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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Questions d'actualité

Assassinat de Samuel Paty - Valeurs républicaines (I)

Mme Éliane Assassi

M. Jean Castex, Premier ministre

Assassinat de Samuel Paty - Soutien aux enseignants (I)

Mme Nadège Havet

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports

Assassinat de Samuel Paty - Soutien aux enseignants (II)

M. David Assouline

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports

Assassinat de Samuel Paty - Valeurs républicaines (II)

M. Jean-Claude Requier

M. Jean Castex, Premier ministre

Assassinat de Samuel Paty - Formation des enseignants

Mme Monique de Marco

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports

Assassinat de Samuel Paty - Haine sur internet

M. Claude Malhuret

M. Jean Castex, Premier ministre

Assassinat de Samuel Paty - Lutte contre l'islamisme (I)

M. Bruno Retailleau

M. Jean Castex, Premier ministre

Assassinat de Samuel Paty - Expulsion d'étrangers radicalisés

M. Loïc Hervé

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur

Assassinat de Samuel Paty - Soutien aux enseignants (III)

M. Olivier Paccaud

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports

Assassinat de Samuel Paty - Respect de l'État de droit

Mme Marie-Pierre de La Gontrie

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur

Assassinat de Samuel Paty - Lutte contre l'islamisme (II)

M. Philippe Pemezec

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur

Autonomie fiscale des collectivités

M. Olivier Cigolotti

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales

Vaccin contre la grippe

M. Bruno Belin

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles

Assassinat de Samuel Paty - Moyens de l'antiterrorisme

M. Jean-Yves Leconte

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur

Zones de revitalisation rurale

M. Rémy Pointereau

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales

L'Agence française de développement et la Chine

M. Olivier Cadic

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Terrorisme et immigration

M. Stéphane Ravier

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur

Cour de justice de la République (Élections - Ouverture du scrutin)

Avis sur une nomination

CMP (Nominations)

Déshérence des contrats de retraite supplémentaire

Discussion générale

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable

Mme Catherine Deroche, en remplacement de Mme Catherine Procaccia, rapporteur de la commission des affaires sociales

Mme Monique Lubin

M. Daniel Chasseing

Mme Raymonde Poncet Monge

M. Dominique Théophile

Mme Véronique Guillotin

M. Fabien Gay

Mme Annick Jacquemet

M. Guillaume Chevrollier

M. Vincent Segouin

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

ARTICLE 4 (Supprimé)

Explication de vote

Mme Monique Lubin

Cour de justice de la République (Résultat du scrutin)

Cour de justice de la République (Prestation de serment)

Hommage à Samuel Paty

Accord en CMP

Conseil européen des 15 et 16 octobre 2020

M. Clément Beaune, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes

M. Pascal Allizard, vice-président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances

M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes

M. Pierre-Jean Verzelen

M. Jacques Fernique

Mme Nadège Havet

M. Henri Cabanel

M. Jérémy Bacchi

M. Jean-François Longeot

M. Jean-Yves Leconte

M. Didier Mandelli

Mme Catherine Fournier

Mme Marta de Cidrac

M. Guillaume Chevrollier

M. Clément Beaune, secrétaire d'État

M. Jean-François Rapin, président de la commission

Annexes

Ordre du jour du jeudi 22 octobre 2020

Nomination des membres de trois CMP




SÉANCE

du mercredi 21 octobre 2020

9e séance de la session ordinaire 2020-2021

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : M. Jacques Grosperrin, Mme Victoire Jasmin.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Je rappelle le respect des règles sanitaires en vigueur et notamment le port du masque, obligatoire dans l'hémicycle, y compris pour les orateurs.

Au nom du Bureau du Sénat, j'appelle chacun à observer l'une des valeurs essentielles du Sénat : le respect des uns et des autres et celui du temps de parole.

Assassinat de Samuel Paty - Valeurs républicaines (I)

Mme Éliane Assassi .  - L'assassinat de Samuel Paty a sidéré la Nation. En France, pays des Lumières, un enseignant a été tué sauvagement car il transmettait le savoir, la réflexion, l'humanité, pour faire de ses élèves des citoyens libres. C'est cette humanité qu'a voulu tuer ce terroriste, au nom d'un islam radical.

L'islam doit sortir de l'emprise intégriste, encouragée par des pays qu'il faudra dénoncer, afin que l'immense majorité des musulmans, comme ils le souhaitent, puissent pratiquer sereinement leur religion. Il faudra rejeter les amalgames et les tentatives de division qui se multiplient.

Samuel Paty est mort en héros. Il a porté haut les valeurs de la laïcité, la liberté d'expression. Son petit garçon pourra être fier de la gloire de son père, en écho à ces hussards noirs de la République qui ont diffusé, au siècle dernier, la nécessité de l'émancipation humaine par le savoir et la culture.

Avec la Nation tout entière, nous devons saluer sa mémoire mais aussi donner les moyens de leur action aux enseignants et à tous les hussards de la République, dans les écoles, les hôpitaux, les mairies, les commissariats, qui, abandonnés, crient ou taisent leur impuissance.

Il faut une véritable reconquête républicaine, plaçant l'humain au coeur des décisions.

Avec Gambetta j'affirme que « ce qui constitue la vraie démocratie, ce n'est pas seulement de reconnaître les égaux, mais d'en faire. »

En ce jour de deuil national, nous portons l'espoir que la mort de Samuel Paty remettra en mouvement la République laïque, démocratique et sociale, pour que liberté et progrès règnent sur notre territoire : c'est notre devoir ! (Applaudissements)

M. Jean Castex, Premier ministre .  - C'est dans un moment extrêmement grave et solennel que je prends ici la parole, en ce jour où le Président de la République présidera une cérémonie d'hommage national à ce professeur lâchement, odieusement assassiné, dans l'exercice de ses fonctions.

À travers lui, c'est la République et ses valeurs qui sont visées, au coeur desquelles se trouve l'Éducation nationale. Oui, la liberté de penser, d'enseigner, de s'exprimer, est bien la cible de cet ennemi qu'il faut nommer : l'islamisme politique, radical, terreau du terrorisme. Nous connaissons les combattants.

Mme Éliane Assassi.  - Et on fait quoi ?

M. Jean Castex, Premier ministre.  - La première chose à faire, c'est de rester unis dans ces moments, car leur objectif est aussi de nous diviser, d'affaiblir la République, en nous poussant à des propos ou à des actes qui conduiront encore davantage d'adversaires de la République dans leurs filets.

Nous agissons de façon ferme et déterminée. Je pourrais détailler les décisions prises pour donner toutes les suites à cet attentat horrible. Mais le Gouvernement et l'administration de la République travaillent à la prévention de ces actes ignobles, depuis plusieurs années, notamment depuis 2017. Les services ont été réorganisés, les moyens renforcés comme jamais, alors que jadis, on avait abrogé les renseignements généraux. Les lois ont été renforcées, de très nombreux attentats ont ainsi été déjoués.

Cet assassinat doit nous conduire, dans le respect de nos valeurs, à intensifier encore notre action. Le projet de loi contre le séparatisme annoncé aux Mureaux par le Président de la République vient donc à point nommé.

Nous allons encore augmenter les moyens pour lutter contre la haine sur internet. Ce matin même, le Conseil des ministres a dissous un groupement de fait répandant la haine. D'autres suivront. L'Éducation nationale, la République, la France ont été attaquées ; mais nous vaincrons, unis et déterminés, car nous agirons sans relâche pour que force reste à la loi républicaine. (Applaudissements au centre et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Assassinat de Samuel Paty - Soutien aux enseignants (I)

Mme Nadège Havet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI) Toutes mes pensées vont à Samuel Paty, à sa famille et à ses collègues, à tous les professeurs qui sont retournés en classe, choqués et trop seuls. Cet attentat fait suite à d'autres attentats islamistes : près de 300 morts depuis 2011, dont des enfants ! Il ne faut pas trembler, ni faire acte de compromission.

La question de l'accompagnement au quotidien se pose. Certains, en ce moment même, propagent toujours la haine sur les réseaux sociaux ; une lycéenne ne peut toujours pas retourner dans son lycée pour avoir critiqué une religion ! Attention au risque d'autocensure, qui serait un recul collectif.

Nous parlons des fondements mêmes de notre Nation, la liberté de conscience, la libre expression, l'esprit critique ; de ce que nous sommes : une République laïque, une et indivisible.

Nous connaissons la détermination du Gouvernement et du Président de la République. La loi sur les séparatismes qui arrive bientôt au Parlement fait partie de la réponse globale.

L'Éducation nationale doit accompagner les professeurs à enseigner la laïcité, face à des contestations violentes. Comment mieux les protéger ? Avec quelle formation ? Quel encadrement ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI ; M. Philippe Bas applaudit également.)

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports .  - Nous partageons tous ce socle de la République. La liberté d'expression est un pilier fondamental de la démocratie, chez nous et partout dans le monde : je constate un immense élan de solidarité internationale.

Samedi, j'ai reçu les organisations syndicales et les associations de parents d'élèves. J'ai été heureux de constater notre unité et notre convergence de vues sur les valeurs de la République.

Nous donnerons des consignes nettes, précises et fortes, pour la rentrée du 2 novembre.

J'ai demandé au Conseil des sages de la laïcité, que j'ai créé il y a trois ans, de siéger en permanence pour recevoir ceux qui souhaitent être écoutés, et les organisations ou élus qui voudraient faire part de leurs propositions.

D'ores et déjà, je demande à tous les élus de la République d'être présents auprès des professeurs le jour de la rentrée. D'autres mesures seront prises, je les annoncerai aujourd'hui même. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur plusieurs travées du groupe UC)

Assassinat de Samuel Paty - Soutien aux enseignants (II)

M. David Assouline .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Au nom de mon groupe, je veux dire notre immense peine à la famille et aux proches de Samuel Paty.

Un professeur a été assassiné, ce n'est pas par hasard. L'islamisme politique - à ne pas confondre avec la religion musulmane de nombre de nos concitoyens - mène un combat idéologique contre notre République indivisible, sociale, démocratique et laïque. C'est parce qu'il diffuse sa haine obscurantiste par de multiples réseaux, bénéficiant de trop de complaisance et d'aveuglement, qu'un terroriste s'est senti autorisé à tuer.

Un professeur a été assassiné. Il était de ceux qui, à contre-courant des haines, avait pour mission de faire de nos jeunes des citoyens émancipés, de les soustraire à leur assignation à résidence communautaire, de leur expliquer que les femmes et les hommes sont égaux, que nul ne peut être discriminé, et qu'aucune loi religieuse ne saurait s'imposer à la loi de la République.

Un professeur a été assassiné. Je vous demande de redire avec force que personne n'est au-dessus des enseignants de l'école de la République pour transmettre nos valeurs fondamentales. 

Je vous demande d'honorer les 900 000 enseignants, ces piliers de la République, de les protéger, de les valoriser. Ce serait le meilleur hommage à M. le professeur Samuel Paty. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports .  - Nous étions côte à côte dimanche, place de la République, monsieur le sénateur.

Il y a un sujet de protection, mais aussi de reconnaissance de nos professeurs. C'est pourquoi nous travaillons depuis plusieurs mois avec les syndicats sur un agenda social et un Grenelle de l'éducation qui, hasard du calendrier, débute demain. Les mots-clés seront reconnaissance financière, coopération, modernisation et protection.

Nous proposerons des mesures qui feront l'objet d'une loi de programmation. L'effet le plus visible sera la hausse de la rémunération des enseignants, notamment des plus jeunes ; 400 millions d'euros sont d'ores et déjà prévus dans le projet de loi de finances.

Au-delà, nous allons transformer le système, en développant une politique de ressources humaines de proximité. L'Éducation nationale doit être moins anonyme, suivre chaque professeur tout au long de sa carrière. Le sursaut national doit nous conduire à mettre le professeur au centre de notre société, et à le respecter. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur plusieurs travées du groupe RDSE)

Assassinat de Samuel Paty - Valeurs républicaines (II)

M. Jean-Claude Requier .  - Au nom du RDSE, j'exprime toute notre émotion et notre compassion à la famille, aux collègues et amis de Samuel Paty. Je rends aussi hommage au professionnalisme de nos forces de l'ordre.

Mais je veux aussi dire notre colère face à notre incapacité collective à mettre un terme aux défis devenus quotidiens d'une idéologie totalitaire et mortifère. Assez de minutes de silence, de marches blanches ! Notre démocratie a besoin d'actes forts. L'école, creuset de l'avenir de la Nation, a été attaquée, un enseignant décapité pour avoir enseigné la liberté d'expression !

J'ai été professeur d'histoire-géographie, j'ai enseigné à des élèves de toutes origines l'édification de la République, les grands principes émancipateurs des Lumières, le doute raisonnable, le libre arbitre, le débat contradictoire, afin qu'ils deviennent des citoyens éclairés.

Depuis 1892, le RDSE est un défenseur ardent de la laïcité - sans adjectif - qui garantit la concorde civile, la liberté de croire ou de ne pas croire, qui permet l'égalité des chances, à rebours de l'obscurantisme des fanatiques.

Monsieur le Premier ministre, l'autorité de l'État n'a cessé de reculer depuis trente ans. Allez-vous y mettre un terme ? (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et INDEP, et sur plusieurs travées des groupes UC, Les Républicains et SER)

M. Jean Castex, Premier ministre .  - Je salue la profession que vous exerciez, qui devient un symbole.

Une des forces de la République, c'est d'être laïque. Elle le demeurera plus que jamais. Pilier de notre socle social, construit par nos prédécesseurs républicains, la laïcité sera renforcée, confortée.

Cet acte odieux ne restera pas impuni. Je rends hommage aux forces de sécurité intérieure : l'auteur de l'attentat devant les anciens locaux de Charlie Hebdo a été arrêté une heure dix après les faits et l'assassin de Samuel Paty a été neutralisé quelques minutes après son crime.

Sous le contrôle de l'autorité judiciaire, nous avons engagé tous les moyens pour que les complices soient poursuivis. Nous avons dissous une association et fermé la mosquée de Pantin.

Au-delà, nous comptons renforcer les valeurs de la laïcité. C'est tout l'objet de la loi contre les séparatismes, dont vous débattrez début 2021. Elle approfondira notamment les dispositions votées dans la loi Gatel.

Notre détermination et notre action sont renforcées par les événements qui viennent de se produire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur quelques travées du groupe UC)

Assassinat de Samuel Paty - Formation des enseignants

Mme Monique de Marco .  - Ma première pensée va à la famille de Samuel Paty. La violence de cet assassinat montre l'immense difficulté du métier d'enseignant, en première ligne. C'est une mission essentielle que d'accompagner tous les enfants de la République sur le chemin de la connaissance et de la réflexion. L'éducation et l'esprit critique sont le gage de la démocratie et de la lutte contre le terrorisme. Or les professeurs font face à des difficultés quotidiennes, les relations se tendent, l'accompagnement fait défaut.

Nous assistons à la paupérisation du service public de l'enseignement. Il n'y a plus de formation continue digne de ce nom sur la citoyenneté et le vivre-ensemble ; elle doit se tenir sur le temps scolaire, en prévoyant des remplacements.

Enseignante en collège pendant trente ans, je vous demande avec émotion un plan de formation ambitieux. Non pas un énième numéro vert mais de vraies mesures pour accompagner les professeurs. Il faut honorer la mémoire de Samuel Paty et poursuivre son travail. (Applaudissements à gauche ; M. André Gattolin applaudit également.)

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports .  - Nous avons avancé sur le sujet de la formation. Les crédits budgétaires de l'éducation nationale ont plus augmenté sous ce quinquennat que sous les deux ou trois derniers.

Nous avons avancé avec la loi Gatel, et la loi pour l'école de la confiance. La formation à l'éducation morale et civique fait désormais systématiquement partie de la formation initiale.

La formation continue doit être plus abondante, et ce dans toutes les disciplines. L'éducation morale et civique a été et sera renforcée, avec pour but de la rendre plus vivante, susceptible d'engager les élèves. Des outils pédagogiques et des formations à distance via Canopé sont développés. L'éducation morale et civique doit être portée par les professeurs d'histoire-géographie mais aussi par l'ensemble du corps professoral. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)

Mme Monique de Marco.  - La formation à distance n'est pas suffisante. Il faut une formation vaste et en présentiel, s'adressant à tous les enseignants, pas seulement ceux d'histoire-géographie. (Applaudissements sur les travées du GEST)

Assassinat de Samuel Paty - Haine sur internet

M. Claude Malhuret .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants) Ce n'est plus seulement dans les mosquées salafistes que se recrutent les djihadistes, mais aussi sur internet. L'assassinat de Samuel Paty a été précédé par les torrents d'injures des fanatiques sur les réseaux antisociaux.

Y sévissent aussi ceux qui fracturent méthodiquement le pays : les identitaires, les indigénistes, les racialistes, les décoloniaux, et les idiots utiles qui crient à l'islamophobie dès qu'une mesure combat l'islamisme.

La loi contre les contenus haineux sur internet a été censurée par le Conseil constitutionnel au nom de la liberté d'expression, laissant le problème entier. La loi interdit à la presse de publier des contenus haineux ; les plateformes, elles, charrient leurs « torrents de boue », comme le dit Gérard Larcher, sans aucune sanction.

Il faut trouver le moyen d'obtenir le retrait des contenus haineux. Nous le devons à Sonia Mabrouk, à Mila, à Zineb el Rhazoui, à toutes les victimes de ces fatwas sur internet.

Le meilleur hommage à Samuel Paty, c'est de continuer son cours contre la haine et pour l'unité de la République. (Applaudissements des travées du groupe Les Indépendants à celles du groupe Les Républicains)

M. Jean Castex, Premier ministre .  - Je partage l'intégralité de vos propos.

Les criminels passent à l'acte sous l'effet de deux facteurs : une manipulation par des groupes, vecteurs de l'islam politique, qui se camouflent sous un objet sportif, éducatif ou cultuel, et par les réseaux sociaux.

Nous devons nous attaquer plus fortement encore à ceux qui manipulent et à ceux qui transmettent la haine. Nous allons donc dissoudre des associations et groupements de faits et proposer au Parlement d'élargir le cadre légal encadrant ces dissolutions.

Concernant les réseaux sociaux - et je me retrouve dans l'appréciation portée par le président du Sénat - il y a deux sujets : la jurisprudence du Conseil constitutionnel, mais aussi une directive communautaire à faire évoluer pour mieux responsabiliser les hébergeurs. Je serai dès vendredi à Bruxelles pour en parler avec la Commission. Ce sera l'une de nos premières priorités.

Le texte sur le séparatisme devra - et le Sénat y concourra - trouver une voie juridique tenant compte de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, pour rendre plus effective notre lutte contre la haine sur les réseaux sociaux. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE ainsi que sur quelques travées du groupe UC)

Assassinat de Samuel Paty - Lutte contre l'islamisme (I)

M. Bruno Retailleau .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) En France aujourd'hui, on peut être décapité pour avoir fait un cours d'instruction civique sur la liberté d'expression. En France aujourd'hui, des fatwa sont lancées et la charia immédiatement exécutée. Mais les Français sont passés de la sidération à la colère. Ils demandent des comptes, exigent des résultats. Ils sentent que nous perdons le combat contre le totalitarisme islamique, faute de courage, faute de mener un combat global contre l'islamisme sous toutes ses formes, violentes ou rampantes, mais aussi contre le désordre migratoire qui en est l'un des terreaux, qui est un obstacle à l'assimilation de nos valeurs républicaines.

Monsieur le Premier ministre, êtes-vous prêts à mener ce combat global ? Votre loi, qui ne viendra devant nous que dans cinq mois, comportera-t-elle des mesures pour remédier à ce désordre migratoire ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ainsi que sur quelques travées du groupe INDEP)

M. Jean Castex, Premier ministre .  - Les Français sont en colère, nous le sommes tous. Le Gouvernement est déterminé et à la manoeuvre. J'entends que nous sommes questionnés sur notre prétendue inefficacité ; c'est le débat démocratique et je l'accepte.

Mais les choses sont difficiles, et ceux qui combattent la République ont aussi la volonté de faire éclater la communauté nationale. N'en doutez pas un seul instant !

Vous parlez d'immigration, mais le renseignement nous apprend que ces actions ne sont pas uniquement le fait d'étrangers mais aussi, malheureusement, de citoyens de la République ! (Mouvements sur les travées du groupe Les Républicains) Nous agissons tous azimuts afin de les identifier avant qu'ils ne passent à l'acte.

Nous avons renforcé le renseignement, nous allons nous attaquer aux effecteurs. Notre main ne tremblera pas. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)

M. Bruno Retailleau.  - C'est votre Gouvernement qui fait le lien entre islam et immigration en annonçant comme première mesure l'expulsion d'étrangers en situation irrégulière ! (Exclamations à gauche)

Nous vous demandons de réarmer la République mais aussi de faire aimer la France. Ne cédez pas à la tentation française de la pénitence perpétuelle, ne faites pas comme le Président de la République, qui a jugé que la France est coupable du pire des crimes, le crime contre l'humanité. Relevons ensemble l'étendard de nos valeurs, de la fierté française. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Assassinat de Samuel Paty - Expulsion d'étrangers radicalisés

M. Loïc Hervé .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La France est un État de droit et entend le rester. Notre pays ne doit pas être faible. Des milliers d'étrangers prêcheurs de haine sont toujours sur notre sol alors que certains sont sous le coup d'une obligation de quitter le territoire national.

Les Français en colère demandent : pourquoi sont-ils encore là ? On nous répond, comme on l'a mille fois fait : c'est compliqué !

Le Gouvernement nous parle de durcir l'arsenal juridique, d'augmenter les peines. Mais le premier problème, c'est l'application ferme et systématique du droit. Ce n'est pas le cas, terrible aveu.

Le Président de la République a annoncé des mesures concrètes et rapides. Monsieur le ministre de l'Intérieur, vous avez annoncé l'expulsion de 231 étrangers dangereux. Pouvez-vous vous engager à revenir le mois prochain devant nous, pour nous dire combien ont réellement été expulsés ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur .  - J'y suis prêt.

Je pense aux policiers qui ont été en première ligne, à Conflans comme devant les locaux de Charlie Hebdo, et qui en moins de dix, quinze ou vingt minutes sont intervenus pour neutraliser les agresseurs ou mettre fin à une cavalcade mortelle, et ce, au risque de leur vie.

En 2018, un fichier de signalement pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) a été créé. Depuis trois ans, 436 étrangers radicalisés en situation irrégulière ont été expulsés. Entre 2007 et 2010, il y en avait eu 106 pour trouble à l'ordre public. Quant aux interpellations de personnes en situation illégale, il y en avait eu 74 000 sous François Fillon, mais 125 000 sous Édouard Philippe. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)

M. Loïc Hervé.  - Aucun humanisme ne tiendra le choc si la République ne fait pas appliquer les mesures votées par le Parlement et prononcées par la justice. Dans un mois, si certains étrangers expulsés sont toujours là, il faudra nous donner les raisons. Raisons juridiques ? Il faudra modifier la loi. Raisons diplomatiques ? Il faudra lever les obstacles. Cela règlera seulement une partie du problème, car beaucoup de ces prêcheurs de haine sont Français, mais renvoyons déjà les étrangers qui méritent de l'être. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

Assassinat de Samuel Paty - Soutien aux enseignants (III)

M. Olivier Paccaud .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Si je suis sénateur, je reste le professeur d'histoire-géographie que je fus.

Samuel Paty est mort, sacrifié sur l'autel de fanatiques islamistes, décapité pour avoir fait son métier. L'histoire, et sa fille naturelle, l'éducation civique, sont des matières plus que précieuses, car elles révèlent nos racines, donnent un sens au long fil d'Ariane qui nous relie à nos aïeux. Elles nous aident à comprendre comment mieux vivre ensemble.

Mieux vaut en effet savoir d'où l'on vient pour ne pas s'égarer sur les sentiers du malheur : tel est le talisman prudent qu'offrent l'histoire et ses professeurs.

Mais depuis un certain temps, on veut les faire taire : de la Shoah, des croisades, des valeurs républicaines, de la laïcité, de la femme égale de l'homme, les islamistes veulent effacer la trace dans les esprits, alors que certaines autorités prônent le « surtout pas de vagues ». Samuel Paty avait été convoqué au commissariat pour se justifier ! Il est temps de protéger les professeurs et de sanctuariser les cours d'histoire et d'instruction civique, mais aussi de sciences, de lettres ou de sport, et d'instaurer un délit d'entrave à la liberté d'enseigner, pour faire cesser la guérilla permanente des ennemis de l'école émancipatrice. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports .  - Oui, les professeurs d'histoire-géographie, dont je recevais l'association, venue m'apporter son soutien et ses propositions ce matin, sont souvent en première ligne - mais les autres y sont aussi - pour défendre et transmettre les valeurs de la République.

Je ne puis vous laisser dire qu'il n'y a pas eu de soutien de l'institution. Ce n'est pas vrai. Nous avons créé il y a trois ans et demi le Conseil des sages de la laïcité, afin de disposer d'un système de référence de l'Éducation nationale, très exigeant sur la laïcité ; nous avons créé les équipes valeurs de la République, qui ont soutenu Samuel Paty : ne relayez pas, je vous en supplie, les fausses informations qui circulent sur les réseaux sociaux comme le font les ennemis de la République, alors que nous devons défendre sans faille ses valeurs.

La logique fameuse du « pas de vagues » n'est plus celle du ministère de l'Éducation nationale, je l'ai dit le jour de mon arrivée il y a trois ans et demi. Certes, nous n'avons pas tout résolu, loin de là ; il faut agir pour qu'on signale mieux, qu'on réagisse mieux. Je suis ouvert à toutes vos propositions en ce sens. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)

M. Olivier Paccaud.  - Vous ne m'avez pas répondu sur le délit d'entrave. Oui, nous sommes en guerre ; oui, la peur doit changer de camp, la foi ne doit pas se situer au-dessus de la loi. La République doit éclairer, mais aussi protéger. Commençons par modifier l'article 431-1 du code pénal : j'ai une proposition de loi à votre disposition. Charles Pasqua disait jadis : « il faut terroriser les terroristes. » L'heure est venue de se séparer des séparatistes, de paralyser les islamistes ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Assassinat de Samuel Paty - Respect de l'État de droit

Mme Marie-Pierre de La Gontrie .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Chacun ici a soutenu des gouvernements ayant dû faire face au terrorisme. Cela doit tous nous engager à l'humilité, à la responsabilité, monsieur le président Retailleau, dans une période troublée et violente. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

La France est un État de droit où la norme s'applique et l'arbitraire n'a pas sa place. Or le ministre de l'Intérieur veut « intimider », faire « passer des messages » et assurer une forme d'arbitraire.

Le garde des Sceaux, tout d'abord discret, absent aujourd'hui, semble quant à lui prêt à modifier la loi fondatrice de la liberté de la presse et d'expression, du 29 juillet 1881.

« Ce n'est pas par des lois et des juridictions d'exception que l'on défend la démocratie, la liberté, contre ses ennemis, ce serait là un piège que l'histoire a déjà tendu aux démocraties ; celles qui ont cédé n'y ont rien gagné en efficacité répressive, mais beaucoup ont perdu en liberté et parfois en honneur » déclarait Robert Badinter après l'attentat contre Charlie Hebdo.

Entendez-vous écorner l'État de droit ou toujours vous y référer dans un face-à-face courageux avec les Français ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur .  - J'applique les lois votées par le Parlement, notamment celles portées par MM. Valls et Cazeneuve, que jadis vous souteniez - peut-être le changement de ministre vous a-t-il fait changer d'avis... (Rires à droite)

Il y a quelques jours, avant que soit perpétré cet attentat odieux, nous échangions ici même avec le président François-Noël Buffet et le rapporteur Marc-Philippe Daubresse, sur la loi relative à la Sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (SILT). Or votre groupe n'a pas voté les dispositions qui aideraient nos services de renseignement et nos forces de police... (Protestations sur les travées du groupe SER ; applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

J'ai effectivement commandé 80 opérations de police, toutes autorisées par les juges des libertés. Je suis à la disposition du Parlement pour en rendre compte, devant toute commission. J'applique la loi de la République, c'est-à-dire la force de l'État pour protéger les petites gens. (Applaudissements au centre)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Je regrette que vous n'ayez pas affirmé votre attachement à l'État de droit. (Marques d'agacement à droite) Vous étiez encore enfant lorsqu'un de vos illustres prédécesseurs et membre du Sénat avait annoncé qu'il allait « terroriser les terroristes ». Quatre mois plus tard, l'attentat de la rue de Rennes causait sept morts et cinquante-et-un blessés. Lorsque vous réglementez les étals de supermarché, êtes-vous dans votre rôle ? Je ne suis pas sûr que vous respectiez ainsi l'État de droit ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Assassinat de Samuel Paty - Lutte contre l'islamisme (II)

M. Philippe Pemezec .  - Donc Charles Pasqua avait raison !

Les ayatollahs islamistes veulent imposer leur loi. Élu local, j'ai constaté bien des renoncements depuis trente ans et vu l'idéologie totalitaire se développer. Nous avons fermé les yeux sur l'immigration massive à fins de regroupement familial, sur la déviance de certains quartiers, les menus spéciaux dans les cantines, le voile dans l'espace public, les prières de rue, les horaires de piscine... Ce furent autant de coups de boutoir contre la République. Et aujourd'hui, il se passe la même chose à Conflans qu'à Rakka ou Mossoul...

Monsieur le Premier ministre, vous ne pouvez plus fermer les yeux ! Les bougies ne peuvent suffire à faire rempart, les Français attendent des réponses fortes : maîtrise de l'immigration, reconquête rue après rue des quartiers, déchéance de nationalité, recours à la police voire à l'armée.

Il faut pour cela un exécutif déterminé et un Parlement respecté. « Ils ne passeront pas », disait le Président de la République. Avec quelles armes allons-nous combattre ? Plus de renoncement, des actes ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur .  - Je partage votre constat, mais pas toujours les solutions. Attention à ne pas considérer que tout étranger est un potentiel terroriste. Nombreux sont ceux qui fuient les dictatures islamistes, comme les jeunes filles demandeuses d'asile à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).

Je ne crois pas qu'il y ait de procès à faire sur les naturalisations. Pour autant, je vous rappelle qu'il y en a eu 84 000 par an sous la présidence de M. Sarkozy, contre 54 000 sous la présidence d'Emmanuel Macron. L'erreur est ancienne, vous faites votre propre procès...

Il faut beaucoup de courage pour réparer les erreurs du passé ; c'est pour cela que c'est un honneur d'être ministre de l'Intérieur. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)

Autonomie fiscale des collectivités

M. Olivier Cigolotti .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le groupe UC ne remet pas en cause la pertinence de la baisse des impôts de production, c'est du bon sens pour relocaliser, réindustrialiser et relancer l'économie. Mais une fois encore, le Gouvernement a décidé de diminuer la fiscalité locale - cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), contribution économique territoriale (CET), cotisation foncière des entreprises (CFE), taxe sur le foncier bâti des entreprises  - et non la taxe sur les salaires, la C35 ou le forfait social qui sont des impôts nationaux.

Le ministre des comptes publics nous a assuré que cette perte serait compensée de manière intégrale, dynamique et pérenne. Dont acte.

Mais cela augmente la dépendance des collectivités territoriales qui deviennent de simples guichets à l'égard d'un État centralisateur. Pourquoi faire des efforts sans retour sur investissement ?

Comment rétablir l'autonomie fiscale pour les collectivités territoriales ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Laurent Duplomb applaudit également.)

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales .  - La suppression de la taxe d'habitation était un engagement du Président de la République pour soulager les Français. Personne ne l'a remis en question...

Mme Sophie Primas.  - Bien sûr que si ! Nous l'avons fait !

Mme Jacqueline Gourault, ministre.  - Personne dans la population.

Les impôts de production baisseront ainsi de 10 milliards d'euros en 2021, suppression de la part régionale de la CVAE et baisse de moitié des impôts fonciers sur les locaux industriels. Le Gouvernement s'est engagé à ce que les collectivités territoriales soient intégralement et de façon dynamique, compensées. Les régions toucheront ainsi une fraction de TVA égale à la perte de CVAE. (Mme Cécile Cukierman s'indigne.) Pour les communes et les intercommunalités, la loi prévoira un prélèvement sur les recettes de l'État à hauteur des impôts locaux que les collectivités territoriales auraient dû toucher.

Mme Sophie Primas.  - Ce n'est pas la même chose ! (Mme Cécile Cukierman renchérit.)

Mme Jacqueline Gourault, ministre.  - Il ne s'agit donc pas d'une dotation budgétaire. C'est un gage pour les élus locaux.

Mme Cécile Cukierman.  - Nullement !

Mme Jacqueline Gourault, ministre.  - Hier, nous avons eu ici un débat de fond sur l'autonomie fiscale et financière des collectivités territoriales. Je comprends que pour les communes, le fait de lever l'impôt est important. Nous devons donc en débattre.

Vaccin contre la grippe

M. Bruno Belin .  - (Applaudissements sur les travées Les Républicains) Ma question s'adressait au ministre de la Santé. Je ne vous parlerai pas d'un virus venu du bout du monde et inconnu il y a quelques mois, mais d'un virus connu depuis 1918 et pour lequel un vaccin a été créé en 1943.

Or nous ne sommes pas prêts : 7 millions de Français ont retiré un vaccin en pharmacie ; 15 millions de personnes auront une prise en charge en raison d'une situation à risque ; mais 13 millions de doses de vaccin seulement ont été préparées. Que faire pour éviter la rupture de stock en officine ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles .  - Je vous adresse mes félicitations pour votre élection. J'ai apprécié le travail mené ensemble dans la Vienne pour la protection de l'enfance.

La campagne de vaccination durera du 13 octobre au 31 janvier.

Tout le monde doit-il se faire vacciner ? Selon la Haute Autorité de santé (HAS), cette vaccination s'adresse en priorité au personnel de santé et aux plus fragiles. Il est nécessaire que les professionnels se vaccinent pour se protéger ainsi que leurs patients.

Quant au nombre de doses disponibles, l'objectif est de vacciner non pas 100 % mais 75 % des Français, conformément aux recommandations de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

Compte tenu d'une demande accrue par crainte du covid, 30 % de doses supplémentaires par rapport aux 12 millions consommées l'an dernier ont été commandées. Pour la première fois, il y aura constitution d'un stock d'État. Le Gouvernement fait tout pour protéger les citoyens.

M. Bruno Belin.  - Je crains que nous devenions le pays des pénuries : pénurie de médecins, de vaccins, de masques, de surblouses... et d'anticipation, ce qui est plus grave encore.

L'impréparation est une faute. J'espère que nous nous mobiliserons afin qu'il y ait moins de pénuries et d'incurie dans notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Assassinat de Samuel Paty - Moyens de l'antiterrorisme

M. Jean-Yves Leconte .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Ma question s'adresse à Gérald Darmanin.

Vendredi, Samuel Paty a été lâchement assassiné. Il a payé de sa vie la transmission des valeurs de la République, et l'exercice d'un métier qui le passionnait. Il nous protégeait toujours, dit l'une de ses anciens élèves, je ne peux croire qu'il n'y ait eu personne pour le protéger !

Nous nous posons la même question, alors que des moyens existent. Les délits attachés au terrorisme ont été élargis en 2014 dans le code pénal et, en 2015, les moyens des services de renseignement ont été renforcés. L'assassinat de Samuel Paty montre combien cela est encore insuffisant.

De quels moyens humains et financiers concrets nos services vont-ils être dotés pour lutter plus efficacement contre le terrorisme ? Il faut des actes. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur .  - Depuis 2017, les moyens de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) et du renseignement territorial ont été multipliés par deux. Nous avons eu ce débat il y a une semaine encore, mais vous n'avez pas voté les dispositions proposées.

M. Jean-Yves Leconte.  - Nous avons voté tous vos amendements !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Ne vous énervez pas, je ne fais qu'expliquer ! Nous manquons de moyens légaux. La vidéo du père de famille n'aurait pu être retirée, car elle est insidieuse : elle ne constitue pas un appel direct à l'assassinat.

De la même façon, je ne peux proposer au conseil des ministres de dissoudre des associations si elles n'ont pas un lien direct avec le terrorisme - ce qui est autre chose qu'un lien avec l'islam radical. Il faut revoir la législation dans le cadre du projet de loi Séparatismes. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)

Il en va de même pour la haine en ligne. Nous vous attendons ! (Même mouvement)

Zones de revitalisation rurale

M. Rémy Pointereau .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le 26 novembre 2019, avec Frédérique Espagnac et Bernard Delcros, nous vous avons remis notre rapport sur les zones de revitalisation rurale, qui proposait notamment de proroger le dispositif actuel jusqu'au 31 décembre 2021, pour revoir les critères. Vous avez opté pour une prorogation de seulement six mois, mais la réforme n'est pas prête et vous envisageriez, paraît-il, de le proroger jusqu'en 2022. Le Sénat aurait-il eu tort d'avoir eu raison trop tôt ? Les élus des ZRR sont inquiets de ces échéances.

Comment parler de plan de relance sans ZRR qui aide à l'installation d'entreprises dans les zones les plus isolées ?

Avez-vous un calendrier pour l'étude des critères des ZRR ? (Applaudissements sur les travées Les Républicains)

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales .  - Oui, le Premier ministre a décidé de prolonger les ZRR jusqu'en 2022. Je l'ai dit à l'Assemblée nationale, en réponse à une question d'actualité, la semaine dernière.

Je me souviens de votre excellent travail, commis avec Frédérique Espagnac et Bernard Delcros. Nous avions conservé dans le dispositif jusqu'à la fin de l'année les 4 400 communes qui auraient dû en sortir en juillet.

Nous voulions également, comme vous le recommandiez, mieux cibler et simplifier le système des ZRR, et donc élaborer une géographie prioritaire de la ruralité.

La covid est cependant venue perturber nos travaux et le Premier ministre a jugé que nous n'en avions pas le temps : il faut donc proroger les ZRR.

S'agissant des critères, nous poursuivons nos travaux, avec l'Insee notamment. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe UC ; Mme François Gatel : « Très bien ! »)

M. Rémy Pointereau.  - Je me réjouis de cette annonce. Le Sénat, maisons des territoires, doit être associé à cette réflexion. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

L'Agence française de développement et la Chine

M. Olivier Cadic .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le Parlement se demande si l'Agence française de développement (AFD) n'a pas d'autres priorités que de prêter 250 millions d'euros à la Chine pour sa transition énergétique.

Avec le président Cambon, j'ai demandé au directeur de l'AFD s'il n'était pas possible de redéployer les fonds vers la zone Indopacifique, où nous avons besoin d'accroître notre influence. Voici son incroyable réponse : je gagne de l'argent en Chine ; mon salaire est payé par les Chinois, qui achètent sur les marchés des obligations de l'AFD ; l'argent retourne en Chine sous forme de prêts, avec au passage une commission pour l'Agence.

Et cela, au risque de servir la stratégie d'influence du régime chinois à l'international. Cette situation de conflit d'intérêts est consternante. J'ai été alerté par Nassimah Dindar et par Gérard Poadja sur la lourdeur des conditions exigées en contrepartie de prêts accordés à La Réunion ou à la Nouvelle-Calédonie, dans des conditions opaques.

Comment garantir que l'Agence ne sert pas d'autres intérêts que ceux de la France ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Le directeur général de l'AFD pense avoir le sens de l'humour ; de mon point de vue, la boutade n'est ni pertinente ni opportune dans de tels lieux et sur de tels sujets.

M. Bruno Sido.  - Très bien.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Oui, l'AFD est présente en Chine, car c'est notre intérêt.

Pour le climat, nous devons orienter le premier émetteur de CO2 dans le monde pour aller vers une stratégie bas carbone. La présence française dans ce pays valorise l'expertise de l'AFD : je le répète, c'est de notre intérêt. Il n'y a pas de subvention à la Chine, qui ne reçoit de la France que des prêts aux conditions du marché.

La Chine est notre partenaire, concurrent et rival. Nous devons décliner ces trois aspects avec vigilance, et en faisant valoir nos intérêts et notre souveraineté. Il y faut de la fermeté, de la transparence et de la détermination. (M. François Patriat applaudit.)

Terrorisme et immigration

M. Stéphane Ravier .  - « La barbarie est à nos portes », dit le garde des Sceaux. C'est pire ! Lorsque des gamins se font tirer dessus au Bataclan, des familles écraser à Nice, les barbares sont là et nous n'avons plus de porte à fermer.

C'est que vous avez retiré toutes les barrières, toutes les frontières. Vous êtes responsables, tous, de l'anarchie, de la déferlante migratoire. Nicolas Sarkozy a supprimé la double peine, lui l'ami du Qatar ! L'immigration a atteint sous son mandat un niveau record.

Les islamistes bénéficient de notre générosité pour combattre leur abomination. À chaque fois, c'est la même chose : Bataclan, Marseille, Romans, Charlie Hebdo, Samuel Paty : votre politique d'immigration anarchique tue des innocents. Mais vous refusez de l'admettre ! C'est le grand silence de la classe politique. Il s'agit désormais d'agir pour sauver des vies !

Vous avez insulté et haï le mouvement national qui vous alerte pourtant depuis des décennies. Qu'il est douloureux d'avoir eu raison en tout ! Allez-vous renvoyer les milliers d'immigrés dans leur pays et stopper l'immigration ?

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur .  - Le moment est trop grave pour user de ce ton et s'engager dans de telles polémiques.

Les attentats que vous citez sont horribles mais tous n'ont pas été commis par des étrangers. Considérez les 19 derniers attentats commis depuis 2017 : 9 auteurs sont étrangers et 22 sont français. (Mme Cécile Cukierman renchérit.)

Bien sûr, il faut pouvoir expulser les étrangers en situation irrégulière radicalisés, même si cela est parfois difficile, lorsqu'ils sont issus de pays en guerre comme la Libye ou la Syrie. Mais les auteurs d'attentats sont souvent nés en France, de famille française - ou devenue française il y a longtemps, plus longtemps que la mienne. Certains sont allés en Syrie, s'y sont convertis et sont revenus. Éliminer les étrangers ne règlera donc pas la radicalisation islamiste. (Applaudissements sur les travées au centre)

Mme Valérie Létard.  - Très bien.

M. le président.  - La prochaine séance de questions d'actualité au Gouvernement aura lieu le 28 octobre, à 15 heures.

La séance est suspendue à 16 h 30.

présidence de Mme Laurence Rossignol, vice-présidente

La séance reprend à 16 h 40.

Cour de justice de la République (Élections - Ouverture du scrutin)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle le scrutin pour l'élection de six juges titulaires et de six juges suppléants à la Cour de justice de la République.

Il va être procédé dans les conditions prévues par l'article 86 bis du Règlement au scrutin secret pour l'élection de six juges titulaires et de six juges suppléants à la Cour de justice de la République.

Ce scrutin se déroulera dans la salle des Conférences et la séance ne sera pas suspendue durant les opérations de vote.

J'invite chacune et chacun à veiller au respect des distances de sécurité pour se rendre aux deux bureaux de vote, l'un pour les sénateurs dont le nom commence par les lettres A à I, l'autre pour ceux dont le nom commence par les lettres J à Z.

Je rappelle que la majorité absolue des suffrages exprimés est requise pour être élu. Pour être valables, les bulletins ne peuvent comporter plus de six noms pour les juges titulaires et plus de six noms pour les suppléants.

Le nom de chaque titulaire doit être obligatoirement assorti du nom de son suppléant. En conséquence, la radiation de l'un des deux noms, soit celui du titulaire, soit celui du suppléant, entraîne la nullité du vote pour l'autre.

Une seule délégation de vote est admise par sénateur.

Je remercie nos collègues Mme Victoire Jasmin et M. Jacques Grosperrin, secrétaires du Sénat, qui vont superviser ce scrutin.

Les juges titulaires et les juges suppléants à la Cour de justice de la République nouvellement élus seront immédiatement appelés à prêter serment devant le Sénat.

Je déclare ouvert le scrutin pour l'élection de six juges titulaires et de six juges suppléants à la Cour de justice de la République.

Il sera clos dans une demi-heure.

Avis sur une nomination

Mme la présidente.  - En application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, ainsi que de la loi organique et de la loi du 23 juillet 2010 prises pour son application, la commission de la culture, a émis lors de sa réunion de ce jour, un avis défavorable par 3 voix pour, 25 voix contre à la nomination de M. Thierry Coulhon à la présidence du Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur.

CMP (Nominations)

Mme la présidente.  - J'informe le Sénat qu'ont été publiées des candidatures pour siéger au sein des commissions mixtes paritaires chargées d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière ; du projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental et de la proposition de loi relative au renforcement de l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique et à l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée ».

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.

Déshérence des contrats de retraite supplémentaire

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la déshérence des contrats de retraite supplémentaire.

Discussion générale

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable .  - Les Françaises et les Français qui ont atteint l'âge de la retraite s'endorment sur une épargne de 5,4 milliards d'euros, mais elle demeure invisible, ignorée, inconnue. À 70 ans, les contrats d'épargne retraite non liquidés s'élèvent à 1,8 milliard d'euros.

Notre littérature est friande des héritages miraculeux, qui attisent toutes les convoitises. Tartuffe, Eugénie Grandet, Frédéric Moreau, en sont autant d'exemples. Mais ces fortunes aujourd'hui ne trouvent ni propriétaire, ni héritier.

Il ne s'agit pas d'un pécule que les intrigants veulent s'arracher, mais d'une épargne de sécurité construite par le travail, dont le temps et la complexité ont pu effacer le souvenir.

L'État se trouve à terme le propriétaire de tous ces contrats en déshérence. Évitons tout cynisme : cette épargne doit revenir aux travailleurs. L'État doit être un garant, un régulateur, un facilitateur.

Les bénéficiaires d'une retraite supplémentaire doivent être mieux informés de ce que les assurances leur doivent. Cette démarche a commencé en 2014 et cette proposition de loi la parachève.

Mais les obstacles restent importants. Ces contrats n'ont pas de terme. Le lien entre gestionnaires et bénéficiaires est souvent distendu par les changements d'adresse, d'emploi, de vie.

L'enjeu est de rendre visible cette épargne et que nos concitoyens puissent en bénéficier.

Je salue le travail du député Daniel Labaronne, auteur et rapporteur de cette proposition de loi, mais aussi de Catherine Procaccia, rapporteur, et de la commission des affaires sociales qui ont permis au texte d'être plus efficace et plus rigoureux. Le Gouvernement ne présentera aucun amendement, car il approuve totalement l'équilibre trouvé sur ce texte par la commission.

Un seul point reste en discussion, mais les rapporteurs ont eu des échanges constructifs pour parvenir à un accord. Toutes les autres modifications de la commission des affaires sociales sont pertinentes.

À l'article premier, la commission a amélioré le système d'information via le site Info-Retraite. Ainsi, chaque personne aura une vision consolidée de l'ensemble de ses droits à la retraite, tous régimes confondus. C'est une disposition efficace de lutte contre la déshérence des contrats. Les échanges d'information entre les gestionnaires et le groupement d'intérêt public qui gère Info-Retraite ont été précisés. Une convention d'échange de données sera signée une fois la loi votée.

L'article 2 prévoyait une campagne de communication. Ces dispositions pourront effectivement être envisagées à un niveau infra-législatif et, comme le rappelle la commission, la publicité de ce service est déjà prévue à l'article premier. Nous pouvons en espérer d'importantes retombées médiatiques.

Votre commission a supprimé la délégation de la recherche des bénéficiaires par la Caisse des dépôts et consignation à des cabinets de généalogistes, prévue sous forme d'expérimentation à l'article 4. Le Gouvernement y est également favorable.

Lutter contre la déshérence, c'est renforcer le pouvoir d'achat des retraités, la qualité du contrat, la protection du citoyen. L'État doit être régulateur, garant et facilitateur. (M. Alain Richard applaudit.)

Mme Catherine Deroche, en remplacement de Mme Catherine Procaccia, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - Je tiens à excuser Mme Procaccia, rapporteur du texte, temporairement éloignée de nos travaux.

Cette proposition de loi vise à lutter contre la déshérence des contrats de retraite supplémentaire. Ces produits de capitalisation sont souscrits par des entreprises au profit de leurs salariés ou volontairement par des individus, comme c'est souvent le cas pour les professions libérales.

Les contrats de retraite supplémentaire sont destinés à compléter les pensions des régimes obligatoires. Ils sont utilisés en rente viagère, ou en capital dans certains cas, à l'âge souhaité par le souscripteur.

Le risque de déshérence de ces contrats de retraite supplémentaire a été identifié par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) en 2018 qui estimait à 10,6 milliards d'euros le montant des contrats concernés passé 62 ans, à 5,4 milliards d'euros passé 65 ans et 1,8 milliard d'euros après 70 ans.

Les contrats non liquidés ne sont pas forcément en déshérence. Il n'est donc pas vraiment possible d'évaluer le montant et le nombre des contrats en déshérence.

Ce sont encore des contrats marginaux : ils ne représentent que 4,5 % des cotisations versées et seulement 2,4 % des prestations servies.

Les contrats à adhésion obligatoire, autrement dit souscrits par les entreprises pour le compte de leurs salariés, sont identifiés comme davantage sujets au risque de déshérence. Les informations sur les bénéficiaires sont en effet parfois incomplètes ou dépassées et le titulaire peut même ignorer qu'il détient un contrat.

Des lois récentes sont intervenues : les lois Eckert, Sapin 2 et Pacte. En outre, les nombreux produits d'épargne retraite - plan d'épargne retraite populaire (PERP), plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco), Madelin, « article 39 » doivent, à terme, s'éteindre au profit des nouveaux plans d'épargne retraite, prévus par la loi Pacte.

L'initiative de ce texte revient au député Daniel Labaronne, très engagé sur ce sujet. Je salue son travail d'auteur et de rapporteur de cette proposition de loi.

La commission des affaires sociales a souhaité maintenir l'intégrité de ce texte.

Désormais, l'assuré qui consulte le site Info-Retraite aura une information sur ses contrats de retraite supplémentaire, grâce à un répertoire renseigné par les gestionnaires. Le GIP Union Retraite sera chargé d'identifier et d'informer les souscripteurs.

La commission des affaires sociales a transféré les nouvelles dispositions au sein du code monétaire et financier, et non au sein du code de la sécurité sociale, les retraites supplémentaires ne devant pas être confondues avec les régimes obligatoires. Nous avons également souhaité distinguer la retraite obligatoire de la retraite supplémentaire sur le site Info-Retraite, notamment par une dissociation du relevé de situation.

Nous avons aussi cherché à garantir le respect de la vie privée et la protection des données, tout en assurant l'efficacité du dispositif.

Nous avons aussi prévu des transferts limités d'informations vers les gestionnaires, sans mention des éléments relatifs à la situation financière.

Notre commission a supprimé l'article 4 relatif à la recherche des assurés par des généalogistes. Ce dispositif expérimental nous a paru présenter des lacunes juridiques.

Nous avons bien veillé à ce que le dispositif fonctionne et qu'il n'entraîne pas de confusion entre retraite obligatoire et retraite supplémentaire. Ce texte est ainsi équilibré. Nous nous sommes logiquement opposés à tout amendement revenant sur ces clarifications.

Soucieuse de parvenir à un accord avec l'Assemblée nationale, notre rapporteur a proposé un amendement de compromis à l'article premier sur un point encore en débat.

Je suis optimiste sur le devenir de ce texte à l'Assemblée nationale ; cette proposition de loi devrait s'appliquer rapidement. Je vous propose d'adopter ce texte modifié par l'amendement que je viens d'évoquer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Monique Lubin .  - Nous avons bien compris le sens de cette proposition de loi. Mal informés, de nombreux assurés ont pu délaisser leurs capitaux. Ce texte instaure plusieurs garde-fous à cette déshérence en assurant une meilleure information des assurés. Les gestionnaires devront donner toutes les informations dont ils disposent au GIP qui en assurera la communication. Les entreprises devront aussi informer leurs salariés.

Renforcer le droit à l'information des petits épargnants, afin qu'ils puissent faire valoir leurs droits, est une bonne chose. Mais beaucoup a déjà été fait, sous le quinquennat socialiste, en 2014 et 2016.

En 2012, on comptait ainsi 1,8 million de comptes inactifs et 1,6 milliard d'euros non réclamés, compte tenu d'un environnement normatif inadapté.

Les dispositions de la loi Eckert du 13 juin 2014 ont donc fait l'unanimité. Elles prévoyaient notamment une obligation de recherche et d'information des souscripteurs et des bénéficiaires des assurances-vie. Ces dispositions ont été efficacement mises en oeuvre comme le prouve le recul du nombre de contrats en déshérence. Pour autant, des difficultés demeurent, notamment pour les contrats de retraite supplémentaire. Les assureurs ont des difficultés à retrouver les bénéficiaires.

La loi Sapin 2 du 9 décembre 2016 impose certes aux assureurs d'informer les assurés chaque année sur leurs droits, ainsi qu'un rapport de l'ACPR au ministre de l'Économie. Mais des difficultés demeurent. Cela interroge sur la nature de ces contrats par capitalisation qui, pour certains, est une alternative à la retraite par répartition.

Cette proposition de loi corrige un système de retraite facultatif qui dysfonctionne. Ne devrait-on pas plutôt s'interroger sur ces contrats et ces sommes dormantes ? Ces produits financiers sont insatisfaisants. Ne devrait-on pas revoir les régimes généraux de retraite ?

Le groupe socialiste, écologiste et républicain s'abstiendra donc sur ce texte.

M. Daniel Chasseing .  - Avec cette proposition de loi, il s'agit de lutter contre la déshérence et de renforcer les droits des épargnants.

La loi Eckert du 13 juin 2014 a certes constitué un premier pas en renforçant les obligations de recherche et d'information des bénéficiaires, mais elle s'applique mal aux contrats sans terme.

Malgré les avancées de la loi Sapin 2 au profit de l'information des ayants droit, ils restent un angle mort dans notre dispositif législatif que cette proposition de loi va combler. Elle s'appuie sur les recommandations du Comité consultatif du secteur financier, de la Cour des comptes et de l'ACPR.

Le montant des liquidités bloquées chez les gestionnaires se montait à 13 milliards d'euros en 2018. Ces contrats représentent 4,5 % des cotisations versées et 2,4 % des prestations servies, comme l'a rappelé Mme Catherine Deroche.

Le texte prévoit qu'Info-Retraite devra afficher toutes les informations dont il dispose. Le GIP disposera d'un nouveau répertoire centralisant les données des souscripteurs fournies par les gestionnaires.

La commission des affaires sociales a modifié le texte initial en prévoyant un retour d'information du GIP vers les gestionnaires tout en préservant la protection des données personnelles des contractants.

La commission des affaires sociales a supprimé les articles 2 et 4, le premier étant satisfait par la rédaction de l'article premier. Pour le second, l'idée de confier la recherche des bénéficiaires à des experts en généalogie nous semblait intéressante.

Je veux saluer la députée Sophie Auconie qui avait déposé une proposition de loi similaire en décembre 2019, qui a été reprise par ce texte.

Ce ne sont pas des dispositions anecdotiques puisqu'elles concernent 13 millions de nos compatriotes pour une rente moyenne qui s'élève à 195 euros par mois.

Les produits d'une épargne retraite sont difficilement lisibles. Les situations de déshérence sont nombreuses, notamment dans le cas d'employeurs multiples.

Nous soutenons cette proposition de loi.

Mme Raymonde Poncet Monge .  - Cette proposition de loi aura plus un effet de prévention que de résolution des problèmes de stocks. Après les réformes nécessaires des retraites, le troisième étage de la retraite par capitalisation, dont on voit ici la fragilité, se développe, plus en substitution qu'en complémentarité, ce que nous dénonçons.

Il convenait de rétablir la confiance dans ces produits. Le chiffre de 13 milliards d'euros d'encours en déshérence est calculé à 62 ans, âge légal de la retraite. Mais en excluant les départs anticipés, l'âge de départ moyen est de 63 ans et demi en 2019, contre 61 ans et demi en 2010. Il conviendrait d'étudier le stock à des âges ultérieurs, en particulier celui de la retraite à taux plein.

On peut aussi liquider sa retraite supplémentaire postérieurement à son départ à la retraite, pour obtenir une rente supplémentaire par exemple.

La déshérence est souvent le fait de contrats collectifs qu'ils soient facultatifs ou obligatoires. Les encours des contrats de retraite supplémentaire non dénoués à 65 ans s'élèvent à 5 milliards d'euros et de 1,8 milliard d'euros à 70 ans. Le texte de la commission des affaires sociales reprend l'obligation faite aux gestionnaires de ces contrats de transférer les informations au GIP Union Retraite mais il ne reprend pas l'obligation d'une campagne de communication.

Par ailleurs, si ce texte améliore l'information des salariés s'agissant des contrats supplémentaires à leur nom lors de leur départ à la retraite, il serait préférable de la faire figurer sur le relevé pour solde de tout compte comme le proposait l'Assemblée nationale.

Nous ne pouvons que souscrire à des améliorations dans le recours aux droits conventionnels, nonobstant notre critique sur la promotion de ce type de produits de retraite par capitalisation qui affaiblit nos régimes généraux et complémentaires obligatoires. En outre, nous préférerions que les sommes en déshérence reviennent in fine à la branche retraite plutôt qu'au budget général de l'État. Nous réservons notre vote.

Mme la présidente.  - Je déclare clos le scrutin pour l'élection des juges titulaires et des juges suppléants à la Cour de justice de la République.

M. Dominique Théophile .  - Cette proposition de loi entend répondre aux critiques de la Cour des comptes et de l'Autorité de régulation formulées en 2018 et en 2019. Le manque d'informations des assurés est la première cause de déshérence des contrats de retraite supplémentaire.

Leur identification et celle de leur ayant droit est souvent incertaine. Hélas, ni la loi Eckert de 2014, ni la loi Sapin 2 de 2016, ni la loi Pacte de l'an passé ne s'attaquent véritablement au problème.

Ce texte apporte une première réponse pour éviter que le phénomène ne perdure : il prévoit ainsi que le site Info-Retraite offrira une information complète aux assurés, aux frais des gestionnaires. La commission des affaires sociales y a apporté plusieurs modifications.

Notre groupe souhaite revenir sur l'interdiction de transférer au GIP les données financières détenues par les gestionnaires. Cela nous semble en effet conditionner l'efficacité du dispositif et peu susceptible de mettre en péril la protection des données personnelles. Les gestionnaires et les associations de consommateurs se sont accordés sur cette mesure dans le cadre des discussions avec le Comité consultatif du secteur financier. Enfin, le décret d'application sera examiné par la CNIL.

Notre groupe votera cette proposition de loi et l'amendement de compromis de Mme Procaccia, dont je salue le travail.

Je souhaite à Mme la ministre la bienvenue parmi nous car c'est sa première séance au Sénat. (Mme la ministre semble sourire sous son masque.)

Mme Véronique Guillotin .  - Alors que la réforme des retraites s'éloigne, nous examinons un texte sur la retraite supplémentaire. Le système est de plus en plus complexe : les Français ne s'y retrouvent plus et de nombreux contrats sont en déshérence, à hauteur de 1,8 milliard d'euros pour les plus de 70 ans, sommes dont nos aînés auraient pourtant besoin.

La loi Eckert de 2014 ne traitait hélas que des contrats à terme, ce qui n'est pas le cas des contrats de retraites supplémentaires. Ils ne font donc pas l'objet de recherche de bénéficiaires, et si le décès de l'assuré reste inconnu de l'assureur, la créance n'est pas éteinte.

Avec ce texte, les Français auront une information complète sur leurs contrats de retraite sur le site Info-Retraite, renseigné par le GIP Union Retraite en collaboration avec les gestionnaires.

Les amendements de notre rapporteure, adoptés en commission, apportent des précisions utiles sur divers points, notamment sur les informations échangées entre les assureurs et le GIP Union Retraite.

Je regrette néanmoins la suppression de l'article 4, bien qu'ayant entendu les explications de la ministre et de la rapporteure sur cette expérimentation.

Dans l'attente d'une grande réforme des retraites, le groupe RDSE votera ce texte. Je rappelle que la retraite supplémentaire représente 4,5 % des cotisations versées, tous régimes confondus. Ce n'est pas négligeable en temps de crise.

Espérons que cette proposition de loi prouve son utilité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE)

M. Fabien Gay .  - Je vous prie d'excuser Mme Cohen, qui a dû s'isoler comme cas contact. Je remercie la rapporteure et la présidente pour le travail mené.

D'après l'Insee, près de 2,6 millions de retraités complétaient leur pension par un contrat supplémentaire, signe de la diminution régulière du niveau des pensions.

Dans ce contexte, la proposition de loi est une mesure positive. Mais qui en seront les véritables bénéficiaires ? Les salariés ou retraités qui pourront récupérer plus facilement leur argent placé depuis des années ou les assureurs ? Ces derniers voient leur obligation de recherche des bénéficiaires transférée par ce texte au GIP Union Retraite, évitant ainsi tout risque de sanction. Allianz, ne pourrait plus ainsi se faire condamner à payer une amende de 50 millions d'euros qui lui fut infligée pour avoir tardé à retrouver les bénéficiaires de contrats d'assurance-vie non réclamés.

Selon l'ACPR, il y avait, en 2018, plus de 13 milliards d'euros d'encours en déshérence.

Les droits à la retraite entraînés par la signature de nombreux contrats collectifs sont souvent illisibles pour les polyassurés. Certes, les assureurs avaient déjà une obligation d'information sur les plans d'épargne retraite, qu'ils ne remplissaient pas, ce qui pose la question de l'utilité réelle de ces plans de retraite supplémentaire qui affaiblissent le système de retraite obligatoire, sur fond de réforme des retraites, mise en sommeil, pour le moment, par le Président de la République.

Nous ne sommes pas dupes de la technique du Gouvernement qui consiste à faire passer ses projets par la voie de propositions de loi. Cela étant posé, une meilleure information des salariés est positive ; nous voterons donc ce texte, (Marques d'approbation sur les travées du groupe Les Républicains) même si les montants placés dans de tels produits financiers auraient été mieux utilisés pour augmenter les salaires.

Mme Annick Jacquemet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le présent texte lutte contre la déshérence des contrats de retraite supplémentaire. Je salue le travail de notre rapporteur.

Il apparaît que certains épargnants, faute d'information, ont délaissé leurs capitaux, qui demeurent donc au bilan des compagnies d'assurances. Or la loi Eckert de 2014 avait laissé les contrats de retraite supplémentaire, hors de son champ, puisqu'ils étaient sans terme.

En dépit des avancées des lois Sapin 2 et Pacte, le phénomène persiste : fin 2016, les contrats non liquidés après 62 ans s'élevaient à 10,6 milliards d'euros et à 1,8 milliard d'euros pour ceux des assurés âgés de plus de 70 ans.

Comme la Cour des comptes, le comité consultatif du secteur financier a commis un rapport en janvier sur le sujet, plus important encore avec la crise.

La proposition de loi renforce l'information de l'assuré sur le site Info-Retraite, financé et géré par le GIP Union retraite : ce dispositif conviendra tant aux gestionnaires qu'à la Cour des comptes et à l'ACPR.

La commission des affaires sociales a apporté plusieurs correctifs bienvenus, notamment sur la transmission des données financières par les gestionnaires.

Nous regrettons toutefois que cette proposition de loi soit plus utile pour les flux que pour le stock des contrats en déshérence, d'autant que pour des raisons de constitutionnalité, la commission des affaires sociales a supprimé l'article 4 nouveau de la proposition de loi, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, précisément pour y remédier.

Espérons que la navette permette, avec l'aide des services du Gouvernement, de trouver une solution à cette question, essentielle pour nos aînés qui ont capitalisé pour leur retraite, voire pour contribuer à améliorer la prise en charge de leur dépendance, si les bénéficiaires peuvent être retrouvés. Ces sommes sont également bienvenues pour alimenter la relance économique.

Notre groupe votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Guillaume Chevrollier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Selon l'ACPR, près de 13 milliards d'euros ne sont pas réclamés par les assurés sur des contrats en déshérence. C'est une part non négligeable de l'épargne des Français.

Ces 13 milliards d'euros sont donc orphelins, alors que de nombreux retraités ont vu leur pouvoir d'achat baisser par la hausse de la CSG et le gel des pensions. Leur situation doit nous pousser à agir.

Je remercie notre rapporteur et tous ceux qui ont amélioré ce texte, qui est une bonne nouvelle.

La retraite, c'est toute une vie de travail. C'est l'avenir de nos aînés. Si l'on y ajoute la perspective de la dépendance, il est de notre responsabilité, de rendre notre système plus juste et plus clair pour nos concitoyens. Si les lois Eckert en 2014, Sapin 2 en 2016, et Pacte ont traité du sujet, elles n'ont pas réglé la question.

La proposition de loi propose donc que le GIP Union Retraite fournisse les informations sur ces contrats sur le site Info-Retraite grâce aux éléments transmis par les gestionnaires.

Une mission d'information du Sénat a travaillé sur l'illectronisme : les démarches administratives en ligne, complexes, laissent trois Français sur cinq sur le bord de la route, notamment des retraités. Il faut prévoir davantage de formations pour les accompagner, madame la ministre.

Je soutiens la proposition de la commission des affaires sociales s'agissant de garantie de la protection des données personnelles et voterai ce texte. (Applaudissements dans les travées du groupe Les Républicains)

M. Vincent Segouin .  - (Applaudissements dans les travées du groupe Les Républicains) Comme disait Napoléon, un bon croquis vaut mieux qu'un long discours... Je préfère vous raconter une histoire. Dans un merveilleux département pris au hasard - l'Orne - (Sourires) Marguerite, ayant commencé à travailler à 18 ans, a eu une vie et une carrière mouvementées : après avoir occupé divers emplois depuis l'âge de 18 ans, elle a perdu un premier mari, divorcé d'un second et s'est mariée avec un troisième...(Exclamations amusées sur diverses travées, notamment celles du groupe Les Républicains) À 45 ans, elle se met à son compte, mais décède, victime d'un malencontreux accident. (On s'en désole sur les mêmes travées.)

Commence alors le parcours du combattant pour Aristide, (Marques de perplexité sur certaines travées) son veuf, pour obtenir une réversion sur la retraite supplémentaire de sa femme. Aristide n'est pas au bout de ses peines, n'ayant d'autre voie pour faire valoir ses droits que de rechercher tous les bulletins de salaire de son épouse pour savoir à quel organisme réclamer la réversion.

M. Laurent Duplomb.  - Heureusement qu'il est brillant ! (Exclamations amusées et rires prolongés sur diverses travées, notamment sur celles du groupe Les Républicains)

M. Vincent Segouin.  - C'est bien sûr impossible. Elle a changé trois fois de nom, certaines entreprises ou assureurs n'existent plus ou se sont fait racheter... Qu'est devenue son épargne ?

Vous voyez combien il est difficile de retrouver les assurés au travers de ce maquis de données historiques complexes. Souvent, le contrat est souscrit par l'entreprise sans prévenir son salarié.

La déshérence n'est pas due à la mauvaise volonté des assureurs, qui n'ont nul intérêt à garder cet argent inactif, perdu pour l'économie, d'autant qu'ils sont tenus de le déposer à la Caisse des dépôts.

Le GIP Union Retraite a mis en place un site efficace, Info-Retraite, très simple, que je vous invite à consulter.

Cette proposition de loi de simplification et de transparence sera bénéfique pour les entreprises, pour les assureurs et surtout pour les salariés qui pourront s'informer en un clic de leur historique de cotisations.

Mais le problème des déshérences existantes n'est pas réglé, à l'article 3 pour les retraites sur-complémentaires, la loi Eckert n'ayant réglé le problème que pour les contrats d'assurances-vie. L'amendement de M. Savary, qui propose d'étendre son bénéfice aux surretraites, est donc bienvenu.

Je voterai ce texte utile et nécessaire. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

Mme la présidente.  - Amendement n°1 rectifié quater, présenté par MM. Lévrier, Théophile, Iacovelli, Patriat, Bargeton, Buis, Dennemont, Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Yung, de Belenet, Cadic et Chasseing, Mme Dindar et MM. Laménie, Levi, Maurey et Pellevat.

Alinéa 2, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

M. Dominique Théophile.  - Cet amendement supprime les restrictions introduites par la commission des affaires sociales dans la nature des informations qui peuvent être transmises au GIP Union Retraite. La transmission du montant des contrats est essentielle au bon fonctionnement du dispositif.

Le décret d'application de cet article premier sera examiné par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), qui vérifiera la proportionnalité entre la nature des données véhiculées et le caractère d'intérêt général de la mission.

Mme la présidente.  - Amendement n°7, présenté par Mme Procaccia, au nom de la commission.

Alinéa 2, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Ces informations peuvent comprendre les références et la nature des produits ainsi que la désignation et les coordonnées des gestionnaires des contrats.

Mme Catherine Deroche, rapporteur.  - Dans cet amendement travaillé avec le député Labaronne, les données financières ne seront transmises que si c'est nécessaire pour les gestionnaires et inscrit à la convention qui fait l'objet de l'alinéa 5 du présent article. Retrait de l'amendement n°1 rectifié quater au profit de celui-ci ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - Même avis : l'amendement n°7 est le fruit d'un compromis constructif avec Daniel Labaronne, auquel je donne un avis favorable.

M. Dominique Théophile.  - Je m'en félicite. Il importe que ce problème de la déshérence soit réglé. Je le retire donc.

L'amendement n°1 rectifié quater est retiré.

L'amendement n°7 est adopté.

L'article premier, modifié, est adopté.

L'article 2 demeure supprimé.

L'article 3 est adopté.

ARTICLE 4 (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°6 rectifié quater, présenté par Mmes Guidez, Jacquemet et Sollogoub, M. Henno et Mme Guillotin.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

À titre expérimental, pour une durée de deux ans à compter de la publication de la présente loi, la recherche des bénéficiaires des encours de contrats d'assurance-vie ou de contrats de retraite supplémentaire en déshérence placés à la Caisse des dépôts et consignations peut être confiée à des organismes volontaires spécialisés dans la révélation de succession. La liste et les conditions de rémunération de ces organismes, le seuil d'encours des contrats concernés et le nombre minimum de dossiers confiés sont fixés par voie réglementaire.

Les conditions dans lesquelles les organismes visés au premier alinéa peuvent obtenir des éléments d'information et des données à caractère personnel sont fixées par voie réglementaire, dans le respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

Au plus tard six mois après la fin de cette expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport pour juger de l'opportunité de généraliser ce dispositif.

Mme Jocelyne Guidez.  - Cet amendement entend répondre aux contrats d'assurance-vie ou de retraite en déshérence. Il est parfois difficile de retrouver les titulaires ou ayant droits. En cas de « vaines recherches », les contrats sont transférés à la Caisse des dépôts.

Nous proposons de recourir à titre expérimental aux généalogistes professionnels pour identifier les bénéficiaires. Il s'agit de 7 milliards d'euros - 5 milliards pour l'assurance-vie, 1,8 milliard pour les retraites supplémentaires - qui seraient plus utiles pour la relance économique. S'il y a des difficultés juridiques, votons tout de même cet amendement pour le sécuriser durant la navette parlementaire.

Si cette expérimentation était adoptée, nous espérons la bienveillante contribution des services de l'État. Le Gouvernement avait, en outre, retiré avant la séance publique à l'Assemblée nationale son amendement de suppression de l'article 4...

Mme la présidente.  - Amendement n°4 rectifié bis, présenté par MM. Savary et Belin, Mmes Berthet et Bonfanti-Dossat, MM. Bonne, Bouchet, Brisson et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chauvin, M. Courtial, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi, Deseyne et Di Folco, MM. B. Fournier et Grand, Mme Gruny, M. Husson, Mme Imbert, MM. Karoutchi, Klinger et Laménie, Mme Lassarade, MM. D. Laurent, Lefèvre et H. Leroy, Mmes Lherbier, M. Mercier et Micouleau, MM. Milon, Mouiller, Paccaud et Piednoir, Mmes Raimond-Pavero et Richer et MM. Savin, Segouin, Sol, Somon et Vogel.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

À titre expérimental, pour une durée de deux ans à compter de la publication de la présente loi, la recherche des bénéficiaires des encours de contrats de retraite supplémentaire en déshérence placés à la Caisse des dépôts et consignations peut être confiée à des organismes volontaires spécialisés dans la révélation de succession. La liste et les conditions de rémunération de ces organismes, le seuil d'encours des contrats concernés et le nombre minimum de dossiers confiés sont fixés par voie réglementaire.

Les conditions dans lesquelles les organismes visés au premier alinéa peuvent obtenir des éléments d'information et des données à caractère personnel sont fixées par voie réglementaire, dans le respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

Au plus tard six mois après la fin de cette expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport pour juger de l'opportunité de généraliser ce dispositif.

M. René-Paul Savary.  - Cet amendement va dans le même sens. Le texte de la commission des affaires sociales apporte des solutions. Mon amendement porte uniquement sur l'épargne retraite, tandis que celui de Mme Guidez porte aussi sur l'assurance-vie. Je le retire donc à son profit.

Une expérimentation des recherches généalogiques serait tout à fait intéressante : nous saurions au bout de deux ans si les sommes paralysées à la Caisse des dépôts et consignations au détriment des bénéficiaires sont toujours aussi importantes.

L'amendement n°4 rectifié bis est retiré.

Mme Catherine Deroche, rapporteur.  - La commission des affaires sociales a considéré que ce dispositif présentait des lacunes juridiques. Ces contrats portent souvent sur des montants très faibles. Des questions se posent aussi sur le respect du secret bancaire : les généalogistes ne sont pas une profession réglementée.

Les produits sont versés à la Caisse des dépôts et consignations dix ans après la mort du bénéficiaire ou lorsqu'il atteint l'âge théorique de 120 ans.

Sur 430 millions d'euros de comptes bancaires transférés à la Caisse des dépôts dans ce cadre en 2019, un seul contrat avait été répertorié comme plan d'épargne-retraite.

Retrait ou avis défavorable.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État.  - La Caisse des dépôts et consignations ne dispose pas de la mission de recherche des bénéficiaires des sommes transférées mais uniquement de celle d'organiser la publicité des informations et de conserver et restituer les fonds sur demande.

Les assureurs sont déjà chargés des recherches des bénéficiaires et le font plutôt bien. Dupliquer cette mission pour la confier à des cabinets privés ne serait pas très efficace et entraînerait une déresponsabilisation.

L'expérimentation conduirait à confier des données personnelles à une profession non réglementée, ce qui n'est pas souhaitable. Avis défavorable.

M. Vincent Segouin.  - Si la rédaction n'est pas correcte, pourquoi la commission des affaires sociales n'en propose-t-elle pas de meilleure ? Je n'ai jamais entendu de bénéficiaires se plaindre du manque de protection de leurs données personnelles lorsqu'un généalogiste leur annonce un capital oublié. L'État a-t-il réellement intérêt à trouver un bénéficiaire aux contrats en déshérence ?

M. Philippe Mouiller.  - Même si j'ai cosigné l'amendement défendu par M. Savary, je rejoins la position de la commission des affaires sociales.

M. Daniel Chasseing.  - Confier la recherche des ayants droit à des généalogistes est une idée intéressante. Je voterai donc l'amendement n°6 rectifié quater.

Mme Jocelyne Guidez.  - Je me rallie à la position de la commission des affaires sociales. Je retire donc l'amendement n°6 rectifié quater, à regret, car je pense qu'il faut y réfléchir.

L'amendement n°6 rectifié quater est retiré.

Mme la présidente.  - Monsieur Savary, maintenez-vous le retrait de votre amendement ?

M. René-Paul Savary.  - Je ne renie pas mes paroles de tout à l'heure. Mme Guidez a choisi en toute responsabilité de retirer aussi son amendement.

L'article 4 demeure supprimé.

Explication de vote

Mme Monique Lubin .  - Marguerite n'a pas pu changer trois fois de nom : nous gardons notre nom de naissance toute notre vie ! (Mme Françoise Gatel proteste.)

Je plaisante ! Vu sa génération, je doute fort que Marguerite ait eu une retraite, même si elle avait dû beaucoup travailler. Quant à Aristide, sa retraite devait être très faible.

Merci à la rapporteure pour son travail.

Pour les salariés, ces contrats ne durent que le temps de leur présence dans l'entreprise. Mais ils ont un coût pour celle-ci. L'existence même de ces contrats pose problème. Nous nous abstiendrons, sans aucune agressivité.

La proposition de loi, ainsi modifiée, est adoptée.

Cour de justice de la République (Résultat du scrutin)

Mme la présidente.  - Voici le résultat du scrutin pour l'élection de six juges titulaires à la Cour de justice de la République et de leurs six juges suppléants :

Nombre de votants : 273

Suffrages exprimés : 269

Majorité absolue des suffrages exprimés : 135

Bulletins blancs : 4

Bulletins nuls : 0

Ont obtenu :

Mme Chantal Deseyne, titulaire et M. Stéphane Le Rudulier, suppléant : 269 voix

Mme Catherine Di Folco, titulaire et Mme Brigitte Lherbier, suppléante : 269 voix

M. Jean-Luc Fichet, titulaire et Mme Corinne Féret, suppléante : 269 voix

M. Antoine Lefèvre, titulaire et Mme Nadine Bellurot, suppléante : 269 voix

Mme Évelyne Perrot, titulaire et Mme Catherine Fournier, suppléante : 269 voix

M. Teva Rohfritsch, titulaire et M. Bernard Buis, suppléant : 269 voix

Ces candidats ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, ils sont proclamés juges à la Cour de justice de la République. (Applaudissements sur toutes les travées)

Cour de justice de la République (Prestation de serment)

Mme la présidente.  - Mmes et MM. les juges titulaires et Mmes et MM. les juges suppléants à la Cour de justice de la République vont être appelés à prêter, devant le Sénat, le serment prévu par l'article 2 de la loi organique du 23 novembre 1993 sur la Cour de justice de la République.

Je vais donner lecture de la formule du serment. Il sera procédé ensuite à l'appel nominal de Mmes et MM. les juges titulaires puis à l'appel nominal de Mmes et MM. les juges suppléants. Je les prie de bien vouloir se lever à l'appel de leur nom et de répondre, en levant la main droite, par les mots :

« Je le jure ».

Voici la formule du serment :

« Je jure et promets de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder le secret des délibérations et des votes, et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat. »

Mme Chantal Deseyne, Mme Catherine Di Folco, M. Jean-Luc Fichet, M. Antoine Lefèvre, Mme Évelyne Perrot, juges titulaires, se lèvent et prêtent serment.

Mme Nadine Bellurot, Mme Corinne Féret, Mme Catherine Fournier, M. Stéphane Le Rudulier, Mme Brigitte Lherbier, juges suppléants, se lèvent et prêtent serment.

Acte est donné par le Sénat du serment qui vient d'être prêté devant lui.

M. Teva Rohfritsch, juge titulaire, et M. Bernard Buis, juge suppléant, qui n'ont pu assister à la séance d'aujourd'hui, seront appelés ultérieurement à prêter serment devant le Sénat.

Hommage à Samuel Paty

Mme la présidente.  - (Mme la présidente, Mmes les sénatrices et MM. les sénateurs ainsi que Mme la ministre se lèvent.) Comme le président du Sénat l'a rappelé dans cet hémicycle lundi, la République a été attaquée vendredi dernier, à Conflans-Sainte-Honorine et à Éragny. Le terrorisme islamiste s'en est pris à l'un de ses serviteurs, Samuel Paty, un professeur d'histoire-géographie, assassiné dans des conditions odieuses pour avoir enseigné la liberté de penser, la liberté d'écrire, la liberté de caricaturer, pris pour cible pour avoir porté les valeurs de la République.

La Nation lui rendra hommage dans quelques minutes dans la cour de la Sorbonne et pour que nous puissions tous nous associer à cet hommage, je vous propose d'observer un instant de recueillement en la mémoire de Samuel Paty. (Mme la présidente, Mmes les sénatrices et MM. les sénateurs ainsi que Mme la ministre observent un moment de recueillement.)

La séance est suspendue à 18 h 15.

présidence de M. Pierre Laurent, vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

Accord en CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Conseil européen des 15 et 16 octobre 2020

M. le président.  - L'ordre du jour appelle le débat à la suite de la réunion du Conseil européen des 15 et 16 octobre 2020 (demande de la commission des affaires européennes).

M. Clément Beaune, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes .  - Le Président de la République a rendu hommage à Samuel Paty cet après-midi et je tiens ici à m'y associer. Le Président a souligné que les hommes libres formés par le professeur feront comprendre à notre Nation nos valeurs et notre Europe.

À l'issue du sommet des 15 et 16 octobre 2020 où j'ai accompagné le Président de la République, je vais vous rapporter les positions que la France a défendues et les avancées obtenues s'agissant du Brexit, de la coordination européenne sur le Covid, du changement climatique et des relations extérieures.

Je dirai aussi un mot sur la PAC, premier budget européen, sur laquelle un premier accord a été trouvé hier, porté par le ministre de l'Agriculture Denormandie.

La situation épidémique suscite de vives inquiétudes partout en Europe, et des mesures ont été prises dans l'ensemble des États. La coordination européenne de notre réponse sanitaire a été à l'origine défaillante - il faut dire que ce n'est pas une compétence européenne.

Il est normal que les mesures soient différenciées selon les situations et les territoires, mais face à la reprise de l'épidémie, les décisions européennes doivent aussi être coordonnées et proportionnées. C'est l'objet d'un premier accord au Conseil des affaires générales puis au Conseil européen des chefs d'État et de gouvernement. Nous devons en effet aller plus loin pour harmoniser les mesures, par exemple limiter les restrictions de déplacements, c'est important notamment pour les 350 000 travailleurs frontaliers français.

Nous devons aller plus loin sur la reconnaissance mutuelle des mesures sur les transports, sur les tests développés, sur la restriction des quarantaines ; il faut aussi harmoniser les mesures préalables d'information.

Grâce à ces efforts bilatéraux et européens de coordination, nous sommes dans une meilleure situation qu'au printemps.

Plusieurs fois par mois, les chefs d'État et de gouvernement se concerteront désormais par visioconférence.

Sur les vaccins, l'Europe avance vite pour promouvoir un travail commun. Trois contrats ont été signés et financés par l'Union européenne avec de grands laboratoires de recherche ; trois autres sont en préparation. Nous devrons, lorsqu'un vaccin aura été trouvé, éviter le nationalisme sanitaire et le chacun pour soi. La France pousse à la coordination financière et la préacquisition de vaccins.

Sur la relation future à l'issue du Brexit, ce Conseil européen a permis de rappeler nos priorités communes. Trois d'entre elles sont particulièrement importantes à nos yeux. C'est tout d'abord la pêche, question cruciale pour la France et sept autres pays. Le 1er janvier, le visage du Brexit sera le visage de nos pêcheurs. Nous devons garantir leurs intérêts. Nous n'isolerons pas le sujet de la pêche dans la négociation, malgré la pression tactique des Britanniques, car nos pêcheurs ne valent pas moins que les leurs et nous devons les protéger. Le maintien d'un accès stable, durable et réciproque aux eaux britanniques est notre priorité. Le Conseil européen l'a rappelé.

Notre deuxième priorité est relative à des conditions de concurrence équitables pour nos économies, très intégrées après plus de quarante ans d'appartenance au même ensemble. Il n'est pas envisageable d'accepter un « zéro tarif, zéro quota », autrement dit un accès complet à notre marché, sans garanties solides en matière environnementale, sanitaire et - sujet difficile dans la négociation - sur la question des aides d'État.

En matière de gouvernance, nous avons besoin de mécanismes de rétorsion rapides en cas de non-respect des engagements. Nous souhaitons un accord mais c'est surtout le besoin du Royaume-Uni. Nos priorités sont claires, publiques et transparentes. La négociation continuera je l'espère dans ce cadre, dans les prochaines heures.

Nous devons toutefois nous préparer à l'ensemble des scénarios : soit un accord - qui ne sera pas le statu quo car il y aura des contrôles douaniers, sanitaires, phytosanitaires, que nous préparons - soit un No Deal que nous ne souhaitons pas - avec des contrôles et des barrières, tarifaires et non tarifaires.

Le 12 octobre, le Premier ministre a convoqué les ministres concernés pour faire le point sur ces préparatifs.

Avec onze autres pays, le Président de la République, pour la France, a défendu une réduction de 55 % des émissions de CO2 à l'horizon 2030. Le Parlement, plus ambitieux, a voté 60 %. Mais il ne serait ni juste ni efficace que l'Europe s'engage sur de tels objectifs sans demander des contreparties à ses partenaires commerciaux, notamment via l'instauration d'une taxe carbone aux frontières.

S'agissant des relations extérieures de l'Union européenne, la question turque et le partenariat avec l'Afrique ont aussi été évoqués. Ce dernier fera l'objet d'un sommet spécifique en décembre. Nous devons, en cette période, soutenir l'Afrique, y compris dans la lutte directe contre l'épidémie ; il faut lui garantir un accès abordable au vaccin. Au premier semestre 2021 se tiendra un sommet physique.

Un mot d'une actualité qui n'était pas au menu du Conseil européen. L'accord budgétaire du 21 juillet a permis de stabiliser la PAC au niveau actuel, en particulier les paiements directs aux agriculteurs qui constituent une part importante de leurs revenus.

Les ministres de l'Agriculture - et je salue Julien Denormandie - sont parvenus cette nuit à un accord qui prévoit des écorégimes obligatoires au sein du premier pilier de la PAC à hauteur de 20 % des aides. Oui au verdissement de la PAC... si les obligations s'appliquent à tous.

Un soutien d'urgence à la viticulture française a également été obtenu, complémentaire au plan voté au mois de juillet. (M. Jean-Yves Leconte applaudit.)

M. le président.  - Je vous remercie et vous souhaite la bienvenue au Sénat, pour votre première intervention devant notre assemblée.

M. Pascal Allizard, vice-président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - Je suis heureux de vous retrouver ce soir, monsieur le ministre, après vous avoir accueilli la semaine dernière à Port-en-Bessin.

Brexit : l'heure est grave. Les chances d'instaurer un partenariat avec le Royaume-Uni s'amenuisent chaque jour un peu plus ; Jean-Yves Le Drian ne l'a pas démenti cet après-midi devant notre commission des affaires étrangères et de la défense.

Saisissons les dix ans du traité de Lancaster House pour conforter notre coopération bilatérale en matière de défense. Membre du Conseil de sécurité de l'ONU, le Royaume-Uni doit rester associé dans la défense européenne : la géographie est têtue. Le Sénat jouera tout son rôle en la matière. Ne laissons pas le Brexit miner dix ans d'efforts.

La remise en cause du protocole nord-irlandais rouvre la question des frontières. Le camp des indépendants écossais est désormais majoritaire dans les sondages.

La Turquie avance ses pions au Haut-Karabakh - comme dans la République autoproclamée de Chypre du nord, où le candidat soutenu par Erdogan l'a emporté sur le dirigeant sortant, favorable à la réunification de l'île. Quelle sera la réponse européenne ?

Avec les menaces de sanctions contre la Turquie au dernier Conseil européen, nous voyons un diagnostic mieux partagé au sujet des menaces. Mais la baisse des crédits du fonds européen de développement (FED) est un très mauvais signal, y compris en matière spatiale.

L'Europe doit être le refuge du droit mais doit aussi rester une puissance. C'est le message que nous demandons au Gouvernement de porter au niveau européen. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'ordre du jour du Conseil européen était riche, mais c'est surtout la relation future entre l'Union européenne et le Royaume-Uni qui a retenu l'attention de la commission des finances.

On a parlé de « sommet de la dernière chance ». Ce nouvel épisode a finalement ressemblé aux précédents. Le feuilleton bien connu reste le même. Les Vingt-sept ont constaté l'insuffisance des progrès réalisés.

Boris Johnson, à l'issue du sommet, a soufflé sur les braises en regrettant de ne pas bénéficier d'un statut similaire à celui du Canada, mais Londres a également annoncé la reprise des négociations ce soir. Partie d'échecs interminable...

Ces hésitations pèsent sur nos entreprises et sur nos concitoyens. Le temps presse. Estimez-vous, monsieur le ministre, que la France est suffisamment préparée d'un point de vue économique, budgétaire et douanier pour faire face à une absence d'accord ?

Les conséquences économiques de la crise ont pu occulter celles d'un No Deal. Qu'en est-il des prévisions macroéconomiques ?

Le retrait du Royaume-Uni entraîne immédiatement une hausse de 2,1 milliards d'euros de la contribution française au budget européen. À quelle hauteur estimez-vous les effets d'un No Deal sur notre produit intérieur brut (PIB) ?

En ma qualité de rapporteur général de la commission des finances, mais aussi d'ancien rapporteur spécial des crédits de la mission Écologie, je salue la réflexion de la Commission sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre d'au moins 55 % d'ici à 2030. Le levier budgétaire semble indispensable pour y arriver. La Commission propose une nouvelle recette propre fondée sur un système révisé d'échanges de quotas d'émissions, éventuellement étendu au transport maritime. Quelles sont les perspectives d'introduction d'une telle ressource à court terme ? Avec quel rendement ?

M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ainsi que sur quelques travées du groupe UC) C'est un honneur pour moi, nouvellement élu président de la commission des affaires européennes, d'ouvrir ce débat. Je rends hommage à mon prédécesseur Jean Bizet qui a tant oeuvré pour porter la voix du Sénat à Bruxelles et faire souffler l'esprit européen dans notre assemblée.

Nous espérons tous construire une relation privilégiée avec le Royaume-Uni. Ce dernier y a encore plus d'intérêt d'un point de vue commercial - 50 % de ses échanges commerciaux dépendant de l'Union européenne - et du fait du passeport financier que l'Union peut décider unilatéralement de lui octroyer ou non.

Le rapport de force est en notre faveur, mais nous sommes particulièrement inquiets pour nos pêcheurs. Certains grands armements négocient déjà en sous-main des droits de pêche dans les eaux britanniques, et l'achat de bateaux sous pavillon britannique, mais la pêche artisanale, elle, qui fait vivre tant de familles sur nos côtes, n'en a pas les moyens. Nous devons accompagner les pêcheurs, quelle que soit l'issue des négociations - plus qu'hasardeuse, tant le Royaume-Uni souffle le chaud et le froid. Comment garder confiance quand la loi sur le marché intérieur récemment votée par le Royaume-Uni viole déjà de manière flagrante l'accord de retrait conclu il y a seulement un an ?

L'ambition climatique européenne est grande. La France en est le fer de lance. Il n'est pas étonnant que les chefs d'État et de gouvernement aient reporté à leur prochaine réunion de décembre la décision sur l'ampleur du relèvement de l'objectif de réduction des émissions carbone. Le climat représente une priorité de l'Europe. L'accord obtenu pour l'instant sur un seuil à 55 %, qui serait respecté par les États collectivement, est une concession faite aux États adeptes du charbon, qui accroît la pression sur les autres, dont le nôtre. Quel sera l'impact sur nos industries et notre agriculture ? La Commission vient seulement de promettre une étude d'impact sur la stratégie « De la ferme à la fourchette » : il était temps.

Monsieur le ministre, aurez-vous des éléments précis à nous fournir d'ici décembre ?

Je me félicite de l'élan donné à notre partenariat avec l'Afrique pour bâtir un socle de valeurs partagées, avec des investissements substantiels dans les infrastructures de développement durable.

Je regrette, en revanche, notre frilosité sur la scène internationale, notamment en ce qui concerne la situation en Biélorussie, dans le Haut-Karabakh, ou encore en Méditerranée orientale, où Russie et Turquie enchaînent les provocations. La diplomatie européenne doit changer de braquet.

Alors qu'il se tient habituellement quatre fois par an, le Conseil européen s'est réuni deux fois en octobre, en raison de la crise sanitaire, mais aussi parce qu'une évolution de fond est à l'oeuvre dans les institutions européennes. Il faut en tenir compte dans la perspective d'une conférence sur l'avenir de l'Europe. Celle-ci devait être lancée en mai dernier mais a dû être reportée. Quelles sont les perspectives à cet égard ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Alain Richard et Mme Nadège Havet applaudissent également.)

M. Pierre-Jean Verzelen .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Loïc Hervé applaudit également.) L'Union européenne traverse l'un de ces moments exceptionnels et ces temps de crise qui jalonnent son histoire. Depuis dix ans, il y a eu la crise financière, la dette grecque, les tensions diplomatiques avec des pays amis, le terrorisme, le Covid, le Brexit... Il n'est que de voir le nombre de sujets abordés par le Conseil européen et leur importance. Dans ces moments, une mission l'emporte sur les autres : les chefs d'État européens doivent protéger les peuples.

Au début de l'épidémie, il y a eu à l'échelle européenne un retard à l'allumage. L'épidémie a évolué différemment selon les régions. Il est nécessaire d'améliorer la coordination et de créer des mécanismes pour rendre l'Union européenne plus réactive désormais. Nous saluons la volonté commune qui s'est exprimée sur les questions transfrontalières, les tests, les quarantaines et les déplacements au sein de l'Union européenne. Nous devons prendre collectivement des engagements clairs sur le vaccin tant attendu, sur sa distribution, sa répartition. Le partage d'informations sur la recherche devra être exemplaire entre les États membres.

Quant au Brexit, je salue le travail de M. Barnier pour bâtir depuis le début une ligne commune et je regrette les volte-face du gouvernement britannique, peut-être en train de préparer un royaume prochainement désuni...

Des apprentis sorciers, comme Nigel Farage proposant de reverser au système de santé britannique les centaines de millions de livres prétendument aspirées chaque semaine par l'Union européenne, un Boris Johnson affichant un tel argument sur son bus de campagne, ont joué avec la vérité. Comme on dit dans mon patois picard : fake news ! (On apprécie.)

Les conditions d'une concurrence loyale et équitable doivent être assurées, de même que le respect du filet de sécurité irlandais. Nous devons aussi être clairs au sujet de la pêche, qui cristallise tant de passions. Si les eaux britanniques nous sont fermées, soyons fermes et ne laissons pas notre marché intérieur européen accessible à la pêche britannique.

M. Christian Cambon.  - Très bien.

M. Pierre-Jean Verzelen.  - Ayons le courage d'affirmer dès maintenant aux pêcheurs britanniques que pêcher c'est bien mais vendre sa pêche, c'est encore mieux ! Comme élu des Hauts-de-France et comme parlementaire, je vous le demande : pas d'accord au rabais sur le dos des pêcheurs français et européens ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; MM. Loïc Hervé et Pierre Louault applaudissent également.)

M. Alain Marc.  - Tout à fait d'accord.

M. Jacques Fernique .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) La question du changement climatique est majeure. Je salue le vote récent du Parlement européen sur un objectif en 2030 de 60 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990. C'est une décision historique, comme l'a dit le président Jean-François Longeot. Cet objectif serait-il irréaliste comme l'a déclaré Jean Bizet ? Je ne le pense pas. C'est une chance pour notre économie qui serait moins vulnérable et qui y gagnerait en emplois.

Le Conseil européen, quoique n'ayant pas tranché, n'a pas validé ce vote du Parlement, reportant sa décision en décembre. Il ne fait pas même mention de sa volonté, se contentant de rappeler les moins 55 % proposés par la Commission européenne, qui semblent donc être le compromis convenu à demi-mot.

Il faut une ligne plus ambitieuse pour limiter l'augmentation des températures à 1,5 degré. L'ambition du Parlement européen est-elle partagée ? Nous savons qu'il y a, attisées par les géants des énergies fossiles, des réticences fortes, notamment dans les pays de l'Est de l'Europe aux économies très carbonées.

J'ai bien entendu l'appel des onze pays, dont le nôtre, à un seuil minimum de 55 %.

Certes l'effort climatique ne peut reposer sur la seule Union européenne et les élections américaines, espérons-le, feront bouger la donne. Reste que l'Union doit engager cette décennie déterminante pour tenir une trajectoire respectueuse des accords de Paris.

Au-delà de cet objectif, nous serons attentifs au plan de relance européen massif, et aux moyens qui lui seront alloués. Des ressources propres - taxes carbone, Gafam, transactions financières - devront être trouvées. Après la réponse encourageante du Premier ministre à la question posée la semaine dernière par le président Gontard, quelles sont les perspectives concrètes en la matière ?

Disons-le, dans notre Chambre des territoires : les élus locaux attendent beaucoup de cet effort de relance. C'est elles et eux qui savent le mieux traduire sur le terrain une dynamique, qui doit être accompagnée dans la proximité, clé du succès. (Applaudissements sur les travées du GEST)

Mme Nadège Havet .  - Le Conseil européen a adopté ses conclusions sur divers sujets. L'Europe est là, et bien là.

Les Vingt-sept ont exprimé leurs inquiétudes sur la crise sanitaire, alors que la deuxième vague déferle. L'Irlande se reconfine, la France vit sous couvre-feu, comme la Belgique, qui ferme cafés et restaurants, l'épidémie s'accélère en Allemagne, en Espagne des habitants sont appelés à rester chez eux, à Londres, il est interdit de recevoir des personnes extérieures au foyer...

Avec 250 000 décès, l'Europe paie un lourd tribut. Elle coordonne davantage ses actions. C'est heureux mais il faut aller plus loin sur les données, les tests et les restrictions temporaires des déplacements non essentiels vers l'Union européenne. Je salue le travail du groupe Renew Europe et de l'eurodéputée Véronique Trillet-Lenoir. Le recours à une cartographie unique du risque, qui facilite les prises de décision, est désormais effectif.

Nous devons aussi mener conjointement le combat contre le changement climatique. L'objectif actuel de 40 % est insuffisant pour atteindre la neutralité climatique en 2050. La décision sera prise en décembre, pour les cinq ans de l'accord de Paris. Ne soyons pas défaitistes : soyons ambitieux comme l'a été le Parlement européen en adoptant l'amendement de Pascal Canfin, président de sa commission Environnement, fixant un objectif de baisse de 60 %.

Ambitieux, il faudra aussi l'être dans nos négociations avec le Royaume-Uni, sur les trois dossiers encore bloqués : la concurrence, le règlement des différends et la pêche.

Sénatrice du Finistère, j'insiste sur ce dernier point, fondamental. Le Royaume-Uni n'a pas d'intérêt à un No Deal, sauf à signer des accords de pêche bilatéraux, comme il l'a fait avec la Norvège. Perdre l'accès à notre système européen de l'énergie lui coûterait plus d'un milliard d'euros, sans parler de l'imposition de droits de douane et de quotas. Il faudra accompagner nos pêcheurs, déjà frappés par les conséquences de la crise sanitaire. Pas d'accord sans un bon compromis, sans visibilité, sans respect dans la durée !

Nous nous félicitons enfin de l'accord trouvé cette nuit sur la PAC, avec des mesures environnementales fortes pour tous les États membres. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)

M. Henri Cabanel .  - (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE) Je vais évoquer le sujet de la pêche, à l'approche de l'échéance du 31 décembre. J'insiste : les pêcheurs français ne doivent en aucun cas constituer la variable d'ajustement d'un accord. L'objectif de souveraineté alimentaire doit inclure la pêche au titre de la diversité agricole. Aussi, je me félicite que vous en fassiez une priorité. Nul n'a intérêt à un No Deal sur la pêche. Il nous faut refuser toute annualisation des droits de pêche. La pêche est un métier difficile, parfois dangereux mais toujours exercé avec passion. Imaginez le chaos qui suivrait un mauvais accord ! La France, avec les huit États membres concernés, doit maintenir le cap d'une répartition juste des quotas d'espèces et d'un accès aux eaux réciproque et équitable. Avez-vous un plan B en cas d'échec des négociations ?

Les dernières négociations sur la PAC vont dans le bon sens et je vous remercie des bonnes nouvelles que vous nous avez annoncées. Je pense en particulier aux éco-régimes. Un grand nombre d'agriculteurs sont déjà engagés dans la transition écologique. N'ayons pas peur de l'accélérer !

Notre pays est prêt, mais d'autres vont devoir évoluer. Je soutiens la nouvelle ambition de la PAC et la proposition du Gouvernement de porter à 30 % le niveau des aides directes conditionnées au respect des mesures en faveur de l'écologie.

Où en sommes-nous en matière d'étiquetage harmonisé des denrées alimentaires « durables » ?

Nous devons accepter le verdissement de la PAC et regarder avec attention l'objectif de 55 % de réduction des gaz à effet de serre, qui doit cependant être partagé collectivement par les États membres, et autant que possible être exporté au-delà des frontières de l'Europe. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE)

M. Jérémy Bacchi .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE) Le Conseil européen a mis en lumière le manque de coordination des États membres lors de la pandémie.

L'objectif de réduction des gaz à effet de serre était également à l'ordre du jour. Je m'étonne qu'il n'ait en revanche pas été fait mention du conflit au Haut-Karabakh, où le couvre-feu est régulièrement violé et où les morts se comptent déjà par centaines, les personnes déplacées, jetées sur les routes de l'exil, par dizaines, voire centaines de milliers. La guerre est aux portes de l'Europe.

Membre du groupe de Minsk, la France ne peut se désintéresser du sujet. À quand la reconnaissance officielle du Haut-Karabakh, seul moyen d'assurer la paix durable dans cette zone instable depuis le fragile cessez-le-feu de 1994 ?

Comment comprendre que l'Union européenne poursuive les discussions avec l'Azerbaïdjan et la Turquie sur d'autres sujets ? Qu'entend Ursula von der Leyen quand elle dit que des sanctions contre Ankara sont « prêtes et peuvent être utilisées immédiatement » ? À quand un processus d'autodétermination sécurisé par une opération de maintien de la paix et le retour du million de déplacés artsakhis, arméniens et azéris ? Comment l'Union européenne compte-t-elle assurer le respect du cessez-le-feu afin de pouvoir secourir la population civile ?

L'assistance civile, l'appui au cessez-le-feu, la reconnaissance de la République d'Artsakh sont les seules solutions. L'Europe n'est pas à la hauteur de l'enjeu. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; MM. Jean-Yves Leconte et Patrice Joly applaudissent également.)

M. Jean-François Longeot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) J'interviens en tant qu'orateur du groupe UC mais aussi en ma qualité de président de la commission du développement durable.

Nombre des défis environnementaux doivent être relevés au niveau européen. Ainsi de la lutte contre le changement climatique et de la future loi Climat qui s'inscrira dans le cadre des orientations prises par l'Union européenne.

Le 6 octobre, un vote historique a eu lieu au Parlement européen, fixant pour 2030 un objectif de 60 % de réduction des gaz à effet de serre par rapport à 1990. Est-ce irréaliste ? La Commission européenne défend un objectif de 55 %, certains État sont réticents et demandent une évaluation de l'impact. Bref, ce n'est pas une surprise : la décision est reportée au Conseil européen de décembre.

Mais il est acté que la relève de l'objectif est nécessaire. Cela signifie que plus personne ne se satisfait de l'objectif actuel de 40 %. Le Conseil de décembre sera celui de la dernière chance pour renforcer les ambitions européennes. L'enjeu est de taille. La France et onze autres États se sont prononcés en faveur d'un objectif de 55 %.

La crise sanitaire, la catastrophe naturelle qui a touché les Alpes-Maritimes, l'augmentation des températures - le mois de septembre 2020 aura battu les records  - tout nous rappelle qu'il y a urgence à agir.

Les évènements climatiques extrêmes deviennent la nouvelle normalité. Personne n'est plus à l'abri du changement climatique. Il faut réagir, comme nous y appelle le climatologue américain Michael Mann.

La commission du développement durable s'implique et s'impliquera. Nous l'avons fait avec une mission d'information et une proposition de loi sur l'impact environnemental du numérique à l'initiative de nos collègues Chaize, Chevrollier et Houllegatte. Nous continuerons à être force de proposition pour une transition durable de notre économie. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains ; M. Jacques Fernique applaudit également)

M. Jean-Yves Leconte .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Le Brexit a montré que même en tissant des liens pendant plus de cinquante ans, s'il n'y a plus de volonté d'être ensemble, cela ne tient plus. Même avec de nouveaux instruments financiers, l'accord du 21 juillet, déjà inespéré, ne suffira pas à faire une Europe politique.

Le Conseil européen de la semaine passée n'a pas fait la une des journaux.

Sur le Brexit, nous restons dans l'incertitude : les Britanniques veulent-ils partir sans accord ou s'agit-il d'une tactique de négociation ?

Sur le cadre financier pluriannuel, alors que la pandémie reprend, les remarques du Parlement européen méritent d'obtenir des réponses.

Sur le Green Deal, nous saluons la volonté de la Commission européenne de porter l'objectif de baisse des émissions carbone à moins 55 %, mais constatons que nous n'avons guère avancé sur les moyens d'y parvenir. Attention surtout à ne pas compenser la baisse de nos émissions par des émissions importées, comme l'a fait la France.

Sur le pacte migratoire, on change le nom mais pas le contenu. Il est difficile dans ces conditions à l'Europe de parler le langage de la puissance.

Comment faire respecter l'accord de retrait, déjà mis à mal par le Gouvernement britannique, et garantir les droits des Britanniques en Europe et des ressortissants européens au Royaume-Uni ? Quelle place pour le Cour de justice de l'Union européenne s'il n'y a pas d'accord sur la relation future ?

L'accord du 21 juillet sur les nouveaux instruments de financement des politiques européennes, est symbolique : plus de 70 % des obligations souveraines émises par les États membres ont déjà été rachetées par la BCE. Comment tenir la distance face aux États-Unis et à la Chine qui mettent beaucoup plus que nous ?

Nous risquons de voir les recettes propres de l'Union baisser. Pendant ce temps, les nouvelles dépenses vont financer des politiques nationales, avec un réel risque de décrochage de certains États membres, à rebours de la politique de convergence. Il y a besoin de ressources propres nouvelles, sans quoi ce sera un « one shot » et on aura cassé la dynamique.

Comment envisagez-vous de répondre à la problématique de l'État de droit ? Aucun État membre n'est parfait et ils sont nombreux à être condamnés. Quels sont les critères objectifs ? Certains États membres ont des pratiques de corruption dans l'usage des fonds européens : nous avons besoin d'outils de contrôle. Il est à cet égard regrettable que la Hongrie ne participe pas au parquet européen.

Sur la question migratoire, on nous annonce la suppression de la procédure Dublin - mais la responsabilité du pays de premier accueil demeurera, alors que les pratiques sont très différentes. Sur ces sujets, avançons à quelques-uns, en instituant par exemple avec l'Allemagne une cour européenne du droit d'asile.

Enfin, la pandémie a mis à mal les principes de l'Europe de Schengen, avec le retour des contrôles aux frontières. Notre espace de libre circulation n'est absolument pas au niveau : il faut le faire évoluer.

Nous avons besoin d'une implication de l'Union européenne pour faire cesser le drame humanitaire au Haut-Karabakh. Je partage les propos tenus par Jérémy Bacchi. Je pourrais aussi vous interroger sur la Biélorussie où les manifestants sont poursuivis, ou sur notre partenariat avec l'Afrique et les modalités de négociation avec ce continent.

Enfin, les parlements nationaux, qui ont seuls la souveraineté budgétaire, doivent être au coeur du débat sur l'avenir de l'Europe. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Didier Mandelli .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Jean-François Longeot applaudit également.) Le Conseil européen ne manquait pas de dossiers brûlants.

L'objectif de neutralité carbone en 2050 nous impose de revoir notre objectif de réduction d'émission des gaz à effet de serre. Nous sommes très volontaires pour nous fixer des objectifs, un peu moins pour les tenir. La France est loin des engagements pris dans l'accord de Paris. L'an passé, nous avons réduit nos émissions de 0,9 % au lieu des 1,5 % visés ; à compter de 2025, nous devons être à moins 3,2 % par an... Nous devons accélérer le rythme de réduction de nos émissions.

L'Union européenne mobilise des moyens considérables pour financer sa transition écologique. Entre le cadre financier pluriannuel 2021/2027 et la nouvelle capacité d'emprunt, l'Union européenne bénéficiera de 1 850 milliards d'euros, dont 30 % pour le climat.

Nombreux sont ceux qui considèrent que ces moyens sont insuffisants. Quels critères d'utilisation ? Quels contrôles ? Quel rythme de déblocage ?

Nous attendons des détails sur la stratégie européenne de réduction des émissions liées au secteur des transports, l'un des plus émetteurs, le seul dont les émissions ont augmenté depuis 1990. La Commission européenne n'attend qu'une baisse de 20 % entre 2015 et 2030. À quand un plan européen ambitieux en faveur des transports publics, ferroviaires, fluviaux et maritimes ? Il faut aller plus loin que le soutien à la conversion du parc automobile et encourager le report modal.

Le verdissement des transports maritimes est engagé mais des efforts sont encore nécessaires. Ils pourraient être intégrés au marché carbone. Quelle est la position de la France ?

Plus de 200 aéroports européens ont engagé une feuille de route pour atteindre l'objectif de 0 % de CO2 net en 2050. Airbus prévoit d'être le premier opérateur à adopter l'avion à hydrogène en 2035. Mais le choc lié à la crise sanitaire risque de remettre en cause ces objectifs. Quel soutien l'Europe compte-t-elle apporter à la décarbonation du secteur des transports ? Je souhaite que l'Union européenne soit au rendez-vous de ce défi. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

Mme Catherine Fournier .  - Depuis que le Royaume-Uni a officiellement quitté l'Union européenne, les pourparlers patinent et l'échéance se rapproche dangereusement.

Une absence d'entente au 31 décembre se traduirait par la fermeture des eaux britanniques aux pêcheurs européens, la fin des quotas partagés et le retour des conflits d'usage entre flottes. Notre filière pêche est lourdement menacée par une absence d'accord. Entre 2011 et 2015, 98 000 tonnes de poissons ont été pêchées dans les eaux britanniques, représentant 171 millions d'euros de chiffre d'affaires et 2 566 emplois directs.

Englober la pêche dans un accord global est un vrai contrepoids dans la négociation. Trente ports français sont concernés. Le port de Boulogne-sur-Mer est le premier port français en termes de tonnages, il traite 36 000 tonnes de poissons et 360 000 produits de la mer par an. C'est une plateforme logistique leader en Europe. Ne faudrait-il pas assouplir le fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche pour l'utiliser comme fonds d'urgence, et se préparer à des marchés de substitution ?

Le port de Calais assure, quant à lui, le transport de 10 millions de voyageurs et de 44 millions de tonnes de marchandises. C'est un poumon économique pour notre territoire.

Il faut un accord de libre-échange ambitieux avec le Royaume-Uni. Pour cela, le Royaume-Uni devra actualiser ses règles pour éviter tout risque de dumping à nos portes.

Enfin, Eurotunnel représente 26 % des échanges entre le Royaume-Uni et l'Union européenne, 138 milliards d'euros de marchandises et 21 millions de passagers par an. L'Union a encouragé la France à négocier un avenant au traité de Canterbury afin que le tunnel reste sous l'égide du droit européen et la juridiction de la Cour de justice de l'Union européenne. Qu'en est-il ?

M. le président.  - Il faut conclure.

Mme Catherine Fournier.  - Pour finir, je me félicite des progrès dans l'approche coordonnée de la crise sanitaire et des restrictions de circulation au niveau européen. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Mme Marta de Cidrac .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le constat du réchauffement climatique et de la destruction des espaces naturels est bien réel. Les citoyens nous interpellent, nous les élus.

L'action européenne en faveur du climat a été évoquée lors du Conseil européen mais sans fixer de nouveaux objectifs. Ce n'est pas une surprise : vous nous aviez annoncé que la question ne serait pas tranchée avant le Conseil de décembre.

Même si la cible finale n'est pas précisée, le programme de la Commission, d'une baisse des émissions de 55 % d'ici 2030, figure dans les conclusions du Conseil. Cela signifie-t-il que la proposition du Parlement européen à 60 % est jugée inatteignable et donc exclue ?

Cela nécessitera des investissements importants. Nous devons fixer un cap mais aussi accompagner les économies des États membres. Le Conseil européen a demandé des évaluations précises dans les États membres, je m'en réjouis.

Quel est le rapport de force au sein du Conseil européen au sujet du rehaussement de l'objectif et de la nécessaire solidarité entre États membres ? Compte tenu des premiers échanges avec la Commission, quel serait l'impact pour la France ? Il faut prévenir le risque de fuite carbone. Un mécanisme d'ajustement carbone doit être installé rapidement aux frontières pour éviter toute distorsion de concurrence.

L'Europe ne doit pas être naïve. L'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre n'est pas technique ou mécanique ; il est éminemment politique. Il doit être pleinement accepté par les États membres. Il revêt des enjeux économiques, sociaux, industriels et d'aménagement du territoire dans chaque État membre. Il est bon d'avoir retenu un objectif intermédiaire à horizon 2040. Le Sénat le souhaitait.

Dans un contexte économique dégradé par la crise sanitaire, l'Europe doit veiller à poursuivre son objectif de réduction des gaz à effet de serre. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

M. Guillaume Chevrollier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Comment faire de l'Union européenne un outil stratégique pour écrire la prochaine page de la mondialisation ? Le Sénat a proposé l'établissement d'une barrière écologique aux frontières de l'Union européenne dans un but autant économique qu'écologique. Je crois à l'échange, à la force de nos entreprises, à la compétence de nos agriculteurs mais pour que la liberté d'échange ait un sens, il faut que les règles soient les mêmes pour tous.

La politique européenne en faveur de l'écologie ne doit pas être dogmatique mais pragmatique. Nos objectifs doivent être réalisables et les règles simples. À horizon 2050, l'Europe doit s'engager sur la neutralité carbone conformément aux accords de Paris.

J'en viens à la question agricole. La Commission européenne a présenté sa stratégie de la ferme à la table, avec notamment des mesures législatives. Notre agriculture fait partie des plus vertueuses ; elle est forte et doit le rester grâce à une PAC qui simplifie la vie de nos agriculteurs.

Nous avons besoin de l'agriculture pour l'écologie et nos agriculteurs ont besoin du soutien de l'Europe. Nous serons vigilants sur ce point.

L'Europe doit aussi être moins technocratique et se rapprocher du territoire. Nous avons besoin de dialoguer entre l'État, les élus locaux et les corps intermédiaires. Nous comptons sur vous. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Clément Beaune, secrétaire d'État .  - Je salue le président Jean-François Rapin et le travail accompli par Jean Bizet.

Monsieur Allizard, la question de la sécurité et de la défense avec le Royaume-Uni est importante. Il est impératif de maintenir un cadre de coopération bilatérale, de sécurité et de défense, avec le Royaume-Uni. Il reste notre premier partenaire de défense à bien des égards et le Brexit ne doit pas abîmer ce partenariat. Nous avons aussi mis en place un cadre informel de travail avec une dizaine de pays, l'initiative européenne d'intervention, qui perdurera après le Brexit.

Vous avez évoqué notre relation avec la Turquie. La tension n'est nullement temporaire. Il existe de multiples foyers de tensions dans diverses zones - Méditerranée orientale, Balkans, Syrie, Libye... - et parfois dans nos pays. Il ne faut faire preuve d'aucune naïveté et protéger nos valeurs.

Sur les six derniers mois, le Président de la République a contribué à la fermeté du discours européen et a envoyé cet été des signaux fort en Méditerranée orientale, avec des exercices de présence navale avec l'Italie, Chypre et la Grèce.

Monsieur Leconte, c'est aussi une façon de gagner en autonomie par rapport à la Turquie, notamment sur la question migratoire. Lors du sommet début octobre, nous avons ouvert la porte à la discussion avec la Turquie. Si elle refuse, des sanctions pourront être envisagées.

Monsieur Husson, le Brexit est effectivement une partie d'échecs interminable et je partage la frustration de nombre d'entre vous. Nous estimons qu'une absence d'accord aurait un impact limité de 0,1 point de PIB pour la France en 2021. Ce serait dix fois plus pour le Royaume-Uni compte tenu de la forte asymétrie de notre relation commerciale. Moins de 10 % des exportations européennes vont vers le Royaume-Uni alors que près de 50 % des exportations de ce pays se portent sur l'Union européenne.

Les estimations de la Commission européenne s'établissent entre 5 et 14 milliards d'euros de rendement annuel pour la taxe carbone aux frontières ; près de 15 milliards pour les seuls secteurs de l'acier et du ciment. Pour mémoire, le coût annuel du Brexit est estimé à 10 milliards d'euros.La question de la pêche est effectivement prioritaire, monsieur Rapin. Nous maintenons une forte pression sur ce point, lors des négociations. Il n'y aura en revanche pas de compromis déraisonnable. La bande des 6 - 12 milles est cruciale pour nous comme pour les Britanniques, notamment pour la pêche artisanale. 25 % de la pêche de notre façade nord-est se fait dans les eaux britanniques. En revanche, le Royaume-Uni a besoin de l'accès à notre industrie de transformation des produits de la mer qui traite les trois quarts de la pêche britannique, essentiellement dans les Hauts-de-France. C'est un fort levier de négociation.

Sur la question climatique, Monsieur Rapin, il faut conserver l'équilibre entre nos ambitions et la réalité. Pour la première fois, le Président de la République a soutenu avec onze autres pays l'objectif de 55 % de réduction des émissions en 2030, contre 40 % actuellement. Il est pourtant déjà difficile de tenir nos engagements pris.

N'ayons pas une forme d'exemplarité naïve vis-à-vis de nos concurrents commerciaux. La diplomatie climatique européenne a payé comme le prouvent les récents engagements de la Chine pour 2060. Ce n'est pas anodin.

Le fonds de transition juste, doté de près de 20 milliards d'euros, a été créé cet été. Il bénéficiera notamment aux Polonais pour les aider à atteindre leurs objectifs climatiques.

Le Conseil européen a demandé à la Commission européenne de préciser son étude d'impact par pays et par secteur d'ici sa réunion de décembre.

On peut regretter la lenteur de l'évolution, mais voyez l'accélération des engagements. En 2019, seuls quatre pays défendaient l'objectif de neutralité carbone en 2050. Nous parlons désormais d'un objectif plus ambitieux pour 2030.

Monsieur Verzelen, il faut une meilleure coordination européenne sur les masques, les tests et les vaccins, ainsi qu'une bonne information des parlements nationaux sur les contrats signés par la Commission européenne. Trois contrats sont signés et trois autres en cours de négociation : entre 200 et 400 millions de doses sont ainsi sécurisées pour chaque contrat.

Le plan de relance, qui compte 37 % de dépenses climatiques, et le budget européen, qui prévoit 30 % de dépenses favorables au climat, contribuent à l'objectif de réduction des gaz à effet de serre. Ils s'accompagnent en outre d'un principe général « Do not harm ». Il en va de même pour la PAC, dont le financement a été revu en conséquence.

Nous ne pouvons pas atteindre notre cible écologique sans une PAC bien financée au niveau européen.

Dans l'accord du 21 juillet, il y a un accord de principe sur la création de nouvelles ressources propres pour rembourser le plan de relance après 2027 et alléger les contributions nationales directes. Depuis les années soixante-dix, aucune ressource propre n'a été créée. Il faudra en fixer le cadre législatif.

S'agissant des accords bilatéraux de pêche conclus par le Royaume-Uni, l'annonce relative à la Norvège relève plutôt de la communication, mais il faut rester vigilant, notamment quant à l'impact sur nos propres quotas. Un accord annuel pour l'accès aux eaux britanniques est bien sûr inacceptable.

À l'occasion du Green Deal, la Commission européenne a évoqué l'étiquetage des produits alimentaires mais le combat est encore à mener.

Nous cherchons à maintenir un lien entre les parties au conflit du Haut-Karabakh, monsieur Bacchi. La priorité est que cessent les hostilités. Par deux fois, la France a obtenu par le groupe de Minsk qu'elle impose un cessez-le-feu. Il ne faut pas fragiliser les efforts diplomatiques. Nous avançons vers une position de fermeté à l'égard de la Turquie et nos partenaires européens sont en train de bouger.

Monsieur Longeot, le Conseil européen était un point d'étape pour un accord en décembre avant la COP de 2026 qui se tiendra au Royaume-Uni.

Monsieur Leconte, le risque de fuites carbone est identifié. L'Europe ne représente que 10 % des émissions de CO2.

La réforme du mécanisme ETS peut faire partie de cette boîte à outils, mais il faut rester prudent quant à l'extension du dispositif à certains secteurs. Nous ne sommes pas hostiles s'agissant du transport maritime. Cela est moins évident pour le transport aérien.

Nous avons engagé une procédure de mise en demeure à l'égard du Royaume-Uni. Le Parlement européen a dit qu'il ne voterait pas sur la relation future si les Britanniques ne retiraient pas leur projet de loi remettant en cause l'accord de retrait.

Mme Fournier, vous avez raison au sujet du tunnel sous la Manche. Nous ne pourrons envisager une suspension du trafic. Nous avons une habilitation depuis hier pour discuter avec le Royaume-Uni au nom de l'Union européenne. De fait, le traité de Canterbury ne suffit en effet pas. Si nous n'avions pas le temps, nous pourrions prendre des mesures de contingence unilatérales et symétriques.

L'outil européen qu'est la banque européenne d'investissement devient progressivement une banque européenne du climat, qui soutient notamment les projets des collectivités territoriales.

En matière d'équité dans les échanges commerciaux, soulignée par M. Chevrollier, nous avons besoin d'équité climatique. On ne peut pas commercer avec des grands partenaires qui ne respectent pas nos exigences minimales en matières sanitaires et environnementales, comme le Mercosur par exemple.

Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

M. le président.  - Je vous remercie pour vos réponses détaillées.

M. Jean-François Rapin, président de la commission .  - Ma conclusion sera en forme d'ouverture. Boulogne-sur-Mer est ma ville de naissance et je puis vous assurer que les Anglais ne sont pas nos ennemis. Quand il fait beau, nous voyons les côtes britanniques, mais nous savons aussi qu'il pleuvra le lendemain (Sourires). Demain, ce seront nos partenaires et nous devrons travailler étroitement avec eux.

Sur la pêche, nous aurons besoin de conditions idéales pour fonctionner correctement. Au niveau douanier, nous sommes prêts mais je suis plus inquiet sur les systèmes vétérinaires de surveillance. (M. Clément Beaune, secrétaire d'État, approuve.)

Sur la PAC, nous serons très attentifs à la question de l'utilisation des fonds européens. On ne peut pas les décentraliser au niveau des États. J'ai eu un échange avec deux députées européennes qui étaient très inquiètes à ce sujet.

Sur le Parlement de Strasbourg, le Parlement français sera proactif pour retrouver un équilibre et pour que l'hémicycle strasbourgeois soit à nouveau utilisé. L'argument sanitaire ne tient plus : la situation à Bruxelles est l'une des plus graves en Europe.

Je remercie tous les interlocuteurs de leur participation très active à ce débat. (Applaudissements)

Prochaine séance demain, jeudi 22 octobre 2020, à 14 h 30.

La séance est levée à 23 h 40.

Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Annexes

Ordre du jour du jeudi 22 octobre 2020

Séance publique

De 14 h 30 à 18 h 30

Présidence : M. Georges Patient, vice-président

Secrétaires : M. Jean-Claude Tissot - Mme Marie Mercier

(Ordre du jour réservé au groupe UC)

1. Proposition de loi pour la mise en place d'une certification de cybersécurité des plateformes numériques destinée au grand public, présentée par M. Laurent Lafon (texte de la commission, n° 39, 2020-2021)

2. Proposition de loi visant à réformer la procédure d'octroi de la dotation d'équipement des territoires ruraux, présentée par M. Hervé Maurey (texte de la commission, n° 36, 2020-2021)

Nomination des membres de trois CMP

1. Les représentants du Sénat à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière sont :

Titulaires : M. Claude Raynal, M. Jean Bizet, M. Laurent Duplomb, M. Dominique de Legge, M. Michel Canevet, M. Patrice Joly, M. André Gattolin

Suppléants : Mme Christine Lavarde, M. Daniel Gremillet, M. Jean-François Rapin, M. Pierre Louault, Mme Viviane Artigalas, M. Jean-Claude Requier, M. Éric Bocquet

2. Les représentants du Sénat à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative au renforcement de l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique et à l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » sont :

Titulaires : Mme Catherine Deroche, Mme Frédérique Puissat, M. Philippe Mouiller, Mme Élisabeth Doineau, Mme Monique Lubin, Mme Michelle Meunier, M. Xavier Iacovelli

Suppléants : Mme Chantal Deseyne, Mme Pascale Gruny, Mme Catherine Procaccia, Mme Nadia Sollogoub, Mme Corinne Féret, Mme Véronique Guillotin, Mme Laurence Cohen

3. Les représentants du Sénat à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental sont :

Titulaires : M. François-Noël Buffet, M. Philippe Bas, Mme Muriel Jourda, M. Arnaud de Belenet, M. Jean-Yves Leconte, M. Jérôme Durain, M. Xavier Iacovelli

Suppléants : Mme Jacky Deromedi, Mme Catherine Di Folco, Mme Jacqueline Eustache-Brinio, M. Hervé Marseille, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, Mme Éliane Assassi, M. Jean-Yves Roux