SÉANCE

du mercredi 16 juin 2021

109e séance de la session ordinaire 2020-2021

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : M. Joël Guerriau, Mme Marie Mercier.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions d'actualité

M. le président.  - Monsieur le Premier ministre, nous sommes heureux de vous retrouver. L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

La séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Au nom du Bureau du Sénat, j'appelle chacun de vous, mes chers collègues, à observer chacun les valeurs essentielles du Sénat : le respect des uns et des autres et le respect du temps de parole.

États généraux de la justice

M. Jean-Claude Requier .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. David Assouline applaudit également.) Après le Grenelle de l'éducation, le Ségur de la santé, le Beauvau de la sécurité, le Président de la République a annoncé les États généraux de la justice... Le groupe RDSE s'en félicite : la confiance en notre justice est essentielle pour légitimer ses décisions, alors qu'un fossé s'est installé entre les citoyens et les institutions judiciaires.

Des jurisprudences récentes ont suscité l'incompréhension et l'émotion. Dans un État de droit, la justice ne se confond pas avec la morale : elle applique la loi - dura lex, sed lex. Surtout, il n'y a pas à choisir entre forces de l'ordre et magistrats. Tous sont des fonctionnaires dévoués qui font vivre le service public. Je les salue et les remercie. Ne les opposons pas à l'heure où il faut renforcer la cohésion nationale.

Mais nous n'avons pas besoin d'une énième consultation qui se bornerait à des promesses sans lendemain et décevrait les professionnels du droit comme les citoyens. Il faut une justice plus accessible, plus simple et plus efficace.

Comment restaurer la confiance ? (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Pierre Louault applaudit également.)

M. Jean Castex, Premier ministre .  - Le 16 juillet 2020, à l'occasion de ma déclaration de politique générale, je disais - je me cite (marques d'amusement sur toutes les travées) : « La justice, c'est l'État et l'État, c'est la justice. » L'État, depuis des années, ne donne pas à la justice les moyens nécessaire, et l'action des forces de l'ordre reste parfois sans suite. Il en résulte des situations d'impunité, inacceptables pour nos concitoyens, pour les élus des territoires, les maires au premier chef.

Vous avez voté une loi de programmation et de réforme de la justice. J'entends en accélérer la mise en oeuvre en redéployant, dès 2021, les moyens affectés au budget de ce ministère afin de rendre la réponse judiciaire plus rapide et effective, améliorer la politique des peines, garantir la dignité et la réinsertion des prisonniers, moderniser le fonctionnement des juridictions.

Nous nous attachons à le faire ! (Mme Jacqueline Eustache-Brinio le conteste.)

Les États généraux ne seront pas une énième déception ; ils ont été demandés par le Premier Président de la cour de Cassation et le Procureur général près ladite cour. Le Président de la République a fait suite à cette demande. Le renforcement de l'autorité judiciaire et des moyens de la justice sont au coeur de l'action du Gouvernement.

Je vous remercie de votre modération qui ne me surprend pas. Dans notre République, la séparation des pouvoirs et le respect de l'État de droit doivent nous lier.

M. David Assouline.  - Dites-le à M. Darmanin !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - J'ai entendu des propos inacceptables. Nous devons agir ensemble et dans la sérénité. (MM. Sébastien Meurant et David Assouline protestent.)

Un rappel : entre 2007 et 2012, 700 millions d'euros supplémentaires ont été accordés à la justice ; 840 millions d'euros entre 2012 et 2017 ; depuis le début du quinquennat, c'est 1,4 milliard d'euros, avec une augmentation de 8 % du budget dans la loi de finances pour 2021. Nous poursuivrons nos efforts, car le pays a besoin d'une justice efficiente.

Nous avons augmenté le nombre de places en prison. J'ai annoncé la création de 8 000 places supplémentaires il y a quelques semaines.

N'opposons pas policiers et magistrats -  pas dans un État démocratique. Sur ce terrain, nous agissons. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Jean-Claude Requier.  - « Vendôme » fait trop chic ; « Assises », trop judiciaire. Souhaitons que les États généraux, terme historiquement plus rassembleur, ne deviennent pas un lieu du pugilat politique et électoraliste. (M. Pierre Charon ironise.)

Difficultés du programme EPR

M. Daniel Salmon .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Lundi, nous apprenions que l'EPR chinois de Taishan enregistrait une augmentation de la concentration de gaz rares dans l'un de ses réacteurs. Les autorités chinoises se veulent rassurantes, mais les taux de radiation autorisés sont trois fois supérieurs aux normes françaises...

Mme Pompili disait mardi à la radio qu'il ne fallait pas construire notre réflexion à partir d'un fait. Mais les faits sont têtus et ils s'accumulent... À Flamanville, on observe des défaillances sur le béton, les soudures, le pont polaire. Des valves sont construites à l'envers et les accidents du travail se multiplient. Les dérives financières ne sont pas en reste avec un budget de 20 milliards d'euros - six fois la prévision - et un retard de livraison de dix ans.

En Finlande, avec treize ans de retard de livraison, des équipements sont déjà obsolètes et doivent être remplacés - le surcoût s'élève à 7 milliards d'euros ; en Angleterre, à Hinkley Point, les retards et les surcoûts s'accumulent aussi. La Cour des comptes parle d'un « échec opérationnel » des EPR.

Chacun sait que le coût du kilowattheure nucléaire est largement sous-évalué. Face à un tel fiasco industriel, pourquoi construire de nouveaux EPR au lieu de choisir la sobriété, les énergies renouvelables et le stockage ? (Applaudissements sur les travées du GEST)

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée, chargée du logement .  - Les EPR de Taishan, construits en coopération avec la France, sont exploités par une société chinoise ; la sûreté relève donc de la Chine, même si nous entretenons de fréquents contacts.

Au-delà, notre politique énergétique repose sur un mix qui vise la diversité et la résilience. Comme tous les pays, nous faisons en sorte de ne pas dépendre d'une seule source.

Le nucléaire est décarboné, mais il crée des déchets dont la gestion est complexe et mobilise les cours d'eau pour le refroidissement. Nous réduirons sa part dans le mix de 70 à 50 % en 2035. Le seul projet d'EPR en France est celui de Flamanville. L'État a demandé à EDF d'appliquer toutes les recommandations du rapport de la Cour des comptes et de l'audit.

Les énergies renouvelables nous permettront de continuer à produire l'énergie la plus décarbonée d'Europe. Leur part dans le mix énergétique sera portée à 40 % en 2030. (M. François Patriat applaudit.)

M. Daniel Salmon.  - Ce choix est une coûteuse impasse ! Le nucléaire est à 120 euros du kilowattheure, contre 60 euros pour l'éolien. (Applaudissements sur les travées du GEST)

Évolution de l'opération Barkhane

M. Joël Guerriau .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Le Président de la République a annoncé le 10 juin la fin de l'opération Barkhane. Depuis huit ans, 55 soldats français sont morts au Sahel. Nous saluons leur mémoire et le courage de ceux qui poursuivent le combat. Aujourd'hui même, nous déplorons deux blessés français et un mort nigérien.

La France se bat pour faire reculer le terrorisme au Sahel, mais la situation se dégrade. Les attaques se multiplient au Burkina Faso, au Mali, au Niger. Des pays s'enfoncent dans l'instabilité politique.

La présence française est capitale pour la sécurité au Sahel. Un raid a permis récemment de capturer des cadres de l'État islamique : notre armée fait un travail remarquable.

En 2023, vous annoncez une présence réduite pour former les armées locales et conduire des opérations contre le terrorisme. Le Parlement, qui a toujours soutenu notre action au Sahel, aurait aimé être consulté sur ce changement majeur de stratégie.

Le retrait d'une partie de nos forces est-il concerté avec nos partenaires africains, européens et américains ? Comment lutter à l'avenir contre le terrorisme dans une région cinq fois plus étendue que l'Afghanistan ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

Mme Florence Parly, ministre des armées .  - Le Président de la République a annoncé un changement profond de notre engagement au Sahel avec la fin de l'opération Barkhane. Rappelons que nous y sommes présents à la demande des pays du G5-Sahel.

Nous ne quitterons pas la région et poursuivrons la lutte contre le terrorisme aux côtés de nos partenaires. Nous voulons changer de logique et aller vers plus de coopération via une formation et un accompagnement opérationnel renforcés. Nous travaillerons aussi avec les pays du Golfe de Guinée, également exposés à la menace terroriste.

Le dispositif sera réorganisé : nous nous appuierons sur la force Takuba, qui rassemble nos partenaires européens. Les modalités et le calendrier seront précisés ultérieurement, après consultation de nos partenaires.

Tous nos interlocuteurs ont confirmé leur souhait de lutter contre le terrorisme. Telle est la clé de notre engagement collectif au Sahel. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Joël Guerriau.  - Nous aurions souhaité un débat au Parlement, pouvoir vous interroger, par exemple sur nos liens avec la Minusma (mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali). Nous aurions préféré débattre au sein de la commission des affaires étrangères et de la défense avant de découvrir les intentions du Gouvernement dans la presse ! (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains)

Lutte contre le terrorisme

M. Roger Karoutchi .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La Haute Assemblée est intéressée par votre conception de la lutte contre le djihadisme. Depuis des années, nous nous engageons à l'étranger pour protéger le territoire français. Au-delà du Sahel, comment s'incarne votre détermination ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Vous rappelez à juste titre l'ampleur de la menace et la nécessité d'une vigilance extrême. Elle se répand : au Sahel mais aussi autour du lac Tchad avec Boko Haram, dans le Nord du Mozambique avec les Chebabs, sans compter le risque de résurgence de Daech en Syrie et en Irak et la situation en Afghanistan...

La réponse doit être internationale et globale, intégrant le renseignement, dont les moyens ont été renforcés ; l'intervention armée si nécessaire - comme au Sahel avec une inflexion vers le contre-terrorisme et en Syrie ; l'action au niveau de l'ONU avec la stratégie antiterroriste en cours de définition ; la lutte contre le financement dans le cadre de la coalition No money for terror, et contre le terrorisme en ligne avec la Première Ministre de la Nouvelle-Zélande dans l'appel de Christchurch.

Cette stratégie globale est régulièrement révisée lors des conseils de défense. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Roger Karoutchi.  - L'Europe est la grande absente de votre réponse. Niger, Mali, Mozambique, Tanzanie, Irak, Syrie : les actes de terrorisme se multiplient. La Turquie utilise des mercenaires djihadistes contre nos frères kurdes et arméniens. Où est la France ? Où est l'Europe ? Nos protestations ne suffisent pas à protéger ces peuples.

Lorsque son jeu diplomatique n'est pas clair, la France remet en cause les valeurs de liberté et de démocratie. J'espère que nous n'en paierons pas le prix. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP et sur quelques travées des groupes SER et CRCE)

Distribution de la propagande électorale

M. Pierre Louault .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La distribution de la propagande électorale a été catastrophique là où Adrexo, qui a remporté l'appel d'offres dans 51 départements, en avait la responsabilité pour les législatives partielles.

Nous observons déjà des dysfonctionnements à l'approche des élections départementales et régionales : envois prématurés, défaut de distribution, jusqu'à des paquets d'enveloppes jetés dans les poubelles ! (M. Bruno Sido s'amuse.)

Alors que l'abstention atteint des taux record, nous prenons le risque de priver les électeurs d'informations essentielles.

Pourquoi avoir retiré une partie du marché à La Poste qui assure une mission de service public ? Elle connaît parfaitement nos territoires et chaque boîte aux lettres. (On le confirme à gauche.)

Pourquoi un traitement différencié des envois entre élections régionales et cantonales, pourtant à la même date ? Cela perturbe les électeurs.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous garantir que les électeurs recevront les informations nécessaires ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées des groupes Les Républicains et INDEP)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur .  - Depuis 2005, le Parlement et le Gouvernement ont confié la distribution de la propagande à des sociétés privées.

Le droit de la concurrence et le code des marchés publics nous obligent à la mise en concurrence (protestations sur les travées des groupes UC et Les Républicains), ce que nous avons fait l'an dernier pour les élections à venir. La Poste et Adrexo l'ont emporté.

Oui, Adrexo a très mal distribué une partie de la propagande électorale.

M. Jérôme Bascher.  - C'est vrai !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - L'exemple des enveloppes retrouvées dans les poubelles ne concerne que deux villes - deux de trop, je vous l'accorde.

Je m'en suis expliqué avec les préfets et j'ai demandé au secrétaire général du ministère de remettre en cause le marché public après les élections. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains) Mais je ne peux me soustraire au code des marchés publics...

Enfin, le code électoral ne prévoit aucun délai pour l'envoi de propagandes avant les élections. Aussi, certains envois ont-ils été réalisés trois semaines avant le scrutin.

Cette campagne est particulière en raison de la situation sanitaire, mais le Parlement a souhaité maintenir les élections à ces dates...

M. Pierre Louault.  - Distribuer le courrier est un métier que seule La Poste sait faire, n'en déplaise à Bruxelles. J'espère que tout se passera bien dans onze mois... Les candidats et les électeurs attendent que la propagande soit correctement distribuée. (Applaudissements sur les travées des groupeUC et Les Républicains)

Levée des brevets sur les vaccins contre la Covid-19

Mme Laurence Cohen .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE) En octobre 2020, l'Afrique du Sud et l'Inde, soutenus par plus de cent pays, demandaient une suspension des accords sur la propriété intellectuelle concernant les technologies développées contre la Covid-19. Joe Biden a récemment appuyé cette demande. De nombreux militants syndicalistes, politiques et associatifs se mobilisent contre les effets de la propriété intellectuelle sur l'accès aux soins et aux médicaments.

Après avoir refusé la levée des brevets, le Président de la République a annoncé soutenir cette demande auprès de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Mais les ambiguïtés demeurent.

Quelle est la position de la France, à la veille d'une rencontre à l'OMC ? Quelle modification souhaitez-vous apporter à la demande de ces deux pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Nous devons faire du vaccin un bien public mondial. Cela suppose une contribution financière et des dons, et la France est au rendez-vous.

M. Fabien Gay.  - Ce sont des mots !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - 60 millions d'euros, ce ne sont pas des mots. Revenant d'Afrique, je peux vous dire que les dirigeants africains partagent mon avis.

Avec nos partenaires africains, nous envisageons l'installation d'usines de vaccins en Afrique du Sud et au Sénégal.

Il faut vacciner largement pour atteindre l'immunité collective. Les points bloquants, comme les procédures d'exportation, doivent être levés le plus rapidement possible. Les États-Unis y semblent désormais favorables.

Nous avons toujours souhaité que la propriété intellectuelle ne fasse pas obstacle à la production de vaccins. À l'OMC comme à l'Organisation mondiale de la santé (OMS), des dispositifs existent pour éviter un accaparement des brevets. L'Union européenne vient de faire des propositions en ce sens avec, je l'espère, le soutien des États-Unis.

Mme Laurence Cohen.  - Quelle crédibilité accorder à vos propos lorsque les députés européens LaREM refusent la levée des brevets ? Vous ne réquisitionnez pas les usines alors que le régime de l'état d'urgence sanitaire vous le permet !

Levez les brevets, ce sont des verrous pour la production mondiale. Les belles paroles ne suffisent pas. Portez la demande de l'Afrique du Sud et de l'Inde devant le G7 et l'OMS ! Des actes !

Un casino spéculatif tourne à plein pour Big Pharma. Vous êtes de leur côté et non de celui des plus pauvres. Agissez ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Service national universel

Mme Nicole Duranton .  - En 2019, l'Eure a été l'un des départements pilotes du service national universel (SNU). L'heure est venue d'un bilan d'étape de l'expérimentation, alors que vont être lancés les séjours de cohésion sur tout le territoire du 21 juin au 2 juillet.

Le SNU est un rite de passage vers la citoyenneté, à l'heure où les valeurs de la République sont parfois mises à mal. Il offre l'occasion de brasser des jeunes de milieux très différents et de leur faire découvrir de nouveaux territoires. Emmanuelle Pérès, déléguée interministérielle à la jeunesse, a souligné l'importance de cette mixité sociale lors de son audition au Sénat.

Le SNU est aussi un pont vers l'emploi, alors que la crise sanitaire a fragilisé le marché du travail et l'employabilité des jeunes.

En 2019, le SNU a concerné 2 000 jeunes. Après l'annulation de l'édition de 2020, l'objectif est d'accueillir 25 000 jeunes en 2021. Sera-t-il atteint ?

Le Gouvernement envisage de rendre le dispositif obligatoire en 2024 pour 800 000 jeunes. Le budget a été doublé par la loi de finances pour 2021, passant de 29,8 à 62,3 millions d'euros. Comment sera-t-il utilisé ? Comment justifiez-vous la généralisation du SNU ? (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État, chargée de la jeunesse et de l'engagement .  - Je salue les 18 000 jeunes volontaires qui vont passer quinze jours ensemble, se retrouver autour de rituels républicains - levée du drapeau, chant de la Marseillaise - mais aussi apprendre à débattre, à se repérer dans la forêt, à pratiquer les gestes de premiers secours...

Cette génération a besoin de se retrouver et de créer des liens. Tel est le premier objectif du SNU.

La mixité sociale en est le second. Avec le Premier Ministre, nous sommes allés chercher les jeunes dans les quartiers de la politique de la ville, pour qu'ils rencontrent des jeunes ruraux. L'ambition est portée par l'ensemble du Gouvernement.

Dans tous les départements, 143 sites seront ouverts pour les séjours de cohésion. Dans l'Eure, ce sera le Campus de l'Espace, à Vernon. Les participants sont issus de tous les territoires ; il y a davantage de filles que de garçons.

Il s'agit de renforcer le sentiment d'appartenance de nos jeunes, mais aussi de leur proposer un parcours de citoyenneté, de leur faire rencontrer des corps en uniforme - volontaires, sapeurs-pompiers, policiers ou militaires. Ce temps collectif est un investissement : nous accueillons 20 000 jeunes cette année, avec un coût unitaire en baisse. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)

Situation de l'hôpital public

Mme Michelle Meunier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Hier, les soignantes et les soignants étaient dans la rue pour réclamer une augmentation des salaires et des effectifs.

Le collectif « Notre hôpital public, c'est vous » demande que l'accès aux soins soit assuré par l'hôpital public, que le nombre de soignants par patient soit augmenté pour redonner du sens à leur métier, que les lits soient répartis entre les territoires en fonction des besoins et non des critères budgétaires, que les citoyens puissent délibérer sur les moyens humains et financiers de la politique de santé.

La santé est la première préoccupation des Français. Ces propositions sont à la hauteur de l'enjeu. Tournons la page des fermetures des maternités et des longs trajets en ambulance pour consulter un spécialiste.

Nous, socialistes, appuyons cet appel et soutenons la démanche d'un référendum d'initiative partagée. Je salue l'engagement de Bernard Jomier aux côtés du collectif.

Qu'attendez-vous, monsieur le ministre, pour refondre le système hospitalier et mettre l'humain au centre de l'hôpital public ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Jean Castex, Premier ministre .  - Je suis particulièrement heureux de vous entendre soutenir l'hôpital public. (Protestations sur les travées du groupe SER) Laissez-moi vous donner les chiffres de l'Ondam hospitalier entre 2012 et 2017.

M. David Assouline.  - Et sous Sarkozy ! (Mme Laurence Rossignol renchérit.)

M. Jean Castex, Premier ministre.  - En 2013, 2,1 % ; en 2014, 1,7 % ; en 2016, 1,5 %. En 2019, avant même la crise sanitaire, l'Ondam s'établissait à 2,6 %. En 2020, il était de 8,9 % et, en 2021, il a été fixé à 10,2 %. Ce sont des faits !

On peut toujours, quand on est dans l'opposition, dire que les autres ne font pas ce qu'on n'a pas fait soi-même. (M. David Assouline proteste ; Mme Françoise Gatel approuve.) Mais cela ne marche plus.

M. David Assouline.  - Dites-le à M. Le Drian !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Autre chiffre : cette année, nous avons augmenté de 5 700 les places dans les instituts de formation en soins infirmiers (IFSI), de 5 900 dans les écoles d'aides-soignants. Le Ségur va créer 15 000 places à l'hôpital. Ce sont aussi des faits et des réalités !

Nous le faisons dans un cadre concerté. Le Sénat sait bien que le Ségur résulte d'une négociation et d'un accord majoritaire conclu avec les organisations syndicales représentatives. Cette méthode est à souligner. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Michelle Meunier.  - Je ne pensais pas vous fâcher... L'hôpital public est en danger. Nous attendons une refonte du système sanitaire. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Politique migratoire

M. François-Noël Buffet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Tout récemment, le Président de la République a annoncé un renforcement des mesures de lutte contre l'immigration clandestine, notamment l'augmentation du taux d'exécution des obligations de quitter le territoire (OQTF).

Le dernier avis budgétaire de la commission des lois a confirmé la faiblesse de ce taux d'exécution.

L'annonce du Président de la République est naturellement intéressante mais concrètement, quelles mesures préconisez-vous pour remplir cet objectif ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC ; M. Christian Bilhac applaudit également.)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur .  - La première chose est d'éviter que des étrangers n'entrent de manière irrégulière en Europe et singulièrement en France. (On en convient volontiers sur les travées du groupe Les Républicains.) À la demande du Premier ministre et du Président de la République, le nombre d'étrangers arrêtés à la frontière espagnole a été multiplié par cinq : 15 000 depuis le mois d'août, dont beaucoup de mineurs dits isolés, et 20 000 à la frontière italienne, soit quatre fois plus. (Mme Laurence Rossignol se récrie.)

Il faut aussi éviter le détournement des demandes d'asile. Sur les 130 000 demandes déposées en 2019, 20 à 25 000 personnes ont accédé à l'asile. Les autres doivent repartir. Je le reconnais volontiers, seuls 30 000 quittent le territoire national. Comment exécuter ces OQTF ? Par des laissez-passer consulaires. Comment les obtenir ? En limitant les visas.

L'année 2020 est particulière : elle a été marquée par la fermeture de l'espace aérien, et l'immigration irrégulière a baissé de 74 %. Mais la politique des visas mise en place en 2019 a conduit à délivrer 34 % de visas en moins, et 64 % de laissez-passer consulaires en plus, notamment des pays du Maghreb et d'Afrique.

Nous continuons cette politique en disant clairement qu'il n'y aura plus de visas de la France s'il n'y a pas de laissez-passer consulaires. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. François-Noël Buffet.  - J'approuve ces propos ; je regrette seulement que les propositions que notre groupe faisait en 2015 et 2017 n'aient pas été retenues. Nous proposions qu'un refus définitif du statut de réfugié vaille obligation de quitter le territoire - refusé. Nous voulions inscrire dans la loi que le visa pouvait être conditionné à la délivrance de laissez-passer consulaires - refusé. Nous avions demandé un débat annuel sur l'immigration - il n'a été organisé qu'une seule fois.

Si vous devez afficher une nouvelle politique migratoire, il est urgent d'en débattre devant la représentation nationale. Nous avons des propositions concrètes à vous faire. Nous proposons d'inscrire dans la loi ces mesures et de les exécuter ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Françoise Gatel applaudit également.)

Ambition climatique de la France

M. Joël Bigot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Votre Gouvernement est bon en formules grandiloquentes : États généraux, Grand débat, monde d'après, Make our planet great again... À un problème, une solution : la communication.

Le Conseil d'État a jugé insuffisantes les mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Il rejoint en cela l'avis du Haut Conseil pour le climat. La loi Climat, en cours d'examen, n'annonce rien de neuf à l'horizon. Le Gouvernement campe sur le texte issu de l'Assemblée nationale, rejetant les amendements des sénateurs en séance.

Êtes-vous prêts à enrichir votre texte au Sénat, ou notre travail sera-t-il effacé en CMP ?

Quand proposerez-vous un vrai plan de décarbonation de l'économie et un calendrier conforme à nos engagements internationaux ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée, chargée du logement .  - L'objectif est de réduire de 40 % les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2030. Selon une étude récente du Boston Consulting Group, avec les textes déjà en vigueur et la loi Climat telle que votée par l'Assemblée nationale, nous pourrons l'atteindre.

Le plan de relance consacre 30 milliards d'euros à la décarbonation de l'économie, à la rénovation des bâtiments publics et des logements et aux énergies propres.

La loi Climat est un texte ambitieux, sur la lutte contre l'artificialisation des terres et l'étalement urbain, la régulation de la publicité et des vols domestiques, les passoires thermiques, les zones à faibles émissions, entre autres. Il ne faudrait pas amoindrir cette ambition. Or le Sénat a supprimé l'article 7 qui réglemente les vitrines lumineuses, il s'apprête à refuser la généralisation de l'alternative végétarienne dans les cantines et à décaler les ZFE de cinq ans... (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Si nous voulons tenir notre trajectoire, nous devons voter une loi Climat forte, et continuer à travailler à l'échelle européenne pour réduire de 55 % nos émissions. Là aussi, nous serons au rendez-vous. (M. François Patriat applaudit.)

M. Joël Bigot.  - À en juger par les réactions, le compte n'y est pas. Pour vous, il est urgent d'attendre... Vous mettez la France en insécurité environnementale, alors que le précédent quinquennat nous avait placés à la pointe du leadership écologique. (On ironise à droite et au centre.)

Faisons en sorte que la loi Climat ne soit pas une goutte d'eau dans l'océan des besoins ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

Difficultés des Ehpad

M. Philippe Mouiller .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Gouverner, c'est prévoir. La situation des 7 200 Ehpad est des plus préoccupantes. Les besoins d'investissements, la souffrance du personnel, souvent en sous-effectif, préexistaient à la crise sanitaire, qui a amplifié la situation.

Les nouvelles préconisations des ARS imposent de nouveaux équipements - sas de décontamination, accès dédiés - ce qui engendre des coûts. Parallèlement, le décret éco-énergie tertiaire impose de nouvelles normes environnementales, donc de nouveaux coûts.

La rénovation énergétique est certes nécessaire, mais le calendrier imposé est intenable. L'enveloppe budgétaire prévue dans le volet immobilier du Ségur ne suffira pas.

Avez-vous évalué les besoins sur le territoire, et prévu des aides de l'État ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État, chargé de l'enfance et des familles .  - La crise sanitaire a mis en lumière les difficultés que rencontrent les métiers du soin, notamment en termes d'attractivité et de vétusté du bâti.

Parallèlement, les besoins de prise en charge augmentent : d'ici dix ans, deux millions de personnes supplémentaires seront en perte d'autonomie.

Nous agissons à la fois en améliorant l'attractivité des métiers - c'est le Ségur - et en soutenant l'investissement dans les établissements.

Le 9 mars, le Premier ministre a lancé un grand plan d'aide à l'investissement dans les Ehpad de 2,1 milliards d'euros sur cinq ans, dont 450 millions d'euros dès cette année : 330 millions d'euros pour la rénovation, la reconstruction et l'extension des établissements, 125 millions pour les investissements du quotidien, 20 millions pour les résidences autonomie et 5 millions d'euros pour des appels à projets nationaux.

La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie a élaboré un cahier des charges. Nous incitons les établissements à se saisir de cette opportunité sans précédent pour moderniser leurs établissements et ainsi améliorer le quotidien des résidents et du personnel.

M. Philippe Mouiller.  - Je ne suis pas sûr que vous ayez anticipé l'ampleur des besoins. Gouverner, c'est prévoir ! Il faudrait un moratoire sur les normes qui engendrent des coûts, car les établissements ne peuvent tout mener de front.

Le nombre de personnes en perte d'autonomie va exploser d'ici 2030 -  autant dire demain. La grande loi sur l'autonomie, annoncée il y a trois ans, se fait toujours attendre. Nous n'en connaissons toujours par les contours, alors que nous avons voté la création de la cinquième branche. Votre adage serait-il : « Gouverner, c'est faire croire » ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Enquête sur l'origine du virus de la covid-19

M. Stéphane Demilly .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Dans une crise sanitaire, il est crucial que des enquêtes scientifiques complètes et transparentes soient menées. Nos concitoyens ont le droit de connaître l'origine d'une pandémie qui a bouleversé nos vies.

En janvier dernier, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a enquêté à Wuhan pour connaître les origines de la transmission du virus à l'homme. Mais il semble que les experts aient été surveillés de près - de très près. Leurs conclusions devaient être approuvées par un groupe de travail sous l'autorité directe du gouvernement chinois. L'information est contrôlée, filtrée, censurée. Des journalistes chinois ont d'ailleurs été arrêtés lorsqu'ils ont sonné l'alarme sur le virus.

Le problème de la transparence est d'actualité puisque, tout récemment, l'exploitant de la centrale de Taishan, après un incident sur un réacteur nucléaire, s'est borné à indiquer que les indicateurs environnementaux étaient normaux. La diplomatie chinoise n'est guère plus loquace.

Le sanitaire comme le nucléaire exigent de la transparence. Par des canaux parallèles, avez-vous réussi à capter d'autres informations sur ces sujets cruciaux ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du GEST ; Mme Angèle Préville applaudit également.)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - La France a pris l'initiative, lors de l'Assemblée mondiale de la santé, de demander une évaluation indépendante, complète et transparente sur les origines de la pandémie. Nous avions également demandé à l'OMS de formuler des recommandations en matière de prévention et de riposte.

En dépit des résistances que vous imaginez, une mission de l'OMS s'est rendue en Chine. Son rapport a été remis. C'est une étape importante pour comprendre les origines du virus - mais ce n'est qu'une étape.

Le travail scientifique doit se poursuivre dans la plus grande transparence. Nous appelons l'ensemble des États, à commencer par la Chine, à collaborer avec l'OMS. L'Union européenne a proposé des recommandations pour faire la clarté sur l'origine du virus et sa transmission à l'homme. C'est un droit pour les citoyens, et une nécessité pour prévenir de futures urgences sanitaires. (M. François Patriat applaudit.)

Déconfinement et maintien des gestes barrières

M. Fabien Genet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le Premier ministre, vous venez d'annoncer la levée anticipée du couvre-feu. C'est heureux, mais ces derniers jours interrogent sur votre façon de gouverner.

Vendredi soir, à 23 heures, les citoyens de Digoin quittaient la terrasse d'une guinguette des bords de Loire, en application du couvre-feu ; le public privilégié de Roland-Garros remerciait Macron de les en avoir exemptés ; aux Invalides, des jeunes se faisaient charger pour non-respect de ce même couvre-feu. Selon que vous soyez puissant ou misérable...

Ce week-end, nos concitoyens ont vu votre ministre de l'Intérieur chanter en meeting sans masque, invoquer Satan contre ses opposants politiques dans un espace clos, toujours sans masque. Quant à votre ministre de la justice, à court d'arguments, il n'avait plus que ses postillons à opposer à son adversaire ! (Rires) Quid du respect des gestes barrières, que vous rappeliez tout à l'heure ?

À quatre jours des élections, après le baiser qui tue dans le Sud et le parachutage de ministres dans le Nord, cherchez-vous à susciter l'incompréhension et la colère des Français pour mieux la faire exploser dans les urnes ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe SER)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur .  - Soyez rassuré ! Il n'y a pas eu de question pour la ministre de la Culture, parce que la culture est soutenue par le Gouvernement. Aucune pour le ministre de l'Économie, parce qu'aucun pays au monde n'a autant soutenu ses commerçants, ses artisans, ses entreprises. (Vives protestations à droite ; Mme Patricia Schillinger applaudit.) Aucune pour le ministre de la Santé, parce que nous avons dépassé les objectifs de vaccination.

Quand nos voisins sont contraints de reporter des élections ou de rétablir des mesures coercitives, nous retrouvons, nous, une vie à peu près normale. Cessez la politique des grincheux ! (Huées sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Pierre Louault applaudit.) Réjouissez-vous que les Français soient heureux de revivre !

On pourrait aussi parler du match de football d'hier, pour lequel nous avons fait preuve de mansuétude. Quant à nos policiers, vous devriez les saluer, plutôt que de les attaquer. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains) Cessez la politique des grincheux ! Soyez heureux d'être en France, avouez que nous avons tenu la barre ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains ; applaudissements sur les travées du RDPI)

Oubliés du Ségur de la santé

M. Jean-Claude Tissot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Au risque de passer, moi aussi, pour un grincheux, je me ferai le porte-voix des soignants qui demandent une revalorisation de leur rémunération.

Le Ségur a accordé un complément de traitement indiciaire aux agents des hôpitaux et Ehpad publics. Ce geste, important pour la reconnaissance de ces professions essentielles, a toutefois été ressenti comme une gifle par les « oubliés du Ségur », les personnels des établissements sociaux et médico-sociaux publics autonomes qui exercent pourtant les mêmes métiers, avec les mêmes diplômes et le même statut.

La première conséquence a été une perte d'attractivité de ces métiers. Des soignants du secteur privé quittent leur structure, la boule au ventre, pour le secteur qui a bénéficié du Ségur.

Certains ont finalement été entendus et bénéficieront du complément de revenu à partir du 1er octobre. Mais vous persistez dans cette politique de division en laissant de côté les établissements financés par les conseils départementaux.

Les inégalités entre départements peuvent être fortes. Ainsi, mon département de la Loire a refusé de verser une prime Covid au personnel des services de soins à domicile.

Allez-vous enfin entendre ces professionnels du soin, du social et du médico-social qui manifestaient encore hier ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur plusieurs travées du groupe CRCE)

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État, chargé de l'enfance et des familles .  - Saluons l'effort financier massif accompli dans le cadre du Ségur pour ces professions essentielles. C'est une augmentation de 180 euros nets par mois pour 1,5 million de professionnels des établissements de santé et des Ehpad. Cette hausse inédite bénéficie également aux 90 000 professionnels qui exercent auprès des personnes en situation de handicap ou des personnes âgées.

Un accord de méthode vient d'être signé sur un complément de rémunération pour le personnel soignant des structures pour personnes handicapées et des services de soins à domicile, à la suite de la mission Laforcade.

Il convient de stabiliser les revalorisations et de favoriser la mobilité. Le financement de ces revalorisations interviendra dans la prochaine loi de financement de la sécurité sociale. Les organismes privés non lucratifs pourront anticiper le versement.

Nous traçons des perspectives pour les autres métiers du médico-social. L'État apportera une contribution financière.

Tous les leviers seront activés pour garantir l'attractivité des métiers du soin et de l'accompagnement.

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État.  - D'ici décembre, une conférence multipartite réunira l'ensemble des financeurs pour prolonger ces travaux.

« Quoi qu'il en coûte »

M. Jérôme Bascher .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) « Quoi qu'il en coûte » : cette expression pouvait donner confiance, mais elle aura finalement été malheureuse.

En responsabilité, le Sénat a répondu présent en votant les lois de finances rectificatives de 2020.

Mais en 2021, alors que la croissance est de retour, le déficit public n'aura jamais été aussi élevé, selon vos prévisions, depuis l'après-guerre ! Pour la première fois, nous laissons aux générations futures une dette de la sécurité sociale supérieure à la dette d'investissement des collectivités territoriales !

Il va bien falloir en finir avec le quoi qu'il en coûte, a dit le ministre du Budget -  avant de se faire taper sur le bec. Seulement voilà : il faut payer le Grenelle de l'éducation, le Ségur de la santé, le Beauvau de la sécurité, les États généraux de la justice, la loi de programmation militaire, sans oublier la remontée des taux d'intérêt et un deuxième ou troisième plan de relance.

Allez-vous arrêter de ruiner la France jusqu'à l'élection présidentielle ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. François Patriat.  - Quel cynisme !

M. Alain Griset, ministre délégué, chargé des petites et moyennes entreprises .  - Qu'aurait-on entendu si nous n'avions pas accompagné les entreprises et les salariés ni prévu les moyens nécessaires pour soigner les Français ? À juste titre, vous nous l'auriez reproché !

Le Président de la République a choisi d'accompagner nos entreprises pour qu'elles soient en situation, le moment venu, de reprendre l'activité, d'accompagner les salariés, de soigner les Français. Tous les pays n'ont pas fait ce choix. Nous pouvons en être fiers.

Aujourd'hui, le virus recule, la vaccination permet d'espérer une embellie sanitaire, notre économie repart fort et la diminution d'emploi est moindre qu'anticipée.

Nous faisons le pari que la croissance des prochaines années nous permettra de réduire notre dette sans augmenter les impôts.

Je pense que, dans quelques années, nous pourrons être satisfaits de la manière dont nous aurons traversé la crise. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Jérôme Bascher.  - Vous ne m'avez pas entièrement répondu, mais je ne puis vous en vouloir, compte tenu de l'absence de directives gouvernementales claires...

La situation de nos finances publiques est exactement la même qu'en Italie avant l'arrivée au pouvoir de Matteo Salvini. Je ne veux pas être responsable d'une telle situation en France dans quelques mois ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Parcoursup

M. Stéphane Piednoir .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Aujourd'hui débutent les premières épreuves du baccalauréat. Mais les plus inquiets sont les 168 000 candidats qui n'ont toujours pas reçu de proposition d'affectation sur Parcoursup. Cette année, les lycéens ont privilégié les filières sélectives, avec une hausse des inscriptions en prépa de 28 %. Parallèlement, les professeurs ont entendu l'appel à la bienveillance du ministre, au point de largement surnoter le contrôle continu, qui pèse lourd cette année.

Résultat, beaucoup de très bons élèves, avec d'excellents dossiers, sont sans affectation, faisant peser une suspicion sur la transparence du processus de sélection. Ces bons élèves à qui la République promettait de récompenser le mérite et le travail ont un sentiment d'injustice, et leurs familles s'interrogent. Les critères académiques sont-ils toujours prépondérants dans Parcoursup ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - Je souhaite bonne chance à nos candidats au baccalauréat. Rappelons que depuis le 27 mai, les candidats qui n'ont fait que des demandes dans des filières sélectives et n'ont obtenu aucune réponse positive sont appelés individuellement et accompagnés pour trouver une solution.

La procédure complémentaire qui s'ouvre aujourd'hui concerne toutes les formations, y compris sélectives, partout sur le territoire. Je salue le travail formidable des services.

Les critères sont publics ; ils figurent dans un rapport de chaque établissement ; chaque jeune a accès à son propre dossier. Quelques chiffres montrent que cette procédure fait reculer l'autocensure : 91,7 % des lycéens en bac général ont reçu une proposition, 93 % des boursiers -  en augmentation d'un point. La reconnaissance du mérite est une réalité, j'en suis fière. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Stéphane Piednoir.  - La lettre de mission que vous avez adressée à l'Inspection générale de l'éducation lui demande de se pencher sur « la manière dont ces formations veillent à conserver dans leur classement la diversité de profils, ainsi qu'aux efforts qu'elles feront en matière d'ouverture sociale et d'équilibre de genre. » Si ces critères sont inclus dans les algorithmes locaux, il conviendrait que les candidats, leurs familles, et le Parlement en soient informés. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

La séance est suspendue à 16 h 20.

présidence de Mme Valérie Létard, vice-présidente

La séance reprend à 16 h 35.