Disponible au format PDF Acrobat


Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Mise au point au sujet d'un vote

Coût pour les collectivités territoriales de la crise sanitaire et économique

M. Mathieu Darnaud, pour le groupe Les Républicains

M. Joël Giraud, secrétaire d'État chargé de la ruralité

M. Daniel Chasseing

M. Daniel Salmon

M. Didier Rambaud

M. Christian Bilhac

M. Pascal Savoldelli

M. Bernard Delcros

M. Jérôme Durain

Mme Alexandra Borchio Fontimp

M. Jean-Marie Mizzon

M. Jean-Michel Houllegatte

M. Bernard Fournier

M. Hussein Bourgi

M. Daniel Gueret

M. Philippe Mouiller

M. Bruno Rojouan

Mme Elsa Schalck

M. Jean-François Husson, pour le groupe Les Républicains

Modification du Règlement du Sénat

Discussion générale

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois

M. Guillaume Gontard

M. Alain Richard

M. Jean-Claude Requier

Mme Éliane Assassi

M. Loïc Hervé

M. Éric Kerrouche

Mme Vanina Paoli-Gagin

Mme Pascale Gruny

Mme Nathalie Goulet

M. Stéphane Le Rudulier

Discussion des articles

ARTICLE 4

ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article 5

ARTICLE 6

ARTICLE 7

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 7

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 8

ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article 9

ARTICLE 9

ARTICLE 10

ARTICLE 11

M. Jean-Pierre Sueur

ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 11

ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 13

ARTICLE 14

ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 14

ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 14 quater

Interventions sur l'ensemble

M. Éric Kerrouche

Mme Pascale Gruny

M. Philippe Folliot

Mme Éliane Assassi

Ordre du jour du mercredi 2 juin 2021




SÉANCE

du mardi 1er juin 2021

101e séance de la session ordinaire 2020-2021

présidence de Mme Nathalie Delattre, vice-présidente

Secrétaires : M. Jean-Claude Tissot, M. Daniel Gremillet.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance est adopté.

Mise au point au sujet d'un vote

M. Guillaume Chevrollier.  - Lors du scrutin public n°126, Mme Joëlle Garriaud-Maylam souhaitait voter pour.

Mme la présidente.  - Acte vous est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin.

Coût pour les collectivités territoriales de la crise sanitaire et économique

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle un débat sur le coût pour les collectivités territoriales de la crise sanitaire et économique, à la demande du groupe Les Républicains.

M. Mathieu Darnaud, pour le groupe Les Républicains .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Je ne saurais débuter que par un plaidoyer en faveur de nos collectivités territoriales, à commencer par nos communes. Dans la crise sanitaire, elles ont joué un rôle crucial, notamment pour permettre la vaccination à grande échelle.

À la veille de l'examen du projet de loi déconcentration, décentralisation, différenciation, décomplexification (4 D), réaffirmons cette confiance dans l'ensemble de nos collectivités territoriales, de Brest à Biarritz et de Strasbourg à Privas. Nos communes ont engagé des dépenses : 4 milliards d'euros selon un rapport de l'Assemblée nationale, plutôt 6 milliards selon l'Association des maires de France (AMF). Ces coûts doivent être évalués précisément et faire l'objet d'un accompagnement financier de l'État.

L'autofinancement net du bloc communal a diminué de 9 %, et l'investissement de 15 %. L'État doit donc mettre la main à la poche.

Masques, blouses, centres de vaccination, équipements divers : les collectivités territoriales ont su agir dans l'urgence. Certaines n'ont pas encore perçu les moyens promis pour couvrir ces dépenses. Nos communes sont souvent à l'os. Je pense au Béage, commune ardéchoise de 300 habitants, qui a dû payer 12 000 euros pour un agent supplémentaire à mi-temps. D'autres dépenses passent inaperçues, notamment celles liées au tourisme. Il y a aussi la chute de l'emploi saisonnier et des recettes, comme la taxe de séjour qui a baissé de 15 %, la billetterie des grands sites touristiques - l'Aven d'Orgnac, la grotte Chauvet - ou les taxes sur les casinos, comme à Vals-les-Bains.

L'État a demandé aux collectivités territoriales d'être son bras armé. Il lui faut indemniser ces dépenses au coût réel, pas au forfait. Ainsi, le seul hébergement des personnes faisant fonctionner le centre de vaccination coûte 20 000 euros à la communauté de communes Montagne d'Ardèche !

L'accompagnement financier de l'État est une question de justice, d'autant que l'État compte aussi sur les collectivités territoriales pour son plan de relance. Il ne faudrait pas que la commande publique pâtisse de la non-compensation, pour les collectivités, des coûts induits par la crise.

Nous comptons sur votre pugnacité, monsieur le secrétaire d'État. Nos communes doivent être les aiguillons de la relance. Or elles risquent d'être vaccinées contre les promesses de l'État ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

M. Joël Giraud, secrétaire d'État chargé de la ruralité .  - Le Sénat, chambre des territoires, est attaché au suivi des finances locales. Le Gouvernement aussi, et moi tout particulièrement, en tant qu'ancien maire et rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale.

Ce débat est bienvenu, car nous disposons désormais d'éléments chiffrés fiables. L'année 2020 n'a pas été l'annus horribilis annoncée, même si elle a été difficile.

Les projections pessimistes du rapport de Jean-René Cazeneuve - effondrement des recettes de 5 milliards d'euros, augmentation des dépenses de 2,2 milliards d'euros et donc réduction de 7,2 milliards d'euros de l'épargne brute des collectivités territoriales - ne se sont pas concrétisées.

L'épargne brute des collectivités aurait dû diminuer de 26 % entre 2019 et 2020. En réalité, elle a baissé de 11,4 %. Le bloc communal a le mieux résisté avec une baisse de 6,5 %. La capacité d'autofinancement des intercommunalités et des petites communes se maintient avec une baisse limitée à 4,1 %. L'épargne brute des communes de moins de 3 500 habitants a même crû de 2,4 % grâce aux économies de fonctionnement et à des dotations imperméables à la crise.

L'épargne brute des départements baisse, elle, de 14 %, en raison de l'augmentation de leurs charges sociales, même si les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) ont baissé de seulement 1,6 %. L'épargne des régions se réduit de 21,6 % en raison de l'envolée de leurs dépenses d'intervention.

L'État a mis en place des mesures inédites dès juin 2020 via la loi de finances rectificative, à la suite de la mission Cazeneuve : une clause de sauvegarde des recettes fiscales et domaniales garantit une aide si le montant tombait en deçà de la moyenne 2017-2019 ; une avance sur les DMTO pour les départements répond à la demande de l'Assemblée des départements de France (ADF).

Sans attendre 2021, 1 milliard d'euros de dotation de soutien à l'investissement (DSIL) ont été versés dès le début de la mandature municipale pour de nouveaux projets et des facilités comptables ont été accordées pour étaler les charges de la crise sur cinq ans.

La loi de finances initiale pour 2021 a reconduit le filet de sécurité et garanti les fonds départementaux de péréquation des DMTO pour les petites communes.

Nous avons ouvert un fonds de stabilisation pour les départements et maintenu le fonds de péréquation à son niveau habituel.

Nous avons supprimé la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) des régions et l'avons remplacée par une fraction de TVA, ce qui les protège de la baisse de CVAE attendue en 2021. Nous avons ouvert 1,5 milliard d'euros de dotations d'investissement de relance supplémentaires.

Les services du Gouvernement travaillent à un suivi précis de la situation financière des collectivités. Un groupe de travail rassemble les associations représentant le bloc communal toutes les six semaines pour échanger les données, et ses comptes rendus sont transmis à vos commissions des finances.

Les perspectives pour 2021 sont loin d'être sombres. D'après nos premières estimations, les recettes des collectivités devraient augmenter en 2021. Seules la CVAE, la taxe d'aménagement et la taxe sur les remontées mécaniques vont baisser. L'immense majorité des recettes sont à l'abri. La CVAE ne baisserait que de 1,1 % ; le versement mobilité a progressé de 3,8 % au premier trimestre ; les DMTO, de 10 % par rapport au premier trimestre 2020.

Le projet de loi de finances rectificative (PLFR) ouvrira un fonds de 200 millions d'euros pour aider les collectivités subissant des pertes de recettes tarifaires, qu'il s'agisse de services publics industriels et commerciaux (SPIC) ou administratifs (SPA).

Enfin, nous vous rendrons compte en temps réel de l'exécution de France Relance. Début mai, 80 % des dotations d'investissement ouvertes étaient programmées ou notifiées par les préfets.

Le Gouvernement est pleinement mobilisé pour soutenir les collectivités territoriales et leur capacité d'investissement. (M. Didier Rambaud applaudit.)

M. Daniel Chasseing .  - Nos finances publiques sont prises en étau dans un contexte de crise qui entraîne une forte détérioration des recettes fiscales, tandis que les mesures de soutien ont fait s'envoler des dépenses publiques. C'est vrai pour le budget de l'État, dont le déficit dépasse 200 milliards d'euros en raison du soutien aux entreprises et aux salariés, mais aussi pour les collectivités locales. Les lieux d'accueil pour enfants gérés par les collectivités territoriales ont vu leur fréquentation baisser, et partant leurs recettes. Or les coûts sont restés élevés, notamment de personnel. Malgré l'autorisation spéciale d'absence, les collectivités ont continué à payer les charges salariales. Les frais d'entretien ont doublé, notamment pour la désinfection.

Les collectivités ont fait un travail remarquable de proximité, avec dévouement. De nombreux élus s'inquiètent de l'impact sur les finances locales. Comment allez-vous les aider à faire face ?

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Le PLFR présenté demain en Conseil des ministres comportera une aide au profit des services gérés en régie et confrontés à une baisse des recettes tarifaires, comme le Premier ministre s'y était engagé en mars.

Les recettes des prestations sociales ou périscolaires ont baissé de 30 % en 2020 pour le bloc communal - principalement des petites communes - contre 1 % pour la moyenne des recettes de fonctionnement. Il ne s'agira pas d'une avance remboursable mais d'une dotation budgétaire de 200 millions d'euros. Un premier volet compensera les SPIC ayant subi une baisse d'épargne brute, sur le modèle de ce qui existe pour les entreprises. Quant aux communes et à leurs groupements, elles bénéficieront d'un fonds d'urgence.

Les critères d'attribution seront précisés lors le débat parlementaire.

M. Daniel Salmon .  - Le 16 mars 2020, les structures scolaires fermaient. De nombreuses collectivités ont eu du mal à anticiper la gestion des personnels. Elles ont su s'adapter, mais beaucoup d'agents ont exercé des fonctions inhabituelles. Or tous n'ont pu bénéficier d'une prime car certaines collectivités ne peuvent se le permettre : seules 23 % des communes de moins de 2 000 habitants ont instauré une telle prime.

Alors que la crise sanitaire n'est pas terminée, comment comptez-vous faire pour limiter les disparités entre agents territoriaux ?

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Je m'associe à votre hommage aux agents territoriaux. J'ai ainsi pu être vacciné dans une commune de 5 000 habitants.

Depuis la loi de finances rectificative d'avril 2020, une prime exceptionnelle de 2 000 euros maximum peut être accordée aux agents territoriaux ayant eu un surcroît de travail durant la crise. Les collectivités ont toute latitude pour en fixer le montant, conformément au principe de libre administration des collectivités territoriales. C'est à l'employeur d'en assumer la charge ; nous n'allons pas demander au contribuable national de payer des décisions de gestion des ressources humaines locales ! Les disparités existent de longue date en matière indemnitaire.

L'État a exonéré cette prime d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales, il en prend donc à sa charge, de fait, une partie.

M. Daniel Salmon.  - Votre réponse est bien fataliste... Il demeure d'importantes disparités entre agents territoriaux. En temps de crise, il faut fortifier nos services publics, à rebours de la tendance actuelle.

M. Didier Rambaud .  - Les collectivités territoriales ont fourni des efforts colossaux face à la crise. Les communes de montagne sont particulièrement éprouvées, du fait d'une année blanche pour le secteur clé du tourisme, qui dégage d'ordinaire 20 milliards d'euros de retombées économiques, dont 10,5 milliards pour nos 350 stations de ski.

Le Gouvernement a agi : plus de 5 milliards d'euros ont été déployés durant la crise. Mais les collectivités territoriales de montagne ont plus que jamais besoin d'aide.

Lors de son déplacement en Savoie le Premier ministre a annoncé des mesures de relance pour soutenir ces territoires singuliers, dans le cadre du plan Avenir montagne, concret et prometteur : dotations d'investissement, contrats de massif, soutien à l'ingénierie.

Comment ces 480 millions d'euros seront-ils répartis ? Selon quel calendrier seront-ils versés ?

M. Alain Richard.  - C'est la matière forte du ministre !

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Le plan Avenir montagne est le premier plan d'investissement pour la montagne depuis le plan Neige de 1960. Le Premier ministre a rappelé que 5,4 milliards d'euros avaient été déployés pour la montagne, dont 480 millions d'euros pour les collectivités territoriales.

Cela est sans commune mesure avec ce qui s'est fait ailleurs en Europe. Le chômage partiel ou les mesures d'indemnisation n'existent pas partout. Je pense à l'Italie, la Suisse ou l'Autriche.

Sur les 480 millions d'euros pour les collectivités territoriales, 36 millions d'euros sont prévus pour les garanties de recettes fiscales et domaniales, 231 millions d'euros pour l'investissement, 242 millions pour les contrats de massif et 38,5 millions pour les régies de remontées mécaniques. Nous avons dû batailler avec Bruxelles pour cette dernière aide...

Quelque 300 millions d'euros seront dédiés à l'investissement, un effort à parité avec celui des régions, que je salue, et 31 millions d'euros iront à l'ingénierie des petits territoires. (M. François Patriat approuve.)

M. Christian Bilhac .  - Les collectivités territoriales ont pris leurs responsabilités pendant cette crise : masques, dépistage, vaccination à grande échelle... Elles continuent d'assurer les services courants avec de nouvelles contraintes. Cela a un coût. L'AMF évalue leurs pertes à plus de 6 milliards d'euros sur trois ans. Celles-ci ont été partiellement compensées par les lois de finances rectificatives.

Les collectivités territoriales ont été les acteurs publics les plus résistants budgétairement, selon Olivier Dussopt. Mais elles risquent d'être sollicitées pour le remboursement de la dette Covid. Le rapport de Jean Arthuis propose d'étendre le pacte de Cahors : quel retour en arrière par rapport à la loi Defferre de 1982 ! Allez-vous suivre cette préconisation ?

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - La dette a progressé de 270 milliards d'euros mais de façon très inégale : 65 % de la dette supplémentaire concerne l'État, 28 % la sécurité sociale et 7 % les collectivités territoriales, dont 50 % du fait de l'endettement de la Société du Grand Paris. Au total, la dette supplémentaire des collectivités territoriales s'élève à 8,5 milliards d'euros.

Il faudra bien sûr rembourser cette dette Covid : il n'y a pas de recette miracle. Il faut stimuler notre croissance et maîtriser les dépenses. La règle posée par Jean Arthuis est simple ; les dépenses augmentant plus vite que les recettes, il propose de rembourser au rythme de la croissance. Le Gouvernement a ainsi isolé une fraction de la dette de l'État et a proposé ce schéma d'amortissement à la Commission européenne.

Les collectivités territoriales pourraient adopter la même stratégie de désendettement, et identifier la dette Covid grâce aux annexes budgétaires mises à disposition. Il faudrait maîtriser les dépenses locales en s'inspirant du pacte de Cahors. Beaucoup de propositions de loi organiques vont dans le même sens.

C'est un débat sain car notre dette ne doit pas dépasser nos capacités de remboursement !

M. Christian Bilhac.  - Ne demandons pas aux fourmis-collectivités territoriales de rembourser la dette de la cigale-État ! (Sourires)

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Heureusement que l'État était cigale durant la crise...

M. Pascal Savoldelli .  - Les collectivités territoriales subissent de plein fouet l'impact de la crise sanitaire, avec un effet ciseau. Les dépenses sociales des départements ont augmenté de 7 %, et même de 13 % dans le Val-de-Marne, tandis que les capacités d'autofinancement chutaient de 14 %.

Lors de l'examen des PLFR, nous avons tenté de sauver ce qui reste de l'autonomie des collectivités locales et proposé de les aider, mais le Gouvernement a préféré ses propres solutions, tardives, qui excluent les départements du filet de sécurité ! Le dispositif prévu pour les avances remboursables est passé de 2,7 milliards d'euros à 119 millions d'euros ! Le Gouvernement a pendant ce temps déboursé 135 milliards d'euros pour les prêts garantis par l'État. L'argent a été dirigé vers les entreprises, Renault par exemple, qui a reçu 5 milliards d'euros mais a fermé son usine de Choisy-le-Roi.

Comment justifier une telle gabegie ? Allez-vous corriger le tir ? (Mme Cathy Apourceau-Poly approuve.)

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Les départements n'ont pas été oubliés ; ils ont bénéficié de mesures spécifiques : avance remboursable sur les DMTO - huit départements en ont bénéficié, sachant que ces droits de mutation n'ont diminué que de 1,6 %, au lieu des 25 % prévus ; augmentation du fonds de stabilisation de 200 millions d'euros ; depuis 2021, fraction dynamique de TVA de 250 millions d'euros ; et 300 millions d'euros orientés vers l'investissement dans la rénovation thermique des bâtiments.

Une réunion de M. Dussopt et Mme Gourault avec l'ADF a permis d'évoquer l'amélioration des clauses de sauvegarde, qui autorisent de provisionner certaines années pour réinjecter les fonds durant les années les plus difficiles. Nous restons à l'écoute des départements.

M. Pascal Savoldelli.  - Vous égrenez les dispositifs mais le total ne monte pas très haut... sauf à ce que je mente ! Le dispositif DMTO est-il passé de 2,7 milliards d'euros à 110 millions d'euros ? Oui ! (M. le ministre le confirme.)

Le Parlement n'arrête pas de voter des textes, mais on renvoie la loi de finances rectificative après les élections régionales : votez, on décidera après... Ne nous étonnons pas de la désaffection de nos concitoyens à l'égard de la politique !

M. Bernard Delcros .  - Dès le début de la crise, le Gouvernement a pris les mesures économiques et sociales nécessaires pour maintenir le pays debout.

Depuis la LFR de juillet 2020, des dispositions ont été prises pour les collectivités territoriales. Mais il demeure des angles morts. Les mesures de 2020 ont créé des inégalités de traitement entre les communes qui ont choisi une délégation de service public (DSP) et qui bénéficient des aides du Gouvernement, et celles qui ont choisi une régie et n'ont pas été aidées.

Une réponse devrait être apportée dans le prochain PLFR. J'ai participé au groupe de travail mis en place par le ministère.

Mais quels critères seront retenus pour accompagner les collectivités territoriales ? Il faut prendre en compte la part des recettes perdues dans les recettes fiscales totales. Ainsi, une perte de recettes de 20 000 euros après la fermeture d'un gîte d'étape en montagne dans une commune ayant une recette fiscale inférieure à 100 000 euros justifierait une aide. Êtes-vous prêt à adopter ce critère de la perte de recettes relative ? (MM. Jean-Paul Prince et Jean-François Husson approuvent.)

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Ce n'est pas un secret : nous avons prévu 200 millions d'euros dans le PLFR qui sera présenté demain en Conseil des ministres. Si la perte de recettes est significative pour le budget de la commune, elle entre dans la logique de compensation.

Des solutions doivent être trouvées pour l'ensemble des régies - SPIC et SPA -, comme nous l'avons fait dans le plan Montagne pour les régies de remontées mécaniques, même si les règles comptables diffèrent d'un département à l'autre. Ce travail sera complexe.

Les chiffres sont là. Vous avez raison : les collectivités territoriales les plus fragiles ont mis leurs services en régie. Tout cela sera bien pris en compte.

M. Bernard Delcros.  - Merci pour votre réponse. Les petites communes ont plutôt bien résisté à la crise, mais il y a de très fortes disparités.

M. Jérôme Durain .  - L'échelon régional a été fortement touché par la crise, avec des dépenses supplémentaires. Nous avons été efficaces, trop peut-être, puisque l'État a même réquisitionné notre commande de masques sur le tarmac de l'aéroport de Bâle-Mulhouse. La région Bourgogne-Franche-Comté a déployé des dispositifs de soutien : 36 millions d'euros pour les commerces et les TPE, 12 millions d'euros pour les secteurs du tourisme, de l'événementiel et de la culture, 10 millions pour les hôpitaux, 5 millions pour les associations, 4 millions pour les étudiants... Au total 540 millions d'euros d'aides ont été votés, en complément des aides de l'État. C'est un choix politique et une réponse à la crise.

Mais la crise a surtout eu pour conséquence des recettes minorées ; les recettes ferroviaires sont passées de 83 à 40 millions d'euros en raison d'une fréquentation diminuée de moitié. Malgré la réduction du trafic de 25 %, les dépenses n'ont baissé que de 5 % car les charges fixes demeurent élevées ; la situation est même plus grave en 2021 ! Quelle compensation l'État prévoit-il ?

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Des garanties ont été déployées au profit des régions : le remplacement de la CVAE par une fraction de TVA, des garanties de recettes sur la TVA et la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), la création d'une dotation régionale d'investissement de 600 millions d'euros dont 25 millions d'euros bénéficieront à la région Bourgogne-Franche-Comté.

Dans votre région, 141 communes ont reçu 5,1 millions d'euros de compensation sur leurs recettes fiscales et domaniales. Des communes comme Châlon ont reçu 160 000 euros. Ce n'est pas rien ! Les autorités organisatrices de mobilités (AOM) ont été aidées par des compensations fiscales et des avances remboursables de 21 millions d'euros. Et l'histoire ne s'arrête pas là car les régies seront également prises en compte.

Plus de 117 millions d'euros de dotation de relance ont été notifiés aux collectivités de votre région, auxquels s'ajoutent 25 millions d'euros annuels de DSIL.

Une mission sur les AOM a été confiée à Philippe Duron. Ses conclusions sont attendues fin juin. C'est donc l'ensemble de votre territoire qui a bénéficié d'un système particulièrement résilient de compensation.

Mme Alexandra Borchio Fontimp .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Cette crise sanitaire a enfanté une crise économique qui affecte aussi les acteurs publics, en particulier locaux.

Les collectivités territoriales ont fait preuve de dynamisme en ne lésinant pas sur les dépenses pour aider leurs administrés.

L'AMF estime leurs pertes à 6 milliards d'euros. Le Gouvernement avait annoncé un soutien massif, mais seuls 2 300 à 2 500 communes et une centaine d'EPCI seront aidés.

Les collectivités territoriales sortent exténuées de cette crise, avec la taxe foncière comme seul levier pour compenser les pertes de recettes tarifaires. Une fois de plus, l'État n'assume pas ses compétences.

Le Gouvernement invoque les économies faites en raison du ralentissement de certaines activités. Oui, à Antibes-Juan les Pins, nous avons ainsi économisé 1,5 million d'euros... mais les pertes de recettes atteignent 9,5 millions d'euros et 2 millions de dépenses supplémentaires nous ont été imposées par la situation. Au total, nous accusons 10 millions d'euros de pertes nettes, soit 5 % du budget. Pourquoi refuser de compenser ces dépenses des collectivités ? Cela leur permettrait de continuer à investir malgré la crise !

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Pour compenser, il faut une vision claire de l'équilibre des recettes et des dépenses. La réalité a parfois été différente de nos prévisions. Nous envisagions, par exemple, un effondrement ds DMTO, il ne s'est pas produit alors que nous avions provisionné 2,7 milliards d'euros.

Je suis très conscient de l'effort des collectivités territoriales dans l'accompagnement des personnes. Nous connaissons désormais l'effort conjoint de l'État et des collectivités territoriales. L'État a pris une forte part de la dette et heureusement qu'il n'a pas été « vertueux » !

Dans le département des Alpes-Maritimes, il a versé 14 millions d'euros de compensations dont 9 millions à la commune de Cannes. Il a joué son rôle et continuera à le faire avec le prochain PLFR.

M. Jean-Marie Mizzon .  - Sans surprise, le coût de la pandémie pour nos collectivités territoriales est lourd. Saluons leur réactivité et rendons hommage à leurs élus et leur personnel, qui ont distribué des équipements de protection et continué à lutter contre la fracture numérique. Le Grand Est a ainsi créé le Fonds résistance, avec 44 millions d'euros pour rémunérer le personnel remplaçant, verser des primes exceptionnelles, par exemple aux aides à domicile, ou soutenir l'économie locale. Ces dépenses n'ont été que partiellement compensées par des économies sur les frais de déplacement ou de restauration.

Comment l'État va-t-il aider nos collectivités territoriales, notamment pour compenser les pertes de recettes tarifaires ?

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Je salue également l'implication des collectivités territoriales et notamment des conseils régionaux. Le Fonds résistance est un très bon exemple de l'agilité des collectivités territoriales ; mais l'État n'a pas été moins agile : il a versé 1,8 milliard d'euros au fonds de solidarité au titre du plan de relance et a garanti 8 milliards d'euros de prêts aux entreprises. Il a aidé massivement les collectivités. C'est ainsi que Metz a reçu 1,2 million d'euros. Quatre AOM ont reçu des compensations fiscales face à une baisse importante du versement mobilité. Quatorze d'entre elles ont reçu 30 millions d'euros d'avances remboursables. Quelques 224 millions d'euros ont été notifiés au titre du plan de relance, qui s'ajoutent aux 50 millions d'euros de DSIL annuels.

Des aides complémentaires seront prévues pour les régies en difficulté.

Nous cadrerons au mieux pour les AOM, dans le cadre du rapport Duron que nous attendons.

M. Jean-Marie Mizzon.  - Vous disiez que les recettes des collectivités territoriales ne se portaient pas si mal. J'ai craint que vous n'ajoutiez : grâce à la hausse de la dotation globale de fonctionnement (DGF)... (Sourires) L'humour aurait été quelque peu décapant !

J'ai confiance en votre bonne foi, mais... je ne sais comment vous arrivez à 200 millions d'euros de pertes, alors que l'AMF l'estime plutôt à dix fois plus...

En outre, une avance ne vaut pas une dotation. J'espère que vous donnerez des moyens suffisants pour compenser les opérateurs.

M. Jean-Michel Houllegatte .  - Les perspectives sont plutôt positives pour la saison touristique, mais les élus sont inquiets. Une multitude d'acteurs sont en difficulté, dont les offices de tourisme, très fragilisés. Seuls ceux qui sont subventionnés à moins de 50 % ont pu bénéficier du chômage partiel et la taxe de séjour a chuté jusqu'à 40 %.

La compensation de cette perte est liée à la situation financière de la collectivité territoriale. Or, parfois, les recettes globales se sont maintenues, mais celles des offices de tourisme ont chuté fortement. Avez-vous prévu une mesure spécifique dans ce cas ?

Une compensation intégrale est-elle prévue pour les communes possédant un casino, souvent modeste ?

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Les communes touristiques sont parmi les plus touchées par la crise. Les pertes de taxe de séjour et de recettes de casino seront compensées. La base de calcul pour la taxe de séjour est l'année 2019, plus intéressante que la moyenne de 2017 à 2019.

Quelques 77 millions d'euros de dotations sont allés à des communes classées en stations de tourisme. Plus de la moitié des communes accueillant un casino ont bénéficié de la dotation pour un montant de 62 millions d'euros dont, dans votre région, Deauville, Bagnoles-de-l'Orne, Ouistreham et Trouville, notamment. Cherbourg n'est pas éligible car ses produits fiscaux de 2020 sont supérieurs à ceux de 2017-2019. Il n'y a donc pas de perte.

Quand l'office de tourisme perçoit directement la taxe de séjour, il n'y a pas de compensation à ce stade mais ce cas, assez rare, sera pris en compte dans le cadre du dispositif prévu par le PLFR pour les SPIC.

M. Jean-Michel Houllegatte.  - Il faut du cousu main pour répondre à chaque situation. Aujourd'hui, le filet de sécurité est à grosses mailles. Sortez plutôt le filet à crevettes !

M. Bernard Fournier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il est très difficile de connaître le coût de la crise pour les collectivités territoriales, tant les situations sont hétérogènes.

Les communes rurales ont été très touchées lorsqu'elles avaient une école ou un centre de loisirs du fait des protocoles sanitaires ; les communes touristiques aussi.

L'État a apporté des aides, mais insuffisantes. Il faudrait un soutien accru à l'investissement mais les appels à projet sont complexes et les élus des plus petites communes, qui n'ont pas l'ingénierie nécessaire, sont découragés. L'État doit les accompagner.

Quelle relance de l'investissement des communes rurales ? Comment simplifier leurs démarches ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - L'accroissement du soutien à l'investissement local est destiné à des projets écologiques, à la résilience sanitaire et au patrimoine. La DSIL a été augmentée de 950 millions d'euros pour finaliser des projets. Elle peut être cumulée avec la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR). Quelques 650 millions d'euros bénéficient au bloc communal pour des travaux de rénovation énergétique. Il est prévu d'accompagner les collectivités territoriales pour le montage des projets ; c'est le rôle des sous-préfets territoriaux. Les moyens sont mobilisés en ingénierie : les marchés de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) sont gratuits pour les communes de moins de 3 500 habitants et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de moins de 15 000 habitants. L'ingénierie doit être partagée au sein de l'EPCI.

Nous allons aussi réfléchir à la compensation pour les écoles.

M. Hussein Bourgi .  - La crise sanitaire a eu un impact direct sur les finances locales, mais aussi un impact indirect, en accroissant les difficultés des associations sportives et culturelles. Elles ont perdu des licenciés et des adhérents. Leur trésorerie s'est fortement dégradée et près de 30 000 associations pourraient ne pas survivre à la crise.

Le chômage partiel n'a pas pu aider les associations de bénévoles qui se tournent vers les collectivités territoriales pour obtenir des subventions, pesant ainsi sur des finances locales déjà fortement sollicitées. Quel dilemme pour les élus locaux ! En aidant les associations, ils alourdissent encore la facture locale.

Comment le Gouvernement entend-il aider les communes à sauver ces associations qui oeuvrent en faveur du lien social ?

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - J'ai déjà évoqué le problème central des pertes de recettes tarifaires. Les SPIC et les SPA seront compensés à hauteur de 200 millions d'euros grâce au PLFR.

Les plus petites collectivités, souvent en régie, sont les plus touchées.

Les associations peuvent bénéficier des aides accordées aux entreprises dans certaines conditions : fonds de solidarité, prêts garantis par l'État, chômage partiel pour les associations qui ont des salariés.

Le Sénat a autorisé, dans la deuxième loi de finances rectificative, le maintien des subventions en cas d'annulation d'un évènement - par dérogation au service fait. Cela aidera les associations à voir l'avenir avec plus d'optimisme.

M. Hussein Bourgi.  - J'attendais des avancées plus structurelles comme un chèque pour inciter à adhérer à une association sportive ou culturelle. Ne laissons pas l'habitude de participer à la vie associative se perdre.

M. Daniel Gueret .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Face à la crise sanitaire, trop souvent, les collectivités territoriales ont servi de tampon entre préfet et habitants.

Parfois, un travail admirable en faveur de la vaccination a été réalisé en commun. C'est le cas en Eure-et-Loir, de Chartes à Nogent-le-Rotrou, de Châteaudun à Senonches. Les élus ont mis à disposition leur personnel et recensé les besoins, tout en répondant aux exigences de l'État.

Ces collectivités territoriales assument une mission de service public, mais à quel prix ?

Chartres Métropole a déjà déboursé plus de 280 000 euros. Un bras de fer s'engage sur la signature d'une convention de refacturation puisque l'ARS remet maintenant en cause le remboursement de la location et le gardiennage du site.

Quelles aides pour faire face à cette dépense exceptionnelle alors qu'elle relève d'une compétence de l'État ?

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Les collectivités territoriales, en particulier les communes et les EPCI, ont soutenu l'État dans la mise en oeuvre de la politique de vaccination. Cela a un coût, évidemment.

Un groupe de travail a été mis en place avec les représentants des élus pour établir une doctrine de compensation.

Le fonds d'intervention régional (FIR) des ARS sera mobilisé pour les dépenses prises en charge par les collectivités territoriales. Les surcoûts seront compensés s'agissant de l'ouverture des centres, labellisés ou non, le week-end.

Les 50 000 euros sur six mois évoqués en février ne sont pas un plafond mais un fonds d'amorçage.

L'État est ainsi engagé aux côtés des collectivités territoriales, dont l'action est remarquable.

M. Philippe Mouiller .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Nombre de communes assument des pertes de recettes importantes liées aux annulations et modérations de loyers de commerces et autres locaux communaux dont elles sont propriétaires. En effet, l'État compense peu ces pertes.

Les régies de gestion des sites touristiques sont également affectées. Or elles ne bénéficient d'aucune aide. Dans les Deux-Sèvres, par exemple, de toutes petites communes gèrent des gîtes. Un soutien spécifique est-il prévu ?

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Le PLFR consacre 200 millions d'euros aux régies. Cela concerne des communes très différentes, qu'elles soient touristiques, rurales ou autres. Il s'agira d'une dotation budgétaire, non d'une avance remboursable, pour les SPIC comme les SPA.

La loi de finances initiale pour 2021 a prévu un prélèvement exceptionnel de 10 millions d'euros en faveur des communes qui renoncent à la perception de loyers.

M. Philippe Mouiller.  - Les 10 millions d'euros ne sont pas à la hauteur des besoins. Dans mon département, par exemple, les crédits ne sont pas au rendez-vous.

Il faudra être réactif pour distribuer les 200 millions d'euros que nous allons voter, notamment pour en faire bénéficier rapidement les plus petites communes. Il ne faudrait pas que les plus grandes passent en priorité.

M. Bruno Rojouan .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Dans la lutte contre la double crise sanitaire et économique, les collectivités territoriales ont pris leur part. C'est le cas de la région Auvergne Rhône-Alpes, avec 1 milliard d'euros pour protéger l'emploi. Cet engagement pour suppléer l'État n'a été, hélas, que très peu compensé.

J'espère que des mécanismes supplémentaires seront mis en oeuvre.

Dans l'Allier, la filière thermale est en crise. Les communes rurales sont particulièrement affectées. En effet, 70 % des établissements thermaux sont installés dans des communes de moins de 5 000 habitants.

Les casinos drainent 400 millions d'euros de recettes par an pour les collectivités territoriales, sans parler de la taxe de séjour. L'impact de la fermeture des établissements thermaux, des hôtels, des restaurants et des casinos dans les villes d'eau est considérable, mais le plan de relance ne prend guère en compte leur spécificité. Comment comptez-vous les accompagner ?

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Il n'y aura certes pas de dotation spécifique pour l'Allier, même si votre département est cher à mon coeur...

La prochaine loi de finances rectificative prévoit une compensation totale des pertes de recettes fiscales de 2020 et 2021.

Cela concerne le produit des jeux et la taxe de séjour. Quelque 4 068 communes et 51 EPCI ont déjà été compensés pour un montant total de 200 millions d'euros. Plus de la moitié des communes accueillant des casinos ont reçu des aides, pour un montant de 62 millions d'euros, dont certaines dans l'Allier.

L'État a aussi remboursé 215 millions d'euros d'achats de masques.

Le Gouvernement est conscient des difficultés des stations thermales. Elles bénéficieront des aides inscrites en faveur des régies dans le prochain projet de loi de finances rectificative et, pour certaines, du plan Avenir Montagnes.

Mme Elsa Schalck .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Après plus d'un an d'efforts contre la crise sanitaire, les élus locaux sont à nouveau en première ligne pour la vaccination. Dans le Bas-Rhin, on dénombre 26 centres de vaccination dont 18 portés par les collectivités territoriales.

Nos élus locaux fournissent un travail colossal avec un grand dévouement. Des agents ont été mobilisés mais des recrutements sont nécessaires pour accompagner la montée en charge de la campagne de vaccination. Tout cela engendre des coûts et les compensations annoncées - 50 000 euros sur six mois - sont insuffisantes. Les collectivités territoriales sont déjà asphyxiées par les baisses de dotations et les pertes de recettes. Mais partout, elles répondent présent. Rassurez les élus locaux et donnez-leur de la visibilité ! Le financement des centres doit être assuré au niveau nécessaire. Que comptez-vous faire et selon quel calendrier ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Joël Giraud, secrétaire d'État.  - Je n'ai pas toutes les réponses sur le FIR mis en place par le ministère de la santé mais je rappelle qu'il s'agit d'un fonds d'amorçage.

Les discussions se poursuivent pour améliorer la prise en compte des coûts. Les dépenses liées au personnel et au fonctionnement seront bien prises en compte. L'État se tiendra au côté des collectivités territoriales pour réussir la campagne de vaccination. Les centres de proximité font tous les jours la preuve de leur efficacité ! Le ministère de la santé prend bien en compte les spécificités des centres ruraux.

M. Jean-François Husson, pour le groupe Les Républicains .  - Oui, les communes ont été en première ligne face à la crise, partenaires loyales de l'État. Elles ont parfois suppléé certaines de ses carences. Elles ont souvent augmenté leurs dépenses sociales au bénéfice des plus précaires. Les départements ont vu leurs dépenses de RSA augmenter de 8 % en 2020. Cela a des conséquences sur les finances d'un tiers d'entre eux.

Communes, intercommunalités et régions ont pris des mesures de soutien économique.

Le coût pour les collectivités territoriales serait de l'ordre de 4 milliards d'euros selon le rapport Cazeneuve, dont 3 milliards d'euros de dépenses supplémentaires. La compensation par l'État est une question qui se pose nécessairement.

Rappelons que les collectivités territoriales n'ont pas la possibilité de s'endetter massivement, contrairement à l'État.

La commission des finances reste fidèle à sa position sur la compensation : privilégier la compensation des pertes de recettes plutôt que mettre en place des dispositifs généraux et automatiques de compensation des dépenses supplémentaires.

Le dysfonctionnement le plus important de l'État concerne les masques. L'État a failli. Heureusement, le Sénat a renforcé la compensation via le « filet de sécurité ».

Deux écueils doivent être évités. D'abord le catastrophisme, car la situation n'est pas aussi grave que certains l'avaient craint. Ensuite, croire que les difficultés sont derrière nous, ce qui est loin d'être le cas. Je pense par exemple aux régies, pour lesquelles les 200 millions d'euros évoqués ne suffiront pas. Nous devons veiller à préserver la capacité d'investissement des collectivités territoriales qui représentent 70 % de l'investissement public local. C'est essentiel pour l'avenir !

La prochaine loi de programmation des finances publiques devra intégrer le rôle des collectivités territoriales dans l'investissement public au service de la relance et d'un aménagement équilibré des territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

La séance est suspendue quelques instants.

Modification du Règlement du Sénat

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de résolution visant à améliorer le suivi des ordonnances, rénover le droit de pétition, renforcer les pouvoirs de contrôle du Sénat, mieux utiliser le temps de séance publique et renforcer la parité, présentée par M. Gérard Larcher, président du Sénat.

Discussion générale

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois .  - Cette proposition de résolution est le fruit des travaux du groupe de travail sur les méthodes de travail du Sénat, présidé par Gérard Larcher, qui a réuni tous les groupes politiques. Il a adopté 39 propositions sur le rapport de Mme Pascale Gruny. Quatorze d'entre elles nécessitent une modification de notre Règlement.

Le premier objectif poursuivi est d'améliorer le suivi des ordonnances. La proposition de résolution ajoute cette mission à celles des commissions permanentes. Saisies au fond, elles pourront aussi prononcer l'irrecevabilité des amendements présentés par les sénateurs contraires à l'article 38 de la Constitution. Enfin, l'information du Sénat sur la publication et la ratification des ordonnances sera renforcée.

Le deuxième objectif est de rénover les modalités d'exercice du droit de pétition, à la suite de l'expérimentation menée depuis janvier 2020. La Conférence des présidents devra statuer sur toute pétition ayant atteint un nombre donné de signatures sur la plateforme électronique. Par dérogation, elle pourrait également se saisir de pétitions n'ayant pas atteint ce seuil.

Le troisième objectif est de renforcer les pouvoirs de contrôle du Sénat. Un rapporteur sera nommé dans le cadre de la procédure de nomination prévue à l'article 13 de la Constitution.

L'attribution des prérogatives de commission d'enquête à une commission permanente ou spéciale quand le Sénat ne siège pas sera simplifiée.

Le plafond du nombre de membres des commissions d'enquête et missions d'information sera fixé à vingt-trois, avec une dérogation possible hors droit de tirage.

En outre, une question écrite restée sans réponse deviendra une question orale dont l'examen en séance publique sera accéléré.

Le quatrième objectif vise à mieux utiliser le temps de séance. C'est là que ça se gâte un peu... Les temps de parole de droit commun seront réduits, de 2 minutes 30 secondes à 2 minutes, et de 10 minutes à 3 minutes pour les motions de procédure n'émanant ni du Gouvernement, ni de la commission, ni d'un groupe politique.

La proposition de résolution supprime le renvoi en fin de tourniquet de l'orateur du groupe auquel appartient le rapporteur et allège l'examen du texte élaboré par une commission mixte paritaire.

Une nouvelle motion ad hoc sera créée pour permettre au Sénat de ne pas examiner un texte dans le cadre de l'article 11 de la Constitution sur le référendum d'initiative partagée.

Le cinquième objectif est d'assurer la parité au sein du Bureau du Sénat. Les listes présentées par les groupes devront s'efforcer d'assurer une répartition équilibrée des hommes et des femmes.

Ces dispositions pourraient entrer en vigueur le 1er octobre prochain, après contrôle du Conseil Constitutionnel.

La commission des lois a approuvé ces mesures, en leur apportant quelques aménagements.

La transmission du calendrier de publication des ordonnances portera sur le semestre, sans se limiter à la session ordinaire.

Sur les pétitions, nous avons approuvé l'exclusion de toute automaticité et veillé à préserver en toutes circonstances le pouvoir d'appréciation des instances du Sénat.

Quand le Sénat ne siège pas, il reviendra au président de la commission des lois d'examiner la demande d'une commission de bénéficier des prérogatives d'une commission d'enquête.

Enfin, la commission des lois a clarifié certaines dispositions, notamment sur les questions orales.

J'ai reçu la contribution de plusieurs collègues, présidents de groupe ou de commission. Je regrette que certains n'aient pas contribué - je le dis sans acrimonie.

Les amendements seront l'occasion d'approfondir le débat, même s'ils sont majoritairement contraires à la position de la commission.

M. Guillaume Gontard .  - Cette proposition de résolution est le fruit de plusieurs réunions de travail. Nous saluons la volonté de faire évoluer notre Règlement, mais cette réforme manque d'ambition et d'ouverture vers l'extérieur et l'opposition.

Je salue les améliorations techniques et de bon sens. L'explosion des ordonnances est le mal démocratique de notre temps. Il faudrait une révision complète de l'article 38 de la Constitution...

Le renforcement des pouvoirs de contrôle est intéressant. On reste loin, toutefois, de ce que devrait être un vrai contrôle parlementaire. Demain doit paraître le rapport du Gouvernement sur les exportations d'armes de la France et nous n'avons absolument aucun droit de regard sur la chose.

Il faudrait nous pencher sur les décrets d'application des lois que nous votons. Trop souvent, le Gouvernement y défait ce que nous avons inscrit dans la loi.

Le renforcement du droit de pétition est trop timide ; nos concitoyens sont avides de plus de participation démocratique ! Nous créerons surtout de la frustration. Il faut systématiser l'inscription à l'ordre du jour des textes. De qui avons-nous peur ? Je regrette que nous nous arrêtions au milieu du gué.

Mon groupe proposait d'augmenter le temps de parole de l'opposition. Nous votons un texte par semaine. C'est la garantie d'un travail mal fait. Cessons de nous presser, de légiférer dans l'urgence, de servir de faire valoir à la communication de l'exécutif. Les petits groupes seront fortement pénalisés par la réduction du temps de parole prévue, alors qu'il n'y a pas d'obstruction dans notre assemblée. Ce pourrait même être contre-productif, en incitant à multiplier les amendements pour augmenter les prises de parole.

Si aucun amendement n'est adopté à l'article 11, nous voterons contre la proposition de résolution. (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe SER)

M. Alain Richard .  - La concertation dont ce texte est le fruit a été globalement ouverte et constructive, malgré certains désaccords. Je salue le travail de synthèse de Mme Gruny, puis le travail de notre rapporteur.

Il est normal que le Règlement évolue modérément avec le temps. Du reste, je n'ai entendu personne réclamer une réforme d'ampleur.

Premier sujet que je souhaite aborder : les pétitions. Il est heureux que notre assemblée soit ouverte aux initiatives des citoyens, mais il est délicat d'adopter une règle générale qui s'applique à tous les cas. C'est pourquoi laisser un pouvoir d'appréciation à la Conférence des présidents parait sage. Le général de Gaulle avait refusé de convoquer l'Assemblée nationale en session extraordinaire à la suite d'une pétition des syndicats agricoles au motif que tout mandat impératif est nul.

Je suis également favorable aux modifications proposées sur le suivi des ordonnances : cela clarifie le processus et permet aux commissions du Sénat de mieux en analyser le contenu. Si l'ordonnance respecte l'objet de l'habilitation, il n'y a pas lieu de se quereller. En revanche, si l'exécutif interprète mal l'habilitation qui lui a été accordée, il est important que le Parlement puisse corriger rapidement le dérapage.

Enfin, s'agissant de la réduction à deux minutes de nos créneaux d'expression en séance publique, je n'oublie pas le travail préalable en commission. Dans tous les parlements, des dispositifs contraignent les débats dans le temps législatif disponible, souvent en limitant le droit d'amendement. La limitation du temps de parole en séance publique n'est donc pas un mauvais compromis, d'autant que son application sera appréciée par nos présidents de séance.

Mme Éliane Assassi.  - Vous venez de dépasser votre temps de parole ! (Rires)

M. Alain Richard.  - Nous savons qu'ils font preuve de discernement et ne coupent pas la parole aux orateurs.

Cette modeste réforme renforcera le dynamisme de nos débats, notre groupe votera pour. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Jean-Claude Requier .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Pendant plus d'un an, la vie de notre assemblée a perdu de sa vigueur : jauge réduite dans l'hémicycle, visio-conférences ad nauseam, tristes boîtes en carton pour déjeuner ou dîner... Ces bouleversements ne nous ont néanmoins pas empêchés de travailler sur une réforme de notre Règlement.

Le RDSE soutient certaines dispositions de cette proposition de résolution, notamment sur le suivi des ordonnances. Une telle évolution est d'autant plus souhaitable que le Gouvernement a beaucoup - et parfois trop - sollicité le Parlement pour l'habiliter à légiférer.

L'article 4 sur les pétitions est équilibré, entre reconnaissance du droit de pétition et liberté d'organisation du travail du Sénat. Le droit de pétition est intéressant, mais il doit être encadré et ne pas brouiller les mécanismes de la démocratie parlementaire.

En revanche, nous sommes plus réservés sur les dispositions relatives au temps de parole en séance publique. Pourquoi réserver, comme le prévoit l'article 10, à la seule Conférence des présidents le droit de demander le retour à la procédure normale concernant les CMP ? Chaque président de groupe devrait pouvoir refuser la procédure simplifiée.

La réduction des temps de parole constitue une atteinte excessive à notre liberté parlementaire, notamment pour les petits groupes dont le temps de parole en discussion générale est déjà fort limité. Nous avons déposé des amendements et espérons qu'ils corrigeront ces biais.

Chacun souscrit au principe de la parité, mais il est d'application délicate pour les petits groupes qui risquent d'y perdre leur liberté de choix. Notre groupe reste cependant volontaire pour avancer sur ces sujets.

Nous attendrons l'issue des débats pour nous prononcer sur ce texte. (Applaudissement sur les travées du RDSE)

Mme Éliane Assassi .  - Pour la troisième fois en six ans, nous modifions notre Règlement. Notre déception est forte, car il aurait fallu réfléchir aux moyens d'action de notre Parlement, abaissé par un exécutif tout-puissant.

Le président du Sénat nous rappelle que « le coeur du métier, c'est de faire la loi », mais en quoi cette proposition de résolution améliorera-t-elle la prérogative essentielle du Parlement ? En rien ! Le droit d'expression est rogné depuis 35 ans au nom de la rationalisation du travail parlementaire. Autant dire que débattre et amender ne seraient pas raisonnables...

À qui la faute si nous manquons de temps pour examiner les textes qui nous sont soumis ? Qui porte la responsabilité du calendrier parlementaire serré et de l'inflation législative ? Au pouvoir exécutif et sa frénésie législative, liée notamment aux normes européennes et à des textes de circonstance.

Nous avons tellement cédé que le sens même du débat se perd. Ce sont des échanges que naissent les équilibres. La majorité veut réduire de deux minutes trente à deux minutes le temps de parole en dehors des discussions générales et motions de procédure. Pourtant, en 2015 et en 2019, le Conseil constitutionnel avait émis des réserves sur la limitation du droit d'expression parlementaire.

Quelles leçons avez-vous tirées de l'affaiblissement de notre pouvoir depuis mars 2020 ? Quelle leçon tirez-vous de la crise politique en cours ? Souhaitez-vous que le débat soit réservé aux chaînes d'information en continu et aux réseaux sociaux ? Sans temps, c'est la dictature de l'instant !

Depuis des années, chacun se plaint de l'application excessive des irrecevabilités. Nous avons déposé plusieurs propositions de loi pour améliorer le droit d'amendement. L'exemple du débat budgétaire est frappant depuis la LOLF et l'application sévère de l'article 40. Il n'y a plus d'échange entre nous.

Cette proposition de résolution passe à côté de l'essentiel : il fallait riposter au projet constitutionnel d'Emmanuel Macron qui visait les prérogatives des assemblées en critiquant le manque d'efficacité et le temps perdu. Ensemble, nous avons combattu cette tentative dangereuse pour la démocratie. Il faut désormais redonner au débat parlementaire toute sa force.

Le contrôle des ordonnances ? D'accord, mais il faut encadrer l'article 38, voire le supprimer.

Enfin, pourquoi donner à la majorité sénatoriale un droit de vie ou de mort sur les pétitions ? Il faut desserrer cet étau.

Nous avons du mal à saisir le sens de cette énième réforme de nos méthodes de travail. Au bout du compte, nous assistons à une réaffirmation du fait majoritaire, assortie d'une nouvelle réduction des prérogatives parlementaires. Le groupe CRCE votera contre. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER)

M. Loïc Hervé .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Nous saluons l'initiative de Gérard Larcher d'avoir constitué un groupe de travail représentant toutes les sensibilités politiques pour réfléchir à la modernisation de nos méthodes de travail.

Cette proposition de résolution apporte des réponses concrètes aux problématiques récurrentes que nous rencontrons.

Les ordonnances se sont multipliées depuis l'arrivée d'Emmanuel Macron à l'Élysée puis avec la crise sanitaire. Cela confine à un Gouvernement par ordonnances, au détriment du Parlement. Aussi est-il plus que jamais nécessaire d'améliorer leur suivi. Le renforcement des prérogatives de nos commissions permanentes en la matière va dans le bon sens.

En tant que membre de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances, je suis également favorable à la disposition relative à la parité au sein du Bureau du Sénat : nous devons donner l'exemple.

De prime abord, j'ai été surpris de la réduction du temps de parole pour les explications de vote, les prises de parole sur article et la présentation des amendements. Mais cette évolution me semble inévitable et conforte, en creux, l'importance des travaux en commission, où le temps de parole est libre.

Je salue le travail de Pascal Gruny et de François-Noël Buffet.

Le groupe UC, membre de la majorité sénatoriale, votera cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Éric Kerrouche .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) « Cette proposition de résolution n'est pas un bouleversement de notre Règlement intérieur, il s'agit plutôt d'une suite d'ajustements », nous dit d'un ton patelin le président Buffet. Je n'y souscris pas.

Il y a certes eu concertation, mais ni compromis ni consensus. Aucune de nos propositions, sauf une, n'a été retenue.

Pourquoi avoir organisé cinq réunions pour aboutir à une résolution qui reprend les propositions initiales soumises au groupe de travail ?

Je n'aime pas quand un restaurant impose un menu unique. En l'espèce, nous vous suivons pour l'entrée, mais pas pour la suite du repas...

Le suivi des ordonnances va dans le bon sens - la jurisprudence du Conseil constitutionnel l'appelait. Mais cela ne doit pas cautionner les abus en la matière, symbole d'un affaiblissement du Parlement. Les ordonnances sont de plus en plus nombreuses - plus de 50 % des textes - et leur ratification de plus en plus rare. Or le délai d'adoption d'une loi est inférieur de 200 jours au délai moyen entre le dépôt d'une habilitation et la publication d'une ordonnance !

Nous sommes également favorables aux dispositions sur le renforcement des pouvoirs de contrôle du Sénat et sur le référendum d'initiative partagé.

J'en viens au plat de résistance que nous ne goûtons pas du tout.

Nous rejetons deux mesures : la diminution du temps de parole et la suppression du tourniquet. Ces ajustements ne sont pas anodins : ils traduisent un affaiblissement du droit de l'opposition et donc du Parlement, ce qui aura des conséquences sur la qualité de la loi. Doit-on devenir le Parlement de la vitesse ? Cette évolution ne fait que confirmer les dires d'Hartmut Rosa : notre société a un rapport pathologique au temps, c'est une aliénation dont il faut se défaire.

Le Sénat, prudent d'ordinaire, défend la qualité de la loi et la place du Parlement face à un exécutif qui abuse des procédures accélérées. Nous sommes déjà un des parlements les plus faibles des démocraties occidentales : au Bundestag, le temps de parole est limité à quinze minutes, au Sénat américain à vingt minutes ; à Westminster, le temps de parole du chef de l'opposition n'est pas limité.

La majorité sénatoriale souhaite que nous parlions toujours moins, alors même qu'il n'y a aucune possibilité de dévoyer l'usage de la parole dans notre assemblée. Le débat est essentiel pour que les idées s'affrontent, contribuant à l'élaboration d'une loi de qualité tout autant qu'à la santé démocratique.

Le Parlement prendrait trop de temps ? Alors pourquoi ne pas le rationaliser jusqu'à le faire disparaître ! Le Parlement doit-il être subordonné au désir de célérité de l'exécutif ? Cette modernisation de façade, calibrée pour la majorité sénatoriale, est un village Potemkine : elle renforce la majorité et affaiblit l'opposition.

Ainsi en est-il de la modification de la règle du tourniquet. Le plus souvent, le président de la commission et le rapporteur sont issus de la majorité. Ce sera ensuite un long tunnel si l'on enchaîne immédiatement avec des orateurs de la majorité.

Nous ne sommes pas dupes : le groupe Les Républicains se ménage de nouvelles marges de manoeuvre.

Les droits de l'opposition sont oubliés alors qu'ils auraient dû être renforcés et confortés, en lui attribuant par exemple la présidence de la commission des finances.

M. René-Paul Savary.  - C'est déjà le cas !

M. Éric Kerrouche.  - Cela ne dépend que de la bonne volonté du Président du Sénat.

Par souci d'équité, nous proposons la motivation des irrecevabilités soient justifiées, ainsi qu'un horodatage des amendements pour que le rapporteur respecte les délais limites.

La rénovation du droit de pétition est timide voire moins-disante par rapport à l'existant puisqu'on rehausse le seuil de signatures requis.

Zn 2019, Gérard Larcher faisait des propositions plus ambitieuses : nous avons repris certaines d'entre elles, elles n'ont pas été acceptées !

La parité est la cerise sur le mauvais gâteau. De l'affichage et peu de contraintes, avec le risque que le groupe majoritaire externalise la parité vers les autres groupes. À tout le moins, les présidences de commission devraient être paritaires.

Nos propositions n'ayant pas été acceptées, le groupe SER ne votera pas ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE)

Mme Vanina Paoli-Gagin .  - Ce texte, l'un des trois instruments de réforme de nos méthodes de travail, comprend quatorze mesures, majoritairement consensuelles.

L'amélioration du suivi des ordonnances renforce le pouvoir de contrôle du Parlement. Cette procédure n'a pas vocation à être banalisée ; nous devrons être vigilants. Nous sommes favorables à ce que les commissions puissent déclarer irrecevables les amendements parlementaires habilitant le Gouvernement à légiférer par ordonnance.

Nous soutenons aussi la mesure tendant à faciliter la transformation des questions écrites restées sans réponse en questions orales - le Gouvernement doit prendre ses responsabilités - et l'équilibre trouvé sur le droit de pétition.

Nous sommes aussi favorables à la parité au sein du Bureau.

Quant à la réduction du temps de parole, si nous comprenons l'objectif visé, nous nous inquiétons des conséquences sur la qualité de nos travaux et sur le fondement même de notre fonction. Cette disposition met en danger l'équilibre existant sans pour autant garantir une accélération des débats.

La proposition de résolution modifie également l'ordre des prises de parole lors d'une discussion générale. Le tirage au sort ne sera plus la règle, ld'orateur du même groupe que le rapporteur ne sera plus renvoyé en fin de discussion. Comme six autres groupes, nous nous opposons à cette réforme. Nous vous proposerons un amendement pour la supprimer.

Souvenons-nous de Camus : « la démocratie, ce n'est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité. » (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur diverses travées du groupe SER)

Mme Pascale Gruny .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il est bon que notre assemblée se penche régulièrement sur ses méthodes de travail et son mode de fonctionnement. Le président Larcher en a soin et a convoqué un groupe de travail dont j'ai eu l'honneur d'être rapporteur, qui a abouti à cette proposition de résolution.

Le recours aux ordonnances a pris une ampleur inédite au cours de cette législature, indépendamment de la crise sanitaire. Cette dérive n'a pas de vraie justification puisque les délais entre une demande d'habilitation et la parution de l'ordonnance sont en moyenne très supérieurs à ceux constatés pour l'adoption d'un projet de loi. Ainsi, une procédure exceptionnelle se banalise au détriment des droits du Parlement. Cette dérive est d'autant moins acceptable que pendant toute la durée d'une habilitation, le Parlement n'est plus autorisé à légiférer sur la matière législative déléguée.

En 2018, un précédent groupe de travail du Sénat proposait d'encadrer les délais de l'article 38. À défaut, il convient d'améliorer le suivi des ordonnances. Déjà, un tableau de bord des habilitations accordées est disponible et les commissions permanentes verront leurs pouvoirs de contrôle renforcés. La ratification de certaines ordonnances devra être soumise à débat parlementaire et le Gouvernement devra rendre compte régulièrement de l'usage fait des habilitations demandées.

L'obligation pour le Gouvernement de présenter à la Conférence des présidents, au début de chaque session ordinaire, un programme prévisionnel de publication des ordonnances et d'inscription à l'ordre du jour des projets de loi de ratification complète le dispositif.

Espérons que ces dispositions assureront un meilleur usage du recours aux ordonnances.

Le deuxième volet de cette réforme concerne les pétitions.

Le droit de pétition auprès du Parlement s'inscrit dans une tradition ancienne, mais il n'était plus utilisé et les dispositions le réglementant paraissaient largement obsolètes. On pouvait s'interroger sur l'intérêt de maintenir une telle procédure car bien d'autres moyens existent pour saisir directement les parlementaires.

Pourtant, dans certains pays et au Parlement européen - où j'ai siégé à la commission des pétitions -, le droit de pétition fonctionne efficacement.

L'article 4 modernise notre Règlement sur le sujet. Il reviendra au Bureau d'en définir les modalités d'exercice, notamment les conditions de recevabilité des pétitions. Ce partage entre Règlement et Instruction générale du Bureau apporte la souplesse nécessaire dans le cas où des ajustements mériteraient d'être apportés au dispositif. Les positions au sein du groupe de travail se sont avérées très diverses. Le groupe Les Républicains estime que le dispositif proposé est équilibré. Le seuil de passage devant la Conférence des présidents a été maintenu à 100 000 signatures, avec des dérogations possibles en fonction de l'intérêt du sujet ou du nombre de signataires. Le pouvoir d'appréciation des instances du Sénat est préservé. Il se dote ainsi d'un instrument de dialogue moderne, sûr et équilibré.

Notre groupe soutient aussi les modifications apportées aux temps de parole. Une présentation concise est souvent plus efficace que la lecture d'un texte rédigé... L'intérêt des débats tient à leur vivacité.

L'obligation de parité au sein du Bureau du Sénat va dans le bon sens. En octobre 2020, les groupes se sont organisés pour tendre à cette parité. Elle demeure cependant imparfaite. L'Assemblée nationale nomme une femme questeur depuis 2007, ce qui n'est jamais arrivé au Sénat... J'espère que la mesure prévue, même incitative, nous permettra de franchir ce pas à la prochaine mandature.

Le groupe Les Républicains votera cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Nathalie Goulet .  - Depuis quatorze ans que je siège ici, j'ai mesuré l'atrophie progressive du débat, notamment en loi de finances : deux minutes par-ci, trois minutes par-là pour les rapporteurs, c'est ridicule. Le débat n'est ni rationalisé, ni efficace.

Pour ce qui est de la réduction du temps de parole, il ne faut pas confondre débat en commission et en séance publique. Le public n'est pas le même : en séance publique, l'ensemble du Sénat est saisi du texte. Nos collègues doivent pouvoir s'exprimer, même s'ils n'appartiennent pas à la commission saisie au fond !

Le travail de contrôle est l'ADN du Parlement : augmentons le droit de tirage pour les commissions d'enquête et les missions d'information et renforçons le suivi des travaux de contrôle. Nos collègues du CRCE avaient initié une commission d'enquête sur la fraude fiscale : une fois le rapport rendu, rien n'a été fait ! Une délégation à la fraude fiscale serait bien plus utile qu'un temps de parole réduit. Voilà qui montrerait l'exemple à l'Assemblée nationale, sur un sujet éminemment citoyen !

Nos commissions d'enquête ont produit d'excellents travaux, trop peu exploités. Je pense en particulier à celle sur le Mediator, qui n'a hélas pas eu de suite.

Il faut être deux pour danser le tango : l'ordre du jour partagé, bonne idée de 2008, rend souvent les débats inintelligibles, à force d'être interrompus et saucissonnés, faute de souplesse dans l'organisation.

La modernisation de notre Règlement doit se poursuivre mais pas au détriment de la séance publique, ni des groupes minoritaires, ni des parlementaires minoritaires au sein de leur groupe...

J'attendrai le sort qui sera fait à mes amendements pour me prononcer sur la proposition de résolution. (Applaudissements sur quelques travées des groupeUC, INDEP, SER et CRCE)

M. Stéphane Le Rudulier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Je ne reviendrai pas sur les nombreuses modifications proposées par la proposition de résolution, brillamment exposées par Pascale Gruny et François-Noël Buffet.

J'insisterai sur le recours parfois abusif aux ordonnances prévues à l'article 38 de la Constitution. Le Gouvernement par ordonnance est devenu une marque de fabrique de l'exécutif, avec 264 ordonnances en quatre ans. Le record atteint sous François Hollande, avec 273 ordonnances, devrait prochainement être battu. (M. Jean-Pierre Sueur le confirme.) Nous avons la désagréable impression que la loi n'est plus le processus normal de législation. Les ordonnances sont devenues une manière de contourner le Parlement et de confisquer le pouvoir législatif. C'est d'autant plus inquiétant depuis le récent revirement de jurisprudence du Conseil Constitutionnel...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Hélas !

M. Stéphane Le Rudulier.  - ... qui aggrave la dépossession du Parlement : il suffira au Gouvernement de déposer des projets de loi de ratification à l'Assemblée nationale pour que ces ordonnances aient valeur législative !

Si nul n'a proposé d'abroger l'article 38, c'est qu'il a son utilité, notamment en cas d'urgence. Il faut néanmoins relativiser l'argument de la rapidité au regard du délai d'élaboration des ordonnances - 450 jours en moyenne, contre 177 jours pour la fabrique de la loi.

Il était important d'agir et la proposition de résolution franchit un premier pas en renforçant notre contrôle sur le suivi des ordonnances. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

L'article premier est adopté, de même que les articles 2 et 3.

ARTICLE 4

Mme la présidente.  - Amendement n°7, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéas 5, 6 et 7

Rédiger ainsi ces alinéas :

« Art. 88.  -  1.  -  Toute pétition ayant atteint un seuil de 50 000 signatures dans un délai de six mois est présentée à la Conférence des Présidents qui vérifie sa recevabilité.

« 2.  -  Toute pétition valide est transmise à la commission permanente compétente. Celle-ci désigne un rapporteur chargé d'en présenter le contenu et les enjeux et de proposer les suites à lui donner, sur lesquelles la commission permanente se prononce par un vote.

« 3.  -  Par dérogation, la Conférence des Présidents ou la commission permanente compétente peuvent décider de se saisir, dans des conditions définies par le Bureau, des pétitions n'ayant pas atteint le seuil défini par le Bureau. » ;

M. Éric Kerrouche.  - Avec cet article sur les pétitions, on donne l'apparence de la démocratisation mais sans opérationnalisation.

Ne doutons pas de la capacité de nos concitoyens à se saisir de thématiques pour les inscrire à l'agenda législatif. Cet amendement abaisse le seuil de signatures requis, tout en maintenant le périmètre d'appréciation du Sénat.

Une seule pétition a franchi le seuil de 100 000 signatures, largement inaccessible. Ouvrons-nous davantage aux citoyens, plutôt que de rester dans la demi-mesure que la majorité sénatoriale entend visiblement reconduire.

Mme la présidente.  - Amendement n°35 rectifié bis, présenté par MM. Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

I.  -  Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

II.  -  Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. 88.  -  1. Toute pétition atteignant un seuil de 300 000 signatures est automatiquement inscrite à l'ordre du jour d'une semaine sénatoriale dans un délai de trois mois.

M. Guillaume Gontard.  - Nous proposons l'inscription automatique à l'ordre du jour des pétitions recueillant plus de 300 000 signatures, pour une démocratie plus collaborative. Le système actuel est peu lisible et laisse le dernier mot à la Conférence des présidents.

C'est nous, in fine, qui débattons et tranchons ; c'est nous qui avons le dernier mot.

Nous soutiendrons bien sûr les amendements nos7 et 37, qui relèvent du même esprit.

Mme la présidente.  - Amendement n°37, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Seule une majorité des quatre cinquièmes en son sein peut s'opposer à l'examen par le Sénat d'une pétition.

Mme Éliane Assassi.  - Nous sommes favorables à l'extension du droit de pétition.

Hélas, nous ne connaissons pas les conditions de recevabilité qui seront appliquées par le Bureau. Pourquoi exclure les questions constitutionnelles ? Pourquoi confier à la Conférence des présidents, et donc à la majorité sénatoriale, le pouvoir d'appréciation ? Cela n'est pas cohérent avec le souhait d'ouverture démocratique.

Notre amendement inverse la règle : une pétition ne pourra être écartée qu'avec un consensus quasi-total de la Conférence des présidents.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable aux trois amendements.

Le président Larcher propose, quand le seuil fixé par le Bureau est atteint, un renvoi automatique à la Conférence des présidents, qui décide de la suite à donner à la pétition. En deçà de ce seuil, point d'automaticité, mais la Conférence peut néanmoins se saisir d'une pétition à laquelle elle trouve un intérêt : c'est elle qui décide.

M. Kerrouche propose de fixer dans le Règlement un seuil très bas, de 50 000 pétitionnaires. M. Gontard prévoit l'organisation automatique d'un débat à partir de 300 000 signatures. Mme Assassi propose, elle, qu'il faille une majorité qualifiée des quatre cinquièmes de la Conférence des présidents pour refuser de donner suite à une pétition.

Ce n'est pas le choix retenu par la proposition de résolution. Avis défavorable : nous préférons laisser toute latitude à la Conférence des présidents.

Mme Pascale Gruny.  - La pétition sur l'allocation aux adultes handicapés (AAH) a été acceptée par la Conférence des présidents, alors qu'elle n'avait pas atteint les 100 000 signatures. Cela illustre l'intérêt du principe de dérogation.

L'amendement n°7 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos35 rectifié bis et 37.

L'article 4 est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article 5

Mme la présidente.  - Amendement n°15, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Avant l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'alinéa 4 de l'article 13 du Règlement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ....  -  Ne peut être élu à la présidence de la commission des finances qu'un sénateur appartenant à un groupe s'étant déclaré d'opposition. »

M. Éric Kerrouche.  - Nous proposons de consacrer dans le Règlement l'usage qui prévaut depuis 2007 à l'Assemblée et depuis 2011 au Sénat, en vertu duquel la présidence de la Commission des finances revient à un membre d'un groupe d'opposition. En l'état actuel des choses, au Sénat, cette disposition ne tient qu'à la bonne volonté du Président, que je remercie. Cette procédure, initialement souhaitée par Nicolas Sarkozy, se généralise dans un grand nombre d'institutions. Inscrivons-la dans notre Règlement.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. Depuis quatorze ans, tous les présidents du Sénat ont respecté ce principe. Personne ne songe à remettre en cause cet usage, qui est devenu une évidence.

M. Éric Kerrouche.  - Verba volant, scripta manent... Mieux vaut écrire les règles, car la coutume n'est pas à l'abri de modifications unilatérales. Pourquoi refuser la formalisation par écrit ? Auriez-vous un doute sur la pérennité de cette règle ?

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le rapporteur, en réalité, a parfaitement défendu l'amendement puisqu'il assure ne songer nullement à remettre en cause cette excellente pratique. Nous devrions donc le voter à une large majorité !

M. Roger Karoutchi.  - J'ai présidé la commission des finances de la région Île-de-France en application de cette pratique, sous Jean-Paul Huchon ; c'est aujourd'hui une élue socialiste.

Le Sénat n'est pas une institution administrative mais une assemblée politique, avec des équilibres politiques. Actuellement, les choses se passent de manière naturelle, mais nul ne sait ce que seront l'Assemblée nationale ou le Sénat dans dix ans. Attention à ne pas imposer une situation qui ne serait pas acceptée par tout le monde.

M. Loïc Hervé.  - C'est une évidence !

Mme Éliane Assassi.  - Vous fonctionnez comme si la majorité devait le rester toujours... Or il peut se passer des choses dans notre pays, qui pourraient nuire à la démocratie. (Mme Nathalie Goulet renchérit.) Mieux vaut consacrer cette règle dans le Règlement plutôt que se contenter d'une coutume qui peut être bouleversée dans les années ou les mois à venir...

L'amendement n°15 n'est pas adopté.

L'article 5 est adopté.

ARTICLE 6

Mme la présidente.  - Amendement n°8, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 3, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

En dehors des jours où le Sénat tient séance, le Président du Sénat fait procéder à l'affichage de cette demande et la notifie au Gouvernement et aux présidents de groupes et de commissions.

M. Éric Kerrouche.  - Cet amendement prévoit qu'une demande de création d'une commission d'enquête donne systématiquement lieu à affichage et à notification au Gouvernement, aux présidents de groupe et de commission en dehors des jours où le Sénat tient séance.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - C'est le président du Sénat qui porte l'accord ou le désaccord ; il ne saurait y avoir d'automatisme. Avis défavorable.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Très bien !

L'amendement n°8 n'est pas adopté.

L'article 6 est adopté.

ARTICLE 7

Mme la présidente.  - Amendement n°34, présenté par MM. Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mmes Poncet Monge et Taillé-Polian et M. Salmon.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. 6....  -  Toute commission d'enquête, mission d'information ou groupe de travail doit comporter au minimum un membre de chaque groupe parlementaire. »

M. Guillaume Gontard.  - Il s'agit de renforcer les droits de l'opposition, en prévoyant que tout groupe de travail comprend au moins un membre de chaque groupe, ce qui n'est pas toujours le cas. Ainsi, le GEST a été écarté de plusieurs groupes de travail de la commission des affaires économiques - suivi d'EGalim, nouvelles formes de commerce, assurance-récolte... Nous nous en sommes émus sans succès ; on nous a opposé notre faiblesse numérique.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Votre amendement est satisfait pour ce qui est des commissions d'enquête, en application de l'ordonnance de 1958, et des missions d'information, en application de l'article 21 du Règlement et de l'article 7 de la présente proposition de résolution. S'agissant des groupes de travail, l'usage des commissions est de nommer un binôme de rapporteurs issus de la majorité et de l'opposition ; les auditions sont ouvertes à tous les commissaires. Retrait ou avis défavorable.

M. Guillaume Gontard.  - Le problème demeure pour les groupes de travail.

L'amendement n°34 n'est pas adopté.

L'article 7 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 7

Mme la présidente.  - Amendement n°4, présenté par Mme N. Goulet.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l'alinéa 1 de l'article 6 bis du Règlement, le mot : « ou » est remplacé par le mot : « et ».

Mme Nathalie Goulet.  - Je souhaite un droit de tirage annuel pour chaque groupe politique pour une commission d'enquête et une mission d'information, afin de renforcer notre fonction de contrôle - même si je ne me fais guère d'illusions...

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Le groupe de travail a déploré la multiplication des missions de contrôle : pas moins de 120 en 2020 ! Retrait ou avis défavorable.

Mme Nathalie Goulet.  - Un groupe de travail ou une mission flash, ce n'est pas tout à fait la même chose qu'une mission d'information. Je retire néanmoins l'amendement.

L'amendement n°4 est retiré.

Les amendements nos30 et 31 ne sont pas défendus.

Mme la présidente.  - Amendement n°6 rectifié, présenté par Mme N. Goulet.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 8 ter du Règlement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« .... - Lorsqu'une commission parlementaire dotée des prérogatives des commissions d'enquête fait procéder lors de ses auditons à une prestation de serment, le bureau de ladite commission peut être saisi et est compétent pour engager des poursuites sur la base de l'article 434-13 du code pénal. Si les faits donnant lieu au déclenchement des poursuites sont découverts postérieurement à la fin des travaux de la commission d'enquête et à la remise de son rapport, le président et le rapporteur de ladite commission d'enquête peuvent saisir le bureau du Sénat aux fins de poursuites. Si la découverte des faits est postérieure à un renouvellement du Sénat, le bureau du Sénat est compétent pour déclencher des poursuites éventuelles. »

Mme Nathalie Goulet.  - Il est arrivé que certaines personnes auditionnées par une commission d'enquête violent le serment prononcé devant celle-ci. Le président et le rapporteur doivent pouvoir engager des poursuites pour faux témoignage, compte tenu de leur connaissance du sujet. Dans l'hypothèse où les faits seraient révélés après le renouvellement du Sénat, le Bureau serait alors compétent.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Cet amendement est contraire à l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 qui prévoit que les poursuites en cas de faux témoignage sont engagées à la requête du président de la commission ou du Bureau si le rapport a été publié. Avis défavorable.

L'amendement n°6 rectifié n'est pas adopté.

L'article 8 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 8

Mme la présidente.  - Amendement n°39, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'alinéa 5 de l'article 16 du Règlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsqu'une proposition de loi est examinée dans le cadre d'un ordre du jour réservé à un groupe de l'opposition ou minoritaire, le rapporteur en est membre, sauf décision contraire du groupe. »

Mme Éliane Assassi.  - Lorsqu'un groupe d'opposition ou minoritaire inscrit une proposition de loi dans son espace réservé, il serait logique que le rapporteur désigné soit issu du groupe concerné. C'est d'ailleurs ce que font plusieurs commissions. Pourquoi la majorité s'arc-boute-t-elle, alors qu'elle garde toute latitude pour adopter ou rejeter le texte ?

Mme la présidente.  - Amendement n°16, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'alinéa 5 de l'article 16 du Règlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les propositions de lois inscrites à l'ordre du jour à l'initiative d'un groupe d'opposition ou d'un groupe minoritaire, le rapporteur est désigné parmi les membres du groupe de l'auteur du texte, si le Président de ce groupe en fait la demande. »

M. Éric Kerrouche.  - Cette pratique en vigueur dans certaines commissions doit être généralisée.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Nous voulons éviter que le rapporteur de la commission ne soit systématiquement battu, alors que le texte n'a guère de chance d'aboutir. Lorsque le texte est susceptible de prospérer, nous veillons à ce qu'il soit confié à un collègue du même groupe que son auteur.

La rigidité n'est pas souhaitable. Je rappelle en outre que la commission ne modifie pas le texte d'une proposition de loi sans l'accord de son auteur, selon notre gentlemen's agreement. Avis défavorable.

L'amendement n°39 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°16.

Mme la présidente.  - Amendement n°17, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 15 ter du Règlement est ainsi rédigé :

« Art. 15 ter. - 1.  -  Les travaux des commissions sont publics.

« 2.  -  Un compte rendu détaillé des réunions des commissions est publié chaque semaine.

« 3.  -  Les auditions des rapporteurs sur les projets ou propositions de loi sont ouvertes à l'ensemble des commissaires.

« 4.  -  Chaque commission peut décider de déroger à l'alinéa 1 à la demande du Premier ministre, de son président ou d'un dixième de ses membres, à l'exception des travaux prévus au chapitre XIV bis. Elle peut ensuite décider de la publication du compte rendu de ses débats au Journal officiel. »

M. Éric Kerrouche.  - La publicité des travaux des commissions doit être de droit. C'est la moindre des choses sur le plan démocratique.

Mme la présidente.  - Amendement n°19, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'alinéa 1 de l'article 15 ter du Règlement est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Tout sénateur membre d'une commission peut demander au Président de la commission une rectification du compte rendu dans les soixante-douze heures suivant sa publication. Tout refus est motivé par écrit. »

M. Éric Kerrouche.  - Défendu.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. La règle est que les commissions se réunissent à huis clos, mais les auditions ou les tables rondes sont généralement captées et diffusées. C'est aux commissions de décider des modalités de publicité. Quant au droit de rectification d'un compte rendu, il est déjà assuré.

M. Éric Kerrouche.  - Les corrections ne sont pas possibles pour les comptes rendus de CMP. J'ai été confronté à ce problème, d'où cet amendement n 19.

L'amendement n°17 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°19.

Mme la présidente.  - Amendement n°13, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 13 ter du Règlement, il est inséré un article 13 ... ainsi rédigé :

« Art. 13 ....  -  Lorsque le président de la commission décide que la réunion de la commission se tient pour tout ou partie par visioconférence ou, à défaut, en audioconférence, le quorum ainsi que les votes sont appréciés par appel nominal, en fonction de la présence des membres dans le lieu de réunion mais également de ceux présents à distance. »

M. Éric Kerrouche.  - La révision du Règlement tirait les enseignements de la crise sanitaire, qui a conduit à adapter notre fonctionnement. Nous proposons ici que, lorsque la réunion de commission se tient en visioconférence, le vote par appel nominal soit autorisé. Cela se pratique pour les assemblées délibérantes des collectivités territoriales et n'entame en rien la sincérité du vote.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. En situation de crise, nous préférons le vote par procuration, classique, au vote à distance. Le président du Sénat a toujours dit son opposition à un Parlement virtuel.

L'amendement n°13 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°27 rectifié, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Règlement est ainsi modifié :

1° La première phrase de l'alinéa 7 de l'article 29 bis est complétée par les mots : « ou une proposition de résolution se rapportant au débat de contrôle en commission défini au chapitre XV bis » ;

2° Après le chapitre XV, il est inséré un chapitre XV bis ainsi rédigé :

« Chapitre XV bis

« Débat en commission

« Art. ....  -  1.  -  À la demande d'un groupe politique, d'une commission, de la commission des affaires européennes ou d'une délégation, la Conférence des Présidents peut proposer au Sénat d'organiser un débat d'initiative sénatoriale avec questions, uniquement en commission.

« 2.  -  Les sénateurs et le Gouvernement sont immédiatement informés de la date de réunion consacrée au débat.

« 3.  -  L'ensemble des sénateurs peut participer à la réunion et interroger le Gouvernement.

« 4.  -  Le débat fait l'objet d'un compte-rendu détaillé publié au Journal officiel.

« Art. ....  -  1.  -  Le débat se déroule sous la présidence du président de la commission compétente.

« 2.  -  Le débat est ouvert par le représentant de l'auteur de la demande de débat en commission. Son intervention ne peut excéder cinq minutes.

« 3.  -  Chaque sénateur peut prendre la parole autant de fois qu'il le souhaite. Chacune des prises de parole ne peut excéder deux minutes et demie, réplique comprise.

« 4.  -  La parole est donnée à tous les orateurs en appelant successivement un orateur de chaque groupe ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe dans l'ordre du tirage au sort prévu à l'alinéa 5.

« 5.  -  Au début de chaque session ordinaire, les présidents des groupes et le délégué des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe déterminent, par voie de tirage au sort, l'ordre dans lequel seront classés leurs orateurs au sein de chaque série, pour le premier débat en commission faisant l'objet d'une organisation. Lors de chaque débat en commission organisé ultérieurement, cet ordre est décalé d'un rang, de telle sorte que chaque groupe soit classé au rang immédiatement supérieur, le groupe placé antérieurement en tête prenant la dernière place.

« Art. ....  -  1.  -  À la suite de ce débat, l'auteur de la demande de débat en commission peut proposer d'inscrire à l'ordre du jour une proposition de résolution en application de l'article 34-1 de la Constitution. Elle se rapporte au thème du débat tenu en commission.

« 2.  -  Cette propositions de résolution est soumise aux règles de recevabilité prévues au chapitre XVI du présent Règlement.

« 3.  -  Son examen se déroule lors des semaines de séance réservées par priorité au contrôle de l'action du Gouvernement et à l'évaluation des politiques publiques. »

M. Éric Kerrouche.  - Des débats de contrôle pourraient se dérouler en commission, sur le modèle de la législation en commission (LEC). Je sais que la présidente Gruny y travaille, et que le président Larcher n'y est pas fermé. Les débats seraient plus interactifs et sans doute plus satisfaisants que nos débats de contrôle actuels.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Les présidents de commission peuvent déjà convoquer les ministres ; ces débats en commission existent déjà, au surplus sans limite de temps. Avis défavorable.

Mme Éliane Assassi.  - Par cohérence, nous ne voterons pas cet amendement, étant opposés à la législation en commission - même si je reconnais que je n'use guère de mon droit de véto !

À force de législation et de débats de contrôle en commission, à quoi la séance publique servira-t-elle encore ? (M. François-Noël Buffet, rapporteur, approuve.)

M. Roger Karoutchi.  - Soyons honnêtes : les débats de contrôle actuels n'intéressent que les présents...

Mme Éliane Assassi.  - C'est vrai.

M. Roger Karoutchi.  - Mais c'est le système de contrôle lui-même qu'il faut changer. Déplacer le débat en commission n'arrangera rien. Et permettre à chacun d'intervenir sans limite rendra ces séances insupportables ! Réfléchissons à un autre modèle de contrôle, au lieu de transférer le problème aux autres.

L'amendement n°27 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°21, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'alinéa 7 de l'article 29 bis du Règlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Au début de chaque session ordinaire, la Conférence des Présidents détermine les règles relatives à l'inscription à l'ordre du jour des débats d'initiative sénatoriale de sorte à garantir un traitement équitable entre les groupes politiques. »

M. Éric Kerrouche.  - L'article 29 bis du Règlement prévoit que la Conférence des présidents peut inscrire à l'ordre du jour un débat d'initiative sénatoriale à la demande d'un groupe, d'une commission, d'une délégation. Je propose qu'au début de chaque session ordinaire, elle fixe les règles et critères encadrant le choix des débats de contrôle afin d'assurer un traitement équitable entre les groupes politiques.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Votre amendement est satisfait par l'alinéa 7 de l'article 29 bis. En pratique, les demandes des groupes sont satisfaites. Retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°21 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°23, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 6 ter du Règlement, il est inséré un article 6... ainsi rédigé :

« Art. 6....  -  Chaque groupe a droit à la mise en ligne sur le site Internet du Sénat d'une consultation des élus locaux par année parlementaire. Au début de chaque session ordinaire, la Conférence des présidents en détermine les modalités.

« La demande est formulée au plus tard une semaine avant la réunion de la Conférence des Présidents qui doit en prendre acte. En cas de demandes concurrentes portant sur un même sujet, priorité est donnée au groupe ayant transmis en premier sa demande.

« À l'issue de la consultation, le groupe politique à son initiative décide des suites à lui donner. Si la consultation donne lieu, dans les trois mois, à une proposition de loi ou à une proposition de résolution, son inscription à l'ordre du jour du Sénat est de droit si le groupe le demande. »

M. Éric Kerrouche.  - Cet amendement crée un nouveau droit de tirage qui permettrait à chaque groupe politique de mettre en ligne sur le site internet du Sénat une consultation des élus locaux. Lorsque cette consultation donne lieu au dépôt d'une proposition de loi ou de résolution, celle-ci est inscrite à l'ordre du jour du Sénat à la demande du groupe qui en est à l'initiative.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - La plateforme de consultation des élus locaux est un outil institutionnel au service du Sénat, pas des groupes ou des partis politiques. Avis défavorable.

M. Éric Kerrouche.  - Cette explication ne tient pas : c'est un outil du Sénat, non de la majorité du Sénat. Chaque groupe devrait pouvoir lancer une consultation d'élus locaux.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Les commissions et les délégations utilisent ce moyen de communication : c'est un outil institutionnel, et non politique.

M. Roger Karoutchi.  - Je ne comprends même pas cet amendement. Toutes les collectivités, toutes les institutions ont un site internet pour communiquer. Les groupes politiques peuvent avoir leur propre outil de communication ou de consultation. Attention au mélange des genres !

L'amendement n°23 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°5 rectifié, présenté par Mme N. Goulet.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 50 quater du Règlement est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« ...  -  Lors du débat, la Conférence des Présidents s'assure que toutes les opinions peuvent être entendues, y compris les positions défavorables à la résolution. 

« ...  -  S'ils n'ont pu s'exprimer lors de la discussion générale, les orateurs opposés à la résolution disposent d'un temps d'explication de vote de deux minutes et demie chacun. »

Mme Nathalie Goulet.  - Lors du vote de résolutions, il n'est pas rare que la discussion générale vaille explication de vote, avec un seul orateur par groupe.

Je me souviens d'un débat sur la Palestine lors duquel il avait fallu ouvrir des rappels au Règlement valant explications de vote. Sur le Nagorny-Karabakh, il n'y avait même pas eu cette possibilité. Pour ma part, j'étais contre...

M. Patrick Kanner.  - Vous étiez la seule !

Mme Nathalie Goulet.  - Peut-être, mais j'aurais voulu pouvoir m'exprimer !

Cet amendement permet d'ouvrir les explications de vote quand il y a des opinions divergentes.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - La Conférence des présidents peut décider que les interventions des orateurs en discussion générale valent explication de vote - c'est l'article 34-1 de la Constitution. Mais chaque groupe peut organiser ses interventions comme il le souhaite. Avis défavorable.

Mme Nathalie Goulet.  - On peut avoir raison contre tous... Je retire néanmoins mon amendement. (Sourires)

L'amendement n°5 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°22, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Règlement du Sénat est ainsi modifié :

1° L'alinéa 1 de l'article 17 bis est complété par une phrase ainsi rédigée : « Chaque amendement ou sous-amendement mentionne la date et l'heure auxquelles il a été transmis au secrétariat de la commission compétente. » ;

2° Après l'alinéa 2 de l'article 44 bis, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 2....  -  Chaque amendement ou sous-amendement mentionne la date et l'heure auxquelles il a été transmis à la direction de la Séance. »

M. Éric Kerrouche.  - Afin de vérifier le respect des dispositions relatives aux délais de dépôt des amendements, nous proposons que ceux-ci soient horodatés.

Il y a parfois des problèmes. Ainsi, des amendements des rapporteurs sur le projet de loi Climat ont été déposés ce week-end, bien après le délai limite. Chacun doit respecter la règle !

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Cela ne relève pas du Règlement. En outre, il existe déjà un horodatage des amendements. Avis défavorable.

L'amendement n°22 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°52, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'alinéa 3 de l'article 44 bis du Règlement est ainsi modifié :

1° Les mots : « effectivement au texte » sont remplacés par les mots : « au projet de loi ou à la proposition » ;

2° Après le mot : « visent », la fin de cet alinéa est ainsi rédigé : « . Ils sont recevables en première lecture s'ils présentent un lien, même indirect, avec le projet ou la proposition en discussion. »

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre ...

Des procédures d'irrecevabilité

M. Gérard Lahellec.  - On observe une dérive inquiétante dans le maniement des irrecevabilités.

Le droit d'amendement est une prérogative constitutionnelle majeure - écornée par l'application de l'article 45 la Constitution.

D'année en année, la recevabilité des amendements a été réduite au nom du combat contre les cavaliers ; or la question du lien avec le texte est une notion subjective.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Retrait ou avis défavorable. Notre débat ne porte pas sur l'article 45 de la Constitution. Sur le fond, je ne vois pas ce que votre rédaction apporte. Si l'on veut avoir un débat sur l'article 45, c'est autre chose...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Ayons ce débat sur l'article 45 !

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Pas ici...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il est très nécessaire.

Le groupe CRCE propose d'écrire dans le Règlement ce que dit la Constitution : sont recevables les amendements qui ont un rapport « même indirect » avec le texte.

Le laïus que nous inflige le pauvre rapporteur sur le périmètre « autorisé » n'est pas conforme à la Constitution : un amendement ayant un rapport « même indirect » doit être recevable.

M. Roger Karoutchi.  - Je reconnais la subtilité du questeur Sueur... Ce n'est pas l'article 45 que vous inscrivez dans le Règlement, mais une interprétation !

Pour en avoir été victime, je partage votre souhait de mener une réflexion sur l'article 45 pour élargir les pouvoirs du Parlement - mais pas au détour d'un amendement au Règlement du Sénat.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je partage votre position.

M. Gérard Lahellec.  - Ce débat devra avoir lieu.

L'amendement n°52 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°40, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 44 bis du Règlement est ainsi modifié :

1° Après les mots : « d'irrecevabilité », la fin de l'alinéa 9 est ainsi rédigée : « soumise à la décision du Sénat. Seul l'auteur de la demande d'irrecevabilité, un orateur d'opinion contraire, la commission et le Gouvernement peuvent intervenir. Aucune explication de vote n'est admise. » ;

2° L'alinéa 10 est abrogé.

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre ...

Des procédures d'irrecevabilité

M. Gérard Lahellec.  - L'arbitraire prévaut en matière d'irrecevabilité. Si celle-ci peut parfois ne pas avoir été soulevée au moment du dépôt de l'amendement, c'est qu'elle n'est pas évidente. Dès lors, le débat est nécessaire.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. Laissons aux commissions la faculté d'appliquer l'article 45. Le nombre d'amendements ainsi rejetés est modeste ; en outre, ces amendements sont publiés et connus de tous.

L'amendement n°40 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°46 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la deuxième phrase de l'article 44 ter du Règlement, les mots : « aux amendements de la commission saisie au fond ou du Gouvernement, ni » sont supprimés.

M. Gérard Lahellec.  - Nous voulons restreindre le dépôt à tout moment d'amendements des rapporteurs et du Gouvernement en séance publique.

Cette pratique du Gouvernement illustre le déséquilibre entre législatif et exécutif. Le président Larcher souhaite faire du Sénat un contre-pouvoir - ce n'est pas compatible avec ces pratiques injustifiables, qui nous obligent à légiférer au doigt mouillé, sans avoir le temps d'examiner ces amendements.

Le Gouvernement doit être astreint aux mêmes règles pour le dépôt des amendements !

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Votre amendement est contraire à l'article 13 de la loi organique du 15 avril 2009 qui prévoit expressément que le délai limite de séance ne s'applique pas au Gouvernement et à la commission saisie au fond. Au demeurant, il serait inconstitutionnel. Avis défavorable.

L'amendement n°46 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°20 rectifié, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Règlement est ainsi modifié :

1° L'article 17 bis est ainsi modifié :

a) L'alinéa 2 est ainsi rédigé :

« 2.  -  La commission est compétente pour se prononcer sur la recevabilité des amendements et sous-amendements. Vingt-quatre heures au moins avant la réunion de la commission, le Président de la commission communique la liste des amendements dont il propose l'irrecevabilité au regard de l'article 40 de la Constitution et des dispositions organiques relatives aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale, le cas échéant après communication au président de la commission des finances qui rend un avis motivé, et des autres irrecevabilités, à l'exception de celle fondée sur l'article 41 de la Constitution. À titre exceptionnel, le Bureau de la commission peut décider de déroger à ce délai. Toute proposition d'irrecevabilité est motivée. La commission se prononce par un vote sur la recevabilité des amendements. » ;

b) L'alinéa 4 est ainsi rédigé :

« 4.  -  La commission détermine son avis sur les amendements déposés sur le texte qu'elle a proposé avant le début de leur discussion par le Sénat. Sans préjudice de l'application des articles 40 et 41 de la Constitution, des dispositions organiques relatives aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale, ainsi que de l'article 45 du présent Règlement, vingt-quatre heures au moins avant la réunion de la commission saisie au fond, le Président de la commission communique la liste des amendements dont il propose l'irrecevabilité. À titre exceptionnel, le Bureau de la commission peut décider de déroger à ce délai. Toute proposition d'irrecevabilité est motivée. La commission se prononce par un vote sur la recevabilité des amendements. » ;

2° Après l'alinéa 4 de l'article 45, il est inséré un alinéa 4... ainsi rédigé :

« 4....  -  Tout sénateur peut contester en séance, à propos d'un amendement dont il est l'auteur, une déclaration d'irrecevabilité fondée sur l'article 40 de la Constitution, sur la loi organique relative aux lois de finances ou sur l'article L. O. 111-3 du code de la sécurité sociale. En cas de désaccord entre la commission des finances ou la commission des affaires sociales et le Gouvernement, l'assemblée se prononce sur la déclaration d'irrecevabilité. »

M. Éric Kerrouche.  - Le président de la commission saisie au fond devra communiquer la liste des amendements dont il propose l'irrecevabilité vingt-quatre heures au moins avant la réunion de la commission, en la motivant.

En séance, tout sénateur doit pouvoir contester une déclaration d'irrecevabilité. Il revient alors à l'assemblée de se prononcer sur celle-ci, sauf en cas d'accord entre la commission des finances ou des affaires sociales et le Gouvernement.

Ces irrecevabilités amputent notre capacité d'initiative.

Mme la présidente.  - Amendement n°38, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 17 bis du Règlement est ainsi modifié :

1° À la deuxième phrase de l'alinéa 1, les mots : « applicable, ni aux amendements du Gouvernement, ni » sont remplacés par les mots : « pas applicable » ;

2° À la troisième phrase de l'alinéa 2, le mot : « ne » et le mot : « pas » sont supprimés.

Mme Marie-Claude Varaillas.  - Dans Le Prince, Machiavel montre comment acquérir et conserver le pouvoir.

Laisser le Gouvernement déposer à tout moment des amendements revient à se reposer sur les « vertus » de nos gouvernants. Or, les moyens du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif sont bien inégaux : quelque 1,9 million de fonctionnaires contribuent à l'élaboration des textes, sans compter les 324 collaborateurs de cabinet... Et le temps de parole du Gouvernement n'est pas limité. Les privilèges des puissants suscitent la frustration, la volonté des gouvernants s'impose aux gouvernés et à leurs représentants.

Que le Gouvernement cesse de déposer des salves d'amendements au dernier moment et qu'il respecte les règles communes en la matière !

Mme la présidente.  - Amendement n°18 rectifié, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Règlement est ainsi modifié :

1° La troisième phrase de l'alinéa 2 de l'article 17 bis est supprimée.

2° La seconde phrase de l'alinéa 1 de l'article 45 est supprimée.

M. Éric Kerrouche.  - Cet amendement supprime la règle selon laquelle les amendements déclarés irrecevables ne sont pas mis en distribution. Les citoyens doivent pouvoir en prendre connaissance.

Mme la présidente.  - Amendement n°42, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La seconde phrase de l'alinéa 1 de l'article 45 du Règlement est supprimée.

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre ...

Des procédures d'irrecevabilité

Mme Éliane Assassi.  - Défendu

Mme la présidente.  - Amendement n°41, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La seconde phrase de l'alinéa 1 de l'article 45 du Règlement est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Le Président de la commission, par un avis écrit et précisément motivé, avertit l'auteur de l'amendement potentiellement irrecevable. Une nouvelle rédaction conforme à l'article 40 de la Constitution peut être présentée soit une heure avant l'examen du rapport en commission, soit à l'ouverture de la discussion générale en séance publique. »

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre ...

Des procédures d'irrecevabilité

Mme Marie-Claude Varaillas.  - Avant la loi organique relative aux lois de finance (LOLF), il nous était proposé, avant la déclaration d'irrecevabilité, de modifier nos amendements pour échapper aux fourches caudines de l'article 40. Nous proposons de revenir à une pratique plus souple, sachant que la rédaction peut sans doute être améliorée.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. La jurisprudence du Conseil Constitutionnel impose un contrôle de la recevabilité financière « effectif et systématique » au moment du dépôt des amendements. Les amendements nos20 rectifié, 18 rectifié et 42 vont à l'encontre de cette jurisprudence.

L'amendement n°20 rectifié est satisfait en pratique s'agissant de l'irresponsabilité au titre de l'article 45.

L'amendement n°41 rigidifie inutilement les choses : une certaine souplesse existe déjà au sein de la commission des finances.

L'amendement n°38 sur le délai applicable au Gouvernement est contraire à la Constitution.

Sachez que sur l'année 2015-2016, 103 amendements ont été jugés irrecevables au titre de l'article 45 ; 146 en 2016-2017, 80 en 2017-2018, 388 en 2018-2019 et 144 en 2019-2020, sur environ 10 000 amendements déposés.

M. Roger Karoutchi.  - Tous ces amendements, sauf le 41, supposent une révision de la Constitution. Ce n'est pas le lieu...

L'amendement n°41, en revanche, est intéressant : le président de la commission des finances pourrait avoir un contact informel avec l'auteur de l'amendement pour le conseiller sur la bonne rédaction.

L'amendement n°20 rectifié n'est pas adopté non plus que les amendements nos38, 18 rectifié, 42 et 41

Mme la présidente.  - Amendement n°44, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase de l'alinéa 7 de l'article 45 du Règlement, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « Si l'irrecevabilité est constatée, elle doit être présentée à l'auteur de l'amendement par courrier comportant une argumentation. Cette irrecevabilité est susceptible de recours. »

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre ...

Des procédures d'irrecevabilité

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Il s'agit de renforcer le respect de l'initiative parlementaire.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Aucune exigence constitutionnelle n'impose un recours au sein de l'assemblée. Avis défavorable.

L'amendement n°44 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°43, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les deux premières phrases de l'alinéa 8 de l'article 45 sont remplacées par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque l'irrecevabilité est invoquée en séance publique, un débat a lieu auquel peut prendre part l'auteur de la demande ou son représentant, un orateur d'opinion contraire et, éventuellement, le Gouvernement. »

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre ...

Des procédures d'irrecevabilité

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Cet amendement rétablit le débat contradictoire lorsqu'est invoqué l'article 40 - véritable chape de plomb, renforcée par la LOLF, sous la pression de Bruxelles. Le Gouvernement n'a plus de marge de manoeuvre, il soumet son projet de loi de finances à la Commission européenne avant même le débat parlementaire... Cela doit bouger, c'est une question de survie démocratique ! La crise sanitaire a fait voler en éclat les critères de déficit public, continuons dans cette voie !

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. C'est une compétence constitutionnelle confiée au seul président du Sénat.

L'amendement n°43 n'est pas adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article 9

Mme la présidente.  - Amendement n°14, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Avant l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'alinéa 5 de l'article 29 bis du Règlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation à l'article 32, alinéa 3, la durée globale du temps dont disposent les groupes d'opposition et groupes minoritaires est calculée selon le principe suivant : un jour de séance équivaut à la somme des heures correspondant aux séances du matin, de l'après-midi et du soir. »

M. Éric Kerrouche.  - L'argument du rapporteur est spécieux. La commission prévoit un jour de séance par mois pour les groupes minoritaires. Comment est-il calculé ? Actuellement, la séance du soir n'est pas prise en compte. Cet amendement y remédie.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Indépendamment du fond, cet amendement modifierait profondément l'organisation de nos travaux.

Vous proposez remplacer le quota de quatre heures par une journée. Une telle modification exige une concertation plus large des groupes politiques et du Bureau. Retrait ou avis défavorable.

Mme Nathalie Goulet.  - Parfois, un texte prend un temps considérable au détriment de l'autre texte prévu dans la niche, qui ne peut dès lors aboutir durant le temps imparti. C'est injuste pour les auteurs, et une fausse démocratie ! Parfois, certains textes se télescopent et les auteurs du second pressent l'examen du premier. Il faut effectivement organiser le temps des niches différemment pour plus de souplesse. Réfléchissons-y.

M. Éric Kerrouche.  - Nous avons fait cette proposition par écrit dans le cadre du groupe de travail. Maintenir le système actuel, c'est limiter les droits de l'opposition et de l'initiative sénatoriale. Ce système a des effets pervers, soulignés par Mme Goulet.

Le mode de calcul que nous proposons respecte à la lettre la Constitution. Vous continuez à brider les droits de l'opposition !

M. Roger Karoutchi.  - Je ne peux vous laisser dire cela. (M. Eric Kerrouche insiste.) Au Sénat, les règles sont beaucoup plus favorables aux oppositions qu'à l'Assemblée nationale, et les présidents de séance font preuve de souplesse si nécessaire pour achever l'examen d'un texte.

Votre proposition va bien plus loin. En réalité, elle est extrêmement favorable aux groupes minoritaires au détriment de la majorité. À tel point que la majorité aurait intérêt à se déclarer minoritaire ! (Dénégations à gauche) Faites le calcul ! Cela mérite à tout le moins une vraie réflexion. On ne peut pas supprimer les électeurs par amendement...

L'amendement n°14 n'est pas adopté.

ARTICLE 9

Mme la présidente.  - Amendement n°9, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

M. Éric Kerrouche.  - Monsieur Karoutchi, nous sommes très conscients du rapport de force politique, mais la suppression du renvoi en fin de tourniquet de l'orateur du même groupe que le rapporteur n'est pas des plus subtiles vis-à-vis de l'opposition. Le mieux à faire est de supprimer cet article.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°29, présenté par M. Malhuret et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires.

M. Claude Malhuret.  - À la différence des nombreuses mesures consensuelles du texte, celle-ci a été rejetée par six des huit groupes politiques. Avec le nouveau système, les plus petits groupes seront marginalisés.

La règle du tourniquet est en vigueur à l'Assemblée nationale comme dans la majorité des parlements.

M. Retailleau nous a objecté le fait majoritaire et la démocratie. Mais la démocratie consiste aussi à protéger les minorités, comme Mme Paoli-Gagin l'a souligné en citant Camus. Le gentlemen's agreement proposé ne remet pas en cause le fait majoritaire.

Avec cette proposition, c'est un peu de notre esprit d'ouverture et de tolérance, un peu de l'esprit du Sénat qui s'en va ! J'appelle les deux groupes majoritaires à se joindre à nous pour préserver cet esprit.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°45, présenté par Mmes Assassi et Cukierman.

Mme Éliane Assassi.  - Le tourniquet figure déjà dans le Règlement de 1971. Il permet une alternance des prises de parole. La réforme de 2009 prévoit que les premiers orateurs désignés après les représentants des commissions sont issus de groupes différents de celui auquel appartiennent ces derniers.

L'article 9 met fin à cette exception, sans raison. Or l'alternance des prises de paroles bénéficie aux groupes minoritaires et au pluralisme. Les groupes majoritaires en profitent aussi puisqu'ils peuvent intervenir à plusieurs moments de la discussion générale et répondre aux orateurs des autres groupes. Aucune logique n'explique donc cette mesure.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. La seule modification proposée concerne le premier orateur après le rapporteur. Lorsque celui-ci s'exprime à la tribune, il le fait au nom de la commission, pas de son groupe. Il ne s'agit pas d'une position politique, ou alors rarement.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il m'est arrivé, en des temps anciens, d'assister à des débats avec plusieurs ministres et rapporteurs de la même tendance politique, puis d'autres orateurs toujours du même groupe.

Il fallait attendre longtemps avant d'entendre un discours dissonant. Quel ennui mortel -  quelle que soit la qualité des orateurs !

Le Règlement actuel a une forme d'élégance qui n'enlève rien aux groupes majoritaires. Ils s'honoreraient à renoncer, après réflexion, à cette mesure introduite à la fin d'un travail mené en bonne intelligence. Je suis sûr que vous y serez sensibles ; je vous parle avec le coeur !

Mme Pascale Gruny.  - Je confirme les propos du rapporteur sur le rôle de ce dernier. Sur un texte comme la loi bioéthique, par exemple, les orateurs des groupes peuvent aussi avoir une parole personnelle.

Dans un groupe, les opinions varient. Certains collègues se plaignent de passer toujours à la fin. (Sourires ironiques à gauche) Il y aura un tirage au sort pour la première place, mais le groupe majoritaire ne sera pas toujours en dernier.

Monsieur Malhuret, revenez au sein du groupe majoritaire ; vous y serez le bienvenu ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jérôme Bascher.  - J'entends l'argument de l'élégance et de la qualité des débats. Le nouvel adage serait donc « la division fait la force » ? Méthode étonnante ! Ne vaut-il pas mieux constituer des groupes forts que de se diviser en une multitude de petits groupes, qui répètent la même chose ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - C'est sûr, vous êtes moins divisés !

M. Claude Malhuret.  - Puisqu'on me fait des propositions, je me dois de répondre à Mme Gruny... Ce n'est pas en marginalisant les groupes minoritaires que vous me donnerez envie de revenir dans un groupe qui se durcit. (Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit.)

Quand j'étais membre du groupe majoritaire, je n'ai jamais entendu quiconque critiquer le tourniquet. Le groupe s'exprime en premier par la voix du président et du rapporteur !

L'explication du rapporteur est parcellaire : elle ne concerne que la proposition 29 du groupe de travail, alors que la proposition 30, discutée en Conférence des présidents, supprime complètement le tourniquet. Ensemble, elles pénalisent lourdement les groupes minoritaires.

Nous nous honorerions de conserver le fonctionnement démocratique actuel. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

Les amendements identiques nos9, 29 et 45 ne sont pas adoptés.

L'article 9 est adopté.

ARTICLE 10

Mme la présidente.  - Amendement n°10, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

Pour l'examen d'un texte élaboré par une commission mixte paritaire, sauf décision contraire de la Conférence des Présidents,

par les mots :

Sauf opposition du Gouvernement, du président de la commission saisie au fond ou d'un président de groupe, pour l'examen d'un texte élaboré par une commission mixte paritaire,

M. Éric Kerrouche.  - Cet amendement valide le principe d'une discussion générale allégée pour les lectures de conclusions de CMP, parfois fastidieuses, mais prévoit la possibilité de revenir à une discussion générale classique dès lors qu'un groupe en ferait la demande.

Mme la présidente.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par MM. Requier, Bilhac, Gold, Artano, Cabanel et Corbisez, Mme N. Delattre, M. Guérini et Mme Guillotin.

Alinéa 2

Après le mot : 

Présidents

insérer les mots :

ou demande par le président de la commission saisie au fond ou un président de groupe

M. Jean-Claude Requier.  - Une procédure simplifiée peut sembler bienvenue, mais il est souhaitable de laisser aux groupes ou aux commissions saisis au fond la possibilité de revenir à une procédure normale, comme pour les textes examinés selon la procédure de législation en commission ou les conventions internationales.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. L'objectif est de gagner un peu de temps. La Conférence des présidents, qui réunit tous les présidents de groupes et de commissions, pourra toujours décider de revenir à une procédure plus longue. La CMP sur le projet de loi Sortie de l'état d'urgence sanitaire a montré qu'en quarante-cinq minutes, on pouvait débattre dans des conditions tout à fait acceptables après une CMP conclusive.

L'amendement n°10 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°1 rectifié.

L'article 10 est adopté.

ARTICLE 11

M. Jean-Pierre Sueur .  - L'article 11, cela n'aura échappé à personne, ne porte pas sur trente secondes - qu'est-ce que trente secondes ? C'est le dernier avatar d'une tendance lourde à la négation de ce qui est éminent, essentiel, principal dans le travail parlementaire.

Déjà, la procédure accélérée s'est généralisé ; j'ai connu un temps où la norme était qu'il y eût deux lectures pour peaufiner les textes. Cela a commencé avant ce quinquennat. Je déplore cette tendance.

Il faut aller vite, nous dit-on. Certains gouvernants se plaignent du temps passé devant le Parlement, et s'en passeraient volontiers...

Je plaide pour ce qui fait la grande tradition du Parlement en France.

Des centaines de parlementaires, connus ou méconnus, ont passé leur temps à argumenter.

Désormais, un avis budgétaire de 40 pages doit être présenté en trois minutes ; et l'on passerait à deux minutes ?

Voulons-nous un Parlement du tweet, ou voulons-nous lui donner les moyens et le temps d'argumenter ? Symboliquement, refusons cet avatar qui détruit toute une tradition parlementaire en France.

Mme la présidente.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par MM. Requier, Artano, Bilhac, Cabanel, Corbisez, Gold et Guérini.

Supprimer cet article.

M. Jean-Claude Requier.  - Une telle disposition viendrait engourdir nos débats, essence même du parlementarisme.

Ce raccourcissement serait indolore, nous dit-on. Mais pourquoi priver certains intervenants de ces trente secondes, puisqu'elles ne sont que rarement utilisées ? Que l'on utilise pleinement les deux minutes trente ou non, l'essentiel est de savoir que l'on aura le temps d'exposer clairement une pensée complexe. Un débat ne peut être fait que de slogans !

Une telle réduction n'est pas sans effet sur les petits groupes tels que le RDSE, qui n'impose aucune consigne de vote à ses membres. Chacun doit pouvoir s'exprimer dans des conditions convenables.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°11, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Éric Kerrouche.  - Toucher aux règles du travail législatif n'est jamais sans conséquence, des études universitaires le prouvent. Plus on réduit le temps de parole, plus la qualité des textes en pâtit.

La discussion en commission est libre - ce qui justifierait la limitation du temps de parole en séance publique, nous dit-on. Rien n'est plus faux.

Il y a deux rythmes dans la façon de légiférer : celui de la politique invisible, en commission, où les affrontements sont limités par l'absence de publicité, et celui de la politique visible, dans l'hémicycle.

Vous voulez remettre en cause le temps de la politique visible, celui de l'affrontement politique. Cela va à l'encontre de la façon même de faire la loi. (Mme Cathy Apourceau-Poly approuve.)

En quoi raccourcir la discussion la rend-elle plus efficace ? Je vous mets au défi de le prouver !

Certains qui voteront cette mesure aujourd'hui le regretteront amèrement dès septembre... Cette disposition est de façade.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°47, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Pourquoi cette volonté dogmatique de réduire le temps de parole des parlementaires ? C'est l'inflation législative qui étouffe le Parlement, pas la discussion, comme le prétendent dangereusement les tenants de la « rationalisation du travail parlementaire », synonyme de réduction du temps de parole, de limitation du droit d'amendement, de remise en cause de l'initiative parlementaire - bref, d'affaiblissement du Parlement.

Corseter les débats lors de l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances n'est pas non plus une bonne solution.

Un certain consensus apparaît entre l'exécutif, sa majorité et la majorité sénatoriale (protestations sur les travées du groupe Les Républicains) pour réduire le pouvoir du Parlement, qui se fonde sur le droit d'amendement et le temps de parole. Or le débat est nécessaire pour mettre en lumière les choix politiques et leurs conséquences pour la démocratie. Nous sommes bien loin des propos du président du Sénat contre la révision constitutionnelle d'Emmanuel Macron !

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable aux trois amendements.

L'inflation législative est une réalité ; nous y participons d'ailleurs avec nos propositions de loi.

En 1995, le président de l'Assemblée nationale Philippe Séguin proposait une session unique pour éviter les séances de nuit. Nous sommes passés à la session unique, et les séances de nuit sont toujours là !

Les commissions ont le temps d'établir leur texte. De ce point de vue, les équilibres ont été modifiés par la révision de 2008 - mais l'inflation législative n'a pas cessé.

D'où la proposition de ramener le temps de présentation d'un amendement à deux minutes. La semaine dernière, deux textes ont été examinés plus vite que prévu car les collègues ont respecté le temps imparti, et surtout parce qu'il n'y avait pas beaucoup d'articles. Mais prochainement, les projets de loi Climat et 4D donneront lieu à des milliers d'amendements : il faudra bien que nous arrivions à travailler. (Mme Cathy Apourceau-Poly le confirme.) Le bon sens doit l'emporter, et chacun doit maîtriser son temps de parole. Je m'excuse de ces six secondes de dépassement...

M. Roger Karoutchi.  - La réforme de 2008 visait à renforcer le rôle des commissions pour réduire la pression sur l'hémicycle. Les débats ont d'abord lieu en commission, c'est un pouvoir considérable à la disposition des parlementaires.

Entre 2000 et 2020, le nombre d'amendements déposés annuellement a triplé. On nous annonce plus de 3 000 amendements en séance sur le projet de loi Climat ! On arrive à saturation. Le dépôt d'amendements n'est pas limité, c'est un droit individuel et constitutionnel. Mais il faut faire en sorte que les débats soient fluides.

En 1995, la session unique devait être une révolution ; elle s'est soldée par un échec total : nous siégeons tout autant la nuit, du lundi au vendredi, et il y a autant de sessions extraordinaires. Le temps parlementaire s'est considérablement accru. La qualité, l'ampleur et l'efficacité de nos textes ont-t-elles considérablement évolué depuis vingt ans ? Je n'en suis pas sûr...

M. Jérôme Bascher.  - Je rejoins M. Sueur quand il évoque l'art oratoire et notre histoire de l'argumentation. Cela participe de la démocratie. Mais la lecture à plus soif d'exposés des motifs pendant deux minutes trente, par des cosignataires qui découvrent parfois l'amendement, nuit à la qualité de nos débats - et je plaide coupable.

Il faudrait se mettre d'accord, et surtout réaliser un effort de discipline personnelle et de concision, car « ce qui se conçoit bien s'énonce clairement... »

M. Claude Malhuret.  - Les présidents Buffet et Karoutchi, parlementaires chevronnés, viennent tous deux de parler deux minutes trente-deux secondes, deux minutes trente-huit secondes pour M. Buffet - afin de défendre leurs positions sur ce sujet complexe. J'en prends acte ! (M. Roger Karoutchi proteste.)

Les parlementaires, réduits à l'impuissance par le Gouvernement, font de plus en plus de la figuration. Les voilà qui décident eux-mêmes de réduire leurs prérogatives ! Je ne connais pas de parlementaire qui ne se plaigne de la profusion de nos lois et de nos codes et qui ne demande pas à chaque Gouvernement de réduire le nombre et le volume des lois présentées au Parlement...

Trente secondes, c'est 20 % du temps de parole. Si nous allons plus vite, le Gouvernement présentera encore plus de textes, à l'opposé de ce que nous réclamons.

N'étant ni masochiste ni schizophrène, je ne voterai pas cette réduction de notre temps de parole.

M. Stéphane Piednoir.  - Et tout cela en deux minutes !

Mme Éliane Assassi.  - Ce débat est important. Depuis la réforme de 2008, le texte de la commission est celui de la majorité sénatoriale. Souvent, nous sommes opposés à la fois au texte du Gouvernement et à celui de la commission.

Nous avons besoin d'expliciter nos positions. J'ai l'impression qu'on n'a plus le droit de manier des idées.

En 2015 et 2019, le Conseil constitutionnel a émis des réserves d'interprétation sur l'encadrement du droit d'amendement. Le président de la commission des lois peut-il nous en dire plus ?

Mme Nathalie Goulet.  - Les étudiants demandent toujours plus de temps pour leurs examens... Quand on leur donne cinq heures de rédaction, ils en veulent cinq et demie ; quand on leur en donne six, ils en veulent six et demie.

Les sénateurs non membres de la commission saisie au fond pourraient avoir besoin de deux minutes trente pour s'exprimer sur un texte qu'ils découvrent. Et quid du PLF, du PFLSS ? Nous devons avoir la possibilité de nous exprimer.

M. Karoutchi était ministre des relations avec le Parlement en 2008. L'idée de ne pas débattre deux fois, en commission puis en séance, était bonne sur le papier, mais en pratique, elle ne fonctionne pas. Idem pour l'ordre du jour partagé. Les deux minutes ne fonctionneront pas en pratique.

Enfin, reconnaissez que nous sommes tout à fait capables de nous arrêter de parler quand nous avons fini, même s'il reste quarante-cinq secondes.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires. Si l'on éliminait toutes les déclarations d'intention sans valeur législative et les mesures réglementaires, on gagnerait beaucoup de temps. Mieux vaudrait moins de lois, davantage mûries.

La civilisation du tweet envahit tout. Elle favorise la déclaration, non l'argumentation. En deux minutes, on fait à peine une introduction.

Pendant longtemps, il n'y avait pas de chronomètre dans l'hémicycle. On nous laissait parler et je trouvais cela très bien. (Rires) Ce qui compte, c'est l'argumentation ! En dehors d'elle, rien n'a de valeur.

Les amendements identiques nos2 rectifié, 11 et 47 ne sont pas adoptés.

Mme la présidente. - Amendement n°48, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet article :

À l'alinéa 5 de l'article 29 ter du Règlement, les mots : « d'une heure » sont remplacés par les mots : « de deux heures ».

M. Gérard Lahellec.  - Nous proposons de rétablir la durée de la discussion générale à deux heures, pour inverser la tendance à la réduction du temps de débat. Plus la discussion générale est courte, moins les groupes minoritaires peuvent s'exprimer. Rendons au travail parlementaire ses lettres de noblesse ! Rogner le temps de parole n'y contribue pas.

Mme la présidente.  - Amendement n°49, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 35 bis est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ....  -  Il appartient au Président de séance d'appliquer cette limitation du temps de parole en veillant au respect des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire. »

M. Gérard Lahellec.  - Défendu.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Laissons à la Conférence des présidents la liberté de décider de la durée de la discussion générale. Le retour aux deux heures est possible quand l'intérêt du texte le justifie. Avis défavorable à l'amendement n°48.

J'émets un avis favorable à l'amendement n°49 sous réserve de sa rectification pour éviter l'écrasement de l'article 11.

L'amendement n°48 est retiré.

M. Gérard Lahellec.  - Nous acceptons la rectification proposée par le rapporteur.

Mme la présidente.  - Ce sera l'amendement n°49 rectifié.

Amendement n°49 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Compléter cet article par un II ainsi rédigé :

II.- L'article 35 bis du Règlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il appartient au Président de séance d'appliquer cette limitation du temps de parole en veillant au respect des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire. »

M. Roger Karoutchi.  - Cet amendement mettra une forte pression sur les présidents de séance... Je le voterai néanmoins. Mais ayez de l'indulgence pour vos présidents de séance ! (Sourires)

L'amendement n°49 rectifié est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°3 rectifié, présenté par MM. Requier, Artano, Bilhac, Cabanel, Corbisez, Gold et Guérini et Mme Guillotin.

Supprimer les mots : 

À la fin de l'article 35 bis, à la deuxième (deux fois) et à la troisième phrase de l'alinéa 7 de l'article 44,

et les mots : 

et à la seconde phrase de l'alinéa 2 de l'article 47 quinquies

M. Jean-Claude Requier.  - Amendement de repli, qui conserve la durée de deux minutes trente pour la prise de parole sur l'article et sur l'ensemble, ainsi que pour l'examen des lois de finance.

Mme la présidente.  - Amendement n°32, présenté par MM. Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

Supprimer les mots :

À la fin de l'article 35 bis,

et les mots :

, à la deuxième, à la troisième et à la fin de la dernière phrase de l'alinéa 5 de l'article 46 bis

M. Guillaume Gontard.  - Amendement de repli. Pourquoi réduire le temps de parole à deux minutes ? Pour gagner du temps ? Au Sénat, personne n'abuse de ses deux minutes trente et elles sont parfois utiles. Nous sommes au Parlement pour discuter la loi. Ne nous tirons pas une balle dans le pied ! S'il y a un engorgement, c'est de la faute du Gouvernement qui doit s'organiser.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Nos collègues poursuivent le même objectif, avec des moyens inverses. Restons-en à la proposition du président du Sénat. Avis défavorable.

L'amendements no3 rectifié n'est pas adopténon plus que l'amendement n°32 .

L'article 11, modifié, est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 11

Mme la présidente.  - Amendement n°51, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article 47 bis-1 du Règlement, les mots : « de la discussion » sont remplacés par les mots : « des discussions générales de la première partie et de la seconde partie ».

Mme Marie-Claude Varaillas.  - Nous voulons préserver les conditions du débat budgétaire en garantissant les droits des groupes d'opposition. L'examen du projet de loi de finances pour 2021 a été particulièrement mouvementé. Le regroupement de plusieurs missions, parfois sans cohérence, comprime le temps du débat. La discussion générale est plus lisible que les amendements de compensation.

Nous nous exposons à l'incompréhension des citoyens. Le temps de parole des groupes doit être préservé, afin de ne pas faire l'impasse sur des pans entiers de nos politiques publiques.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - La Conférence des présidents peut en décider : gardons de la souplesse. Avis défavorable.

L'amendement n°51 n'est pas adopté.

Les articles 12 et 13 sont successivement adoptés.

ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 13

Mme la présidente.  - Amendement n°12, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 13

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 46 bis du Règlement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ....  -  En cas de circonstances exceptionnelles de nature à affecter de façon significative les conditions de participation, de délibération ou de vote des sénateurs, la Conférence des Présidents peut décider qu'un amendement qui n'est pas soutenu par son auteur peut être repris par un sénateur qui n'en était pas signataire. »

M. Éric Kerrouche.  -  Nous devons prendre en compte le risque de circonstances exceptionnelles : il faut permettre à un sénateur de soutenir un amendement dont il ne serait pas cosignataire, en cas de fonctionnement de notre assemblée en jauge réduite pour des raisons sanitaires. Cela relève du pragmatisme. Ne forçons pas un sénateur à cosigner un amendement uniquement parce que son auteur ne peut pas venir le défendre.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. Chaque sénateur peut cosigner un amendement jusqu'à l'ouverture de la séance. Il est plus confortable de défendre un amendement auquel on croit. En outre, évitons le risque que plus personne ne juge utile de venir en séance.

L'amendement n°12 n'est pas adopté.

ARTICLE 14

Mme la présidente.  - Amendement n°24, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Rédiger ainsi cet article :

L'alinéa 3 de l'article 2 bis du Règlement est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Les listes de candidats aux fonctions de vice-président et aux fonctions de secrétaires assurent une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes. Pour la liste de candidats aux fonctions de questeurs l'écart entre le nombre de femmes et d'hommes ne doit pas être supérieur à un. »

M. Éric Kerrouche.  - La question de la parité est bien malmenée par cette proposition de résolution.

Pour les listes de candidats à des fonctions en nombre pair - vice-présidents et secrétaires -, la parité doit être garantie. Pour la liste des candidats à la fonction de questeur, l'écart entre le nombre de femmes et le nombre d'hommes ne pourra être supérieur à un.

La plupart du temps, on oppose une impossibilité technique à la mise en place effective de la parité. Mais il faut poser les principes et l'intendance suivra.

Mme la présidente.  - Amendement n°26, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Rédiger ainsi cet article :

L'alinéa 3 de l'article 2 bis est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Pour les groupes dont la représentation à ces fonctions est en nombre pair, les président de ces groupes proposent un nombre de femmes et d'hommes dans le strict respect de la parité. Pour les groupes dont la représentation à ces fonctions est en nombre impair, au-delà de trois, l'écart entre le nombre de femmes et d'hommes ne doit pas être supérieur à un. »

M. Jean-Pierre Sueur.  - Pour le cas improbable où nos collègues n'auraient pas été convaincus par l'amendement de M. Kerrouche, voici le mien. La rédaction de cet article est poussive. Aussi, mon amendement prévoit que si le nombre de candidats est pair, la parité devra être respectée et que si le nombre de candidats est impair et supérieur à trois, l'écart entre le nombre de femmes et d'hommes ne devra pas être supérieur à un. Contrairement à l'amendement de M. Kerrouche, nul besoin d'accord entre les groupes. C'est très simple.

Allons au-delà des formules vagues.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable à ces deux amendements. La proposition du président du Sénat tient compte des contraintes des groupes politiques, au regard notamment de leur taille. Le Bureau est aujourd'hui à parité sur les postes de secrétaires et de vice-présidents.

M. Roger Karoutchi.  - L'amendement de M. Sueur est de repli, car l'amendement de M. Kerrouche est impraticable. Au sein de notre groupe Les Républicains, l'équilibre hommes-femmes au Bureau est respecté. Le groupe socialiste fonctionne à l'identique mais c'est très compliqué à appliquer aux petits groupes.

L'amendement de M. Sueur est très invasif dans la vie des groupes. Chaque groupe fait des efforts et il ne me semble pas que l'on soit confronté au Bureau du Sénat à un problème de parité ostensible. Laissons les groupes gérer cette question !

L'amendement n°24 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°26.

Mme la présidente.  - Amendement n°33, présenté par MM. Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

Quand plusieurs membres d'un même groupe sont éligibles à la même fonction du bureau, la liste doit assurer la parité des candidats.

M. Guillaume Gontard.  - Cet amendement de repli prévoit une obligation de parité quand un même groupe politique présente plusieurs candidats à la même fonction au Bureau. La coutume doit être consacrée dans le texte.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable.

L'amendement n°33 n'est pas adopté.

L'article 14 est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 14

Mme la présidente.  - Amendement n°25, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'alinéa 1 de l'article 13 du Règlement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 1 ....  -  Les présidences des commissions assurent une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes. »

M. Éric Kerrouche.  - Nous proposons la parité aux présidences des commissions. Au Sénat, seules deux commissions permanentes sont présidées par des femmes. Je sais que les présidents de commission sont élus en leur sein. Mais si nous avions toujours raisonné comme M. Karoutchi, nous n'aurions jamais avancé. À laisser le temps faire, on voit les résultats...

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. Ne nous immiscions pas dans le fonctionnement des groupes.

L'amendement n°25 n'est pas adopté.

L'article 14 bis est adopté, de même que les articles 14 ter et 14 quater.

ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 14 quater

Mme la présidente.  - Amendement n°28, présenté par M. Rapin.

Après l'article 14 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 73 quinquies du Règlement est ainsi modifié :

1° La seconde phrase du second alinéa du 1 est ainsi rédigée : « Le rapport de la commission ainsi que la proposition de résolution qu'elle a adoptée ou, en cas de rejet, le résultat de ses travaux sont déposés et publiés séparément dans un délai d'un mois après sa saisine. » ;

2° L'alinéa 2 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le rapport de la commission des affaires européennes ainsi que la proposition de résolution qu'elle a adoptée ou, en cas de rejet, le résultat de ses travaux sont déposés et publiés séparément. » ;

b) La seconde phase de l'avant-dernier alinéa est ainsi rédigée : « Le rapport de la commission ainsi que la proposition de résolution qu'elle a adoptée ou, en cas de rejet, le résultat de ses travaux sont déposés et publiés séparément. »

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - M. Rapin est absent, mais la commission souhaite le reprendre. Il devient l'amendement n°53.

Mme la présidente.  - Amendement n°53, présenté par M. Buffet, au nom de la commission.

Après l'article 14 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 73 quinquies du Règlement est ainsi modifié :

1° La seconde phrase du second alinéa de l'alinéa 1 est ainsi rédigée : « Le rapport de la commission ainsi que la proposition de résolution qu'elle a adoptée ou, en cas de rejet, le résultat de ses travaux sont déposés et publiés séparément dans un délai d'un mois après sa saisine. » ;

2° L'alinéa 2 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le rapport de la commission des affaires européennes ainsi que la proposition de résolution qu'elle a adoptée ou, en cas de rejet, le résultat de ses travaux sont déposés et publiés séparément. » ;

b) La seconde phase de l'avant-dernier alinéa est ainsi rédigée : « Le rapport de la commission ainsi que la proposition de résolution qu'elle a adoptée ou, en cas de rejet, le résultat de ses travaux sont déposés et publiés séparément. »

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Je reprends cet amendement afin que la commission des affaires européennes fonctionne comme les autres commissions permanentes s'agissant de la publication de ses rapports. La commission des lois y est favorable.

L'amendement n°53 est adopté et devient un article additionnel.

L'article 15 est adopté.

Interventions sur l'ensemble

M. Éric Kerrouche .  - Il aurait été facile d'évoluer vers plus de consensus sur certains points. Mais les positions sur le temps de parole et le tourniquet montrent qu'il ne s'agissait que d'un texte de façade, destiné à conforter la majorité : nous voterons contre.

Mme Pascale Gruny .  - Je remercie la commission des lois d'avoir intégré les conclusions du groupe de travail.

L'essentiel réside dans les dispositions relatives aux ordonnances et aux pétitions, ainsi qu'au contrôle.

Le temps de parole n'est pas un sujet : son efficacité sera certaine. Au Parlement européen, la moyenne d'intervention dans l'hémicycle est d'une minute et les vrais échanges ont lieu en commission. Au Sénat, la séance publique est très formalisée.

Je n'aime pas la parité obligatoire, même si ma présence au Sénat y est peut-être due. On ne peut pas dire que, dans notre assemblée, les femmes ne sont pas valorisées.

Je remercie tous ceux qui voteront ce texte qui améliorera notre fonctionnement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Philippe Folliot .  - Comparaison n'est pas raison mais il y a quelques mois, je siégeais à l'Assemblée nationale. J'apprécie la qualité de nos travaux au Sénat, où l'on s'exprime et où l'on s'écoute, dans le respect des uns et des autres.

Je ne voterai pas ce texte car les évolutions proposées ne me semblent pas aller dans le bon sens. Nous ne connaissons pas les problèmes d'obstruction de l'Assemblée nationale. La majorité d'un jour sera l'opposition de demain ; c'est le principe de la démocratie... Soyons donc prudents ! Ce texte pourrait être regretté.

Les temps de parole sont utilisés dans la plus grande pertinence pour défendre des opinions, ce qui est essentiel en démocratie.

Mme Éliane Assassi .  - J'ai toujours du mal à comprendre le sens de cette réforme... Je reconnais qu'une certaine courtoisie règne dans notre hémicycle et il est heureux que nous n'ayons pas instauré le temps programmé de l'Assemblée nationale, qui tue l'expression des groupes politiques.

Quant au Parlement européen, parlons-en ! Personne ne sait ce qui s'y dit, ce qui nourrit la défiance de nos concitoyens. Ce n'est pas le meilleur exemple sur lequel s'appuyer.

La proposition de résolution est adoptée.

Mme la présidente.  - En application du premier alinéa de l'article 61 de la Constitution, la résolution que le Sénat vient d'adopter sera soumise avant sa mise en application au Conseil constitutionnel.

Prochaine séance demain, mercredi 2 juin 2021, à 15 heures.

La séance est levée à 19 h 55.

Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du mercredi 2 juin 2021

Séance publique

À 15 heures

Présidence : M. Gérard Larcher, président

Secrétaires : Mme Esther Benbassa - M. Jacques Grosperrin

1. Questions d'actualité

À 16 h 30 et le soir

M. Roger Karoutchi, vice-président Mme Pascale Gruny, vice-président

2. Débat sur le bilan de l'application des lois

3. Débat sur le Pacte vert européen (demande du groupe Les Républicains)

4. Débat sur la reprise et la relance des activités culturelles (demande du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain)