Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. Notre séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet. Au nom du Bureau du Sénat, je vous appelle, mes chers collègues, à observer l'une des valeurs essentielles de notre assemblée : le respect, celui des uns et des autres et, plus prosaïquement, celui du temps de parole. À cet égard, seule Mme la Première ministre dispose de droits inaliénables - à exercer avec mesure... (Sourires)

Politique énergétique

Mme Sophie Primas .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Valérie Létard et Françoise Gatel applaudissent également.) Madame la Première ministre, les Français ont chaud aujourd'hui, mais ils ont peur d'avoir froid cet hiver, à raison. De fait, la situation est inquiétante pour nos ménages comme pour notre économie de production.

La crise énergétique est sans précédent, mais elle était prévisible. En février dernier, nous vous avons alertés sur un probable blackout, en formulant douze recommandations - sans réponse.

Nous avons surtout perdu dix ans, dix ans d'une politique énergétique qui s'est acharnée à détruire le monde d'hier avant de construire l'énergie décarbonée de demain.

Exemple emblématique : on a fermé Fessenheim, mais il faut rouvrir des centrales à charbon... Quel échec !

La programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) prévoit toujours l'arrêt de douze autres réacteurs, à rebours du discours du Président de la République à Belfort. Quand passerez-vous des annonces aux actes, y compris pour la construction des nouveaux EPR ?

À court terme, il faut un grand plan pour garantir les approvisionnements. Depuis des années, le Sénat demande notamment la simplification de MaPrimeRénov', l'accélération de la production de biogaz, le retour en grâce de l'hydroélectricité et la simplification des ENR en liaison avec les collectivités territoriales.

Devant tant de revirements, nous sommes quelque peu perdus... Quelle est votre feuille de route énergétique ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC)

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Nous sommes confrontés à l'une des pires crises énergétiques depuis le choc pétrolier des années soixante-dix.

À court terme, nous devons sécuriser nos approvisionnements en gaz et maintenir une capacité de production forte en électricité.

Nous devons aussi construire le monde décarboné de demain ; la canicule nous en rappelle l'urgence.

Le Gouvernement mobilise tous les moyens pour anticiper une possible interruption de livraison du gaz russe : augmentation des stocks stratégiques et réactivation de la centrale à charbon de Saint-Avold, dont nous aurons peut-être besoin au pic de l'hiver - nous aurions préféré nous en passer, mais cela représente moins de 1 % de notre production d'électricité.

Sans oublier le plan de sobriété, avec une réduction de 10 % de notre consommation d'énergie. Chacun dans notre domaine, nous mobilisons entreprises et administrations pour atteindre cet objectif absolument nécessaire.

Nous n'avons rien perdu de notre ambition en réponse au réchauffement climatique. Le discours de Belfort est tout à fait clair, autour de quatre piliers : sobriété énergétique, efficacité énergétique, accélération du déploiement des énergies renouvelables et nucléaire. La future PPE, qui sera élaborée dans les mois à venir, reprendra ces principes. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Colette Mélot applaudit également.)

Mme Sophie Primas.  - Nous espérons pouvoir vous croire, mais voilà dix ans que le Sénat lutte contre des trajectoires qui nous paraissent fausses. Nous voulons des énergies renouvelables, des énergies décarbonées et de la sobriété, mais nous voulons surtout des actes ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Françoise Férat et Amel Gacquerre applaudissent également.)

M. Pierre Cuypers.  - Bravo !

Zéro artificialisation nette (I)

Mme Françoise Gatel .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Les élus locaux sont accoutumés aux migraines liées à la complexité de leur quotidien, mais, avec la mise en oeuvre du zéro artificialisation nette (ZAN), l'art de la complexité a atteint un sommet !

Si la sobriété foncière est une nécessité que nul ne discute, l'absence de définition du ZAN et les décrets d'application quasi kafkaïens qui déforment l'intention du législateur nous mènent dans une impasse.

Accepterez-vous la proposition du Sénat de réviser les conditions de mise en oeuvre du ZAN ? Après l'hommage de Mme la Première ministre à la sagesse inspirante du Sénat, une réponse elle-même sobre, sous la forme d'un « oui », serait un bon début... (Sourires sur de nombreuses travées ; applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - Permettez-moi d'exprimer ma joie de revenir dans cette enceinte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. François Patriat applaudit également.)

La loi Climat et résilience a été adoptée après une CMP conclusive de douze heures. Elle fixe des objectifs communs dont je me réjouis que personne ne les remette en cause.

Vous avez pointé les décrets du 29 avril dernier, un manque d'accompagnement et de pédagogie vis-à-vis des élus locaux ... (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Paccaud.  - Les élus ne sont pas bêtes !

M. Christophe Béchu, ministre.  - ... et un risque de disparité d'application.

Nombre d'élus s'interrogent et mesurent leur manque d'informations et d'outils, alors que nul ne remet en cause la nécessité de stopper l'artificialisation de 20 000 hectares par an.

Dans sa déclaration de la semaine dernière, la Première ministre vous a fait part de sa volonté de vous associer, chaque fois que nécessaire. Peu de sujets s'imposent autant que le ZAN pour inaugurer cette coopération fructueuse entre nous.

Aussi, dans la continuité de mes échanges avec MM. Longeot, Blanc et Malhuret et en réponse à votre question, madame Gatel, vous dont chacun connaît le niveau de câblage avec les associations d'élus sur tout le territoire, je vous propose de réfléchir ensemble aux modalités de mise en oeuvre du ZAN et, peut-être, à une réécriture partielle des décrets. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur de nombreuses travées du groupe UC)

Mme Françoise Gatel.  - C'est un bon début, mais nous devons tirer les enseignements de ce processus sur la manière dont nous légiférons.

Aucun texte ne devrait être présenté au Parlement sans une étude d'impact complète. Nous pourrions nous accorder aussi sur le nécessaire contrôle de l'imagination parfois débordante de ceux qui écrivent les décrets d'application, se prenant parfois pour le législateur. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur de nombreuses travées du RDSE et des groupes INDEP et Les Républicains ; M. Thierry Cozic et Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudissent également.)

Les modalités des dispositifs doivent être précisées collectivement, avec les associations d'élus et nous-mêmes, pour éviter de perdre du temps à les corriger. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains ; Mme Cécile Cukierman applaudit également.)

« Uber files »

M. Pascal Savoldelli .  - L'affaire Uber files met au jour les conflits d'intérêts entre le Gouvernement et les multinationales.

Ministre de l'économie, Emmanuel Macron a noué des relations avec une entreprise, Uber, qui n'est pas une entreprise banale : elle a fraudé et applique un modèle prédateur. Voilà qui dépasse le cadre normal des relations entre la puissance publique et les intérêts particuliers. Si un ministre de l'économie rencontre des représentants d'intérêt, il n'en oublie jamais le sens de l'intérêt général.

Ainsi donc, après la privatisation de la décision publique par McKinsey et la gestion par BlackRock de l'épargne des Français, Uber aurait eu l'oreille du pouvoir pour guider la casse du code du travail. Le Gouvernement peut-il donner des garanties sur l'indépendance des choix de l'État vis-à-vis des géants de la finance et de leurs influenceurs et lobbyistes ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur de nombreuses travées du groupe SER et du GEST)

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie .  - Je vous prie d'excuser l'absence de Bruno Le Maire. (Exclamations ironiques sur de nombreuses travées)

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Ne vous donnez pas cette peine...

Mme Cécile Cukierman.  - Il ne vient jamais ici !

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Je suis heureux que la première question d'actualité à laquelle j'ai l'honneur de répondre soit posée devant le Sénat, quelques instants après une intervention de Sophie Primas, avec qui j'ai travaillé lors de la précédente mandature ; nous avons montré qu'on peut travailler ensemble avec le souci du compromis. (Mouvements divers)

Un ministre de l'économie rencontre des agents économiques, un ministre de l'industrie des acteurs industriels ; je le ferai.

Uber, il est vrai, n'est pas une entreprise comme les autres. Elle a d'abord une part de lumière : dans le Val-de-Marne, elle a mis le pied à l'étrier à de nombreux jeunes, leur offrant un premier pas vers un emploi pérenne. (Protestations sur les travées du groupe CRCE)

Mme Éliane Assassi.  - Ce n'est pas un emploi !

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Cette entreprise a aussi, comme vous l'avez dit, une part d'ombre : fiscalité, précarité, manque de transparence sur la conservation de certaines données.

Ce que je puis vous dire, c'est que le ministre de l'économie de 2016 comme son successeur n'ont jamais déroulé le tapis rouge à cette entreprise. (Exclamations à gauche et sur certaines travées à droite)

Qui a oeuvré pour la régulation des géants du numérique ? La France. Qui a convaincu le monde de mettre en place une fiscalité des géants du numérique ? La France, avec le Président de la République et Bruno Le Maire.

Nous continuerons de discuter avec toutes les entreprises dont nous souhaitons qu'elles créent de l'emploi en France, sans concession mais avec volonté.

Mme Cécile Cukierman.  - Taxez les entreprises pour financer le pouvoir d'achat !

M. Pascal Savoldelli.  - L'affaire est grave. Monsieur le président du Sénat, notre groupe vous a écrit pour demander la mise en place d'une commission d'enquête ou d'une commission interparlementaire. Après la non-réponse du Président de la République hier, teintée d'arrogance et de vulgarité, et ce que nous venons d'entendre, nous voulons des éléments de vérité.

Les Gafam, ce sont 243 milliards d'euros de bénéfices. Avec l'accord sur la taxation, Uber a payé en France 2,3 millions d'euros, un impôt lilliputien - c'est le magazine Capital qui le dit... Et vous osez prétendre que votre méthode est la bonne !

Quant aux jeunes de mon département, que doivent-ils entendre à travers le message du Président de la République et le vôtre ? Cela me choque, car c'est le milieu dont je viens. On ne peut pas dire à un jeune de la banlieue : soit tu n'as rien, soit c'est Uber - l'algorithme, la discipline de la faim, le contrôle permanent. Ayez un peu plus de respect pour les jeunes des quartiers populaires et tous les jeunes, d'où qu'ils soient. Respect ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et du GEST, ainsi que sur de nombreuses travées du groupe Les Républicains)

Souveraineté industrielle

M. Bernard Buis .  - Je vais tenter de sortir du pessimisme ambiant...

Certes, la situation internationale est difficile. Les deux projets de loi dont nous débattrons ces prochains jours offrent des réponses concrètes et immédiates aux défis qui se présentent à nous.

Pour autant, le ciel n'est pas totalement obscurci. Il y a aussi de bonnes nouvelles, notamment sur le front de l'emploi et de notre industrie.

Ainsi, pour la troisième année consécutive, la France est le pays le plus attractif d'Europe. Nous creusons même l'écart avec l'Allemagne et le Royaume-Uni. Oui, notre industrie a un avenir !

La cinquième édition du sommet Choose France a confirmé cette reconquête industrielle : quatorze entreprises se sont engagées sur 6,7 milliards d'euros et 4 000 emplois pérennes. Je pense en particulier à l'usine de semi-conducteurs de Crolles, en Isère, visitée hier par le Président de la République.

La reconquête industrielle doit être une priorité du Gouvernement, au service de notre souveraineté économique. Les défaillances de nos chaînes de production pendant la crise sanitaire ont montré l'urgence de relocaliser. Innovation, régulation et décarbonation permettront de poursuivre la transformation de notre industrie.

Nous comptons sur votre détermination et votre compétence, monsieur le ministre Lescure. Quelle est votre feuille de route pour faire de l'industrie un nouvel eldorado économique ? (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie .  - Je vous remercie pour votre question. (On ironise à droite.)

Les vingt-cinq dernières années ont conduit à un déclin industriel qui paraissait inéluctable. Pourtant, il a été enrayé au cours des cinq dernières années. Je salue à cet égard l'action d'Agnès Pannier-Runacher.

Le sommet Choose France est un succès. En cinq ans, plus de 12 milliards d'euros d'investissements ont été attirés en France. Plus de 20 000 emplois ont été créés et près de 200 000 préservés, dans tous les territoires -  y compris dans les quartiers populaires dont, monsieur Savoldelli, je suis moi aussi issu.

La feuille de route est simple : nous devons accélérer, pour surmonter les difficultés et saisir les opportunités.

Alors que 70 000 emplois industriels ne sont pas pourvus, nous devons former et requalifier. Nous devons aussi régler les problèmes de foncier. L'année dernière, on a installé en France plus d'usines qu'on en a détruites : soyons-en fiers !

Il nous faut aussi accompagner les entreprises en difficulté, car il y aura des situations difficiles. Je m'engage à tenir un langage de vérité et à travailler avec vous pour trouver des solutions, même si nous n'y parviendrons pas toujours.

Enfin, nous devons saisir les opportunités, notamment en matière de transition écologique et à l'exportation. Gageons que les cinq prochains Choose France seront au moins aussi fructueux que les cinq premiers. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Pouvoir d'achat

M. Patrick Kanner .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Au cours du dernier quinquennat, vous n'avez pas voulu augmenter les revenus du travail de manière notable pour les classes populaires et moyennes. Vous avez pris des mesures sans cohérence et trop tardives, toujours le dos au mur.

Plusieurs fois, nous avons demandé un rééquilibrage de la fiscalité entre le travail et le capital. Mais vous avez fait le choix délibéré d'une déstabilisation par un hyper-bouclier fiscal que même Nicolas Sarkozy, votre nouvel ami politique, n'aurait osé imaginer. Votre politique a toujours favorisé les mêmes, en vertu d'un miracle physique : le ruissellement vers le haut !

Le nouveau quinquennat s'ouvre avec une situation économique inquiétante. La revalorisation automatique du SMIC n'est plus suffisante pour compenser l'inflation.

C'est le moment de changer de méthode : renoncez à la politique des chèques, une fuite en avant qui n'ouvre aucun droit et que personne ne comprend plus. Les Français ne demandent pas l'aumône, mais une juste reconnaissance de leur travail.

Pour répondre à leur attente, nous proposons deux mesures justes et efficaces : la revalorisation du SMIC à 1 500 euros et une grande conférence sociale pour augmenter les salaires. Pouvez-vous expliquer clairement pourquoi vous vous y opposez ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE, ainsi que sur des travées du GEST)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre .  - La première priorité des Français, le pouvoir d'achat, doit être notre priorité commune.

Depuis le premier jour, mon Gouvernement agit pour le pouvoir d'achat des Français, dans la continuité de l'action menée ces derniers mois par Jean Castex.

À l'automne dernier, nous avons mis en place des boucliers tarifaires sur le gaz et l'électricité. Sans ces mesures, les factures auraient explosé ! De même, sans la remise sur les carburants, le prix d'un plein de cinquante litres serait de dix euros plus élevé.

Nous avons agi aussi à travers l'indemnité inflation, la revalorisation du barème de l'indemnité kilométrique et l'aide exceptionnelle sur le chèque énergie.

Toutes ces mesures ont protégé les Français, à commencer par les plus modestes et ceux qui travaillent. L'ensemble représente, je tiens à le souligner, 26 milliards d'euros, un montant considérable mais nécessaire pour protéger le pouvoir d'achat. Grâce à ces mesures, notre inflation est la plus basse de la zone euro.

Nous avons aussi la chance d'avoir, en France, un salaire minimal indexé sur l'inflation et le pouvoir d'achat. Il progressera à nouveau le 1er août prochain.

La guerre en Ukraine dure, et les prix continuent à monter. C'est pourquoi nous entendons prendre de nouvelles mesures, avec le projet de loi sur le pouvoir d'achat dont vous serez prochainement saisis. Nous proposons notamment de prolonger les boucliers tarifaires sur l'énergie, d'augmenter les revenus du travail et de mieux partager la valeur, par exemple avec un triplement de la prime de pouvoir d'achat. Retraites et prestations sociales seront aussi revalorisées, et les travailleurs qui dépendent de leur voiture seront aidés.

M. Thierry Cozic.  - Et sur les salaires ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.  - Telles sont nos propositions pour agir globalement, pour l'ensemble des Français. Nous voulons en débattre avec le Parlement, mais nous serons attachés à ce que les mesures prises soient efficaces, responsables -  car il faut aussi préserver l'équilibre de nos comptes publics  - , cohérentes avec l'urgence climatique et équitables. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur des travées du groupe INDEP)

M. David Assouline.  - Rien sur les salaires !

M. Patrick Kanner.  - J'entends bien toutes ces mesures, qui coûtent d'ailleurs très cher -  il faudra, à un moment donné, savoir comment nous réglons notre dette  - , mais vous ne m'avez pas répondu sur l'effort demandé aux employeurs. Voilà trois ans que le ministre de l'économie demande aux patrons d'augmenter les salaires : avec quel résultat ? Quant à l'augmentation du SMIC dont vous parlez, elle est de 26 euros... Les Français ne demandent pas l'aumône : ils veulent vivre dignement de leur travail ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur de nombreuses travées du groupe CRCE)

Conséquences des intempéries sur l'agriculture

Mme Nathalie Delattre .  - Monsieur le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, je me fais la porte-parole de l'Association nationale des élus de la vigne et du vin pour vous souhaiter la bienvenue dans votre nouvelle fonction.

En juin, dix jours de grêle ont ravagé 30 000 hectares de vigne sur l'ensemble des terroirs, de la Gironde à la Lozère en passant par l'Hérault. Nos viticulteurs sont désemparés, la viticulture française sinistrée.

Nous ne savons plus comment faire face à l'accumulation des difficultés : crise diplomatique avec les États-Unis, crise sanitaire, crise climatique, crise inflationniste. Les viticulteurs ont besoin d'un soutien massif du Gouvernement.

J'ai une pensée aussi pour les sylviculteurs, élus et pompiers girondins qui se battent contre trois incendies dévastateurs. Je remercie le ministre Darmanin de se rendre sur place dans quelques heures.

À court terme, un fonds d'urgence est indispensable pour aider les viticulteurs et tous les agriculteurs dont la trésorerie a fondu sous l'effet des crises successives.

De nombreux agriculteurs ont souscrit un prêt garanti par l'État (PGE), mais ne peuvent le rembourser dans la situation actuelle. La seule solution est une prolongation générale des délais de remboursement.

Nous reconnaissons le travail du Gouvernement sur la réforme du dispositif assurantiel de gestion des aléas, inspiré par les propositions de notre collègue Henri Cabanel. Mais il restera vain si le mode de calcul des références de production ne prend pas en compte l'enchaînement récent d'aléas.

Comment comptez-vous agir pour prévenir les drames familiaux et entrepreneuriaux qui menacent ? (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Alain Richard applaudit également.)

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - À mon tour, je salue tous ceux qui se battent contre les feux de forêt en Gironde. Chacune et chacun d'entre nous doit rester vigilant : près de 90 % des incendies ont une cause humaine.

À la suite des épisodes de grêle du mois de juin, plusieurs mesures ont été prises : dégrèvement de taxe sur le foncier non bâti, report des cotisations sociales. En outre, dans le prochain projet de loi de finances rectificative, le PGE « résilience » sera prolongé.

J'ai diligenté une mission d'inspection expresse, car nous devons réfléchir à une réponse adaptée secteur par secteur ; les résultats m'en seront remis la semaine prochaine. L'État a toujours été au rendez-vous ces dernières années.

Nous voulons mettre en oeuvre le nouveau dispositif assurantiel au 1er janvier prochain. Nous travaillerons au niveau européen sur la moyenne olympique, qui peut, en effet, pénaliser certains agriculteurs. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Pierre Louault applaudit également.)

Situation aux urgences

Mme Raymonde Poncet Monge .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Faut-il confier le ministère de la santé à des médecins ? La question est légitime, au vu du risque accru d'effondrement de l'hôpital public laissé par votre confrère... Du moins à des médecins peu soucieux de défendre un service public universel de qualité.

Votre traitement d'urgence fait de nouveau la part belle au libéral, en creusant les écarts de rémunération qui dégradent l'attractivité de l'hôpital public. Votre diagnostic est incomplet et vous continuez à fermer des lits.

Vous préconisez le tri des patients à l'entrée des urgences, alors que les SAMU sont déjà débordés. Dans le 93, seuls 8 % des appels au 15 sont décrochés dans la minute...

Un psychiatre dirait que vous déplacez le symptôme au lieu de traiter la maladie. Rouvrez des lits ! C'est la 42e proposition...

Vos mesures dites d'urgence s'inscrivent-elles dans une vision des urgences réduites aux seules urgences vitales ? Ce n'est pas notre conception. L'été de tous les dangers passé, nous présenterez-vous enfin un budget à la hauteur des besoins ? (Applaudissements sur les travées du GEST, sur de nombreuses travées du groupe CRCE, et sur quelques travées du groupe SER ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention .  - Ma mission de ministre de la Santé est que chaque Français soit pris en charge de manière adéquate lorsque cela est nécessaire - ce qui, bien entendu, ne se limite pas à l'urgence vitale.

Oui, chaque Français continuera d'être pris en charge dans le cadre de l'urgence et des soins non programmés, là où ce sera le plus utile pour lui. Je n'ai en aucun cas préconisé la fermeture de services d'urgence.

Le terme de « triage » est mal utilisé. Nous, professionnels, parlons plutôt de « qualification », préalable à l'orientation vers le parcours de soins le plus adapté. Quand on a mal au genou depuis trois semaines, mieux vaut aller chez son médecin traitant ou un généraliste proche qu'aux urgences...

Plusieurs voix à droite et à gauche.  - Il n'y en a plus !

M. François Braun, ministre.  - La tension aux urgences est liée aussi à un enjeu systémique d'organisation de l'offre de soins. C'est dans cette perspective globale que nous travaillons pour transformer un système fondé sur l'offre de soins en un système fondé sur la réponse aux besoins de santé.

Vous proposez une 42mesure, mais, pour rouvrir des lits, il faut des soignants ; et pour avoir des soignants, il faut redonner sens à leurs métiers.

J'ai signé il y a trois jours une instruction aux ARS reprenant l'ensemble de ces mesures d'urgence. Il est faux de prétendre qu'elles privilégient le secteur privé. Pour la première fois, la pénibilité est reconnue, notamment celle liée au travail de nuit. Quant à la permanence des soins, nous préconisons qu'elle soit partagée entre public et privé, en fonction des spécialités.

Ma volonté est de sortir d'une logique de silos pour faire travailler tous les acteurs ensemble. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Alors que 200 000 infirmières ont quitté leur métier pour ne pas être maltraitées et maltraitantes, nous verrons si l'hémorragie continue ou non. Cet indicateur simple permettra d'apprécier vos résultats. (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe CRCE)

Canne à sucre à La Réunion

M. Jean-Louis Lagourgue .  - Les planteurs réunionnais ont obtenu gain de cause après un trop long conflit -  comme à chaque renégociation de la Convention.

La filière reste inquiète : l'industriel Tereos refuse toujours d'appliquer à La Réunion le modèle coopératif en vigueur en métropole, qui garantit une meilleure répartition des profits.

Le prix des intrants a été multiplié par trois.

La prime bagasse, de 14,50 euros par tonne de canne, n'a pas été réévaluée depuis 2015 alors que les prix du charbon ont bondi à 400 euros.

Comment allez-vous sauvegarder la filière canne, qui représente des milliers d'emplois en outre-mer ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Alain Richard applaudit également.)

M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer .  - À l'Assemblée nationale, hier, on nous accusait bien de ne rien faire. Aujourd'hui, nous avons trouvé une solution satisfaisante jusqu'en 2027. Tout le monde a fait des efforts.

Trois euros de plus pour la prime bagasse, une meilleure répartition des bénéfices, des aides aux planteurs augmentées de 14 millions d'euros ; le prix d'achat de la canne est porté à 100 euros par tonne.

Quant à Tereos, nous allons lui dicter de renforcer sa transparence.

Les cotisations sociales sont prises en charge pour 2022 et 2023 ; le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) accorde une aide exceptionnelle. Nous allons travailler sur l'autonomie alimentaire. Les premières conclusions augurent des évolutions positives. (Applaudissements sur quelques travées du groupe INDEP ; M. François Patriat applaudit également.)

Situation des maternités

Mme Catherine Deroche .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La semaine passée, je me suis rendue à la maternité Delafontaine, en Seine-Saint-Denis. Cet établissement de niveau 3 assure plus de 4 000 accouchements par an et prend en charge les grossesses à risques : sur 91 sages-femmes, il en manque 30 ; le service de néonatologie et de soins intensifs est quasiment vide ; quant à la prévention, elle est totalement laissée de côté.

Que comptez-vous faire pour que les femmes accouchent en toute sécurité ? Comment allez-vous faire revenir les sages-femmes dans les hôpitaux ? Le recrutement de sages-femmes diplômées hors Union européenne est plus complexe que celui de praticiens diplômés hors Union européenne (Padhue), alors que ce sont aussi des professions médicales. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées des groupeUC et SER)

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention .  - Oui, la crise est systémique. Notre pays a connu une réorganisation continue des maternités, depuis plusieurs années, pour répondre à la démographie médicale et à l'exigence de qualité et de sécurité des soins. Mais des inégalités persistent et nous luttons contre.

Nous agissons : huit maisons de naissance expérimentales ont été ouvertes, pour une cible de vingt ; nous allons étendre les missions des centres périnataux de proximité ; nous expérimentons des équipes mobiles de néonatalogie à domicile ; enfin, nous prenons en charge l'hébergement de proximité et les frais de transport des femmes qui accouchent loin de chez elles. (Mme Cécile Cukierman ironise.)

Quant à l'attractivité des métiers, les sages-femmes quittent l'hôpital à cause de la pénibilité de la permanence des soins, qui doit être partagée entre public et privé. (Mme Cécile Cukierman redouble d'ironie.) Les professionnels des maternités ont bénéficié de 12 millions d'euros de revalorisations dans le cadre du Ségur ; pour les sages-femmes, c'est 500 euros par mois.

Nous ouvrons des places de formation et créons une sixième année de formation de maïeutique.

Enfin, les mesures de la mission Flash s'appliquent aussi à ces professionnels. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Catherine Deroche.  - Quand on a une grossesse à risque, on ne va pas dans une maison de naissance !

Mme Cécile Cukierman.  - Exactement !

Mme Catherine Deroche.  - Le personnel est dévoué, mais débordé et épuisé. Et ma question sur les diplômes étrangers ? Nous vous donnons rendez-vous dès la rentrée pour examiner tous ces sujets, avant l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

Constitutionnalisation de l'IVG

Mme Laurence Rossignol .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Voilà six mois, le Président de la République, devant le Parlement européen, a dit son souhait d'inscrire le droit à l'IVG dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

Depuis lors, il y a eu l'effroyable décision de la Cour suprême des États-Unis, un choc brutal. Le lobby anti-IVG dispose de financements et de relais idéologiques et religieux puissants. Aucune démocratie n'est plus à l'abri, pas même la France. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Plusieurs propositions de loi ont été déposées, mais le plus simple pour réformer la Constitution serait de passer par un projet de loi. En déposerez-vous un pour constitutionnaliser le droit à l'IVG ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et du GEST ; Mme Guylène Pantel applaudit également.)

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice .  - L'histoire fourmille d'exemples de libertés fondamentales que l'on croyait acquises et qui ne l'étaient pas. Le droit à l'IVG est un droit fondamental. Personne ne peut envisager de retirer aux femmes le droit de disposer de leur corps. (Mme Cécile Cukierman en doute.)

Le Gouvernement soutiendra toutes les initiatives parlementaires, notamment celle de Mme Aurore Bergé.

L'exemple américain n'aurait pas sa place en France ? Rien n'est jamais acquis ; la liberté, la démocratie, les droits fondamentaux sont toujours fragiles. Isabelle Rome se bat pour défendre les femmes. Ne prenons aucun risque : je défendrai toute initiative pour que le droit à l'IVG devienne inaliénable. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Une voix à gauche. - C'est donc que la réponse est non...

Mme Laurence Rossignol.  - N'en prenez pas ombrage, monsieur le garde des sceaux, mais je m'adresserai à Mme la Première ministre. Vous avez dit vouloir des majorités de projet : je vous en propose une belle ! Une proposition de loi n'aboutira pas, contrairement à un projet de loi, car personne ne veut passer par le référendum. Faites-le. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et du GEST ; Mmes Guylène Pantel, Patricia Schillinger et Annick Billon applaudissent également.)

Zéro artificialisation nette (II)

M. Jean-Baptiste Blanc .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Madame la Première ministre, dans votre discours de politique générale, vous avez souligné votre respect pour le Sénat.

L'objectif du zéro artificialisation nette (ZAN) provoque une vive ébullition chez les élus. Une fois de plus, on assiste à une surmétropolisation de notre pays et à la punition de notre ruralité. Aucune ingénierie n'est proposée aux collectivités territoriales : l'État les abandonne. Et le pouvoir réglementaire revient sur la loi !

Le Sénat était contre, non l'objectif du ZAN, mais ce centralisme régional descendant et punitif. Nous avons demandé une territorialisation de l'objectif, un assouplissement du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet) et, surtout, plus de confiance envers les élus.

Allez-vous réexaminer ces décrets, afin de les rendre conformes à la position exprimée par le Parlement ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - Ma réponse à Mme Françoise Gatel vous a donné une idée de ma détermination.

Les décrets ont été publiés le 29 avril, votre rapport spécial a été remis le 29 juin : vous ne pouvez me reprocher un manque de diligence. La présidente Primas a présenté le 6 juillet dernier les 1 242 retours des élus locaux sur le ZAN.

Nous ne remettons pas en cause l'objectif du ZAN à compter de 2050, mais pouvons travailler sur les modalités d'accompagnement. Votre proposition d'une pérennisation du fonds Friches a d'ores et déjà été validée par la Première ministre. Vous évoquez aussi l'ingénierie, la mobilisation du fonds national d'aide à la pierre, un guichet unique, la définition de projets d'intérêt national...

Avançons ensemble sur ces pistes. Le cap est clair et l'ambition partagée. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP et sur plusieurs travées du groupe UC)

M. Jean-Baptiste Blanc.  - Les élus locaux ont jusqu'au 22 octobre pour répondre aux régions : il y a plus qu'urgence ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

Événements du Stade de France

M. Laurent Lafon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La finale de la Ligue des Champions a été marquée par de graves dysfonctionnements, même si le pire a été évité. Nous devons des réponses aux victimes - notamment les supporters de Liverpool -, mais aussi à tous ceux qui s'interrogent sur la capacité de la France à organiser de tels évènements, comme la Coupe du monde de rugby en 2023 et les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris en 2024.

Les commissions des lois et de la culture du Sénat ont identifié les dysfonctionnements, établi les responsabilités et fait des propositions afin d'éviter que cela ne se reproduise. Notre rapport, présenté avec François-Noël Buffet ce matin, a été adopté à l'unanimité.

Madame la Première ministre, votre parole a été rare sur le sujet ; mais elle est nécessaire. Que pensez-vous faire ? Quels enseignements tirez-vous de ces dysfonctionnements ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Nous avons pris connaissance de votre rapport ce matin ; nous en suivrons les recommandations. (Marques de satisfaction à droite)

Mme la Première ministre nous a aussi demandé d'utiliser des billets infalsifiables. En matière d'ordre public, vous suggérez de tourner l'attention de la police moins vers le hooliganisme que vers les mouvements de foule. Nous allons donc suivre vos conclusions, sauf peut-être sur la garde montée.

Vous faites un constat réel s'agissant de la délinquance. Il y a eu, ce soir-là, des dysfonctionnements, mais aussi des erreurs de préparation, dont nous devons tirer toutes les conséquences.

Une réunion à ce sujet s'est tenue avec la Première ministre il y a dix jours ; une réunion est programmée la semaine prochaine autour du Président de la République pour évoquer notamment la question de la sécurité des jeux Olympiques ; la semaine prochaine également, une réunion sera organisée avec la ministre des Sports pour mettre en place les recommandations du Sénat. Je vous invite à nous revoir à l'automne pour faire le point. (Marques d'ironie à droite)

Une voix à droite. - Quel aveu d'humilité !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Permettez-moi de souligner que depuis ces évènements, trois matchs à enjeu et avec le même nombre de spectateurs se sont bien déroulés au Stade de France. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Cécile Cukierman s'exclame.)

M. Laurent Lafon.  - Nous partageons un même objectif : que les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris se déroulent du mieux possible. Pour cela, il faut tirer tous les enseignements. Monsieur le ministre, nos propositions ne sont pas toutes identiques à celles du préfet Cadot. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains ; M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)

Financement des jeux Olympiques et Paralympiques

M. Pierre Charon .  - À deux ans des jeux Olympiques et Paralympiques, les interrogations s'accumulent. Seuls les risques financiers liés à l'inflation sont assurés. Mais les factures explosent : 173 millions d'euros au lieu de 90 pour le centre aquatique, 132 millions au lieu de 90 pour l'Arena de la porte de La Chapelle. Et les changements de sites de dernière minute ont aussi un coût !

Et que dire de la sécurité publique lors de la cérémonie d'ouverture, avec ses 160 barges flottantes abritant 205 délégations, 10 000 athlètes et des chefs d'État, face à 600 000 spectateurs massés sur six kilomètres le long de la Seine ?

Pas moins de 5 000 chantiers gangrènent la capitale. Les élus parisiens, et même Guy Drut, demandent plus de transparence. Le budget, de 6,8 milliards d'euros, est passé à presque 8 milliards. Évitons que cette grande fête populaire ne se transforme en un immense fiasco !

Le Gouvernement a-t-il pris la pleine mesure de ce dossier ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - Paris 2024 est la promesse d'une grande fête, mais la livraison de l'ensemble des infrastructures est le défi majeur et repose sur des choix, notamment financiers, de la Ville de Paris.

Sa situation financière s'est améliorée au cours des derniers mois, grâce notamment à la reprise des droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Ce serait donc de sa part une mauvaise manière de se défausser sur l'État.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - C'est rassurant !

M. Christophe Béchu, ministre.  - Nous suivons ces sujets avec beaucoup d'attention. Les discussions avec le cabinet de la ministre des sports apporteront des clarifications. Mais ne mettez pas en cause le Gouvernement pour des décisions qui relèvent de la Ville !

M. Pierre Charon.  - Vous êtes trop subtil pour ne pas avoir compris... (Rires sur les travées du groupe Les Républicains) Je dénonçais bien la mauvaise gestion de la Maire de Paris ! (Exclamations sur les travées du groupe SER ; applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Situation dans les Ehpad

Mme Michelle Meunier .  - En janvier 2022, le livre Les Fossoyeurs de Victor Castanet a provoqué une déflagration. Face aux dysfonctionnements au sein des Ehpad Orpea et à la faiblesse du contrôle par les pouvoirs publics, le Sénat a constitué une mission d'information qui a mené une cinquantaine d'auditions des dirigeants d'Orpea, du Gouvernement, des instances de contrôle, des financeurs. Son rapport a été adopté hier à l'unanimité de la commission des affaires sociales.

Le Gouvernement va-t-il prendre à bras-le-corps la question du grand âge en présentant un projet de loi ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Jean-Christophe Combe, ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées .  - Je suis très heureux d'engager devant vous, représentants des collectivités locales, un dialogue que j'espère fructueux.

Je connais l'engagement des professionnels du secteur. J'ai consacré mon premier déplacement en tant que ministre à la visite d'un Ehpad du Val-d'Oise, où j'ai annoncé un plan pour la continuité de la prise en charge cet été. Le scandale Orpea rappelle combien la qualité de l'accueil des personnes âgées dans ces établissements doit être une priorité.

Je reprendrai toutes les mesures annoncées par ma prédécesseure, Brigitte Bourguignon : les 7 500 Ehpad seront tous contrôlés d'ici deux ans grâce au renforcement des moyens des ARS ; le suivi des signalements sera mieux organisé ; les familles seront encouragées à participer à la vie des établissements ; nous aborderons aussi la question des recrutements.

Je porte une vision du bien vieillir et considère que le grand âge est une capacité plutôt qu'une incapacité. J'aurai plaisir à prendre connaissance de votre rapport. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Michelle Meunier.  - Je ne doute pas de votre intérêt pour le sujet, mais entendez l'urgence. Le statu quo n'est plus possible : il faut une loi. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du RDSE ; MM. Bernard Bonne et René-Paul Savary applaudissent également.)

Feux de forêt

M. Laurent Burgoa .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Voilà quelques jours, dans le Gard, le feu a consumé 900 hectares en moins de vingt-quatre heures. De nombreux villages -  Bordezac, Bessèges, Générac...  - ont été touchés. Les Gardois passeront l'été dans l'angoisse. Je salue les sapeurs-pompiers et les maires, grâce auxquels aucune habitation n'a été touchée.

Un feu est toujours un désastre écologique. Laissons les préfets adapter les textes à nos territoires. L'impératif de biodiversité interdit parfois le débroussaillage des abords des routes !

Nos communes rurales, très étendues, ne peuvent être laissées seules face au coût des aménagements contre l'incendie. Les feux se jouent des limites administratives. L'État doit soutenir les collectivités : allez-vous renforcer leurs moyens financiers ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Comme vous, je veux rendre hommage aux services de l'État, aux sapeurs-pompiers et aux élus locaux, hier dans le Gard et aujourd'hui en Gironde -  où je me rendrai dans quelques instants.

Cet été, en raison de la sécheresse, 5 000 hectares ont brûlé, contre 500 hectares à la même date l'an dernier. Mais sachez que le nombre moyen d'hectares brûlés baisse chaque année depuis cinq ans, grâce aux SDIS, à Météo France et aux Canadair, Dash et hélicoptères financés par l'Union européenne.

Mon collègue Christophe Béchu travaillera à résoudre l'équation que vous avez évoquée entre biodiversité et lutte contre la propagation des feux.

Marc Fesneau l'a dit : neuf feux sur dix sont d'origine humaine -  accidents ou pyromanes. Mettre le feu, c'est dix ans de prison. Il faut plus de responsabilité.

M. Laurent Burgoa.  - Certes, mais vous ne m'avez pas répondu. Les élus locaux savent s'organiser, mais il leur faut des moyens financiers supplémentaires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Compensation de la revalorisation du point d'indice

Mme Amel Gacquerre .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le 28 juin, le Gouvernement a annoncé une revalorisation du point d'indice de la fonction publique. Cela était nécessaire, mais coûtera plus de 2 milliards d'euros par an aux collectivités. Cette décision non concertée de l'État s'inscrit dans un contexte marqué par la flambée des prix et le désengagement de l'État sur les contrats aidés. S'y ajoutent la suppression des 17 milliards d'euros de CVAE et la demande de 10 milliards d'euros d'économies - alors que le déficit de l'État ne cesse de se creuser depuis 2017... La majorité des collectivités territoriales ne pourront pas faire face et c'est une casse des services publics qui s'annonce.

Soutiendrez-vous, en séance publique, l'amendement voté en commission des finances de l'Assemblée nationale pour compenser le surcoût de cette revalorisation du point d'indice pour les collectivités territoriales ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains ; Mme Michelle Meunier et M. Jean-Michel Houllegatte applaudissent également.)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - J'en ai été témoin : toutes les associations représentatives reçues par Stanislas Guerini ont dit combien il était nécessaire de revaloriser le point d'indice gelé depuis dix ans. (M. Stanislas Guerini, ministre de la transformation et de la fonction publiques, approuve.)

La Cour des comptes a souligné hier que les finances des collectivités territoriales se sont améliorées depuis cinq ans : le soutien de l'État et le plan de relance ont été efficaces.

Mme Sophie Primas.  - Le plan de relance, c'est de l'investissement !

M. Christophe Béchu, ministre.  - Il est vrai que les effets de la guerre en Ukraine et de l'inflation ne se voient pas encore dans les budgets des collectivités. Dans quelques jours, je recevrai l'ensemble des associations d'élus afin que nous ayons une vision globale pour les années à venir. Les finances des collectivités territoriales sont soutenables cette année, mais méritent d'être accompagnées dans les années qui viennent.

Mme Amel Gacquerre.  - Vous ne répondez pas : nous voulons des compensations à la hauteur des dépenses imposées.

Les collectivités territoriales ne supporteront pas de revivre la baisse des dotations de 35 % du quinquennat Hollande. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)