière l'aspect financier, il y a une question de dignité. Étudiant, je me suis battu pour le préservatif gratuit. Certains, pour des raisons sociales, ne se donnent plus le droit d'avoir des droits devant la vie !

Demandez-donc à Leclerc, Carrefour, Auchan, vos amis, ce qui fait le plus l'objet de vols.

Mme Sophie Primas.  - Les lames de rasoir !

M. Pascal Savoldelli.  - Pas les bijoux ou les CD, mais les produits de première nécessité, dont les protections périodiques. Nous voterons cet amendement, même s'il vient de la majorité gouvernementale. (M. Fabien Gay applaudit.)

Mme Michelle Meunier.  - Je ne comprends pas l'incohérence du Gouvernement : vous dites que c'est un sujet majeur, mais vous repoussez cet amendement que Mme Schillinger porte depuis des années. Je voterai aussi cet amendement.

L'amendement n°II-463 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-83, présenté par M. Mouiller, au nom de la commission des affaires sociales.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

800 000

800 000

Handicap et dépendance

Égalité entre les femmes et les hommes

800 000

800 000

Conduite et soutien des politiques sanitaires,

sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

TOTAL

800 000

800 000

800 000

800 000

SOLDE

0

0

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - Cet amendement augmente de 800 000 euros l'enveloppe dédiée à l'aide financière à l'insertion sociale et professionnelle des personnes engagées dans le parcours de sortie de la prostitution (AFIS), réduite de près de 2 millions d'euros en 2019 à 1,2 million d'euros en 2020.

Alors que 40 000 personnes seraient victimes d'exploitation sexuelle en France, cette baisse envoie un mauvais signal. Au Gouvernement de lever les freins à sa montée en charge - je pense aux commissions départementales.

Cette hausse est gagée sur la baisse des crédits dédiés au RSA jeune actif : alors que le nombre de bénéficiaires ne cesse de diminuer tant les conditions sont restrictives, ces crédits, même réduits de 800 000 euros, resteraient plus de deux fois supérieurs à ceux ouverts en 2019.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Avis favorable. Il y a deux ans, Éric Bocquet et moi-même nous étonnions de la sous-consommation des crédits de l'AFIS. Deux ans, c'est déjà beaucoup. Augmentons le budget de 800 000 euros.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - La baisse des crédits entre 2019 et 2020 résulte d'une montée en charge plus modérée du dispositif. 218 personnes ont bénéficié des aides de l'AFIS, dont 154 à compter d'août 2019. Les crédits prévus en 2020 - 1,2 million d'euros - correspondent au nombre de bénéficiaires attendus. Avis défavorable.

Mme Laurence Cohen.  - Le Gouvernement devrait afficher une volonté politique. Or, apparemment, il ne souhaite pas que la loi de 2016 s'applique... Il faut accompagner ces sorties de parcours.

Nous transférons les enveloppes sur des budgets tout aussi importants, en essayant de cibler ce qui est encore plus urgent. C'est moins pire que le pire, comme diraient les enfants...

C'est que vous voulez toujours restreindre la dépense publique, mais qui se bat pour plus de dépenses publiques dans cet hémicycle ? Nous ne sommes pas majoritaires dans cet hémicycle.

Vous vous donnez bonne conscience. Mes chers collègues, pensez-y au moment des votes, pour engager la dépense publique au service du bien-être de nos concitoyennes et concitoyens !

Mme Laurence Rossignol.  - Le Gouvernement a fait le choix de l'extinction de la loi de 2016. Vous ne citez jamais la prostitution lorsque vous parlez des violences faites aux femmes. Cela n'existe pas dans le vocabulaire du Gouvernement ! Jamais vous ne faites référence à cela lorsque vous allez voir les parquets, les commissaires, les préfectures.

Vous savez bien que la seule loi qui est appliquée tout de suite, c'est la première partie de la loi de finances, quand il s'agit de lever l'impôt ! Pour toutes les autres, il faut prendre son bâton de pèlerin, faire campagne, y compris auprès des fonctionnaires...Là, vous avez décidé de faire l'impasse, parce qu'au bout du quinquennat, vous aurez réduit totalement le budget de l'AFIS.

L'amendement n°II-83 est adopté.

Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », modifiés, sont adoptés.

Article 78 octodecies

M. le président.  - Amendement n°II-583, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Au sixième alinéa, après les mots : « au moment de la », est inséré le mot : « première » ;

II.  -  Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

2° Au début du septième alinéa, il est ajouté le mot : « et » ;

III.  -  Alinéa 5

Après le mot :

mensuellement

insérer les mots :

et revalorisée le 1er octobre de chaque année par application du coefficient mentionné à l'article L. 161-25 du code de la sécurité sociale

IV.  -  Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

6° À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « et de durée des séjours dans le pays d'origine » sont supprimés.

V.  -  Après l'alinéa 7

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Les références à : « l'aide à la réinsertion familiale et sociale » dans le code de l'action sociale et des familles sont remplacées par les références à : « l'aide à la vie familiale et sociale ».

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Cet amendement de clarification renforce l'efficacité du droit pour l'aide à la réinsertion familiale et sociale (ARFS).

M. Éric Bocquet, rapporteur spécial.  - Avis favorable. Cet amendement vient clarifier utilement l'ARFS.

L'amendement n°II-583 est adopté.

L'article 78 octodecies, modifié, est adopté.

Article 78 novodecies

M. le président.  - Amendement n°II-84 rectifié, présenté par M. Mouiller, au nom de la commission des affaires sociales.

I.  -  Après l'alinéa 4

Insérer six alinéas ainsi rédigés :

1° bis L'article L. 815-24-1 est ainsi modifié :

a) La première phrase est ainsi modifiée :

-  les mots : « de cette allocation et » sont supprimés ;

-  après les mots : « l'intéressé et », sont insérés les mots : « , s'il y a lieu, de celles » ;

b) La seconde phrase est ainsi rédigée : « Le montant de la ou des allocations est égal à la différence entre le plafond applicable à la situation du ou des allocataires et le total des ressources de l'intéressé ou des époux, concubins ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité. »

II.  -  Alinéa 8

Après la référence :

1° 

insérer la référence :

1° bis

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - L'Assemblée nationale a introduit, à l'initiative du Gouvernement, une réforme bienvenue de l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI).

Cet amendement précise, par coordination avec cette réforme, les règles de calcul de l'ASI de telle sorte qu'elle devienne, à compter d'avril 2020, une allocation strictement différentielle par rapport à un plafond.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Amendement rédactionnel. Avis favorable.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Avis favorable à ce dernier amendement.

L'amendement n°II-84 rectifié est adopté.

L'article 78 novodecies, modifié, est adopté.

L'article 78 vicies est adopté.

RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Le budget 2020 de l'enseignement supérieur s'inscrit dans la trajectoire de la loi de finances de 2019, avec une augmentation de 1,5 % des crédits, soit 242 millions d'euros supplémentaires.

C'est un budget satisfaisant, d'autant que 435 millions d'euros de crédits du programme d'investissement d'avenir l'abondent. Ce budget affiche une hausse de près de 159 millions d'euros supplémentaires, dédiés aux formations supérieures et à la recherche. Je salue cette évolution, au bénéfice de la mise en oeuvre du plan Étudiant et de la réforme des études de santé notamment.

Cependant, près du quart de cette enveloppe correspond à des dépenses obligatoires ou à des mesures décidées en année pleine en 2019, et compense le dispositif « Parcours professionnels, carrières et rémunérations ». Une partie des 50 millions d'euros dédiés au dialogue stratégique et de gestion devrait être utilisée pour compenser, totalement ou partiellement, le glissement vieillesse-technicité (GVT).

Seuls 15 millions d'euros seront consacrés aux financements stratégiques de 80 établissements - contre 5 millions d'euros pour 10 établissements l'année dernière. Le compte n'y est pas.

Le reste financera le plan Étudiant et la réforme des études de santé - ainsi, 43 millions d'euros en 2020 sont consacrés au plan Étudiant, dont 40 millions d'euros pour l'extension en année pleine des mesures de la rentrée 2019.

Il s'agit de limiter l'échec des étudiants en améliorant leur orientation. Il faut relever le défi démographique -  avec 16 500 nouveaux inscrits dans l'enseignement supérieur en 2019, après 30 000 en 2018.

L'enseignement privé joue un rôle crucial pour absorber ces hausses d'effectifs, sans engagement suffisant de l'État. En 2019, les établissements d'enseignement supérieur privé d'intérêt général (Eespig) ont accueilli 9 500 étudiants supplémentaires, soit une augmentation de 9 %. Les établissements qui ont contractualisé avec l'État, n'auront que 3 millions d'euros en plus - contre plusieurs dizaines de millions d'euros pour les universités. Ils représentent 4 % des établissements mais reçoivent 0,6 % des crédits. Le montant moyen de la subvention de l'État par étudiant, qui a diminué de 46 % entre 2009 et 2019, va continuer sa chute.

Pourquoi un taux de réserve à 7 % ? Certes, vous promettez un dégel de 3,5 millions d'euros en 2019.

Confirmez-vous qu'ils seront versés aux Espig et non à la formation des maîtres ?

Deuxième défi : la diversification des ressources de l'enseignement supérieur. Je suis très inquiet des conséquences de la réforme du mécénat. Il semble paradoxal que l'État incite les établissements à diversifier leurs ressources propres et baisse sans vergogne les incitations pour les entreprises à financer les universités.

En 2020, les crédits du programme 261 augmentent de 66,4 millions d'euros par rapport à 2019, ce qui rompt avec la stabilité observée jusqu'à présent. Les bourses augmentent de 46 millions d'euros en raison de leur revalorisation et de l'augmentation du nombre de bénéficiaires. L'évolution est politique mais ne répondra pas à la crise étudiante.

Ces bourses sont peu attribuées : 15 millions d'euros d'aides destinées aux étudiants ne sont pas consommés. Comment remédier à ce dysfonctionnement ?

Comme sous chaque gouvernement, seuls 50 % des logements - soit 30 000  - seront livrés dans le plan quinquennal. Cela devrait relever non pas de votre ministère mais des collectivités territoriales via leurs offices.

La commission des finances propose d'adopter les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». (M. André Gattolin applaudit.)

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial de la commission des finances .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'année 2020 sera une année charnière pour la recherche. Le Gouvernement travaille à une loi de programmation pluriannuelle, très attendue, qui devrait nous être présentée l'année prochaine.

La recherche est la dépense d'avenir, par excellence, dans le temps long. Je me félicite d'une loi de programmation mais les défis sont là : attractivité des métiers, soutien à la recherche européenne. Nous espérons une politique ambitieuse. Le budget 2020 est un budget d'attente et de transition.

Les sept programmes Recherche bénéficient de 12,7 milliards d'euros en autorisations d'engagement, 12,5 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 428 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 292 millions d'euros en crédits de paiement. Je salue cette progression qui traduit concrètement la priorité accordée par le Gouvernement à la recherche.

Le budget 2020 est marqué par une forte augmentation de la recherche spatiale, en hausse de 280 millions d'euros, à plus de 2 milliards d'euros, preuve de son importance stratégique. Cela apurera définitivement la dette française auprès de l'Agence spatiale européenne. Nous pourrons financer le programme Ariane 6. Lors du conseil ministériel de l'Agence spatiale européenne, la France s'est engagée à verser 1,5 milliard d'euros sur la période 2020-2022, soit 400 millions d'euros de plus que ce qui avait été envisagé.

Les crédits de l'Agence nationale de la recherche (ANR) seront augmentés de 30 millions d'euros, pour renouer avec un taux de succès acceptable pour les appels à projets. En parallèle, le plan d'action national pour la participation française au programme-cadre de recherche et d'innovation bénéficiera de 31 millions d'euros. Alors que les chercheurs français sont souvent couronnés de succès, il faut les encourager à candidater à l'Europe.

Les crédits alloués aux infrastructures de recherche et aux organisations internationales poursuivent leur hausse, afin de financer notamment le réacteur thermonucléaire expérimental ITER à Cadarache et le renouvellement de la flotte océanographique de l'Ifremer.

Je regrette que le financement de la recherche soit de plus en plus éclaté comme le montre la dispersion des crédits rattachés au plan pour l'intelligence artificielle. Les circuits de financement sont extrêmement complexes et font intervenir de nombreuses structures : Programme d'investissement d'Avenir, Fonds pour l'innovation et l'industrie, missions budgétaires. Cela entrave le suivi et le contrôle parlementaire.

Enfin la masse salariale des organismes de recherche n'a cessé de croître, sans que cela ne soit compensé intégralement par l'État. Les organismes rognent sur leurs effectifs, engageant une sous-exécution importante des plafonds d'emploi. L'application d'un taux de mise en réserve de 4 % serait alors regrettable.

La plupart des impasses budgétaires ont été résolues comme la construction du réacteur Jules Horowitz.

Le crédit d'impôt recherche (CIR) constitue une aide à l'innovation déterminante et doit être soutenu avec un coefficient multiplicateur supérieur à un.

La commission des finances propose l'adoption des crédits de la mission « Enseignement supérieur et recherche ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, applaudit également.)

M. Jean-Pierre Moga, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

Nous avions publié un rapport avec la commission des affaires étrangères sur la recherche spatiale, que je vous invite à lire, si vous ne l'avez déjà fait, madame la ministre. (Mme la ministre et Mme Sophie Primas sourient.)

Mais c'est un budget dépourvu d'ambition, dans l'attente de la loi de programmation. La recherche stagne autour de 2,2 % du PIB depuis les années 1990 ; nous dépensons deux fois moins que l'Allemagne. Nos politiques sont illisibles, avec la multiplication des intervenants.

Saluons la persévérance et la pugnacité de nos chercheurs. Quelle est la cohérence des aides individuelles à l'innovation de BPI France ? Ou des pôles de compétitivité au milieu du gué, ballotés entre État et régions ? Cela relève du ministère de l'Écologie, mais faites passer le message !

Je m'étonne du taux de réserve des crédits. Je pense notamment aux 30 millions d'euros de crédits d'intervention de l'ANR.

Le GVT fait du personnel la variable d'ajustement. Arrêtons avec cette logique mortifère ! Notre commission des affaires économiques votera les crédits de la mission.

Madame la ministre, le Parlement attend une loi de programmation ambitieuse, à la hauteur des enjeux, qui donne du souffle à notre écosystème de recherche et d'innovation, afin que notre pays puisse garder sa place dans le concert des grandes nations.

Dans cette attente, la commission a émis un avis favorable, nous voterons ce budget. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Jean-Michel Houllegatte, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) En 2020, 1,9 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 1,770 milliard d'euros de crédits de paiement seront consacrés à la recherche. Cela demeure modeste au regard des enjeux, notamment de transition écologique.

Le soutien à la recherche est crucial. Il est quelque peu étonnant que les crédits pour le nucléaire augmentent au détriment des nouvelles énergies dont les crédits baissent de 2 millions d'euros.

L'Institut français du pétrole-énergies nouvelles (Ifpen) connaît une baisse constante de sa dotation depuis deux ans, partiellement compensée par ses ressources propres, alors qu'il contribue éminemment aux recherches sur la transition énergétique.

N'est-ce pas un signal négatif à l'heure de la transition énergétique ? Le CEA travaille aussi sur ce sujet, ainsi que sur un projet de plateforme de transfert technologique dans six régions. Je salue la création de l'université Gustave Eiffel, nouvel établissement d'enseignement supérieur sur la ville durable, et les travaux de l'Ineris sur les risques industriels, qui ont aidé à la gestion de l'incendie de Lubrizol.

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits, malgré une interrogation sur l'adéquation entre les ambitions et les moyens.

Mme Laure Darcos, rapporteure pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication pour la recherche .  - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC) L'année 2020 sera effectivement une année charnière. Dans ce contexte, le budget ne contient aucune mesure structurelle. Il enregistre toutefois une augmentation de 2,5 %, atteignant 12,1 milliards d'euros en crédits de paiement, notamment au profit de la recherche spatiale.

La loi de programmation suscite de nombreuses attentes, notamment des organismes de recherche. Des inquiétudes s'expriment sur le passage d'un taux de gel de 3 % à 4 %, ainsi que sur le coût du GVT et de l'évolution de la masse salariale.

L'objectif de 1 % de la richesse nationale pour la recherche publique nécessiterait un investissement de 5 milliards à 5,8 milliards d'euros - nous sommes actuellement à 0,79 %. Le soutien à la recherche publique est « un choix de souveraineté », comme le rappelait le président de la République lors des 80 ans du CNRS.

Le métier de chercheur est en crise. Il est temps de renouer le pacte de la Nation avec ses chercheurs. J'ai cru comprendre que c'était l'objectif du Gouvernement. Il faut valoriser le statut de chercheur, dont la rémunération décroche par rapport à nos partenaires européens, et dont le recrutement est tardif. D'où une perte d'attractivité du métier et de la carrière. Les contractuels et les vacataires se multiplient systématiquement. Ce n'est pas une question financière mais morale. Oui, il est urgent de renouer un pacte national avec nos chercheurs.

Sous ces réserves, la commission de la culture a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

M. Stéphane Piednoir, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication pour la recherche .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Jean-Pierre Moga, rapporteur pour avis, applaudit également.) Les crédits des programmes 150 et 231 augmentent mais l'enseignement supérieur doit faire face à de nombreux défis : croissance du nombre d'étudiants, augmentation de la masse salariale - le GVT ne sera plus compensé par le Gouvernement, des réformes doivent être mises en oeuvre comme celle des études de santé, et de nécessaires investissements patrimoniaux doivent être réalisés.

La décision récente du Conseil constitutionnel ouvre la voie à de nombreuses inquiétudes sur l'avenir des droits d'inscription, notamment pour les grandes écoles. Le choix de l'adjectif « modique », quelque peu flou, ouvre une inquiétante incertitude juridique, laissant la place à une gamme d'interprétations, dans l'attente de l'analyse juridique du Conseil d'État. Or les droits d'inscription sont un levier de financement qui mérite d'être activé, dès lors qu'il est tenu compte des capacités financières des étudiants.

Pour développer leurs ressources propres, les trois quarts des universités se sont dotées de fondations qui perçoivent 630 000 euros en moyenne, provenant à 87 % des entreprises de leur territoire. Or l'article 50 du projet de loi de finances modifie les règles fiscales sur le mécénat, sans aucune évaluation sur son impact sur l'enseignement supérieur et la recherche.

Je me réjouis que le Sénat, sous l'impulsion des commissions des finances, et de la culture, ait supprimé cette réforme. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Laurent Lafon applaudit également.)

Mme Véronique Guillotin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE) Les crédits de la mission ont augmenté de 2,4 % en 2019 et de 2,6 % en 2020 s'agissant du volet recherche, mais nous sommes encore loin des ambitions affichées.

La loi de programmation orientera l'investissement dans la recherche publique, « par choix de souveraineté », selon les mots du président de la République, mardi soir, aux 80 ans du CNRS.

Les carrières des professeurs seront revalorisées, le plan Étudiants mis en oeuvre et les études de santé réformées, avec effet à la rentrée 2020. Ainsi, 6 millions d'euros seront attribués à ce dernier projet, dont le contenu doit encore être détaillé. Les CHU retrouvent aussi à cette occasion une place centrale dans les études de santé.

Les bourses étudiantes sont revalorisées de 1,1 % mais les aides sont trop saupoudrées : selon l'observatoire de la vie étudiante, 66 % des étudiants « non pauvres » bénéficient d'aides alors que 46 % des étudiants « pauvres » n'en touchent pas.

S'agissant de la recherche, dont le budget est difficilement lisible, nous attendons la loi de programmation annoncée. L'augmentation des crédits profite surtout à la recherche spatiale, fleuron de la recherche française. Nous soutenons cette haute priorité, en cette année cruciale où Ariane 6 fera son premier vol. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE)

M. André Gattolin .  - L'examen du projet de loi de finances est un grand moment de « vérité des prix » sur le financement des engagements pris. Mais nos prédécesseurs ont abusé de monstrueux PLFR, véritables PLF-bis, des mises en réserve et des décrets d'avance, et la loi de règlement est devenue le seul moment de vérité ; certes longuement débattue.

Cette mission, jusqu'en 2017, a été parmi les plus rognées. Dans des domaines aussi stratégiques, cela a eu des effets dramatiques sur la compétitivité de notre pays et a alimenté la crise de confiance de la communauté scientifique à l'égard de l'État. (M. Pascal Savoldelli et Mme Claudine Lepage s'exclament.)

Il faut définir une trajectoire pluriannuelle dans ce domaine et s'y tenir, en dépit des aléas qui peuvent frapper les ressources publiques, pour faire revenir la confiance.

En 2020, les crédits de la mission -  à hauteur de 28,6 milliards d'euros  - augmentent. Ils étaient restés strictement stables entre 2012 et 2017. Cela peut sembler encore insuffisant, mais en l'absence des sempiternels décrets d'avance et de massifs gels de crédits, ces crédits ne sont pas de la monnaie de singe !

Nos ambitions ne s'arrêtent pas là : le président de la République l'a rappelé lors des 80 ans du CNRS : l'objectif est de porter à 3 % du PIB les crédits de la recherche. La loi de programmation à venir inscrira la trajectoire du Gouvernement.

Le programme européen, Horizon Europe, le plus important programme de recherche publique au monde, avec 100 milliards d'euros pour la période 2012-2027, nous permettra de lutter contre la concurrence internationale. La loi de programmation inscrira dans ce cadre le rôle moteur de la France dans la recherche européenne.

Cet investissement massif et cette synergie entre budget national et budget européen sont absolument nécessaires si nous ne voulons pas que notre pays et notre continent soient définitivement dépassés dans la rude compétition qui nous oppose aux États-Unis, à la Chine et à d'autres puissances.

Dans ce cadre, la France doit prendre toute sa place et se montrer fiable, auprès de l'Union européenne et de nos partenaires européens. Nos prédécesseurs ont laissé une dette de 700 millions d'euros à l'agence spatiale européenne. Nous l'avons presque intégralement remboursée. À Séville, où s'est achevée hier la conférence ministérielle de l'Agence, la tenue des engagements de la France a été saluée et les 22 États membres ont dans la foulée confirmé leur soutien à une politique spatiale européenne aux ambitions très renforcées.

Le groupe LaREM votera évidemment ces crédits.

M. Pierre Ouzoulias .  - (M. Pascal Savoldelli applaudit.) En 2018, j'avais attiré votre attention sur les prodromes flagrants d'un décrochage de l'enseignement supérieur et de la recherche française. Selon Cédric Villani, député et président de l'Opecst, « la France n'investit pas assez dans sa recherche » et « a perdu du terrain » dans ce domaine. Depuis dix ans, les dépenses pour la recherche croissent moins vite que le PIB. En 2014, elles représentaient 2,28 % du PIB contre 2,19 % aujourd'hui. L'effort de l'État est médiocre. Nos entreprises privées investissent 1,4 % du PIB dans la recherche, contre 2 % en Allemagne, et cet écart augmente. Cela a des conséquences funestes pour l'emploi scientifique. Le nombre de doctorants est en baisse constante. Le CNRS ouvrait 412 postes en 2010 contre environ 200 en 2020. Nos jeunes chercheurs quittent le pays !

Votre projet de budget ne reviendra pas sur cette situation. Pire, il affaiblira les opérateurs en ne compensant plus le GVT. Pour les universités, cela correspond au gel de plus de 1 200 emplois.

Je regrette vivement, avec nos rapporteurs, que le Gouvernement demande au Parlement de se prononcer sur des objectifs qu'il sait inaccessibles. De même, la hausse de la démographie estudiantine, conjuguée à la quasi-stabilité des moyens alloués aux universités, aboutit à une baisse du budget moyen : ce ratio, qui diminue d'un point par an depuis 2010, est estimé à11 470 euros en 2018.

L'augmentation de la réserve de précaution à 4 % est une catastrophe, surtout lorsque l'on sait que les crédits gelés ont été intégralement annulés dans le projet de loi de finances rectificative.

Le Gouvernement refuse d'anticiper la décision du Conseil constitutionnel sur les droits d'inscription. Les sages ont considéré que le principe de gratuité s'appliquait, et que des droits d'inscription n'étaient acceptables que s'ils étaient modiques. Cela ouvre des droits de recours pour tous les étudiants considérant leurs droits d'inscription trop élevés par rapport à leurs moyens, ce qui va priver encore de ressources les universités.

On ne perçoit pas dans votre budget que l'enseignement supérieur et la recherche sont une priorité. Il faudra attendre l'année prochaine pour que le président de la République fasse des annonces, devant un autre auditoire. Nous ne traitons ici que des affaires courantes...

Nous voterons contre ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; Mme Sophie Taillé-Polian applaudit également.)

M. Pascal Savoldelli.  - Bien argumenté !

M. Emmanuel Capus .  - La mission « Recherche et enseignement supérieur » rassemble neuf programmes. Le groupe Les Indépendants salue l'engagement du Gouvernement pour cette mission stratégique, avec 500 millions d'euros de dépenses supplémentaires, à hauteur de 28,8 milliards d'euros. Cependant la France est largement en deçà de l'objectif de Lisbonne à 3 % du PIB. Or notre capacité économique dépend de l'excellence des formations, de notre engagement en matière de recherche, des investissements.

Nous ne pouvons être seulement des utilisateurs des nouvelles technologies. Le financement de cette mission est une question de souveraineté nationale. Nous devons être acteurs du changement pour faire émerger les solutions de demain et répondre aux défis du siècle.

Bien sûr, c'est un budget de transition dans l'attente de la loi de programmation. Cette réforme devrait permettre de donner plus de lisibilité aux laboratoires et plus d'attractivité aux carrières scientifiques.

Ce sont 13,61 milliards d'euros qui sont consacrés aux formations supérieures et à la recherche universitaire. Cela bénéficiera notamment aux études de santé. Cette année, 175 millions d'euros supplémentaires iront à la vie étudiante, notamment aux bourses, mais sans revalorisation de l'aide au mérite.

Le manque de place dans les résidences universitaires est une source de précarité : le logement représente 70 % du budget des étudiants. Il est urgent de les aider.

Les crédits augmentent aussi en faveur du plan Intelligence artificielle, sur le programme 172, et pour la création du nouvel Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae).

J'attire votre attention sur notre dépendance à Google et à Palantir, dont la CIA est actionnaire et qui est chargée de la gestion des bases de données de la DGSI. Il faut impérativement bâtir une stratégie d'indépendance européenne en matière d'information.

L'enveloppe consacrée à la recherche spatiale représentera 2 milliards d'euros en 2020, pour apurer notre dette auprès de l'agence européenne. Après le succès de la mission Thomas Pesquet, après celui de Galileo, Ariane 6 décollera en juillet 2020 pour son vol inaugural. Mais, selon la Cour des comptes, la politique spatiale manque d'ambition face à la Chine et aux États-Unis. L'Europe doit développer son propre lanceur réutilisable - comme le fait Spacex. Certes, nous ne pouvons guère rivaliser avec les 21 milliards de budget de la NASA, mais nous pourrions développer une expertise de pointe, dans l'exploration des ondes gravitationnelles par exemple.

Lors de la conférence ministérielle de Séville, une contribution globale de 14,3 milliards d'euros sur trois à cinq ans a été votée par l'Union européenne pour sa politique spatiale. La France doit être à la hauteur des enjeux !

Le groupe Les Indépendants votera les crédits de la mission. (M. Jean-Marc Gabouty applaudit.)

M. Laurent Lafon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le budget « Recherche et enseignement supérieur » pour 2020 est le troisième que vous nous présentez, madame la ministre. Il est donc à considérer au regard des projets que vous avez lancés depuis trois ans, la loi Orientation et réussite des étudiants (ORE), la réforme des études de santé et le plan Bienvenue en France, pour l'accueil des étudiants étrangers.

L'enseignement supérieur fait face à une augmentation des effectifs étudiants liée au boom démographique de l'an 2000. Votre budget en tient compte seulement en partie, il est insuffisant pour maintenir un budget par étudiant stable.

Les universités sont confrontées à des difficultés budgétaires importantes. L'augmentation des effectifs sera suivie d'une baisse à partir de 2025. Si l'État n'augmente pas mécaniquement les budgets, espérons qu'il ne les baisse pas quand les effectifs diminueront !

La hausse du nombre d'étudiants s'ajoute à l'impact des réformes mises en place. Vous engagez une phase de dialogue avec les présidents d'université, avec une enveloppe de 50 millions d'euros à répartir. La prise en compte du GVT ne sera pas automatique.

S'il n'est pas choquant que vous ayez un dialogue individuel de gestion avec chaque université, il est frustrant pour nous de voter cette ligne budgétaire sans plus de précision ! Nous souhaitons que vous nous fassiez un retour lorsque ce dialogue sera achevé. Nous pourrons ainsi mesurer l'efficacité de cette phase.

Le parc immobilier universitaire est pour partie vétuste et inadapté aux exigences de la transition écologique. Il nécessite un effort de rénovation important, que les universités ne peuvent fournir seules. Je n'ose rêver d'une grande mobilisation des collectivités territoriales comme lors du plan Universités 2000. Mais quelle enveloppe est prévue par l'État pour les futurs contrats de plan ? Quelles instructions sont données aux préfets et recteurs ?

Quel est le calendrier de dévolution aux universités de leur patrimoine ? Je présenterai un amendement à ce sujet lorsque nous examinerons la mission relative au patrimoine de l'État.

Nous nous inquiétons de la décision du Conseil constitutionnel sur les droits d'inscription. Espérons que le Conseil d'État apportera une réponse rassurante.

Le PLF 2020 comprend une diminution des crédits d'impôt des donateurs, décision prise sans étude d'impact. Quels sont les montants, les établissements concernés ?

L'outil statistique de l'enseignement supérieur et insuffisant, notamment en comparaison de celui de l'éducation nationale. Nous ne pourrons pas apprécier l'impact de certaines réformes, ni le taux de réussite en première année de licence, ni le nombre de places en BTS-IUT.

L'événement dramatique de Lyon a placé au coeur de l'actualité le niveau des aides étudiantes et leur adaptation aux besoins. La réponse, malgré l'émotion, ne se limite pas à des crédits budgétaires. Espérons qu'une analyse des dispositifs sera faite rapidement.

Le budget 2020 est d'attente, avant la loi de programmation. Nous voulons une rémunération correcte des chercheurs, coordonnée avec le privé. Nous regrettons l'augmentation du taux de réserve de précaution sur la recherche et espérons que vous obtiendrez gain de cause auprès de Bercy.

Le groupe UC votera les crédits. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et LaREM ; M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.)

M. Max Brisson .  - L'an dernier, vous êtes allée vite pour faire voter la loi sur l'enseignement supérieur ! Vous avez devancé Jean-Michel Blanquer, qui a fait une erreur de calendrier lorsqu'il a lancé la réforme du bac. Nous connaissons votre engagement sincère et constant. Les moyens de l'enseignement supérieur sont en hausse. Dont acte. Mais sont-ils à la hauteur des défis ? Non. Et les nuages menacent.

Vous utilisez le GVT pour serrer la vis de certains ; en 2018, vous le compensiez intégralement ; en 2019, nous vous alertions ; en 2020, la compensation n'est plus systématique. Or les situations sont très diverses sur le temps long, et le manque de moyens conduit des universités à ne pas compenser les départs en retraite alors que nous avons 30 000 étudiants en plus chaque année.

Les dépenses de l'État par étudiant baissent, le parc immobilier est dégradé et la précarité étudiante s'aggrave.

Abaisser le taux de défiscalisation des dons des entreprises marquera un tournant, privant l'université de fonds supplémentaires. Pourquoi, dans un contexte financier difficile, affaiblir la diversification des ressources ?

La rémunération des chercheurs et enseignants-chercheurs est insuffisante. Ils éprouvent un sentiment de déclassement social. En dépit du protocole PPCR qui représente une dépense de 28 millions d'euros, une refonte de la grille indemnitaire des chercheurs est nécessaire. C'est une question d'attractivité du métier et de dignité. La baisse du nombre de doctorants doit être un électrochoc !

Un mot de la formation des professeurs du second degré dont vous avez la responsabilité conjointe avec le ministre de l'Éducation nationale. Les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (Inspé) ont été maintenus au sein des universités, alors qu'ils auraient pu être intégrés au sein de l'Éducation nationale.

Comment ces instituts vont-ils recruter les enseignants de haut niveau ? Comment les maquettes ne seraient-elles pas contraintes par les spécialités des enseignants qui seront affectés dans les Inspé ? Comment ceux-ci vont-ils mieux que les ESPE articuler formation théorique et formation pratique ? Comment s'établira la collaboration avec les corps d'inspection et les formateurs du second degré, sans remettre en cause l'autonomie des universités ?

L'enseignement supérieur et la recherche ne pourront se passer d'une réforme profonde. La prochaine loi de programmation de la recherche devra répondre aux enjeux.

Le groupe Les Républicains, compte tenu des efforts déjà déployés, votera les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Sylvie Robert .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) Nous examinons ce budget dans un contexte très incertain. Le Conseil constitutionnel a tiré du 13e alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 l'exigence constitutionnelle de gratuité de l'enseignement supérieur, estimant dès lors que seuls des droits d'inscription modiques, en rapport avec les capacités financières des étudiants, peuvent être exigés. Le Conseil d'État devra préciser la portée de cette décision. La Cour des comptes avait déjà souligné dans son rapport de novembre 2018 l'écart croissant entre les modèles économiques des établissements et le manque de cohérence du système.

Un coût élevé d'inscription représente il est vrai une rupture réelle d'égalité d'accès à l'institution. Mais la décision inquiète, d'autant que les financements de l'enseignement supérieur s'érodent. Le programme 150 augmente de 1 % seulement, comme a alerté la Conférence des présidents d'université. Or il y a eu 33 000 nouveaux étudiants en 2019, 15 000 sont attendus en 2020. Et il faut mettre en oeuvre les lois ORE, École de la confiance, réforme des études de santé.

Pas moins de 250 millions d'euros supplémentaires seraient nécessaires, contre 160 millions d'euros prévus. C'est un problème chronique. Et les ressources propres des établissements connaissent une pression forte, créant un effet ciseau. Alors que la France amorce son rattrapage sur les universités anglo-saxonnes, l'article 50 lance un très mauvais signal et portera un coup aux partenariats avec le privé. La commission de la culture entend maintenir le régime actuel de mécénat.

Vous n'assurez plus systématiquement la compensation du GVT. La croissance de la masse salariale aura un impact sur l'investissement des universités. Comment sera financé l'enseignement supérieur ? L'enjeu est celui de la réussite des étudiants par des formations qualifiantes, dont dépendent la capacité d'innovation et le rayonnement de la France. Nous avons le devoir d'assurer à la jeunesse un avenir malgré les défis colossaux qui l'attendent, en lui dispensant une formation de qualité tout au long de la vie, car l'adaptabilité et la polyvalence seront essentielles.

Les étudiants subissent l'inflation du coût de la vie, doivent travailler, arrêtent de se soigner, paient des loyers trop onéreux.

Malgré des progrès, l'effort budgétaire est insuffisant. Notre amendement tend à réinjecter dans le budget les 35 millions d'euros de crédits du programme relatif à la vie étudiante gelés en 2019.

Gommons les effets de seuil pour les bourses sur critères sociaux. Davantage d'étudiants méritent d'être aidés. Il faut accélérer la réflexion sur l'allocation d'autonomie pour tous les étudiants en situation de précarité. Nous voulons un changement d'échelle sur le soutien aux étudiants.

La loi de programmation pluriannuelle pour la recherche est annoncée pour l'année prochaine. Nous espérons qu'elle sera à la hauteur des ambitions. Pour l'heure, les crédits du programme 172, qui concentre les principaux opérateurs nationaux, stagnent.

Le taux de réserve appliqué à l'ANR est élevé, 8 % en 2019, freinant la sélection des projets autour de 15 %. Il faut absolument arriver à 25 %, la moyenne européenne. Quel sera le taux de réserve en 2020 ?

L'investissement doit favoriser le rattrapage du retard européen face aux États-Unis, en matière d'intelligence artificielle. Gardons-nous de toute compétition intra-européenne. Les recherches sur l'intelligence artificielle doivent être réalisées dans le cadre démocratique, pour éviter des atteintes aux libertés publiques. Le RGPD est une première pierre importante de l'édifice. Notre souveraineté nationale et européenne s'y joue...

Enfin, j'insiste sur la rémunération des chercheurs et des enseignants-chercheurs. Vous souhaitez que la France soit au niveau des standards internationaux, mais elle ne l'est pas. Nous devrions avoir 3 % du PIB investis dans la R&D, dont 1 % pour la recherche publique. En entrée de carrière, le salaire est à 63 % de celui des chercheurs de l'OCDE. L'attractivité du métier en pâtit, en témoigne la baisse du nombre de doctorants.

En l'état, notre groupe ne peut voter ces crédits. Nous espérons que le futur projet de loi de programmation lèvera nos réticences d'aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE ; Mme Laure Darcos, rapporteure pour avis, applaudit également.)

Mme Catherine Procaccia .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Je vous félicite, madame la ministre, pour la troisième année, de tenir vos engagements sur la progression des crédits de la recherche.

La recherche spatiale reçoit 214 millions d'euros supplémentaires, notamment pour apurer la dette de la France envers l'Agence spatiale européenne. C'était indispensable. Les 14,4 milliards d'euros de crédits obtenus à Séville sont une bonne chose. Le succès d'Ariane 6 dépend aussi des lancements institutionnels confiés par les pays contributeurs. Je ne suis pas hélas certaine que cela soit le cas.

Je suis heureuse que Galiléo dépasse le milliard d'utilisateurs ; j'étais inquiète précédemment. Qu'en est-il de ses options payantes, qui devaient le rentabiliser ? Quant à l'ANR, la sélection des dossiers demeure drastique : 16 % contre 25 % en moyenne en Europe. La transparence de l'agence doit être améliorée. J'espère que vous n'en ferez pas l'opérateur central de votre texte.

Nous sommes rassurés, à l'Opecst, par l'avancement des travaux du réacteur Jules Horowitz. Il fournira des données sur le comportement des composants et des combustibles nucléaires, mais ne produira pas d'énergie, contrairement aux réacteurs de quatrième génération.

L'arrêt stupide de Superphénix a été un désastre sur le plan de la recherche et nous reproduisons la même erreur avec l'abandon du réacteur à neutron Astrid, qui aurait dû recycler du combustible. C'est une erreur scientifique ! Selon l'administrateur général du CEA, c'est pour des raisons économiques : l'uranium n'est plus assez cher pour qu'il soit nécessaire de le recycler...

Sur le CIR, je considère, comme France Stratégie, que le dispositif a profité aux entreprises au bénéfice de la R&D. Je salue la suppression de l'obligation documentaire par l'Assemblée nationale, qui l'avait instituée l'an dernier.

La recherche publique et la recherche privée ne doivent pas se concurrencer mais se compléter.

Je terminerai par la nécessité d'améliorer la situation des étudiants-chercheurs, notamment ceux qui, partis comme post-doc à l'étranger, peinent à revenir, faute de trouver un poste en France.

Le groupe Les Républicains votera ce budget, malgré ses limites. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - L'examen des crédits de la mission est un temps important pour évoquer ces sujets. Je rends hommage à ceux qui font vivre l'exigence de l'enseignement supérieur, chaque jour.

Le drame du 8 novembre à Lyon a mis en lumière les conditions de vie de certains étudiants en grande précarité et qui ignorent les dispositifs d'aide existants. Améliorer les conditions de vie des étudiants est une priorité de mon ministère.

C'est l'avenir qui est en jeu. Le président de la République l'a rappelé lors du 80e anniversaire du CNRS, c'est à la force scientifique que se mesure la puissance d'une Nation. C'est donc une mission prioritaire du prochain triennal.

En 2020, les crédits augmentent de 500 millions d'euros. C'est 10 % des crédits nouveaux de l'État. Aux 25,35 milliards d'euros s'ajoutent 140 millions d'euros versés au titre de la contribution à la vie étudiante aux universités et aux Crous, ainsi que les investissements d'avenir, qui jouent un rôle majeur depuis dix ans dans la recomposition du paysage de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Les collectivités territoriales s'engagent toujours davantage pour l'enseignement supérieur. Le rapport de M. Rapin fera mieux connaître leur rôle en la matière.

Le projet de loi de programmation sera présenté mi-février devant le Conseil des ministres. Un tel texte est un événement rare. La programmation démarrera en 2021, comme les prochains contrats de plan État-région (CPER) et le programme de recherche Ambition Europe, dont vous avez souligné la portée particulière. Notre texte articulera au mieux les politiques régionales, nationales et européennes.

Le budget 2020, dans cette attente, finance les politiques en place depuis le début du quinquennat. L'ANR verra ses moyens augmenter de 32,9 millions d'euros. Le plan Intelligence artificielle voit ses crédits plus que doubler, de 17 à 38 millions d'euros. Le soutien aux laboratoires - 25 millions d'euros - sera reconduit, comme la lutte contre les cancers pédiatriques pour 5 millions d'euros, en complément des financements de l'INCa et de l'Inserm.

Deux programmes de recherche sur l'environnement et le développement durable sont prioritaires, dont un concerne l'agriculture.

La création de l'Inrae sera accompagnée de 2 millions d'euros supplémentaires.

Les chercheurs ont leur passion chevillée au corps. La question de leur rémunération est essentielle : 28 millions d'euros seront consacrés au PPCR. Le CNRS verra ses moyens croître pour recruter davantage de chargés de recherche : le nouveau pacte d'accueil sera abondé de 2,5 millions d'euros.

Le programme spatial européen et le CNES auront de nouveaux financements, conformément aux engagements pris par la France à Séville ; et 7 millions d'euros supplémentaires iront au développement des plateformes et des data center.

Le plan Étudiants sera poursuivi en 2020. Les crédits augmentent comme chaque année depuis 2017. La réforme du premier cycle bénéficiera de 350 millions d'euros du programme des investissements d'avenir.

La confirmation d'un changement se joue dans les universités grâce à Parcoursup et à la nouvelle politique d'orientation.

En Staps, le taux de réussite a progressé de plus de 11,7 % en un an. Nous vous ferons part de ces évaluations. Le dialogue stratégique de gestion pour répartir une enveloppe de 50 millions d'euros se tiendra en 2020. Une autre enveloppe de 50 millions d'euros est destinée au PPCR, et aux investissements pédagogiques. Il s'agit d'ouvrir un dialogue entre l'État et les universités.

La vie étudiante est au coeur des préoccupations du Gouvernement. Peu de pays affichent un tel effort continu et croissant depuis plusieurs décennies. Nous avons amélioré les bourses sur critères sociaux et pris plusieurs mesures d'urgence : trêve hivernale avancée, gel des loyers - qui représente un effort de 6 millions d'euros. Les aides d'urgence sont trop peu utilisées. Des étudiants n'osent pas demander ou ne savent pas à qui s'adresser. Nous allons mieux informer, via les Crous en particulier, et mettre en place un numéro vert.

La suppression de l'affiliation à la sécurité sociale étudiante a été généralisée cette rentrée, ce qui augmente de 200 millions d'euros les moyens dédiés à la santé des étudiants.

Madame Robert, le régime des bourses sur critères sociaux doit être revu. Nous y travaillons avec les organisations étudiantes, pour lisser les effets de seuil, dans le cadre des discussions sur le revenu universel d'activité.

C'est un budget sincère, respectueux de nos engagements, construit en responsabilité. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

Examen des crédits de la mission et des articles rattachés

Article 38

M. le président.  - Amendement n°II-380, présenté par M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

666 360 378

 

638 045 512

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques

pluridisciplinaires

 

666 360 378

 

638 045 512

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l'énergie,

du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur

en matière économique et industrielle

dont titre 2

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

666 360 378

666 360 378

638 045 512

638 045 512

SOLDE

0

0

M. Pierre Ouzoulias.  - Une agence comme l'ANR est utile à la science à partir d'un taux d'habilitation de 30 %. Or on est actuellement à moins de 11% de réussite ! Le taux de 25 %, au rythme actuel de progression, ne sera pas atteint avant 2035...

Selon le rapporteur spécial, et je partage son avis, il faut dote l'ANR d'un budget d'1 milliard d'euros. Il y a eu en 2019 une augmentation obtenue par une diminution du taux de réserve de 8 à 4 %. La LOLF permet difficilement d'accroître le budget de l'ANR, si l'on s'interdit de ponctionner ailleurs... J'ai donc choisi une solution radicale ! C'est un amendement d'appel.

M. le président.  - Amendement n°II-379, présenté par M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

 

40 000 000

 

40 000 000

Vie étudiante

300 000 000

 

300 000 000

 

Recherches scientifiques et technologiques

pluridisciplinaires

 

260 000 000

 

260 000 000

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l'énergie,

du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur

en matière économique et industrielle

dont titre 2

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

300 000 000

300 000 000

300 000 000

300 000 000

SOLDE

0

0

M. Pierre Ouzoulias.  - La précarité étudiante est un problème majeur : santé, dépression, addiction, mais aussi prostitution, phénomène dramatique dont on ne parle pas assez. Un étudiant sur deux travaille à temps partiel pour payer ses études. Il est difficile de réussir ses examens en livrant des pizzas une partie de la nuit... Une revalorisation des bourses est nécessaire. Celle qu'applique le Gouvernement est de 11 à 61 euros par an, payée sur dix mois, donc 6 euros par mois ! Un étudiant loue son appartement sur douze mois et non dix. Cela pose problème notamment dans les métropoles où les loyers sont élevés. L'Observatoire national de la vie étudiante (ONVE) devrait rendre un rapport en 2020. Organisons ici un débat d'évaluation pour débattre de la précarité étudiante.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Radical en effet : vous proposez une injection létale pour un patient qui va mieux ! (Sourires) L'ANR reprend des couleurs et reste un opérateur de financement essentiel pour la recherche. À qui transférer, en outre, toutes ses missions annexes ? Vous n'en dites rien. Avis défavorable aux amendements nosII-380 et II-379.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.  - Ces amendements sont sympathiques mais le problème est qu'ils ponctionnent d'autres programmes. On ne parlera bientôt plus des chercheurs ni de l'enseignement supérieur car on aura tout pris pour la vie étudiante ! Avis défavorable.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Il faut abonder l'ANR pour qu'elle prouve toute son utilité. Avis défavorable à cet amendement d'appel n°II-380.

Avis défavorable à l'amendement n°II-379. Il n'est pas raisonnable de baisser les programmes à destination des universités et de la recherche, de 40 et 260 millions d'euros respectivement.

M. Pierre Ouzoulias.  - Je vous sais gré d'avoir reconnu que le caractère provocateur de mon amendement était une forgerie pour pouvoir m'exprimer. (Sourires)

Le nombre de projets en sciences humaines et sociales a été divisé par deux. J'ai déposé trois dossiers à l'ANR, et essuyé trois échecs ; c'est beaucoup plus facile de concourir auprès de l'European Research Council (ERC) ou des régions ! Mes collègues chercheurs en sciences humaines ne se tournent plus vers l'ANR.

L'amendement noII-380 n'est pas adopté, non plus que l'amendement noII-379.

M. le président.  - Amendement n°II-405, présenté par Mme Taillé-Polian.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

40 000 000

40 000 000

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

40 000 000

40 000 000

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

40 000 000

40 000 000

40 000 000

40 000 000

SOLDE

0

0

Mme Sophie Taillé-Polian.  - En seconde délibération, le Gouvernement a fait supprimer l'ouverture de 20 millions d'euros sur le programme 192, qu'avaient pourtant adopté les députés, arguant de la prise en compte de « l'ensemble des moyens budgétaires et extrabudgétaires consacrés à l'innovation ».

L'innovation des entreprises se développe en France depuis les années 2010 grâce à l'impulsion d'acteurs publics. Bpifrance finance des projets innovants sous forme d'aides individuelles directes aux TPE et PME, majoritairement financées par l'État sur le programme 192, qui joue un rôle bien plus important que le fonds pour l'innovation de rupture. Ces crédits accompagnent de nouveaux projets dans les territoires.

Après un abondement de 250 millions d'euros en 2011, les moyens de l'État gérés par Bpifrance ont ainsi progressivement décru pour atteindre 120 millions d'euros en 2019 et 100 millions d'euros en 2020, sans compter le taux de gel des crédits qui ne fait qu'augmenter.

Le rapport Lewiner sur les aides à l'innovation préconise de « maintenir les aides à l'innovation de Bpifrance inscrites sur le programme 192 au moins au niveau de 140 millions d'euros ». Cet amendement augmente donc ces crédits de 40 millions d'euros. Nous serions ravis que le Gouvernement nous évite de gager sur un autre programme.

M. le président.  - Amendement n°II-476 rectifié, présenté par MM. Canevet et Delahaye, Mme Loisier, MM. Le Nay, Henno, Kern et P. Martin et Mme Guidez.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

20 000 000

 

20 000 000

Recherche dans les domaines de l'énergie,

du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur

en matière économique et industrielle

dont titre 2

20 000 000

 

20 000 000

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

M. Michel Canevet.  - C'est un amendement de même nature : 20 millions d'euros, pris sur la recherche spatiale au bénéfice de BpiFrance. Je ne suis pas certain qu'il plaise à M. Adnot...

Mme la présidente.  - Amendement n°II-460, présenté par M. Moga, au nom de la commission des affaires économiques.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

10 000 000

 

10 000 000

Recherche spatiale

 

10 000 000

 

10 000 000

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

20 000 000

 

20 000 000

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Pierre Moga, rapporteur pour avis.  - Quelle est la cohérence de la politique gouvernementale en faveur de l'innovation. Les aides à l'innovation de BpiFrance ne devraient pas descendre sous la barre des 120 millions d'euros ; le rapport Lewiner plaidait pour 140 millions. Or le Gouvernement ne propose que 100 millions d'euros. Le politique en faveur de l'innovation doit être stable, sans quoi c'est un coup d'épée dans l'eau.

Le fonds pour l'innovation et l'industrie nous prive de notre droit de regard annuel sur 250 millions d'euros. Et la cible du plan Deep tech n'est pas celle des aides à l'innovation, qui financent des entreprises innovantes sur les territoires. C'est un levier qui a prouvé son efficacité.

Pouvez-vous faire cet effort supplémentaire de 20 millions d'euros pour la Bpi ?

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Retrait ou avis défavorable sur ces amendements. En 2019, Bpifrance a récupéré 70 millions d'euros, et 26 millions d'euros en exonération de charges au titre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. L'an dernier, elle a fait 1 milliard d'euros de bénéfices.

Attention, d'autant que vous prélevez des crédits sur la recherche spatiale alors que nous devons régler notre dette envers l'Agence spatiale européenne, avant de relancer une vraie politique spatiale.

Croyez-moi, nous avons étudié la question. Vous avez vu la valse-hésitation de l'Assemblée nationale qui avait initialement pris des crédits sur l'université, avant de reculer. Ne faisons pas la même erreur ; n'augmentons pas davantage les crédits de Bpi.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Je n'aurais pu mieux dire. Le budget de Bpifrance a augmenté : 100 millions d'euros de crédits budgétaires, 70 millions d'euros du fonds de l'innovation, 26 millions avec le projet de loi de financement de la sécurité sociale. L'opérateur réalise 1 milliard d'euros de bénéfices. Avis défavorable.

M. Pierre Ouzoulias.  - Un milliard d'euros de bénéfices ? Je les aurais affectés directement à l'ANR ! J'ai manqué de jugeote. (Sourires)

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Filou ! (Sourires)

M. Pierre Ouzoulias.  - Mes collègues scientifiques travaillent souvent avec des bouts de ficelle. Nous avons une exigence morale d'absolue transparence de l'argent public investi dans la recherche - y compris les crédits du CIR. Je suivrai le rapporteur.

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Ces fonds, qui aident des entreprises au coeur des territoires, relèvent plus du développement économique que de cette mission. Bpifrance utilise ses fonds propres pour faire face à la baisse de ses crédits, notamment dans le cadre des mécanismes de garantie. Sa situation n'est pas si florissante ! Il serait bon qu'il demeure une ligne budgétaire pour que nous gardions un contrôle.

Cela dit, je retire mon amendement n°II-405.

Mme Sophie Primas.  - Je suis sensible à ces arguments, et l'amendement de la commission des affaires économiques pourra être retiré. Mais il faut que le fonds pour l'innovation et l'industrie soit plus transparent ; c'est peut-être ancien monde, mais le Parlement doit avoir un droit de regard ! Nous souhaitons aussi que Bpifrance demeure dans le budget de l'État, pour pouvoir exercer un contrôle.

M. Jean-Pierre Moga, rapporteur pour avis.  - Je retire l'amendement n°II-460, mais il est anormal que les 250 millions d'euros du fonds pour l'innovation et l'industrie échappent à notre regard.

L'amendement n°II-405 est retiré, de même que les amendements nosII-460 et II-476.

M. le président.  - Amendement n°II-381, présenté par M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

 

40 000 000

 

40 000 000

Vie étudiante

40 000 000

 

40 000 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielledont titre 2

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

40 000 000

40 000 000

40 000 000

40 000 000

SOLDE

0

0

M. Pierre Ouzoulias.  - En 2017, le Gouvernement s'était engagé à construire 60 000 logements étudiants. À peine la moitié seront livrés. Selon Marc Prévot, responsable des plans pour le logement étudiant, les objectifs sont inatteignables.

Nous sommes favorables au gel des loyers dans les résidences Crous, que votre ministère prend en charge pour 6 millions d'euros.

Mais dans le projet de loi de finances rectificative, le Gouvernement a obtenu l'annulation de 35 millions d'euros de crédits pour la vie étudiante, qui correspondent à des crédits gelés. Trois jours après le vote du collectif, le 26 novembre, vous nous annoncez 6 millions d'euros supplémentaires. Où les prenez-vous ? Pourquoi avoir alors annulé les 35 millions d'euros ? Nous avons repris ces crédits, ajouté les 6 millions d'euros promis et arrondi à la dizaine supérieure.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.  - Avis défavorable. Vous prendriez 40 millions d'euros sur les crédits de l'enseignement supérieur privé. La dépense moyenne passerait de 500 euros par étudiant à 250 euros ; à l'université, c'est 10 000 euros par étudiant !

Ce n'est pas en ajoutant 40 millions d'euros qu'on rattrapera les 30 000 logements manquants. Il faut un investissement des collectivités territoriales pour libérer du foncier et un engagement de tous les acteurs.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - L'enquête du 31 mars 2019 a recensé 30 373 places livrées ou prévues d'ici 2022. De nombreux projets sont bloqués non pour des raisons de financement, mais faute de disponibilité du foncier, même si nous travaillons avec les maires. Certains refusent hélas de nous fournir du foncier, ou à des coûts exorbitants...

Nous agissons, avec le gel des loyers, la trêve hivernale dans les Crous, la caution Visale, le bail mobilité, la colocation, la mise en place de l'observatoire territorial du logement étudiant, et la signature prochaine d'une convention entre l'Union sociale pour l'habitat, le Cnous, la conférence des présidents d'université et les associations d'élus pour faciliter la mise en synergie de tous les acteurs. Avis défavorable.

L'amendement n°II-381 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-567, présenté par Mme S. Robert et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

35 000 000

 

35 000 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

35 000 000

 

35 000 000

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle dont titre 2

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

35 000 000

35 000 000

35 000 000

35 000 000

SOLDE

0

0

Mme Claudine Lepage.  - Le 18 novembre, lors de l'examen du collectif pour 2019, nous faisions adopter un amendement rétablissant 35 millions d'euros de crédits pour la vie étudiante - qui n'a hélas pas survécu à la CMP.

Cet amendement réinjecte ces 35 millions dans le budget 2020. Ils ne seront pas superflus pour renflouer les bourses, qui sont réévaluées de 1,1 % après quatre années de stagnation, accroître les aides au mérite, en chute, et à la mobilité internationale. Alors que la précarité étudiante a été révélée par un geste dramatique, il faut aider nos étudiants à étudier, à se loger, à se déplacer, bref à réussir dans des conditions décentes.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.  - Ces 35 millions d'euros seraient pris sur la recherche spatiale ; avis défavorable. Or 15 millions d'euros n'ont pas été consommés dans ce programme, preuve que le problème n'est pas celui de la disponibilité budgétaire. Attendons de connaître les projets de la ministre sur la réforme des bourses.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Il nous faut être responsables. Nous sommes tous extrêmement touchés par la précarité étudiante. Les bourses sont un programme de guichet : tant qu'il y a des demandes, nous y répondons. La baisse des aides au mérite était un choix du précédent gouvernement. Sur les 76 millions mis en réserve, nous en avons dégelé 41, soit 54 %, pour répondre à la demande.

Il faut travailler ensemble, avec les associations, sur le critère de distance pour fixer le montant des bourses, sur les seuils, etc, pour mettre les bourses en adéquation avec la réalité de la vie des étudiants

L'amendement n°II-567 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-382, présenté par M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

27 344 000

 

27 344 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

27 344 000

 

27 344 000

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

27 344 000

27 344 000

27 344 000

27 344 000

SOLDE

0

0

M. Pierre Ouzoulias.  - La précarité étudiante est plus élevée de sept points dans les territoires d'outre-mer que dans l'Hexagone. La vie y est aussi plus chère, de 7 à 13 %. Il faut en tenir compte pour leur permettre d'étudier dans de bonnes conditions.

Les étudiants ultramarins qui étudient en métropole reçoivent une bourse sur douze mois. Ce statut privilégié est légitime, mais ceux qui restent en outre-mer devraient pouvoir en bénéficier également.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Désolé, mais votre amendement diminue les crédits de la recherche. Avis défavorable.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Même avis. Les critères d'attribution des bourses doivent être les mêmes pour tous les étudiants, en vertu du principe d'égalité. En faire varier le montant selon le lieu de résidence supposerait de passer par la loi. La question se pose aussi pour Paris... Nous travaillons sur le sujet dans le cadre du revenu universel d'activité.

M. Pierre Ouzoulias.  - Il y a déjà une différence au profit des étudiants d'outre-mer étudiant en métropole, les orphelins et les pupilles de la Nation, qui touchent leur bourse sur douze mois et non dix.

L'amendement n°II-382 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-418 rectifié, présenté par MM. Raison, Milon et Perrin, Mme M. Mercier, M. Longuet, Mme A.M. Bertrand, M. Mouiller, Mme Bruguière, MM. Pierre et Mayet, Mme F. Gerbaud, MM. Savary, Calvet, Kennel et Huré, Mme Malet, M. Meurant, Mme Bonfanti-Dossat, M. Cuypers, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Bonne et Vaspart, Mme Ramond, MM. Bouchet et Bazin, Mmes Imbert, Procaccia et Gruny, M. Brisson, Mme Chauvin, MM. Genest, Sol, D. Laurent, H. Leroy, Sido et Gremillet, Mme Deroche et M. Laménie.

I.  -  Créer le programme :

Recherche appliquée et innovations agroalimentaires

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

Vie étudiante

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

20 000 000

20 000 000

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

Recherche appliquée et innovation agroalimentaires

20 000 000

20 000 000

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

M. Max Brisson.  - Cet amendement crée un nouveau programme, « Recherche appliquée et innovations agroalimentaires », doté de 20 millions d'euros, pour favoriser le développement d'une capacité nationale d'innovation visant, in fine, à garantir aux consommateurs une alimentation saine, sûre et accessible. Les états généraux de l'alimentation avaient préconisé la mise en place d'un dispositif de soutien des instituts techniques agro-industriels.

Je suis disposé à le retirer, ne me faisant guère d'illusions...

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Demande de retrait. J'avais déjà répondu l'an dernier à M. Raison qu'il fallait attendre la fusion de l'INRA avec l'Irstea pour former l'Inrae. Créer un nouveau programme ne me parait pas opportun.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°II-418 rectifié est retiré.

Les amendements nosII-427 rectifié et II-368 ne sont pas défendus.

M. le président.  - Amendement n°II-378, présenté par M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

18 067 613

 

18 067 613

Recherche spatiale

10 000 000

 

10 000 000

 

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

5 200 000

 

5 200 000

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

2 179 314

 

2 179 314

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

246 718

 

246 718

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

441 761

 

441 761

 

TOTAL

18 067 613

18 067 613

18 067 613

18 067 613

SOLDE

0

0

M. Pierre Ouzoulias.  - Lors du vote en seconde délibération à l'Assemblée nationale pour restituer les 20 millions d'euros supprimés, il y a eu au passage un petit coup de rabot : 441 000 euros en moins pour l'enseignement supérieur et la recherche agricole. Dans un contexte de nécessaire mutation de l'agriculture, cela parait malvenu. Le Sénat est très attaché à l'enseignement agricole, y compris supérieur. Nous lui restituons ces moyens.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Il y a toujours un coup de rabot... Cet amendement n'est pas irrecevable, mais se heurte à la LOLF. Avis défavorable.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Avis défavorable. Il y a une confusion dans l'objet de votre amendement. L'amendement de l'Assemblée nationale, voté, y compris par vos collègues communistes, contre l'avis du Gouvernement, qui transférait 20 millions du budget des universités vers la BPI n'a aucun rapport avec la répartition, en interministériel, des 18 millions d'euros sur différents programmes.

L'amendement n°II-378 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-404 rectifié, présenté par Mme Berthet, MM. Pellevat et H. Leroy, Mme Morhet-Richaud, MM. D. Laurent, Meurant, Chaize et Morisset, Mmes Deromedi et Imbert, M. Milon, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Laménie, Kennel, Savary et Danesi, Mme F. Gerbaud et MM. Mayet, Cuypers et Genest.

I.  -  Créer un programme :

Recherche scientifique et technologique pour la santé personnalisée

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

 

10 000 000

 

10 000 000

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

Recherche scientifique et technologique pour la santé personnalisée

10 000 000

 

10 000 000

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

Mme Corinne Imbert.  - Le concept de santé personnalisée, objectif prioritaire de la politique nationale de santé et de la politique publique de recherche et d'innovation, correspond à l'émergence des données numériques de santé pour un pilotage individualisé des soins et de la santé génomique en cancérologie ou pour les maladies neurodégénératives, et tient compte de la singularité de chaque parcours de soins et de vie.

Pour en accompagner le développement, cet amendement flèche les financements de la recherche vers les EPST, EPIC et autres opérateurs publics intervenant dans le domaine de la santé personnalisée.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Demande de retrait pour les mêmes raisons que l'amendement précédent, même si l'intention est louable.

Mme Laure Darcos, rapporteure pour avis.  - Universcience est déjà à l'os, alors qu'il organise toutes les fêtes de la science ! Lui retirer des crédits serait suicidaire. Je ne voterai pas cet amendement.

L'amendement n°II-404 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-105 rectifié, présenté par MM. Leleux, D. Laurent, Morisset, Lefèvre, Piednoir et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Charon, Pellevat et Karoutchi, Mmes Bruguière et Lassarade et MM. Longuet, H. Leroy, Mandelli, Sido, Gremillet, Schmitz et Bonhomme.

I.  -  Créer le programme :

Tiers secteur de la Recherche

II.  - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

8 500 000

 

8 500 000

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

Tiers secteurde la Recherche

8 500 000

 

8 500 000

 

TOTAL

8 500 000

8 500 000

8 500 000

8 500 000

SOLDE

0

0

M. Max Brisson.  - Le tiers secteur est à la recherche publique et privée ce que le tiers état est à la noblesse et au clergé. (Sourires)

Depuis les années 70, la société civile a constitué une contre-expertise citoyenne en contrepoint de l'expertise scientifique officielle, souvent suspecte. Le tiers secteur de la recherche, qui regroupe entreprises, associations et élus locaux associés dans des formules en réseau très variées, permet de faire émerger des thématiques de recherche innovantes, orphelines de la recherche publique ou privée, et donne un souffle nouveau à l'innovation, en particulier dans le numérique ou l'écologie. Cet amendement vise à faire reconnaître officiellement cette approche.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Vous anticipez la loi de programmation de la recherche, et prenez des crédits sur une ligne budgétaire tendue. Retrait ?

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Même avis.

M. Max Brisson.  - La future loi de programmation pourrait utilement aborder le sujet. Madame la ministre, pouvez-vous nous en dire plus ?

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - De nombreux programmes de recherche intègrent déjà la société civile - les agriculteurs, les patients. Votre amendement est contraire à la recommandation de la Cour des comptes.

L'amendement n°II-105 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-383, présenté par M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

8 400 000

8 400 000

Vie étudiante

Recherches scientifiques et technologiques

pluridisciplinaires

8 400 000

8 400 000

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l'énergie,

du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur

en matière économique et industrielle

dont titre 2

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

8 400 000

8 400 000

8 400 000

8 400 000

SOLDE

0

0

M. Pierre Ouzoulias.  - La situation des doctorants est dramatique. Ils participent à la vie scientifique du laboratoire, portent un projet, aident une équipe. Le contrat doctoral ne rémunère qu'à hauteur de 1 700 euros bruts, à peine plus que le Smic. Les contrats CIF sont un peu supérieurs mais 60 % des doctorants en sciences humaines et sociales n'ont aucune rémunération.

Le taux d'abandon en doctorat est important : 10 à 30 % dans les sciences dures, 60 % en sciences humaines. Quel gâchis !

Nous en reparlerons lors de la loi de programmation, pour laquelle nous ne manquons pas d'ambition - nos amendements en sont la preuve.

Le taux d'emploi des docteurs dans la haute fonction publique est le plus bas du monde : 1 % ! Il est aussi très bas dans le secteur privé. J'y vois l'une des causes des difficultés de la science française à porter des projets qui soient repris par des entreprises privées.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.  - C'est un sujet important. Le problème, c'est où vous prenez les fonds... Avis défavorable.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - J'entends votre appel. Avis défavorable. Nous en parlerons dans la loi de programmation.

L'amendement n°II-383 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-26, présenté par M. Adnot, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

3 500 000

3 500 000

Vie étudiante

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

Recherche spatiale

3 500 000

3 500 000

Recherche dans les domaines de l'énergie,

du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur

en matière économique et industrielle

dont titre 2

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

3 500 000

3 500 000

3 500 000

3 500 000

SOLDE

0

0

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.  - L'enseignement privé est mal traité budgétairement. Imaginez qu'il faille former ces 110 000 étudiants dans le public, pour un coût de 10 000 euros par étudiant !

Vous me direz, madame la ministre, que la réserve va être levée pour 3,5 millions d'euros mais c'est pour financer la formation professionnelle, déjà prévue ! Cet amendement relève donc le montant de l'enveloppe accordée aux établissements d'enseignement supérieur privés.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Avis défavorable. Les établissements d'enseignement supérieur privés d'intérêt général (Eespig) vont bénéficier de 81,7 millions d'euros ; sur ce programme, 99,7 % des crédits ouverts ont été affectés.

L'amendement n°II-26 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-289 rectifié bis, présenté par MM. Poadja, Kern, Laugier, Gremillet, Détraigne et Janssens, Mme Joissains, MM. Henno et Longeot, Mme Loisier, MM. Moga, Capo-Canellas et Canevet, Mmes Doineau et Billon et M. Delcros.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

 

2 600 000

 

2 600 000

Vie étudiante

2 600 000

 

2 600 000

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l'énergie,

du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur

en matière économique et industrielle

dont titre 2

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

2 600 000

2 600 000

2 600 000

2 600 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Pierre Moga, rapporteur pour avis.  - Ces 2,6 millions d'euros correspondent au montant que coûterait l'octroi de bourses aux étudiants calédoniens, auxquels on oppose l'inadaptation des plafonds d'éligibilité à la vie chère en Nouvelle-Calédonie. En 2015, l'écart de prix moyen entre la Nouvelle Calédonie et la métropole est de 33 %. Pour les produits alimentaires 73,4 %, pour les communications 63,6 %, et pour le logement 37,1 %. Ces spécificités appellent une modulation des critères d'éligibilité aux bourses.

Seulement 27 % des étudiants calédoniens remplissent les critères d'éligibilité, contre 38 % en métropole, et 63 % dans le reste des outre-mer. En abondant les crédits des bourses sur critères sociaux, nous rendons possible une modulation des critères d'éligibilité pour la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.  - Il existe déjà des dispositifs pour ces étudiants. Avis défavorable.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°II-289 rectifié bis n'est pas adopté.

Les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » sont adoptés.

Article additionnel avant l'article 76 sexdecies

M. le président.  - Amendement n°II-389 rectifié, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Avant l'article 76 sexdecies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les conséquences pour les finances publiques d'une gratuité des inscriptions dans les établissements d'enseignement supérieur public et d'une compensation de l'État en direction des établissements de la perte de ces ressources propres.

M. Pierre Ouzoulias.  - Cette demande de rapport est un prétexte pour évoquer la question des droits d'inscription dans l'enseignement supérieur, à la suite de la décision du Conseil constitutionnel.

C'est une loi de 1951 qui charge le pouvoir réglementaire de fixer des droits : à l'époque, les étudiants étaient peu nombreux. Ne serait-il pas opportun que le Parlement réfléchisse collectivement, chaque année, au montant des droits d'inscription ? Les disparités sont incompréhensibles : 502 euros pour s'inscrire en doctorat de médecine, 159 euros en doctorat vétérinaire...

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.  - La position du Conseil constitutionnel a surpris : la France serait donc prête à former gratuitement tous les étudiants du monde... Avis défavorable, en attendant les éclaircissements du Conseil d'État.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Même avis.

M. Pierre Ouzoulias.  - Faut-il que le Gouvernement continue à définir par arrêté le montant des droits d'inscription ? Telle était ma question.

L'amendement n°II-389 rectifié n'est pas adopté.

Article 76 sexdecies

M. le président.  - Amendement n°II-24, présenté par M. Adnot, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.  - La commission des finances n'est pas favorable aux demandes de rapports.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°II-24 est adopté et l'article 76 sexdecies est supprimé.

Article additionnel après l'article 76 sexdecies

M. le président.  - Amendement n°II-470 rectifié bis, présenté par M. Kern, Mme Troendlé et MM. Kennel, Reichardt, Danesi, J. Bigot, Le Nay, P. Martin, Delcros et Canevet.

Après l'article 76 sexdecies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  À compter de l'entrée en vigueur du II de l'article 43 de la loi de finances pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999), les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel sont exonérés de la taxe sur les installations nucléaires de base.

II.  -  À compter de l'entrée en vigueur de l'article 96 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010, les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel sont exonérés de la contribution annuelle au profit de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire due par les exploitants des installations nucléaires de base.

III. - Les I et II entrent en vigueur au 1er janvier 2021.

IV.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Michel Canevet.  - L'Université de Strasbourg a exploité un réacteur nucléaire universitaire jusqu'en 1997. Elle était à ce titre redevable de la taxe sur les installations nucléaires de base et de la contribution additionnelle due à l'IRSN.

Il est anormal que l'établissement demeure redevable de ces taxes sur la période où le réacteur n'était plus en service.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.  - Avis favorable.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Même avis. Je lève le gage.

L'amendement n°II-470 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.

Mme Catherine Procaccia.  - Bravo !

Article 76 septdecies

M. le président.  - Amendement n°II-25, présenté par M. Adnot, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.  - Il s'agit à nouveau de supprimer un rapport.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Avis favorable.

L'amendement n°II-25 est adopté et l'article 76 septdecies est supprimé.

Article additionnel après l'article 76 septdecies

M. le président.  - Amendement n°II-391 rectifié, présenté par Mme Berthet, MM. Pellevat et H. Leroy, Mme Morhet-Richaud, MM. D. Laurent, Meurant, Chaize et Morisset, Mmes Deromedi, Imbert et Bonfanti-Dossat, MM. Laménie, Milon, Kennel, Savary et Danesi, Mme F. Gerbaud et MM. Mayet, Cuypers et Genest.

Après l'article 76 septdecies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 113-2 du code de la recherche est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « cinq » ; 

2° Le d est ainsi rédigé :

« d) La recherche, l'innovation et le transfert de technologies dans les domaines identifiés pour la santé personnalisée ; »

3° Après le même d, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...) Des programmes mobilisateurs pluriannuels qui font appel à ces différentes catégories d'action. Ces programmes mobilisent autour des grands objectifs d'intérêt national retenus par le Gouvernement tant des crédits budgétaires que d'autres moyens apportés par les organismes publics de recherche, les laboratoires universitaires, les entreprises nationales, les centres de recherche et les entreprises privés. Ces crédits peuvent être révisés lors des examens annuels des projets de lois de finances. »

Mme Corinne Imbert.  - À l'occasion du Conseil stratégique des industries de santé, le Gouvernement a présenté plusieurs mesures visant à améliorer la compétitivité et l'attractivité de la France dans le domaine de la santé, notamment dans la recherche et le développement des biomédicaments et des thérapies innovantes.

Pour encourager la structuration d'une filière de médicaments de thérapie innovante, il faut lui assurer prévisibilité et stabilité financière.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Je prends cela comme un amendement d'appel sur la santé personnalisée. Retrait.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°II-391 rectifié est retiré.

Prochaine séance, aujourd'hui, samedi 30 novembre 2019, à 10 h 30.

La séance est levée à 1 h 30.

Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,

Jean-Luc Blouet

Chef de publication