Réunion de la délégation pour l'Union européenne du mercredi 14 avril 2004


Élargissement


Élargissement

État de préparation des dix pays à la veille de leur adhésion
Audition de M. Pierre Mirel, directeur chargé des pays adhérents
à la direction générale Élargissement
de la Commission européenne

M. Hubert Haenel :

C'est plus qu'un observateur privilégié de l'élargissement que nous accueillons aujourd'hui en la personne de Pierre Mirel : c'est un grand témoin, un acteur même, presque un premier rôle puisque ses fonctions de directeur chargé de suivre, pour la Commission européenne, les dix pays qui vont prochainement rejoindre l'Union en ont fait un des principaux collaborateurs du commissaire Günter Verheugen pour la préparation de cet événement.

Il a étroitement participé aux négociations qui ont conduit au traité d'adhésion signé à Athènes le 16 avril 2003. C'était il y a tout juste un an, mais sa mission ne s'est pas achevée à cette date. Les rapports de suivi de novembre dernier, que le commissaire Verheugen était venu nous présenter une semaine après leur adoption, le 12 novembre dernier, ont montré - si besoin était - l'attention que la Commission porte à la réussite de l'élargissement du 1er mai prochain. Ces documents mettaient l'accent, sans alarmisme excessif, mais sans complaisance, sur des points pour lesquels certains États devaient redoubler d'efforts s'ils souhaitaient être effectivement prêts au jour de l'adhésion. Cela concernait en particulier l'agriculture, la sécurité alimentaire et la reprise de l'acquis communautaire en matière de reconnaissance mutuelle.

La Commission a ensuite poursuivi - et poursuit toujours - cet exercice de suivi. Pierre Mirel, qui s'est encore rendu dans les pays adhérents ces tout derniers jours, va donc pouvoir nous donner les plus récentes informations sur l'état de préparation des Dix. Je vous propose d'organiser notre réunion en deux temps : dans un premier temps, Pierre Mirel pourrait nous dresser un panorama de l'état de préparation des pays adhérents, en insistant sur les points qui lui semblent les plus significatifs, soit parce que d'importants progrès ont été réalisés ces derniers mois, soit au contraire parce qu'il semble que certains problèmes n'aient pas été résolus à deux semaines du jour J. Chacun d'entre nous pourra bien entendu réagir en émettant des observations ou en posant des questions à l'issue de ce premier exposé.

Puis, nous passerions au second temps de notre réunion. Il consisterait à mettre l'accent sur deux sujets qui avaient particulièrement retenu l'attention de notre délégation lorsqu'elle avait apporté sa contribution au débat sur la ratification des traités d'adhésion, à savoir la sécurité alimentaire et la libre circulation des salariés.

M. Pierre Mirel :

Depuis votre dernière audition du commissaire Verheugen, la Commission s'est engagée dans la surveillance finale - ce que nos amis belges appellent le « monitorage » - de l'adhésion en envoyant des missions sur le terrain, notamment pour le contrôle des frontières, des agences chargées du versement des aides agricoles et structurelles et des postes sanitaires. Après les consultations menées en février dernier avec les pays candidats, les contrôles se sont encore poursuivis activement.

Les pays candidats sont-ils maintenant prêts pour l'élargissement du 1er mai 2004 ?

Le domaine des quatre libertés fondamentales (liberté de circulation des personnes, des capitaux, des marchandises et des services) est celui où ces pays sont les mieux préparés. En effet, grâce aux accords d'association qui avaient pour objet la réalisation, au 1er janvier 2001, d'une zone de libre échange avec la Communauté européenne, il n'existe déjà plus de droits de douane, ni de contingentements tarifaires entre ces pays et l'Union européenne Il n'y aura ainsi pas de choc commercial au 1er mai 2004. J'ajoute que le solde des échanges de la France avec ces pays est annuellement positif de 2,2 milliards d'euros.

Pour la reconnaissance des diplômes, des difficultés subsistaient encore récemment, notamment pour les professions médicales. Mais les pays retardataires ont maintenant tous adopté les lois et les règlements nécessaires. Au surplus, on peut penser que, si des infirmières étaient recrutées en France sans l'équivalence de diplôme jugé nécessaire, elles recevraient alors la formation professionnelle complémentaire requise pour pouvoir exercer leur activité.

Certaines difficultés subsistent aussi dans le domaine de la concurrence. Les aides illégales qui ont été versées à l'industrie sidérurgique en Slovaquie devront faire l'objet d'une restitution au budget de cet État. La question est plus délicate dans le domaine bancaire, car certaines aides ont pu frauduleusement être cachées aux acquéreurs au moment des privatisations.

En matière de gestion des aides agricoles et des fonds structurels, tous les pays candidats ont mis en place les structures et les procédures requises. Mais il n'est pas certain que, en raison de la complexité des mécanismes, ces nouvelles structures soient à même de fonctionner correctement dès cette année. Dans ce cas, le risque ne concerne pas les États membres actuels, mais bien plutôt les pays candidats qui ne pourront pas bénéficier de toutes les aides auxquelles ils pourraient prétendre. Pour la politique sociale et l'emploi, les questions en suspens portent sur la sécurité sur les lieux de travail et elles ne concernent que les petites entreprises ; les pays ont ainsi négocié des périodes de transition de trois à cinq ans.

S'agissant des douanes et de la fiscalité, l'ensemble des services des pays candidats doivent être connectés au réseau douanier des États membres pour le 1er mai 2004. Les problèmes qui demeurent portent plutôt sur l'harmonisation des taux de TVA, comme en Pologne où le Parlement vient de refuser de voter l'augmentation du taux de TVA sur le commerce électronique.

Chypre et Malte avaient des difficultés pour mettre en place l'acquis en matière de transports maritimes. Mais la menace d'application d'une clause de sauvegarde les a conduits à recruter le personnel supplémentaire nécessaire pour mener les contrôles auxquels ils sont tenus. Ils disposent donc maintenant de la capacité formelle de les effectuer.

D'énormes progrès ont été réalisés par tous les pays candidats dans le domaine de la justice et des affaires intérieures, notamment en raison des fortes pressions exercées par la Commission et certains États membres pour qu'ils améliorent le recrutement et la formation des gardes frontières. En outre, le fait que la décision de lever les contrôles Schengen dépendra de l'effectivité des contrôles de leurs frontières extérieures et du bon fonctionnement de leurs systèmes informatiques connectés au Système Informatique Schengen (SIS) est une garantie pour les États membres. Enfin une « facilité Schengen » dotée de 900 millions d'euros par an doit les aider dans la mise en place de leurs équipements de sécurité.

D'une façon générale, on peut donc considérer que les pays candidats sont bien préparés pour leur adhésion au 1er mai 2004, même s'il reste encore quelques textes en cours d'examen devant leurs parlements nationaux. S'il subsiste des difficultés, celles-ci paraissent maîtrisables, d'autant que la Commission dispose de clauses de sauvegarde dans un certain nombre de domaines. Par ailleurs, l'article 38 du traité d'adhésion lui permet, pendant une période de trois ans après l'adhésion, de suspendre les effets de cette adhésion en matière de marché intérieur. Elle pourra aussi lancer des procédures d'infraction pour les aides d'État illégales. Enfin, elle pourra arrêter le versement des aides communautaires ou demander leur remboursement en cas de fraudes.

Pour autant, le test du succès de cet élargissement viendra en fait de la capacité des nouveaux États membres à appliquer l'acquis communautaire. Or, de ce point de vue, le système judiciaire a encore des progrès à faire. La création d'une « facilité de transition » entre 2004 et 2006 servira ainsi à l'envoi, dans ces pays, de praticiens des systèmes judiciaires et à la formation. Mais le test de ce succès dépendra aussi de la capacité des Quinze à répondre aux besoins de financement de ces pays entre 2007 et 2013. La tentation est grande de ne pas leur donner toute l'aide qu'ils attendent. La désillusion serait alors forte, dans leurs opinions publiques, mais aussi chez les investisseurs de nos pays, qui attendent de l'Union les moyens financiers qui permettront le rattrapage des pouvoirs d'achat et la mise à niveau des infrastructures.

M. Robert Del Picchia :

Devant l'impréparation de certains des pays candidats, ne pensez-vous pas que cet élargissement intervient trop tôt ? Par ailleurs les délocalisations se font maintenant de ces pays vers l'Est ou l'Asie et vont avoir des incidences économiques défavorables pour eux. Enfin, compte tenu des différences de PIB et des problèmes monétaires qu'ils risquent de rencontrer, quand pensez-vous qu'ils pourront intégrer la zone euro ?

M. Claude Estier :

Les évolutions générales des pays candidats ont-elles fait disparaître toutes les différences entre eux ou bien ces différences existent-elles toujours ? Par ailleurs, la nécessité, pour l'Union, d'assurer un effort budgétaire en leur faveur - comme l'a d'ailleurs demandé le commissaire Michel Barnier - est-elle compatible avec la limitation du montant du budget européen que demande la France ?

M. Xavier de Villepin :

Comment expliquez-vous les inquiétudes de la Russie devant l'élargissement actuel ? Sont-elles motivées par la question des minorités dans les États baltes ou par d'autres raisons ?

M. Marcel Deneux :

Pourriez-vous nous expliquer les mécanismes de compensations monétaires qui seront mis en oeuvre dans certaines transactions commerciales, notamment agricoles ? Qui est chargé de ce contrôle des mouvements monétaires ?

M. Maurice Blin :

Ces pays seront-ils capables de contrôler leurs frontières, et surtout ont-ils conscience que leurs capacités à contrôler ces frontières auront des effets jusqu'à l'autre bout de l'Europe ? Par ailleurs, autant leur aspiration à la prospérité est forte, autant on constate des réserves de leur part pour assurer les réformes institutionnelles indispensables au maintien de la capacité de décision de l'Europe ou pour rejoindre des coopérations renforcées. Comment expliquez-vous leur méfiance à l'égard des « grands » États et leur manque d'enthousiasme pour l'approfondissement de l'Union ?

M. Pierre Mirel :

Après une quinzaine d'années de changements dans ces pays, on peut difficilement dire que l'élargissement intervient trop tôt, alors même que, depuis le début des années 90, ces États ont mené des politiques de réforme qui avaient pour but ultime l'adhésion à l'Union européenne ? Il ne faut pas non plus négliger la lassitude des opinions de ces pays qui ont payé un large tribut au coût social de ces réformes.

S'agissant des délocalisations, seule celle de Whirlpool, qui a quitté le Pas-de-Calais pour la Slovaquie, concerne la France. En revanche, il est exact que de nouvelles délocalisations s'effectuent maintenant depuis ces pays vers l'Asie, comme par exemple Flextronic ou Philips qui s'étaient installés en Hongrie au début des années 90. Pour les meubles et le textile, les délocalisations s'effectuent plutôt vers la Roumanie et l'Ukraine.

M. Marcel Deneux :

Bientôt on va aussi constater les délocalisations de l'agro-alimentaire avec des firmes comme Danone ou Bonduelle !

M. Pierre Mirel :

À propos de l'euro, la Commission est d'une extrême prudence et on constate d'ailleurs depuis quelques mois des changements dans les discours de ces pays - par exemple la Hongrie - dans leurs perspectives d'adhésion à la zone euro. En effet, ils vont être confrontés à la fois à des demandes d'augmentation des salaires, à la réforme de leurs systèmes de santé et d'éducation, au cofinancement de leurs infrastructures et de leurs dépenses agricoles, autant de facteurs qui rendront plus difficiles le respect des conditions et des critères d'adhésion à l'Union monétaire. C'est pourquoi, même pour la Hongrie, les dates seraient plutôt maintenant 2009-2010, voire 2011-2012.

Il est exact que de grandes différences subsistent encore entre les pays candidats. Ainsi la Lituanie a effectué, en deux années seulement, des progrès spectaculaires qui lui permettent maintenant de devancer la Pologne. De même la Slovaquie, qui avait commencé tardivement ses négociations, a opéré un rattrapage rapide avec ses voisins. De ce fait, les pays qui sont maintenant les mieux préparés sont la Hongrie, la Slovénie, la Lituanie et la République tchèque et ceux qui ont le plus de difficultés sont la Pologne, la Lettonie et l'Estonie, Chypre et Malte étant à part.

Dans le domaine budgétaire, il est certain que, sans l'aide de la France et de l'Allemagne, il sera difficile de tenir les engagements qui ont été pris à l'égard de ces pays et qui devraient conduire à un budget européen de l'ordre de 1,24 % du PNB communautaire. Faute de cet effort financier, le risque serait alors grand de créer une immense désillusion dans leurs opinions.

M. Robert Del Picchia :

Chacun doit être conscient que la situation économique dans l'Union européenne des Quinze n'est plus aussi favorable qu'il y a dix ans.

M. Pierre Mirel :

Les gouvernements des pays qui vont rejoindre l'Union le savent, mais les populations ne l'ont pas toujours à l'esprit.

Un accord de partenariat et de coopération doit être signé cette semaine entre l'Union européenne et la Russie et étendu automatiquement aux dix pays candidats. La Russie est opposée à cette extension automatique et elle négocie en contrepartie des accords vétérinaires pour l'exportation de ses produits agricoles, un accès privilégié aux céréales de l'Union et une compensation financière à l'élargissement. Elle demande également un accord spécifique pour l'enclave de Kaliningrad et une intégration plus rapide des minorités russes en Estonie et en Lettonie. Une déclaration commune sur l'acier et les céréales devrait être publiée prochainement. En revanche, sur les minorités russes, l'Union en resterait à une position de soutien de principe car elle se refuse à entrer dans un débat sur le fond.

M. Robert Del Picchia :

Quel est l'accord avec la Russie pour la circulation des personnes avec Kaliningrad ?

M. Pierre Mirel :

L'accord est celui qui a été signé en 2002 et qui porte sur un transit ferroviaire entre l'enclave et la Russie.

M. Hubert Haenel :

Nous allons maintenant évoquer les deux domaines sur lesquels notre attention s'est tout particulièrement portée : la libre circulation des salariés et la sécurité alimentaire.

M. Pierre Mirel :

Concernant la circulation des travailleurs salariés, le traité prévoit une période transitoire de deux ans, à compter du 1er mai 2004, pendant laquelle les quinze États membres pourront maintenir leurs règles nationales de contrôle des travailleurs. À l'expiration de cette période de deux ans, ils auront la possibilité de prolonger à nouveau pour trois ans ce régime dérogatoire. À l'issue de ce délai total de cinq ans, ils devront prouver qu'il subsiste des risques de perturbation de leur marché du travail s'ils veulent prolonger à nouveau de deux ans la période de transition. Cette clause est identique à celle qui avait été appliquée lors de l'adhésion de l'Espagne et du Portugal et qui avait été levée à l'issue d'une période de six ans. Mais elle a entraîné un sérieux mécontentement dans l'opinion des pays candidats. Je précise que cette période transitoire ne joue pas pour Chypre et Malte.

Deux États membres, l'Irlande et le Royaume-Uni, ont indiqué dès l'origine qu'ils ouvriraient leur marché du travail dès l'adhésion des pays candidats. Mais ils ont récemment fait savoir qu'ils limiteraient les avantages sociaux dont pourraient bénéficier ces travailleurs afin d'éviter les abus. Cette annonce, qui a provoqué un nouveau mécontentement chez les pays candidats, va conduire la Commission à veiller à ce que ne s'établisse aucun régime discriminatoire à l'encontre des salariés des pays candidats car les traités ne le permettent pas. En revanche, les Pays-Bas et la Suède ont finalement décidé de ne pas respecter la promesse qu'ils avaient formulée à l'époque de ne pas recourir à la période transitoire, ce qui a créé un nouveau choc psychologique dans les pays candidats. De ce fait, treize pays sur quinze vont continuer d'exiger un permis de travail pour les travailleurs des pays candidats. En contrepartie, les travailleurs des nouveaux États membres bénéficieront d'une priorité à l'embauche par rapport aux ressortissants des États tiers.

La sécurité alimentaire pose cinq types de questions :

- les règlements phytosanitaires ;

- le contrôle de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) ;

- la collecte des animaux morts et l'équarrissage ;

- la mise à niveau des abattoirs et des laiteries ;

- le fonctionnement des postes d'inspections frontaliers.

Pour ces cinq domaines, l'acquis communautaire est maintenant entièrement transposé par les pays candidats. Mais la Commission restera vigilante grâce à des missions d'inspections sur place. Trois pays, la Pologne, la Lettonie et la Slovénie, auront sans doute des difficultés pour mettre en oeuvre ces mesures avant le 1er mai prochain. Les postes d'inspection qui ne seront pas aux normes ne pourront pas procéder aux contrôles. S'agissant de l'ESB, en revanche, la Pologne a organisé depuis longtemps les contrôles souhaités. Mais Chypre et les États baltes ne sont pas encore en règle. Pour l'équarrissage, la Lettonie, Chypre et Malte ne disposent pas encore d'incinérateurs.

Pour les abattoirs et les laiteries, trois listes ont été établies : celle des établissements autorisés, celle des établissements qui ne sont pas aux normes et qui devront être fermés, enfin celle des établissements qui disposent d'un délai pour réaliser les investissements nécessaires. Seuls les établissements de la première catégorie pourront effectuer les contrôles des produits destinés à l'exportation. Les produits contrôlés par les établissements de la troisième catégorie ne pourront être mis en vente que sur le marché local. La liste de ces établissements s'est d'ailleurs allongée ces derniers temps, notamment en raison des conséquences sociales qu'auraient les fermetures d'établissement, ainsi qu'en raison de la sous-estimation des investissements nécessaires pour la mise aux normes des installations.

Les pays candidats ont été informés du fait que, en cas de fraude, c'est le pays tout entier qui serait sanctionné par une interdiction générale d'exportation de ses produits. La Commission n'exclut pas de prendre de telles clauses de sauvegarde générale après le 1er mai si les consultations actuellement en cours n'aboutissent pas à des mesures satisfaisantes dans le domaine sanitaire et phytosanitaire.

M. Robert Del Picchia :

Quels sont les moyens dont disposent l'Union européenne pour assurer ces contrôles ? J'avais cru comprendre, par exemple, qu'en matière de surveillance des frontières extérieures, elle ne disposait que d'une trentaine de fonctionnaires. Par ailleurs le dispositif sur la circulation des travailleurs ressortissants des pays candidats signifie-t-il qu'un chef d'entreprise en France devra prioritairement embaucher des travailleurs d'Europe centrale au détriment de travailleurs marocains ou maliens ?

M. Maurice Blin :

Je reviens sur la question que j'ai posée tout à l'heure. Comment expliquez-vous la méfiance et la réserve des pays candidats à l'égard de l'Union, de son fonctionnement et de certaines de ses règles ?

M. Jean Bizet :

Je suis un peu sceptique sur la capacité de ces pays à respecter les normes sanitaires et le niveau d'exigence que les Quinze se sont imposés, compte tenu du coût de ces mesures pour les filières concernées. Je crains surtout que les effets induits d'éventuels manquements ne soient très difficiles à corriger après le 1er mai 2004.

M. Marcel Deneux :

J'émets également des réserves sur la qualité des contrôles vétérinaires qui seront effectués dans ces pays. Les normes sanitaires, par exemple pour le transports des animaux vivants, sont très difficiles à respecter et exigent, tant en termes de procédures que de produits à utiliser, de réelles compétences dans les filières concernées.

M. Pierre Mirel :

Les pays candidats répondent que l'ESB n'est pas venue de chez eux et que les scandales vétérinaires sont nombreux dans les actuels États membres. Il est vrai que l'Office vétérinaire de Dublin ne dispose pas d'effectifs importants. Mais c'est précisément pour remédier à ce problème que la Commission a recours aux vétérinaires des États membres pour effectuer les missions d'inspection dans les pays candidats et aux jumelages entre États membres et pays candidats. Quant aux détournements des aides qui ont pu avoir lieu dans le cadre du programme SAPARD ou avec des prêts de la Banque européenne d'investissement (BEI), ce sont les pays candidats eux-mêmes qui les ont découverts et dénoncés.

S'agissant de la méfiance qu'ont ces pays pour le fonctionnement de l'Union, elle s'explique - surtout dans les États baltes - par le fait que ces pays ont retrouvé une réelle indépendance à laquelle ils tiennent beaucoup. Malheureusement la question de l'application de l'acquis vétérinaire, notamment en Estonie, est intervenue au moment où se développait la crise de l'ESB au Royaume-Uni. Mais c'est en Pologne que le débat est actuellement le plus tendu.

Enfin les dispositions relatives à la circulation des travailleurs salariés conduisent bien à privilégier l'embauche des ressortissants des nouveaux pays adhérents par rapport à celle des ressortissants de pays tiers car, dès le 1er mai 2004, ces dix pays sont des États membres de l'Union.